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  • Capitalisme en crise : socialisme ou barbarie ! (1)

    Chaque jour, le capitalisme démontre l’ampleur de sa faillite : extrême pauvreté, guerres, famine, destruction de l’environnement,… Nous refusons ce constat, nous opposons résolument au capitalisme et luttons pour une société socialiste démocratique. Dans ce cadre, notre réflexion et nos actions sont basées sur le marxisme. Ce dossier vous présente nos critiques contre le capitalisme ainsi qu’un petit aperçu de ce qu’est notre vision du socialisme. Ce texte est largement basé sur le livre «Le socialisme au 21e siècle» de notre camarade britannique Hannah Sell.

    Qu’est-ce que le capitalisme?

    En 300 ans d’existence, le capitalisme a changé la face du monde à coups de voies ferrées, de lignes électriques, d’avions, d’ordinateurs,… Au cours du dernier siècle seulement, l’économie mondiale est devenue 17 fois plus grande !

    Cependant, malgré les capacités technologiques actuelles, malgré tout le potentiel aujourd’hui présent, 1,2 milliard de personnes n’ont aucun accès à l’eau potable, 841 millions de personnes sont sous-alimentées et jusqu’à 28 millions d’Africains sont infectés par le virus du SIDA. Alors que le capitalisme consacre des milliards d’euros au bombardement d’une population pauvre comme celle d’Afghanistan, au même moment, ce système n’a aucune solution pour la pauvreté, la faim ou les maladies. En fait, le capitalisme est même une menace pour l’avenir de la planète. L’avidité conduit à une production aveugle qui ne tient aucun compte de l’homme ou de l’environnement.

    Les forces productives ont amplement été développées, mais elles ne sont pas systématiquement utilisées. Seul compte le profit à court terme. De leur côté, les gouvernements et les politiciens traditionnels sont au service des intérêts du capital et c’est à cet objectif que l’appareil d’Etat ou le pouvoir judiciaire est utilisé. Le capitalisme est soi-disant un ‘‘marché libre’’ et une ‘‘démocratie’’ mais quelle participation démocratique avons-nous concernant la manière de produire ? Des milliards de personnes à travers le monde n’ont que la liberté d’être exploités ou de connaître la misère et la guerre.

    Qu’est-ce que le socialisme ?

    Une société socialiste assimilerait l’énorme potentiel des talents de chacun et de la technologie pour édifier une société et une économie au service des besoins de tous. Cela ne signifie pas que tous les problèmes seraient immédiatement résolus, loin de là, mais la suppression du profit marquerait le début de la construction d’une nouvelle société, ce qui n’est possible qu’à l’échelle internationale.

    Les marxistes sont en faveur d’une économie démocratiquement planifiée, une économie où les grandes entreprises qui dominent aujourd’hui plus de 80% de l’économie seraient mises sous le contrôle démocratique de la collectivité, ce que nous appelons le contrôle ouvrier. Cela ne signifie toutefois pas que tous les petits commerces, les boulangeries, les boucheries,… seraient nationalisés.

    Un régime socialiste nous permettrait d’avoir bien plus à dire que sous la ‘‘démocratie’’ parlementaire capitaliste, qui ne nous accorde que des élections fort médiatisées après quelques années, tout ça pour élire des représentants qui ne défendent pas nos intérêts et qui ne doivent en rien se justifier auprès de leurs électeurs. Pour les marxistes, tout le monde doit pouvoir participer au processus de prise de décision quant à la manière dont sont gérées l’économie et la société.

    Les élus devraient toujours avoir à se justifier et être révocables, à tous niveaux, par leurs électeurs. De plus, les représentants ne toucheraient que le salaire moyen d’un travailleur, afin de garder un lien concret avec le quotidien de la majorité de la population. Un parlementaire marxiste (comme notre camarade irlandais Joe Higgins au Parlement Européen) ne gagnerait ainsi que l’équivalent du salaire moyen d’un travailleur.

    Les marxistes luttent pour la démocratie des travailleurs, ce qui implique que toute la collectivité travaillerait ensemble à la planification de la production. A tous les niveaux, sur les lieux de travail et dans les quartiers, des comités de représentants seraient organisés, sur les plans régionaux et nationaux, sous le contrôle d’assemblées générales de base. Chacun aurait ainsi la possibilité de réellement participer aux décisions et à la gestion de la société.

    Le capitalisme a développé plusieurs outils pour nous faciliter cette tâche, comme l’enseignement, qui fournit un niveau supérieur d’éducation, ou encore les nouvelles technologies, qui rendent la communication beaucoup plus facile et potentiellement bien plus accessible. La planification de l’économie n’est pas une utopie, les grandes entreprises et les multinationales fonctionnent d’ailleurs sur base d’une planification de leurs activités à grande échelle. Mais porter cela au niveau de la société signifie de s’attaquer à leur propriété.

    Le socialisme va bien au-delà du simple partage des richesses. Il s’agit également de décider de ce qui est produit et de quelle manière. Nous voulons immédiatement en finir avec le gaspillage consacré à des industries comme celle de la publicité. Nous voulons répartir le travail disponible au lieu de demander à une couche de travailleurs de travailler plus dur et plus longtemps alors qu’une autre couche (y compris beaucoup de jeunes) est au chômage.

    Mais aujourd’hui, dans le cadre d’une société où le profit est sacré et où l’humanité souffre sous ses diktats, il n’est pas possible de donner une vue complète de ce que sera une société socialiste. Nous ne pouvons que donner un léger aperçu en mettant en lumière les conditions qui permettront au potentiel existant d’être utilisé dans l’intérêt de la majorité de la population.

    Le socialisme n’aboutira-t-il pas à une dictature bureaucratique comme en Russie ?

    Les monstrueuses dictatures bureaucratiques et sanglantes de Russie, de Chine, d’Europe de l’Est et d’ailleurs étaient une négation totale du véritable socialisme démocratique. Mais il est fondamental que les marxistes d’aujourd’hui étudient l’expérience de la Révolution russe afin d’expliquer les raisons qui ont conduit à sa dégénérescence bureaucratique. En fait, ce processus trouve ses racines dans des conditions historiques spécifiques et non dans la nature humaine.

    La Révolution russe de 1917 a constitué la première fois où la classe ouvrière a renversé le capitalisme et a commencé à instaurer une nouvelle société socialiste. L’Union Soviétique des premiers temps était le gouvernement le plus démocratique que le monde ait jamais connu: ouvriers et paysans dirigeaient la société démocratiquement par l’intermédiaire de conseils ouvriers (c’est-à-dire, en russe, des soviets). C’est le premier Etat au monde à avoir donné aux femmes la totalité des droits légaux, comme le droit de vote et celui d’avorter. L’Union Soviétique avait aussi légalisé l’homosexualité.

    Les dirigeants bolcheviks Lénine et Trotsky, ont toujours expliqué qu’il était impossible d’instaurer le socialisme dans un seul pays, et plus particulièrement dans les conditions semi-féodales de la Russie de l’époque. Pour eux, la Révolution russe ne pouvait parvenir à survivre qu’en s’étendant aux puissants pays capitalistes d’Europe occidentale.

    Les principales puissances impérialistes ont elles-mêmes reconnu que la Révolution russe n’était pas une affaire purement locale et que le capitalisme était mondialement menacé. Elles ont donc participé à une sanglante guerre civile du côté des capitalistes et des propriétaires terriens russes afin de renverser le nouveau gouvernement soviétique. 21 pays ont envahi la Russie pour soutenir la contre-révolution (États-Unis, France, Allemagne, Grande-Bretagne, Belgique, Japon,… ) Pour que les bolcheviks arrivent à remporter la guerre civile (1918-1921), la vague de révolutions qui a déferlé sur toute l’Europe et dans le monde a été décisive. La Révolution russe et l’appel des bolcheviks aux travailleurs du monde entier au soulèvement contre la Première Guerre Mondiale avait mis le feu aux poudres. Les soulèvements révolutionnaires en Allemagne et à travers l’Europe ont entraîné la fin de la guerre et ont forcé les classes dirigeantes à retirer leurs troupes hors de Russie afin d’éviter d’autres bouleversements dans les pays capitalistes.

    Malheureusement, ces révolutions n’ont pas réussi à renverser le capitalisme. A la différence de la Russie, il n’existait aucun parti révolutionnaire de masse disposé à mener les révolutions jusqu’à leur terme. Au lieu de cela, les partis ouvriers de masse en Europe ont été dominés par les dirigeants réformistes qui ont joué un rôle décisif pour sauver l’économie capitaliste. Ainsi, alors que l’Union Soviétique a vaincu la contre-révolution, la jeune république Soviétique est restée isolée. La première guerre mondiale puis la guerre civile avaient laissé le pays dans une situation désastreuse, les masses épuisées, au chômage et affamées. Tout cela a constitué la base pour l’accession au pouvoir d’une caste bureaucratique conservatrice. La bureaucratie, groupée autour de Staline, a concentré le pouvoir dans ses mains dans les années ’20 et ’30 et a démoli les droits démocratiques que la classe ouvrière russe avait réussi à obtenir.

    Les nombreuses révolutions qui, plus tard, ont pris place dans le monde néocolonial et en Europe ont malheureusement regardé la Russie comme le modèle à suivre, et le gouvernement bureaucratique soviétique a pu exporter son modèle stalinien vers la Chine, l’Europe de l’Est, et ailleurs.

  • Eco-terrorisme dans le Golfe du Mexique

    Nationaliser BP et le secteur pétrolier

    Suite à l’explosion, le 20 avril dernier, de la plate-forme Deepwater Horizon, le président américain a qualifié la catastrophe de ‘‘11 septembre écologique’’ ! Il n’a malheureusement pas poussé son raisonnement jusqu’au bout… Le capitalisme et sa logique de maximisation du profit est prêt à causer des dégâts irréversibles à l’environnement et à ceux qui y vivent. La ‘‘guerre contre le terrorisme’’ est un échec, et si nous voulons éviter que la lutte contre ‘l’éco-terrorisme’ n’emprunte la même voie, nous devons détruire la base matérielle de cet ‘éco-terrorisme’ : le système de production capitaliste. Seule une gestion démocratiquement planifiée de l’économie peut à l’avenir assurer qu’une telle catastrophe ne se reproduise plus.

    Par Alain, Namur, article tiré de l’édition d’été de Lutte Socialiste

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    Multinationales pétrolières et changements climatiques

    La réalité des changements climatiques est aujourd’hui généralement acceptée, mais les sociétés pétrolières ne jouent pas seulement un rôle important dans la pollution. Elles essayent aussi de jouer sur la perception que nous avons de cette pollution.

    Le journaliste d’investigation George Monbiot a démontré qu’ExxonMobil avait ainsi directement ou indirectement subventionné 124 organisations dont le but était de contester les changements climatiques. La tâche de ces organisations est de semer la confusion en affirmant qu’il existe d’autres positions scientifiques que celles qui dénoncent les modifications climatiques. Cela aboutit parfois à des conclusions absurdes, comme de dire qu’il y a plus de chance de connaître une invasion extra-terrestre qu’un changement climatique… Tout est bon pour semer le trouble dans les médias et l’opinion publique.

    Sécurité ignorée

    Des documents démontrent que BP a ignoré des avertissements au sujet de la possibilité d’une fuite. En 2009, un rapport de la multinationale a affirmé qu’un accident était peu probable, voire même impossible. Mais les scientifiques et les membres du personnel ont toujours dit que c’était une conclusion un peu trop rapide. BP a économisé de toutes les manières imaginables, notamment en travaillant avec des sous-traitants, ce qui a assuré le licenciement de centaines d’ingénieurs. On a vu le résultat qui accompagne ces pratiques.

    Les amis de BP

    Jusqu’à présent, BP a entretenu de très bons liens avec l’establishment politique. Sarah Palin peut bien faire des critiques aujourd’hui, les liens entre son parti, les républicains, et le secteur pétrolier ne sont plus à démontrer. Le président Obama a, par exemple, reçu une aide financière de la compagnie pour sa campagne électorale. A peine un mois avant le désastre du Golfe du Mexique, le gouvernement Obama avait d’ailleurs examiné une loi destinée à élargir les possibilités pour le forage en haute mer. Quant au secrétaire d’Etat à l’énergie du gouvernement Obama, Steven Koonin, il était encore il y a fort peu directeur de recherche au service de… BP. Il était notamment responsable de la surveillance de la sécurité des plateformes en haute mer !

    A lire aussi:

    • Rubrique "écologie" de ce site
    • Nationalisation de BP et des sociétés pétrolières – Transition vers l’énergie propre MAINTENANT! – Tract de Socialist Alternative (CIO-USA)
    • Marée noire catastrophique dans le Golfe du Mexique – Arrêtons les pollueurs !

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    11 travailleurs payent de leur vie la course aux profits

    Selon plusieurs sources (dont deux élus démocrates au congrès US), BP aurait pris des risques lors du forage de la plateforme afin de se débarrasser de certains coûts… dont celui de la sécurité. Les économies ainsi réalisées seraient comprises entre 7 et 10 millions de dollars. De plus, avant l’explosion, plusieurs rapports avaient rapporté des incidents, sans que BP ne juge utile de leur donner suite.

    Lors de l’explosion de la plateforme, 11 travailleurs sont décédés, une illustration du fait que la classe ouvrière paye toujours le prix fort de la course au profit. La classe des travailleurs toute entière sera touchée de diverses manières : les travailleurs de Louisiane (déjà victimes de l’ouragan Katrina) vont subir le choc de la catastrophe sur un secteur important de l’économie régionale, celui de l’élevage de crevettes (40% des fruits de mer consommés dans le pays proviennent de Louisiane). Le coût engendré par le nettoyage des plages ne sera que partiellement payé par BP. Des bénévoles sont parfois à l’œuvre sur certaines plages pour éliminer les galettes de pétrole qui s’y échouent. Et comment évaluer la perte subie par le patrimoine naturel (poissons, fonds marins, modification du biotope et de la biocénose) ? Le coût de la catastrophe ne pourra être que sous-évalué, au détriment de la collectivité.

    La énième catastrophe

    Le 24 mars 1989, l’Exxon Valdez a été responsable d’une marée noire de 38.500 tonnes en Alaska. Exxon a payé 3.4 milliards de frais de nettoyage et 500 millions de dollars de ‘‘dommages punitifs’’. Le 16 mars 1978, l’Amoco Cadiz a été responsable d’une marée noire de 227.000 tonnes de pétrole sur les côtes de Bretagne. Standard Oil a payé 1,25 milliard de dollars après 14 ans de procédure. Le 12 décembre 1999, le naufrage de l’Erika a déversé 20.000 tonnes sur les côtes de Bretagne, Total ne payant que 570 millions d’euros, dont 200 millions font toujours l’objet d’un pourvoi en cassation. Le Prestige, le 13 novembre 2002, a déversé 64.000 tonnes sur les côtes d’Espagne, de France et du Portugal. Le fond international d’indemnisation pour les dommages dus à la pollution (FIPOL) par les hydrocarbures estime à 1.05 milliard d’euros le coût de cette catastrophe. Finalement, le désastre du 20 avril 2010, qui aura déversé (selon les estimations du gouvernement américain) entre 177.000 et 322.000 tonnes de pétrole dans le Golfe du Mexique coûtera 9,8 milliards de nettoyage et environ 8,6 milliards d’indemnisation et de frais de justice (Le Soir, 16 juin 2010). Cette somme, même astronomique au regard des salaires et des sommes avec lesquelles la classe ouvrière doit se débrouiller, n’est qu’une grosse cacahuète au vu des dividendes versés par BP ces dernières années (environ 8,7 milliards d’euros par an).

    Le titre de BP a subi des troubles en Bourse suite aux annonces menaçant de ne pas verser de dividende cette année. Cela démontre encore une fois de quelle rapacité font preuve les actionnaires face aux désastres écologiques et humains.

    Une catastrophe qui en cache des tas d’autres dans le secteur

    Dans le delta du Niger, un oléoduc d’ExxonMobil s’est rompu rejetant 4 millions de litres de brut pendant 7 jours avant que la brèche ne soit colmatée. Avec ces 606 champs pétrolifères, le Delta du Niger fournis 40% des importations américaines de pétrole. C’est devenu aussi la capitale mondiale de la pollution pétrolière… En deux générations, l’espérance de vie est retombée à 40 ans dans certaines régions de ce Delta. Entre brèche et fuite, tous les sols sont souillés. La corruption des régimes compradores de la région permet que les compagnies pétrolières ne soient pas trop inquiétées.

    Plus jamais ça ?

    Barack Obama a appelé l’économie américaine à se libérer de sa dépendance face au pétrole pour s’orienter vers les énergies du 21 siècle. Ce genre de déclaration ne vise qu’à restaurer son image, fortement écornée par sa gestion de l’affaire, qualifiée au mieux de molle.

    Quand on demande aux travailleurs du secteur de la crevette dans la région s’ils sont favorables à la fermeture des plates-formes, leur réponse n’est pas unilatérale. En effet, le secteur pétrolier est aussi un grand pourvoyeur d’emplois et chaque crevettier a soit un fils, soit des amis qui travaillent dans le secteur. L’attitude incantatoire d’Obama tente en fait de masquer que les USA sont dépendants de l’industrie pétrolière. La seule solution, pour sortir de cette dépendance, est de nationaliser ce secteur hautement stratégique et en même temps dangereux. La mise sous contrôle des travailleurs de sites critiques comme ceux des plateformes en haute mer permettrait de ne pas laisser au seul soin du profit d’évaluer la politique de gestion du risque.

    Pour sortir de la dépendance aux énergies fossiles, il faut planifier la transition vers les énergies renouvelables. Cela ne peut se faire que dans le cadre d’une économie planifiée. En effet, sur base capitaliste, la transition vers les énergies renouvelables est bloquée par l’investissement énorme qui est nécessaire afin de développer le secteur.

    La concurrence dans un secteur pour obtenir une bonne part de marché et réaliser son profit, combinée à la concurrence entre tous les secteurs de l’économie, donne lieu à une répartition sectorielle du taux de profit. Le capitalisme vert n’est qu’une modification sectorielle de la répartition du taux de profit. Cela signifie que cela reste du capitalisme et, sous ce système, on ne peut trouver aucune solution pour répondre aux besoins sociaux tout en faisant face aux contraintes environnementales.

  • Construire le CIO : diffuser les idées socialistes à travers le monde

    La crise capitaliste conduit à un intérêt croissant pour les idées et les campagnes socialistes du CIO

    A la mi-juillet s’est déroulée, à Gand, l’école d’été du CIO. Cette semaine très réussie a réuni plus de 400 participants. La dernière session de discussion était consacrée à la construction du Comité pour une Internationale Ouvrière, dans cette période de crise mondiale économique et politique.

    Rapport de l’école d’été du CIO par Michael O’Brien, Socialist Party (CIO-Irlande)

    La session a débuté par un montage vidéo consacré aux récents mouvements de protestations qui ont pris place sur tous les continents, et auxquels le CIO a activement participé, et en a même initié certains. Niall Mulholland, du Secrétariat International du CIO, a introduit la discussion, en résumant les expériences de différentes sections au cours de l’année écoulée, en parlant de leurs percées mais également des défis auxquelles elles ont dû faire face.

    La plupart des sections du CIO ont connu une croissance de leurs effectifs pendant l’année passée. Malgré l’ampleur de la crise et l’absence d’une alternative claire pour les travailleurs, Niall a souligné qu’il serait une erreur de faire un lien automatique entre le déclenchement d’une récession et le fait que des jeunes et travailleurs y répondent en tirant immédiatement des conclusions socialistes. En général, la conscience politique tend à être en retard sur les évènements. La précédente période de domination idéologique néolibérale, les obstacles pratiques que constituent les directions syndicales de droite et l’absence d’une alternative politique de gauche à une échelle de masse ont été autant d’éléments qui ont constitué un frein pour le développement d’une réponse militante plus active de la part des travailleurs et des jeunes. Cela étant dit, les évènements poussent clairement une grande partie de la jeunesse et des travailleurs à entrer en opposition face au système, et il existe une couche qui se radicalise de plus en plus et qui est attentive aux idées du socialisme et du Comité pour une Internationale Ouvrière.

    Toutes les sections du CIO ont fait l’expérience d’une accélération du rythme de leur activité ces derniers mois, car les sujets sur lesquels se battre et faire campagne ne manquent pas. L’année dernière a aussi vu un renouveau de l’activité du CIO dans des endroits comme l’Espagne, le Portugal et Taïwan. ControCorrente, en Italie, a rejoint le CIO, le Mouvement pour le Parti Socialiste fait campagne pour construire le CIO au Québec,…

    Niall s’est particulièrement concentré sur le développement du CIO en dehors de l’Europe. Le CIO est actif dans des pays tels que la Malaisie ou encore la Bolivie. Au Brésil, la section du CIO a obtenu un grand succès lors de sa fusion avec un autre groupe de gauche pour former Liberté, Socialisme et Révolution. Des discussions et une collaboration avec d’autres groupes de gauche voient le jour dans des pays variés, y compris en Turquie.

    Les socialistes rencontrent des situations difficiles

    Niall a aussi fait état que, dans certaines parties du monde comme au Sri Lanka et au Nigéria, la période à laquelle les socialistes sont confrontés est actuellement très difficile à cause des guerres, de l’oppression nationale, d’une généralisation extrême de la pauvreté et d’un recul des luttes de masse. Les sections du CIO au Sri Lanka (le Parti Socialiste Unifié) et au Nigéria (le Mouvement Socialiste et Démocratique) ont accompli le miracle de maintenir leurs forces, construites à travers des années en développant leur politique et leur programme, ce qui les place dans une bonne position pour une croissance substantielle lorsque la situation leur sera plus favorable.

    Un des développements les plus frappants cette année a été celui rencontré par le CIO au Pakistan avec le Mouvement Socialiste du Pakistan, qui a récemment pu tenir une école de cadres rassemblant plus de 100 personnes. Etant donné la pauvreté énorme au Pakistan et le manque d’infrastructures, la construction d’une organisation socialiste dans ces conditions relève de l’exploit. Cette section a aussi vu la fédération syndicale qu’elle a lancée, la Fédération Progressiste des Travailleurs du Pakistan, augmenter son nombre de membres pour atteindre les 500.000 membres.

    Niall a aussi évoqué les différentes activités dans lesquelles les sections européennes du CIO ont été impliquées, ce qui a été développé plus en détail dans la discussion. Le rôle pratique qu’une organisation internationale comme le CIO peut jouer a été démontré par la semaine de solidarité et d’action initiée par Joe Higgins, notre député européen, et soutenue par le groupe de la Gauche Européenne du Parlement Européen en juin, contre les attaques d’austérité qui pleuvent sur la classe ouvrière grecque. En conséquence, les sections du CIO ainsi que d’autres partis de gauche ont organisé des protestations, des piquets de grève et des meetings dans toute l’Europe.

    Avec la croissance numérique du CIO se présente le défi de développer politiquement et organisationnellement des camarades expérimentés pour qu’ils participent et mènent des luttes dans leur quartier, leur lieu de travail ou d’étude.

    Dans la discussion qui a suivi, le camarade Brett des Etats-Unis a fait état d’une série d’interventions que Socialist Alternative (CIO-USA) a fait dans les luttes récentes, notamment avec une grève des infirmières à Philadelphie, avec le mouvement anti-guerre contre l’envoi de troupes en Afghanistan par Obama et avec le « Grassroots Education Movement », qui a été mis en place en réponse à la privatisation à venir de l’éducation.

    Christel, de ControCorrente (CIO-Italie) a parlé du travail avec les postiers en lutte contre la privatisation. Suite à l’initiative d’un jeune camarade dans la petite ville d’Abruzzo, une manifestation contre l’extrême droite de Forza Novo a eu lieu.

    Gary a parlé du travail du Socialist Party en Irlande du Nord, où les problèmes du sectarisme compliquent pas mal l’activité de nos camarades. Néanmoins, les effets des coupes sociales se font ressentir et notre parti a récemment été à l’initiative d’une manifestation réussie à Belfast, avec le soutien de nombre de syndicats. Ce genre de travail a créé les bases pour le développement de nouvelles sections du Socialist Party.

    Kyriakos, de Xekinima (CIO-Grèce), a décrit le travail des camarades dans l’alliance de gauche Syriza, ainsi que notre travail dans d’autres secteurs, et particulièrement parmi la jeunesse. Xekinima a traversé une période de croissance rapide dans les années récentes et développe ses efforts pour former plus de cadres.

    Greg, du Socialist Party (CIO-Angleterre & Pays de Galles), a montré des chiffres prouvant la croissance dans le nombre de nouvelles adhésions ces derniers mois, particulièrement remarquable parmi les syndicalistes. Une nouvelle dynamique a permis au parti de refonder des sections dans plusieurs villes. Le week end ‘‘Socialisme 2010’’ en novembre, les campagnes contre les coupes budgétaires dans les quartiers et les syndicats seront les principaux axes de travail du parti.

    Ioshe du Mouvement de Lutte Socialiste (CIO-Israël) a parlé de la participation des membres du CIO dans les mouvements de protestation contre l’attaque contre la flotille d’aide humanitaire à Gaza, ainsi que contre les colonies en Cisjordanie. Les camarades ont aussi gagné de nouveaux membres suite à leur participation aux campagnes pour les droits des LGBT en Israël.

    La lutte pour le socialisme en Inde, en France et en Belgique

    Vishwa, de la Nouvelle Alternative Socialiste (CIO-Inde) est intervenu sur le travail des camarades contre les activités des compagnies minières, qui se sont vues offrir par le gouvernement les ressources naturelles indiennes et qui tire du profit de l’exploitation effrénée des travailleurs et de l’environnement. Le livre du CIO, Le Marxisme dans le monde d’aujourd’hui, a été traduit dans une quatrième langue en Inde, afin d’apporter aux idées socialistes un profil encore plus grand dans le sous-continent.

    Alex de la Gauche Révolutionnaire (CIO-France), a décrit comment la section française a participé au Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA), où les camarades font campagne pour que celui-ci adopte un programme socialiste. Le CIO en France mène également des campagnes antiracistes et pour les droits des écoliers.

    Bart du Linkse Socialistiche Partij / Parti Socialiste de Lutte (CIO-Belgique) a décrit comment le CIO développe la formation socialiste de ses membres après une croissance significative du parti. Alors qu’il n’y a pas eu de lutte généralisée en Belgique depuis une certaine période, il y a eu quelques mouvements importants de la jeunesse et des luttes industrielles isolées auxquelles les membres du CIO ont apporté leur soutien.

    Pour clore l’école d’été 2010, Tony Saunois du Secrétariat International a souligné qu’il s’agissait de la plus grande école d’été depuis plus de 20 ans, ce qui est une autre indication des progrès que le CIO a fait pendant l’année passée. Avec cette croissance arrive aussi le défi de former des cadres – ce qui peut être fortement accéléré dans le contexte de la crise économique et l’augmentation du tempo de la lutte des classes, ce qui permettra à de nouveaux membres du CIO d’acquérir rapidement, à plus ou moins court terme, une expérience vitale.

    Tony a aussi souligné l’importance de l’appel de la Confédération Européenne des Syndicats pour des actions à l’échelle européenne le 29 septembre prochain contre les coupes sociales et les plans d’austérité. A cette date, une grève générale aura également lieu en Espagne. Le CIO en Europe participera aux grèves et aux manifestations qui se tiendront ce jour ci, là où ce sera possible.

    L’école d’été se conclut sur les notes de l’Internationale, chantée dans plus de douze langues, alors que les participants se préparent pour les luttes futures. A cette date, il y aura également une grève générale en Espagne. Le CIO, à travers l’Europe, va participer aux grèves, manifestations et diverses initiatives qui auront lieu ce jour-là, partout où cela nous sera possible.

    Cette école d’été du CIO a été clôturée par l’Internationale, chantée dans une douzaine de langues différentes, avec un grand enthousiasme de la part des participants, qui sont prêts pour les luttes à venir.

  • La construction de nouveaux partis des travailleurs et les tâches des marxistes

    Lors de l’école d’été européenne du CIO qui s’est déroulée en Belgique à la mi-juillet, une attention particulière a été accordée à la question de la construction de nouveaux partis des travailleurs de masse. Depuis maintenant près de 20 ans, l’appel à la formation de nouveaux partis des travailleurs est une partie cruciale du programme politique de bien des sections du Comité pour une Internationale Ouvrière. Cette école d’été était un moment idéal pour partager les expériences variées de nos sections concernant cette question, pour discuter des perspectives de développement des nouveaux partis et pour tirer les leçons principales au sujet de notre double tâche : construire les forces marxistes révolutionnaires tout en participant au développement de nouveaux partis des travailleurs de masse.

    Rapport de l’école d’été du CIO par Paul Murphy, Socialist Party (CIO-Irlande)

    En introduction à la discussion, Tony Saunois (Secrétariat International du CIO) a fait le tour des principaux développements qui se sont déroulés ces dernières années. Il a expliqué que le processus de bourgeoisification des anciens partis sociaux-démocrates et ‘communistes’ a constitué un élément clé qui nous a poussés à appeler à des nouveaux partis des travailleurs de masse. C’est ce processus qui a conduit à ce que des partis tels que le Labour Party en Grande-Bretagne ou encore le SPD en Allemagne, qui avaient une base ouvrière active et une direction pro-capitaliste, deviennent de plus en plus des partis capitalistes qui avaient perdus leurs racines.

    Dans sa réponse à la discussion, Andros (de Grèce) a mis en avant que cet appel pour de nouveaux partis des travailleurs est de bien des façons la continuation de l’orientation traditionnelle du CIO vers les formations de masse de la classe ouvrière. Dans les années ’60, ’70 et ’80, cette tactique a été facilement appliquée en s’orientant vers les partis traditionnels sociaux-démocrates, y compris en y participant, et parfois vers d’autres partis. Maintenant, nous avons à appliquer cette tactique de manière différente, en particulier avec cet appel à construire de nouveaux partis des travailleurs de masse.

    Depuis la droitisation décisive des partis sociaux-démocrates, de nouvelles formations de gauche ont été créées. Cependant, à l’exception de Rifondazione Communista en Italie, aucune d’entre elles n’a été rejointe par un large nombre de travailleurs et n’est devenue un véritable parti de masse. Deux questions cruciales sont à mettre en avant pour expliquer cela : l’absence d’un programme de gauche clair, anticapitaliste et socialiste capable d’attirer les travailleurs et les jeunes dans le contexte de la crise capitaliste et la faiblesse persistante concernant l’orientation vers les luttes et les actions des travailleurs, ce qui signifie que ces partis n’ont pas été revitalisés par les luttes qui ont émergé en Europe. En raison de cela, le processus de développement de ces partis ainsi que le travail en leur sein a été compliqué. Tony a expliqué que la question des nouveaux parties des travailleurs est enracinée dans la situation objective, tout comme il n’est pas possible pour la classe ouvrière de donner naissance à des formations révolutionnaires de masse d’un coup. Généralement, au vu du niveau actuel de conscience de classe, le développement de partis des travailleurs de masse est une étape nécessaire sur la route du développement de la conscience et de partis révolutionnaires de masse.

    Pourquoi participons nous aux nouveaux partis des travailleurs ?

    Les complications rencontrées dans les nouvelles formations ont été abordées par de nombreux camarades. La réalité est que la plupart des directions de ces formations ne considèrent pas devoir présenter une opposition claire contre les partis de l’establishment. Un des camarades allemands du CIO a par exemple expliqué qu’aucun dirigeant de Die Linke ne voit le socialisme comme une alternative réelle au capitalisme. Cela peut conduire à un travail très frustrant à l’intérieur de ces partis, avec nos initiatives constamment bloquées par la bureaucratie du parti.

    Sascha, d’Allemagne, a toutefois insisté sur l’importance pour le CIO de faire partie de ces partis en raison des perspectives de ces partis. Avec sa politique actuelle, il est improbable que Die Linke se développe pour devenir un véritable parti ouvrier de masse en Allemagne. Il est toutefois possible que ces formations jouent un rôle dans la formation de nouveaux partis de masse de la classe ouvrière.

    En réalité, il y a deux partis au sein de Die Linke – un parti ouvrier réformiste et un parti social-libéral pro-capitaliste. La possibilité est réelle qu’une scission arrive à un moment donné. Il est vital que les membres du SAV (CIO-Allemagne) soient présents dans de tels développements, afin de défendre des politiques claires, de gauche et socialistes ainsi que pour tenter d’organiser une gauche forte, apte à grandir pour devenir un parti de masse. L’autre possibilité à ne pas écarter, c’est que Die Linke soit poussé à gauche par la lutte de classe, ce qui déboucherait probablement sur le départ des éléments les plus à droite du parti.

    Comme cela a été montré par l’instabilité des nouvelles formations de gauche, il n’est pas possible de créer des partis des travailleurs stables suivant les lignes des partis sociaux-démocrates ou ‘communistes’ de la période d’après guerre. Cela s’explique par la nature de la période actuelle et de la crise économique, qui ne permet pas les mêmes bases matérielles pour des réformes telles que celles que la période d’après-guerre a connue. La question des coalitions avec des parties pro-capitalistes et celle de rejoindre un gouvernement qui attaque la classe ouvrière est posée. C’est pourquoi ces nouvelles formations sont instables, avec des tensions internes et parfois des scissions.

    La réaction de la gauche face à la crise économique

    Les nouvelles formations de gauche, dans différents pays, ont des origines et des caractéristiques différentes. Le Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) français, par exemple, a été lancé par une organisation se réclamant du trotskisme, la Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR), qui a évolué vers la droite et s’est dissoute dans une formation plus large. Le processus de construction de Die Linke en Allemagne a été initié par des syndicalistes et des responsables syndicaux de base qui ont rompu en 2004 avec le SPD (l’équivalent allemand du PS, ndt) pour former le WASG, qui s’est joint plus tard au successeur de l’ancien parti dirigeant est-allemand, le PDS, pour former Die Linke. Le Bloc de Gauche au Portugal a été initié par un rassemblement d’organisations de gauche existantes, en particulier des maoïstes, des trotskistes de la tradition du SUQI (Secrétariat Unifié de la Quatrième Internationale, à laquelle était liée l’ancienne LCR française) et des eurocommunistes (des réformistes avec une rhétorique communiste). Syriza, en Grèce, est une alliance d’organisations de gauche, dont la plus grande est Synaspismos, qui a émergé en tant que scission eurocommuniste du Parti Communiste Grec (KKE).

    Il existe toutefois des éléments communs à tous. Le plus marquant a été la tendance à virer non pas vers la gauche sur base de la crise économique, mais vers la droite. Marco, d’Italie, s’est référé à l’expérience de Rifondazione Communista (le PRC), qui exprime les dangers d’une telle approche et d’une participation aux gouvernements capitalistes. Le PRC, qui avait plus de 100.000 membres à son apogée, a été détruit par sa direction de droite, et les membres du CIO en Italie font campagne pour la construction d’une “gauche des travailleurs” incluant des anciens mais aussi des nouveaux militants.

    Dimitrios, de Grèce, a expliqué que l’alliance Syriza avait à un certain moment quelques 17.5% dans les sondages d’opinion, mais a chuté à 4%, largement en raison de la politique de ses dirigeants, faite de zigzags. Même quand une position réellement socialiste est prise par ses organes dirigeants, aucun des porte-paroles ou des représentants publics de Syriza ne met publiquement en avant cette position. Dimitrios a aussi critique le nouveau programme de Syriza, propose par ses dirigeants, qui est un méli-mélo de revendications qui ne met pas en évidence une claire alternative de gauche pour les travailleurs et leurs familles dans ce contexte de crise profonde.

    En conséquence, Syriza traverse maintenant une crise sérieuse. L’aile droite de Synaspismos (le plus grand groupe de Syrisa) a joué un rôle de frein pour chaque orientation à gauche. Il y a un mois, cette aile droite a scissionné et Xekinima (CIO-Grèce) a accueilli cette scission comme une opportunité pour Synaspismos et Syriza d’effectuer un virage décisif vers la gauche. Notre position a cependant été attaquée par d’autres et a généré beaucoup de débats, mais aussi d’attention pour nos arguments.

    Cédric, du CIO, a parlé des forces de gauche au Portugal. Malheureusement, le Bloc de Gauche possède beaucoup des faiblesses de ces nouvelles formations de gauche à travers l’Europe. Il n’a pas eu de réponse face à la crise et n’a lancé aucune proposition concrète capable de mobiliser les travailleurs et les jeunes. Son slogan principal se limite à dire “plus de justice dans l’économie”, ce qui ne signifie rien pour ceux qui veulent lutter. En fait, une bonne part de sa direction veut créer une prétendue “gauche moderne”, ce qui en réalité signifie une gauche qui voit la lutte de classe comme quelque chose de dépassé.

    Lise, une membre de la Gauche Révolutionnaire (CIO-France), a décrit de quelle façon le NPA a été lent à réagir et à s’orienter vers les grandes luttes des travailleurs et des pensionnés. Par exemple, la figure la plus connue du NPA, le facteur Olivier Besancenot, n’a pas été utilisée durant la grève des postiers pour effectivement intervenir afin de correctement orienter la lutte. Cela reflète aussi le fait que, à l’instar de beaucoup de nouvelles formations de gauche à travers l’Europe, le NPA est principalement concentré sur les élections, bien plus que sur la lutte de classe dans les entreprises et dans la rue.

    Le CIO et les nouvelles formations de gauche

    Actuellement, une des tâches au sein de beaucoup de ces nouveaux partis est de construire des groupes d’opposition avec d’autres pour s’opposer au virage à droite des directions. En agissant de la sorte, au Brésil, la section du CIO (Liberdade Socialismo e Revolucao) a joué un rôle important pour qu’un nouveau candidat, Plinio, plus à gauche, soit sélectionné comme candidat pour les élections présidentielles du Parti du Socialisme et de la Liberté (PSOL).

    Dans le NPA en France, les camarades du CIO ont joué un rôle vital dans le rassemblement d’un groupe d’opposition de gauche. Ils ont réussi à obtenir 30% des voix lors d’un vote de membres du parti pour leur position de gauche clairement socialiste. Au Québec, à l’intérieur de Québec Solidaire, un regroupement de gauche qui a maintenant 9% dans les sondages d’opinion, nos membres travaillent avec d’autres pour tenter de tirer le parti vers la gauche. En Grèce, nous avons également été impliqués dans de similaires initiatives et il est à espérer que nous puissions assister à un développement similaire dans Die Linke à un certain moment.

    Dans les pays où il n’y a pas encore de nouveau parti de gauche, nos membres sont impliqués dans des campagnes pour la construction de telles formations et là où nous avons des forces substantielles, nous avons un rôle crucial à jouer. C’est le cas en Grande-Bretagne, où nous avons aide à lancer la Trade Unionist and Socialist Coalition (TUSC, coalition de syndicalistes et de socialistes), qui a participé aux dernières élections.

    Dave, du Socialist Party en Angleterre et Pays de Galles, a abordé les difficultés des conditions objectives auxquelles ont fait face nos camarades du Socialist Party lors des dernières élections, caractérisées par une peur profonde du retour des Conservateurs, les Tories, ce qui a repoussé beaucoup de gens vers le Labour Party, avec en résultat de grandes pertes pour les petits partis. Il est important de maintenir la TUSC comme une arène de travail et comme étape vers la construction d’un nouveau parti des travailleurs.

    Michael, d’Irlande, a fait état de notre travail concernant la construction d’un nouveau parti des travailleurs de masse. La nature de droite de presque toute la direction syndicale irlandaise entraîne qu’il est fortement improbable qu’une initiative soit prise par un “Bob Crow irlandais” (du nom du dirigeant du syndicat des cheminots et des conducteurs en Angleterre, qui fait campagne avec nous depuis plusieurs années pour la construction d’un nouveau parti des travailleurs). Toutefois, la position clé acquise par nos camarades irlandais du Socialist Party (CIO-Irlande) parmi la gauche signifie que nous avons un rôle tout particulier à jouer dans le développement d’une nouvelle formation et que nous pouvons avoir un rôle central en son sein. La forte probabilité pour que l’Irish Labour Party, le parti travailliste irlandais, entre dans un gouvernement après les prochaines élections peut créer les circonstances favorables au lancement d’un nouveau parti. Le Socialist Party est actuellement impliqué dans des négociations pour construire une alliance de gauche pour les prochaines élections.

    Les développements dans les partis ‘communistes’

    Un des fils de la discussion était l’attention à porter vers les développement à l’œuvre dans les partis communistes, qui peuvent aussi être affectés par la crise. L’exemple d’Izquierda Unida (Gauche Unie, en Espagne, une coalition politique dont la composante la plus forte est le parti communiste) a été utilisé pour illustrer ce processus. Son nouveau dirigeant parle de guerre de classe et vire à gauche, ce qui devient plus attractif pour de nombreux jeunes et travailleurs en Espagne.

    Le Parti Communiste Portugais garde une forte base dans la classe ouvrière, possède 57.000 membres et attire toujours à lui des couches de jeunes. Il détient des positions syndicales clés, dont la direction du syndicat CGTP (le plus grand syndicat du pays, qui compte 750.000 membres). Malheureusement, son approche est très sectaire, en refusant de travailler avec d’autres et en n’ayant aucune compréhension d’une méthode transitoire, il ne fait aucun pont entre la résistance contre les coupes budgétaires actuelles et le socialisme, qu’il dit défendre. Cependant, au sein de ces parties, de grandes discussions se développent à ces sujets.

    Même le KKE (la Parti Communiste Grec), qui est formellement un parti stalinien et est extrêmement sectaire, est affecté par la crise. Nos camarades grecs ont expliqué comment cela s’est produit. Après chaque lutte de classe sérieuse, des travailleurs honnêtes de la base du parti quittent le KKE à cause de son approche extrêmement sectaire. Par exemple, le KKE organise toujours ses propres manifestations, séparées des autres, et il en va de même pour son front syndical, PAME, à la place de s’engager dans la lutte avec les travailleurs des plus grands syndicats, mais si leur direction est acquise au PASOK (les sociaux-démocrates grecs, actuellement au pouvoir).

    Notre réponse est d’appeler à un front unique d’action entre les vieux partis communistes avec de sérieuses racines dans la classe ouvrière et les nouvelles formations, ainsi qu’au développement de discussions entre ces partis. L’approche de Syriza, en Grèce, est largement correcte à cet égard, elle fait des appels répétés au KKE pour faire des actions en commun et pour avoir des discussions ensemble, même si le programme politique de Syriza est limité. Si cette alliance s’était maintenue à 17.5% des sondages tout en continuant avec cette approche, cela aurait eu un réel impact sur le KKE.

    De petits groupes vers des parties de masse

    Dans sa conclusion, Andros a expliqué que l’organisation de parties politiques de masse ne va pas nécessairement se produire d’un coup. La création du Parti Travailliste britannique a constitué un processus s’étant étalé sur plusieurs décennies. Cependant, une fois qu’un sérieux parti large basé sur la lutte de classe sera construit, il sera bien plus facile et plus rapide d’en reproduire la formation ailleurs. Les exemples de l’Europe du sud dans les années ’60 et ’70 illustrent à quelle rapidité ce processus peut également aller dans un contexte de crise tel que celui que nous connaissons. Dans plusieurs pays, de très petits groupes ont pu devenir des partis de masse dans un très court laps de temps, comme le Parti Socialiste au Portugal au cours de la Révolution des Œillets en 1974.

    La crise économique est maintenant un facteur crucial dans le développement de nouveaux partis des travailleurs, décisif pour en déterminé la nature et la rapidité. Il est encore tout à fait possible que Syriza et d’autres formations puissent prendre un grand virage à gauche sous l’impact de la crise économique. Cependant, il est également possible que le scenario du PRC italien touche ces partis à cause de la tendance à droite de leurs directions.

    Même s’il ne s’agit pas de développements linéaires, il est clair que, dans beaucoup de pays, des développements se dirigeant vers de nouveaux partis des travailleurs de masse sont en train de prendre place. Il ressort très clairement de l’expérience du CIO jusqu’à présent qu’il sera capable, avec ses sections, de jouer un rôle important dans ces développements, tout en construisant ses propres forces pour lutter en faveur d’un programme réellement socialiste.

  • Jeunes en lutte pour l’emploi – Faites votre choix : le chômage ou un job de misère

    Dans les pages de Lutte Socialiste ous ur ce site, nous avons déjà abordé la problématique du chômage des jeunes dans de nombreux articles, notamment avec le chiffre alarmant d’un jeune de moins de 25 ans sur trois au chômage en 2011 ou encore avec la perspective de 800.000 chômeurs en Belgique pour la même année.

    Par Nicolas Croes

    A NOUS DE PAYER NOS EMPLOIS PRÉCAIRES

    Pour les politiciens traditionnels, tout n’est qu’une question de volonté et de formation du sans-emploi… ainsi que d’incitants à l’employeur bien entendu. Johan Vande Lanotte, ancien président du SP.a (le PS flamand), insiste sur l’expérience. Quand on reste au niveau du principe, là, comme ça, ça peut paraître sympa. Qui pourrait dire qu’on n’a pas besoin d’expérience? Sauf que, concrètement, c’est vraiment, mais alors vraiment loin d’être sympa. Son idée, c’est de transformer la période de stage d’attente (1) en une ‘‘période d’expérience au travail’’.

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    PARLER, OK, MAIS AUSSI AGIR !

    NOUS – POUR DES MARCHES DES JEUNES POUR L’EMPLOI !

    Le PSL participe à des comités ‘‘Jeunes en lutte pour l’emploi’’ avec les jeunes FGTB de différentes villes et d’autres organisations comme la Jeunesse Ouvrière Chrétienne pour organiser des manifestations locales sur le thème de l’emploi des jeunes.

    Pour nous, il s’agit clairement d’aider à construire un rapport de forces en faveur des travailleurs et des jeunes. N’hésitez pas et participez avec nous : pour avoir un avenir, il nous faudra lutter! Contactez nous! (02/345.61.81)

    EUX – MAQUILLAGE CONTRE CHÔMAGE

    Deux communes du nord des Pays-Bas ont mis en place un plan destiné à relooker les chômeuses pour les aider à trouver un mari riche qui les dispenserait de devoir toucher les allocations de chômage! Difficile de trouver plus absurde comme méthode de lutte contre le chômage. On doit aussi dénoncer le caractère extrêmement sexiste de cette mesure qui considère que les femmes ne sont pas beaucoup plus que de jolis objets à vendre.

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    Derrière les mots, la ‘‘période d’expérience au travail’’ consiste à forcer un jeune à accepter un stage en entreprise, qu’il ne peut refuser, tout comme il serait obligé d’accepter une offre d’emploi dans cette entreprise après le stage. En guise de ‘‘salaire’’ le jeune recevrait une allocation d’attente considérée comme subside à l’emploi. Expliqué plus brutalement, il s’agit d’aller puiser dans les caisses de la collectivité (c’est-à-dire notre argent, celui de nos impôts) pour que des patrons puissent bénéficier de travailleurs quasigratuits, forcés d’accepter n’importe quelle condition.

    Ça ne reste qu’une proposition en l’air nous direz-vous. Mais Joëlle Milquet, la ministre de l’emploi du précédent gouvernement, a suivi exactement la même logique avec l’application de son plan win-win (2) : payer des salaires de misère avec l’argent des caisses de l’Etat.

    Les diminutions de charges et autres cadeaux aux entreprises ont permis de donner plus d’argent aux patrons tout en laissant ces derniers libres de presser un travailleur comme un citron pour le jeter ensuite quand il n’y a plus assez de ‘‘subside à l’emploi”” pour le soutenir. Cette somme gigantesque, plusieurs milliards d’euros par an, aurait pu être consacrée au développement des services publics, en engageant des travailleurs avec de bons statuts. Il y aurait ainsi moins de chômage, et plus de service à la population. Pas mal hein ? Attendez, parce qu’il y a moyen d’aller encore plus loin.

    UN CHOIX DE SOCIÉTÉ

    Partout en Europe, les gouvernements regardent les pensions le couteau entre les dents. On parle partout d’élever l’âge d’accès à la retraite. En France, on estime que le projet du gouvernement Sarkozy de repousser l’âge de départ à la retraite représente l’équivalent d’un million d’emplois de jeunes… En Espagne, le gouvernement (dirigé par l’équivalent local du PS) aimerait bien faire pareil, dans un pays où 40% des moins de 25 ans sont au chômage !

    Toujours selon Philippe Defeyt, ‘‘le chômage n’a jamais été aussi élevé, il augmente de manière tendancielle, depuis 30 ans, il touche aujourd’hui, quasiment 15% de la population active (…) comment peut-on vivre dans une société, quand de manière aussi structurelle et durable, il n’y a pas assez d’emplois pour tout le monde ? Il est peut-être temps de voir s’il n’est pas possible de s’organiser autrement, sur le plan économique et sur le plan social.”

    Pour le PSL, la solution est simple : partager le temps de travail disponible en fonction des forces disponibles. Aujourd’hui, chaque avancée technologique met plus de gens à la rue, alors que cela devrait permettre d’avoir plus de temps à consacrer pour soi et pour la société. Concrètement, le PSL revendique les 32 heures de travail par semaine, avec embauches compensatoires et sans perte de salaire. L’argent existe! Vous vous souvenez des banques qui ont été sauvées à coups de milliards par la collectivité ? Et bien les quatre banques belges ont réalisé ensemble un bénéfice de 1 milliard d’euros uniquement au cours du premier trimestre 2010. Si le secteur financier était placé sous contrôle démocratique des travailleurs et non pas sous celui de requins capitalistes, ces moyens n’iraient pas finir dans les poches de parasites actionnaires et spéculateurs, mais seraient investis pour les besoins de la société.

    On est loin d’entendre de telles choses de la bouche des partis traditionnels, et c’est normal. Pour le PS, le MR, Ecolo ou le CDH, ce sont les patrons qui créent la richesse. Pour nous, ce sont les travailleurs : le patron a besoin des travailleurs, les travailleurs n’ont pas besoin de patron.

    C’est pourquoi nous luttons contre le capitalisme, pour une société où les richesses extraordinaires dont dispose notre monde seraient consacrées à la satisfaction des besoins de chacun dans le respect de notre environnement. C’est ce que nous appelons une société socialiste démocratique.


    1. Stage d’attente : période comprise entre la demande d’allocations de chômage et le premier versement, généralement de 9 mois
    2. Plan win-win : mesure entrée en vigueur le premier janvier et faisant bénéficier les patrons de diminutions de taxes énormes pour un jeune de moins de 26 ans. Dans certains cas, les patrons n’ont même plus rien à payer à l’Etat.
  • Ecole d’été 2010 – Crise économique: aucune solution sur base capitaliste

    Aujourd’hui, nous ne parlons pas seulement d’une crise économique, notre environnement est également en jeu. Et si nous analysons les développements actuels, c’est pour nous préparer pour le futur, pour nous préparer à intervenir. Il est vrai qu’il est difficile de déterminer exactement la façon dont les choses peuvent se dérouler, mais il est très clair qu’un certain nombre de pays font face à l’imminence d’une explosion sociale. La crise a déjà entraîné une diminution du niveau de vie de millions de personnes et des dizaines de millions connaissent l’insécurité, la peur du lendemain.

    Vers une plus grande instabilité

    La crise économique mondiale est parfaitement illustrée par la crise que traverse l’Europe. Newsweek et Times (deux magasines américains) ont consacré tous les deux et au même moment leur première page à l’Europe. Il y était notamment dit que le grand secret de l’Europe était que son secteur bancaire était plus touché que Wall Street et que les banques européennes sont tout aussi voraces que les américaines quand il s’agit de jouer avec des actifs toxiques.

    Les commentateurs bourgeois ne peuvent plus maintenant se permettre de parler d’un éventuel progrès, ils ne parlent que d’assainissements. La perte de confiance des classes dirigeantes et de leurs partisans, un peu partout dans le monde, est un élément important qui dans un certain sens exprime le cul-de-sac dans lequel se trouve le capitalisme. Toutefois, nous savons que le système capitaliste ne disparaitra pas de lui même, cela ne pourra arriver que par l’intervention consciente de la classe des travailleurs. Mais la division au sein même des élites dirigeantes est un élément important. Les tensions augmentent (comme les tensions commerciales entre différents pays ou encore les tensions entre différents niveaux de pouvoir). Au niveau international, de façon générale, nous allons vers une période caractérisée par de plus en plus d’instabilité.

    En 1938, Trotsky a publié le ‘‘Programme de transition, L’agonie du capitalisme et les tâches de la IVe Internationale’’ dans lequel il disait notamment que la bourgeoisie ferait tout pour éviter la déroute. C’est encore tout à fait vrai aujourd’hui, et on peut d’ailleurs le voir à la façon dont la bourgeoisie se défend.

    Le pouvoir le plus puissant que le monde ait jamais connu – l’impérialisme américain – est embourbé depuis 10 ans en Afghanistan. Ce que l’impérialisme américain espère, c’est de gagner assez de traitres à ses côtés pour pouvoir aboutir à une situation de ‘calme’ comme en Irak mais, même là, il n’est pas question de victoire. Tout comme Tacite le disait de l’empire romain, c’est une paix de désolations (‘‘ils firent un désert et le nommèrent paix’’). En Irak, la guerre civile a été temporairement gagnée par les chiites. Le pays est divisé sur base communautaire, mais ces délimitations peuvent voler en éclat à tout moment. Au lieu d’un Saddam Hussein, on peut en voir émerger une dizaine.

    Quant à la catastrophe de BP, où l’actionnariat est majoritairement américain, elle constitue une parfaite illustration de l’incapacité du capitalisme à gérer l’environnement. La détérioration de la planète est inévitable dans le système capitaliste. Les problèmes ne vont faire qu’empirer, y compris en termes de guerre. Si ce système continue ses méfaits, nous connaîtrons d’autres guerres pour les ressources, comme la guerre pour le pétrole au Moyen-Orient. Déjà aujourd’hui, il y a de plus en plus de conflits autour de l’approvisionnement en eau potable. On estime actuellement à 50 millions le nombre de réfugiés sur la question de l’eau, et ils seraient issus de 27 pays. Dans ce cadre, le sommet de l’ONU au sujet des changements climatiques de Copenhague a été un échec total.

    D’une politique de stimulants à une politique d’austérité

    L’incapacité du capitalisme à faire la moindre mesure progressive peut se voir concernant la crise économique. Dans un premier temps, on a tenté de se limiter à des plans de relance mais, puisque ces programmes de sauvetage n’ont plus d’effet, dans un deuxième temps, on passe maintenant à des plans d’austérité, à des attaques contre les travailleurs. Lors du dernier G20 à Toronto, les partisans des plans de relance étaient minoritaires, l’optique générale est maintenant de passer à des plans d’austérité très durs. Après ce sommet, seul Obama était en faveur de plans de relance. S’il n’avait pas adopté cette position, il aurait eu des problèmes et se serait retrouvé en minorité, y compris au sein de son parti. Mais le fait même qu’il ait été mis en minorité à Toronto illustre que l’impérialisme américain a perdu sa capacité d’imposer sa volonté.

    A certains moments les assainissements sont très brutaux, comme en Roumanie, à d’autre c’est plus léger. Le gouvernement britannique veut par exemple réduire le déficit budgétaire de 40 à 50% dans les 5 prochaines années. Les conséquences de ce genre de politique ont été illustrées, en Irlande notamment. Il y a quelques semaines, des milliers de personnes y ont manifesté: des parents d’handicapés mentaux qui s’occupent de leur enfant déficient à la maison. Ils avaient une institution où ils pouvaient déposer leur enfant une ou deux nuits pour souffler un peu, et une des premières conséquences des coupes budgétaires était, entre autres, la suppression de cette institution. Angela Merkel a déclaré que l’Allemagne devait donner l’exemple pour le reste de l’Union Européenne avec son plan d’austérité. Ces assainissements vont très certainement empirer la situation dans les autres pays, et pas seulement en Allemagne.

    Essai après essai, les entreprises veulent augmenter leur profitabilité, avec l’aide des gouvernements. Dans les environs de Venise, une commune a été jusqu’à interdire de faire des châteaux de sable. La raison est toute simple: les amendes rapportent de l’argent. Cela indique à quel point de désespoir se retrouvent parfois confrontées les autorités. Ce n’est certes pas un élément de ce type qui va déclencher une révolution, mais il suffit parfois d’une étincelle, aussi absurde soit-elle. Le doute qui subsiste dans l’esprit de la bourgeoisie est de savoir jusqu’où elle sera capable d’attaquer les travailleurs sous l’argument "Vous êtes obligés d’accepter les coupes, sinon c’est la Grèce qui vous attend". Cette menace est même utilisée aux Etats-Unis.

    La Grèce est le maillon faible du capitalisme européen. La situation qui s’y développe est un test pour la bourgeoisie et pour la classe ouvrière, mais aussi pour le CIO: comment une de ses sections peut-elle réagir et adapter son intervention dans une telle situation. La grève du 5 mai était la plus grande depuis 25 ans, de même que la taille des manifestations. L’attaque du Parlement avait été le fait de travailleurs du service public. Il y a aussi eu des mouvements de masse dans les secteurs de l’enseignement, des hôpitaux,… En fait, tous les secteurs les plus importants, du privé ou du public, ce sont mis en action durant cette période. A Athènes, il y a eu des mobilisations contre le gouvernement chaque semaine. Nous sommes dans une phase où les commentateurs ont peur que l’expérience grecque rate son coup à cause d’une trop grande mobilisation. Les jeunes, les travailleurs et les commentateurs font le parallèle avec l’Argentine du début de ce siècle. Mais le gouvernement tient bon, parce que les directions syndicales n’ont aucune idée de la manière de réagir, aucune réelle stratégie ni alternative.

    Nos slogans sont "abolition de la dette – nationalisation du secteur financier", tout en appelant à des actions communes pour rassembler les grévistes. La lutte est actuellement en pause, mais le sentiment général est que les luttes recommenceront en septembre. Nous devons aussi renforcer la revendication de nationalisation sous le contrôle démocratique de la population du secteur financier. C’est une revendication qui avait suscité un grand enthousiasme quand Joe Higgins en avait parlé lors d’un grand meeting de la formation large de gauche grecque Syriza. Nous sommes les seuls à accorder autant d’attention à cela. Une banque publique ou des mesures visant à rester dans le cadre de la compétition entre banques sont des mesures insuffisantes.

    De sombres perspectives économiques

    Tous ces budgets d’austérité seront incapables de solutionner quoi que ce soit. Les capitalistes se réfèrent à la Suède ou au Canada au début des années ‘90, et ils caricaturent ce qui y a été réalisé. A l’époque, le capitalisme était en croissance, différence fondamentale avec aujourd’hui. Les éléments actuels de rémission du capitalisme sont avant tout circonstanciels et non structurels, on ne parle pas de croissance des moyens de productions.

    De toute façon, avant même de discuter de cette soi-disant reprise économique, de sa nature et de sa durée, il faut bien se rendre compte que, pour l’écrasante majorité des travailleurs et des jeunes, la reprise économique n’a pas ouvert de meilleures perspectives d’avenir. Cela est tout au plus considéré comme un évènement temporaire. Même dans les pays où la reprise a été plus importante, quand on regarde les chiffres, on se rend compte qu’il s’agit pour beaucoup d’un écran de fumée. Ainsi, dans les médias, on s’est moqué de la reprise économique allemande comme d’un conte de fée. Cette année sera certes un record en termes d’exportations des automobiles allemandes, mais les ventes au sein même du pays vont reculer de 30% pour cette année. La fragilité de la reprise est notamment illustrée par l’utilisation de la capacité de production de l’économie allemande, qui se situe sous les 80% alors que la moyenne était précédemment de 84%. De plus, aucune certitude n’existe quant à la durée de cette reprise économique. Nous devons regarder tous ces chiffres avec beaucoup de prudence. Par exemple, selon les chiffres, le pays qui a connu la plus forte progression de sa production industrielle est Singapour (+64% en une année), mais ce n’est que le reflet de l’ampleur de la chute connue l’année d’avant! Aucun commentateur bourgeois n’a en fait de réelle confiance dans le système. Le dernier rapport du FMI a d’ailleurs revu à la baisse ses prévisions économiques.

    Le mieux auquel s’attendre, c’est une stagnation avec un chômage de masse. Mais nous nous dirigeons vers une nouvelle récession, et très probablement vers une nouvelle crise bancaire. Les Etats réinterviendront encore avec l’argent de la collectivité (comme ils l’ont déjà fait), mais une nouvelle crise bancaire combinée à une récession aurait un grand effet. Le résultat serait une nouvelle dégradation importante du niveau de vie des masses, mais l’impact politique serait également énorme. Ce serait une défaite gigantesque pour la classe capitaliste et cela provoquerait une remise en question encore plus grande du système capitaliste, avec la recherche d’une alternative.

    La dette publique a remplacé la crise des dettes financières. Mais quelle classe sociale est responsable de cette dette publique? D’un pays à l’autre, les conditions sont différentes, mais c’est généralement une conséquence du renflouement des banques. C’est encore une conséquence du fait que l’Etat a dû garantir la faillite financière et immobilière. Nous devons expliquer que la crise n’est pas provoquée par les pensionnés grecs ou par les travailleurs des services publics. Il y a 3 ans, en 2007, tous les Etats avaient un déficit d’à peine plus de 1%. Depuis lors, la moyenne est montée de 1.7% à plus de 8%, malgré l’absence d’augmentation des pensions par exemple.

    Les plans d’austérité vont encore aggraver les conséquences de la crise. Les keynésiens classiques ont raison de dire que le problème fondamental, c’est la demande insuffisante. Le prix Nobel d’économie Paul Krugman a raison d’affirmer que les capitalistes sont repartis vers la politique de Hoover en 1929: liquider les acquis des travailleurs. Il a aussi raison quand il indique que les politiques actuelles vont poser les bases d’une seconde crise, beaucoup plus profonde.

    En cas d’augmentation des dépenses publiques: qui va payer ? Si on fait payer les bourgeois, ils vont se retirer et arrêter d’investir. L’idée générale est de s’en prendre aux travailleurs et à leurs familles, mais il faut s’attendre à ce qu’un tsunami de résistance accompagne le tsunami d’austérité. De plus, malgré toutes les coupes, les déficits des budgets des Etats seront encore plus profonds à la fin de l’année qu’au début et les milliards retirés de l’économie par les plans d’austérité vont peser sur elle. La Chine est le seul pays à avoir connu une bonne reprise sur base des investissements d’Etat, mais cette reprise se place dans le contexte d’une grosse surchauffe de l’économie.

    Remontée de la lutte des classes

    Quant aux travailleurs, l’impact de la crise les frappe de plein fouet. Ceux qui retrouvent un emploi après l’avoir perdu connaissent des conditions de travail bien pires. En Grèce, la possibilité d’un effondrement complet des conditions de travail n’est pas à exclure. En Espagne, 90% des emplois disparus concernaient les couches de travailleurs précaires, mais une bonne partie de la population connait ces conditions. Tous les regards se portent vers le sud de l’Europe, et l’atmosphère combative qui y existe est inspirante. En Angleterre, certains Tories (les conservateurs) ont même été jusqu’à dire qu’ils allaient faire des manifestations contre leur propre gouvernement suite à l’annonce d’attaques contre les budgets des écoles! Tout a été utilisé pour décrédibiliser le mouvement qui se développe en Grèce. Mais toute cette propagande capitaliste a ses limites. Jusqu’ici, les capitalistes se basaient beaucoup sur l’idée que les richesses se répartiraient, que ‘‘demain sera meilleur’’. Cette idée est en train d’être réduite en morceaux.

    Aujourd’hui, les protestations se généralisent. Grèce, Portugal, Espagne, France,… les luttes se développent, mais les directions syndicales jouent un rôle de frein. Lors d’une grande manifestation à Bologne, en Italie, le dirigeant syndical local a notamment dit "personne ne remet en cause qu’il doit y avoir des coupes budgétaires, mais il faut les faire autrement". Avec des dirigeants pareils, on n’est pas encore sortis de l’auberge. Quand Rosa Luxembourg décrivait le rôle des dirigeants sociaux-démocrates durant la première guerre mondiale, elle était particulièrement virulente. Mais que dirait-elle aujourd’hui? L’attitude des dirigeants syndicaux actuels est de compliquer la situation. En Belgique, cela a laissé une certaine ouverture pour approfondir la crise communautaire et aux USA cela s’exprime avec le Tea Party. En Hongrie et en Grèce, l’extrême-droite se renforce. Des questions comme l’immigration commencent à devenir des questions clés, auxquelles nous devons apporter une attention toute particulière.

    Le mouvement de résistance ne se développe pas partout de la même manière. En Grande-Bretagne par exemple, les mesures mises en avant par le gouvernement actuel sont les plus dures depuis 1922, ce qui avait jeté les bases pour la grande grève générale de 1926. Nous en sommes encore loin aujourd’hui. Le niveau de conscience des masses a fortement chuté depuis la chute du mur. Avant, une grève générale posait très rapidement la question du pouvoir et de la confrontation avec l’Etat capitaliste. D’une certaine manière, toutes les grèves générales font cela. Mais l’absence actuelle d’un facteur subjectif de masse, même sous la forme d’un parti réformiste très confus, complique les choses.

    Le capitalisme est incapable de résoudre les problèmes qu’il engendre. Il connaît sa plus grande crise, mais la conscience des masses n’est pas à la hauteur de la situation. Cela ne signifie toutefois pas dire qu’on ne peut pas vaincre la bourgeoisie, comme en France, en 1995, quand le premier ministre Alain Juppé avait connu une défaite avec son ‘‘plan Juppé’’.

    Nouveaux partis des travailleurs, ouverture pour les idées socialistes

    Un des points cruciaux pour reconstruire la conscience des masses est la création et le développement de nouvelles formations politiques larges capables d’orienter des couches larges de la population dans les luttes afin qu’elles puissent apprendre de leur expérience pratique de lutte. Mais il existe le danger de l’électoralisme. Le point le plus important est de maintenir une orientation claire vers les entreprises et le monde du travail. Ces nouvelles forces peuvent se développer très vite, mais également s’effondrer très vite, comme l’illustre l’exemple de Rifondazione Comunista en Italie. Cette formation avait un grand potentiel, qui a beaucoup souffert de sa participation au gouvernement capitaliste de Prodi ainsi qu’à des coalitions locales. Aujourd’hui, l’état général de l’opposition est tel qu’il n’est pas impossible que Berlusconi remporte d’autres victoires malgré les scandales, les conséquences de la crise économique, les attaques contre les travailleurs,…

    L’espace laissé vacant par le mouvement ouvrier se rempli d’autre chose, et nous avons eu différents exemples dans plusieurs pays. Nous pouvons comprendre ces développements au vu de la pourriture des anciens dirigeants politiques. En Italie, il y a le Mouvement Violet. Vu la chute du PRC, il est quasiment inévitable de voir même des couches syndicales développer un état d’esprit antiparti et antipolitique. On peut également voir se développer des tendances au terrorisme, comme en Grèce où l’on assiste à des attentats contre des commissariats ou des banques. L’absence de formulation d’une riposte face à la crise par les directions syndicales est à dénoncer dans ces actes. Les camarades grecs ont ainsi parlé de dirigeants syndicaux qui appelaient à faire grève, mais qui étaient incapable de participer aux actions car les travailleurs les attaquaient dès qu’ils les voyaient pour leur mollesse.

    Pour l’instant, ce sont surtout les organisations d’extrême droite ou populistes de droite qui connaissent une petite poussée. Même si des organisations de gauches de masses existaient, avec le racisme latent dans la société, ces organisations auraient de toute façon connu une poussée dans un premier temps. La question nationale refait également son apparition (Ecosse, Belgique, Pays Basque,…)

    Les choses ne se développent pas qu’en Europe. Au Moyen-Orient, face à la corruption des régimes en place, de plus en plus de travailleurs sont ouverts à nos idées. En Russie, une opposition se développe contre Poutine. Au Kazakhstan également, avec une petite organisation, nous avons pu lancer une organisation ouvrière de masse, Kazakhstan 2012. En Chine, de gigantesques usines existent, avec des conditions de travail véritablement horribles. Des filets ont par exemple été fixés sous les fenêtres d’une usine Foxconn où 12 travailleurs se sont suicidés cette année. L’Etat est bien conscient du problème et essaye de créer de nouveaux syndicats "patronaux", pour tenter d’étouffer la contestation. Mais les grèves continuent de se développer.

    Dans toute une série de pays, de grands mouvements ont déjà pris place. Plusieurs syndicats ont déjà appelé à une grève générale en septembre. Dans d’autres pays, on parle surtout de manifestation ou de journée d’action (de la part des directions syndicales), d’où l’importance de la manifestation du 29 septembre à l’appel de la Confédération Européenne des Syndicats. Il est important de voir comment nous allons intervenir dans ces évènements et comment cadrer cela dans les évènements qui forment la conscience et la combativité de la classe ouvrière. Nous ne devons pas seulement intervenir pour construire le mouvement mais aussi pour voir quel élément mettre en avant et pourquoi. Il est important de comprendre que les attaques antisociales peuvent provoquer différents types de réactions à différents moments.

    Cette crise économique et sociale a aussi son impact politique avec la chute du soutien des partis au pouvoir en Allemagne, en France, en Italie ou même au Japon. La semaine dernière, des élections se sont déroulées pour le parlement japonais. Le premier ministre, élu depuis juillet seulement, a reçu une raclée électorale de grande ampleur, parce qu’il a commencé à parler d’assainissements et du doublement d’une taxe. Quant aux conservateurs britanniques, ils avaient banni le terme "austérité" de leur vocabulaire pendant la campagne, mais ce n’était qu’une opération de communication. Dans différents pays, il y a de grands changements d’état d’esprit très rapide, et une des conséquences de ce processus est que cela mine le soutien des gouvernements en place. Du point de vue des mouvements futurs, l’intervention des camarades de Chypre était intéressante, avec un gouvernement de centre-gauche qui essaye de prendre des mesures également contre les riches, mais qui est de suite bloqué au Parlement. Ce qui est encore possible, ce sont des gouvernements élus sur base de populisme,… mais qui peuvent provoquer des mouvements sociaux importants. C’est entre autres le cas de la Grèce, où le gouvernement est en place depuis 9 mois seulement, élu sur base du moindre mal et de la promesse de ne pas appliquer l’austérité, et a suscité des mouvements sociaux de grande ampleur.

    Ce que le capitalisme nous propose, c’est un monde où chacun est en lutte contre chacun. Notre tâche est de préparer la classe ouvrière pour prendre le pouvoir et s’émanciper. En ce sens, la moindre erreur théorique se paye très cher dans la pratique. Mais nous avons réussi à démontrer ce que nous sommes capables de faire. Dans une telle période, un petit groupe avec des idées claires et qui est enraciné dans les masses peut avoir un impact énorme. A la fin des années ’80, dans des circonstances spécifiques, nous avons pu diriger un mouvement de masse contre la Poll Tax en Angleterre, un mouvement qui a rassemblé 18 millions de personnes, et nous étions à l’époque quelques milliers dans le pays. Cette école d’été a pour vocation de nous préparer à cela. A travers son expérience de lutte, la classe ouvrière va arriver à la conclusion que la seule façon de sortir de ce système, c’est la voie vers le socialisme.

  • Un tsunami d’austérité déferle sur l’Europe

    Malgré l’opération de sauvetage financier de la Grèce, ses obligations d’Etat sont toujours considérées comme de la pure camelote par les agences de notation. Maintenant, il semble bien que ce soit au tour de l’Espagne et du Portugal et, ailleurs encore en Europe, la machine d’austérité est mise en marche. Ainsi, en Grande-Bretagne, le nouveau gouvernement conservateurs / libéraux-démocrates veut assainir 7 milliards d’euros en un an. En Allemagne, Angela Merkel veut assainir 80 milliards d’euros d’ici 2014. Ce tsunami d’austérité touche presque tous les pays européens, son arrivée chez nous n’est qu’une question de temps.

    Article basé sur une analyse de Robert Bechert, du CIO

    LA CRISE N’EST PAS FINIE

    L’Union Européenne et l’euro ont reçu de bonnes claques et les réunions de crise sont devenues la norme. Les contradictions internes à l’Union Européenne se sont également exprimées avec des tensions personnelles entre différents dirigeants européens, Sarkozy menaçant même un moment de quitter la zone euro. Beaucoup a été tenté pour éviter la faillite de la Grèce et relever l’euro mais, pour la première fois depuis son instauration en 1999, une discussion s’est ouvertement développée concernant la possibilité d’expulser des pays de la zone euro.

    Les classes dirigeantes n’ont pas seulement eu peur qu’une faillite grecque conduise à une nouvelle chute économique, elles craignaient également que d’autres pays soient ‘‘infectés’’ par les protestations ouvrières en Grèce. Une révolte en Grèce ou dans un autre pays pourrait initier une vague de protestations, et cette peur est à la base de la campagne de propagande internationale destinée à faire passer les Grecs pour des ‘‘paresseux’’ ainsi que des tentatives de monter les travailleurs des différents pays les uns contre les autres.

    Cette crainte des classes dirigeantes est justifiée. La crise commencée en 2007 est loin d’être terminée. La situation économique reste incertaine, même si certains pays ont connu une faible croissance. Les capitalistes n’ont aucune confiance en une relance et, si relance il y a, elle sera de toute façon limitée et sans création d’emplois. Le fait que la croissance économique d’avant la crise ait été stimulée par le crédit a pour conséquence que les dettes restent un élément important. Les grandes dettes des Etats instaurent une pression sur les gouvernements pour assainir les dépenses mais ces opérations d’austérité peuvent conduire à une nouvelle récession.

    SONGES EUROPÉENS ET MENSONGES

    Le secteur financier reste instable, ce qui renforce la position de faiblesse de l’euro envers le dollar. Ceci dit, tous les pays européens ne sont pas mécontents avec un euro faible qui stimule les exportations. Le paquet de sauvetage pour la Grèce était destiné à sauver l’euro, mais le Financial Times a de suite fait remarquer: ‘‘La crise de la zone euro se développe tellement vite que l’opération de sauvetage pourrait vite être dépassée (par les évènements, ndlr).’’

    Le “rêve européen” est sapé par la crise ainsi que par les tensions entre les différentes bourgeoisies nationales et leurs représentants politiques. Lors de l’introduction de l’euro il y a dix ans, nous avions déjà dit qu’une complète unification européenne était impossible sur base capitaliste. L’intégration européenne à laquelle nous avons assisté était exceptionnelle mais, en même temps, le capitalisme est essentiellement resté basé sur les Etats nationaux, avec des bourgeoisies nationales défendant leurs intérêts propres. Dans un contexte où tout se passait bien sur le plan économique, les classes capitalistes nationales pouvaient coopérer. Toutefois, la crise survenue, seuls comptent les intérêts nationaux.

    Si la crise dévoile les faiblesses de l’euro, elle n’est pas destinée à n’avoir d’effets qu’au niveau des marchés financiers. Les travailleurs sont directement menacés. Il nous faut comprendre cette crise et lui apporter une réponse. Les sommets de l’Union Européenne ne sont bons qu’à conclure de grands accords et à annoncer de grandes mesures, mais ces gesticulations cachent fort mal les contradictions internes à l’Union. La succession rapide d’annonces et de mesures sans grands effets illustre justement que ces gens-là n’ont aucune véritable solution.

    QUELLE RÉPONSE ?

    Les finances publiques gémissent dans presque tous les pays européens sous l’impact des opérations de sauvetage massives à destination des banques, de la baisse des revenus de l’impôt et des mesures destinées à adoucir les conséquences de la crise. En conséquence, le niveau de vie des travailleurs et les services publics sont sous pression. En Roumanie, par exemple, il est proposé une baisse de 25% des salaires en plus d’une baisse de 15% des pensions, qui sont déjà pitoyables. Cette vague d’austérité entraîne l’instabilité ou l’impopularité de nombreux gouvernements européens.

    Les travailleurs doivent résister contre chaque tentative de nous faire payer la crise. Jusqu’à présent, la Grèce a montré la voie avec des protestations de masse contre les assainissements du gouvernement social-démocrate. Au Portugal et en Espagne également, de grandes manifestations et des actions de grève se développent, là encore contre des assainissements budgétaires portés par des gouvernements soi-disant socialistes. En Allemagne, 45.000 personnes ont récemment défilé à Stuttgart et Berlin.

    Fait remarquable, beaucoup de ces actions ont été le résultat d’une grande pression de la base, sans initiative des dirigeants syndicaux nationaux. Dans la plupart des cas, les directions syndicales semblent ne vouloir que des actions symboliques, au lieu de préparer une lutte sérieuse pour défendre nos intérêts. Des mobilisations et des manifestations peuvent illustrer la force du mouvement ouvrier, mais elles peuvent aussi être utilisées pour faire baisser la pression et ainsi freiner le développement d’un mouvement combatif.

    Ces hésitations existent parce que beaucoup de dirigeants syndicaux sont eux-mêmes rentrés dans la logique de ce système ou ne voient pas d’alternative à opposer au capitalisme. Pire, dans de nombreux cas, les dirigeants syndicaux essaient même de coopérer avec les gouvernements pour appliquer les assainissements, comme c’est le cas en Irlande mais aussi aux Pays-Bas, où la direction syndicale a accepté une augmentation de l’âge d’accès à la pension jusqu’à 67 ans.

    RÉPONDRE À LA CONFUSION PAR UNE CLARTÉ SOCIALISTE

    Ce manque de mots d’ordres clairs ou de plan d’action est une expression partielle de l’affaiblissement de la conscience socialiste et de la disparition de certaines traditions du mouvement ouvrier suite à la chute du stalinisme en 1989. Même là où se développent de nouvelles formations de gauche (Die Linke en Allemagne ou le NPA en France), l’anticapitalisme n’est pas traduit en une vision claire concernant la manière de lutter contre le capitalisme pour le remplacer par une alternative socialiste. Cette confusion est très claire à la FGTB wallonne qui mène campagne sous le slogan ‘‘Le capitalisme nuit gravement à la santé’’, sans se détacher clairement du PS.

    Les défis pour le mouvement ouvrier sont gigantesques. Les attaques antisociales se combinent aux dangers du nationalisme et de la politique de diviser- pour-mieux-régner, ce qui peut avoir un certain impact sur la conscience des masses. Cela a sans doute été le cas avec la campagne massive des médias allemands contre les Grecs qui avaient besoin de ‘‘notre argent’’ parce qu’ils étaient ‘‘trop paresseux’’ pour travailler eux-mêmes. La politique de diviser- pour-mieux-régner s’exprime aussi dans des campagnes destinées à monter les travailleurs du secteur privé contre ceux du public ou encore les travailleurs autochtones contre les travailleurs immigrés. Tout est fait pour éviter que ne se développe une compréhension générale de la crise comme conséquence du système capitaliste.

    Nous devons nous opposer à la dictature et au chaos du marché, mais en même temps plaider pour une transformation socialiste de la société. Le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) défend la nécessité d’un plan d’action européen et a été, avec d’autres, à la base d’un appel de députés européens de la Gauche Unitaire Européenne pour une semaine européenne d’action de protestation et de solidarité fin juin. Nous devons lutter ensemble et avancer des revendications telles que la nationalisation des secteurs clés de l’économie sous contrôle et gestion démocratique des travailleurs afin d’aboutir à une planification socialiste de la production dans une fédération européenne socialiste démocratique.

  • Une semaine de ‘Protestation et de solidarité’ tenue à travers l’Europe

    Faisons de la manifestation de la Confédération Européenne des Syndicats du 29 Septembre une "journée d’action" décisive pour la mobilisation des travailleurs

    A la suite de l’appel lancé par 16 députés européens de la Gauche Unitaire Européenne / Gauche Verte Nordique (GUE/NGL), et initié par Joe Higgins et le Socialist Party (CIO-Irlande), des protestations et des activités ont pris place dans plusieurs pays européens la semaine dernière. Même si ces actions étaient de taille restreinte, elles ont activement pointé la direction dont nous avons besoin : des actions de protestation de masse au niveau européen pour résister aux attaques des gouvernements et des patrons du continent.

    Par Paul Murphy, CIO

    A l’initiative du Socialist Party, 500 personnes ont défilé dans les rues de Dublin ce samedi 26 juin, mobilisées autour des slogans "Stop au renflouage des banques – Opposons-nous aux coupes d’austérité du Fonds Monétaire International et de l’Union Européenne – Pour la fin de la dictature des marchés." Plutôt cette semaine, une protestation à Belfast, devant les locaux de la Commission Européenne, avait reçu le soutien officiel du syndicat des pompiers, d’un syndicat des enseignants (INTO – région du nord), du syndicat de la fonction publique (PCS) et de l’association des enseignants et lecteurs (ATL). Environ 150 personnes étaient présentes à cette action.

    En Grèce, des protestations ont été organisées par Syriza, avec également un meeting qui a réuni des centaines de personnes le vendredi soir à Athènes. En Angleterre, le réseau national des délégués syndicaux (National Shop Stewards Network) a organisé un meeting le samedi 26 juin au soir, sur le thème de la solidarité internationale. En Suède, des militants de 4 organisations socialistes et syndicats (de l’Alliance de Septembre), se sont réunis devant les bureaux de la Commission Européenne à Stockholm. Ils avaient une bannière déclarant "Non à l’Europe du grand capital" et ont donné une lettre de protestation à la Commission Européenne.

    A Lisbonne, l’après-midi du 26 juin, des militants du Bloc de Gauche ont distribué 200.000 tracts concernant la crise économique. Un peu plus de 80 personnes ont protesté à Bruxelles lors d’une manifestation organisée par le Front des Gauches, avec le soutien de Synaspismos (Grèce) et de la Federazione Comunista del Belgio (Italie). Cette protestation s’est déroulée dans un quartier habité par plusieurs communautés du Sud de l’Europe et a reçu les applaudissements et le soutien de plusieurs habitants. Les membres du CIO en Autriche (Sozialistische Linkspartei) ont organise une protestation devant la Chambre de Commerce de Salzburg le mercredi 23 juin et avaient une banderole longue de 35 mètre clamant "Protestation et solidarité internationales" utilisée lors d’une manifestation le vendredi.

    Au Danemark, le meeting annuel de l’Alliance Rouge-Verte s’est déroulé à Copenhague le mercredi 23 juin, avec la participation de centaines de personnes. Finn Sørensen, le vice-président d’un syndicat de Copenhague, a attaqué les déclarations selon lesquelles la crise grecque est conséquente au fait que les travailleurs grecs vivent au-dessus de leurs moyens. Il a insisté sur la responsabilité de l’Union Européenne, du gouvernement grec et des spéculateurs. Un puissant message de solidarité a été envoyé aux travailleurs grecs du Danemark. En Italie, la semaine de protestation a été relayée par les camarades de Controcorrente, qui sont intervenus dans la grève générale du 25 juin.

    L’Europe regarde en direction de la Grèce

    Les niveaux différents de protestations dans les divers pays reflètent les différents niveaux de lutte et les situations qui existent dans les divers pays européens. Cependant, avec les mesures budgétaires draconiennes du gouvernement Tory/Libéral en grande Bretagne et avec l’annonce des attaques vicieuses d’Angela Merkel en Allemagne, ainsi que les mesures d’austérité annoncées en France, il est maintenant très clair que c’est toute l’Europe qui se dirige vers la Grèce. Au cours de ces derniers jours seulement, il y a également eu des grèves générales ou des grèves générales partielles en France, en Italie et au Pays Basque en Espagne.

    Cette semaine d’action initiée par le Comité pour une Internationale Ouvrière a mis en avant le chemin à suivre pour les travailleurs partout à travers l’Europe: celui de la nécessité d’actions communes à l’échelle européenne pour vaincre les attaques antisociales qu’on cherche à nous imposer.

    Maintenant, les regards se tournent vers la "Journée d’action" annoncée par la Confédération Européenne des Syndicats pour ce 29 septembre. Les syndicats espagnols ont annoncés qu’ils partiraient en grève générale ce même jour. Le CIO plaide pour que cette journée d’action devienne une réelle journée de mobilisation des travailleurs à travers l’Europe. Là où cela est approprié, comme en Espagne, des grèves générales pourraient être organisées ce jour-là, avec des manifestations régionales et une manifestation majeure à Bruxelles.

    Dublin

    Joe Higgins, eurodéputé du Comité pour une Internationale Ouvrière (Socialist Party, CIO-Irlande)

    Clare Daily (Socialist Party, CIO-Irlande)

    Joe Higgins, eurodéputé du Comité pour une Internationale Ouvrière (Socialist Party, CIO-Irlande)

    Autriche

    Angleterre – Coventry

    Suède

    Danemark

    Belgique

  • Gay Pride : 800.000 personnes à Paris contre l’homophobie

    Ce samedi 26 juin, les rues de la capitale accueillaient l’édition 2010 de la Gay Pride, dans une ambiance électrique et combative. Plus de 800.000 personnes ont ainsi défilé sous le drapeau arc-en-ciel ! Le mot d’ordre était clair : «Violences, discriminations, ASSEZ! Liberté et Egalité, partout et toujours.» Les principales revendications mises en avant cette année : le droit au mariage et à l’adoption, ainsi que la lutte contre la violence homophobe et les discriminations, revendications à la justesse cruellement illustrée le soir même : un homme s’est en effet fait poignardé.

    Par Pablo V. (Bruxelles)

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    Après 40 ans de Gay Pride, la lutte continue

    La fin des années ‘60 a été riche en luttes : mai 68, mobilisations anti-guerre, Printemps de Prague, mouvement noir,… C’est dans ce contexte de luttes que naissent les émeutes de Stonewall à New York, luttes qui symbolisent le début du mouvement LGBT.

    Par Julien (Bruxelles)

    A l’époque, les LGBT n’avaient légalement aucun droit et les descentes homophobes de flics étaient fréquentes. Le 28 juin 1969, un raid un peu plus violent que d’habitude au Stonewall va amener les LGBT à se mobiliser contre les attaques policières et les lois homophobes. En solidarité avec les mouvements afro-américains, des slogans comme ‘‘Gay Power’’ et ‘‘Gay is good’’ seront criés à chaque manifestation. Le Gay Liberation Front fut fondé par les militants LGBT de l’époque à New-York et s’étendra très vite au Canada, en Australie et dans beaucoup de pays européens. Très vite est née une collaboration pratique entre le GLF, les Blacks Panthers et les mouvements anti-guerre.

    Cette année, cela fera 40 ans que la première Gay Pride a été organisée à New-York. Le but était clairement de revendiquer des droits. Aujourd’hui, le milieu gay est beaucoup trop cher et beaucoup de LGBT en sont exclus. La Gay Pride est hélas essentiellement devenue l’opportunité de faire de l’argent et l’aspect revendicatif est de plus en plus mis de côté.

    (Petit) tour du monde de l’homophobie

    • 8 pays dans le monde exécutent des homosexuels.
    • L’homosexualité est punie par la loi dans une soixantaine de pays.
    • Aux Etats-Unis, les homosexuels sont exclus de l’armée. “Nous n’avons pas été en mesure d’empêcher le massacre de Srebrenica en Bosnie parce que l’armée était composée de soldats gays” se justifie un ancien commandant des forces de l’Otan.
    • Il est légal de licencier pour homosexualité dans 30 Etats américains.
    • Pour le numéro deux du Vatican, les multiples scandales de pédophilie qui secouent l’Eglise catholique sont liés à l’homosexualité et non au célibat des prêtres.
    • Dans les pays de l’Europe de l’Est, les Gay Pride sont violemment réprimées.

    A lire également:

    • DOSSIER: l’égalité reste à gagner!
    • DOSSIER: Histoire du mouvement LGBT – Les émeutes de Stonewall – 1969
    • Deux réfugiés LGBT agressés à Bruxelles
    • Répression des LGBT en Europe de l’EST
    • Les propos de Léonard font réagir le mouvement LGBT
    • Les droits des LGBT avant et maintenant
    • Luttons contre l’homophobie! – Interview d’une camarade brésilienne
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      A côté de chars publicitaires, se trouvaient de nombreuses associations LGBT telles que ACT UP, SOS homophobie,… mais aussi les syndicats (CGT, CFDT…), l’ensemble de l’opposition (NPA, PCF, Parti de Gauche, Europe Ecologie, PS,…), d’anciens militants du FHAR (le front homosexuel d’action révolutionnaire), ainsi qu’une soixantaine d’associations diverses (sans-papiers, sportifs, policiers,…). La commission LGBT du PSL-LSP participait également à l’évènement, aux côtés de nos camarades français de la Gauche Révolutionnaire, courant du NPA.

      Pour beaucoup, c’était l’heure de faire le bilan du gouvernement Sarkozy. En effet, aucune promesse de campagne n’a été respectée au point que GayLib (mouvement pourtant associé à l’UMP) s’est attaqué frontalement au gouvernement («Assez de promesses, l’égalité maintenant!») Au niveau européen aussi, avec l’aide du PPE et du Saint Siège, la majorité présidentielle s’est singularisée dans son opposition virulente au projet de loi visant simplement à combattre les discriminations homophobes au sein de l’Union. Pourtant, il s’agit bien d’une urgence. Selon une étude menée par la Halde en 2006, 85% des homosexuels se disent victimes de discriminations voilées (dénigrement ou rejet), et 40% d’entre eux affirment subir des discriminations ouvertes (blagues, insultes, harcèlement, voire violences physiques), émanant, la plupart du temps, de collègues. Les coupes budgétaires et l’austérité que nous annonce Sarkozy ne devrait pas améliorer cette situation, bien au contraire.

      Un homme poignardé en pleine Gay Pride cette année !

      La Gay Pride battait son plein dans le quartier du Marais à Paris, lorsque, vers minuit, un homme d’une quarantaine d’année s’effondre. Il s’est fait poignarder. Au même moment, une fusillade éclate à San Francisco blessant 3 personnes (dont une grièvement) dans une attaque terroriste contre la Gay Pride californienne. Ces attaques homophobes montrent que si aujourd’hui, pour certains, affirmer son orientation sexuelle est devenu moins complexe que par le passé, pour les autres, cette même affirmation peut devenir synonyme de violence et d’oppression. Par ailleurs, on se rappelle tous des dernières Gay Pride en Europe de l’Est et en Russie, où les militants LGBT devaient à la fois esquiver les coups de matraque de la police et les cocktails molotov lancés par des fascistes et des extrémistes religieux. Pire encore, les homosexuels sont actuellement persécutés dans plus de 60 pays dans le monde (prison à vie, coups de fouet…) et sont encore condamnés à la peine de mort dans huit pays. Dans un tel contexte, on ne peut pas rester les bras croisés.

      Néanmoins, la violence homophobe n’est pas inéluctable !

      Il y a fort à parier, par ailleurs, que la crise qui fragilise les plus opprimés à travers la destruction d’emploi, des services publics et d’éducation aura des conséquences sur les LGBT. A l’inverse, la défense des droits sociaux, le partage du temps de travail pour travailler tous, la garantie d’un logement décent,… permettrait sans doute de briser cet engrenage de tensions au sein de la société, et d’en finir avec la logique du « diviser pour mieux régner » chère à Nicolas Sarkozy et autres PPE.

      C’est pourquoi nous devons nous organiser pour résister à la violence homophobe, tout en construisant un rapport de force avec les travailleurs pour changer la société. Si pour vous aussi, ne rien faire, c’est laisser faire, alors rejoignez le PSL et sa commission LGBT. Samedi, nous avons par exemple tenu un stand avec de nombreuses brochures sur l’histoire du mouvement LGBT, Stonewall, avec notre organisation sœur en France (la Gauche Révolutionnaire) lors de la Gay Pride parisienne. Une initiative encourageante des deux côtés de la frontière !

  • Pour l’indépendance réelle et pour le socialisme !

    50 ans d’indépendance formelle de la RD Congo, suka wapi (*) ?

    Ce 30 juin 2010, au regard du bilan de ces 50 ans ‘‘d’indépendance’’, on verra qu’il ne reste plus grand-chose de cette indépendance et que la grande fête du 30 juin 1960 n’aura que peu duré. Depuis lors, le Congo n’a connu que la dictature pro-impérialiste de Mobutu, les guerres, la souffrance et la misère. Pour une réelle indépendance et pour que les énormes richesses du pays reviennent à la population, une société socialiste est nécessaire.

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    République Démocratique du Congo

    Population en 2009 : 68.692.542 (6 fois la Belgique, autant qu’en France)

    Quelques dates :

    • 1885: Léopold II achète le Congo en tant que propriété personnelle, et s’enrichit par la vente de caoutchouc. Entre 1885 et 1908, au moins 5 millions de Congolais meurent des suites de l’exploitation et de la maladie
    • 30 juin 1960: le Congo obtient son indépendance, sous la Présidence de Kasavubu et avec Lumumba comme Premier Ministre. Lumumba est assassiné en 1961
    • 1965-1997: le Général Mobutu prend le pouvoir. En 1971, le Congo est rebaptisé Zaïre. En 1984, la fortune de Mobutu était estimée à 4 milliards de dollars
    • 18 mai 1997: Kabila entre dans Kinshasa avec ses troupes de l’AFDL
    • 1998: début de la guerre civile, lorsque le Rwanda et l’Ouganda se liguent contre Kabila
    • 2001: Kabila est assassiné lors d’une tentative de coup d’Etat, son fils prend le pouvoir à sa suite
    • 2006: Kabila Jr. remporte les élections

    Une indépendance arrachée de haute lutte

    ‘‘L’indépendance du Congo constitue l’aboutissement de l’œuvre conçue par le génie du Roi Léopold II’’ voilà ce que déclare le roi Baudouin à Léopoldville (Kinshasa) le 30 juin 1960, en affirmant que l’indépendance est le sommet de l’œuvre civilisatrice de la Belgique en Afrique. Un beau mensonge, destiné à justifier la colonisation afin de garder une mainmise ‘amicale’ (sic) sur le Congo et à préserver le prestige de la Belgique sur la scène internationale. La vérité, la voilà : l’indépendance du Congo a été acquise au prix de la lutte implacable du peuple congolais et au prix du sang de nombreux combattants de cette indépendance.

    Ainsi, le 4 janvier 1959, la foule de Léopoldville s’était attaquée aux symboles du colonialisme, police et armée en tête, après l’interdiction et la répression d’un meeting de l’ABAKO de Joseph Kasa-vubu(1), au prix d’une centaine de morts. Ce n’est qu’après cet événement que la Belgique s’est résolue à l’indépendance, en comprenant qu’elle était incapable d’assumer une lutte prolongée. Avant cette date, l’indépendance était inconcevable à court terme. Ainsi, le professeur Van Bilsen, de l’UCL, parlait alors d’une éventuelle indépendance du Congo par l’intermédiaire d’un plan étalé sur 30 années.

    Cette cérémonie du 30 juin à Kinshasa révèle trois choses. Premièrement, la Belgique ne compte nullement abandonner sa mainmise sur le Congo. Deuxièmement, le discours du président Kasa-Vubu montre que la plupart des élites congolaises est prête à vendre cette indépendance que le peuple a obtenue pour quelques privilèges personnels. Le président Kasa-Vubu remercie ainsi Baudouin pour avoir ‘‘aimé et protégé’’ la population du Congo. La troisième chose rétablit la vérité sur l’indépendance du Congo et est révélée dans le discours de Patrice Lumumba(2), qui affirme que ‘‘cette Indépendance (…) nul Congolais digne de ce nom ne pourra jamais oublier que c’est par la lutte qu’elle a été conquise, une lutte de tous les jours, une lutte ardente et idéaliste, une lutte dans laquelle nous n’avons ménagé ni nos forces, ni nos privations, ni nos souffrances, ni notre sang.’’

    C’est de ce discours, où Lumumba salue les combattants de l’indépendance, ses ‘‘frères de lutte’’, dont nous nous souviendrons ce 30 juin 2010.

    Du colonialisme au néocolonialisme

    Comme l’a annoncé Baudouin, la Belgique ne compte pas abandonner ses ‘‘droits’’ sur le Congo et, plus spécifiquement, sur les richesses minières du pays. Quand il se rend compte que Lumumba, le premier ministre, veut vraiment faire profiter les richesses du pays aux Congolais, l’Etat belge décrète sa mise à mort ainsi que celle de son gouvernement nationaliste. Cela se concrétise tout d’abord par un soutien à la sécession du Katanga (où se trouvent la plupart des richesses minières et la puissante Union Minière) et à celle du Sud-Kasai (où se trouvent les ressources diamantifères) et ensuite par l’assassinat de Lumumba et le soutien au Coup d’Etat du général Mobutu.

    Le régime mobutiste est un régime de dictature et de terreur instauré avec le soutien de la Belgique et des Etats-Unis, à travers la CIA qui travaillait déjà avec Mobutu depuis plusieurs années. La formule qui dit que ‘‘contre des privilèges personnels, les élites congolaises sont prêtes à vendre leur pays aux intérêts occidentaux’’, se vérifie.

    Le régime de Mobutu est soutenu par les puissances occidentales afin de protéger les intérêts économiques occidentaux au Congo (devenu Zaïre en 1971) et pour être la plaque tournante de la CIA contre le ‘‘communisme’’ en Afrique. Ainsi, le Zaïre a par la suite été la base arrière de l’UNITA, qui luttait pour les intérêts occidentaux en Angola contre le Mouvement Populaire de Libération de l’Angola (MPLA) au pouvoir.

    Grâce à une aide occidentale considérable, le régime de Mobutu peut offrir quelques miettes à la population ; le niveau de vie s’améliore durant quelques années, avec des résultats corrects dans l’éducation par exemple. Mais cette relative et très brève période de réussite n’est due qu’au financement occidental et, quand les régimes occidentaux décident que Mobutu va trop loin et qu’ils le lâchent définitivement après la chute du mur de Berlin et la fin de la ‘‘nécessaire lutte contre le communisme’’, le régime s’effondre.

    Dépourvu du soutien occidental, le Zaïre de Mobutu sombre dans le chaos et la violence : Kengo wa Dondo, le chef du gouvernement du parti unique MPR (et actuel président du Sénat), ‘‘remet de l’ordre’’ dans les finances de l’Etat en pratiquant une politique néolibérale brutale, saccageant tous les acquis des travailleurs et de la population et allant même jusqu’à ne plus payer les fonctionnaires. Cette politique engendre une violence généralisée dans le pays et on assiste aux grands pillages opérés par les FAZ (l’armée officielle), qui n’avait plus touché leur salaire depuis longtemps.

    Cette période où l’impérialisme lâche Mobutu voit aussi l’organisation de la Conférence nationale souveraine (CNS) sensée opérer une transition démocratique pour le pays. On voit alors ‘‘l’opposant’’ de Mobutu, Etienne Tshisekedi (3) et son UDPS, monter en puissance pour finalement accepter de devenir premier ministre de Mobutu à plusieurs reprises. Cela illustre une fois de plus à quel point les élites congolaises sont prêtes à vendre leur pays pour quelques privilèges.

    La fin de Mobutu

    Extrait de l’édito de ce journal en juin 1997

    «Kabila a accompli ce que tous les pouvoirs impérialistes voulaient éviter à tout prix: prendre d’assaut Kinshasa. La position de Kabila est donc forte aujourd’hui. Ce qu’il va ensuite faire reste provisoirement une énigme. Les besoins sont immenses: emplois, salaires, soins de santé, enseignement, logement, transport et communications… L’objectif n’est pas seulement la reprise de l’économie et sa gestion dans l’intérêt des masses, mais aussi la reconstruction d’une économie totalement ruinée.’’

    «Cela ne peut se faire en ouvrant le pays à la dictature du marché et au capitalisme mondial. L’Alliance semble pourtant suivre cette voie: avant la prise du pouvoir, des accords d’exploitation ont déjà été signés avec des entreprises américaines et sud-africaines. Cela ne peut aboutir qu’à des zones franches dans les provinces disposant de richesses minérales où des journées de 16 heures de labeur avec des salaires de famine seront la norme.’’

    «Seul un gouvernement qui nationalise et planifie l’économie en faveur des masses peut offrir une solution. Les ouvriers et les paysans pauvres doivent être impliqués dans la mise sur pied et l’application d’un plan de reconstruction.’’

    «Le Congo devra évidemment faire du commerce avec le capitalisme mondial. Il sera donc soumis à une pression gigantesque. En restant indépendant de l’impérialisme et en mettant l’intérêt du peuple au centre de ses préoccupations, le Congo peut être un exemple pour tous les Africains et un pôle de solidarité internationale.’’
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    Les erreurs de Laurent-Désiré Kabila

    C’est dans ce contexte d’un Etat chancelant que démarre, en 1996, la guerre de l’AFDL, dont le porte-parole est Laurent-Désiré Kabila, qui tenait son maquis d’inspiration maoïste à Hewa Bora au Sud-Kivu depuis les années ’60. En réalité, derrière cet homme se trouvent les armées rwandaise et ougandaise, désireuses de profiter de la faiblesse du Zaïre pour piller les richesses de l’Est du pays (or, coltan, cassitérite, etc.) et pour traquer les génocidaires hutus de 1994 réfugiés au Zaïre. Vouloir ‘‘libérer’’ le pays avec des armées liées à l’impérialisme dans son dos, voilà la première erreur de Kabila.

    La population, qui veut en terminer avec le pouvoir chaotique de Mobutu, accueille favorablement les miliciens de l’AFDL jusqu’à Kinshasa, où le régime passe définitivement aux mains de Kabila le 17 mai 1997. Enfermé dans la théorie maoïste des deux étapes, et redevable envers ses ‘‘amis’’ rwandais, ougandais, angolais, zimbabwéens,… et occidentaux ; Kabila veut accueillir les ‘‘bons’’ capitalistes contre les ‘‘mauvais’’ qui avaient soutenu le régime mobutiste. Il octroie donc des concessions aux sociétés multinationales qui avaient financé la guerre de l’AFDL. Seconde erreur: impossible de libérer un pays du joug de l’impérialisme en l’accueillant à bras ouvert sur son sol ; impossible de développer un pays en permettant à des sociétés assoiffées de profits d’exploiter ses richesses. Un réel développement indépendant passe par la mise sous contrôle des travailleurs des entreprises pour que les richesses produites profitent à la population toute entière, que le développement s’effectue sur base nationale et pour éviter l’exportation des bénéfices vers l’étranger.

    Alors que les Congolais avaient accueilli l’AFDL à bras ouverts pour mettre fin au chaos mobutiste et à la dictature de parti unique du MPR ainsi qu’au ‘‘multi-mobutisme’’ instauré avec la CNS (celles-ci avaient permis la création de parti ‘d’opposition’, tous d’anciens mobutistes convertis à la démocratie comme Kengo, Tshisekedi, Karl-i-Bond, etc.), Kabila échoue à intégrer les masses dans un projet révolutionnaire. Les CPP (comités de pouvoir populaire) devaient, à la base, être le centre du pouvoir de Kabila, son instrument démocratique. Mais, au lieu de cela, les CPP jouent rapidement le rôle de courroie de transmission des ordres du haut vers le bas et non de réel pouvoir populaire. Rien d’étonnant : la lutte de Kabila était avant tout une lutte armée plus qu’un mouvement révolutionnaire populaire.

    Les caractéristiques principales d’une lutte armée sont de ne pas impliquer toutes les masses pauvres mais seulement les combattants ainsi que d’obéir à un système hiérarchique strict où la démocratie n’a pas place. C’est ce modèle qui s’applique désormais à l’ensemble de la société congolaise. C’est la troisième erreur fondamentale de Kabila et, lorsque les alliés rwandais et ougandais se sont retournés contre l’enfant turbulent Kabila, celui-ci n’a pu compter sur aucune base et s’est retrouvé seul, sans réel appui autre que celui de l’Angola jusqu’à son assassinat en 2001.

    Les parrains contre le filleul, le fils contre le gendre

    En 1998, Kabila s’émancipe trop de ses parrains, et ceux-ci décident de lancer une nouvelle guerre de ‘‘correction révolutionnaire’’ (sic). Ainsi nait le RCD, où se retrouvent pêle-mêle les anciens cadres de l’AFDL, des anciens FAZ, des membres de l’UDPS,… Bref, toute la clique pro-impérialiste du pays et tous les aventuriers prêts à gagner quelques privilèges contre services rendus à l’impérialisme. En réalité, les armées rwandaises et ougandaises ne tardent pas à se disputer la part du lion. Les troupes s’entretuent à Kisangani et l’Ouganda crée le MLC dirigé par Jean-Pierre Bemba, gendre de Mobutu. Le vieux Kabila assassiné, le fils prend la relève et, quelques millions de morts plus tard (on parle de 4 millions), on arrive aux accords signés à Sun City en 2002, qui prévoient un gouvernement commun Kabila-MLC-RCD et des élections en 2006. Cet accord a été rendu possible car les différentes parties étaient finalement d’accord sur l’essentiel depuis la mort de Kabila : satisfaire les occidentaux en accueillant les institutions financières internationales et répartir les postes de pouvoir. Quel cynisme ! Le fils de l’ancien président Kabila et le gendre de Mobutu (Jean-Pierre Bemba est également le fils de Jeannot Bemba Saolona, ancien président de l’ANEZA – association nationale des entreprises du Zaïre sous Mobutu, le patron des patrons), ensemble pour l’occident et les privilèges.

    Les élections donnent Kabila vainqueur et celui-ci réalise la politique voulue par l’impérialisme et les institutions financières internationales. Mais il n’y a aucun doute sur le fait que Jean-Pierre Bemba aurait réalisé le même programme, voire encore pire, lui qui est le fruit de l’union entre Mobutu et le patronat zaïrois.

    Un pays sous tutelle

    Aujourd’hui, à qui profitent les richesses du Congo ? Certainement pas à son peuple qui se voit accablé d’une pauvreté extrême. Dans des provinces comme l’Equateur ou le Bandundu, le taux de pauvreté atteint les 90%. Dans l’ensemble du pays, l’espérance de vie atteint péniblement les 54 ans et 1 million de personnes décèdent chaque année du SIDA. Et, en effet, le Congo n’a pas son avenir en main. En acceptant les plans des institutions financières internationales, Joseph Kabila leur a donné les clés de la maison. Aujourd’hui, par exemple, c’est un Canadien qui dirige la Gécamines, ancien fleuron de l’économie zaïroise et société nationale active au Katanga. Celui-ci a pour mission d’octroyer des concessions minières au plus offrant et c’est tout le capitalisme sauvage qui se retrouve au Katanga : du capitaliste belge Georges Forrest aux sociétés chinoises en passant par les multinationales venues d’Inde, du Canada, etc.

    Les programmes sociaux d’éducation, de santé,… sont inexistants. Les fonctionnaires ne reçoivent que rarement leur salaire, s’adonnant à la corruption pour survivre. Les infrastructures promises par Kabila dans ses ‘‘5 chantiers’’ sont invisibles. Rester dans le cadre du FMI ne pourra que faire perdurer cette situation : avec la dette immense laissée par Mobutu (pour construire des villas en Suisse, ce que les bailleurs savaient parfaitement), le Club de Paris – les grands créanciers des pays endettés – possède un moyen de pression extraordinaire pour pousser le régime congolais à libéraliser au maximum son économie, faisant ainsi place aux capitalistes qui pillent le pays. Cette question de la dette empêche également le Congo de toute capacité d’action puisque le budget de l’Etat s’en retrouve amoindri.

    Pour un Congo véritablement indépendant – Pour un Congo socialiste

    50ans après l’indépendance, nous voyons un pays sous tutelle des institutions financières internationales, un pays où la population ne voit pas un franc de ses richesses. En 2011 auront lieu les élections présidentielles et législatives et, quel que soit le vainqueur (Joseph Kabila, un opposant issu du PPRD, du MLC ou de l’UDPS), cet Etat des lieux de changera pas car tous ont la volonté d’être celui qui plaira le plus à l’impérialisme, tous sont prêts à vendre leur pays pour quelques privilèges. Au parlement, tous seront prêts à aller chercher leur enveloppe de dollars pour voter ‘‘comme il faut’’.

    La réappropriation du pays passe par la prise en mains de ses richesses par les travailleurs et le peuple tout entier et par la prise en mains par les paysans des grandes concessions octroyées aux amis de Mobutu.

    La résolution de la question agraire et la nationalisation des concessions minières, voilà ce qui permettra, grâce au profit immense qu’elles produisent, de dégager de l’argent pour construire les infrastructures nécessaires au développement du pays, pour investir dans l’éducation et dans la santé. Cette nationalisation doit être véritable et démocratique, c’est-à-dire entre les mains de ceux qui y travaillent et aux mains du peuple tout entier et non entre les mains de quelques dirigeants corrompus.

    Ce programme doit être réalisé en tenant compte des leçons enseignées par l’Histoire : ne faisons pas confiance aux élites prêtes à vendre le pays pour quelques privilèges ; ne nous allions pas avec des impérialistes, nos intérêts sont opposés ; ne nous allions pas avec des capitalistes, l’appropriation collectives des richesses est le seul gage d’une indépendance réelle ; impliquons les masses au maximum dans ce processus révolutionnaire, elles seules ont la force de résister aux agressions, elles seules peuvent éviter le pouvoir d’une élite corrompue ; la lutte commence au sein des travailleurs des villes par les grèves et les manifestations, la lutte armée n’est qu’un outil périphérique qui, utilisé seul, mène à la dictature.


    (*) Ça se termine où (quand) ?

    (1) L’ABAKO est l’Association des Bakongos, un parti régionaliste de la province du Bas-Congo dirigé par le président Kasa-vubu (1913-1969) qui représentait les positions pro-occidentales et soutenait la dictature de Mobutu.

    (2) Lumumba (1925-1961) était un chef de file du Mouvement national congolais (MNC) qui a remporté les élections en décembre 1959. Opposé à la déclaration d’Indépendance – parrainée par la Belgique – de la riche province du Katanga, il avait fait appel au soutien de l’Union soviétique. La radicalisation de Lumumba a donné lieu à son assassinat soutenu (ou organisé) par l’Occident.

    (3) Etienne Tshisekedi a toujours été un « opposant » au service de l’impérialisme. En 1965, il devient ministre de l’Intérieur sous Mobutu et participe, en 1967, à la rédaction de la nouvelle constitution de parti unique et au manifeste de Nsele qui fonde le MPR, Parti-Etat. Ce n’est qu’en 1982 qu’il fonde l’UDPS pour obtenir le pouvoir qu’il voulait partager avec Mobutu mais que celui-ci monopolisait. Lors de la transition ‘‘démocratique’’ et de la CNS, Tshisekedi sera plusieurs fois Premier Ministre de Mobutu comme demandé par les impérialistes qui voulaient le compromis entre ces deux hommes. Après la chute de Mobutu, l’UDPS a en permanence cherché des alliés contre Kabila. En 2006, l’UDPS soutient Jean-Pierre Bemba au second tour de la présidentielle après avoir boycotté l’élection.

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