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Tag: Inde
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III. NOTRE PROGRAMME
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"Le PSL – LSP, un parti pour changer de société"
– Préface
– II. Perspectives, tâches et objectifs
– IV. Notre fonctionnement interne
Cette brochure peut être commandée via redaction@socialisme.be et revient à 3 euros (que vous pouvez verser sur le n° de compte 001-2260393-78 du PSL/LSP avec la mention "brochure PSL").
[/box]Idéologie
Beaucoup de gens disent qu’ils n’adhèrent à aucune idéologie particulière, il est même devenu assez «tendance» de se dire pragmatique. Depuis la chute du stalinisme, à la fin des années ’80 – début des années ’90, la classe dominante et ses collaborateurs intellectuels ont déclaré avec grand fracas que le débat idéologique avait pris fin. Seul le marché «libre» était dorénavant considéré comme étant efficace. Pour reprendre la célèbre expression du philosophe Francis Fukuyama (qui a très peu fait parlé de lui par la suite) la «fin de l’histoire» a été explicitement proclamée.
La raison pour laquelle peu de gens parlent encore de cette prétendue «fin de l’histoire» n’est pas compliquée à trouver: les contradictions de classes n’ont fait que s’accroître durant les années 1990 et 2000 et le clivage entre riches et pauvres est aujourd’hui gigantesque. De plus en plus de travailleurs et de jeunes se retrouvent sur le côté. Cette situation conduit inévitablement à de nouveaux questionnements ainsi qu’à la recherche d’une réponse générale contre le capitalisme ; autrement dit : une autre idéologie, capable de mieux expliquer les développements sociaux que l’ancienne.
A travers l’histoire, les classes dirigeantes ont toujours essayé de présenter leurs idées comme «naturelles», «éternelles», et «normales». La bourgeoisie n’agit pas différemment au travers de ses partis, de son enseignement, de ses médias et de ses intellectuels. Attardons nous sur quelques clichés de la vision capitaliste :
– «La société n’est pas constituée de différentes classes économiques, mais bien d’individus indépendants.»
Cela est totalement faux. Il existe une classe dirigeante qui dispose de la propriété privée des machines, des ressources, etc. Cette propriété privée des moyens de production entraîne inévitablement l’exploitation de la majorité de la population et une compétition mortelle, contrairement à ce que permettrait une économie démocratiquement planifiée. Il y a donc bien des groupes aux intérêts divergents et irréconciliables dans la société capitaliste. Un tel système contradictoire conduit immanquablement à des crises de surproduction.
– «Les restructurations et les licenciements sont déplorables, mais sont un phénomène temporaire, et nécessaire à la viabilité de l’économie.»
Tout aussi faux. Le chômage a, en Belgique, augmenté de 70.753 personnes au début des années ’70 à plus d’un demi-million de personnes qui dépendent de l’ONEM aujourd’hui. Le licenciement des travailleurs est seulement «nécessaire» afin de garantir les profits des patrons et PAS pour maintenir une économie saine. Les profits d’une petite élite priment sur tout le reste.
– «Celui qui est sans emploi l’est uniquement par sa propre faute. C’est un problème personnel, pas social.»
Une fois de plus, c’est un mensonge. Le chômage structurel – alors que tant de besoins ne sont pas satisfaits dans la société (garderies à bon marché, facilités de loisir, enseignement de qualité,…) – est une maladie liée à la crise de surproduction capitaliste.
Les frais salariaux sont seulement une excuse pour des capitalistes à la mémoire courte. Dans les années ’50 et surtout ’60, un système de sécurité sociale a été construit, et les salaires réels sont montés de manière significative. Mais ce processus a pris place dans une période de forte croissance capitaliste. Depuis la politique néolibérale, au début des années ’80, nos salaires directs et indirects (pensions, allocations, etc.) ont fortement diminué en termes de pouvoir d’achat. Cela n’empêche pas les patrons de systématiquement parler du coût salarial comme d’un facteur «destructif pour l’emploi». La seule chose destructive pour l’emploi est pourtant le système capitaliste qu’ils défendent.
– «L’idée de redistribuer les richesses est le reflet d’une jalousie vis-à-vis de ceux qui ont réussi dans la vie. La position de quelqu’un dans la société correspond à ses efforts et à ses talents.»
Faux. La redistribution des richesses signifie de réclamer aux grands actionnaires le travail non-payé, grands actionnaires dont l’activité ne consiste d’ailleurs qu’à s’asseoir sur leurs culs de fainéants, à remplir des coupons et à les commercialiser. Etre riche aujourd’hui signifie avant tout être né dans une «bonne famille». Les efforts et les talents de la majorité des travailleurs sont constamment niés par le capitalisme. Par la routine robotique, le manque de contrôle et de démocratie, ces talents sont à peine utilisés.
– «Le socialisme ne correspond pas à la nature humaine, car la majorité des gens est égoïste.»
Encore une autre désinformation. Dans la nature humaine, on peut indubitablement constater des éléments d’altruisme, par exemple dans la relation des parents envers leurs enfants. Mais la lutte pour le socialisme ne se base pas sur l’idée que nous devrons faire «plus avec moins». Bien en contraire. C’est dans la lutte pour les intérêts matériels de la majorité de la population que se trouve le fondement même des mouvements de lutte à venir.
– «La révolution, c’est un coup d’Etat chaotique réalisé par une petite minorité, comme cela a été le cas en Russie en octobre 1917.»
C’est quelque chose que l’on entend également très souvent, mais là encore, c’est très loin de correspondre à la réalité. Les révolutions ont lieu seulement quand les masses ne veulent plus vivre de l’ancienne manière : quand les masses laborieuses arrivent sur la scène de l’histoire. Nous parlons d’une intervention consciente et organisée des masses pour prendre la gestion de la société entre leurs mains. La révolution de 1917 était portée par la majorité des travailleurs et des paysans pauvres, organisée dans des conseils (soviets) démocratiquement élus.
– «Une économie planifiée n’est pas réaliste. Qui voudrait encore travailler?»
Cette idée rejoint la thèse sur la nature humaine «égoïste». La satisfaction du travail pour les masses trouvera sa source dans le fait qu’elles contrôleront elles-mêmes les produits de leur travail, et ce d’une manière démocratique. Ce sera un stimulant économique et social énorme. Les conditions de vie pourraient de nouveau augmenter sur toute la planète, avec des possibilités gigantesques pour les nouvelles technologies et les sciences, tout en tenant compte de l’environnement. C’est seulement sur base d’une économie démocratiquement planifiée que l’on pourra réellement respecter l’environnement, nécessité vitale pour chacun.
Ce sera l’intérêt commun et non le profit d’une petite élite qui sera mis en avant par des discussions dans les conseils ou comités de travailleurs. La technologie, qui actuellement conduit à plus de chômage au fur et à mesure des progrès en entraînant des crises de surproduction, pourrait sous une économie planifiée élargir le temps libre, la liberté humaine et la connaissance de ce que la planète a à nous apporter de façon considérable.
On pourrait encore aborder beaucoup d’autres questions. Est-ce que les travailleurs d’aujourd’hui sont encore exploités, comme au 19e siècle ? La majorité d’entre nous n’est-elle pas devenue heureuse grâce au capitalisme, à l’exception de quelques problèmes provisoires et marginaux ? En fait, la machine de propagande bourgeoise tourne tellement bien que certaines finissent pas la croire, malgré des statistiques qui prouvent le contraire.
Il en va ainsi du «Quart-Monde», que beaucoup de gens considèrent comme ayant toujours existé, et destiné à disparaître à terme. En réalité, la notion de «Quart-Monde» est née dans les années ’80 suite aux économies opérées dans les services sociaux. Depuis quelques années, même ceux qui ont un emploi ne sont plus certain d’échapper à la pauvreté.
En fait, les idées capitalistes sont quotidiennement diffusées par des milliers de canaux tandis que la réponse socialiste à ce flot de propagande ne dispose bien évidemment que de peu de moyens. Ainsi, quand la presse bourgeoise parle des grèves, elle parle essentiellement de la nuisance de celles-ci. Pourquoi n’entend-t-on jamais dire de leur part que sans les grèves, les grèves générales et les manifestations de travailleurs, nous n’aurions jamais eu le droit de vote ou la sécurité sociale? Ce n’est pas un fait objectif peut-être? Ou est-ce simplement parce que cela déplaît à l’idéologie dominante, celle de la classe dominante et de ceux qui servent ses intérêts?
Et d’ailleurs, est-ce qu’il existe encore des idéologies? On prétend aujourd’hui facilement qu’au 19e siècle, à l’époque de Marx, il y avait encore de grandes contradictions de classes, mais que celles-ci ont entre-temps disparu. La raison avancée pour étayer cette thèse est que la classe ouvrière de l’époque de Marx n’existe plus aujourd’hui. C’est un argument auxquelles nos oreilles auraient à force presque tendance à s’habituer, alors qu’il n’y a pas la moindre parcelle de vérité là-dedans.
Au 19e siècle, la classe ouvrière était une petite minorité largement désorganisée. Politiquement, elle était proche du parti Libéral, et on ne parlait même pas encore d’un parti ouvrier (de tels partis sont nés seulement vers la fin du 19e siècle). Une des tâches les plus importantes de Marx a consisté à donner une idéologie propre et globale à la classe ouvrière ainsi qu’à créer des organisations ouvrières indépendantes de la bourgeoisie. Marx parlait de transformer la classe ouvrière d’une classe «en soi» (qui existe) en une classe «pour soi» (conscience de son existence en tant que classe aux intérêts communs).
Aujourd’hui, la classe ouvrière constitue la majorité de la population. Elle est bien éduquée, organisée dans des syndicats, possède un certaine degré d’indépendance politique et, depuis le 19e siècle, elle a obtenu le droit de vote, la liberté de la presse, le droit de grève, etc. Il est normal que la bourgeoisie essaie de s’en prendre à ces droits. Les patrons font bien entendu tout pour miner et diviser cette force potentielle en scissionnant des entreprises (la scission de Bayer à Anvers en Bayer et Lanxess, par exemple) ou à l’aide de la sous-traitance.
C’est dans ce cadre qu’il faut replacer les attaques contre le droit de grève. Les patrons veulent limiter le pouvoir potentiel des travailleurs, avant que ce pouvoir ne se manifeste de manière trop évidente. En France, Sarkozy a fait voter une loi qui oblige les grévistes, dans le secteur des transports publics, à annoncer préalablement une grève à la direction. Ils veulent ainsi pouvoir anticiper les effets de la grève et soumettre les travailleurs à l’intimidation. Les politiciens et les patrons rêvent d’élargir cet exemple à d’autres secteurs.
En Belgique, comme en France, la discussion sur le «service minimum» est lancée. A quoi sert une grève, si des remplaçants sont sur place? Les directions syndicales nationales de la CSC et de la FGTB n’ont pourtant pas émis de forte résistance contre une telle idée. Dans certains cas, ils ont même aidé la droite dans ses réflexions sur le sujet, tant leur peur des actions spontanées et des mouvements généralisés est profonde. Comme Trotsky l’a déclaré il y a quelques décennies, si les dirigeants syndicaux ne rejettent pas le système, alors ils s’y incorporent de plus en plus.
Les dirigeants syndicaux ne portent pas juste une «petite» part de responsabilité sur leurs épaules dans l’absence de perspectives de toute une génération et d’une jeunesse immigrée abandonnée par le capitalisme. Aujourd’hui, dans beaucoup de villes européennes, on assiste à l’émergence de ghettos auxquels aucun politicien bourgeois ne s’intéresse. L’aliénation que ceci peut amener, nous avons pu la voir à l’œuvre dans les explosions violentes des banlieues françaises en 2005. Des voitures et des entreprises ont été incendiées. Des attaques ont été commises contre des bus dans lesquels se trouvaient des travailleurs ordinaires victimes de la politique néolibérale au même titre que les jeunes. On a pu voir également les attaques de la part de jeunes immigrés contre leurs compagnons d’âge pendant les manifestations et les grèves contre le CPE (Contrat Première Embauche), tout cela parce qu’ils faisaient selon les jeunes des banlieues partie des «riches». Ces exemples sont tous des signes d’une société malade. De nouveaux partis des travailleurs doivent, avec l’aide des syndicats, défendre toutes les couches de la population, même les plus opprimées. Ne pas le faire ouvre la porte aux islamistes radicaux, et, parmi la jeunesse blanche, à l’extrême-droite.
Il y a encore de grands débats idéologiques en vue. Ni la classe ouvrière, ni l’exploitation n’ont disparu et, en conséquence, pas non plus la nécessité d’un fondement idéologique. Ce qui a disparu, c’est les idéologies réformistes des sociaux-démocrates, ainsi que des dirigeants staliniens.
Ces derniers, après la chute des régimes staliniens, ont couru à toute vitesse vers le camp du marché libre, parfois avec quelques «corrections sociales» mais sans le plus souvent. A tel point que l’ancien premier ministre britannique Tony Blair prétend maintenant que le Parti Travailliste n’aurait jamais dû rompre avec les libéraux! En fait, ce que Blair demandait en disant cela, c’était un retour à la période qui a précédé Marx.
C’est assez logique pour quelqu’un qui a intérêt à ce que l’idéologie capitaliste reste la seule en course, ce qui concrètement signifie que tout doit rester comme avant. «Pas d’idéologie» ou le «pragmatisme» néolibéral, ce ne sont rien d’autre que des formes revêtues par l’idéologie bourgeoise qui a entre autres conduit aux libéralisations, aux privatisations, à la chute du pouvoir d’achat et à une flexibilité croissante.
Le fait que la discussion sur le «socialisme du 21e siècle» ait été lancée au Vénézuela et en Amérique Latine n’arrive pas au bon moment pour la classe capitaliste. Pour nous, ce n’est que le début du type de discussions qui vont gagner en intensité dans les années à venir, en Europe et dans les pays développés également. Très certainement dans le cadre de cette crise économique qui risque d’être la plus importante jamais connue et si la tendance à la formation de nouveaux partis des travailleurs se confirme.
Chavez a mené une série de mesures positives pour la population pauvre en partie grâce au prix élevé du pétrole, dont le Vénézuela regorge. Nous soutenons bien entendu ces mesures (supermarchés spéciaux pour les pauvres, campagnes d’alphabétisation, meilleurs soins de santé avec l’aide de médecins cubains,…). Mais, malheureusement, Chavez n’est pas clair sur la nécessité d’opérer une véritable rupture avec le capitalisme. Il n’y a pas encore autant de nationalisations qu’il y en a eu au Nicaragua dans les années ’80, où d’ailleurs le processus révolutionnaire avait été renversé. Suite à la crise économique, au fur et à mesure de la baisse des revenus pétroliers, cela va fortement limiter l’espace dont dispose Chavez pour l’application de mesures sociales et le soutien pour le régime pourrait en sortir considérablement miné. De plus, le développement d’organes de classe indépendants (comités de lutte élus, partis, etc.) est freiné par l’approche «de haut en bas» du régime.
Les références de Chavez au socialisme reflètent une pression de la base. Elles expriment la volonté des masses d’abandonner la misère du capitalisme pour construire un nouvelle société.
IDEOLOGIE ET PROGRAMME
Le mot «programme» est souvent compris comme «cahier de revendications». Mais un programme, c’est bien plus que cela. Le cahier de revendications n’est que la pointe de l’iceberg, autrement dit l’application concrète d’un programme sous certaines conditions.
Par exemple, il est possible que l’on soit complètement d’accord avec le cahier de revendications du MR aujourd’hui, sans nécessairement souscrire à tout le parcours historique de ce parti, aux différentes réponses que les libéraux ont offert à travers l’histoire. Pour être un vrai libéral, il ne faut pas seulement souscrire à leur cahier de revendications actuel, mais aussi à la manière avec laquelle ils sont arrivés à cela.
En d’autres termes, un programme signifie: un cadre idéologique consistant et historiquement construit, une analyse de la situation actuelle, une orientation générale, une stratégie et une tactique. Sans cela, on peut être d’accord avec le MR aujourd’hui mais être complètement en désaccord avec eux demain, lorsque les conditions auront changé. A l’inverse, il est possible d’être d’accord avec le populiste de droite Jean-Marie Dedecker sur un cadre historique libéral, mais avec un autre cahier de revendications.
Dans un parti qui souscrit à l’idéologie dominante, l’idéologie bourgeoise, cela ne joue pas un rôle tellement important. Par contre, lors d’une révolution ou de grands mouvements de lutte, ces différences peuvent comporter des conséquences catastrophiques.
C’est pour ça qu’un programme, au sens marxiste du terme, ne peut pas se limiter à un simple cahier de revendications. Le Manifeste du Parti Communiste, écrit par Marx et Engels comme proposition de programme pour la «Ligue des Communistes», était en premier lieu une analyse historique du développement du capitalisme, une perspective sur son futur développement, une orientation générale vers le mouvement ouvrier, et enfin une discussion sur la stratégie et la tactique à adopter vis-à-vis d’autres courants socialistes. Une page seulement sur les 80 à 100 pages du Manifeste (en fonction de l’édition), contient un cahier de revendications en 10 points.
Les thèses d’Avril de Lénine, le document programmatique des Bolcheviks pour la révolution d’Octobre ‘17, ou encore le programme de transition élaboré par Trotsky en 1938 nous donnent la même image. Autrement dit : on n’est pas pour autant marxiste parce qu’on est d’accord avec une ou même toutes les revendications du cahier de revendications. On le devient réellement sur base d’une analyse historique et actuelle de l’évolution de la lutte des classes et des grandes tâches générales qui en découlent.
Le PSL/LSP et le Comité pour une Internationale Ouvrière basent leur programme sur l’œuvre de Marx, Engels, Lénine et Trotsky; sur les textes des quatre premiers Congrès de la Troisième Internationale, sur le Congrès fondateur de la Quatrième Internationale et sur les textes du CIO (créé en 1974) et de ses pionniers depuis la Deuxième Guerre Mondiale. Cela n’est pas rien et cela ne signifie pas non plus que nous sommes d’accord avec ces textes à la virgule près. Nous utilisons ces documents comme référence, comme méthode d’analyse et comme fil rouge pour nos orientations et tâches pratiques.
LE PROGRAMME DE TRANSITION
Naturellement, nous comprenons que tous les travailleurs et les jeunes ne souscrivent pas à 100% de notre programme. C’est pour cela que Trotsky a développé la notion de programme de transition. Par «programme de transition», il entendait un programme qui part de ce qui est nécessaire pour les travailleurs et leurs familles à un moment précis et qui met en avant la transition socialiste de la société.
Trotsky affirmait qu’il ne sert à rien d’élaborer un programme ou des revendications pour une gestion «plus humaine» du capitalisme, mais qu’il faut cependant offrir des solutions qui partent des besoins des travailleurs et de leurs familles. Trotsky a argumenté que le capitalisme ne sera jamais capable de satisfaire ces besoins, que seule une société socialiste pourrait offrir une solution durable.
En fait, il n’a rien fait d’autre que d’exprimer sous une forme plus claire un concept que Marx avait déjà élaboré dans le Manifeste du Parti Communiste et Lénine dans ses Thèses d’Avril. Lénine utilisait le slogan «Terre, pain et paix» pour arriver à la conclusion que le gouvernement transitoire qui a succédé au tsarisme après la révolution de février 1917 ne pourrait jamais satisfaire ces revendications pourtant primordiales. A travers cela, il est arrivé au slogan «Tout le pouvoir aux soviets».
De même, le PSL/LSP parle aujourd’hui de la «nécessité que la production soit basée sur les besoins de la population et pas sur les profits d’un petit groupe de capitalistes» pour arriver à la conclusion que cela n’est possible que par un changement socialiste de la société.
Le programme du PSL/LSP exprimé ci-dessous n’est rien d’autre qu’une application actuelle de ce programme de transition. Il doit être lu en prenant en considération les remarques ci-dessus à propos de l’idéologie et du programme.
LE PROGRAMME DE TRANSITION AUJOURD’HUI
La classe ouvrière est soumise à un recul perpétuel sous le capitalisme. La «cathédrale» de la sécurité sociale et d’autres acquis sont sous attaque depuis des décennies par le patronat et leurs politiciens. Ce n’est pas un processus économique inévitable. Le passé nous apprend que lorsque les travailleurs s’organisent dans des syndicats et des partis, la situation peut se retourner.
D’une lutte défensive visant à défendre nos intérêts par entreprise ou par secteur, nous devons reprendre tous ensemble l’offensive et réclamer la richesse que nous avons créée : pour créer des emplois décents, bien payés et stables; pour augmenter les allocations ainsi que les retraites et disposer d’un pouvoir d’achat digne de ce nom; pour initier un programme de construction massif de logements sociaux et plafonner les prix des habitations; pour renationaliser, sous le contrôle démocratique de la population, les services privatisés et libéralisés ; pour refinancer l’enseignement; pour organiser collectivement les tâches ménagères qui actuellement pèsent toujours sur les épaules des femmes ;… En bref, pour mettre réellement en avant les besoins de la majorité, au lieu de la soif de profit d’une minorité de grands actionnaires et de patrons.
Tous ensemble, jeunes et vieux; Flamands, Wallons ou Bruxellois; Belges ou immigrés; hommes et femmes;… nous sommes plus forts !
1. La technologie : un ami ou un ennemi ?
Cette situation est navrante lorsque l’on considère que les possibilités n’ont jamais été aussi grandes qu’aujourd’hui.
Un vol jusqu’en Amérique dure à peine 5 heures. Grâce aux ordinateurs, le boulot de centaines de milliers d’employés et de travailleurs peut être réalisé avec beaucoup moins de personnes. Internet, les e-mails et les GSM rendent la communication plus facile pour ceux qui y ont accès et créent pour beaucoup de jeunes et de travailleurs le sentiment d’appartenir à une communauté internationale. La médecine peut résoudre des problèmes dont nous ne pouvions que rêver auparavant. Mais, malgré toutes ces avancées, la chasse au profit joue un rôle extrêmement désastreux.
Les fonds gouvernementaux pour la recherche scientifique sont drastiquement réduits. Seule la recherche servant directement les intérêts des entreprises et leur fournissant des bénéfices est encore subventionnée. Et quand les entreprises prétendent vouloir financer la recherche, ils la déduisent en réalité de leurs impôts.
Les seuls qui en profitent sont les patrons. Les centres de recherches perdent ainsi leur indépendance. De plus, cela entraîne une concurrence entre les différents centres pour tenter d’obtenir des fonds. Les scientifiques sont isolés ; ils ne peuvent pas se concerter ni échanger des expériences, ce qui entraîne un gaspillage énorme d’énergie, de temps et d’argent.
Et même si l’on fait de la recherche utile, et que l’on arrive à trouver des solutions – pensons aux différents traitements des problèmes cardio-vasculaires – les traitements sont pour beaucoup de gens inaccessibles à cause de leur coût.
Pendant ce temps-là, les problèmes pour lesquels il faut urgemment trouver une solution continuent de s’empiler. Pensons au SIDA, aux catastrophes naturelles qui coûtent la vie à des millions de gens, aux traitements des cancers, à la production des déchets et à la pollution, à la famine dans de larges parties du monde,… Prenons plus particulièrement la famine. Un raisonnement logique serait: il y a une grave pénurie de nourriture, il faut donc produire plus. Et pourtant, les usines tournent au ralenti en craignant la surproduction, alors qu’une énorme quantité de nourriture est détruite tout simplement pour garder les prix à un certain niveau.
L’écrasante majorité des scientifiques sont d’accord pour affirmer que le réchauffement de la planète aura des conséquences désastreuses pour de larges parties du globe si on ne commence pas à y remédier maintenant. Selon des centaines d’experts présents lors du sommet sur le climat à Bruxelles (en avril 2007) l’Antarctique, l’Afrique Subsaharienne, les îlots et les grands deltas asiatiques sont les régions qui souffriraient le plus du réchauffement de la planète. On parle d’inondations, de tempêtes et de glissements de terrain qui se produiront plus fréquemment. Les franges les plus pauvres de la population mondiale seront les plus touchées par ces catastrophes naturelles. Mais l’existence d’une quantité inquiétante d’espèces de la faune et de la flore est également menacée, entre autres, par le réchauffement de la planète.
Une économie planifié à l’échelle mondiale et sous le contrôle démocratique de la population permettrait de prendre des mesures immédiates pour réduire «l’empreinte écologique» de l’Homme, notamment par un usage massif de transports publics gratuits mais également par des investissements massifs dans la recherche de sources d’énergie alternatives. Il est difficile de se rendre actuellement compte du potentiel de ces alternatives, du fait que l’industrie pétrolière et automobile leur mettent souvent des bâtons dans les roues.
La question-clé est qu’aujourd’hui, la science et la technologie sont aux mains et au service des multinationales. Ainsi, les différents gouvernements bourgeois ne peuvent pas prendre les mesures qui s’imposent, ou alors uniquement de façon ambiguë quand il est déjà trop tard. Leur politique est destinée à satisfaire la soif de profit, et pas à satisfaire les besoins de l’Homme et de son environnement. Nous devons exiger le contrôle démocratique de la science, au nom des scientifiques et de la population mondiale.
Aussi longtemps que les banques, les multinationales,… disposent du monopole de toutes les solutions possibles, nous sommes totalement impuissants. Ce n’est pas le développement de la science et de la technologie qui est en soi désavantageux, mais bien leur contrôle par les groupes mentionnés ci-dessus. Au service de la population, la technique et la science pourraient sauver et améliorer la vie de millions de personnes.
2. Pour des emplois décents, stables et bien payés.
- RETABLISSEMENT DE NOTRE POUVOIR D’ACHAT!
- STOP A LA FLEXIBILISATION!
- REDUCTION DE LA CHARGE DE TRAVAIL PAR LA REDISTRIBUTION DU TRAVAIL DISPONIBLE!
- 32 HEURES PAR SEMAINE SANS PERTE DE SALAIRE ET AVEC EMBAUCHES COMPENSATOIRES!
Les paroles du gouvernement contrastent de façon criante avec ses actes. Dans de larges parties de Bruxelles et de Wallonie, il y un chômage massif et structurel. En juin 2007, le chômage dans la région Wallonne était de 14,4% (allocataires au chômage complet et élèves ayant quitté le système scolaire). Presque la moitié de cette catégorie était au chômage depuis plus de 2 ans. Dans la région Bruxelloise, à la même période, le nombre de chômeurs était de 19,9%. Des générations entières sont exclues par l’économie de marché !
En Flandre, certains essaient de donner l’impression que le chômage a baissé considérablement dans le courant de 2006-2007 et qu’il y a même une pénurie dans certains métiers. Beaucoup de ces métiers sont flexibles (nettoyage, construction) et ne sont pas toujours rémunérés convenablement pour les efforts supplémentaires demandés. Que veulent les patrons? Des travailleurs prêts à se faire exploiter pour une bouchée de pain? La soi-disant pénurie est utilisée pour importer, de façon sélective, des travailleurs bon marchés en Belgique. Des travailleurs qui disposent de moins ou, dans le cas des sans-papiers ou des travailleurs au noir, d’aucun droits sociaux du tout. Le PSL/LSP défend les droits égaux pour tous les travailleurs. Ce n’est que de cette façon que l’on pourra combattre la pression sur les salaires et la politique de diviser pour régner appliquée par le patronat. Tout ce qui nous divise nous affaiblit!
Au niveau national, plus d’un million de personnes sont totalement ou partiellement dépendantes d’une allocation de chômage. Ce niveau est un record historique. Au début des années ’70, le taux de chômage officiel tournait autour des 70.000-80.000. En 1995, on comptait déjà 505.944 chômeurs : une croissance de 1,9% à 12,3% de la population active !
Depuis la moitié des années ’80, les chômeurs les plus âgés (de + de 50 ans) ne sont plus comptabilisés dans les statistiques. C’était déjà le cas pour les prépensionnés, et depuis 1986, pour ceux qui sont en pause carrière. Aujourd’hui, tous ces groupes constituent ensemble plusieurs centaines de milliers de personnes, qui reçoivent une allocation de l’ONEM mais ne sont pas comptées dans les statistiques.
Le chômage partiel et temporaire – pour ceux qui ont signé un contrat de travail mais qui, pour des raisons particulières, ne peuvent pas travailler – n’est pas non plus repris dans les statistiques. C’est également le cas pour les gens qui sont «activés», pour qui on utilise l’allocation de chômage comme une subvention salariale! Les patrons sont ravis! Depuis juillet 2004, les chômeurs entre 50 et 58 ans sont réinscrits comme demandeurs d’emploi à cause de la politique «d’activation» des chômeurs, sauf s’ils peuvent prouver au gouvernement que leur carrière a été suffisamment longue. Le gouvernement force les travailleurs à travailler plus longtemps à travers le Pacte des générations. Mais lorsqu’ils sont licenciés sur le tard, la réalité nous montre que peu d’employeurs acceptent de leur offrir une seconde chance!
En septembre 2007, le chômage officiel en Flandre était de 6,43% (selon le VDAB). Il faut tenir compte qu’il y a plus de gens en pause carrière et de prépensionnés en Flandre qu’en Wallonie ou à Bruxelles. En outre, la politique d’activation et de suspension commence à «payer»: c’est-à-dire que des dizaines de milliers de personnes ont perdu leur allocation de chômage ces dernières années.
A Ostende, suivant le modèle de «l’activation», les jeunes sont massivement soumis à des sessions intensives pour la recherche d’un emploi, afin de leur apprendre à solliciter collectivement. Il ne s’agit même pas de formations professionnelles, et il n’y a aucune garantie d’avoir un emploi à la fin du parcours. De cette façon, les statistiques du chômage peuvent être embellies. D’autre part, le système incertain et extrêmement flexible des chèques-services connaît un succès grandissant. En juillet 2007, 4,38 millions de chèques ont été utilisés. Le système s’est rapidement répandu, surtout en Flandre (66,2% pendant la première moitié de 2007). A Bruxelles (5,9%) et Wallonie (27,8%), c’est moins le cas.
L’introduction d’emplois à 10, 20 ou 30% permet de beaucoup jongler avec les statistiques. Ainsi, si vous allez repasser ou nettoyer 3 à 4 heures par semaine grâce aux chèques-services, le gouvernement vous raie déjà des statistiques officielles de chômage. Ce genre d’emploi est largement subventionné par le gouvernement, et le système risque de devenir impayable. Sans parler du fait que les contrats flexibles, temporaires et intérimaires sapent de plus en plus la position des travailleurs qui bénéficient encore un emploi stable.
Ceux qui plaident pour une limitation du paiement des allocations de chômage dans le temps afin d’obliger les gens à dépendre du CPAS vivent sur une autre planète ou se foutent tout simplement des conséquences sociales de telles mesures. S’il est vrai que les gens choisissent de vivre d’une allocation plutôt que d’aller travailler parce que la différence entre les deux est trop faible, alors il faut augmenter les bas salaires plutôt que de réduire encore les allocations.
Les bureaux d’intérims sont devenus aujourd’hui des entreprises florissantes. Cela n’a rien d’étonnant. De cette manière, les entreprises n’ont plus à assumer la responsabilité d’un employé fixe. L’entreprise se dirige directement vers l’agence d’intérim qui lui fournit des travailleurs, parfois même avec des contrat à la journée! Vous n’avez plus besoin de travailleurs? Licenciez-les sans en subir les conséquences. Certains intérimaires travaillent depuis plus de 3 ans pour le même patron, ils fournissent à ce patron toute leur expérience, mais ne reçoivent ni la sécurité d’emploi, ni un salaire décent.
Les Etats-Unis sont cités comme l’exemple à suivre en matière de lutte contre le chômage. Le taux de chômage y serait très bas (entre 4 et 5 %). Ce que l’on ne raconte pas, c’est que la majorité des gens sont obligés de prendre un deuxième boulot après avoir fini le premier pour pouvoir s’en sortir. Ce modèle est en réalité un champ de bataille social. Pourtant, on voit que notre marché du travail évolue vers une croissance des contrats à temps partiel et des chèques-services, de plus en plus comme le système américain.
Un argument trop souvent cité est le manque de formation. Quelle hypocrisie! Les entreprises exigent que les élèves qui quittent l’école soient formés pour un job spécifique dans l’entreprise. La subvention des écoles par ces entreprises, pour pouvoir utiliser ces jeunes une fois sortis de leurs études, n’est plus un phénomène exceptionnel depuis longtemps. Une fois que le jeune – spécialement formé – n’est plus utile pour l’entreprise, il est mis à la porte.
Le patronat exige d’assainir le financement de l’éducation. Le raisonnement est toujours le même : les écoles doivent fournir des travailleurs formés, alors pourquoi organiser une formation large quand il s’agit d’emplois précaires ou de rester au chômage? La revendication du mouvement ouvrier comme quoi l’enseignement doit fournir une formation générale est un luxe qui doit être réservé aux enfants de la bourgeoisie. Voilà les pensées cyniques qui se cachent derrière les chiffres et les plaidoyers des chefs d’entreprises et de leurs organisations.
La crise du capitalisme mène de plus en plus à la croissance du chômage et des emplois précaires à bas salaires. L’ironie est que cela renforce la position des capitalistes, parce qu’ils peuvent menacer les travailleurs avec l’argument que si ces derniers n’acceptent pas les conditions qu’on leur impose, il y en a d’autres qui accepteront de travailler aux conditions imposées.
Le PSL/LSP défend un rétablissement complet de l’index et un salaire minimal de 1.500 euros net; dénonce le démantèlement de la sécu et « l’érosion » des contrats de travail. Nous nous opposons à chaque fermeture d’entreprise car, dans le cadre du système capitaliste, chaque fermeture mène au chômage et à la pauvreté. La seule revendication capable de commencer à résoudre le problème du chômage est l’introduction de la semaine des 32 heures, sans perte de salaire et avec des embauches compensatoires.
3. Stop aux libéralisations et aux privatisations ! Renationalisation sous contrôle démocratique de la population!
Dans les années ‘90, après la chute du Bloc de l’Est, l’idée selon laquelle le marché libre était le seul système viable a été largement diffusée. Tant la social-démocratie que les dirigeants syndicaux ont cru à cette fable et ont refusé de continuer à résister à l’offensive idéologique de la bourgeoisie. En utilisant l’unification européenne comme excuse, nos services publics ont été attaqués les uns après les autres, libéralisés et préparés à la concurrence privée. Au vu de la croissance plus lente de beaucoup d’autres secteurs – en conséquence de la crise de surproduction – le capital a cherché de nouveaux créneaux pour faire du profit.
Aujourd’hui, beaucoup de travailleurs commencent à percevoir les conséquences de cette politique – ou à la sentir dans leur portefeuille ! On pense par exemple à l’augmentation des prix de l’électricité en Belgique : "Test achat" a ainsi calculé que le prix pour un kilowattheure (kWh) chez Electrabel a augmenté de 50% entre janvier 2005 et décembre 2006.
Peu après les élections de juin 2007, Electrabel a annoncé qu’elle augmenterait à nouveau ses prix de 13% à 20% ! Après d’énormes protestations, l’entreprise a donné l’impression qu’ils n’allaient finalement pas mettre en place cette décision. Mais en réalité, le CREG, la Commission de Régulation de l’Electricité et du Gaz, a publié un peu plus tard les résultats de sa recherche sur les augmentations des prix du gaz et de l’électricité. La commission a confirmé que, pour les particuliers, l’augmentation sera de 17% en 2008. Une famille moyenne va donc payer environ 172 euros de plus par an pour sa consommation d’énergie.
Et ceci alors que, selon le VREG qui est le régulateur flamand des marchés du gaz et de l’électricité, le nombre de familles qui ne sont pas capables de payer leur facture d’énergie a augmenté pour atteindre 91.600 en 2006. Une augmentation de 50% par rapport a l’année passée ! Le nombre de « mauvais payeurs » en Flandre a donc atteint un niveau record en 2006. Déjà 4,5% des ménages flamands sont dépendants du tarif social pour leur électricité. Le VREG affirme, à propos de ce scandaleux bradage d’un besoin essentiel, que « Les clients sont seulement intéressants pour les fournisseurs s’ils rapportent quelque chose. Les mauvais payeurs sont donc mis plus vite à la porte par leurs fournisseurs. »
Sur le marché du gaz, au début de la libéralisation, Electrabel a temporairement baissé ses prix pour attirer le plus de clients possible. Du moment que le marché a été divisé entre plusieurs concurrents, les prix ont augmenté assez vite pour assurer un maximum de profits pour les patrons et les gros actionnaires du secteur. C’est l’évolution naturelle à attendre de chaque forme de libéralisation et de privatisation d’un service public.
Le PSL/LSP se demande pourquoi la collectivité n’a pas de contrôle sur le marché de l’énergie. Pourquoi le profit est-il central s’il s’agit de notre consommation d’énergie ? Le PSL/LSP exige l’abolition des 21% de TVA sur l’énergie, qui représente un besoin essentiel pour chaque famille et revendique un gel des prix de l’énergie comme première mesure dans le processus de mise sous contrôle démocratique de tout le secteur de l’énergie. C’est seulement sur cette base que seront pris en compte les besoins des travailleurs et de leurs familles (y compris les besoins écologiques).
La libéralisation et la privatisation signifient toujours un drame social concernant le nombre d’emplois et les conditions de travail. A La Poste, 9.000 des 35.000 emplois ont été supprimés ce qui équivaut à la fermeture de deux grandes usines d’assemblage de voitures. Les travailleurs de La Poste qui sont restés ont été confrontés au système « géoroute » qui conduit à une augmentation perpétuelle de la charge de travail pour moins de personnel. Cela a mené, ces dernières années, à une vague de grèves spontanées dans de nombreux bureaux de poste à travers tout le pays. A quand un mouvement unifié pour jeter tout le plan « géoroute » à la poubelle et stopper net les pas « en avant » vers la libéralisation ?
Au début des années ’90, 26.500 personnes travaillaient encore chez Belgacom alors que ce chiffre est descendu à 15.000 début 2007. Aujourd’hui, la direction veut encore éliminer 1.500 places. A la classe ouvrière de supporter drames sociaux et pertes d’emplois tandis que les profits exorbitants sont réservés aux patrons. En 2006, Belgacom a ainsi réalisé 6,1 milliards d’euros de profit. La même année, le top manager Didier Bellens a reçu 1,85 millions d’euros de salaire, en plus des 480.000 euros de dividendes pour ses actions. Il en avait d’ailleurs également vendu pour une valeur de 6 millions d’euros. Les ex-« services publics » sont de véritables « jackpots » pour les capitalistes. Et bien sûr, les libéraux, les sociaux-chrétiens et les sociaux-démocrates trouvent que ce genre de profits ne devraient surtout pas être attaquables. Pour eux, les profiteurs sont les chômeurs, dont il faut au plus vite suspendre les allocations ou limiter celles-ci dans le temps.
Dans les chemins de fer, le transport de marchandises a déjà été libéralisé, et le transport de voyageurs est en train d’y être préparé. L’avenir en Belgique sera-t-il le même qu’en Grande-Bretagne ? Les divers accidents et autres misères qu’y ont connus les chemins de fer privatisés sont loin d’être des coïncidences pour l’opinion publique qui a, depuis, clairement changé d’opinion vis-à-vis de la privatisation. Aujourd’hui, la revendication de la renationalisation du secteur trouve de plus en plus d’échos en Grande-Bretagne, ce qui représente un sérieux changement par rapport aux années ’90.
En Amérique Latine également, les ravages de la politique de privatisation ont provoqué un changement dans la conscience. Aujourd’hui, les « gouvernements de gauche » en Bolivie et au Venezuela sont mis sous pression pour nationaliser les richesses naturelles. Les pillages et les expropriations par les multinationales sont de moins en moins tolérés par les masses. Comme l’expliquait Engels, le compagnon de Marx, les nationalisations apparaissent déjà comme des «éléments de socialisme» qui s’imposent à la veille société en crise. Ils démontrent la faillite du capitalisme et du libre marché.
Pendant que les gouvernements néolibéraux organisent la casse sociale, le nombre de personnes ayant besoin de services publics de qualité augmente de jour en jour. Par exemple, de nombreux parents qui travaillent ont un réel problème concernant la garde de leurs enfants. Ils seraient sans aucun doute enchantés d’avoir à disposition des crèches dignes de ce nom, et organisées par l’Etat.
Chaque jour, des milliers d’ouvriers et d’employés vont au boulot en transport en commun. Quelqu’un est-il capable de nous expliquer pourquoi les transports en train, en tram et en bus sont de plus en plus chers ? Quelle est la logique derrière cela ? A Bruxelles, n’est-ce pas scandaleux de devoir payer 2 euros pour un ticket de la STIB si celui-ci n’a pas été acheté à l’avance à un guichet ? Est-ce comme cela que l’on pense pouvoir résoudre les problèmes des embouteillages ? Un gouvernement au service de la population rendrait directement tous les transports publics gratuits pour faire face au problème des embouteillages et à la pollution. Dans le secteur de transports, il existerait des règles beaucoup plus strictes pour éviter que la pression du travail – en réalité la pression des profits – n’impose à des chauffeurs fatigués de devoir prendre la route.
Aujourd’hui, la destruction du système des soins de santé est une réalité flagrante et mène parfois à des situations dramatiques. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, les Belges doivent déjà payer eux-mêmes 33% de leurs coûts médicaux. L’OCDE estime ce pourcentage à 28%. Le sous-financement des hôpitaux devient une excuse pour les médecins pour commencer à organiser des consultations « personnalisées », pour lesquelles ceux qui paient le plus sont évidemment les plus vite servis. Les médecins sont rémunérés selon leurs prestations, ce qui favorise les abus.
Le PSL/LSP veut mettre fin à la course aux profits dans l’industrie pharmaceutique, à la commercialisation rampante et aux abus de la médecine de prestation. Nous sommes pour la création d’un service de soins de santé public et national, avec des statuts fixes – qui sont de plus en plus minés dans les hôpitaux publics – et des salaires décents pour tout le personnel. Selon nous, des éléments tels que le profit ou le prestige de certains individus ou de multinationales ne peuvent intervenir dans le secteur des soins de santé.
L’argument invoqué en permanence pour la privatisation est le manque de "rentabilité" des services publics. Mais comment un service public peut-il être rentable ? Un service public a pour objectif de rendre un certain nombre de services le plus accessible possible pour chacun, qu’il soit riche ou pauvre.
Une prestation de services est par définition non rentable parce qu’elle ne peut générer de bénéfice. Ce qu’on oublie, c’est que le droit à des services publics – tout comme à la sécurité sociale – a été arraché par la lutte dans l’objectif de pourvoir à certains besoins sociaux.
En réalité, la libéralisation et la privatisation signifie la vente de nos services, avec moins d’emplois disponibles et des conditions de travail diminuées, pour nous faire payer doublement le prix. Ainsi le gouvernement économise-t-il sur les dépenses publiques, mais au détriment de qui ? Nous ne payons pas un centime de moins d’impôts, tandis que les managers de nos ex-services publics s’en mettent plein les poches !
Le PSL/LSP lutte contre la privatisation, pour la gratuité des transports publics, des soins de santé, de la distribution postale et de la collecte des déchets, parce que tous ces services doivent être accessibles a tout le monde, quelque soit l’âge, la situation professionnelle, le sexe,…
L’argument selon lequel un service public fonctionne mal par définition est largement répandu dans les consciences. Les services publics ont toujours été victimes de ragots. Ils seraient "inefficaces", "bureaucratiques", "tout sauf ponctuels", etc. Et, au contraire, dans le privé, tout marche évidemment à merveille.
Cette image est complètement fausse. Il y a toujours eu trop peu d’argent disponible pour les services publics, et ce même dans les "golden sixties". Mais même avec suffisamment d’argent, le problème n’est pas totalement résolu. Pour qu’un service fonctionne le plus efficacement possible, la participation de tous ceux qui l’utilisent ou y travaillent est également nécessaire.
Par exemple, les chemins de fer seraient bien plus efficaces et accessibles en impliquant les travailleurs et les voyageurs dans le fonctionnement du service. Cela permettrait à beaucoup de travailleurs de laisser leur voiture chez eux pour se rendre sur leur lieu de travail en prévoyant suffisamment de correspondances aux heures opportunes. Ces services seraient gratuits et donc accessibles a tous. Les points de départ du PSL/LSP sont l’efficacité et l’accessibilité pour tous, et non pas la logique de privatisation pour le profit de quelques-uns.
4. Et la concurrence alors ? Qui va payer tout cela ? Il n’y a pas d’argent pour cela ? Les patrons ne vont jamais l’autoriser…
Une citation des ouvriers des Forges de Clabecq, à l’époque de leur lutte dans les années ’90 pour le maintien de leur usine : « Si tu mets une pile de briques sur le sol, elles ne vont pas se mettre l’une sur l’autre d’elles-mêmes pour former un mur une maison. C’est pour cela que l’intervention humaine est nécessaire. C’est le travail qui génère la richesse. ». Des richesses, il y en a assez. La question est : qui en bénéficie ?
Si nous regardons à quel point la productivité a augmenté durant les dernières décennies, il apparaît que la durée du travail n’a pas augmenté aussi vite. Si c’était le cas, nous ne travaillerions qu’une paire d’heures par jour. Tous les profits que les patrons ont amassés, ils les ont gardés dans leurs poches.
Pour résoudre le chômage, le travail disponible doit être partagé entre tous les travailleurs disponibles. Cela déterminera la durée hebdomadaire du travail, qui pourra ainsi être fortement diminuée. Mais attention, nous voulons que le salaire soit totalement conservé, car nous y avons droit.
Naturellement, le patronat et le gouvernement vont refuser, car cela signifierait qu’une grosse partie de leurs profits leur échapperaient. Cela signifierait aussi que leur position concurrentielle serait menacée. Mais la concurrence est aussi vieille que le capitalisme. Les travailleurs doivent-ils tout avaler pour être « concurrentiels » ? Si on pousse la logique à l’extrême, cela peut être lourd de conséquences. Cela signifierait que nous devrons accepter à terme les mêmes salaires que les ouvriers chinois ou indiens surexploités.
Si les travailleurs et leurs organisations avaient suivi le même raisonnement au début du 20e siècle, nous serions encore en train de travailler 12, 13 ou 14 heures par jour au lieu de 8. Lorsque la classe ouvrière a fait pression pour la journée des huit heures, après la 1ère guerre mondiale, il n’était pas question de pertes de salaire.
Au lieu de partir de la question « Qu’est-ce qui est supportable et réaliste pour les entreprises », nous préférons nous demander « Qu’est-ce qui est nécessaire pour les travailleurs ». Nous trouvons simplement logique que la richesse produite par les travailleurs serve à subvenir à leurs besoins.
5. Pour un syndicat combatif !
Une des conditions pour atteindre les objectifs ci-dessus, c’est que les travailleurs puissent compter sur des organisations, tant sur le plan politique que syndical, avec lesquelles pouvoir mener le combat pour ces revendications.
C’est certain, une bataille sera nécessaire à l’intérieur des syndicats, pour remettre en avant le syndicalisme de combat. Le modèle de négociation par lequel la direction des syndicats essaye de convaincre le patronat a échoué. La force des syndicats réside dans leur capacité à mobiliser les travailleurs dans la défense de leurs intérêts immédiats, comme l’histoire l’a démontré à mainte reprises.
C’est de cela que les patrons ont peur. Au contraire, si le patron sait que la direction syndicale est prête à accepter un petit accord, il n’a aucune raison de faire des concessions. Si par contre, il comprend que le syndicat est prêt à se dresser comme un seul homme pour défendre les intérêts des travailleurs, il réagira de façon plus prudente. Ce qui importe, c’est que les travailleurs se lancent avec un peu plus de confiance dans la lutte, en sachant qu’ils ont la possibilité d’y gagner quelque chose.
Les syndicats ne servent pas à aider les patrons dans leurs « restructurations », ils servent à défendre les intérêts des travailleurs. A la place du syndicalisme de concertation, nous défendons le syndicalisme de combat. Nous soutiendrons chaque lutte dans ce sens. Il est crucial de se battre pour chaque emploi et pour le maintien de tous les acquis.
Un nouveau parti des travailleurs devra aussi organiser une aile gauche combative à l’intérieur des syndicats pour offrir une alternative à la « stratégie » d’enterrement des mouvements de lutte des directions syndicales. C’est la principale raison pour laquelle beaucoup de travailleurs sont aujourd’hui cyniques par rapport au rôle des syndicats. C’est aussi pour cette raison que les militants syndicaux ont du mal à convaincre les jeunes de s’engager dans un travail syndical.
Pensons par exemple à l’arrêt du mouvement contre le Pacte des Générations en 2005. Au cours de cette lutte, la base a été « consultée », dans le meilleur des cas, au cours d’assemblées régionales sans avoir la possibilité de décider réellement. Le mouvement a été stoppé arbitrairement par la direction de la FGTB et de la CSC. Pourquoi les militants ne pourraient-ils pas décider eux-mêmes de la fin ou non d’un mouvement ? Nous avons besoin d’une réelle démocratie syndicale, fondée sur une base active et impliquée qui peut décider elle-même du déroulement de la lutte par des votes démocratiques. La force de la classe ouvrière est potentiellement présente mais nous avons besoin de leaders syndicaux qui osent utiliser leur force pour défendre nos emplois, nos salaires, nos pensions, etc. Et qui puissent concilier ce combat quotidien avec la recherche d’une autre société.
6. Appel pour la formation d’un nouveau parti des travailleurs
Mais la classe ouvrière a aussi besoin d’un parti capable de traduire cette stratégie politiquement. Il est clair que le PS et le SP.a sont toujours considérés par une majorité de travailleurs comme « leurs » partis. Mais ces partis ne sont plus prêts à mener la lutte.
Au contraire, ils sont devenus parmi les meilleurs exécutants des politiques d’austérité. Leur participation aux gouvernements durant de nombreuses années – ainsi que la désorientation et la démoralisation qui ont suivi la chute des régimes dits « socialistes » avec comme conséquence le triomphe des dogmes du libre marché – ont totalement corrompu ces partis.
Si nous voulons une traduction politique de nos revendications de travailleurs, nous devons en conséquence construire un nouveau parti, mais nous savons qu’un tel parti ne tombera pas du ciel. Comme le dit l’adage populaire, Rome ne s’est pas construite en un jour. Celui qui n’est pas prêt à se retrousser les manches pour franchir les premières étapes vers un nouveau parti oublie que le Parti Ouvrier Belge (POB, l’ancêtre du PS) n’est pas apparu du jour au lendemain.
Nous sommes conscients qu’un tel nouveau parti des travailleurs ne sera vraiment viable que s’il est soutenu par une partie importante du mouvement ouvrier, et en particulier par des fractions syndicales, sur base d’expériences de mouvements et de luttes massives. Mais si nous devons attendre les directions syndicales, cela peut encore durer longtemps. C’est seulement s’il y a suffisamment de pression de la base que les meilleurs d’entre eux seront prêts à se mettre en avant.
Ce parti doit être ouvert à tous ceux qui veulent lutter contre la casse sociale. Des discussions libres doivent être ouvertes pour les différents courants, syndicats, groupes d’actions,… qui veulent défendre leurs points de vue propres. Ce parti doit se battre contre chaque division des travailleurs, que ce soit sur base de la nationalité, de la race, du sexe, ou de la religion. Les seuls qui trouvent un intérêt quelconque dans ces divisions sont les patrons et leur système. Tous ensembles, nous sommes forts et, en luttant pour des droits égaux pour tous, nous renforcerons cette unité.
Ce parti large doit aussi lier la lutte contre l’exploitation de tous les ouvriers, y compris ceux du monde néo-colonial. Les intérêts des travailleurs des autres pays sont souvent présentés comme étant opposés aux intérêts des travailleurs d’ici, mais c’est là une tentative de briser la lutte internationale. Les travailleurs de VW Forest auraient certainement été plus forts dans leur combat contre la restructuration s’ils avaient été capables de convaincre leurs collègues des autres sites VW de mener une lutte efficace à l’échelle internationale contre la fermeture. Mais la lutte internationale ne peut pas être une excuse pour ne pas mener le combat dans son propre pays. Les deux sont indissociablement liés.
Un nouveau parti des travailleurs doit respecter le droit à l’autodétermination des Flamands, des Wallons et des Bruxellois, sans tomber dans le piège de ceux qui veulent affaiblir les travailleurs par la surenchère communautaire. Le PSL/LSP estime que chaque peuple doit avoir le droit de prendre ses propres décisions. Si un peuple veut vivre avec un autre peuple dans le cadre d’un Etat national, cela doit être possible. Mais sur un pied d’égalité et sur une base complètement libre.
Être obligés de vivre dans un Etat où une partie de la population a moins de droits que l’autre, cela ne peut mener qu’à des situations désastreuses. Nous sommes par conséquent pour toutes les facilités susceptibles de mettre un terme aux sentiments d’oppression nationale. Donc également pour les facilités linguistiques.
Beaucoup d’Etats capitalistes sont basés sur l’oppression de peuples ou de groupes de population. La Belgique a sur ce plan une mauvaise réputation. Les Flamands ont ainsi été empêchés durant 100 ans d’aller à l’école dans leur propre langue. Toute l’administration était francophone. Il était donc facile d’affaiblir les travailleurs en les divisant sur une base linguistique. On pouvait par exemple lire dans le journal wallon « Les Nouvelles », du 25 octobre 1904 : « Les Flamands de La Louvière ont reçu hier leur salaire et l’ont directement dépensé pour se saoûler et provoquer des bagarres pendant toute la nuit. Il faut relever qu’à chaque fois que des telles bagarres générales se déroulent à La Louvière, on y trouve des Flamands qui jouent avec des couteaux ».
Entre temps, l’image s’est transformée. Selon le modèle propagé aujourd’hui, le Flamand est le travailleur courageux, le Wallon le profiteur et l’immigré celui qui sort son couteau. Fondamentalement, c’est toujours la même rengaine : les patrons empochent les profits tandis qu’ils dressent les travailleurs les uns contre les autres. C’est surtout la sécurité sociale qui constitue une épine dans le pied des patrons et du gouvernement. En brandissant la menace d’une scission, ils font du chantage sur les travailleurs wallons et, en même temps, ils nourrissent la Flandre de l’illusion que cela serait bon « pour tous les Flamands ».
Les seuls qui tireraient avantage de la scission de la sécurité sociale sont les patrons, aussi bien les Wallons que les Flamands. Ils feraient pression sur nos salaires, nos pensions, nos pécules de vacances et nos prestations de santé en menaçant de déménager vers l’autre région. Aucun travailleur n’y a intérêt, ni les Wallons, ni les Flamands, ni les immigrés. Seuls les patrons y gagneraient.
Un tel parti devrait agir pour la nationalisation des secteurs les plus importants de l’économie, sous contrôle ouvrier, car aux mains du privé, ces secteurs ne servent qu’à générer des profits pour les patrons et leurs actionnaires (banques, investisseurs, etc.).
La seule manière pour que la population puisse profiter des revenus et/ou des services de ces secteurs (énergie, transport, banques…) est de les nationaliser. Mais il ne faudrait pas s’arrêter là. Dans les mains de l’Etat actuel, qui n’est ni plus ni moins qu’une marionnette aux ordres de la classe capitaliste, ces services devraient toujours être rentables et ne pas trop coûter à l’Etat. La même argumentation est actuellement utilisée pour privatiser les entreprises publiques.
La participation et le contrôle des travailleurs et de leurs familles dans et sur la politique sont essentiels. En tant qu’utilisateurs et qu’employés, ils savent mieux que quiconque où se situent les déficiences et quelle est la meilleure manière d’y remédier.
7. Révolution
Au regard du fait que les multinationales travaillent main dans la main avec les régimes les plus sanguinaires ; que des guerres sont menées pour le pétrole en faisant des milliers et des milliers de victimes innocentes ; que ces multinationales dressent des populations entières les unes contre les autres pour qu’elles finissent, à la longue, par s’entretuer ; qu’elles préfèrent encore laisser les gens mourir de faim plutôt que de toucher à leurs profits et qu’au besoin l’armée choisit la solution militaire, il est clair que ce programme ne peut être atteint autrement que par une lutte résolue.
Bien plus, pour avoir la possibilité de pouvoir décider nous-mêmes de ce qu’on veut faire de la richesse produite, un mouvement déterminé des travailleurs sera nécessaire pour arracher le pouvoir des mains de la petite minorité des capitalistes.
Beaucoup feront remarquer que cette minorité est très puissante, car elle dispose de tous les instruments nécessaires pour maintenir les gens sous contrôle. Elle utilise tous les canaux pour diffuser son idéologie, comme l’enseignement, les médias,… afin de faire croire aux gens que le système capitaliste est le seul système qui peut fonctionner.
Et si ce n’est pas suffisant, elle contrôle encore la police, l’armée et la justice pour faire respecter les lois capitalistes par la force. Les tentatives visant à briser le droit de grève se situent complètement dans cette logique, tout comme la tentative d’exercer un contrôle policier plus sévère au travers d’un appareil policier unifié. Comme nous le voyons à chaque grève, la justice et la police ne sont pas de notre côté.
Mais cela ne peut pas nous arrêter. C’est le rapport de forces qui sera déterminant. Une classe ouvrière convaincue, dont le noyau le plus dynamique est décidé à ne plus se laisser berner, et déterminée à prendre le pouvoir ne peut pas être arrêtée, même par mille armées.
Nous devons tenir compte du fait que le capitalisme en crise est continuellement pendu à un fil. Si le système ne parvient plus à convaincre dans ses propres rangs, ce qui est souvent le cas lors d’une révolution, alors il est pour ainsi dire mort.
Le meilleur exemple est celui de la révolution russe, mais aussi de Mai 68 en France, ou plus récemment les révolutions en Serbie, Géorgie, Ukraine, etc. Ces révolutions ont montré comment une classe dirigeante peut perdre prise sur ses propres troupes face à un mouvement de masse qui se développe. On peut encore parler de la radicalisation énorme en œuvre en Amérique Latine avec les mouvements de masse au Mexique, en Bolivie et dans beaucoup d’autres pays ainsi qu’avec le processus révolutionnaire qui se déroule au Venezuela. Selon nous, c’est un avant-goût des mouvements révolutionnaires qui vont se développer en Europe et dans le monde industrialisé.
Ce qui a manqué dans beaucoup de ces exemples, c’est une organisation prête à mener le combat contre l’impérialisme jusqu’au bout, en faisant clairement le choix d’un autre type de société. C’est à la construction d’une telle organisation que travaille le PSL/LSP.
8. Que sera le nouveau système ? Cela ne va-t-il pas dégénérer de la même manière qu’en Russie ?
Pour éviter une situation où l’élite bureaucratique tire tous les avantages vers elle et rend impossible toute participation démocratique comme cela a été le cas dans l’ancien Bloc de l’Est, nous devons veiller à ce que le système et son économie fonctionnent pour satisfaire les besoins réels de la population.
La discussion sur le stalinisme n’est pas seulement une discussion historique. Nous ne pouvons pas simplement dire que des « fautes » ont été commises dans l’ancienne Union Soviétique. Trotsky et ses partisans sont les seuls à avoir expliqué l’avènement d’une élite bureaucratique en Russie sur base d’une analyse marxiste. Le stalinisme était la conséquence de l’isolement de la révolution dans un pays arriéré sur le plan industriel et culturel. Trotsky a laissé deux possibilités ouvertes : soit la nouvelle élite régnante était chassée par une révolution politique qui aurait préservé l’économie planifiée, mais qui aurait réinstallé les soviets (ou démocratie des conseils), soit la bureaucratie se réformerait d’elle-même pour devenir une nouvelle classe capitaliste, lorsque l’économie bureaucratiquement planifiée arriverait à bout de souffle. C’est malheureusement cette deuxième possibilité qui s’est produite. Une économie planifiée a besoin de démocratie ouvrière tout comme le corps humain a besoin d’oxygène.
Le Socialisme suppose un système dans lequel le plus possible de travailleurs, ainsi que leurs familles, puissent participer et exercer un contrôle sur les prises de décision et ce tant sur le plan économique et social que politique. Un plan de production démocratiquement établi et contrôlé par des conseils composés de représentants des travailleurs, des syndicats nationaux et de la population dans son ensemble doit pouvoir faire une estimation correcte de ce qui est nécessaire et prioritaire. Chaque décision doit ensuite pouvoir être évaluée.
Mais que se passera-t-il avec ceux qui seront au pouvoir ? N’est-il pas exact de dire que le pouvoir corrompt ? Si être au pouvoir signifie pouvoir rester à son poste sans aucun contrôle de la collectivité, cela pose effectivement un problème.
Ce que nous défendons au contraire, et que nous mettons déjà en pratique dans notre organisation, c’est que chaque fonctionnaire doit être élu mais aussi révocable à tout moment, au cas où il n’a plus la confiance de ses électeurs. De même, il ne doit pas disposer d’un salaire plus élevé que la moyenne des travailleurs qu’il représente.
La situation que nous connaissons actuellement, dans laquelle les parlementaires touchent des milliers d’euros par mois fait en sorte que ceux qui nous représentent vivent bien loin de notre réalité. Comment peuvent-ils savoir quels sont nos besoins ? Ils ne vivent pas dans les quartiers ouvriers, ils ne fréquentent pas les mêmes endroits, ils ne savent pas ce que c’est que d’arriver péniblement à payer toutes ses factures chaque mois, etc.
Joe Higgins, jusqu’il y a peu notre parlementaire en Irlande, mais aussi nos parlementaires à l’intérieur du Labour Party dans les années ’80, ne gardaient comme salaire que l’équivalent d’un salaire moyen. Tout le reste était consacré aux campagnes et aux luttes des travailleurs, et non à la construction d’une villa dans le sud de la France…
9. Pour le socialisme et l’internationalisme !
Si les travailleurs d’une entreprise se mettent en grève, le patron fera tout pour briser cette grève. Il va proposer un accord aux leaders syndicaux, essayer par tous les moyens d’isoler le noyau dur de la grève et faire appel aux gardes de l’entreprise ou à la police et aux tribunaux pour briser les piquets.
Il essayera, si la grève dure trop longtemps, de compenser ailleurs les pertes de production, si possible dans une société sœur à l’intérieur ou à l’extérieur du pays mais, s’il le faut, chez la concurrence. En d’autres mots, le capitaliste fera appel à sa classe, à ses représentants politiques, aux médias, et à l’appareil de répression pour briser la grève.
A l’ère de la production internationale et des flux financiers mondiaux, le capitaliste fera de plus en plus appel à la « solidarité » des patrons à travers les frontières. Les travailleurs doivent en tirer les leçons. Ils doivent aussi faire appel à leur classe pour faire triompher leur lutte. Ils doivent aussi, et plus que jamais, s’appuyer sur leurs collègues à l’étranger.
Aucune lutte n’éclate partout en même temps, chaque lutte commence quelque part. Les chances de réussite augmentent à mesure que la lutte s’élargit. Cela vaut pour les grèves, pour les mouvements de désobéissance civile, pour les marches de protestation… mais aussi pour la révolte et la révolution.
Même une révolution socialiste éclate à une échelle nationale, mais sa réussite finale est déterminée par les événements internationaux. La solidarité a une importance majeure, mais avec un soutien moral ou même des collectes, etc. on ne remporte pas une victoire. C’est pour cela que le soutien actif des travailleurs d’autres entreprises, secteurs et pays et un élément d’importance cruciale. La révolution va donc débuter sur un plan local, mais sans élargissement national et international, elle est condamnée à l’échec. La démocratie ouvrière et la planification socialiste ne peuvent pas être limitées à un seul pays, comme cela a été démontré en Russie. L’isolement de la Russie soviétique a conduit à sa dégénérescence à partir de 1924.
La Révolution russe, la seule dans laquelle la classe ouvrière a réussi à prendre le pouvoir pendant une courte période, a été l’événement le plus important de l’histoire. L’expérience n’a été que partiellement réussie, mais nous pouvons en tirer des leçons énormes et entre autres que nous devons nous organiser au niveau international, dans le cadre d’un parti mondial. C’est pourquoi le PSL/LSP fait partie du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO).
Le CIO est actif sur tous les continents. Nous avons des sections aux États-Unis, mais aussi au Chili, au Brésil et au Venezuela. En Afrique, nous sommes présents au Nigeria et en Afrique du Sud. En Asie, nous avons des sections au Sri Lanka, en Inde, au Pakistan, au Kazakhstan et au Japon.
En Europe, nous sommes présents en Belgique, en Suède, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Angleterre, en Écosse, en Irlande (Nord et Sud), en Autriche, en Tchéquie, en Russie, en Ukraine, en Pologne, en Italie, en Grèce, à Chypre, en Espagne et en France. Au Moyen-Orient, nous avons des sections en Israël et en Palestine et des sympathisants au Liban. Le CIO a aussi une section en Australie. Le PSL/LSP voit donc sa lutte en Belgique dans le cadre de la lutte des travailleurs du monde entier, pour une société socialiste.
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II. PERSPECTIVES, TÂCHES ET OBJECTIFS
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"Le PSL – LSP, un parti pour changer de société"
– Préface
– III. Notre programme
– IV. Notre fonctionnement interne
Cette brochure peut être commandée via redaction@socialisme.be et revient à 3 euros (que vous pouvez verser sur le n° de compte 001-2260393-78 du PSL/LSP avec la mention "brochure PSL").
[/box]MARX et les lois générales du développement du capitalisme
Le PSL/LSP ne travaille évidemment pas à partir de rien. Marx avait défi ni les lois générales du développement du capitalisme: la concentration continuelle du capital dans de moins en moins de mains (l’accumulation du capital), la tendance de la production à sortir des frontières (ce qui conduit inévitablement à des conflits commerciaux et des guerres), la tendance à la diminution du profit par unité de capital et, par conséquent, le besoin de plus en plus de capital (baisse tendancielle du taux de profit), les crises de surproduction ou la capacité de surproduction (entre autres à cause de l’exploitation de la classe ouvrière et de la partie de notre journée de travail qui n’est pas rémunérée au bénéfice des capitalistes); la création d’une couche grandissante de travailleurs qui ont pour seule source de subsistance la vente de leur force de travail (en fonction des conditions sociales rencontrées).
Concentration de capital et croissance des profits Le pourcent le plus riche de la population mondiale contrôle 24% de la richesse globale. Aujourd’hui, ces riches capitalistes viennent aussi d’Amérique Latine, du Moyen Orient et d’Afrique (qui a récemment connu la plus grande croissance du nombre de riches) à cause de l’augmentation des prix des matières premières. Ces augmentations ont en fait disparu dans les poches d’un petit groupe de super riches dans le monde néo-colonial. De la même manière, la croissance des pays capitalistes développés a surtout enrichi les milliardaires.
En 1960, il était estimé que les 20% les plus riches sur le plan mondial possédaient 30 fois ce dont disposaient les 20% les plus pauvres. Vers 1997, cette proportion était de 74/1 tandis que pour la fi n 2005, le rapport était de 150 pour 1. Selon une étude de l’université américaine de Michigan, les 2% les plus riches des Etats-Unis ont depuis 1984 doublé leurs revenus pour atteindre une moyenne de 2,1 millions de dollars en 2005. Quant au 1% le plus riche, leur revenu moyen est de 4,9 millions de dollars par an.
Le salaire moyen d’un manager américain est maintenant 300 fois supérieur au salaire moyen, différence 10 fois plus grande que durant les années ‘70. En 2007, le revenu cumulé de tous les milliardaires à travers le monde avait augmenté de 35% en une année seulement ! Le capital se retrouve concentré auprès de moins en moins de personnes mais – à cause de la super exploitation du néo-libéralisme – celles-ci sont de plus en plus riches. Il s’agit d’un phénomène mondial.
En Belgique également, l’élite dominante n’a pas trop de difficultés. Les 10% les plus riches possèdent 50% de la richesse totale. En 2006, les valeurs financières des Belges ont connu un record en atteignant 793,4 milliards d’euros, c’est-à-dire 80.000 euros par Belge (compte d’épargne, actions boursières,…) Beaucoup de travailleurs se demandent sur quel compte se trouve leurs 80.000 euros… Sur celui de leur patron? Ou sur ceux des actionnaires principaux de l’entreprise qui les emploie ? Ou encore sur le compte des politiciens bourgeois ? C’est vrai que ces derniers se sont bien servis avec leurs sièges dans les conseils d’administration des grandes entreprises (entreprises qu’ils ont d’ailleurs toujours bien soigné au cours de leurs carrières politique).
Au regard du développement des profits, l’origine de cette inégalité sociale n’est pas difficile à trouver. Ces dernières 30 années, depuis le début de la politique néolibérale sous le gouvernement Martens – Verhofstadt de 1981, ont été une véritable « ruée vers l’or » pour les capitalistes et leurs partisans. Une ruée vers l’or en direction de moyens initialement prévus pour la sécurité sociale (pensions et autres allocations) et en direction de notre pouvoir d’achat. En Belgique, les profits des entreprises étaient en 1980 de 241 milliards de francs belges. En 1985, ce chiffre avait déjà augmenté jusqu’à 484 milliards FB, jusqu’à 821 milliards FB même en 1994. Cependant, en 2005, les profits des entreprises avaient atteint… 41 milliards d’euros (environs 1.640 milliards d’anciens FB). Même en tenant compte de l’augmentation des prix, les richesses d’une petite élite ont énormément grandi. L’objectif de la politique néolibérale est limpide. La classe dominante a par ce moyen tenté de rétablir le taux de profit face à la compétition sur un marché qui connaissait depuis 1974- 75 une croissance plus faible ou des périodes de stagnation. Un nouveau développement était seulement possible sur base d’une répartition différente des richesses. Les salaires (directs ou indirects à travers les allocations sociales) – que les travailleurs avaient arraché au cours de leurs luttes – ont alors chuté. C’est sur cette base qu’ont pu exploser les profits de la classe capitaliste. Les super-profits permettent d’ailleurs aussi de comprendre la taille appréciable des salaires des managers : un manager d’une entreprise du Bel 20 empoche chaque année en moyenne 1,5 million d’euros brut.
La politique néolibérale a signifié un transfert gigantesque de richesse de la classe ouvrière vers un groupe de super-riches tel que jamais encore l’histoire n’en avait connu. Ces capitalistes ne savent que faire de leur prospérité, beaucoup d’entre eux se sont même lancés dans la charité. Probablement veulent ils ainsi «redistribuer» une part de ce qu’ils ont extorqué aux travailleurs, aux bénévoles,… Plus sérieusement, il s’agit là d’un moyen commode pour redorer son blason dans la société au moment où les capitalistes à la richesse indécente sont de plus en plus perçus comme nuisibles pour la société.
Les riches deviennent plus riches tandis que la classe ouvrière s’appauvrit.
Il n’est pas ici question d’un d’une paupérisation relative face à une minorité « qui a eu de la chance ». La majorité des travailleurs et des employés auraient d’ailleurs soi-disant eux aussi fait des pas en avant vers de meilleurs conditions de vie ces dernières 25 à 30 années. Les statistiques du gouvernement démontrent pourtant le contraire. D’abord, il ressort clairement que la plupart des allocataires (pensionnés, chômeurs,…) a connu un appauvrissement absolu. 21% des pensionnés sont officiellement sous le seuil de pauvreté et 39% des pensionnés ont une pension inférieure à 750 euros. En 1980, l’allocation moyenne de chômage représentait 41,6% du salaire brut moyen ; en 1999, cela avait diminué jusqu’à 27,9%. L’allocation d’invalidité moyenne était équivalente à 43,9% d’un salaire brut moyen en 1980, tandis qu’en 1999, ce chiffre avait baissé jusqu’à 33,3%.
Il n’est donc pas surprenant que la pauvreté touche – malgré la croissance des richesses – de plus en plus de personnes. Aujourd’hui, elle représente 15% de la population alors que dans les années ’80, on parlait de quelques 6%. Une situation pareille est honteuse pour un pays soi disant « prospère ». Il faut y voir le résultat direct des attaques sur la protection sociale des divers gouvernements néo-libéraux, avec ou sans le PS, le SP.a ou les verts.
Mais n’y a-t-il tout de même pas une couche aisée de familles avec deux revenus ayant quand même progressé?
Les médias nous resservent régulièrement cette soupe. Le fait est qu’aujourd’hui, deux travailleurs sont nécessaires dans une famille pour préserver un certain niveau de vie, et cela en dit déjà beaucoup. En réalité, le pouvoir d’achat des salariés normaux a fortement reculé. Les coûts d’une maison ou les loyers, par exemple, ne se reflètent pas dans les augmentations salariales ou dans l’indexation. «L’index-santé» actuel est devenu une caricature face aux augmentations réelles des prix de beaucoup de produits. Comme le remarquent correctement beaucoup de gens : «Tout devient de plus en plus cher, mais nos salaires ne suivent pas».
Déjà au début des années 1980, le gouvernement néolibéral de Martens a forcé une dévaluation de la monnaie et l’index a alors subi des manipulations. Entre 1981 et 1985, les salaires réels ont diminué de 13% à 21%, en fonction de leur catégorie. Depuis ce temps, le coût du logement a pris énormément plus de place dans le budget des ménages – parfois jusqu’à 1/4 ou plus du total – et le pétrole, les cigarettes,… ont été retirés de l’index.
Il n’y a pas beaucoup d’études concrètes sur la chute du pouvoir d’achat de nos salaires, mais ce n’est probablement pas exagéré de l’estimer autour de 30 à 40%. Ceci correspondrait à l’expérience concrète de beaucoup de ménages qui ont besoin de 2 emplois ou d’un emploi et un temps partiel pour préserver un certain niveau de vie. En 1981, les salaires représentaient 59,2% de la production nationale. En 2006, cette partie était arrivée sous la barre des 50%. Et encore, les patrons trouvent que le coût salarial est trop élevé pour leur soif de profit insatiable !
Le néolibéralisme a conduit à une augmentation énorme de la pression au travail et du stress, en combinaison avec une insécurité d’emploi croissante. Beaucoup de ces problèmes – en fait des problèmes sociaux, liés au capitalisme – se retrouvent au sein de la famille et n’ont certainement pas aidé à développer des relations harmonieuses entre partenaires ou entre parents et enfants. Mais quand un nouveau «drame familial» prend place, tout l’establishment jette les mains dans l’air. On les entend beaucoup moins parler des 17% de Belges qui, à un certain moment de leurs vies, sont confrontés à une dépression. Quant à la responsabilité de la politique néo-libérale dans tout cela (avec la disparition de la protection sociale,…), les médias n’en parlent pas.
En Amérique Latine comme en Afrique ou encore dans les ex-pays du bloc de l’Est et même dans les pays capitalistes développés, la crise économique commencée au milieu des années ’70 a conduit à une paupérisation de la population. Toutefois, certains idéologues libéraux ont persisté jusqu’à aujourd’hui à affirmer que le marché «libre» a diminué la pauvreté dans le monde. Ils se basent sur des rapports des Nations Unies qui clament qu’en Asie «des centaines de millions de paysans» sont sortis de la pauvreté. Mais cet exemple Asiatique peut être critiqué. En fait, cette prétendue diminution de la pauvreté en Asie est seulement basée sur l’Inde et la Chine. En ce qui ce concerne l’Inde, la méthode de calcul a été modifiée dans les années ‘90. La soi-disante baisse du nombre de pauvres est un point fortement contesté, même entre «économistes du développement» qui ne remettent pas en doute le «libre» marché.
La Chine est un cas spécial. Sur base de l’économie bureaucratiquement planifiée, le développement de l’agriculture a atteint ses limites dans les années ‘70. La bureaucratie en Chine a commencé à augmenter les prix pour les denrées produites par les paysans, ce qui a entraîné une croissance de la productivité. Beaucoup de paysans sont devenus un peu moins pauvres et sont tombés hors des statistiques des Nations Unies. Mais le fait que la Chine reste essentiellement dépendante des exportations pour sa croissance économique démontre qu’un marché interne n’a pas été créé. Officiellement, les campagnes chinoises sont un peu moins pauvres qu’auparavant. Mais la transition vers le capitalisme a signifié la mort du «bol de riz d’or» (la protection sociale chinoise) sur les plans de l’éducation, des soins de santé, de l’espérance de vie,… Si en Chine également les lois du capitalisme vont de plus en plus jouer, cela ne va que mettre encore plus en évidence – pour ceux qui n’en étaient pas encore convaincus – que combattre la pauvreté dans ce système est une illusion.
La Chine a connu une forte croissance, précisément parce Le PSL/LSP, un parti pour changer de société 27 qu’elle est devenue «l’usine du monde». Cette position a seulement pu être acquise sur base d’une super-exploitation, du manque de législation sociale et de conditions qui rappellent le 19e siècle en Europe (ou pire encore).
En conclusion: devenir riche aujourd’hui n’est en rien une question de chance ou d’intelligence. Dans la plupart des cas, cela veut simplement dire que, sur base de sa position de classe comme grand actionnaire ou propriétaire privé, il est possible de manœuvrer pour obtenir des parties sans cesse plus grandes de «travail gratuit». Dans ce processus, les gouvernements – qui aident à miner les salaires et les allocations, vident les contrats de travail et privatisent les services publics – sont les gentils petits toutous du capital.
Avec leurs salaires, les politiciens sont certains de ne pas ressentir les conséquences de leur politique de casse sociale. L’insécurité croissante et l’absence de perspectives pour l’avenir ont favorisé l’arrivée d’une énorme méfiance vis-à- vis de «la politique» précisément parce qu’il ne s’agit pas d’une politique en faveur des travailleurs et de leurs familles. Ce développement amène aussi une plus grande volatilité lors des élections. La classe dominante possède beaucoup moins d’instruments stables pour pouvoir mener sa politique comparativement à la période de croissance extraordinaire qui a suivi 1945.
Surproduction et crise économique
Karl Marx a expliqué dans «Le Capital» comment la classe ouvrière reçoit une valeur (son salaire) qui ne correspond qu’à une partie de la valeur qu’elle produit elle-même (en biens et en services). Ce travail non-rémunéré est la base de la plusvalue des capitalistes. Les capitalistes peuvent acheter une partie des voitures, des machines à laver, des télévisions,… que les travailleurs produisent pendant la partie non-rémunérée de leur journée de travail et qu’ils ne consomment pas, mais ils ne peuvent acheter toute la production. Donc, à un certain moment, une surproduction ou capacité de surproduction survient inévitablement.
Un autre facteur doit être pris en compte. Sous pression de la compétition, les capitalistes ont une tendance à investir de plus en plus dans de meilleures et de plus modernes machines. De cette façon, ils espèrent augmenter la productivité du travail, diminuer leurs prix et ainsi acquérir une plus grande part de marché. Le problème, c’est que seule la force de travail peut engendrer la plus-value. Les machines se déprécient pendant un nombre d’années calculable. En elles-mêmes, elles ne produisent pas de plus-value, uniquement représentée par le travail non-rémunéré de la classe ouvrière. Quand la plus-value reste égale, tandis que les coûts pour les machines et nouvelles technologies grandissent, le taux de profit (le profit par unité de capital investi) commence à baisser.
Ces deux éléments ont été à la base, vers les années ‘70, de la fi n de la période de forte croissance économique. Les profits ont aussi été amoindris par un autre développement. Dans les ans ‘60 et jusqu’au milieu des années ’70, les travailleurs ont, dans la plupart des pays industrialisés, livré un combat acharné pour de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail, mais souvent également avec des revendications portant sur un changement radical de société, avec les sommets atteints par mai ‘68 en France, la révolution des œillets au Portugal et la lutte contre le régime des colonels en Grèce. Le patronat et les gouvernements ont donc dû faire des concessions. En Belgique, par exemple, les salaires réels ont augmenté pendant plusieurs années durant cette période. Évidemment, cela a d’autant augmenté la pression sur les bénéfices de la classe dominante.
Ces développements ont conduit à un point tournant fondamental pour l’économie capitaliste mondiale. Le taux de profi t était miné et la crise économique a causé, en 1974, une forte augmentation du chômage. Le chômage structurel de masse a dès ce moment été un élément permanent, malgré les diverses tentatives des gouvernements pour masquer et manipuler les statistiques. A ce moment, les bourgeois ont opté pour une politique néolibérale, après une première réaction qui a consisté à de nouveau injecter de l’argent dans l’économie, ce qui n’avait seulement produit que des augmentations de prix et de l’inflation.
Le problème avec les solutions néolibérales pour rétablir le taux de profit, c’est elles conduisent toutes à terme à une crise plus profonde. Faire baisser le pouvoir d’achat des salaires directs et indirects (allocations de chômage, pensions,…), faire travailler les travailleurs plus durement et plus longuement pour le même salaire ou pour un moindre,… tout cela aggrave au final le fossé entre la production et le pouvoir d’achat des masses. Ce phénomène explique pourquoi les économies capitalistes ont également une tendance à connaître des crises de plus en plus graves depuis les années ‘70. Les montagnes de dettes que les gouvernements ont construit dès les années ‘80 ont d’ailleurs été autant de tentatives d’éviter une crise plus profonde et plus rapide. De même, ces dernières années, on a poussé les travailleurs à dépenser les salaires qu’ils n’avaient pas encore gagné (sur base de dettes, d’hypothèques, de différentes formes de crédits,…).
Le problème n’est pas qu’il n’existe pas assez de richesses dans la société. Par contre, cette richesse est constamment plus invisible pour une majorité de travailleurs. Le taux de dettes des ménages belges a augmenté en 2005 vers le record de 43,1% du PIB. Il y a vingt années, il ne s’agissait encore que de 28,1%. Là où dans le passé une important portion des revenus pouvaient encore être épargnée – aux environs de 20% dans les années ‘80 – cela a également beaucoup diminué dans la période néolibérale. Pourtant, c’est avec cette épargne que de nombreux retraités évitent de sombrer dans la pauvreté.
Ces dernières années, on remarque même que les capitalistes ont moins investi dans de nouvelles machines et technologies pour augmenter la productivité. Où pourraient-ils encore vendre tout ces produits sur un marché miné ? Ils tentent, au travers d’assainissements, de rassembler ou de garder des fonds chez les grands actionnaires ou alors les prêtent aux banques, ce qui est à la base d’une stratégie de fusions et de reprises. Ils veulent «devenir plus grands» en achetant d’autres entreprises, puis y faire plus de profits avec moins de gens en effectuant des économies d’échelle. Jan Marijnissen, le président du SP hollandais (à la gauche de notre PS) a convenablement qualifié ce phénomène de «capitalisme prédateur». Malheureusement, en tant que politicien réformiste, il croit encore qu’il peut domestiquer «l’animal prédateur».
L’importance accrue des bourses et de la spéculation financière illustre la dégénérescence du capitalisme qui – à cause de la surproduction – investi moins dans la production réelle. A titre d’exemple, aux Etats-Unis, la part des institutions purement financières dans les profits a grandit de 10 à 15 % dans les années ’50 et ’60 jusqu’à 30 à 40% aujourd’hui.
A son époque, Marx a mené une vive et intense polémique contre les socialistes utopiques et les anarchistes qui attaquaient les phénomènes visibles du capitalisme, mais ne voulaient pas mener une analyse approfondie du système pour voir quelles forces contradictoires étaient présentes.
Marx a ainsi polémiqué contre ceux qui plaidaient pour des îlots «socialistes» dans un océan capitaliste comme les entreprises «socialistes» autogérées et les coopératives et/ou communes autogérées par des socialistes ou des anarchistes. Au contraire, il a démontré que le capitalisme engendre sa propre déchéance avec la création d‘un groupe croissant de travailleurs rassemblés dans de grandes unités de production.
La bourgeoisie a, depuis le début de la crise au milieu des années ‘70, détruit une grande partie de l’industrie. En Belgique, elle a essayé de partiellement remplacer ces emplois en créant des emplois dans «le secteur tertiaire des services». Mais même dans des call-centers ou des PME’s, ces travailleurs ont vu leurs salaires et conditions de travail se détériorer. Les syndicats devraient considérer leur présence et les élections sociales dans les PME’s comme d’une importance majeure.
Ignorer cela équivaut à laisser l’opportunité à la bourgeoisie d’affaiblir notre lutte. De plus, cela pousse les couches non-organisées de notre classe en direction de solutions individuelles – de fausses solutions – et les rend plus perméables à la vague de propagande droitière contre les grèves.
Concurrence capitaliste… ou socialisme mondial ?
En 1848, quand Marx a écrit le «Manifeste du Parti Communiste», la classe des travailleurs salariés n’était même pas encore une majorité dans la société sur le continent européen. Ce qui est particulièrement brillant dans le «Manifeste du Parti Communiste», c’est que l’estimation de la tendance générale du mode de production capitaliste était correcte. Le capital était destiné à conquérir le monde à cause de sa soif d’accumulation et de production de profits.
Observons la situation telle qu’elle se présente actuellement. En septembre 2007, Janssen Pharmaceutica a annoncé le licenciement de 688 de ses travailleurs. Parmi eux se trouvaient aussi 194 de chercheurs hautement qualifiés. Un délégué syndical du Setca a fait remarquer dans la presse: «Janssen Pharmaceutica a réalisé l’année passé un profit de 250 millions d’euros. Tous ces licenciements sont-ils nécessaires? Ou est ce que Johnson & Johnson (l’entreprise mère, NDLR) veut prendre un chercheur en Inde pour chaque place perdue ici ?»
En 2006, un autre géant belge, Inbev, a décidé de délocaliser une partie de son administration vers des pays meilleur marché: la Tchéquie et la Hongrie. L’année précédente, Inbev avait fait un profit de 1 milliard d’euros. Les grandes entreprises sont aujourd’hui des «joueurs mondiaux» à la recherche de la production la plus rentable partout à travers le monde. De grandes parties du monde néo-colonial sont trop instables pour cela, à cause du niveau d’instruction très bas et des structures gouvernementales corrompues. Mais, heureusement pour les maîtres du monde capitalistes, il y a encore les nouveaux Etats membres de l’Union Européenne, l’Inde ou encore la Chine où ce qui reste de la bureaucratie stalinienne garde un oeil sur les travailleurs.
La délocalisation révèle de façon aiguë de quelle manière les systèmes de productions capitalistes, depuis le temps de Marx et du «Manifeste du Parti Communiste», sont inter-connectés sur le plan mondial. En même temps, on ne saurais mettre en avant un meilleur argument en faveur de la nécessité de l’organisation internationale des travailleurs. Le PSL/LSP et son organisation internationale, le Comité pour une Internationale Ouvrière, perpétuent une tradition de solidarité internationale. Sinon, quelle est la norme? Les salaires et conditions de travail de Pologne? Ou alors ceux de Chine? Les travailleurs doivent résister et s’organiser contre cette spirale négative.
Les besoins de la classe ouvrière se heurtent à la dictature des grands actionnaires. Pour ce club, beaucoup de profits ce n’est pas encore assez. La rentabilité est relative et la concurrence renforce ce processus. Des actions baissent de valeur ? Les «assainissements» sont, dans ce système concurrentiel, la seule réponse. Ce ne sont pas seulement les ouvriers industriels qui ont à craindre la «logique» folle du capitalisme, mais aussi des employés et de chercheurs hautement qualifiés.
Comme Marx l’avait déjà démontré, le marché capitaliste traverse les frontières et mène à des tensions commerciales et à des guerres. Si, grâce à la force potentielle du mouvement ouvrier en Europe ou aux Etats-Unis, les pays capitalistes développés sont aujourd’hui épargnés, ce n’est pas le cas du monde néo-colonial.
Regardons l’intervention de Bush en Irak. Même Alan Greenspan, l’ancien chef de la FED (la Banque centrale américaine), admet maintenant que le motif de la guerre en Irak était «principalement la protection du transfert du pétrole». La seule «moralité» du capital est son chiffre d’affaires. La «lutte pour la démocratie» est seulement une façade pour l’impérialisme, derrière laquelle se cachent les profits des grandes entreprises. Seul le mouvement ouvrier a un intérêt à maintenir et à élargir les droits démocratiques.
Un conflit commercial existe aussi entre les Etats-Unis et la Chine qui importe des produits bon marché aux Etats-Unis. De leur côté, plusieurs pays d’Amérique Latine essaient de faire des accords de commerce entre eux afin de contrer quelque peu l’influence de l’impérialisme, surtout américain. En Europe, les bourgeoisies nationales ont tenté de limiter la compétition entre elles par l’introduction de l’euro et la création de la Banque Centrale Européenne. Une crise fondamentale du système liée à des révoltes ouvrières vont pousser les bourgeoisies nationales les plus faibles vers la sortie. Ce développement va à terme casser la zone euro et l’Union Européenne, avec seulement la persistance d’un noyau dur.
La production capitaliste tente de surpasser les frontières, mais elle se heurte toujours au carcan de l’Etat-nation. La propriété privée des moyens de production et l’Etat-nation sont des formes sociales dépassées. Elles doivent être remplacées par une économie démocratiquement planifiée et par le socialisme mondial.
La majorité de la classe ouvrière et l’avant-garde
Sur base des lois générales du développement du capitalisme analysées plus haut, Marx a mis en avant la nécessité d’une société socialiste, une société harmonieuse de producteurs et de consommateurs où la production n’est pas dirigée vers les profits d’une petite minorité, mais vers les besoins de chacun.
Selon Marx, la classe ouvrière est la seule classe capable de réaliser cela au vu de son rôle dans la production. C’est de là que découle sa stratégie visant à essayer de gagner la majorité des travailleurs pour un programme socialiste. En contradiction avec les anarchistes – avec Bakounine, leur plus éminent représentant à ce moment – qui voulaient rendre les travailleurs «conscients» au travers d’actes terroristes, Marx pensait que seule une majorité consciente de la classe ouvrière serait capable de mener une transformation socialiste de la société.
Le terrorisme, comme l’ont toujours expliqué les socialistes de Marx à Trotsky, est l’arme du petit-bourgeois désespéré ou du «prolétaire en haillons» non-organisé. Ces éléments n’ont pas de confiance dans le mouvement de la masse de la population. Ils essaient, en tant que petite minorité, de forcer le développement de la société. Une révolution socialiste peut seulement aboutir si elle est soutenue par la majorité de la population: la classe ouvrière.
Bien sûr, entre la constatation de ce qui est objectivement nécessaire – gagner la majorité de la classe ouvrière pour un programme socialiste – et effectivement atteindre cet objectif, il y a encore beaucoup d’obstacles. Tous les travailleurs ne montrent pas le même degré d’initiative. Parmi les travailleurs comme parmi les jeunes, il y a des individus actifs qui sont ont un rôle décisif pour la réaction de groupes plus larges de travailleurs et de jeunes. C’est surtout cette «avant-garde» qui doit dans un premier temps de radicalisation être gagnée à un programme socialiste. Ce n’est qu’à travers celui-ci qu’il est possible de plus tard atteindre et gagner les couches plus larges. En somme, un parti révolutionnaire doit d’abord s’orienter vers l’avant-garde, la partie la plus active et consciente des travailleurs et des jeunes, afin d’atteindre ensuite sur cette base les couches plus larges. Mais il est très important de ne pas isoler cette avant-garde des couches larges avec un programme ultra-gauchiste, mais d’adopter un programme de transition qui offre la possibilité d’entrer en dialogue avec ces couches larges.
Sous le stalinisme, cette option stratégique a été déformée pour servir les intérêts d’une bureaucratie. Vu l’isolement de la Révolution dans le pays industriellement et culturellement arriéré qu’était la Russie de 1917, une vieille couche de carriéristes a pu envahir le Parti Communiste. Cette couche de carriéristes était principalement constituée de personnes capables de lire et d’écrire, souvent déjà fonctionnaires sous l’ancien régime tsariste. Ils n’avaient évidemment pas fait la révolution (et pour la plupart était même contre). Sous le régime de Staline, ce groupe social a transformé le Parti Communiste en un instrument taillé en fonction de ses propres intérêts bureaucratiques. Tous les éléments de démocratie ouvrière qui existaient encore ont été abolis.
Pour la bureaucratie, il n’était plus nécessaire de gagner l’avant-garde. Au contraire, les staliniens se sont proclamés eux-mêmes l’avant-garde et ont défini leur parti comme celui de l’avant-garde. Cette approche élitiste a sérieusement discrédité l’idée de gagner les couches les plus conscientes des travailleurs et des jeunes. En réalité, les staliniens ont rompu avec la stratégie qui a été proposée par Marx. Ils ont déformé ses idées pour servir leurs propres objectifs bureaucratiques.
Des perspectives comme guide pour l’action
Marx a dévoilés les lois générales du développement du capitalisme et les tâches stratégiques les plus importantes. Ces lois générales de mouvement ainsi que la lutte entre les travailleurs et le capital ne se déroulent pas de façon linéaire. Des moments de progrès et de recul se succèdent.
Pour une organisation révolutionnaire, il n’est pas seulement nécessaire d’étudier le mouvement général à long terme, mais aussi d’estimer comment les choses vont se développer à court et à moyen terme. C’est sur base d’une telle analyse qu’on peut déduire les tâches concrètes pour aujourd’hui et demain.
Prenons une comparaison connue. Sur base du nombre potentiel de spectateurs et des réserves financières, on peut en déduire qu’une équipe de football d’un pays riche a plus de chances d’avoir un bon résultat en compétition qu’une équipe d’une petite ville, avec moins de revenus issus des spectateurs et de la publicité. On pourrait appelé cela une «loi de mouvement général».
L’équipe qui se base seulement sur cette loi de mouvement général et ne se force pas trop ne va pas aller bien loin malgré son futur prometteur. Il est nécessaire que l’équipe comprenne aussi ce qu’elle a à faire aujourd’hui. Si l’équipe joue contre une équipe offensive, elle devra jouer d’une autre façon que contre une équipe avec une attitude défensive. Autrement dit, l’équipe devra aussi estimer à court terme le jeu de l’adversaire et sur cette base décider d’une tactique afin de remporter le match.
L’idée quelle pourrait acheter quelques nouveaux joueurs l’année prochaine ne changera rien au résultat d’aujourd’hui. De plus, une défaite aujourd’hui aurait aussi un effet sur le nombre de spectateurs et la publicité à l’avenir. Une bonne équipe, donc, n’a pas seulement besoin d’une stratégie à long terme, mais doit aussi estimer tactiquement le jeu de l’adversaire à court terme. Sinon, les bonnes perspectives pour le futur pourraient être transformées en son contraire assez rapidement.
Pour une organisation révolutionnaire aussi, il est important d’estimer les rapports de forces de façon correcte, d’analyser les développements à court terme et d’élaborer sur cette base une approche tactique. Mais l’adversaire peu aussi essayer de jouer sur la surprise est décider de jouer d’une autre façon. De la même manière, les perspectives d’une organisation révolutionnaire ne sont pas des prévisions exactes, mais une tentative d’estimer les développements de la façon la plus correcte possible, à court et moyen terme, afin d’y ajuster tactiques et objectifs de façon systématique.
Par exemple, le lancement de Blokbuster, notre campagne antifasciste flamande, a pris place, comme cela a déjà été mentionné, quelques mois avant la percée du Vlaams Blok lors des élections de 1991. Nous avions mis en avant la perspective que, malgré la croissance économique de cette époque, une couche importante de la population des villes connaissait un recul de leur niveau de vie. Une victoire du Vlaams Blok allait probablement provoquer une certaine radicalisation parmi une couche de jeunes. Sur base de ces perspectives correctes, les précurseurs du PSL/LSP ont posé les fondations de la construction d’une organisation révolutionnaire et d’une tradition antifasciste encore largement respectée aujourd’hui.
Perspectives et tactiques
Dans les années ’70 et au début des années ’80, il y avait encore une large conscience socialiste auprès d’une couche importante de travailleurs et de jeunes. L’idée qu’il y avait une alternative au capitalisme, même sans être claire à 100% sur ce que représentait cette alternative dans les détails, était acceptée par un groupe important de travailleurs et de jeunes. Durant cette période, les marxistes avaient surtout à confronter leurs points de vue spécifiques avec les réformistes sociaux-démocrates et les staliniens.
La chute des régimes staliniens et le processus de bourgeoisifi cation de la social-démocratie ont miné cette conscience «socialiste». Aujourd’hui, le rôle des marxistes ne se limite plus à défendre leurs positions contre celles des dirigeants sociaux-démocrates et de ce qui reste des staliniens. Notre tâche est aussi de propager l’idée générale du socialisme.
De là découle l’appel tactique du PSL/LSP pour un nouveau parti de masse des travailleurs indépendant de la bourgeoisie où tous les courants et individus qui résistent à la politique néolibérale seraient les bienvenus. Cet appel pour un nouveau parti des travailleurs date déjà de 1995. Les membres du PSL/LSP étaient dès lors préparés pour des initiatives comme celle du CAP, le Comité pour une Autre Politique qui avait le potentiel d’aller dans la direction d’un tel nouveau parti des travailleurs, sans toutefois avoir pu y parvenir.
Nous sommes convaincus que seul un programme socialiste achevé – une économie planifiée et la démocratie ouvrière – peut résoudre les problèmes quotidiens de l’emploi, de la pression au travail, de la chute du pouvoir d’achat, de la crise du logement, de l’éducation plus chère, de la destruction du climat,… Mais nous voulons discuter de cela de façon ouverte avec des couches plus larges de travailleurs, sans mettre en avant des ultimatums comme les groupes gauchistes.
Mais nous ne pensons pas qu’un nouveau parti des travailleurs ne peut pas avoir comme objectif principal ou pré-condition d’unifier tous les groupes de la gauche radicale. Tout ces courants n’ont pas la même vision de la manière de construire une alternative de gauche, ni la même orientation vers les couches larges de travailleurs, ou encore n’ont pas les mêmes méthodes ouvertes pour arriver à une nouvelle formation. La première tâche des initiatives qui veulent aller en direction d’un nouveau parti des travailleurs est de gagner des couches fraîches de travailleurs et de jeunes à travers des campagnes vers les lieux de travail, les piquets de grève, les quartiers, les écoles et les universités. Au plus il existera de réels courants de gauche voulant participer de façon constructive à ce projet, au mieux cela sera selon le PSL/LSP. Mais, selon nous, il y a une différence fondamentale entre la «recomposition de la gauche» et le lancement d’un nouveau parti des travailleurs.
Pour le PSL/LSP, des nouveaux parti larges des travailleurs sont des instruments importants pour avoir, à nouveau, une organisation de base, pour donner une voix à la lutte des syndicats sur le terrain national et politique, pour rassembler des travailleurs et des jeunes qui auparavant étaient isolés, pour élever la conscience sur le rôle du capitalisme, et pour entamer la discussion sur une société démocratique et socialiste.
Mais les partis larges de travailleurs ne sont pas immunisés à la pression idéologique et matérielle de la bourgeoisie, comme cela peut déjà se remarquer au niveau international. En Italie, Rifundazione Comunista (RC) a participé au gouvernement néolibéral de Romano Prodi. RC était une scission du vieux Parti Communiste stalinien. Ce parti a adopté une position plus ouverte et se tenait à distance des dictatures de l’ancien bloc de l’Est. Dans les années ’90 déjà, RC avait des dizaines de milliers de membres et pouvait mobiliser, sur ses propres forces, une masse de gens dans les rues.
Les dirigeants de ce parti tenaient malheureusement au capitalisme. Vu la crise actuelle de ce système, il n’y a presque plus de marges sociales pour acquérir des améliorations sociales permanentes. De nouveaux partis des travailleurs sont beaucoup plus vite confrontés au choix de s’adapter au marché capitaliste et ainsi mener une politique de casse sociale néolibérale, ou de rompre avec ce système et alors se battre pour une transformation socialiste de la société. En clair: réforme ou révolution. Malheureusement, la direction de RC a choisi les postes parlementaires et le carriérisme. Une crise profonde dans RC en a été le résultat, et l’aile droite du parti a dû partir. Il est aujourd’hui assez peu clair de voir dans quelle direction va évoluer RC et si ce parti pourra se débarasser du discrédit de sa participation gouvernementale.
Le SP, en Hollande, avec des dizaines de milliers de membres Le PSL/LSP, un parti pour changer de société 31 sur papier, présente lui aussi une pensée anti-néolibérale. Ce parti était une alternative au PVDA social-démocrate devenu néolibéral. Mais au sein du SP également, un processus similaire à celui de RC en Italie s’est développé. La direction du SP a dans le passé laissé entendre qu’il était ouvert pour des coalitions même avec le CDA, un parti ouvertement à droite (si toutefois ce dernier devenait un peu plus social). Sur le plan local, le SP participe à des coalitions qui ont mené des privatisations. Il y a beaucoup de mécontentement au sein du SP sur l’absence de démocratie interne. Les vieilles méthodes maoïstes et le parlementarisme de la direction du SP jouent un grand rôle dans ce processus. Plus de 1.000 personnes auraient, à cause des ces problèmes internes, déjà montré un intérêt dans le lancement d’un nouveau parti vraiment socialiste et démocratique. On doit encore voir si la direction de cette nouvelle initiative va mettre en avant les mêmes objectifs, mais la chasse aux sorcières contre les éléments les plus à gauche dans le parti a déjà commencé. Selon le PSL/LSP, il y a un lien entre la forme que revêt une organisation et le programme politique. Si il veut défendre les intérêts des travailleurs et pas ceux d’une élite du parti qui vise des postes parlementaires, un parti doit véritablement fonctionner de façon démocratique.
En Allemagne, Die Linke, avec Oskar Lafontaine, atteint parfois 15 % dans les sondages. C’est une confirmation du vide politique existant à gauche. Le fait que Lafontaine, comme Chavez, fait des références au «socialisme du 21ième siècle» est très positif. La défense des grèves et des grèves générales marque aussi un pas en avant important. Die Linke peut commencer à organiser une nouvelle génération contre la casse sociale néolibérale. Mais l’alternative de Die Linke reste malheureusement limitée. Le programme du parti défend une sorte d’économie capitaliste mixte, avec un plus grand rôle pour le gouvernement au lieu de la nationalisation des secteurs clés de l’économie sous le contrôle des travailleurs. En même temps, Die Linke peut être discrédité par sa participation au conseil néolibéral de Berlin, par exemple avec les empois «1 euro» (un euro par heure en plus d’une allocation de chômage déjà très basse). Le parti court le danger d’être vu comme complice des mesures antisociales.
Selon le PSL/LSP, on peut seulement participer aux conseils locaux sur base d’une majorité socialiste en menant la lutte et en mobilisant les gens dans la rue pour plus de moyens financiers de la part du gouvernement central avec le but d’élaborer un «budget des besoins» qui représente une rupture visible et importante avec la politique néolibérale. C’est ce que nos camarades ont fait à Liverpool dans les années ‘80, alors qu’ils étaient l’aile gauche marxiste du Labour Party, la parti travailliste. Cela doit impérativement être lié à l’idée qu’un changement fondamental n’est possible qu’en brisant, sur le plan national et international, le pouvoir des grandes entreprises et en mettant en place une démocratie ouvrière.
Le PSL/LSP pense donc qu’il y a une double tâche pour les socialistes révolutionnaires: défendre l’idée d’un nouveau parti des travailleurs, aider activement au lancement d’un tel parti afi n d’établir à nouveau les idées générales de lutte et socialisme, construire en même temps notre propre courant révolutionnaire afin de mettre en avant un programme révolutionnaire achevé et, avec d’autres socialistes, combattre l’influence des bureaucrates et des carriéristes – et leurs idées et méthodes de droites – au sein du nouveau parti. Très certainement dans une situation de victoires électorales, le danger existe que ces couches voient un nouveau parti non pas comme un instrument pour changer de société, mais comme un outil pour acquérir un poste confortable au Parlement.
Un nouveau parti des travailleurs a donc intérêt à avoir une forte aile gauche marxiste afin de donner le plus de poids possible aux points fondamentaux tels que la démocratie interne et un véritable programme socialiste (ou en tout cas les éléments les plus importants d’un tel programme). Sur base de discussions et de l’expérience en commun, nous espérons à terme convaincre la majorité, aussi dans la société, de notre programme révolutionnaire socialiste.
Perspectives et objectifs
Elaborer des perspectives, stratégies et tactiques est une chose, mais tout cela ne vaut rien sans être lié à des tâches et objectifs concrets. Tout comme un entraîneur d’une équipe de football qui, dans le cadre de la stratégie et de la tactique déterminée collectivement, va voir comment chaque joueur peut individuellement contribuer sur base des ses qualités et de ses faiblesse, de la même façon, une organisation révolutionnaire socialiste doit faire le maximum pour utiliser toutes ses qualités et vaincre ses faiblesses.
On ne doit pas mettre en avant des tâches et des objectifs – par exemple pour la vente du journal, la récolte de soutien financier ou le recrutement de nouveaux membres – impossibles à atteindre. On doit motiver les membres pour atteindre un objectif qui est dans leurs capacités. Ce qu’on fait, on doit bien le faire, sans essayer d’en faire beaucoup trop, en mettant en avant des objectifs à chaque niveau, et finalement pour chacun individuellement en s’assurant que toutes les capacités soient utilisées de façon optimales.
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Réforme ou révolte ? Comment la traite des esclaves a-t-elle été abolie ?
Le commerce des esclaves entre la côte occidentale de l’Afrique et les Amériques, qui s’est étalée sur une période de 300 à 400 ans, a été une des périodes les plus barbares de toute l’histoire de l’exploitation. La capture et la vente d’Africains a fait des commerçants d’esclaves et de leurs mécènes des hommes riches ; leurs clients utilisaient le travail de leurs esclaves afin de s’enrichir à leur tour.
Hugo Pierre, Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles)
L’accumulation de cette richesse a joué un rôle majeur dans le développement du capitalisme en Europe. Mais les souffrances infligées aux esclaves étaient immenses, et l’héritage de ce commerce est toujours bien vivant parmi nous. Cette migration forcée et brutale a été très différente par rapport aux formes d’esclavage qui existaient en Europe et en Afrique au Moyen-Âge ou même à l’Antiquité.
Nous avons des preuves que les marchés aux esclaves qui existaient à ces époques dans diverses régions d’Europe et d’Afrique étaient surtout utilisées en tant que moyens de punition, en particulier de débiteurs, ou pour l’utilisation de prisonniers de guerre. Aux Antilles, on a tout d’abord déporté des esclaves européens afin de les faire travailler dans les plantations qui produisaient les cultures et les biens destinés à la consommation européenne.
Ceci s’avéra bien problématique pour les propriétaires, puisque certains s’échappaient et n’étaient plus retrouvés, ou refusaient de se remettre à travailler. Même l’utilisation de serviteurs contractuels – des gens qui échangeaient une dette ou leur libération de service en échange d’une période de travail aux Amériques – était un problème pour leurs « propriétaires », puisque souvent les contrats étaient rompus.
L’utilisation par les Portugais d’esclaves en provenance d’Afrique occidentale fut presque accidentelle, mais ceci devint la méthode préférée d’approvisionnement en main d’oeuvre pour le système de plantations aux Amériques tout au long du 17ème siècle.
Les propriétaires des plantations développèrent un système basé sur la violence afin de réprimer les esprits de leurs captifs déjà désorientés et facilement identifiables, et une idéologie, le racisme, afin de s’octroyer la supériorité et la justification de leurs actions. Il est estimé que, grâce à la vente de 2,5 millions d’Africains, les marchands d’esclaves britanniques obtinrent 12 millions de livres de profits (l’équivalent de 900 millions de livres actuelles).
Les vies des Africains capturés étaient perçues comme autant de « marchandises » périssables par les marchands et les planteurs. De nombreux mouraient au cours du « passage » entre l’Afrique et les Amériques – dans certains cas, jusqu’à 45% des membres d’une « cargaison » mouraient au cours du voyage, mais en moyenne ce chiffre tournait autour de 30%.
L’espérance de vie sur la plantation n’était guère meilleure. En 1764, la Barbade comptait 70 706 esclaves, 41 840 autres furent amenés par négrier jusqu’en 1780. Le décompte des eclaves en 1783 révélait que ce chiffre avait baissé de 62 258 unités au cours des neuf années écoulées.
Un commerce mortel
Ce commerce d’humains n’était pas effectué que par la Grande-Bretagne, même au 18ème siècle, mais la richesse qui en découla créa de puissants partisans en faveur de sa poursuite. Il est dit qu’en conséquence de ce commerce, la ville de Bristol toute entière devint une cité de petits commerçants.
Liverpool fut transformée d’un petit village de pêcheurs en un lieu de commerce international, sa population passant de 5000 personnes en 1700 à 34 000 en 1779. Sur une période de soixante ans, 229 525 Africains furent embarqués sur des vaisseaux esclavagistes à partir de ce port. La propriété n’était souvent pas détenue par un individu, mais par un groupe d’actionnaires composé de petits commerçants et de marchands, avides de s’octroyer une part des profits.
La traite des esclaves n’était pas sans danger pour ceux qui s’y adonnaient. Les captifs eux-mêmes ne prenaient pas à la légère leur condition d’esclaves. Nous disposons de nombreux récits de vaisseaux dévastés par les esclaves surgis de leurs cales, avec même dans un cas la capture du vaisseau tout entier par les esclaves, après qu’ils aient jeté tout l’équipage à la mer.
Le système esclavagiste pratiqué dans les plantations requérait la formation d’une milice locale afin de le réguler, et l’utilisation fréquente de la Marine afin de mettre un terme à de graves troubles. Une des premières révoltes d’esclaves à la Barbade, en 1683, incluait un appel à l’unité dans la rébellion de tous les esclaves, rédigé en anglais.
A la Jamaïque, il ne se passait que rarement une décennie sans une nouvelle rébellion, qui menaçait souvent l’ensemble du système des plantations. Dans certains cas, un accord de paix était obtenu avec les rebelles en leur permettant de gérer leurs propres communautés.
Afin d’effectivement obtenir le renversement de l’esclavage, la riposte des esclaves devait être renforcée par d’autres forces de classes au sein du centre impérial lui-même. A ce sujet, en cette année du deux-centième anniversaire de l’abolition du commerce des esclaves, on parlera beaucoup du rôle de William Wilberforce, présenté comme le militant qui abolit la traite des esclaves grâce à un travail parlementaire acharné et diligent. En conséquence, Melvin Bragg, le présentateur de la BBC, a récemment consacré cet homme comme étant le plus grand de tous les politiciens anglais.
Des arguments lui furent donnés par son ami proche, William Pitt le Jeune, Premier Ministre de l’époque, selon qui l’esclavage devait être aboli parce que bien plus coûteux que l’utilisation d’ouvriers. Le point de vue de Pitt était celui d’un disciple de l’économiste du marché libre, Adam Smith, à la suite de la Guerre d’Indépendance qui avait induit la perte des colonies britanniques en Amérique.
En réalité, la principale préoccupation de Pitt était le fait que les négriers vendaient une grande partie de leurs esclaves aux colonies françaises, en particulier celle de Saint-Domingue (Haïti), renforçant par là une puissance rivale. En 1787, Wilberforce rejoignit la campagne déjà existante et connue sous le nom de Société pour l’Abolition, qui était essentiellement un groupe d epression.
Wilberforce dépensa la plupart de son énergie en rédaction de législation parlementaire. L’humeur de la jeune classe ouvrière et des pauvres était en faveur d’un changement radical. Parmi eux, se trouvaient approximativement 10 000 noirs – anciens esclaves, serviteurs et fugitifs. Le gouvernement Pitt n’avait pu parvenir à mettre en avant des réformes constitutionnelles, en particulier sur le plan électoral (à cette époque, seule une petite minorité de la population avait le droit de vote) – il considérait l’abolition comme un moyen de détourner l’attention.
Mais dans l’espace d’un an, le lancement d’une pétition, couplée à des rassemblements de masse dans les villes, petites et grandes, organisés par d’anciens esclaves tels qu’Olaudah Equiano, venus raconter leur vécu, s’articula autour des préoccupations globales des masses ouvrières et pauvres.
A Manchester, 10 000 hommes (les femmes n’étaient pas encouragées à signer la pétition, bien qu’elles trecherchaient souvent à le faire) signèrent la pétition – plus de la moitié de la population mâle adulte de la ville. Malgré cela, la première action de Wilberforce au Parlement fut refusée par la Chambre des Communes en 1789. Mais de plus grands événements allaient intervenir.
La révolution française
A partir des années 1870, la colonie française de Saint-Domingue était devenue la plus prospère des îles des Caraïbes. Elle produisait plus de sucre, de café et de tabac qu’aucune autre, non seulement en termes de quantité, mais aussi de qualité. Ceci permit à la France et aux marchands impliqués dans lîle de s’enrichir.
De la même manière que Liverpool, Bristol et London s’étaient développées sur base du commerce des esclaves, les villes de Nantes, Bordeaux et Marseille grandissaient. En 1789, les tensions sous-jacentes entre la richesse de la nouvelle classe de marchands et la monarchie explosèrent en un mouvement de masse, avec la prise de la Bastille et le début de la Révolution française.
Cette révolution fut le signal de la fin du féodalisme en France, et posa les bases d’une société capitaliste moderne. Bien que cette révolution n’était pas une révolution socialiste, mais bourgeoise, ce furent les masses pauvres, les sans-culottes, qui menèrent le processus révolutionnaire de plus en plus en avant.
Dans les colonies, la révolution divisa les Blancs en différents camps. Les métis libres et parfois riches de Saint-Domingue (qu’on appelait les « mulâtres ») choisirent leur camp, et firent pression pour obtenir plus de droits. Les Blancs déclenchèrent contre eux et contre la majorité noire de la population la terreur et la violence. Mais les divisions entre les Blancs fournirent à tous les autres l’occasion de dresser la bannière de la liberté.
En particulier, à la fin de 1789, les « mulâtres » demandèrent à l’Assemblée Constitutante en France d’être traités comme des égaux par rapport aux Blancs. Ils désiraient toujours avoir accès à de la main d’oeuvre sur leur île, et par conséquent ne demandèrent pas de droits pour les Noirs.
L’Assemblée était alors dominée par l’aile droite de la révolution, qui désirait obtenir des droits pour les nouveaux riches capitalistes, mais était terrifiée par le potentiel des masses qui avaient saccagé la Bastille. Après beaucoup d’hésitations, seule une minorité des métis purent obtenir des droits.
Mais les divisions parmi les classes dirigeantes – la royauté et l’aristocratie contre la nouvelle couche émergente de capitalsites –, comme dans toute révolution, allait donner confiance aux masses. Ceci se vérifia pour les ouvriers et paysans de France mais aussi pour les Noirs de Saint-Domingue, qui croyaient à la nécessité de faire pression pour leurs revendications, mais cette fois-ci, jusqu’au bout.
A partir de 1791, Saint-Domingue explosa et une guerre de classe débuta, qui sépara aussi les Blancs, les Noirs et les métis. Très rapidement, Toussaint L’Ouverture émergea en tant que dirigeant des esclaves. Son armée emprunta de très nombreuses différentes routes et positions afin de se battre pour l’émancipation.
Mais la France révolutionnaire était aussi attaquée sur le plan international. Parmi les agresseurs se trouvait l’impérialisme britannique, qui luttait contre les Français pour l’hégémonie dans les Antilles, et qui lança une guerre en vue de conquérir les possessions françaises, en particulier Saint-Domingue.
Saint-Domingue étant dans les faits divisée sous le contrôle de trois forces différentes, et devant faire face à l’invasion britannique, le nouveau gouverneur n’avait d’autre option que de déclarer l’abolition totale de l’esclavage, en 1793, et de mettre sous ses ordres l’armée de Toussain L’Ouverture. Les masses en France s’étaient également mises en branle pour défendre leurs intérêts, et en 1794 l’Assemblée, maintenant contrôlée par les Jacobins – la gauche – abolit l’esclavage.
Révolte dans les Antilles
Le drame de la révolution fut dans son ensemble joué à Saint-Domingue. Mais les conséquences de la Révolution française ébranlèrent l’ensemble des Antilles françaises : des révoltes d’esclaves se produisirent à la Martinique, en Guadeloupe, et à Tobago. La bannière « Liberté, égalité, fraternité » inspira les esclaves.
A Sainte-Lucie, les esclaves prirent le contrôle de l’île de 1795 à 1796, après en avoir expulsé les troupes britanniques. Une fois que la Grande-Bretagne eût repris le contrôle, elle obtint la « paix » en acceptant de transformer l’armée d’esclaves en un régiment Ouest-Africain. La Marseillaise était toujours chantée par les jeunes dans les villages dans les années 30 et 40 !
Les travailleurs et les radicaux britanniques reprirent eux aussi la bannière de la Révolution française, et soutinrent Tom Paine lorsque celui-ci rédigea ses Droits de l’Homme.
La guerre contre la France affaiblit le soutien parlementaire en faveur de l’abolition. A cette époque comme maintenant, le Parlement décréta une série de mesures répressives afin de faire taire l’opposition à la guerre qui vivait parmi la classe ouvrière et les pauvres. En 1795, en l’espace de trois semaines, trois manifestations fortes de plus de 150 000 personnes défilèrent sous les slogans de « A bas Pitt ! », « Non à la guerre ! », « A bas le roi ! ».
Wilberforce soutint la politique étrangère de Pitt contre la France, de même que sa politique intérieure de répression. A ce moment, il ne fit que maintenir ses suggestions visant à ouvrir un débat sur l’abolition au Parlement.
La révolution en France devait encore connaître de nombreuses vicissitudes. Dix ans après qu’elle ait débuté, Napoléon Bonaparte arriva au pouvoir. De nombreux gains de la révolution en faveur des sans-culottes furent annulés, mais le passage d’un système de propriété féodale à un système de propriété capitaliste fut maintenu.
Napoléon réinstaura l’esclavage, mais Toussaint L’Ouverture avait prédit la réaction des esclaves de Saint-Domingue dès 1797 dans une lettre au Directoire français :
« Pensent-ils que des hommes qui ont été capables d’apprécier la bénédiction de la liberté vont calmement la leur voir arrachée ? Ils ne supportaient leurs chaînes que tant qu’ils ne connaissaient pas d’autre condition de vie plus heureuse que l’esclavage. Mais aujourd’hui, alors qu’ils l’ont quittée, quand bien même ils disposeraient d’un millier de vies, ils les sacrifieraient toutes plutôt que d’être à nouveau contraints à l’esclavage. »
Les masses noires de Saint-Domingue lancèrent une insurrection qui allait mener à la fin de la tutelle française et à l’indépendance. Le joyau colonial de la France, que la Grande-Bretagne avait tenté de lui voler, resterait exempt de l’esclavage.
Le mouvement radical en Grande-Bretagne reflua vers la voie parlementaire. A partir de 1806, des parlementaires plus radicaux (bien que capitalistes) furent élus au Parlement. L’impérialisme britannique, libéré de la lutte pour Saint-Domingue, se tourna de plus en plus vers les richesses de l’Inde plutôt que vers celles des Caraïbes.
Qui plus est, la flotte française, décimée à Saint-Domingue, ne représentait plus la même menace pour la politique et les intérêts britanniques. Aux Antilles, il était clair que la menace de révolte constante allait accroître par l’import continu de nouveaux esclaves en provenance d’Afrique. La loi d’Abolition de l’Esclavage fut signée en 1807, pour être mise en application en 1808.
L’héritage du mouvement
Des dizaines de milliers d’Africains furent encore capturés et vendus pendant des décennies. On trouva rapidement des lacunes dans la Loi, et le recours à des activités illégales telles que l’utilisation de contrebandiers, de fronts étrangers pour les marchands britanniques, de même que toute une série d’autres mécanismes, permirent aux colons de satisfaire leur soif de main d’oeuvre pour leurs plantations.
Mais le commerce des esclaves et l’esclavage lui-même furent finalement abolis en Grande-Bretagne en 1833 par l’action de la classe ouvrière et les révoltes et la résistance continues des Noirs maintenus en captivité.
Aujourd’hui, la classe dirigeante ne peut même pas souffrir de devoir faire des excuses pour les atrocités de l’esclavage, de peur d’être assaillie de demandes de réparations.
En 1833, vingt millions de livres (l’équivalent de 1,5 milliards de livres actuelles) furent offertes aux propriétaires d’esclaves en compensation. L’héritage dévastateur laissé par l’esclavage – l’idéologie raciste, la destruction des civilisations et communautés africaines, la mort et la déportation de 10 à 30 millions de gens, la destruction de la vie des familles noires dans les colonies – persiste encore de nos jours.
Toutefois, l’héritage laissé par le mouvement pour l’abolition consiste en la preuve que les masses, et en particulier la classe ouvrière et les pauvres – Noirs comme Blancs – peuvent lutter ensemble pour obtenir des changements décisifs. De nos jours, seul le contrôle socialiste, la distribution et l’utilisation démocratique de l’énorme richesse qui existe partout dans le monde peuvent mettre un terme à leur exploitation et à leur divison de manière décisive.
« Victimes de l’avarice »
« Enfin, lorsque le vaisseau dans lequel nous nous trouvions eût chargé toute sa cargaison, ils s’apprêtèrent, avec de nombreux bruits effrayants, et nous fûmes tous placés sous le pont, de sorte que nous ne puissions pas voir comment ils manoeuvraient leur embarcation. Mais cette déception était le moindre de mes soucis.
La puanteur de la cale, alors que nous étions encore sur la côte, était si intolérable, si répugnante, qu’il était dangereux pour nous d’y demeurer même pour une courte période, et certains d’entre nous avaient reçu l’autorisation de rester sur le pont pour y profiter de l’air frais ; mais maintenant que l’ensemble de la cargaison du vaisseau y était confinée, l’air y devint absolument pestilentiel.
L’étroitesse de l’endroit et la chaleur du climat, ajoutées au nombre de gens dans le vaisseau, qui était si plein que chacun y avait à peine assez d’espace que pour se retourner, nous suffoquèrent presque.
Ceci produisit une copieuse perspiration, de sorte que l’air devint bientôt inapte pour la respiration, chargé d’odeurs répugnantes, et amena une maladie parmi les esclaves, parmi lesquels de nombreux périrent, devenant par là victimes de l’avarice irréfléchie, si on me permet de l’appeler ainsi, de leurs acheteurs. »
Olaudah Equiano, ex-esclave et militant anti-esclavage
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Inde : Retour sur les attentats terroristes de Mumbai
A bas la terreur du communautarisme et du capitalisme.
Le 27 novembre dernier, un abominable attentat a ensanglanté les rues de Mumbai (anciennement Bombay). Nos camarades Indiens avaient alors publié une déclaration que nous publions ici.
Déclaration de New Socialist Alternative (CIO-Inde)
L’horrible attaque terroriste du 27 novembre à Mumbai (anciennement appelée Bombay par l’occupant britannique, peuplée de 14 millions d’habitants, Mumbai est le centre économique et cinématographique indien) doit être condamnée à tous points de vue. Elle s’est déroulée dans la gare ferroviaire CST, habituellement bondée, ainsi qu’à six autres emplacements très fréquentés, tuant au moins 140 personnes (bien que certains bilans laissent entrevoir plus de 20 morts) et en blessant des centaines. La responsabilité a été réclamée par les Moudjahidines du Deccan, un groupe terroriste islamiste jusqu’ici inconnu.
Nos cœurs sont avec les familles, parents et amis qui sont gravement affectés par ces actes haineux, quel que soit le groupe ou l’organisation qui les ait perpétrés. Le gouvernement du Maharashtra (la province dont Mumbai est la capitale) et les autorités concernées devraient immédiatement compenser les familles qui ont perdu un ou des proches. Nous sommes certains que toutes les communautés, qu’elles soient hindoues, musulmanes, ou chrétiennes, sont terrifiées, pas seulement à Mumbai, mais dans le pays tout entier. Les organisations démocratiques des travailleurs, les syndicats et les organisations locales de toutes les communautés doivent organiser la lutte contre le terrorisme au côté de la lutte contre le capitalisme, le féodalisme et l’impérialisme.
Depuis les attaques du 11 septembre aux Etats-Unis, les attaques terroristes se sont multipliées en Inde. Les gouvernements de New Delhi, quel que soit le parti au pouvoir, se sont étroitement alliés avec Washington, une alliance qui a culminé avec l’accord hautement controversé sur l’énergie (et les armes) nucléaire. Au cours des derniers mois, chaque ville indienne d’importance a connu de telles attaques terroristes, tuant des douzaines, si pas des centaines d’innocents.
Polarisation communautaire
Les gouvernements capitalistes du monde entier ont suivi la même politique que l’administration américaine sous la tutelle de George Bush, personnage détesté dans l’ensemble du monde ; cette politique visait à aliéner les peuples musulmans en leur greffant l’étiquette de « terroristes », potentiels ou non. En Inde, la division communautaire historique a été encore renforcée par cette stigmatisation communautaire officieuse des minorités, et en particulier des musulmans.
Les gouvernements des Etats indiens dirigés par le BJP (Bharatiya Janata Party – Parti du Peuple Indien, de tendance centre-droite nationaliste et hindouiste), ou le gouvernement central dirigé par l’UPA (l’UPA, l’United Progressive Alliance, est une coalition de partis, elle-même dirigée par le Parti du Congrès, parti nationaliste laïque à tendance sociale-démocrate), sont directement responsables de la désaffection parmi la jeunesse, et surtout les jeunes musulmans qui, bien qu’en faible nombre, rejoignent les rangs de ces bandes terroristes désespérées.
Pour l’establishment indien, le fait de blâmer soit les membres de l’ISI (Inter-Services Intelligence, les services d’espionnage pakistanais), soit leur bouc émissaire préféré : le SIMI (Students’ Islamic Movement of India), afin de les diaboliser aux yeux de la population, est devenu le schéma habituel. Cela n’enlève absolument rien à la responsabilité de ces groupes monstrueux qui utilisent des méthodes de terreur. Leurs activités renforcent les forces communautaristes hindoues d’extrême-droite et la machine d’Etat qui ne fera qu’utiliser cette opportunité qui lui est offerte de piétiner les droits des travailleurs en particulier et des droits de l’Homme en général.
L’agenda caché de la terreur fondamentaliste hindouiste
Les chroniqueurs de la gauche radicale tels que Ram Punyani et Subhash Gatade se sont déjà étendus sur le phénomène que l’on connaît de nos jours sous le nom de « terreur saffran », celle des organisations fondamentalistes hindouistes. Les récentes explosions à Malegaon (dans le Maharashtra) qui ont mené à l’arrestation de Sadhvi (sainte) Pragya Singh et de ses deux associés, remet en question toute la théorie de la terreur djihadiste elle-même.
Les méfaits de Raj Thackeray, membre du MNS (Maharashtra Navnirman Samithi – Armée de la Rénovation du Maharashtra), un groupe qui terrorise en ce moment dans le Maharashtra les travailleurs immigrés en provenance de l’Uttar Pradesh (un Etat du nord-est de l’Inde, le long du Gange et frontalier avec l’Himalaya, et dont 18% de la population est musulmane), etc. ne sont pas moins terrorisants que la terreur soi-disant islamique.
Pravin Thogadia, la fripouille du VHP (Vishwa Hindu Parishad – Conseil Hindou Mondial), ainsi que l’infâme Narendra Modi, «le Hitler du Goujarat», sont célèbres pour leur politique communautariste qui flirte avec le fascisme. Ces « célébrités » communautaires hindoues doivent également être pointées du doigt. Encore aujourd’hui, des millions de musulmans frissonnent au souvenir de la terreur de masse – viols, meurtres, pillages – qui a été perpétrée à l’encontre des musulmans désarmés du Goujarat (un Etat indien frontalier avec le Pakistan, à forte population musulmane) pendant les émeutes de Godhra en 2002.
Que ce soit la terreur de masse commise par la Sangh Parivar (« Famille d’Associations ») et sa famille composée de la Rashtriya Swayamsevak Sangh, du BJP, du VHP, de la Shiv Sena, de la MNS, de la Sanathan Sanstha, de la Durga Vahini, de la Bajarang Dal, de l’Abhinav Bharat, de l’Akhila Bharatiya Vidyarti Parishad, du Rashtriya Jagaran Manch, du Hindu Raksha Samithi, etc. (Organisation Nationale des Volontaires, Parti du Peuple Indien, Conseil Hindou Mondial, Armée de Shiva, Armée de la Rénovation du Maharashtra, Organisation éternelle, Armée de Durga, Armée des Singes, Nouvelle Inde, Conseil pour tous les Etudiants de l’Inde, Forum pour un Jagran National, Comité de Défense Hindoue), la criminalisation et la brutalisassions de la société toute entière, ou les tactiques de terreur individuelle des groupes djihadistes islamistes, ils polarisent une société déjà divisée. Ils vont pousser la société encore plus loin dans une impasse de haine et de vengeance, qui pourrait même mener à une situation de guerre civile.
Les statistiques et les faits révèlent que le néolibéralisme et le communautarisme se sont renforcés l’un l’autre afin de servir les intérêts du capitalisme en Inde. A partir de 1991, l’offensive néolibérale a coopéré amicalement avec la vague montante de communautarisme hindouiste ; la destruction de la Mosquée de Babri à Ayodhya en 1992 a bel et bien détourné l’attention du mouvement ouvrier loin des problèmes réels que sont le riz et le sambhar (plat de légumes indien), le roti (pain indien) et le sabji (un autre plat de légumes indien).
Unité et action de classe maintenant !
La lune de miel dont a bénéficié le Parti du Congrès s’est visiblement subitement terminée. Les mandarins du Bloc Sud de Delhi (les bureaux des Premier Ministre, Ministre de la Défense et Ministre des Affaires étrangères) qui, jusqu’il y a peu, se complaisaient dans la gloire d’un boom sans précédent et dans l’aura de l’accord nucléaire avec Washington, sont maintenant frénétiquement partis à la recherche de boucs émissaires sur le plan économique aussi bien que social. Le ton suraigu avec lequel le Premier Ministre Manhoman Singh a prévenu les « voisins » de l’Inde de ce qu’ils vont devoir payer, montre bien le désespoir de l’establishment indien. L’idée de sonner le tambour de guerre jingoïste par quelques singeries emphatiques a peut-être traversé les esprits des pouvoirs en place afin de les préserver de la déroute électorale lors des prochaines élections provinciales et, surtout, lors de l’élection générale de la moitié de l’an prochain.
Le BJP et ses sbires, qui se préparent en ce moment à un come-back à l’échelle nationale lors des prochaines élections générales, vont utiliser le sentiment de chagrin et de désespoir qui vit actuellement afin de rallumer le feu communautaire et ainsi prendre avantage de la crise sociale.
La récession qui s’est déjà bien installée dans l’économie va encore plus dévaster les vies des travailleurs pauvres, des paysans et des classes moyennes dans les semaines et mois qui viennent. La période à venir exige toute la combativité que la classe ouvrière peut rassembler afin de défendre les intérêts des travailleurs et des pauvres. La nécessité du moment, c’est l’unité de classe. Nous appelons tous les travailleurs, qu’ils soient hindous, musulmans, chrétiens ou sikh, à être vigilants et unis afin de contrecarrer toute tentative de diviser leur classe sur des bases communautaires sanglantes.
Les syndicats et organisations de travailleurs et de communes doivent agir pour vaincre ces tentatives sinistres de diviser pour régner dans le but d’en tirer un profit politique.
Nous exigeons:
- La justice pour les personnes affectées et de vraies compensations pour les victimes et pour leurs familles
- Des comités de quartiers des travailleurs et des pauvres afin de défendre les zones affectées par des attentats et des émeutes
- Non au terrorisme !
- Une lutte unie et commune des travailleurs et des pauvres pour la justice, contre l’exploitation et la pauvreté
- Aucune confiance dans les forces étatiques officielles. Le droit pour les agents de police et des forces auxiliaires à se syndicaliser et à élire des représentants aux comités régionaux
- La fin du capitalisme qui engendre le communautarisme et le terrorisme !
- Un socialisme démocratique, seule alternative
- Que soient chassés du gouvernement le Congrès, le BJP et les autres partis qui défendent le capitalisme, et n’offrent aucune alternative
- L’édification d’un nouveau parti des travailleurs de masse
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[video] Interview de Jagadish (New Socialist Alternative) sur la situation en Inde
Lors de la réunion du Comité Exécutif International du Comité pour une Internationale Ouvrière, nous avons discuté avec Jagadish, de notre organisation-soeur en Inde. Cette interview est intéressante pour avoir une meilleure compréhension du contexte de la situation actuelle en Inde. L’interview a été réalisée avant les évènements de Mumbai.
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Débat : La spéculation est-elle fondamentale dans les causes de la hausse des prix?
DEBAT
Quelques temps après la publication de notre tract sur la crise alimentaire, nous avons reçu cette lettre d’un lecteur de notre site. Nous la publions ici, ainsi que notre réponse. Vous aussi, n’hésitez pas à réagir vis-à-vis de nos articles, idées, méthodes,… La polémique est souvent une bonne manière d’aller au fond des choses !
Bonjour camarades,
Je voudrais réagir à l’article et au tract intitulés "Prix de l’alimentation. Ils spéculent. Nous payons la note!"
Dans ce texte, il est indiqué que la spéculation est le facteur prépondérant dans la flambée des prix. Je pense que cette analyse est erronée et peut déboucher sur de mauvaises conclusions. Voici en gros, mon analyse :
- 1. Il est clair que la spéculation joue un rôle. Mais pas forcément le 1er rôle. Il faut d’abord regarder les fondamentaux du marché. Or nous sommes dans une situation où la demande augmente de manière régulière depuis plusieurs années, sous l’impulsion des pays émergeants.
- 2. La production ne suit pas la même courbe et les stocks baissent pour atteindre des niveaux très bas ces derniers mois.
- 3. Les coûts de production augmentent fortement (notamment à cause du pétrole). Les petits producteurs ont donc des difficultés à investir pour produire plus, à cause du renchérissement des intrants. Et s’ils peuvent investir, ils ont la possibilité de s’orienter vers les agrocarburants…
- 4. La spéculation vient s’ajouter à tout ceci. Mais la spéculation ne fonctionnerait pas si le marché n’était pas tendu. En d’autres termes, dans un contexte de surproduction, même en achetant des centaines de tonnes de céréales, il sera très difficile de faire monter les prix ne fût-ce que de 1%. Aujourd’hui, beaucoup de denrées alimentaires sont à la limite de la rupture, donc la spéculation peut fonctionner à plein rendement. Sur les matières premières, le déterminant essentiel des prix ce n’est pas l’offre ou la demande mais bien le niveau des stocks ; or, pendant des années on a fait face au surcroît de demande de céréales en puisant dans les réserves, à tel point que celles-ci ont désormais atteint des niveaux proprement intenables, d’où l’extrême violence des "ajustements" actuels, amplifiés par les restockages prudentiels de nombre de pays importateurs… La spéculation n’est donc pas indispensable ni nécessaire pour faire monter les prix. Pour preuve, certaines denrées sont inaccessibles aux spéculateurs (pas de marchés à terme), et les prix ont doublé en quelques mois (ex : les lentilles, le riz…). Il est vrai que le Japon détient des stocks pharaoniques de riz, mais c’est la conséquence d’une contrainte imposée de longue date par l’OMC…
- 5. Les inégalités croissantes de revenus jouent un rôle important dans la flambée des prix, car la différence entre ce que peuvent payer les uns et les autres pour se nourrir est… énorme.
En conclusion, la spéculation joue certes un rôle, mais globalement marginal. Pointer le doigt vers elle, c’est désigner la partie visible (et particulièrement abjecte) de l’iceberg du capitalisme.
Ce qu’il faut dénoncer, c’est le fonctionnement global du système capitaliste : laisser la production des denrées alimentaires, et donc la survie d’une grande partie de l’humanité aux mains des capitalistes, c’est courir à la catastrophe, de manière certaine et répétée. La situation actuelle était prévisible, mais personne n’a voulu l’éviter. Seule une planification démocratique de la production et une organisation structurelle de la surproduction peut faire face aux aléas du climat et à l’augmentation des besoins de la population.
En l’absence d’une telle planification démocratique organisée au niveau mondial, chaque Etat doit avoir le droit de prendre des mesures pour garantir sa sécurité alimentaire.
J.L.
Cher camarade,
Différentes données démontrent le rôle prépondérant de la spéculation dans la hausse des matières premières, notamment de l’alimentation et du pétrole. Cela découle de la crise inhérente au capitalisme. Faute de pouvoir investir dans la production par crainte d’une crise de surproduction, les capitalistes spéculent en injectant leur argent non pas pour de nouveaux appareils dans les entreprises par exemple, mais en entretenant différentes "bulles" économiques. L’éclatement de celles du crédit et de l’immobilier a poussé les spéculateurs à chercher d’autres débouchés chez les valeurs "sures" comme les matières premières. Une récente enquête réalisée par des parlementaires américains et révélée par le Wall Street journal indique par exemple que la spéculation représente autour de 71% des échanges sur le Nymex, le New York Mercantile Excange (bourse spécialisée dans l’énergie et les métaux). En 2000, ce pourcentage était "seulement" de 37%. Il est vrai qu’il ne s’agit pas ici de denrées alimentaires, mais le principe est le même.
Le magazine britannique New Statesman a par exemple publié un article ("La folie commerciale à l’origine de la flambée des prix") qui parle bien sûr de l’augmentation de la population mondiale et de la place occupée par les agrocarburants, mais continue en affirmant que :"Ces facteurs à long terme sont importants, mais ne sont pas les raisons véritables pour lesquelles les prix alimentaires ont doublé ou pourquoi l’Inde rationne le riz ou pourquoi les éleveurs britanniques tuent les cochons pour lesquels ils ne peuvent plus payer la nourriture animale. C’est la crise du crédit. (… la crise alimentaire s’est développée au cours) d’un laps de temps incroyablement court, en essence au cours de ces 18 derniers mois. (…) La raison de la "pénurie" alimentaire est la spéculation sur le marché à termes de marchandises, suite à l’effondrement des marchés à termes des instruments financiers. En désespoir de cause d’obtenir un rendement rapide, les courtiers ont retiré des millions de dollars investis en actions et dans des prêts immobiliers pour les placer dans les denrées alimentaires et les matières premières. A Wall Street, on parle alors de "super cycle des matières premières" et il est probable que cela conduise à une famine à une échelle épique." Avec un certain cynisme, la première banque belge, la KBC, a eu comme slogan pour un de ses "produits" financier: "Tirez avantage de la hausse du prix des denrées alimentaires !".
Sean Corrigan (Diapason Commodities Management, Suisse, en charge d’un portefeuille de 6 milliards de dollars) a déclaré en 2007 que : "S’il y a un ralentissement mondial de l’activité, ça n’affectera pas les produits agricoles car les gens continueront de manger (…) L’acier, le fer et le nickel souffriront, mais les gens continueront d’acheter du pain et des pommes de terre."
De son côté, l’ancien associé de George Soros Jim Roggers disait aussi au même moment "Il y a trois milliards d’asiatiques (…) qui ne perdront pas leur appétit à cause d’un problème aux Etats-Unis.".
Pour Marc Faber, financier spécialiste des matières premières, les prix des matières premières agricoles sont relativement "attractifs". Il précise aussi que les perturbations climatiques vont faire monter les prix.
Il existe, comme tu le mentionnes, différents facteurs qui jouent dans la hausse des prix. Mais la spéculation en est le facteur fondamental. Et au plus les prix augmentent, au plus ils attirent d’autres investissements.
Le Monde Diplomatique, dans son édition de mai, a aussi déclaré que "Les indices agricoles font un tabac auprès des fonds d’investissement. Entre la fin du premier trimestre et la fin du quatrième trimestre 2007 (…) le volume des capitaux gérés par les fonds d’investissement cotés sur les produits agricoles européens a quintuplé" et est passé de 99 millions d’euros à 583 millions. Aux USA, c’est par sept que les fonds d’investissement sur les produits agricoles ont été multipliés l’année dernière…
Mais, bien évidemment, nous nous rejoignons sur la nécessité d’une économie planifiée et sur le fait qu’il faut dénoncer le capitalisme… Laisser à la soif de profit et au chaos du secteur privé des secteurs aussi fondamentaux que ceux de l’énergie et de l’alimentation, par exemple, signifie de laisser consciemment un gaspillage immense s’effectuer, en terme de ressources et de vies humaines.
Pour plus d’informations, nous invitons les lecteurs à lire notre dossier Crise internationale du pouvoir d’achat, crise alimentaire,… Le malheur des uns fait le bonheur des autres!.
Liens:
- Prix de l’alimentation: Ils spéculent, nous payons la note! Tract du MAS/LSP
- Augmentation des prix et crise alimentaire: Ce n’est pas notre faute, ce n’est pas à nous de payer!
- Augmentation des prix, rébellion et pauvreté.
- Rage globale contre les hausses de prix de la nourriture
- Côte d’Ivoire: Lutte victorieuse contre l’augmentation des prix de la nourriture !
- Catégorie "Pouvoir d’achat"
Crise économique (articles du plus récent au plus ancien)
- C’est la crise pour tout le monde… sauf pour les gros joueurs
- Capitalisme en crise. En route vers un tsunami économique ?
- Après une année 2007 agitée : vers une année 2008 explosive!
- Le capitalisme se dirige-t-il vers une crise économique profonde?
- Le capitalisme : un système en crise
- Stagflation: syndrôme d’une maladie chronique
- Une crise économique mondiale est-elle inévitable ?
- Deux millions d’Américains vont perdre leurs maisons, 80.000 leur emploi, mais les Banques Centrales distribuent des centaines de milliards d’euros… aux speculateurs!
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Le malheur des uns fait le bonheur des autres !
Crise internationale du pouvoir d’achat, crise alimentaire,…
Une crise alimentaire aux conséquences effrayantes se développe à l’échelle mondiale. De nombreux observateurs et économistes l’affirment “Dans les mois à venir, des millions de gens vont mourir de faim”. Tous pointent du doigt les immenses dangers de cette crise.
Cette crise n’est pas l’effet temporaire de l’un ou l’autre désastre naturel. Une intervention humanitaire à grande échelle ne suffira pas à faire face à la crise alimentaire actuelle, qui touche des centaines de millions de pauvres pour qui les produits de base deviennent bien trop cher.
Le débat concernant les causes de cette crise et les mesures à prendre est intense. Pour les uns, la réponse réside dans le « libre marché » et toute mesure de limitation des prix ou de contrôle des exportations est donc à proscrire. Pour les autres, c’est au contraire dans la limitation et la correction de ce “libre marché” que se trouve la solution.
Les raisons pour lesquelles plus de 100 millions de personnes sont venues – en quelques mois ! -grossir les rangs du milliard de pauvres (ceux qui vivent avec moins de 1 dollar par jour) qui existait déjà sont les mêmes que celles qui sont à la base des profits record de bon nombre de grandes sociétés agroalimentaires. Des mastodontes comme Monsanto, Cargill, Mosaic, Syngenta, Unilever, Nestlé, Wal-mart et autres producteurs de graines génétiquement modifiées, de produits agricoles, d’autres produits à base de soja, de maïs ou de blé, d’engrais,… ont augmenté leurs profits jusqu’à parfois 70% !
Les pauvres et les classes moyennes du monde néocolonial ne sont pas les seuls à subir les conséquences désastreuses de l’augmentation des prix. Chez nous aussi, la crise du pouvoir d’achat fait exploser la part du budget des familles consacrée à la nourriture et à l’énergie.
Quelles sont les causes de ce “choc des prix alimentaires” ?
Une demande qui augmente…
Plusieurs spécialistes parlent de l’augmentation de la demande des pays dits “émergents” comme le Brésil, l’Inde, la Chine,… Ces pays ont connu une croissance économique allant de 5 à plus de 10% sur base de la croissance de l’économie mondiale. Jusqu’au milieu de l’année 2007, l’euphorie était générale vis-à-vis de cette croissance et du développement des classes “moyennes” qui promettaient, à terme, l’abolition de la pauvreté.
Durant ces années, des centaines de millions de gens ont ainsi pu augmenter un peu leur consommation alimentaire. Mais l’impact de cette augmentation ne doit pas être surestimé. D’abord, parce que la pauvreté est loin d’avoir disparu. Trois milliards de gens vivent avec moins de 2 dollars par jours, dont un milliard (une personne sur six) avec 1 dollar ou moins par jour ! Ensuite, parce qu’au cours des quatre premiers mois de 2008, ils ont déjà perdu en moyenne 0,20 dollar, une bouche en moins dans une famille de cinq (De Morgen, 26/04/08) et que la crise économique qui se développe risque de doubler ce nombre et d’effacer l’essentiel des gains des dernières années !
… et une offre limitée
Au cours des 20 dernières années, les investissements dans l’agriculture ont chuté vertigineusement et la productivité a suivi. L’hebdomadaire britannique The Economist (19/04/08) a ainsi écrit que “les investissements publics dans l’agriculture du monde néocolonial ont diminué de moitié entre 1980 et 2004. (…) Nous payons le prix de 15 années de négligence”.
Mais il ne s’agit nullement de négli-gence mais au contraire d’une politique consciente aux conséquences catastrophiques. Le néolibéralisme a transformé des pays producteurs de nourriture en pays importateurs et a mené en général au sous-emploi et au sous-investissement dans l’agriculture pour la simple raison que ce n’était pas assez rentable. Le commerce dans les pays du Tiers-Monde a été « libéralisé » sous les pressions du FMI et de la Banque Mondiale pour favoriser les importations provenant des Etats-Unis et de l’Europe alors que ces derniers ont continué à protéger leurs propres marchés. Résultat: la production locale a été balayée. Les progrès technologiques (meilleurs engrais, graines,…) ne sont accessibles qu’à ceux qui disposent de gros capitaux. Les petits paysans du monde néocolonial sont donc privés de ces progrès.
Des pays qui étaient hier auto-suffisants en termes de production de nourriture sont devenus dépendants de l’importation et en paient aujourd’hui le lourd prix. La nourriture importée est devenue inabordable pour des millions de personnes sans qu’une production de nourriture locale puisse la remplacer. De plus, les stocks mondiaux de nourriture ont baissé jusqu’au minimum absolu, ce qui est très attractif pour les spéculateurs !
Agrocarburants: une solution face au prix du pétrole ou un crime contre l’humanité ?
Les prix toujours plus élevés de l’énergie, la très grande instabilité politique et sociale dans les pays producteurs de pétrole ainsi que les conséquences dramatiques du réchauffement climatique – pas seulement dans le monde néocolonial (qui n’a jamais eu d’intérêt décisif pour le capitalisme mondial) mais ici aussi, dans le monde industrialisé – ont obligé les gouvernements et les grands groupes capitalistes à porter leur attention sur des formes “alternatives” ou “vertes” d’énergie.
Aux Etats-Unis, la production alimentaire laisse une place grandissante à celle d’agrocarburants, comme c’est déjà le cas au Brésil depuis longtemps. L’Europe suit une pente identique. Fidel Castro a été l’un des premiers à montrer du doigt les conséquences perverses de cette politique mais aujourd’hui, même un rapporteur de l’Organisation des Nations-Unies parle des subventions accordées aux agrocarburants comme “d’un crime contre l’humanité”. Le problème, c’est qu’il n’existe tout simplement pas de solution écologique et humaine dans le cadre du capitalisme. Les agrocarburants sont aujourd’hui plus lucratifs et plus attractifs pour le capital, et tant pis si cela engendre de nouveaux problèmes. Le bonheur des uns fait la mort des autres !
L’élément déterminant: la spéculation
La fuite des capitaux du marché immobilier vers celui des matières premières, c’est-à-dire d’une bulle spéculative à une autre, est d’une importance décisive dans les augmentations de prix. Le capital, uniquement intéressé dans un maximum de retour sur investissement, s’est trouvé un nouveau “refuge”.
La patronne de la société ADM (multinationale spécialisée dans la vente et la transformation de grains) a déclaré: “la volatilité sur le marché des matières premières présente des opportunités sans précédent”. Ce n’est pas du cynisme, c’est de l’économie. De l’économie de marché, plus précisément.
Les crises récentes du marché immobilier, du crédit et de l’alimentation font chanceler les économies, créent de l’instabilité et mettent en danger les gouvernements. L’euphorie qui régnait encore au début de l’an dernier a totalement disparu. Aux Etats-Unis, où la crise est plus avancée, des centaines de milliers de gens ont perdu leur maison ou leur emploi, voire les deux. Un sérieux ralentissement de la croissance mondiale arrive à grands pas. Bien que des milliards de dollars et d’euros se soient évaporés, la recherche de profits continue et le pétrole, l’or et les matières premières sont devenu le nouvel eldorado. Personne ne va investir dans la production dans une période de déclin du pouvoir d’achat.
L’économie mondiale est prise dans une spirale descendante et nous allons en subir les conséquences.
Un monde politique sous pression et profondément divisé
Des protestations massives autour du pouvoir d’achat et de l’alimentation (les fameuses émeutes de la faim) se sont développées partout à travers le monde depuis le début de l’année. Dans beaucoup de pays, les travailleurs sont passés à la lutte collective et des victoires ont été obtenues, comme les fonctionnaires en Syrie et en Egypte qui ont obtenu jusqu’à 30% d’augmentation salariale.
La peur s’est installée. Des insti-tutions internationales comme la Banque Mondiale, le FMI ou l’ONU organisent des réunions, discutent,… mais ne trouvent pas de solutions viables. Bien entendu, il subsiste encore des fous libéraux qui appellent à plus de libre marché et à l’abolition des subventions et des limitations commerciales. Mais, sous la pression, la politique dominante des 20 dernières années commence à être mise en question et une tendance vers le protectionnisme et les interventions de l’Etat se développe. Des mouvements de masse, ou même parfois seulement la crainte de protestation, ont déjà forcé des gouvernements à prendre des mesures précédemment considérées comme hérétiques. Plus de 30 pays ont pris des mesures de limitation des exportations, de contrôle des prix, de subvention alimentaire,… pour tenter de contrer la spéculation.
Tout cela peut temporairement et localement atténuer les problèmes. Nous sommes évidemment favorables à chaque amélioration à court terme et nous luttons pour en obtenir mais nous devons aussi prévenir des limites de ce type de mesures, et particulièrement du protectionnisme. Un contrôle des prix sans contrôle de la production et de la distribution conduit à des étagères vides dans les supermarchés et à la pénurie parce qu’il est plus avantageux pour les producteurs de se diriger vers le marché noir. Une augmentation des taxes pour les multinationales mène à une fuite des capitaux et de la production. Limiter les exportations alors qu’il n’y a pas assez de consommation locale peut pousser les paysans contre les autres travailleurs et le gouvernement local.
En fait, œuvrer pour le bien des masses de pauvres et de travailleurs tout en essayant de donner un os à ronger aux propriétaires du capital est un grand écart impossible à réaliser.
Une soi-disant « troisième voie » qui prétende sauvegarder à la fois les intérêts du travail et ceux du capital est un cul-de-sac.
Food, not profit !
Un programme socialiste contre le “libre” marché capitaliste
Des protestations massives peuvent temporairement obliger les gouvernements et les entreprises à investir dans l’approvisionnement alimentaire ou les services publics, à produire en respectant mieux l’environnement, à payer des salaires qui suivent le coût réel de la vie,… à céder, donc, une part plus grande de leurs profits aux travailleurs et à leurs familles. Mais pour réaliser des changements fondamentaux, nous devrons nous en prendre au système de profit en lui-même.
Cette crise alimentaire ne se solution-nera pas avec des sparadraps, il faut une approche mondiale, une planification de la production et de la distribution de nourriture sous le contrôle de la collectivité. Seule la classe ouvrière peut l’imposer en s’organisant, en luttant pour conquérir des droits syndicaux et politiques, en construisant des partis politiques qui défendent réellement ses intérêts et enfin en prenant elle-même le contrôle de la société.
Les banques et le système financier jouent un rôle important dans cette crise. Nationaliser ce secteur et en utiliser les moyens pour le bien commun permettrait des investissements énormes dans une production de nourriture efficace, planifiée et respectueuse de l’environnement.
Les nationalisations ont longtemps été considérées comme irréalisables, mais la crise du crédit a mis une fin à cette idée. Ces derniers mois, aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne, de grandes banques et institutions financières ont été nationalisées pour éviter des faillites qui auraient pu causer de grands problèmes au système financier et à toute l’économie.
Partout, les banques ont reçu des garanties que leurs dettes seraient si nécessaire reprises par l’Etat, ce qui a incité les marchés à calmement continuer comme avant : la collectivité payera bien pour la spéculation quand ça tournera mal…
Les travailleurs et les pauvres, où que ce soit, ne reçoivent pas ces garanties. Pourtant, ce sont eux qui produisent la richesse. Si les grandes banques peuvent être « sauvées » avec de l’argent public, pourquoi ne pas les nationaliser pour assurer à chacun assez de nourriture variée ou pour garantir l’emploi et les revenus ainsi que des services publics de qualité, notamment dans des secteurs comme l’enseignement et les soins de santé ? Ces idées ne sont pas neuves. L’expérience du mouvement ouvrier nous apprend qu’un programme de nationalisations ne peut être une solution que dans un système démocratique où le contrôle et la gestion sont assurés par les travailleurs.
Cela est nécessaire tant pour assurer que des gouvernements corrompus et les riches élites n’accaparent les profits que pour garantir une efficacité et une planification à l’échelle nationale et internationale.
L’augmentation des prix et la pénurie alimentaire peuvent conduire à de grands mouvements révolutionnaires qui, faute de solution dans le système de profit, chercheront nécessairement une solution au-delà les limites du capitalisme. Des gouvernements de gauche en Amérique Latine, comme au Chili au début des années ’70 et au Venezuela aujourd’hui, illustrent ce qui est possible, même si une fraction seulement de la richesse est utilisée dans l’intérêt commun. Mais ce type de mesures est insuffisant pour abolir la pauvreté et la misère.
Les moyens de production doivent être dans les mains des travailleurs pour pouvoir utiliser la richesse, la technique et la nature dans les intérêts de l’homme et de l’environnement. Le vieux slogan “socialisme ou barbarie” est aujourd’hui plus actuel que jamais.
Liens:
- Prix de l’alimentation: Ils spéculent, nous payons la note! Tract du MAS/LSP
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Crise économique (articles du plus récent au plus ancien)
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Birmanie : Le désastre du cyclone. Les richesses et les privilèges passent avant l’aide.
Birmanie : Le désastre du cyclone.
Les effets effroyables du cyclone qui a frappé le vaste delta du fleuve Irrawaddy ont choqué partout à travers le monde. Mais le régime militaire s’avère incapable d’aider les victimes. La dévastation ainsi que le nombre de décès et de blessés sont probablement plus grands que ceux qui ont été entraînés par le tsunami de 2004.
Keith Dickinson, Socialist Party (section de notre internationale en Angleterre et Pays de galles).
Jusqu’ici, il est possible que 100.000 personnes aient décédé et 1,5 million de personnes sont en danger. Les travailleurs et les paysans luttaient déjà avant simplement pour survivre sous les privations et la répression du régime militaire, maintenant, dans les secteurs frappés par le cyclone, des millions de personnes souffrent également du manque d’abri, de la famine et de la propagation de maladies.
Dans ce pays grand producteur de riz, ce sont les principales régions productrices de riz qui ont été frappées. Dans les médias britanniques, il a été dit que certaines des installations gazières et pétrolières en mer d’Andaman pourraient également avoir été endommagées par le cyclone, ce qui pourrait grandement préoccuper les généraux au pouvoir.
Ces généraux ont principalement été financés par l’exploitation des gisements de gaz naturel et d’autres ressources minérales. L’année dernière, la Thaïlande voisine a importé de Birmanie pour 2,7 milliards de dollars en gaz naturel, ce qui représente 45% de toutes les exportations birmanes. L’investissement thaï en Birmanie s’est élevé à 1,34 milliards de dollars et continue d’augmenter.
Le militant des droits de l’homme Benedict Rogers a écrit avant l’arrivée du cyclone dans la revue Far East Economic Review que le premier ministre thaï a décrit les généraux, après avoir conclu une nouvelle affaire d’investissement avec eux en mars, comme de « bons bouddhistes » parce qu’ils « ont médité », en dépit de leur massacre de moines bouddhistes en septembre passé.
En février, le dirigeant de la Karen National Union, le plus grand groupe ethnique armé birman, a été assassiné en Thaïlande sur les ordres du régime birman, probablement avec l’assentiment des autorités thaïes. En mars, la police thaïe a fait des raids contre 14 organisations Karen en exil en Thaïlande.
Ainsi le gouvernement thaï a « améliorer ses relations » avec les généraux birmans. Les gouvernements occidentaux l’incite maintenant à convaincre les généraux – qui résistent énergiquement à toute intervention extérieure – de permettre à la charité des travailleurs occidentaux d’organiser l’aide et la distribution de vivres désespérément requise.
Il est intéressant de noter que le ministre des affaires étrangères thaï a déclaré que les généraux birmans sont inquiets de l’aide occidentale après les invasions de l’Irak et de l’Afghanistan. En septembre passé, un des commentateurs du gouvernement birman a condamné les « puissances globales qui pratiquent l’hégémonisme ». La nouvelle prétendue « constitution » birmane, conçue pour préserver la dictature militaire, comprend des clauses qui interdisent le stationnement de troupes étrangères en Birmanie.
Les gouvernements du monde condamnent le manque de démocratie du régime birman, mais ce ne sont pas les intérêts des birmans qui les préoccupent, mais bien les efforts des généraux birmans pour limiter l’influence et l’exploitation des puissances impérialistes afin de défendre leurs propres richesses et privilèges. Tandis que les différents gouvernements invitent leurs propres travailleurs – déjà frappés par la crise du crédit – à faire des dons pour organiser l’aide après le passage du cyclone, ils courtisent le régime birman.
La Russie fournit de la formation nucléaire, de la technologie, de l’équipement et des armes à la Birmanie. L’Inde continue à investir et le Japon possède 19,3% du gisement de gaz naturel de Yetagun, entre autres projets importants, alors que Singapour est l’endroit préféré des généraux pour encaisser l’argent, l’investir, faire des achats, obtenir des soins médicaux, instruire leurs enfants et faire leurs accords sur les armes.
Chine
Le monde des entreprises de Grande-Bretagne, des USA et de France investissent eux aussi en Birmanie, mais c’est la Chine qui est le principal appui économique des généraux birmans, et le pays leur donne accès à l’Océan Indien.
Avant le cyclone, le secrétaire général de la fédération birmane des syndicats a déclaré: « Quand le régime était sur ses genoux en 1998, les compagnies Chevron et Total l’ont remis sur pieds. C’est la même situation maintenant. Politiquement, le régime est dans un mauvais état. Mais c’est l’argent de Chevron et de Total qui leur permet de tenir. Ainsi, c’est la politique des multinationales qui soutient le régime. »
Le peuple birman doit se débarrasser du régime répressif ; il a démontré à de nombreuses reprises, comme en 1988 et l’année dernière, sa capacité et volonté de lutter pour surmonter tous les obstacles afin d’améliorer son sort. Mais il ne peut compter que sur l’action et l’aide internationale des travailleurs et non sur « l’aide » des gouvernements capitalistes.
Après les dévastations causées par le cyclone, alors qu’il est urgent d’obtenir l’approvisionnement en nécessités de base pour tous ceux qui en ont besoin, il est également nécessaire de reconnaître, comme un auditeur l’a fait remarqué à une radio, que: « la résistance et les ressources des Birmans à travailler en tant que collectivité pour s’entre aider». C’est évident après deux semaines, et cela le sera encore plus en changeant de régime.
Les profits, pas les droits de l’homme.
Le pipeline de pétrole et de gaz naturel de Yadana passe à travers la Birmanie du Golfe d’Andaman vers la Thaïlande. Ce pipeline, dont les associés sont Total et Chevron, a entraîné le travail forcé des masses ainsi que d’autres abus des droits de l’homme commis par l’armée sous l’œil bienveillant des multinationales. Durant les protestations pro-démocratiques de l’année dernière sous la conduite des moines bouddhistes et qui ont été brutalement réprimées par les généraux birmans, un porte-parole de PTTEP, un partenaire thaï de Total, a déclaré: « Les affaires continuent comme d’habitude. Je ne vois aucun impact dans un avenir proche » du malaise. « Quand nous avons un contrat avec un gouvernement, il n’importe pas vraiment de savoir quel gouvernement c’est. »
Liens
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