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  • Jeremy Corbyn: quel type de parti pour les travailleurs et la jeunesse?

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    Le Parti travailliste britannique est le champ de bataille d’un combat acharné entre la gauche et la droite. Le résultat de cette épreuve de force est très attendu en Europe et au-delà. Jeremy Corbyn, le président de gauche du parti, parviendra-t-il à retirer le Labour des griffes de l’appareil bureaucratique pro-austérité du parti ? Pourrait-il développer un nouveau modèle de parti des travailleurs contrôlé par la base ?

    Par Peter Delsing

    La droite du Labour a déclenché une procédure de réélection pour la présidence et, en dépit de la manœuvre qui a fait grimper les cotisations des membres à 25£, au moins 183.000 personnes ont à nouveau adhéré. Aucun parti – de gauche ou de droite – ne peut se vanter d’avoir connu un tel afflux en Europe ces dernières années. Les meetings de Jeremy Corbyn bénéficient partout d’une présence massive. A Liverpool, plus de 10.000 personnes se sont retrouvées dans les rues.

    Corbyn essayera-t-il de maintenir une nuisible ‘‘unité’’ avec ses opposants néolibéraux ? L’appareil bureaucratique du Labour – soutenu par les médias – pourrait réussir à l’éjecter à un certain stade. Soit maintenant, au cours des nouvelles élections pour la présidence du parti où lui fait face Owen Smith, soit plus tard.

    Une revanche de l’Histoire

    Depuis le milieu des années ’70, le capitalisme est en crise latente. La période post-stalinienne ouverte après 1989 a conduit la social-démocratie encore plus loin des idées du socialisme. Ses dirigeants ont ouvertement adopté le ‘‘libre marché’’, la privatisation et les coupe antisociales dans les salaires, les allocations sociales et les pensions. Cette absence de ‘‘boussole de classe’’ claire, a ouvert la voie à la croissance du populisme de droite et parfois même de l’extrême droite.

    C’est surtout depuis que la crise de 2008 a éclaté que de nouveaux courants de gauche ont fait une percée. En Grèce il y eut l’émergence et la chute de SYRIZA, le développement de Podemos en Espagne et, bien sûr, l’impressionnant mouvement autour de Bernie Sanders. Ces développements politiques se sont construits sur l’essor des conflits sociaux: les Indignés, les occupations de place, le mouvement Occupy aux Etats-Unis,… La lutte contre l’élite capitaliste et leur exploitation pousse inévitablement à la recherche d’une issue, pas toujours sans ambiguïté, comme ce fut le cas avec le référendum sur le Brexit qui est essentiellement une révolte de la classe des travailleurs contre l’establishment et son projet européen.

    Il est temps de choisir: un tournant à gauche ou foncer vers le précipice avec la droite?

    Le challenger de Corbyn, Owen Smith, essaye naturellement de se profiler à gauche au vu du contexte actuel, mais il se veut le garant d’un Labour inoffensif pour la classe dirigeante et les carriéristes. Peut-être Corbyn parviendra-t-il à nouveau à remporter les élections. 234 des 275 réunions locales du Parti qui se sont tenues en août pour désigner leur candidat ont choisi Corbyn.

    Dès le début, la droite a organisé une offensive pour saboter sa présidence, parfois concernant des choses insignifiantes. Portait-il une cravate? A-t-il chanté l’hymne national britannique ? N’a-t-il pas montré bien peu d’enthousiasme pour l’Union européenne néolibérale ? La droite a essayé d’exclure de nombreux nouveaux membres, puis a considérablement augmenté le montant de leurs cotisations. Des dizaines de milliers de personnes ont été exclues pour avoir affiché sur les médias sociaux leurs critiques de l’aile droite du Labour. Il a même été interdit aux réunions locales du parti de se réunir et de discuter de la situation actuelle, sauf pour désigner leur candidat à la présidence.

    Malheureusement, Corbyn s’est initialement montré trop conciliant envers l’aile droite. Il a changé de position pour soutenir l’Union européenne. Il s’est prononcé contre la révocation des députés s’ils ne reflétaient pas l’opinion de la majorité démocratique du parti ou s’ils participaient à la politique d’austérité. Il a également refusé que le Labour s’oppose à l’austérité à l’échelle communale et défende des budgets publics visant à mobiliser la rue pour exiger davantage de moyens du gouvernement et des plus riches.

    Malgré cela, son programme de renationalisation des chemins de fer, en faveur d’un salaire minimum et en défense des droits syndicaux trouve un écho. Cette guerre civile politique entre deux ailes représentant des intérêts de classe irréconciliables ne peut pas tout simplement être reléguée au frigo. Le groupe autour de Jeremy Corbyn s’est jusqu’ici limité à des perspectives purement électoralistes en essayant de temporiser les choses jusqu’à une victoire électorale en 2020 qui changerait tout. Cette perspective n’est pas réaliste.

    Un instrument démocratique pour la classe des travailleurs

    Ce que le capital et la bureaucratie travailliste craignent par-dessus tout, c’est la victoire électorale d’un Labour fondamentalement renouvelé par l’implication de la classe des travailleurs et qui aurait absorbé leur défense jusqu’en son cœur. Ils tremblent face à la perspective d’un Labour radicalisé dans une situation déjà rendue périlleuse suite au vote sur le Brexit.

    Selon le parti frère du PSL, le Socialist Party, l’enthousiasme basé sur le programme Corbyns doit être libéré des entraves bureaucratiques du parti. Il faudrait refonder le Labour en organisant une grande conférence destinée à rassembler tous ceux, du Labour ou non, mouvements ou individus, qui veulent s’opposer au néolibéralisme. Un tel parti fonctionnerait mieux de manière fédérative (au lieu d’être fortement centralisé), ouverte et inclusive, en assurant la prépondérance de sa base de masse active dans la prise des décisions politiques et organisationnelles centrales. Le Socialist Party participerait avec enthousiasme à un tel projet démocratique. L’expérience de la social-démocrate, des bureaucraties staliniennes du passé, de nombreux dirigeants syndicaux et de leurs approches hiérarchiques et exclusive ne fonctionnerait pas et ne serait pas acceptée par les militants du parti ou syndicaux.

    Cela conduirait à une scission? Oui. Mais quelle situation serait la plus favorable aux travailleurs ? Un parti dont les centaines de députés votent pour l’austérité et la guerre? Ou un nouveau parti avec quelques dizaines de membres au Parlement mais qui, avec un programme vraiment à gauche et un passé sans tâche, pourrait certainement réaliser une percée impressionnante ? Si ce parti s’implique dans les luttes syndicales, les campagnes de quartiers,… il pourra rapidement devenir un parti de millions de travailleurs et de jeunes. Un tel parti de masse serait un gigantesque laboratoire d’idées et de lutte pour une société socialiste démocratique.

    Le spectre du trotskysme dans les médias capitalistes

    Le parti frère du PSL, le Socialist Party, a été touché par la campagne de diffamation des médias de masse contre Jeremy Corbyn. Des figures de droite du parti travailliste ont, avec le soutien des journaux et de la télévision, tenté de démontrer l’existence d’une ‘‘infiltration trotskyste’’. Ils espéraient que Corbyn allait en pâtir par association d’idées.

    Mais contrairement aux affirmations de l’aile droite, les méthodes du Socialist Party (ex-Militant) ne reposent pas et n’ont jamais reposé sur l’intimidation ou les complots. La véhémence de nos détracteurs visait particulièrement les succès du passé de notre organisation: la lutte massive de la ville de Liverpool sous la direction de Militant en pleine ère de Thatcher, où le conseil communal a réussi à arracher 60 millions de livres des autorités nationales pour des budgets sociaux, et bien sûr, la campagne contre la Poll Tax durant laquelle 18 millions de personnes ont refusé de payer cette taxe et ont ainsi mis fin au règne de Margareth Thatcher.

    Trotsky a lutté contre la bureaucratie stalinienne ainsi qu’en défense de la démocratie soviétique et d’un système multipartite, mais reposant sur l’économie planifiée et la lutte pour le socialisme international. Il fut, avec Lénine, le principal dirigeant et théoricien de la Révolution russe.

    Aux yeux de l’establishment capitaliste, cet héritage de défense implacable du drapeau rouge et des meilleures traditions du mouvement ouvrier ne doit évidemment pas être redécouvert par les nouvelles générations. Pourquoi ? Parce que ce sont des idées et une organisation qui peuvent changer le monde.

  • Grande-Bretagne: L'insurrection Corbyn. Finissons-en avec la droite!

    Jeremy-Corbyn

    Jeremy Corbyn semble bien être en route pour être à nouveau élu à la tête du Parti travailliste (le Labour) ce mois de septembre. Mais la lutte acharnée et amère que lui mène la droite démontre qu’il ne peut y avoir aucun compromis avec les représentants du capitalisme au sein du Parti travailliste. Cette fois, il faut en finir et véritablement transformer le Labour en un parti socialiste anti-austérité. L’article suivant est publié dans l’édition de septembre de Socialism Today, le magazine de nos camarades du Socialist Party.

    Par Hannah Sell, Socialist Party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et au Pays de Galles)

    La guerre civile en cours dans le Parti travailliste atteint un nouveau pic d’intensité. La majorité anti-Corbyn des députés travaillistes (le Parliamentary Labour Party, PLP) et l’appareil du parti mènent une campagne tout aussi désespérée que dégoûtante pour tenter de reprendre le contrôle de la situation. Ils ont face à eux un véritablement mouvement de la classe ouvrière et de la jeunesse. Ces derniers ont fait irruption sur la scène de l’Histoire et exigent de faire entendre leur voix. La «bulle de Westminster» (siège du Parlement britannique) qui a passé des décennies à complaisamment accepter les coupes budgétaires, l’austérité et les privatisations a le sentiment d’être soudainement menacée par des «barbares frappant à sa porte». L’ensemble de l’establishment capitaliste a tout d’abord été secoué par le vote sur le Brexit et, maintenant, les tentatives de se débarrasser de Jeremy Corbyn sont contrecarrées par une énorme vague de soutien pour le dirigeant travailliste qui déborde des limites de la politique habituelle.

    Ces dernières semaines ont eu lieu les plus grands rassemblements de masse de la gauche depuis des décennies, à Liverpool, Hull, Leeds, Bristol et dans de nombreuses autres villes. Des 275 réunions locales qui se sont tenues pour désigner leur candidat à la présidence du parti, 234 ont à ce jour choisi Corbyn, avec la plupart du temps une participation de centaines de personnes. Cette «deuxième vague» venue à la rescousse de Corbyn est encore plus grande que la première qui lui avait permis d’être élu à la tête du parti l’an dernier. Elle comprend également un plus grand nombre de travailleurs au côté de l’importante couche de jeunes radicalisés qui avait dominé la première vague.

    Toutes les forces de l’establishment capitaliste, à l’intérieur et à l’extérieur du Labour, tentent de vaincre ce mouvement regroupé derrière Jeremy Corbyn. La décision de la Cour d’appel de soutenir celle du National Executive Committee travailliste d’interdire le droit de vote aux 130.000 nouveaux membres ayant rejoint le Labour après le 12 janvier n’est que le dernier exemple en date du soutien que l’establishment capitaliste est capable de donner aux manœuvres les plus antidémocratiques qui soient de la part de la droite du parti. Un incroyable nombre de 183.000 personnes ont payé les 25£ pour s’enregistrer comme supporters du Labour en 48 heures seulement. Mais il a été signalé que plus de 40.000 d’entre eux vont être exclus pour des raisons qui incluent notamment d’avoir apparemment eu la témérité de qualifier les députés «blairistes» (partisans de la ligne droitière de Tony Blair) de “traîtres” sur les réseaux sociaux. Toutes les réunions des sections locales du Labour ont été annulées, à l’exception de celles consacrée à la nomination du candidat. Un certain nombre de réunions de partisans de Corbyn ont été annulées pour des motifs fallacieux.

    Étant donné jusqu’où la droite est prête à aller pour essayer de l’emporter, ce serait une erreur de faire preuve de complaisance. Les médias capitalistes mènent une campagne électorale unilatéralement en faveur du challenger de Jeremy Corbyn, Owen Smith. Ce dernier a remarquablement tenté de se profiler à gauche, une stratégie désespérée visant à faire appel aux partisans radicalisés de Corbyn. Il a même prétendu être favorable à une «révolution socialiste»! Parallèlement, il a tenté de s’attirer les voix de ceux qui avaient voté pour le maintien de la Grande-Bretagne à l’intérieur de l’Union européenne durant le référendum sur le Brexit en se disant favorable à la tenue d’un second référendum sur l’appartenance à l’UE. L’axe central de sa campagne est cependant que Corbyn est «inéligible» et divise le Parti travailliste, suggérant ainsi que la seule voie pour un gouvernement travailliste passe par son élection. Une couche plus passive de gens pourrait être affectée par cet assaut des médias.

    Jusqu’à présent, la droite semble s’être révélée incapable d’empêcher la réélection de Jeremy. Sa victoire, particulièrement avec une marge confortable, ferait à juste titre le plaisir des centaines de milliers de personnes qui ont rejoint la bataille contre les blairistes. Mais cela ne sera encore que le début et non la fin de cette bataille. Il n’y a aucune chance que la droite accepte l’autorité de Jeremy Corbyn. Elle l’a elle-même explicitement dit. L’ancien conseiller de Tony Blair, John McTernan, a carrément déclaré : «Les révolutions sont inévitablement sanglantes et, n’ayons aucune illusion, reprendre le Parti travailliste des mains de Jeremy Corbyn et John McDonnell nécessite une révolution.» Les gens tels que McTernan sont les véritables «entristes» dans le Parti travailliste, non pas favorables à la révolution, mais à la contre-révolution. Cet homme a encore récemment appelé les conservateurs (les Tories) à «écraser les syndicats des cheminots une bonne fois pour toutes» (The Telegraph, 10 août 2016). De tels propos ne devraient pas prendre place dans un parti précisément historiquement créé par les syndicats afin de promouvoir les intérêts de la majorité de la classe ouvrière.

    L’essence de la lutte en cours dans le Parti travailliste se résume aux intérêts de classe qu’il défendra à l’avenir. Défendra-t-il la classe ouvrière, majoritaire dans la société, et la classe moyenne sans espoir pour l’avenir ou alors l’élite capitaliste ? La droite utilisera tous les moyens nécessaires pour faire à nouveau du Parti travailliste un outil fiable pour les capitalistes. Cependant, à l’heure actuelle, rien ne les pousse à imaginer disposer de beaucoup de chances de succès. Ils titubent sous le choc d’une classe ouvrière radicalisée qui ose désormais intervenir dans «leur» parti et menacer leurs carrières.

    Le Financial Times a publié le 24 juillet dernier un article indicatif de leur détresse, sous la plume du député Jon Cruddas, qui défendait que le «parallèle historique le plus proche (…) ne se trouve pas dans à Westminster, mais à Berlin en 1918», au moment de la révolution allemande. Il compare les députés anti-Corbyn à «Friedrich Ebert [qui] a dirigé le parti social-démocrate (SPD)» et le mouvement en faveur de Jeremy Corbyn aux révolutionnaires «Spartakistes, dont Rosa Luxemburg et Karl Kautsky, [qui] qui ont reçu [leur légitimité] du mouvement des travailleurs, des comités d’usine et des comités ouvriers.» Il ajoute que «Ebert a finalement lâché les Freikorps contre les dirigeants de l’insurrection», ce qui a conduit à l’assassinat de Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht. Il ne propose pas l’assassinat comme un moyen de sortir de la situation qui prévaut actuellement dans le Labour, mais il est très clairement désespéré.

    Une scission de droite ?

    L’une des possibilités est que la droite finisse par scissionner du parti pour constituer une nouvelle formation à la suite de l’élection de la direction. Owen Smith lui-même a déclaré : «Je pense qu’il y a toutes les chances que le parti se divise si Jeremy remporte cette élection.» Bien sûr, à ce stade, personne ne va admettre qu’il à l’intention de faire scission. Mais c’est toujours le cas dans une situation de guerre : tout le monde continue de parler de paix jusqu’au moment de déclarer la guerre.

    Il est toutefois frappant de constater à quel point la droite envisage ouvertement cette possibilité. Il a été révélé que Stephen Kinnock était au centre d’une discussion portant sur une scission de 150 députés du Labour pour créer un nouveau parti. Un tel parti, qu’importe s’il parvient ou non à garder le nom «Labour» serait en mesure de devenir l’opposition officielle (le plus grand parti d’opposition) et donc de recevoir environ 4 millions £ par an de subventions parlementaires. Kinnock envisage la possibilité d’une scission rapide afin de disposer de suffisamment de temps pour constituer un parti de «centre-gauche», c’est-à-dire pro-capitaliste, avant la tenue de nouvelles élections générales.

    Il est cependant toujours possible que la droite hésite et entretienne l’espoir de renverser Corbyn à un moment donné, où que certains quittent le parti tandis que d’autres y restent. Tout comme George Eaton l’a écrit dans le New Statesman: «Nombreux sont ceux qui croient aujourd’hui que ce n’est qu’à travers une élection générale que la lutte interne du parti sera résolue.» Ce qu’ils veulent dire par là est qu’ils attendent que la Première Ministre Teresa May appelle à des élections anticipées donnant la victoire aux Conservateurs pour que la droite puisse espérer vaincre Corbyn et le forcer à démissionner!

    C’est espoir est vain. Il est impossible de dire aujourd’hui si Teresa May appellera oui ou non à des élections anticipées. Même s’il est peu probable qu’elle finisse son mandat en 2020 étant donné l’extrême faiblesse de son gouvernement de même que les profondes divisions au sein du Parti conservateur qu’elle n’a pu que temporairement calmer, d’importantes raisons la poussent à hésiter avant de convoquer immédiatement de nouvelles élections. Premièrement, il y a les conséquences du Brexit. La stratégie actuelle des capitalistes est de faire trainer les choses en longueur autant que possible et d’espérer que l’occasion se présente de faire marche arrière. Ce n’est pas un thème sous lequel Teresa May pourrait battre campagne et espérer remporter une élection générale !

    L’autre problème, c’est qu’en dépit des sondages actuels qui donnent une avance aux Conservateurs, Jeremy Corbyn pourrait bien remporter les élections pour autant qu’il se batte avec un clair programme de classe anti-austérité. C’est un scénario de cauchemar pour la classe capitaliste, en particulier dans le contexte d’une crise économique grandissante, car cela pourrait réveiller l’appétit de la classe ouvrière pour une alternative à l’austérité, en conséquence de quoi un tel gouvernement pourrait être mis sous pression pour adopter des mesures radicales menaçant le système capitaliste.

    Aucun compromis avec la droite !

    Même si la droite décide de temporairement raccrocher les gants et d’attendre pour à nouveau partir à l’offensive, cela ne signifierait pas pour autant un retour à la trêve armée qui existait il y a un an. La guerre civile qui a commencé exige une conclusion, presque indépendamment de la volonté de ses protagonistes. Le chef adjoint du Parti travailliste, Tom Watson, a décrit le genre de mesures que la droite défendrait, y compris l’élection du cabinet fantôme (sorte de gouvernement d’opposition) directement par les députés (ce qui laisserait Jeremy Corbyn isolé au beau milieu d’une équipe de droite) ou encore le retour au précédent système de «collège électoral» pour l’élection du président du parti, en donnant un tiers des voix aux députés et députés européens travaillistes. Cela rendrait beaucoup plus facile à l’appareil de garder en main le contrôle du parti. Mais le changement de l’équilibre des forces au sein du Labour leur rend la tâche très difficile. Ils sont également terrifiés d’être pris un par un dans un processus de désélection (de révocation des élus). Les événements peuvent donc pousser la droite sur la voie de la scission même si elle craint que son nouveau parti ne dispose que d’une base sociale extrêmement limitée.

    Ce qui est essentiel, c’est qu’à la différence de la première victoire de Corbyn en 2015, il n’y ait plus de tentatives de la gauche de trouver un compromis avec les blairistes. Le mouvement autour de Corbyn doit au contraire être organisé et construit afin de consolider et d’accroître les gains jusqu’ici obtenus.

    Un programme anti-austérité sans équivoque doit être adopté et les députés travaillistes doivent y souscrire comme condition préalable pour siéger comme membre du parti. A cela doit être combiné l’introduction d’une procédure de resélection obligatoire permettant aux sections locales du parti de décider démocratiquement de celui qui se tiendra au Parlement en leur nom. La conférence de la fédération syndicale UNITE a adopté une motion proposée par un membre du Socialist Party appelant à la resélection obligatoire. UNITE doit maintenant faire campagne pour que cela soit effectivement adopté lors de la prochaine conférence du Parti travailliste.

    Ceux qui, à gauche, craignent une scission de la droite du Labour doivent faire face à ce que la prévention d’une telle scission nécessite: une capitulation complète devant les éléments pro-capitalistes du parti. Rien d’autre ne satisfera la droite. Cette dernière ne condescendra à s’entendre avec l’aile gauche que si on lui laisse le champ libre, si la carrière de ses représentants est protégée et, plus important encore, si le Parti travailliste se limite entièrement au cadre capitaliste de l’austérité, des privatisations et de la guerre.

    Certains à gauche essayent d’ignorer cette réalité. Ils font valoir que le Labour a toujours été une grande église où les «factions belligérantes» doivent trouver des compromis. Il est vrai que la plupart de l’histoire du parti est marquée par cette «large église», sous la forme d’un parti ouvrier bourgeois.

    Alors que sa direction agissait dans l’intérêt de la classe capitaliste, elle devait composer avec une base de masse à prédominance ouvrière qui, via ses structures démocratiques, a été en mesure d’exercer une influence sur l’orientation du parti. La carrière de l’aile droite dépendait de membres issus de la classe ouvrière. A contre-cœur, elle a été contrainte de tenir compte de leurs opinions. Il y avait une base matérielle derrière cette alliance, particulièrement lors de la période de reprise économique d’après-guerre, alors que le capitalisme s’est vu forcé d’accorder des réformes à la classe ouvrière.

    Cette période est toutefois révolue depuis longtemps déjà. Avant même le début de la crise économique mondiale de 2008, les conquêtes sociales passées de la classe ouvrière étaient sous pression systématique, y compris sous l’effet du New Labour lorsqu’il était au pouvoir. Les blairistes sont parvenus à transformer le Parti travailliste en un parti agissant loyalement selon les désirs de la classe capitaliste. Comparer l’attitude du parti lors des guerres du Vietnam et d’Irak illustre l’ampleur de la profonde transformation de la nature du parti. Le Premier ministre travailliste Harold Wilson fut incapable d’envoyer des troupes soutenir l’impérialisme américain au Vietnam, en dépit de sa volonté de procéder de la sorte. Tony Blair, en revanche, a été en mesure de dire à George Bush: «Je serai avec vous, quoi qu’il puisse se passer.» La conférence travailliste de 2004 s’est elle-aussi placée du côté de Bush en votant massivement pour le soutien de l’occupation de l’Irak. Le parti fut imperméable à la plus grande manifestation anti-guerre de l’Histoire de Grande-Bretagne qui avait eu lieu l’année précédente.

    Refonder le Labour

    L’élection de Jeremy Corbyn représente une rupture essentielle dans l’impasse politique. Cela offre l’occasion de créer un parti de masse de la classe ouvrière, que ce soit ou non sous le nom de «Labour». Il s’agirait d’un grand pas en avant. Les marxistes doivent faire tout leur possible pour aider au développement d’une telle force. Un tel parti, en particulier dans ses premiers jours, serait encore une «large église», dans le sens où il contiendrait inévitablement des groupes aux approches politiques différentes. Le fil rouge devrait toutefois être l’unité contre l’austérité et en défense de mesures visant à améliorer la vie de la majorité sociale – les travailleurs et la classe moyenne.

    Cela seul serait une véritable «alliance progressiste» contrairement à l’idée d’une alliance avec des forces pro-capitalistes telles que les libéraux-démocrates, comme l’a suggéré le journaliste de gauche Paul Mason. A l’opposé de cette approche, il faut unir tous ceux qui sont prêts à souscrire à un programme clairement anti-austérité. Un appel peut être lancé en direction des Verts, des organisations socialistes (parmi lesquelles le Socialist Party et la Coalition des syndicalistes et socialistes, TUSC), des syndicats non affiliés au Labour et des organismes communautaires pour se rassembler sous un même parapluie aux élections tout en conservant leurs propres identités. C’est sur une telle base fédérale que le Parti travailliste a été initialement constitué. Cette version moderne serait un vrai pas en avant et pourrait récupérer un grand nombre des près de cinq millions d’électeurs, principalement issus de la classe ouvrière, que le Parti travailliste a perdu entre 1997 et 2010. Beaucoup d’entre eux ont tout simplement arrêté de voter, d’autres ont protesté en votant pour l’UKIP, les Verts ou, dans certains cas, pour la TUSC, coalition à laquelle participe le Socialist Party.

    Aux premiers jours du Parti travailliste, le Parti socialiste britannique (l’un des précurseurs du Parti communiste) était affilié au Parti travailliste. Le célèbre marxiste écossais John McLean s’est présenté aux élections pour devenir député en 1918 sous la bannière travailliste (il était aussi Consul écossais de Russie à l’époque!). Jusqu’en 1925, les membres du parti communiste pouvaient avoir une double adhésion. Jusqu’à la victoire du blairisme, il y a toujours eu des forces marxistes et trotskystes significatives au sein du Parti travailliste. Lorsque la Militant Tendency (Tendance Militant, qui existe aujourd’hui sous le nom de Socialist Party), a été expulsée du labour, nous avions prévenu que la direction avait franchi le Rubicon et que le processus se terminerait par l’expulsion des voix de la classe ouvrière.

    Il est très positif que Jeremy Corbyn semble globalement en accord avec cette approche des choses. Il a à juste titre rejeté le dossier douteux de Tom Watson paru dans The Observer le 14 août comme étant un «non-sens» et en déclarant: «Nous ne pouvons gagner une élection générale qu’en gagnant des gens qui ne votent pas ou qui votent pour un autre parti. Si quelqu’un a politiquement évolué au point de rejoindre le Parti travailliste, qu’il ait été autrefois membres des Lib-Dems, des Verts ou d’autre chose, c’est très bien. Bienvenue à bord.» Interrogé sur la possibilité que le Socialist Party s’affilie au Labour, il a ajouté: «Je me réjouis d’avoir une conversation avec Peter [Taaffe, secrétaire général du Socialist Party] à un moment donné.»

    Cependant, Pati travailliste refondé ne pourrait pas se contenter d’être un rassemblement des forces politiques de gauche. Il lui serait aussi vital de restaurer les droits démocratiques des syndicats au sein du parti. Un aspect central de la destruction des structures démocratiques du labour fut l’affaiblissement du rôle des syndicats. Le Parti travailliste a été créé par les syndicats dans le but de disposer d’un parti spécifique pour la classe ouvrière. Aujourd’hui, les syndicats restent les plus grandes organisations démocratiques de Grande-Bretagne. Elles impliquent plus de six millions de travailleurs. L’action collective des syndicats a été le principal moyen par lequel les travailleurs ont été en mesure de lutter contre l’austérité. Si les dirigeants syndicaux de la TUC (Trade Union Confederation) avaient été prêts à appeler à une action de grève coordonnée contre l’austérité, à commencer par une grève générale de 24 heures, le gouvernement serait tombé. Pourtant, les syndicats sont restés sans voix politique de masse depuis des décennies. Restaurer leur rôle dans le parti ne doit toutefois pas signifier de reproduire à l’identique le «vote par blocs» du passé, parfois utilisé de manière antidémocratique par les sommets syndicaux. Il faudra assurer la participation active des syndicalistes de base. La reconstruction d’une section jeunes massive et démocratique serait également posée.

    Les scissions ont une base de classe

    Ceux qui excluent l’arrivée d’une scission du Parti travailliste sur des lignes de classe sont les vrais utopistes. Imaginer qu’il soit possible pour Jeremy Corbyn de s’accrocher à la présidence jusqu’à 2020 en mettant la droite en sourdine, comme le font certains à la direction de «Momentum» (un mouvement favorable à Corbyn), c’est entretenir des illusions. Il existe des précédents de scissions au sein du Labour qui ont été, en fin de compte, des manières de protéger les intérêts de la classe capitaliste. En 1981, la scission qui a constitué le Parti social-démocrate (SDP) n’a pas fait beaucoup pour les carrières ministérielles de ceux qui sont partis, mais elle a joué un rôle important pour la classe capitaliste. En emportant 11,5% des voix travaillistes aux élections générales de 1983, elle a contribué, avec la guerre des Malouines, à assurer la défaite du Parti travailliste et Thatcher a pu gagner un second mandat.

    En 1931 s’est présenté un cas différent. A l’époque, 15 députés travaillistes, dirigé par le Premier ministre travailliste Ramsay MacDonald, ont fait scission pour constituer un gouvernement avec les Libéraux et les Conservateurs qui a mis en œuvre une offensive sauvages contre la classe ouvrière. L’expérience comprend un certain nombre de leçon pour aujourd’hui. Herbert Morrison, grand-père de Peter Mandelson, a été invité à rester dans le Labour au lieu de rejoindre la scission avec les traîtres afin défendre les intérêts du capitalisme au sein du parti. Sans aucun doute, même si la grande majorité des députés travaillistes quitte le parti, il ne s’agira pas d’une scission chimiquement pure. Certains à droite resteront dans un Labour dirigé par Corbyn pour des raisons identiques à celles de Morrison à l’époque. Il serait donc encore nécessaire pour Corbyn et ses partisans d’exiger de tous les députés travaillistes de souscrire officiellement à un programme anti-austérité qui les engage à défendre cette politique.

    De nombreux partisans travaillistes craignent qu’une scission n’affaiblisse le parti. En fait, ce serait très exactement le contraire. Certes, en cas de scission, il y aurait peut-être moins de députés travaillistes à Westminster, du moins dans un premier temps. Mais un groupe de députés même limité menant campagne sans relâche contre l’austérité et en défense des travailleurs en lutte ferait beaucoup plus pour la lutte contre les Conservateurs que 232 députés «travaillistes» dont la majorité voteraient en faveur de l’austérité, des privatisations et de la guerre.

    Un Parti travailliste anti-austérité pourrait rapidement engranger des gains électoraux de façon similaire à ce qu’a connu Syriza en Grèce lors de sa victoire de janvier 2015 en défendant à l’époque un programme anti-austérité. En Espagne aussi, la gauche a récemment obtenu des gains rapides sur le terrain électoral. La situation n’est pas directement comparable mais, entre 1931 et 1935, le Labour avait gagné 13,5% aux élections. En 1931, les suffrages travaillistes avaient diminué de près de deux millions par rapport aux élections qui s’étaient tenues deux ans auparavant, mais aux élections générales de 1935, le Labour était de retour au niveau de 1929. Cela, bien sûr, reflétait la colère contre la trahison de Ramsay MacDonald et sa clique. En substance, le rôle d’un nouveau parti de «centre gauche» ne sera pas différent au groupe de MacDonald, il ferait bloc au parlement avec un gouvernement conservateur faible contre Corbyn et la classe ouvrière.

    L’impact d’un parti de gauche

    Un sondage YouGov (2 août) a récemment été utilisé pour démontrer l’impossibilité d’une scission, mais il ne fait rien de la sorte. Il suggère que si la droite fait scission et que Corbyn conserve le nom de «Labour», la gauche recevrait 21% des voix, alors qu’une scission de gauche où la droite garderait le nom du parti recevrait 14% des voix. La différence relativement faible entre ces deux chiffres exprime l’affaiblissement de la fidélité traditionnelle envers le Labour qui a pris place au cours des décennies. La loyauté au «label» travailliste est très faible. De toute évidence, 21% est préférable à 14%, mais dans ces circonstances, ce serait aussi un très bon début pour la construction d’un nouveau parti autour d’un programme anti-austérité.

    Un tel parti pourrait rapidement gagner du terrain électoralement en offrant une alternative aux coupes budgétaires sans fin, aux privatisations et à la misère croissante. En revanche, les présidences du parti de Brown et Miliband ont démontré qu’il existe un appétit limité pour un parti travailliste défenseur d’une austérité «light» et qui appliquerait essentiellement une version édulcorée des politiques conservatrices. Mais même si un Parti travailliste de droite était en passe de conquérir le pouvoir, ce serait pour faire quoi ? Si c’est pour appliquer une politique capitaliste, alors ce sera au détriment des intérêts de la majorité dans la société.

    En revanche, un parti dirigé par la gauche, sous le nom de Labour ou sous un autre, serait en mesure de faire avancer les intérêts des travailleurs dès le premier jour, et d’engranger des gains électoraux en raison de cela. Owen Smith a défini ce qui le sépare de Corbyn en disant que toute la question était de savoir si le changement devait venir de l’intérieur ou de l’extérieur du Parlement. Il a notamment reproché à Corbyn de parcourir le pays pour construire un mouvement et de ne pas s’inquiéter des élections.

    Tout d’abord, Owen Smith n’a aucune preuve pour affirmer que Jeremy Corbyn ne se soucie pas des élections. Mais suggérer qu’aucun changement n’a été acquis en dehors du parlement depuis l’instauration du suffrage universel est une preuve de complet «crétinisme parlementaire». Les exemples sont innombrables. C’est la grève Ford Dagenham qui a imposé la Loi sur l’égalité salariale entre hommes et femmes adoptée par le Parlement. C’est la menace d’une grève générale qui a forcé la libération des dockers emprisonnés en 1972. Ce sont les 18 millions de personnes qui ont refusé de payer la Poll Tax qui ont mis fin au règne de Margaret Thatcher et qui ont forcé le gouvernement de John Major d’abolir la taxe.

    Comme pour résumer leur idiotie, un des films produit par l’aile droite (Saving Labour) commence en expliquant platement que manifester n’a jamais changé quoi que ce soit. Ce slogan était imposé sur deux manifestations à Liverpool, l’une en soutien de Corbyn, l’autre en soutien au conseil municipal de Liverpool en 1984. A l’époque, le conseil municipal travailliste, dans lequel les partisans de la Tendance Militant ont joué un rôle central, a arraché 60 millions £ du gouvernement conservateur et a été en mesure de construire 5.000 logements sociaux, d’ouvrir six nouvelles crèches, quatre collèges, six centres de loisirs et bien plus encore. Il n’aurait pas été possible de faire tout cela en passant tout simplement par le conseil. Une approche audacieuse à l’intérieur du conseil municipal combinée à des manifestations massives, au secteur public en grève générale et à la grève des mineurs qui se déroulait en même temps, c’est tout cela qui a forcé le gouvernement Thatcher à faire de sérieuses concessions.

    L’année suivante le conseil de Liverpool et celui de Lambeth ont été défait en raison de la trahison de Neil Kinnock et de la direction du Parti travailliste. Mais ses réalisations sont toujours là, en briques et en mortier. Jeremy Corbyn, qui a soutenu la lutte du conseil municipal de Liverpool à l’époque, a commis une erreur en n’y faisant pas référence dans son discours au récent meeting de masse tenu à Liverpool. Il n’a pas jusqu’à présent pas pris de position sans équivoque concernant le fait que les conseils municipaux travaillistes doivent refuser d’appliquer l’austérité et les coupes budgétaires, en dépit des conférences des syndicats UNITE et GMB appelant à les conseils municipaux à adopter des budgets municipaux sans aucune coupe budgétaire.

    Imaginez si, après presque une décennie de coupes budgétaires brutales qui ont laissé les budgets municipaux exsangues (en moyenne de 40% moindres à ceux de 2008), un certain nombre de conseils – même une poignée – refusaient de mettre en œuvre les réductions budgétaires et se soutenaient comme l’avaient fait à l’époque les conseils de Poplar, Liverpool, Lambeth et Clay Cross. Imaginez si ces conseils disposaient du soutien sans faille du parti de Jeremy Corbyn au Parlement, quel que soit son nom. Une telle lutte – étant donné toute la colère accumulée contre l’austérité – serait très populaire. Il serait non seulement possible de gagner, mais aussi d’organiser la lutter contre les conservateurs pour forcer la tenue de nouvelles élections à partir desquelles serait posée la possibilité de l’arrivée au pouvoir du parti de Corbyn. Il s’agit juste d’un exemple de la manière dont un parti de gauche au Parlement, même avec tout d’abord un petit nombre de députés, pourrait agir en tant que porte-voix de la classe ouvrière et du mouvement anti-austérité, déplaçant ainsi la balance de forces dans la société dans le sens de la classe ouvrière.

    Renverser le capitalisme

    Le Socialist Party soutient Jeremy Corbyn dans son combat contre la droite et soutient chaque étape positive franchie. Mais nous cherchons également à pousser le mouvement encore plus vers la gauche en avertissant des retraites qui peuvent, à un stade ultérieur, conduire à des défaites.

    Le programme électoral de 2016 de Jeremy soulève de nombreux aspects positifs qui résonnent parmi les travailleurs et sont très populaires, y compris son appel à l’instauration d’un salaire minimum de 10 £ de l’heure, sa promesse de construire un million de logements (des logements sociaux pour moitié) et d’introduire le contrôle des loyers dans le secteur privé. Ses promesses de renationalisation des chemins de fer et de fin de la privatisation des services de santé aura également un soutien généralisé. L’idée d’une banque nationale d’investissement avec 500 milliards £ à dépenser dans des investissements publics payés par l’augmentation des taxes sur «les plus hauts revenus» est la bienvenue. Dans son interview au magazine The Observer (14 août), Jeremy a réitéré son soutien à l’abolition des frais de scolarité et à la réintroduction d’une bourse d’étude.

    Dans le même temps, il a cependant reculé concernant son appel initial à la nationalisation des compagnies d’énergie, plaidant maintenant uniquement pour «une participation accrue de la communauté». Malheureusement, son appel à la renationalisation des chemins de fer se limite à leur reprise en main publique quand les franchises arrivent à échéance, ce qui signifie qu’après cinq ans de gouvernement travailliste, seuls deux tiers des chemins de fer seraient sous propriété publique. Il n’a pas non plus clairement appelé à renationalisation de l’industrie de l’acier, en dépit de cette nécessité écrasante. Cela reflète une réticence à tirer toutes les conclusions qui s’imposent sur la manière de défendre les intérêts de la classe ouvrière. Il ne faut pas accepter mais bien défier ce que l’ancien conseiller économique de Jeremy Corbyn David Blanchflower a appelé «les réalités modernes du capitalisme et des marchés» (The Guardian, 2 août). Blanchflower est maintenant ardent partisan d’Owen Smith.

    Les capitalistes résistent avec véhémence à un plus grand rôle de l’Etat et à l’augmentation des taxes. Pour mettre en œuvre le programme, même modeste, de Jeremy Corbyn, «l’action extra-parlementaire» sera cruciale, ce qui signifie la mobilisation active de la classe ouvrière en soutien aux politiques d’un gouvernement de gauche.

    Le programme actuel de Jeremy Corbyn représente un véritable pas en avant par rapport aux politiques pro-capitalistes des précédents dirigeants travaillistes. Il se situe toutefois en deçà d’un programme socialiste. La nécessité d’un tel programme sera posée par les événements. L’expérience de SYRIZA en Grèce, où la direction d’un parti anti-austérité a capitulé sous la pression des grandes entreprises et appliqua actuellement lui-même l’austérité, démontre que vaincre l’austérité est lié à la lutte pour le socialisme.

    L’austérité sans fin et les inégalités croissantes ne sont pas des accidents. Cela découle des besoins fondamentaux du capitalisme, un système où les profits de quelques-uns sont réalisés au détriment de la majorité. Cependant, l’énorme avantage de la création d’un parti de masse des travailleurs, chose maintenant à l’ordre du jour, est qu’il fournirait un forum où les travailleurs et la jeunesse pourraient discuter et débattre de la manière d’atteindre le renversement du capitalisme et la construction d’une société socialiste démocratique.

  • Déclaration du syndicat des pompiers britanniques FBU sur le résultat du référendum sur l'UE

    fbuMatt Wrack, secrétaire général de l’Union des Brigades d’Incendie, en réponse à l’annonce que le Royaume-Uni a voté pour quitter l’Union Européenne, a déclaré: «Le gouvernement de Westminster doit respecter le résultat du référendum d’hier et prendre des mesures pour le mettre en œuvre.

    “La démission de David Cameron (NT : le premier ministre britannique) ne sera pas pleurée par les pompiers ou les autres travailleurs, il serait même préférable que l’ensemble du gouvernement démissionne. Depuis 2010, Cameron a supervisé un programme visant à faire baisser les salaires et de réduire le financement des services publics. En conséquence, les salaires et le niveau de vie ont stagné, les services publics sont dans un état critique et nous sommes confrontés à une crise croissante de logements. C’est ce contexte qui a marqué le référendum.

    “Dans le cadre des services d’incendie et de secours, nous avons subi une attaque honteuse sur les pensions des pompiers, sur la rémunération du secteur public et on nous a imposé les pires coupes budgétaires de l’Histoire des pompiers.

    “Les syndicats doivent maintenant lutter pour veiller à ce que les travailleurs ne paient pas le prix de toute l’agitation politique ou économique qui suit le vote. Le gouvernement (…) doit donner l’assurance que les droits en matière d’emploi, de sécurité, (…) seront protégés pour les travailleurs britanniques. Ils doivent aussi protéger les emplois qui seront à risque en raison de la turbulence économique après le vote.

    “Toute tentative d’introduire un budget d’urgence qui attaque davantage les services publics ou cherche à augmenter les taxes sur les travailleurs, doit être combattue par le mouvement syndical et le Parti travailliste.

    “Les syndicats doivent faire campagne sur la base de l’unité. Nous devons nous assurer que tout débat sur l’immigration ne pointe pas les travailleurs immigrés comme boucs émissaires, ceux-ci servant par milliers dans nos soins de santé et dans nos services d’incendie et de secours. Là où d’autres veulent la division, nous devons répondre avec l’unité et la solidarité.

    “Nous disons à tous les travailleurs du Royaume-Uni : si vous avez voté Leave (NT : quitter l’Union Européenne) ou Remain (NT : rester dans l’Union Européenne), nous devons combattre ensemble dans la défense des emplois, de nos droits et de nos services publics.”

  • Grande Bretagne. Après le référendum, dégageons les Tories!

    toriesoutDe nouvelles élections maintenant ! Luttons pour une grève générale de 24 heures !

    « Le référendum pourrait très bien rentrer dans l’Histoire comme un point tournant », a déclaré le journal Financial Times, se faisant l’écho de la colère et du désespoir de l’élite britannique suite à la décision de la majorité des électeurs en Grande-Bretagne de quitter l’Union Européenne. Pour la classe capitaliste britannique et à travers l’UE toute entière, il s’agit d’un coup majeur, décrit par le Financial Times comme « le plus gros recul de l’histoire de l’UE ».

    Par Hannah Sell, Socialist Party, section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre & au Pays de Galles

    Pour le capitalisme britannique en particulier, c’est une terrible défaite. Elle pourrait mener à la scission du Royaume-Uni s’il y avait un nouveau vote sur l’indépendance de l’Écosse, et conduire à l’effondrement du parti conservateur, le Tory Party, qui compta parmi les partis capitalistes les plus prospères de la planète.

    Il est également possible que le parti travailliste, le Labour Party, scissionne à la suite des événements du 23 juin, alors que la droite du parti, pro-business, complote pour faire tomber Jeremy Corbyn [l’actuel secrétaire du Labour, NdT]. Le champ politique est en pleine tempête.

    Beaucoup des 17 millions de personnes qui ont voté pour sortir de l’UE, cependant, se seront réveillés avec un sentiment d’euphorie car ils ont pu exprimer leur rage face à tout ce qu’ils ont eu à endurer à cause du big business qui a voulu faire payer à la classe ouvrière la crise économique de ces dernières années : salaires faibles, contrats zéro heure, coupes dans les aides sociales, manque de logement à prix abordables, et des services publics qui subissent coupe après coupe.

    De plus, ce faisant, ils ont forcé Cameron – le tant détesté Premier ministre – à annoncer sa démission.

    Ce n’est pas seulement en Grande-Bretagne mais aussi à travers l’Europe que de nombreux travailleurs ont pu être inspirés par ce vote contre l’UE des patrons. Il n’y a aucun doute sur le fait que de nombreux travailleurs en Grèce, dont les conditions de vie ont été dévastées entre mains des institutions de l’UE, se seront réjouis du résultat du référendum.

    En réponse au résultat du référendum, les marchés financiers sont dans la tourmente, avec la livre sterling plongeant à son niveau le plus bas depuis trente ans. C’est en partie à cause du fait que les financiers, les « maîtres de l’univers », avaient arrogamment calculé que ce seraient leurs propres choix qui l’emporteraient, et ils n’étaient pas prêts à cette victoire du Brexit.

    Les fluctuations des marchés financiers ne se refléteront pas nécessairement immédiatement dans une nouvelle crise dans l’économie « réelle », ni en Bretagne ni à l’échelle mondiale. Cependant, le débat autour du référendum a été utilisé par le chancelier Osborne pour détourner l’attention des signes d’une nouvelle étape de la crise économique, à la fois pour le Royaume-Uni et le capitalisme mondial, nouvelle étape qui se développe indépendamment du Brexit, et qui peut s’ajouter aux ondes de choc causées par le résultat du référendum.

    Le « Projet Peur »

    Pendant le référendum, le « projet peur » [une campagne médiatique anti-Brexit, NdT] a atteint des proportions gigantesques. La catastrophe économique, la troisième guerre mondiale et la peur de la montée du racisme et de l’intolérance ont toutes été utilisées pour essayer d’intimider les électeurs et soutenir le camp du « Remain », « rester ». Des peurs légitimes autour de ces questions ont été des facteurs majeurs et expliquent pourquoi 48% des gens ont finalement décidé de voter pour « Remain ». En particulier, il semble qu’une majorité de jeunes a voté « Remain » partiellement à cause de leur peur que le racisme augmenterait s’il y avait un vote pour le Brexit.

    Néanmoins, c’est incroyable le nombre de gens qui ont voté pour le « Leave », « Partir », et qui se sont servis du référendum comme d’une opportunité pour s’opposer à l’UE non démocratique et lointaine et pour protester, ignorant les menaces des dirigeants de tous les partis de l’establishment britanniques, et de tous les dirigeants mondiaux, de Merkel à Obama.

    De manière incroyablement cynique, même le terrible meurtre de la députée Labour et militante de la campagne « Remain », Jo Cox, a été utilisé pour essayer d’augmenter le nombre de voix pour le « Remain ».

    Sans aucun doute, l’atmosphère dangereuse exacerbée par les politiciens de droite pendant les débats autour du référendum ont augmenté le danger d’attaques racistes et d’extrême droite. Mais ce n’était pas que le racisme du côté du « Leave » officiel, mais aussi les attaques constantes de Cameron contre les migrants, avec la droite du Labour qui a même demandé qu’il aille encore plus loin dans les derniers jours de la campagne ! Indépendamment de l’issue du référendum, il aurait été tout autant nécessaire pour le mouvement ouvrier d’adopter une position claire pour l’unité, contre le racisme et en défense des droits des travailleurs migrants en Grande Bretagne.

    De même, il est complètement faux de suggérer que le vote pour le Brexit avait – dans l’ensemble – un caractère droitier ou raciste. Bien sûr, certains de ceux qui ont voté pour le Brexit l’auront fait pour des motivations racistes ou nationalistes, mais le caractère fondamental du vote pour le Brexit était un vote de révolte de la classe ouvrière.

    En particulier avec un référendum, ou les électeurs font face à un choix binaire de « Oui » ou « Non », il y a forcément des motivations différentes parmi les votants, de part et d’autre. Mais dans les faits, aucun mouvement de la classe ouvrière n’est 100% pur, complètement vierge d’éléments réactionnaires ou de courants sous-jacents. C’est la tâche des socialistes révolutionnaires de voir ce qui prime – dans ce cas, un soulèvement électoral largement ouvrier contre l’establishment.

    En général, il y a eu une corrélation entre le niveau de pauvreté dans un endroit et à quel point les habitants y ont voté pour le Brexit. L’Écosse et l’Irlande du Nord, où le référendum était vu différemment, étaient des exceptions. Pourtant, en Angleterre et au Pays de Galles, ce n’étaient pas que les zones plus ouvrières et blanches mais aussi les zones ouvrières plus diversifiées ethniquement qui ont voté pour le Brexit.

    Une majorité à Bradford, avec une forte population asiatique, a par exemple voté pour le Brexit. Même si à Londres – avec une population plus jeune et relativement plus riche – une majorité a voté pour le « Remain », le nombre de gens ayant voté pour le Brexit était plus élevé dans les quartiers plus pauvres. À Barking et Dagenham, où moins de la moitié de la population s’identifie comme britannique blanche, 62% des gens ont voté pour le Brexit. Non loin, à Newham, un des endroits les plus pauvres et les plus diversifiés ethniquement du pays, 47% ont voté pour le Brexit.

    Alors que l’ampleur de l’immigration est devenue un sujet central de la campagne sur le referendum pour la majorité il ne s’agissait pas en général de s’opposer à ce que des gens d’autres pays viennent en Grande Bretagne. Non, c’était plutôt à partir de l’expérience de patrons utilisant tous les moyens possibles – dont l’emploi de travailleurs d’autres pays – pour baisser les salaires, plus la colère contre les immenses coupes budgétaires qui ont eu lieu dans les services publics et la peur de ne pas pouvoir faire face à une augmentation de la population.

    Le fait que même Farage [le leader du parti de droite populiste Ukip, NdT] ait dû dire qu’il n’était pas pour que les migrants de l’UE perdent leur droit à rester dans le pays est un reflet de cela, même si bien sûr le mouvement ouvrier doit se battre pour s’assurer que cela soit bien le cas.

    Ceci doit être lié à la lutte pour un salaire minimum de 10 £ de l’heure pour tous les travailleurs, et l’opposition aux coupes dans les services publics comme seul moyen de défendre le droit de tous les travailleurs, indépendamment de leur pays d’origine.

    Une colère qui s’exprime

    Le soulèvement électoral qui a eu lieu avait été prévu par le Socialist Party. Comme nous l’avons expliqué dans le document voté à notre Conférence nationale de mars : « Comme le vote sur l’indépendance de l’Écosse de 2014, il est possible que le référendum sur l’UE puisse devenir un moyen grâce auquel beaucoup de travailleurs expriment leur rage contre une austérité sans fin. Nous devons poser le référendum dans ces termes, en expliquant que le vote “Leave” pourrait mener à la possibilité de dégager les Tories. ».

    À présent que le référendum est terminé, cela a été faiblement reconnu par Momentum, l’organisation initialement montée pour soutenir Jeremy Corbyn, quand ils ont déclaré : « Des millions semblent avoir choisi le vote “Leave” pour voter contre la mondialisation débridée qui a vu les conditions de vie stagner ou chuter alors que le coût de la vie a augmenté. » Malheureusement, ils ne l’ont reconnu qu’aujourd’hui, le jour du résultat, alors qu’ils ont passé la durée du référendum à faire campagne pour le « Remain » !

    En fait, la révolte a eu lieu malgré la faillite complète de la majorité des dirigeants des syndicats et malheureusement de Jeremy Corbyn aussi à mettre en avant une position indépendante de classe en dirigeant une campagne socialiste et internationaliste pour le Brexit, de manière complètement indépendante et en opposition aux « Little Englanders » de Ukip & Co.

    C’est ce qu’a fait le Socialist Party : expliquer que nous sommes contre l’UE des patrons, qui agit dans l’intérêt des 1%, mais que nous sommes en faveur de la solidarité entre les travailleurs à travers le continent et que nous défendons une confédération socialiste volontaire d’Europe.

    En lieu et place de cela, Frances O’Grady, secrétaire générale de la confédération syndicale TUC, est apparue aux côtés du dirigeant des Tories en Écosse, Ruth Davidson, sans prononcer une seule critique contre le gouvernement Tory.

    Jeremy Corbyn et John McDonnell [un membre de la direction parlementaire du Labour] ont, eux, correctement refusé d’apparaître aux côtés de politiciens conservateurs, mais ont néanmoins été impitoyablement utilisés par David Cameron pour essayer de gagner une majorité pour le « Remain » et sauver sa peau.

    Dans le journal The Observer (12 juin 2016), David Cameron a impudemment déclaré qu’il ne pouvait pas être « accusé de mener un coup monté de l’establishment » parce qu’il « disait d’écouter Jeremy Corbyn et les Verts ».

    La situation politique aurait été transformée si Jeremy Corbyn était resté sur sa position historique de s’opposer à l’Union Européenne car, comme il le disait à l’époque du Traité de Maastricht : « Il retire aux Parlements nationaux le pouvoir de définir sa politique économique et abandonne celui-ci à un groupe non élu de banquiers. »

    Une campagne qui aurait expliqué comment la nationalisation des chemins de fer ou de l’industrie métallurgique est illégale sous législation européenne, et en solidarité avec les travailleurs en Grèce, en Irlande et dans le reste de l’UE, aurait augmenté la majorité pour le Brexit et forcé non seulement Cameron à démissionner, mais aussi de nouvelles élections générales, avec la possibilité de l’arrivée au pouvoir d’ un gouvernement Labour dirigé par Jeremy Corbyn.

    L’absence complète d’une voix des travailleurs à une échelle de masse dans le référendum a laissé le champ libre à Nigel Farage, l’ex-Tory, l’ex courtier en valeur, pour se poser comme la voix des « petites gens ». En réalité bien sûr, les idées nationalistes et réactionnaires de Ukip n’offrent pas de solution aux travailleurs.

    Toutefois, malgré les graves erreurs faites par la majorité des dirigeants du mouvement ouvrier dans la campagne sur le référendum, ce n’est pas automatique que l’Ukip et leurs semblables en soient les gagnants.

    Un appel, dès à présent, pour des élections générales immédiates pourraient toujours voir l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement Labour avec Corbyn à sa tête, surtout si un programme anti-austérité est mis en avant.

    Par ailleurs, le mouvement syndical doit passer à l’offensive contre ce gouvernement Tory faible et divisé, et lutter pour qu’une grève générale de 24 heures soit appelée contre toute nouvelle menace austéritaire dans le sillage du Brexit.

    Le vote à 91% en faveur de la grève par le syndicat enseignant le NUT donne une indication du climat qui se développait même avant le référendum. Tout comme les votes, passés par les membres des exécutifs locaux des syndicats Unite et Unison, la conférence du syndicat GMB et la branche galloise de la TUC, pour exiger que les conseils municipaux ne votent pas de budgets de coupes.

    Toutefois, ces résolutions doivent être transformées en action. La conférence du National Shop Stewards Network [NSSN, Réseau National des Délégués Syndicaux] qui aura lieu le 2 juillet prochain, sera une importante opportunité pour les syndicalistes de base de se réunir et de discuter de comment construire un tel mouvement.

    Bien sûr, pour le big business en Grande Bretagne, un gouvernement Labour dirigé par Corbyn est un cauchemar qu’ils feront tout pour éviter, tant ils craignent les espoirs qu’un tel gouvernement créerait parmi les travailleurs qui ont souffert année après année d’austérité.

    Ainsi, la classe capitaliste et leurs loyaux représentants au sein du Labour sont, comme nous avions averti, déjà en train d’essayer de rejeter la responsabilité du vote en faveur du Brexit sur les épaules de Jeremy Corbyn et ainsi essayer d’utiliser cela comme une excuse pour manœuvrer contre lui.

    À l’heure où nous écrivons, deux députées de la droite dure du Labour, Margaret Hodge et Anne Coffey, ont présenté au groupe parlementaire Labour une motion de défiance contre Jeremy Corbyn.

    L’élection de Jeremy Corbyn comme dirigeant du Labour était l’expression du climat anti-austérité qui grandissait dans la société. Malgré qu’il ait pu trouver, de manière inattendue, une expression dans la bataille pour la direction du Labour, il s’agissait essentiellement d’un mouvement depuis l’extérieur du Labour, surtout de jeunes et de « vieux revenants » Labour qui recherchaient quelque chose de différent comparé à la suite de dirigeants de partis – Tory comme New Labour – qui ont agi dans les intérêts du 1%.

    Malheureusement cependant, depuis le début, Jeremy Corbyn a été entouré d’une machine blairiste (en référence à Tony Blair, le dirigeant travailliste qui a supervisé le virage à droite du parti dans les années ’90) déterminée à le discréditer puis le faire tomber.

    Les derniers mois ont montré, comme nous avions averti, qu’aucun compromis avec ces représentants de l’establishment capitaliste n’est possible. Au contraire, tout nouveau recul de la part de la direction du Labour conduirait inévitablement à un reflux du soutien envers Corbyn parmi ceux qui sont enthousiasmés par son attitude.

    Les bravades de la droite devraient être confrontées implacablement et avec détermination. Jeremy Corbyn a correctement dit que d’aucuns avaient voté pour le Brexit pour protester contre l’austérité.

    Combattons l’austérité

    Il devrait à présent lancer la bataille contre l’austérité, avec comme point de départ le programme qu’il avait quand il se présentait pour la direction du Labour. Cela devrait comprendre une position claire contre l’austérité, d’où qu’elle vienne : Bruxelles, Westminster ou les conseils locaux. Une telle position – y compris un salaire minimum de 10£/heure et la construction massive de logements – pourrait enthousiasmer non seulement ceux qui l’ont élu à la tête du Labour, mais également de plus en plus de travailleurs, peu importe ce qu’ils ont voté dans le référendum.

    La classe capitaliste est face à une crise : ils trépignent pour essayer de trouver un moyen de trouver des parties fiables pour agir en leurs intérêts. Il ne leur sera pas aisé d’éviter une élection générale. Il est même possible à présent que les divisions à la fois dans le Labour et chez les Tories, qui ne tiennent debout en réalité que grâce au système électoral, amène à un réalignement de la politique britannique. Une scission des Tories et du Labour pourrait mener à un nouvel alignement de l’aile pro-capitaliste du Labour Party et des Tories pro-UE.

    Ce n’est pas pour rien que Janan Ganesh a écrit dans le Financial Times (14 juin 2016) : « Les modérés Tory et Labour qui commencent à se mélanger dans les bureaux de “Remain” vont plutôt bien ensemble. » Il est même possible que la classe capitaliste puisse promouvoir un changement du système électoral vers une représentation proportionnelle pour essayer de mettre une telle coalition au pouvoir.

    Mais alors que la classe capitaliste est en plein chaos, il est urgent que la classe ouvrière trouve sa propre voix politique. Le résultat du référendum montre le potentiel énorme pour une riposte de masse contre l’austérité en Grande Bretagne. La tâche est de créer un parti politique de masse capable de diriger une telle riposte, politiquement armée de politique réellement socialistes.

  • Référendum sur le Brexit: Votons pour faire dégager les conservateurs!

    woreuprotestLe référendum sur l’appartenance de la Grande-Bretagne à l’Union européenne se tiendra le 23 juin 2016. L’événement ne concernera pas seulement que l’Union européenne, ce sera également une opportunité de donner son verdict à David Cameron ainsi qu’à son gouvernement pourri.

    Éditorial du Socialist, hebdomadaire du Socialist Party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et au pays de Galles)

    La victoire de la sortie de l’Union européenne porterait un coup mortel au gouvernement qui pourrait conduire à la convocation de nouvelles élections générales et à la chute des conservateurs détestés actuellement au pouvoir. Voter ‘out’ est particulièrement important.
    David Cameron a mis son destin en jeu dans cette bataille entre forces pro et anti Union européenne, de même que d’autres ministres du camp du ‘in’ comme George Osborne et Theresa May. Même s’ils remportent la victoire à une marge étroite, leur autorité sera gravement endommagée. En outre, d’intenses luttes intestines vont déchirer le parti conservateur quel que soit le résultat final.

    Les masques sont tombés dès l’annonce du référendum. Le maire conservateur de Londres Boris Johnson a pris le camp du ‘out’, ce qui constitue un revers significatif pour Cameron. L’écrasante majorité de la base du parti Tory veut également soutenir le ‘out’, plus environ 120 députés conservateurs, un nombre à peine plus court que les 129 qui, aux dires du Daily Mirror, veulent voter pour rester au sein de l’UE.

    C’est une grave erreur pour Jeremy Corbyn et le Parti travailliste de soutenir le rester dans l’UE alors que ce vote pourrait conduire à la chute du gouvernement conservateur, déjà dans les cordes. Ils doivent changer de cap et aider à faire tomber Cameron & Co afin que des élections générales puissent être convoquées.

    Cette campagne doit durer quatre mois, David Cameron va tirer toutes les ficelles qu’il peut, y compris en demandant le soutien des chefs de gouvernement à travers le monde, des États-Unis à la Chine. Les politiciens capitalistes des deux côtés du débat jouent sur la peur et les menaces, et nous ne sommes pas encore au paroxysme de ces manœuvres. Le spectre d’une plus grande vulnérabilité au terrorisme a été soulevé par les ministres Iain Duncan Smith et Michael Gove dans le cas où l’adhésion à l’UE était confirmée, David Cameron utilisant le même argument en cas de Brexit. Mais tous ceux-là soutiennent le bombardement de l’Irak et de la Syrie qui alimente le fléau du terrorisme.

    La classe des travailleurs n’a aucun intérêt commun avec ces politiciens capitalistes favorables à l’austérité, qu’ils soient pour ou contre l’adhésion à l’UE. Tout en se distançant fortement des positions nationalistes et pro-capitalistes des conservateurs opposés au maintien dans l’Union et du parti populiste de droite Ukip, le mouvement des travailleurs a besoin de faire entendre sa propre voix contre l’UE dans ce référendum, de s’opposer au club patronal que représente l’UE et de lutter pour les intérêts des gens ordinaires en Grande-Bretagne et en Europe.

    L’inquiétude des capitalistes

    Face à l’inquiétude croissante de nombreux capitalistes britanniques à la perspective de leurs intérêts minés par le Brexit, David Cameron a désespérément obtenu des concessions de dernière minute à Bruxelles qui pourraient aider à soutenir un vote pro-UE. Mais ses gesticulations politiques et les concessions très limitées qu’il a acquises des 27 autres chefs de gouvernement de l’UE ont peu fait pour changer les choses.

    Il a obtenu un accord partiel concernant une attaque contre les allocations de travailleurs de l’UE qui travaillent en Grande-Bretagne et a affirmé que le Royaume-Uni aura désormais un «statut spécial» dans les futurs traités de l’UE, en plus des dérogations déjà existantes. Mais il a été signalé que la chancelière allemande Angela Merkel aurait mis en garde David Cameron que les exceptions pour la Grande-Bretagne dans les traités futurs pourraient ne jamais voir le jour dans la pratique. Le ministre des Affaires étrangères français, Jean-Marc Ayrault, a quant à lui réaffirmé: “Il n’y aura pas de révision des traités, aucun droit de veto pour le Royaume-Uni sur le renforcement de la zone euro et aucune remise en cause du principe de libre circulation”.

    Mais le référendum ne concernera pas principalement l’accord obtenu par Cameron mais bien l’UE dans son ensemble. Partout en Europe, les tensions entre les classes dirigeantes représentent beaucoup plus que les exemptions demandées par le gouvernement britannique. L’économie des 19 pays de la zone euro stagne en dépit des bas prix de l’énergie, d’un taux d’intérêt négatif et d’un assouplissement quantitatif massif de la part de la Banque centrale européenne.

    Cette impasse a conduit à une croissance du nationalisme et des division sur l’ampleur et la répartition des mesures d’austérité brutales que l’UE a tenté de mettre en œuvre et, plus récemment, sur la crise des réfugiés, entre autres questions. L’UE est loin d’être un véhicule pour l’amélioration des droits des travailleurs, comme de nombreux dirigeants du Parti travailliste et des syndicats l’ont défendu en Grande-Bretagne et ailleurs. L’UE est une machine qui vise à imposer une vicieuse austérité qui détruit les services publics et augmente le chômage. La population ordinaire de Grèce , d’Espagne ou du Portugal peut en témoigner.

    Les règles de l’UE ne sont d’aucune utilité pour les gens ordinaires. Elles ont été adoptées pour égaliser le terrain de jeu des grandes entreprises plutôt que pour tenter d’améliorer la vie de la population. Ainsi, la libre circulation des travailleurs a surtout aidé les patrons à mettre pression sur les salaires et conditions de travail, cela ne visait pas à défendre les intérêts des travailleurs et d’assurer l’élévation de leur niveau de vie par-delà les frontières.

    Les normes européennes servent d’écran de fumée pour mieux cacher le fait que les politiques de l’UE sont conçues pour servir les intérêts des entreprises et lutter contre la propriété publique, contre les conventions collectives de travail, contre la régulation et contre les interventions de l’État.

    L’UE est essentiellement une association des classes capitalistes européennes sur base de traités qui réduisent les obstacles à leur soif de profits et facilitent leur concurrence avec d’autres blocs commerciaux à l’échelle mondiale.

    Cependant, les économies européennes n’ont pas été en mesure de surmonter les limites du développement de la production capitaliste sur la base de la propriété privée dans les Etats-nations, et elles ne le seront jamais. Parallèlement, elles font face à l’obstacle insurmontable d’une économie mondiale qui souffre partout de surcapacité de production.

    Jeremy Corbyn… et le GMB

    Jeremy Corbyn et d’autres à gauche ont eu tort de céder à la pression de l’aile droite du Parti Travailliste et à l’argument selon lequel l’UE est avantageuse pour les travailleurs. Ils ont ainsi préconisé de vote pour rester dans l’UE. Une des conséquences de cette erreur est que la campagne référendaire de Corbyn et les autres sera de nature à améliorer les chances de victoire pour Cameron et pour la poursuite de la politique d’austérité des conservateurs.

    Les dirigeants syndicaux se trompent aussi avec leur regardant du côté d’une «Europe sociale» afin de les aider à contrer les attaques antisyndicales et anti-ouvrières d’un gouvernement de droite comme celui de David Cameron. Un futur gouvernement britannique élu sur base du programme anti-austérité défendu par Corbyn alors qu’il menait campagne pour arriver à la tête du Parti Travailliste serait directement confrontée au caractère anti-travailleurs de l’UE.

    Le syndicat GMB (General workers’ union) a publié un communiqué de presse déclarant son souhait de rester dans l’UE, sous le motif que l’exploitation des grandes entreprises “est totalement stoppable. Non pas en votant pour quitter l’UE, mais en exigeant un retour à [la] vision d’une Europe sociale.” Mais qui à qui destiner cette exigence? Comment peut-on la concrétiser ? Il n’y a pratiquement pas de responsabilité démocratique dans l’UE. Les décisions sont prises par le Conseil européen – composé des chefs de gouvernement des 28 pays – et par la Commission européenne qui est en grande partie nommée plutôt qu’élue. Le Parlement européen et ses 751 députés sont presque impuissant.

    Plutôt que d’entrer en lutte pour oeuvrer à la tâche futile de «démocratiser» l’UE, l’attitude de la classe des travailleurs à travers l’Europe penche de plus en plus dans le sens du rejet de cette institution lointaine, bureaucratique et responsable.

    Comme l’a écrit Andrew Rawnsley dans le dernier numéro du Sunday’s Observer, les attitudes sont maintenant très éloignées de ce qu’elles étaient lorsque les politiciens du gouvernement avaient remporté le référendum de 1975 sur l’Europe: “Une grande partie de l’ancienne référence aux «figures d’autorité» s’est évaporée.Nous sommes dans un âge de colère, caractérisé par une aliénation généralisée et profonde de l’établissement.” Il a ajouté: “Le référendum pourrait être un bâton avec lequel donner une claque satisfaisante aux fesses de l’élite politique.”

    Le Financial Times a rapporté que certains hommes politiques pro-européens se demandent si soulever le spectre d’un effet domino du Brexit – à savoir, la désintégration rapide de l’ensemble de l’UE – ne pousserait justement pas les à voter pour ça à la place de les effrayer!

    Certains conservateurs anti-UE feignent soudainement de se préoccuper des personnes touchées par l’austérité. Le secrétaire à l’éducation Gove – détesté des enseignants pour avoir approfondi la privatisation du secteur et avoir lancé des attaques contre les conditions de salaires et de travail – a ainsi déclaré cette semaine avec hypocrisie que : «L’euro a créé la misère économique pour les personnes les plus pauvres de l’Europe.»

    La seule manière de combattre ce genre de monstrueuse duplicité, c’est de construire une campagne indépendante, basée sur la classe des travailleurs, afin de lutter contre l’Union européenne capitaliste et pour offrir la meilleure couverture médiatique à cette approche.

    Tout en appelant à un vote ‘out’, le Socialist Party reconnaît que pour la classe ouvrière et la classe moyenne, le fait que la Grande-Bretagne soit à l’intérieur ou à l’extérieur de l’Union européenne n représente aucune solution. Aucune de ces deux options n’est non plus une solution pour la population à travers l’Europe.

    Seule la solidarité internationale des travailleurs avec les luttes et les combats des uns et des autres pour une confédération socialiste démocratique du continent peut créer les bases pour une société qui transformerait la vie de l’écrasante majorité de la population.

  • [VIDEO] Référendum britannique sur l'UE: que doivent en penser les marxistes ?

    Lors du weekend 'Socialisme 2015' qui a pris place à Londres en novembre de l'an dernier, une discussion avait été organisée au sujet du référendum prévu en Grande-Bretagne concernant l'Union européenne. Notre camarade Hannah Sell y a développé l'approche défendue par notre parti-frère en Angleterre et au Pays de Galles, le Socialist Party.

  • Grande-Bretagne. La police a infiltré le Socialist Party

    carloneri

    Hier, les sites internet du Guardian et de la BBC ont dévoilé hier que «Carlo Neri», tel que nous l’avons connu, a infiltré le Socialist Party de 2001 à 2006 pour le compte la Metropolitan Police’s Special Demonstration Squad (SDS, équipe spéciale d’intervention en manifestation de la police métropolitaine). Ce n’est malheureusement pas surprenant.

    Déclaration de presse du Socialist Party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et au Pays de Galles)

    C’est très loin d’être la première révélation de ce type. En 2013, Peter Francis a révélé qu’il a également infiltré le Militant Labour, organisation qui est aujourd’hui le Socialist Party (et constituait à l’époque l’aile marxiste au sein du Parti Travailliste, NDT) au nom de la SDS. Francis a également admis avoir infiltré Youth Against Racism in Europe (YRE, Jeunes contre le racisme en Europe), une organisation de jeunesse démocratique dans laquelle nous avons été impliqués.

    D’autres preuves des tentatives répétées visant à espionner le Socialist Party ont été révélées en 2002 dans un documentaire de la BBC (intitulé “True Spies”) qui avait mis en lumière que la police du West Midlands avait espionné Dave Nellist, qui est toujours aujourd’hui membre du Socialist Party, au moment où il était député du parti travailliste en tant que Militant Labour.

    Lois Austin, membre du Socialist Party et porte-parole de Youth against Racism in Europe (YRE) et membre de la Commission d’enquête Pitchford sur les infiltrations policières :

    YRE_inflitration
    Une des nombreuses actions menées par YRE

    « Ce n’est là que la dernière de toute une série de scandales ayant révélé que la police a utilisé ses ressources afin d’infiltrer des organisations de gauche démocratiques. Une des principales campagnes de YRE concernait le meurtre de Stephen Lawrence (un assassinat qualifié d’être « l’un des plus évidents meurtres raciaux jamais résolu », NDT). Il a fallu 18 ans à la police pour condamner ses meurtriers (une enquête publique suite à ces évènement conduite sous la supervision du juge Macpherson en vint à conclure que la police était « institutionnellement raciste », NDT) mais nous voyons maintenant qu’elle consacrait ses ressources à l’espionnage de militants antiracistes, y compris en essayant de couvrir de boue la famille endeuillée de Stephen Lawrence.

    « En agissant de la sorte, la police a causé une détresse indicibles aux familles dont le nom des enfants décédés ont été utilisés par les agents infiltrés ainsi qu’aux femmes qui ont construit des relations avec ces hommes qui, à leur insu, étaient en réalité des agents de police sous couverture.

    « Il n’y avait aucune raison d’infiltrer YRE ou Militant Labour. Nous avons publiquement annoncé nos évènements, la police n’avait qu’à lire nos tracts et nos journaux ou à assister à nos réunions publiques pour savoir ce qui se passait. »

    L’ancien député Dave Nellist a ajouté :

    Former Coventry MP and staunch socialist Dave Nellist gave a rousing speech to the protesters. Picture by Jon Mullis 49.010.026.cov.jm7 (www.buyphotos247.com)
    L’ancien député de Coventry Dave Nellist

    « Quand sont apparues ces révélations concernant l’espionnage de la police, le gouvernement s’est vu forcé de réagir en mettant en place la Commission d’enquête Pitchford sur l’espionnage policier. Cela est le bienvenu, mais c’est insuffisant.

    « La Commission d’enquête de Lord Pitchford devra passer outre les tentatives de masquer la réalité. Il est injustifiable que des policiers infiltrés aient espionné un député démocratiquement élu en raison de sa défense d’opinions de gauche. Nous exigeons de connaître les noms de tous les agents « sous couverture », c’est la seule manière de découvrir la pleine mesure de ce qui s’est produit.

    « Nous exigeons également que le mandat de la Commission d’enquête soit étendu à l’Ecosse.

    « Mais à côté de cette Commission d’enquête, le mouvement des travailleurs et les syndicats doivent organiser leur propre enquête indépendante, composée de représentants du mouvement syndical et des groupes antiracistes et écologistes qui ont subi des infiltrations. Une telle enquête pourrait également aller au-delà du rôle de la police et aussi déterminer d’où provenaient les ordres et quel a été le rôle du gouvernement lui-même.

    « Nous refusons de dire que de telles infiltrations sont choses du passé. La surveillance des manifestants pacifiques a considérablement augmenté dans la période récente. Nous exigeons de savoir ce que les Carlo Neris d’aujourd’hui sont en train de faire.

    «Aujourd’hui, une nouvelle génération commence à s’impliquer dans des campagnes contre l’austérité, contre le racisme et contre la guerre. Quelle que puisse être l’ampleur des infiltrations policières, cela ne pourra pas empêcher ce fait. La remise en cause des intérêts que servent la Loi et la police, au côté de revendications visant à les rendre démocratiquement responsables, sera un aspect important des campagnes actuelles et futures. »

  • [VIDEO] Nancy Taaffe (Socialist Party) sur la BBC concernant le Labour et la guerre en Syrie

    nancyLors de l’émission BBC Daily Politics, un débat a eu lieu cette semaine concernant le vote de 66 parlementaires du Parti Travailliste (Labour) en faveur d’une intervention militaire en Syrie. Notre camarade Nancy Taaffe, du Socialist Party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et au Pays de Galles) y a développé une approche socialiste et à souligné l’importance de poursuivre les mobilisations anti-guerre.

  • Seule l’unité des travailleurs peut mettre fin au terrorisme, aux divisions et à la guerre

    protestparisLes atrocités commises par l’Etat Islamique (Daesh) à Paris le vendredi 13 novembre sont l’une des pires attaques commises en France depuis la Seconde Guerre mondiale. Il y a dix mois, les attaques menées contre Charlie Hebdo et un supermarché casher avaient suscité choc et indignation. Ces derniers meurtres déplorables ont abasourdi et consterné la population en raison du plus grand nombre de victimes et de la nature plus aveugle des attentats. La jeunesse de sortie le vendredi soir a particulièrement été touchée.

    Par Jenny Brooks, Socialist Party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et au Pays de Galles)

    Il s’agissait de la quatrième attaque terroriste liée à Daesh en deux semaines à peine, la suite des 224 décès de l’avion russe et des attentat-suicides de Beyrouth et Bagdad qui ont tué 61 personnes.
    Daesh veut cibler les pays ou les communautés opposées à son existence et à son développement, y compris parmi les musulmans. Les récentes attaques sur des Français et des Russes ont été justifiées par Daesh en raison des frappes aériennes lancées par ces deux pays en Syrie. Des gens ont donc été aveuglément abattus pour les crimes commis par leurs gouvernements, ces derniers n’agissant qu’en fonction de la défense des intérêts des classes dirigeantes.

    A la suite de ces attaques, François Hollande a déclaré l’état d’urgence et ordonné une nouvelle offensive, de plus grande ampleur, pour bombarder la ville de Raqqa en Syrie, qui est aux mains de Daesh, avec l’assistance des États-Unis. Leurs missiles de haute technologie qui infligent sans distinction une terreur de masse ainsi que nombre de décès et de blessés parmi les civils et les membres de l’organisation terroriste ne pourront pas prévenir que d’autres attaques terroristes soient commises en Occident.
    La situation catastrophique actuelle en Afghanistan et en Irak, avec l’émergence de Daesh en Irak et e Syrie, découle directement de la «guerre contre le terrorisme» lancée par George Bush après les attentats du 11 septembre 2001.

    Lorsqu’il s’est vu confronté à une révolte populaire de masse contre sa dictature en 2011, le président syrien Assad a volontairement attisé les tensions sectaires selon le principe de «diviser pour régner». Tout en s’opposant à Assad, les puissances occidentales craignaient également les soulèvements de masse qui ont pris place au Moyen Orient et en Afrique du Nord et menaçaient les régimes qui leurs sont dévoués. De même que leurs alliés réactionnaires des pays du Golfe, elles ont financé et armé l’opposition djihadiste à Assad. Cela a soutenu le développement de Daesh, avec l’exploitation des divisions sectaires et le sort des masses sunnites en Syrie et en Irak, jusqu’à ce que cette organisation contrôle aujourd’hui un territoire égal à la superficie de la Grande-Bretagne.

    Les bombardements des puissances impérialistes occidentales (et des forces d’Assad) aident Daesh à recruter à mesure que les images d’enfants déchirés par les missiles circulent au Moyen-Orient et dans le reste du monde. Pourtant, le discours révoltant de nombreux politiciens et médias capitalistes – dont cette semaine le journaliste Patrick Cockburn habituellement plus astucieux – affirme que Daesh ne peut être vaincu que par plus de bombardements militaires.

    Parmi eux se trouve David Cameron, qui depuis longtemps désire que les bombardements britanniques des positions de l’Etat Islamique en Irak soient élargis à son territoire syrien. Ce qui le retient encore, ce sont les divisions qui existent au sein de la classe dirigeante quant à la stratégie à adopter ainsi que le souvenir de sa défaite humiliante de 2013 au Parlement, quand il avait été empêché de bombarder les forces d’Assad. Il avait cependant autorisé l’assassinat par drone de deux djihadistes britanniques en Syrie en septembre et, maintenant, les attentats de Paris pourraient être instrumentalisés pour tenter de construire un soutien pour de nouvelles incursions.

    Le président nouvellement élu du parti travailliste, Jeremy Corbyn, a correctement argumenté contre les bombardements en Syrie en disant que cela n’apporterait que plus de chaos et qu’il est nécessaire de se poser des questions au sujet de ce qui alimente le conflit : « Qui arme l’Etat Islamique ? Qui assure qu’il puisse disposer de ports sûrs? Pour répondre, il faut poser demander qui vend des armes dans la région.»

    Des terroristes «formés localement»

    Les auteurs des attentats de Paris comprennent des terroristes français et belges. Comme David Gardner l’a souligné dans le Financial Times: «Même si une majorité solide des musulmans sunnites sont hostiles à l’Etat Islamique, les djihadistes ont encore deux grandes sources de recrues potentielles : les réfugiés désespérés aux frontières de la Syrie et les musulmans mécontents en Europe.»

    La France comprend la plus grande population musulmane d’Europe occidentale et elle a connu le plus grand exode d’un pays européen pour rejoindre les rangs djihadistes (plus de 1500 personnes). Concentrée dans les grandes cités des banlieues, la jeunesse musulmane française souffre de discriminations racistes, nombreux sont ceux qui se sentent aliénés et plus de 40% des jeunes musulmans sont au chômage. En Belgique, il existe aussi un taux de chômage élevé, de même qu’en Grande-Bretagne.

    Ce sont l’inégalité, le racisme, les guerres et le manque d’opportunités dans le système capitaliste qui sont derrière la «radicalisation» islamique en France. Le Centre de Prévention contre les dérives sectaires liées à l’islam (CPDSI) a estimé que 80% des citoyens français ayant des croyances «islamistes radicales» proviennent de familles non-religieuses.

    En Europe, l’Etat Islamique se nourrit des griefs et de la colère légitimes, particulièrement chez les jeunes musulmans. Son objectif est de diviser les communautés à travers la prédication d’un absolutisme religieux et en utilisant la terreur dans le but de renforcer sa base de soutien et sa fortune. Au plus ses attaques conduisent les politiciens de droite et d’extrême-droite à pointer du doigt tous les musulmans et les réfugiés, au plus il peut utiliser le mécontentement de la population musulmane.

    Contrer la menace terroriste

    Il est impossible que les puissances impérialistes parviennent à complètement détruire l’organisation djihadiste. Son affaiblissant sous les coups militairement portés ne sera pas de nature à dissuader de nouveaux djihadiste et groupes sectaires, comme cela se passe à travers le monde de toute façon. Vaincre Daesh ne peut être que le fait de la classe ouvrière et des pauvres en Irak et en Syrie. Ils doivent lutter ensemble au-delà des divisions sectaires contre toutes les forces réactionnaires locales, contre toutes les formes d’oppression et contre les forces réactionnaires plus éloignées.

    Le terrorisme ne sera pas bloqué par les mesures de «sécurité» et de surveillance des autorités. Les cibles potentielles sont beaucoup trop nombreuses. En Grande Bretagne et en France, des appels sont lancés pour accroître les pouvoirs de l’armée. Cela sera par la suite utilisé contre les luttes sociales et les actions ouvrières.

    La déclaration d’Etat d’urgence en France, y compris avec interdiction des manifestations de masse, est une mesure bien commode pour Hollande dans la mesure où beaucoup de personnes sont en colère contre lui à la suite de ces attaques et que son soutien baisse. Malheureusement, une importante partie de ces critiques ont été le fait de l’impact des attaques de la droite et de l’extrême droite, qui essayent de capitaliser sur ces attaques terroristes, plutôt que de l’action de la gauche. La défense d’une alternative socialiste n’a pourtant jamais été plus urgente.

    En France, en Grande-Bretagne et ailleurs, le mouvement des travailleurs a besoin de développer ses positions sur base d’une indépendance de classe, en fonction de ses propres intérêts et en totale indépendance des intérêts et de l’hypocrisie des gouvernements capitalistes et des classes dirigeantes. Cela doit comprendre l’unité d’action des travailleurs contre le terrorisme, les guerres et le système capitaliste lui-même, un système de plus en plus marqué par les inégalités et par son incapacité à satisfaire les besoins de l’écrasante majorité de la population.

    La transformation socialiste de la société est non seulement souhaitable, mais aussi est de vie ou de mort pour certains, comme les évènements de Paris le montrent tragiquement. La meilleure riposte est de rejoindre la lutte pour l’organisation démocratique des travailleurs et pour la défense des idées socialistes, ce à quoi sont engagées toutes les sections du Comité pour une Internationale Ouvrière.

  • [VIDEO] Weekend "Socialisme" en Angleterre : les idées socialistes sont de retour!

    socialistparty_socialism2015Le weekend “Socialism 2015” organisé ces 7 et 8 novembre par le Socialist Party d’Angleterre et du Pays de Galles (parti-frère du PSL et section du Comité pour une Internationale Ouvrière) fut la meilleure édition de cet événement. Les discussions qui ont pris place durant ce weekend ont été très sérieuses et reflètent les débats qui agitent la classe des travailleurs dans le cadre de l’élection de Jeremy Corbyn à la tête du parti travailliste. La confiance et la volonté de se battre contre l’austérité ont augmenté.

    Plus de 1.000 combattants de la classe des travailleurs, socialistes, syndicalistes et jeunes ont débattu et affiné leurs analyses et leur compréhension des questions de tactique et de tâches au cours des 38 ateliers et forums ainsi que des deux meetings centraux qui ont été organisés, sans encore parler des discussions qui ont eu lieu au bar par la suite.

    L’appel financier a permis de récolter pas moins de 30.000 £ (un peu plus de 42.000 euros), ce qui constitue un précieux indicateur de la volonté des membres et sympathisants du Socialist Party de faire face aux défis qui arrivent. Le stand de livres politiques de Socialist Books a vendu pour 2.000 £ de matériel (2800 euros), ce qui illustre la détermination de s’armer d’idées socialistes.

    socialistparty_socialism2015_02La vidéo ci-dessous reprend les discours du meeting central du samedi soir avec :

    * Peter Taaffe, secrétaire général du Socialist Party et ancien éditeur en chef du journal “Militant”, exclu du Parti Travailliste
    * Paul Murphy, député irlandais du Socialist Party (section irlandaise du Comité pour une Internationale Ouvrière) et de l’Anti-Austerity Alliance
    * Jawad Ahmed, chanteur pakistanais et activiste de l’International Youth and Workers’ Movement
    * Chris Baugh, assistant du secrétaire général du syndicat PCS
    * Suzanne Muna, membre de l’exécutif du syndicat Unite
    * Helen Pattison, membre de Youth Fight Austerity à Londres

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