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Tag: États-Unis
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USA. L’importance nationale de la campagne pour la reelection de Kshama Sawant

Kshama Sawant a été élue pour la première fois au conseil municipal de Seattle en 2013 avec plus de 90.000 voix, en se présentant ouvertement comme membre de Socialist Alternative, avant que Bernie Sanders et Alexandria Ocasio-Cortez ne soient connus. Kshama a profité de sa campagne électorale de 2013 pour défendre vigoureusement l’instauration d’un salaire minimum horaire de 15 $, alors qu’aucun élu de premier plan n’en parlait en dépit des grèves des travailleurs de la restauration rapide. La victoire électorale de Kshama et le mouvement des syndicats, des travailleurs et des socialistes ont fait de Seattle la première grande ville à remporter le salaire minimum de 15 dollars.
Par Bryan Koulouris, Socialist Alternative (CIO-USA)
Le mouvement des 15 $ à Seattle a surmonté l’opposition féroce de l’establishment capitaliste, mais après la victoire à Seattle, la loi des 15 $ s’est répandue comme une traînée de poudre dans tout le pays. L’élection de Kshama en 2013 a également été la première grande percée pour les socialistes aux urnes, ce qui a donné confiance aux autres militants de gauche pour vaincre le pouvoir corporatif et l’establishment politique ; ceci a été renforcé par la réélection de Kshama Sawant en 2015.
Mais pour que les travailleurs, les jeunes et les opprimés gagnent du terrain, les élections ne suffisent pas. La fonction politique doit être utilisée pour construire des mouvements de lutte et accroître la conscience de la classe ouvrière pour changer la société. Kshama Sawant et Socialist Alternative ont brillamment illustré à Seattle comment cela pouvait être fait.
D’innombrables victoires que beaucoup pensaient auparavant impossibles à gagner ont été remportées à Seattle au cours des cinq dernières années. Avec l’élection de Kshama, les militants de la classe ouvrière ont acquis de la confiance et ont disposé d’une voix à l’hôtel de ville et d’une ressource inestimable pour mieux s’organiser. Des lois historiques pour les droits des locataires, l’instauration de la Journée des peuples indigènes, le blocage de la construction d’un bunker monumental de la police, etc. ne sont que quelques exemples de ce qui a été obtenu.
Actuellement, la campagne pour la réélection de Kshama lutte en faveur du contrôle universel des loyers et de la taxation des grandes entreprises pour financer une expansion majeure du logement social. Si nous pouvons remporter une victoire massive en matière de logement à Seattle – tout comme avec le mouvement des 15 $ – cela pourrait ouvrir les vannes des luttes et de la législation dans les villes à travers le pays, partout où les travailleurs font face à une profonde crise du logement.
La crise du logement et de puissants ennemis
Alors que la région de Seattle abrite deux des cinq milliardaires les plus riches au monde, on trouve des campements de tentes pour sans-abri dans presque tous les quartiers – sauf là où la police les a brutalement démolis. Le marché du logement à but lucratif a laissé tomber cette ville, et les gens de la classe ouvrière sont chassés par les expulsions, la hausse des loyers et le système fiscal le plus régressif du pays. Seattle est en tête du pays en ce qui concerne les grues de construction par habitant, et les grands promoteurs tentent de transformer la ville en un terrain de jeu pour les riches. Ils savent que l’appel audacieux de Kshama en faveur d’un contrôle universel des loyers et des taxes sur les riches pour financer des logements sociaux de qualité constitue un obstacle majeur sur leur chemin.
Les grandes entreprises essaient donc d’acheter cette élection. Ils ont investi plus d’un million de dollars dans deux comités d’action politique (PAC) pour tenter de renverser Kshama. Cet argent sera dépensé dans des lettres envoyées par la poste et l’engagement de frappeurs de porte professionnels qui tenteront de cacher aux électeurs de Seattle les véritables intentions des milliardaires derrière une rhétorique “progressiste”. Mais leur objectif est clair : “n’importe qui, sauf Kshama”.
Les grandes entreprises de Seattle sont encouragées en ce moment même. Leur programme avait été repoussé sur de nombreux fronts par le bureau de Kshama Sawant, la croissance de la gauche socialiste, l’augmentation des luttes ouvrières et des victoires clés sur les 15 dollars de l’heure et les droits des locataires. Cependant, au cours de ces deux dernières années, la classe des milliardaires s’est réaffirmée avec la défaite de la “Taxe Amazon” (en savoir plus) et l’élection du maire.
L’année dernière, Kshama et Socialist Alternative ont aidé à mener une grande campagne pour taxer Amazon et les grandes entreprises et utiliser ces fonds pour construire des logements sociaux de qualité. Au départ, lorsque la campagne a proposé cette taxe, la pression organisée des locataires et des travailleurs a fait en sorte que le Conseil municipal adopte la taxe à l’unanimité. Ensuite, l’homme le plus riche du monde – Jeff Bezos – a utilisé son intimidation économique et le lobbying des entreprises a fait son chemin. La taxe Amazon a finalement été abrogée et la grande majorité des membres du conseil municipal ont fait volte-face. Bezos a été aidé dans l’orchestration de cette trahison par la maire Jenny Durkan élue en 2017 avec une contribution de 350.000 $ d’Amazon au travers d’un PAC.
En 2017, Socialist Alternative avait activement soutenu le candidat indépendant de gauche du Parti populaire, Nikkita Oliver, pour le poste de maire. Malheureusement, une section de dirigeants syndicaux a activement soutenu Durkan et s’est ensuite opposée à la lutte pour taxer Amazon et les grandes entreprises. Cette dynamique – un establishment enhardi et un mouvement ouvrier divisé – a conduit Socialist Alternative à comprendre très tôt que cette campagne de réélection serait une bataille très difficile. Le débat au sein des syndicats de Seattle est d’importance nationale et contient des leçons clés sur la voie à suivre pour le mouvement syndical.
Le mouvement ouvrier de Seattle
Avec des niveaux record d’inégalité, pour que le mouvement ouvrier grandisse et prospère, nous devons lutter contre les grandes entreprises qui veulent attaquer nos droits, nos salaires et nos conquêtes sociales. Le meilleur moyen d’y parvenir est d’adopter des revendications audacieuses et une stratégie de lutte, de bâtir la démocratie au sein des syndicats et de ne pas nous limiter à ce qui est acceptable pour les grandes entreprises.
Une recrudescence de la lutte ouvrière a eu lieu ces dernières années avec les enseignants en première ligne, et les sondages montrent que les opinions favorables aux syndicats ont augmenté de façon spectaculaire, en particulier chez les jeunes. Reflétant cette atmosphère, Kshama est fière d’être soutenue par 13 sections syndicales locales de Seattle jusqu’à présent, représentant plus de 80.000 travailleurs de l’État de Washington.
Malheureusement, certains dirigeants syndicaux plus “pragmatiques” estiment que nous pouvons renforcer notre influence en “établissant un consensus” avec les PDG et l’establishment politique plutôt qu’en comprenant que ces forces font obstacle à l’amélioration de la vie des travailleurs. Ces dirigeants syndicaux, dont beaucoup ne disposent pas de processus démocratique au sein de leur syndicat, ont voté contre l’approbation de Kshama au Conseil du travail du comté.
Dans la foulée de ce vote, Monty Anderson, du King County Construction Trades Council a déclaré : “Quand nous avons dû rompre les liens, c’est quand elle a commencé à jouer avec le nouveau poste de police, la taxe [Amazon], qu’elle s’est mise entre les camionneurs et UPS. Nous estimons qu’un politicien local ne devrait pas se mêler de cela. Nous pensons qu’un politicien local devrait faciliter les affaires dans la ville, et elle fait le contraire.”
Nous devons rejeter ce genre de syndicalisme d’entreprise et nous baser sur une stratégie de lutte pour obtenir le contrôle des loyers, un New Deal vert pour les travailleurs, une plus grande responsabilisation de la police et plus encore.
Il est malheureux que, intentionnellement ou non, une section de dirigeants syndicaux ait pris vis-à-vis de ces élections une décision qui renforcera Amazon et la Chambre de commerce, au lieu de défendre les intérêts des travailleurs et des gens de couleur. Gagner cette élection et renforcer la gauche combative à Seattle aurait des implications nationales pour le renforcement du mouvement ouvrier.
L’importance nationale de ces élections
De plus en plus de socialistes auto-identifiés sont élus et mènent campagne dans tout le pays. Cela a suscité un débat à gauche sur une question clé : comment les socialistes peuvent-ils utiliser efficacement les fonctions électives dans un système capitaliste ? Certains prétendent que nous devrions abaisser notre profil socialiste en nous basant uniquement sur les limites du Parti démocrate, mais les victoires de Kshama sont un exemple des possibilités de populariser les idées socialistes, de mener des campagnes indépendantes et de construire des mouvements pour gagner des victoires. Le maintien de ce siège de combat pour les travailleurs à Seattle peut être un phare pour la gauche au niveau national dans le débat sur la manière de changer la société.
La stratégie de Socialist Alternative repose sur la reconnaissance que la classe des milliardaires piétinera nos droits, notre niveau de vie et notre planète à la recherche du profit. Seule la force organisée et unie des travailleurs peut changer le monde. Les élections sont un outil que nous pouvons utiliser dans cette lutte, mais tout comme pour une grève ou une campagne communautaire, nous devons donner tout ce que nous avons dans cette lutte pour la gagner !
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Solidarité avec les travailleurs de Porto Rico !

Une spirale infernale de corruption, de dette, d’austérité et de colonialisme
Le texte qui suit est issu d’un tract distribué durant le week-end des 20 et 21 juillet à San Juan par les membres de Socialist Alternative (CIO-USA).
Un tremblement de terre politique a frappé Porto Rico : plusieurs jours durant, des manifestations de masse ont exigé la démission du gouverneur corrompu et homophobe Ricardo Rossello. Cette mobilisation fait suite à la publication de centaines de SMS dans lesquels Rossello et d’autres hauts responsables plaisantaient au sujet de l’assassinat de Carmen Carmen Yúlin Cruz, maire de San Juan, en plus de blagues homophobes ou portant sur les cadavres qui se sont entassés après le passage de l’ouragan Maria il y a deux ans de cela
La crise politique a suscité des inquiétudes dans les cercles dirigeants américains : “Porto Rico est plongé dans le chaos et l’instabilité persistante est une menace majeure”, a averti le Washington Post vendredi (7/19/2019). La révolte populaire se poursuit et les gens sont descendus dans les rues par dizaines de milliers au cours de ces 10 derniers jours.
L’île connait une récession dévastatrice depuis 13 ans. Des centaines de milliers de personnes ont quitté Porto Rico pour le continent. Le gouvernement a été déclaré en faillite en 2017. Selon une étude récente de l’Université de Harvard, 5.000 personnes sont mortes des suites de l’ouragan Maria et des centaines de milliers d’autres continuent de souffrir du manque de produits de première nécessité, y compris d’abris. Les dommages causés par l’ouragan sont estimés à une somme comprise entre 90 et 120 milliards de dollars. Le Conseil de surveillance budgétaire non élu du gouvernement des États-Unis a continué d’appliquer des coupes budgétaires, de privatiser l’énergie, l’enseignement et les télécommunications et d’instaurer une austérité qui a réduit à néant les conditions de vie de millions de personnes. Les statistiques sont choquantes : plus de 44% des travailleurs et des jeunes vivent dans la pauvreté.
Le prétendu « effort de redressement » est un échec total. Trump affirme que le gouvernement américain a “envoyé 92 milliards de dollars” sur l’île. En réalité, Washington a approuvé l’envoi de 42 milliards de dollars, mais 14 milliards de dollars uniquement ont été envoyés, et la majeure partie a fini dans les poches de l’élite corrompue.
Avant le récent scandale des textes de Rossello, le gouvernement avait été frappé par un scandale de corruption qui a conduit à l’arrestation de six hauts fonctionnaires. Ces derniers avaient détourné 15,5 millions de dollars de fonds fédéraux à des entrepreneurs bénéficiant de connexions politiques entre 2017 et 2019. Ce fut l’élément déclencheur de la révolte des travailleurs et des jeunes contre Rossello et son régime corrompu.
Le peuple portoricain devrait avoir le droit de contrôler son destin politique et économique, y compris le droit de décider entre l’indépendance réelle et le statut d’État à part entière sans la manipulation et l’ingérence de Washington D.C. et de Wall Street. Plus de 100 ans de politiques coloniales profondément axées sur l’exploitation, la manipulation de la monnaie et de la dette ainsi que la réglementation fiscale complexe au profit de l’industrie américaine et des riches investisseurs ont laissé Porto Rico à la merci de Wall Street et de régimes racistes, anti-migrants et anti-travailleurs comme celui de Donald Trump.
Le statut de Porto Rico en tant que territoire non-incorporé et commonwealth des États-Unis rend sa situation juridique unique. Son cas de crise et de faillite est suivi par les grandes entreprises américaines comme un exemple pour d’autres États et villes confrontés à des problèmes similaires et qui se préparent à mettre en œuvre la même austérité sauvage qu’à Porto Rico et dans le reste du monde.
Les travailleurs se soulèvent pour lutter contre Wall Street et les idées réactionnaires du président Trump à travers les États-Unis. Les idées socialistes deviennent populaires parmi des millions de jeunes qui cherchent une alternative au capitalisme. Des millions de personnes aux États-Unis ont leurs racines et leurs origines familiales à Porto Rico. Nous devons nous organiser ensemble et avons besoin d’une stratégie pour lutter contre l’austérité et pour une alternative socialiste.
Nous avons besoin d’une stratégie fondée sur la reconnaissance du fait que la classe des milliardaires piétinera nos droits, notre niveau de vie et la planète à la recherche de profit. Seule la force des travailleurs américains, portoricains et ailleurs dans le monde, organisés et unis, peut changer le monde et vaincre le désastre du capitalisme :
- Solidarité avec le peuple portoricain !
- Organisez des manifestations massives de solidarité en faveur de la population de Porto Rico dans les grandes villes des États-Unis ! Pour une lutte commune !
- Rossello et le régime corrompu doivent dégager ! Pour l’établissement de comités sur les lieux de travail et dans les quartiers afin de faire progresser la lutte !
- Pour une grève générale à travers l’île pour faire tomber le régime !
- Pour une commission indépendante ouvrière chargée d’enquêter sur la corruption ! Pour la présence de candidats des travailleurs aux élections locales !
- Non aux Privatisations ! Non aux coupes budgétaires ! Pour une aide d’urgence contre la crise en cours à Porto Rico !
Pour l’abolition de la dette ! Pour la fin du Conseil de surveillance budgétaire et de la dictature financière de Wall Street ! - Pour des emplois publics et des investissements dans les infrastructures de base ! Les banques et les grandes entreprises doivent devenir propriétés publiques !
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[USA] Adoption brutale de projets de loi sur l’avortement – Ripostons contre la droite !

Fin mai, l’Assemblée législative de l’Alabama, sous contrôle républicain, a adopté – et le gouverneur l’a signé – une interdiction quasi totale de l’avortement. Il s’agit désormais de la loi la plus restrictive sur l’avortement aux USA depuis l’arrêt Roe v. Wade de la Cour suprême en 1973.
Par Keely Mullen, Socialist Alternative (USA)
Ce projet de loi de l’Alabama rend l’avortement illégal à n’importe quel stade de la grossesse – sauf lorsque la vie de la mère est en danger – et menace ceux qui pratiquent des avortements de 99 ans de prison. Il ne s’agit là que d’une des nombreuses récentes lois d’Etats qui tentent apparemment de se surpasser les unes les autres dans leur barbarie. Des projets de loi en fonction des “battements du cœur” ont été adoptés au Kentucky, au Mississippi, en Géorgie et en Ohio, et interdisent les avortements après qu’un battement cardiaque fœtal soit détecté (habituellement entre 6 et 8 semaines), souvent avant même que la mère sache qu’elle est enceinte.
L’interdiction en Alabama, ainsi que des projets de loi similaires en cours dans d’autres États, contestent directement la loi fédérale – ce qui est exactement leur intention. L’objectif clair de la droite chrétienne – en soutenant ces projets de loi – est de faire pression sur la majorité conservatrice de la Cour Suprême pour qu’elle revienne l’arrêt Roe v. Wade.
La droite divisée
Il existe cependant de réelles divisions au sein du parti républicain sur ces projets de loi – en particulier celui de l’Alabama – et en réalité, ils représentent une surenchère de la part des partisans de la ligne de droite dure. Seulement 14 % des Américains appuient une loi extrême comme celle de l’Alabama et les deux tiers des Américains s’opposent à l’annulation de l’arrêt Roe v. Wade.
Si le Parti républicain se rangeait derrière ces interdictions extrêmes de l’avortement, ses chances de conserver la Maison-Blanche et de reprendre la Chambre des représentants en 2020 seraient compromises. C’est pour cette raison que la présidente du Comité National républicain a déclarée publiquement qu’elle s’opposait à la loi de l’Alabama et que des personnalités de droite populaires comme la polémiste républicaine Tomi Lahren s’y sont également opposé – en la dénonçant comme trop restrictive.
La loi d’Alabama sera très probablement annulée par la Cour Fédérale. Plutôt que de l’interdire complètement, la Cour Suprême est quant à elle plus susceptible d’adopter à l’avenir des projets de loi qui restreignent l’avortement.
Mais il n’y a pas lieu de se reposer sur ses lauriers. Roe v. Wade, qui fut la victoire la plus importante du mouvement pour l’émancipation des femmes des années ‘60 et ‘70, est plus en danger aujourd’hui qu’à n’importe quel autre moment depuis 1973.
Lorsque la Cour suprême entendra une affaire susceptible de revenir sur cette victoire, il y aura un tollé d’indignation. Il faut toutefois souligner que ce qui a été gagné dans les années ‘60 et ‘70 a déjà été lentement érodé par les lois des États limitant certaines pratiques d’avortement, pénalisant les praticiens de l’avortement, etc.
Pour gagner le combat historique visant à conserver – et à étendre – les acquis de l’affaire Roe c. Wade, nous devons commencer dès maintenant à construire un mouvement capable de défendre le droit à l’avortement et d’en élargir le champ d’application.
Une contre-attaque s’impose
Ces cinq dernières années, nous avons connu une recrudescence de la résistance des femmes aux États-Unis. Les femmes ont participé en grand nombre à aux manifestations contre Trump et une énorme politisation autour de la question du harcèlement sexuel a pris son envol grâce à #Metoo.
Bien qu’il y ait une grande colère au sujet de la législation anti-femmes en Alabama, en Géorgie et dans d’autres États, et une réelle crainte quant à ses implications, nous n’avons pas encore vu de mobilisation massives pour s’y opposer. Il n’y a eu que de petits rassemblements à travers le pays.
Malheureusement, la responsabilité de cette situation incombe principalement aux principales organisations comme NOW, NARAL et Planned Parenthood qui, malgré leur visibilité importante, n’ont pas fait d’efforts sérieux pour lancer une riposte coordonnée.
La direction du Parti Démocrate a joué un rôle épouvantable dans la protection du droit à l’avortement. La présidente de la Chambre des représentants des États-Unis, la démocrate Nancy Pelosi, a ainsi déclaré que les démocrates n’ont pas à “suivre la ligne du parti” sur l’avortement. Certains démocrates ont clairement pris ce laissez-passer à cœur. Le gouverneur du parti démocrate de Louisiane, John Bel Edwards, est par exemple prêt à signer d’un jour à l’autre un projet de loi sur les « battements de cœur du fœtus ». Cela illustre l’absolue nécessité de disposer d’un nouveau parti qui se battra sans pitié et avec constance pour la défense des droits des femmes.
En l’absence d’une direction combative offerte par les organisations féministes traditionnelles ou l’establishment du Parti Démocrate, de nouvelles forces devront se présenter pour aider à organiser la riposte. Cela pourrait conduire à la création de nouvelles organisations de défense des femmes.
Il convient également de tirer les leçons des victoires historiques remportées ces dernières années au niveau international en matière de droit à l’avortement – en particulier l’abrogation du 8e amendement de la constitution irlandaise qui interdisait l’avortement – qui étaient tout aussi horribles que la loi proposée en Alabama.
Les femmes ont non seulement été au centre de la lutte contre Trump, mais elles ont aussi joué un rôle crucial dans une grande partie des récentes grèves des enseignants, des infirmières et des employés d’hôtel.
Les syndicats devraient rejoindre la lutte pour un avortement gratuit, légal et sûr sur demande dans le cadre d’une lutte plus large visant à obtenir la gratuité des soins de santé. Bernie Sanders a déclaré que sa proposition d’assurance-maladie pour tous inclurait des soins gynécologiques complets et gratuits, ce qui constituerait un grand pas en avant. Les syndicats peuvent utiliser leur poids social considérable pour lutter aux côtés des organisations féministes en faveur de cette revendication, ainsi qu’en faveur de la gratuité et de l’universalité des services de garde d’enfants et des congés parentaux payés pour offrir aux familles de travailleurs un véritable choix.
Le fait d’être forcées de mener à terme une grossesse non désirée peut avoir des conséquences dévastatrices pour les femmes pauvres et les travailleuses. Le rôle de la classe ouvrière organisée est essentiel dans cette lutte.
Il ne fait aucun doute qu’un nouveau mouvement pour les droits des femmes est en train d’émerger et que les attaques récentes pourraient inspirer l’organisation de ce mouvement et permettre de développer une nouvelle direction combative.
Bien que ces nouvelles lois seront presque certainement abrogées, des menaces importantes contre Roe v. Wade se profilent à l’horizon et nous devons rapidement mettre sur pied les forces nécessaires pour vaincre ces attaques quand elles surviendront.
‘Socialist Alternative’ se bat pour construire l’aile féministe socialiste du mouvement pour l’émancipation des femmes qui s’oriente vers les femmes de la classe ouvrière et souligne le lien qui existe entre la lutte pour la libération des femmes et la fin du capitalisme.
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Première grève chez Ahold Delhaize aux USA depuis 1988

Le 13 avril, 31.000 employés de la chaine de supermarchés Stop & Shop sont rentrés en grève en Nouvelle-Angleterre, aux Etats-Unis. Cette chaîne appartient à Ahold Delhaize depuis 1995. Après le secteur de la restauration rapide et les enseignants, c’est maintenant la grande distribution qui entre en lutte. Le rapport ci-dessous a été écrit par Elan Axelbank, de Socialist Alternative, notre organisation-sœur américaine.
Tous les travailleurs doivent se battre pour conserver les avantages sociaux que nous avons gagnés. Nous sommes toujours sur la défensive mais, maintenant, les travailleurs commencent à riposter dans tout le pays. Les enseignants, les travailleurs de la restauration rapide et bien d’autres ramènent la grève au goût du jour pour défendre leurs salaires et leurs avantages sociaux, mais aussi pour gagner davantage de droits. Ce 13 avril, les 31.000 employés de supermarchés de Stop and Shop en Nouvelle-Angleterre leur ont emboîté le pas, en faisant grève pour la première fois depuis 1988.
Stop and Shop est la propriété d’une grande multinationale appelée Ahold Delhaize. Aux États-Unis, elle est la 11e plus grande société de vente au détail et la troisième plus grande épicerie. Elle détient plusieurs des principaux magasins d’alimentation de la côte Est, dont Hannaford et Food Lion. L’an dernier, Ahold Delhaize a réalisé plus de 2 milliards de dollars de profits.
Les travailleurs sont entrés en grève pour réagir face à un certain nombre d’attaques lancées par l’entreprise dans le cadre des négociations collectives. Stop and Shop tente d’augmenter les coûts de la couverture de soins de santé jusqu’à 500 % (les Etats-Unis ne possèdent pas de système de santé universel, l’assurance médicale est régulièrement comprise dans les avantages liés aux contrats de travail). Pour certains travailleurs, cette augmentation peut représenter de passer d’un coût de 13 $ par semaine à 100 $. L’entreprise veut également s’en prendre aux primes pour les dimanches et les jours fériés, dégrader le système de retraite, réduire le nombre de congés payés et instaurer un plafond salarial pour tous les employés. Pendant ce temps, les cadres supérieurs gagnent de plus en plus d’argent chaque année.
Des piquets de grève solides et un soutien de la communauté
Les travailleurs et travailleuses doivent partout soutenir cette grève. Si Stop and Shop est capable de vaincre les grévistes, cela donnera confiance à d’autres grandes entreprises pour procéder de la sorte et lancer une offensive similaire contre les droits des travailleurs. Mais si les travailleurs organisent bien leurs piquets de grève et que le mouvement syndical dans son ensemble se mobilise pour soutenir activement ces travailleurs en lutte, il sera possible de repousser les attaques patronales. Les autres syndicats devraient prendre exemple sur le syndicat des Teamsters (les conducteurs), qui s’est engagé à ne pas franchir le piquet. Concrètement, cela signifie de refuser d’alimenter les services destinés à garder un magasin ouvert (livraisons, réparations,…) tout en appelant ses membres à ne pas se rendre dans ces magasins en tant que clients, à l’instar de l’Association des infirmières du Massachusetts.
Les membres de Socialist Alternative seront présents tous les jours aux piquets de grève afin de les soutenir. Les grévistes doivent tenter d’empêcher les clients de pénétrer dans les magasins en engageant avec eux la conversation sur les enjeux de cette lutte. Les piquets de grève seront plus efficaces s’ils sont faits le plus près possible de l’entrée du magasin. Si les TUAC (United Food and Commercial Workers International Union, Travailleurs Unis de l’Alimentation et du Commerce) organisaient des rassemblements à l’extérieur des magasins, en encourageant les clients et la population à être solidaires, cela donnerait un sérieux coup de fouet à la grève. D’autres syndicats pourraient rejoindre ces rassemblements en force. Les travailleurs sont plus forts quand ils sont solidaires !
Lors des discussions que nous avons eues aux piquets de grève, de nombreux travailleurs ont exprimé leur mécontentement face au temps qu’il a fallu aux dirigeants syndicaux pour déclencher la grève. Cette grève pourrait servir de point de départ pour assurer que les TUAC deviennent un syndicat plus démocratique reposant sur l’implication de la base syndicale. Cela placerait le syndicat en bien meilleure position pour faire face à de futures attaques et obtenir de nouveaux acquis.
Cela aiderait grandement ce processus que des représentants syndicaux se rendent plus fréquemment aux divers magasins pour informer et impliquer les affiliés. Il faudrait également des réunions syndicales plus fréquentes. Tous les représentants syndicaux élus devraient recevoir le salaire moyen des travailleurs qu’ils représentent pour s’assurer qu’ils sont liés aux seuls intérêts des membres du syndicat. Gagner ce genre de changement exigera d’exercer une pression maximale en organisant les affiliés à la base.
Des enseignants aux travailleurs des supermarchés, le mouvement des travailleurs connait actuellement une renaissance aux Etats-Unis. Si les travailleurs de Stop and Shop remportent la victoire avec cette grève, ce serait une puissante démonstration de la capacité des travailleurs à faire face aux attaques des patrons, à riposter et à gagner. Mais la victoire n’est pas garantie. Les grévistes et leurs soutiens doivent maintenir les piquets de grève et assurer qu’ils soient bien fournis dans le but de maximiser le manque à gagner de l’entreprise. Quant aux dirigeants syndicaux, ils doivent taper du poing sur la table des négociations.
- AUCUNE réduction de salaire, AUCUNE réduction des vacances ;
- MAINTIEN du système de retraite, MAINTIEN des soins de santé abordables ;
- MAINTIEN du salaire à 150% les dimanches et jours fériés ;
- Travailleurs et clients : ne franchissez pas le piquet de grève ! Fermer les magasins ;
- TUAC : Mobilisons des RASSEMBLEMENTS à l’extérieur des magasins pour démontrer la force du syndicat et le soutien de la communauté pour la grève ;
- A partir de cette grève, construisons un syndicat plus démocratique et plus combatif avec participation pleine et entière des militants pour se défendre contre d’autres attaques et passer à l’offensive.
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USA. Réaliser le ‘‘Green New Deal’’ exige de défier le capitalisme

‘‘La seule chose dont nous avons besoin plus que d’espoir, c’est d’action. Une fois que nous commençons à agir, l’espoir est partout. Donc, au lieu de chercher l’espoir, cherchez l’action. Alors, et seulement alors, l’espoir viendra.’’ – Greta Thunberg, activiste suédoise de 16 ans qui a aidé à lancer la récente vague de mobilisations dans le monde entier contre l’inaction face au changement climatique.
Par Elan Axelbank, Socialist Alternative (USA)
Espérer sans agir concernant le changement climatique n’a pas plus de sens que les ‘‘pensées et prières’’ qui accompagnent chaque tuerie de masse aux Etats-Unis. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a publié un rapport spécial en octobre 2018 avertissant que d’ici 2050, sans une importante correction de cap, plus de 350 millions de personnes de plus dans le monde seront exposées à des niveaux mortels de stress thermique. Aux États-Unis, les feux de forêt dans l’Ouest du pays ravageront au moins le double des surfaces forestières des années précédant 2019 et les dommages aux infrastructures publiques et au domaine côtier pourraient atteindre les mille milliards de dollars. En 2014, les États-Unis étaient responsables de 20 % de toutes les émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Pendant des décennies, on était considéré comme radical en défendant simplement que le changement climatique était un fait bien réel. Aujourd’hui, la réalité du changement climatique est largement acceptée, mais face à l’inaction exaspérante de l’establishment politique, ce qui est considéré comme radical, c’est de proposer une solution appropriée à ce problème aux proportions gigantesques.
Cet écart entre l’ampleur des problèmes auxquels nous sommes confrontés et les solutions proposées par les politiciens de l’establishment peut être vu sur tous les fronts : qu’il s’agisse des inégalités économiques obscènes, du racisme et du sexisme systémiques ou de la crise climatique imminente. Cette situation constitue une force motrice centrale derrière la politisation et la radicalisation actuellement à l’œuvre à travers le monde.
Qu’est-ce que le Green New Deal ?
C’est dans ce contexte que le Green New Deal (en référence au New Deal de Roosvelt dans les années ’30, NdT) proposé par la députée Alexandria Ocasio-Cortez (qui se décrit comme étant une socialiste démocratique) recueille un soutien massif dans tout le pays. C’est autour de ce projet que se déroule le débat sur le type d’actions nécessaires pour combattre le changement climatique.
Le Green New Deal proposé par Ocasio-Cortez est une résolution et non un projet de loi, ce qui signifie qu’il n’est pas contraignant. Une fois adopté, il fixerait des priorités que le Congrès serait censé atteindre en adoptant par la suite des lois et des mesures politiques concrètes.
Le Green New Deal défend que l’alimentation électrique des Etats-Unis soit à 100 % composée d’énergie propres, renouvelables et à émissions de gaz à effet de serre nulles. La plupart des médias ont rapporté que le Green New Deal appelle à une énergie 100% renouvelable d’ici 2030. Mais la résolution elle-même ne précise pas d’année. Elle préconise une refonte totale des transports aux États-Unis afin de les rendre plus respectueux du climat de même que la modernisation de “tous les bâtiments existants aux États-Unis et la construction de nouveaux bâtiments” pour atteindre une efficacité énergétique maximale, ainsi que l’échange international de technologies, d’expertise, de produits et de financement pour aider d’autres pays à conclure un Green New Deal.
Cette résolution est présentée comme un vaste programme de lutte contre la pauvreté au langage ferme contre les inégalités économiques et sociales. Elle appelle à la création de millions ‘‘de bons emplois [des ‘‘union jobs’’, c’est-à-dire des emplois dont le cadre de travail a été fixé en accord avec les syndicats] de qualité qui respectent les salaires en vigueur, embauchent des travailleurs locaux, offrent des possibilités de formation et d’avancement et garantissent la parité salariale et sociale pour les travailleurs touchés par la transition’’. La résolution défend également un processus démocratique et participatif qui implique les travailleurs et les communautés opprimées dans la planification, la mise en œuvre et l’administration du Green New Deal au niveau local. Il n’est toutefois pas précisé comment cela pourrait pratiquement se faire.
Au-delà de l’environnement, le Green New Deal demande que tous les Américains aient la garantie d’un emploi avec un salaire suffisant pour subvenir aux besoins de leur famille, avec des congés familiaux et une couverture médicale adéquate, des congés payés et une sécurité de pension. Le texte appelle également à mettre fin à l’”oppression historique” des femmes, des personnes de couleur et des migrants aux États-Unis. Enfin, la résolution conclut en demandant au gouvernement fédéral de garantir à tous des soins de santé de haute qualité, des logements abordables et une sécurité économique globale.
Les Etats-Unis représentent le pays le plus riche de l’histoire du monde, mais aucun de ces besoins fondamentaux n’est garanti pour une personne ordinaire. Répondre aux besoins fondamentaux de chacun et passer à une énergie renouvelable à 100 % coûterait bien trop cher, entend-on souvent dire. Pendant ce temps, les trois hommes les plus riches des Etats-Unis accumulent autant de richesses que la moitié la plus pauvre de la population du pays ! 100 entreprises dans le monde sont responsables de plus de 70 % des émissions de gaz à effet de serre depuis 1988. La vérité, c’est que notre civilisation et la planète sont sacrifiées pour qu’une poignée de personnes puissent continuer à gagner des sommes énormes. Le Green New Deal cherche à renverser la vapeur.
Que faudra-t-il pour gagner ?
Le rapport 2018 du GIEC estime qu’il faut 900 milliards de dollars par an pour mettre en œuvre le programme qu’il juge nécessaire. Le Green New Deal s’inspire de ces propositions. M. Ocasio-Cortez propose que ce montant soit payé en partie au moyen d’un taux marginal d’imposition de 70 % sur tous les revenus supérieurs à 10 millions de dollars. Ce serait un bon début, mais qui ne serait pas suffisant pour financer l’ensemble du programme.
Un financement supplémentaire pourrait provenir des impôts des grandes sociétés de combustibles fossiles, des grandes banques et des institutions financières. Toutefois, ces sociétés ne sautent pas de joie à l’idée d’être imposées pour lutter contre les changements climatiques. Elles sont prêtes à s’opposer par tous les moyens au Green New Deal. Cette opposition deviendra de plus en plus aigüe et visible au fur et à mesure que le mouvement qui l’appuie se développera.
Jusqu’à présent, l’opposition s’est principalement manifestée sous la forme d’affirmations selon lesquelles le Green New Deal est un fantasme irréaliste. C’est “juste un tas d’idées qui ne fonctionnent même pas en théorie et encore moins dans le monde réel”, comme l’a déclaré le businessman Lourenco Goncalves (qui possède une fortune de 60 millions de dollars essentiellement issue des mines). Ce type de jugement à l’emporte-pièce constitue souvent la première ligne de défense de l’élite dirigeante et des politiciens lorsqu’ils sont confrontés à des idées progressistes audacieuses qui menacent leurs intérêts. Lors des élections primaires démocrates de 2016, Hillary Clinton a qualifié à maintes reprises de “promesses en l’air (pie in the sky)” bon nombre de propositions de Bernie Sanders, tout particulièrement dès lors qu’il s’agissait du projet de couverture de soins de santé Medicare for All.
Mais aujourd’hui, trois ans après que Sanders ait commencé à populariser le projet Medicare for All, une majorité d’Américains le soutiennent, dont une majorité de républicains. Des démocrates de longue date proches des grandes entreprises tels que Corey Booker ou Kamala Harris se sentent maintenant obligés de soutenir de telles politiques du bout des lèvres pour être acceptés par la plupart des électeurs démocrates. Ce pourrait également être le cas avec le Green New Deal.
Soyons toutefois prudents. Il y a une différence énorme entre offrir un soutien verbal au Green New Deal pendant une campagne politique et soutenir les mesures concrètes requises pour le concrétiser, sans encore parler de la construction du mouvement social qui sera nécessaire. Les déclarations publiques sont une chose, mais dans les coulisses, les lobbyistes et les puissants intérêts des entreprises exercent des pressions et donnent même des directives sur ce que les politiciens qu’ils financent peuvent et ne peuvent pas faire.
Unir tous ceux qui veulent stopper la catastrophe imminente, cela exige un ensemble de revendications claires et audacieuses. Cela exige également une compréhension claire de la manière d’obtenir un tel changement progressiste majeur. La seule force capable de contrer l’opposition des grandes entreprises, c’est un mouvement de masse centré autour du pouvoir social et économique de la classe des travailleurs.
Récemment, la direction du Comité Energie de la fédération syndicale AFL-CIO a envoyé une lettre ouverte aux auteurs du Green New Deal. Dans celle-ci, le syndicat convient de la nécessité de s’attaquer au changement climatique et d’investir dans les technologies renouvelables, en prenant note de l’appel du Green New Deal en faveur de l’inclusion des travailleurs et des syndicats dans ce processus. Le syndicat fait toutefois valoir que la résolution proposée “est beaucoup trop limitée en termes de solutions spécifiques concernant les emplois de nos membres et les secteurs critiques de notre économie (…) et fait des promesses qui ne sont ni réalisables ni réalistes”. Il ajoute : “Nous ne resterons pas les bras croisés et ne laisserons pas sans réponse les menaces qui pèsent sur les emplois de nos membres et sur le niveau de vie de leurs familles”.
Il y a là un élément à remettre en question. La véritable menace pour les affiliés du syndicat et tous les travailleurs, ce n’est pas le Green New Deal. Ce sont les patrons des usines, des secteurs de la construction et de l’énergie, ainsi que l’establishment capitaliste des partis républicain et démocrate. Ce sont eux qui entretiennent la situation de bas salaires généralisés, de baisse des allocations sociales et de hausse du coût de la vie. Sans parler des effets désastreux des changements climatiques à venir.
En fait, la résolution demande “des emplois avec droits syndicaux de haute qualité […], des possibilités de formation et d’avancement, et garantit la parité salariale et sociale pour les travailleurs touchés par la transition”. Cela pourrait être plus clair et plus spécifique, mais il est totalement faux de qualifier cela d’atteinte à l’emploi et au niveau de vie des familles de travailleurs. Il est vrai que le mouvement écologiste a souvent adopté une approche méprisant les préoccupations légitimes des travailleurs concernant leur emploi et leur niveau de vie. Ocasio-Cortez devrait accepter leur offre de poursuivre le dialogue et mettre publiquement au défi ces dirigeants syndicaux de s’asseoir à la table pour discuter d’une proposition commune que tous les travailleurs et les écologistes pourraient soutenir.
Il existe à l’échelle nationale des syndicats favorables à une action énergique contre le changement climatique, comme Amalgamated Transit Union, Communication Workers of America et National Nurses United. De nombreuses sections locales d’autres syndicats partagent leur approche, y compris dans les métiers du bâtiment. Ces syndicats devraient activement mobiliser leur soutien en faveur d’un Green New Deal pour les travailleurs et construire une alternative aux directions syndicales conservatrices qui dominent actuellement la plupart des syndicats. Ce sont les patrons du secteur des combustibles fossiles qui doivent être laissés dans la poussière, pas les travailleurs qui ont un rôle stratégique à jouer dans la lutte pour cette transition industrielle.
Pour assurer l’instauration d’un Green New Deal pour les travailleurs, le mouvement – y compris les travailleurs – ne doit pas considérer comme alliés les directions capitalistes des Démocrates ou des Républicains. Il doit au contraire mobiliser sa pleine puissance avec des manifestations de masse, des actions syndicales et des grèves.
Le Green New Deal pour les travailleurs exige la propriété publique
La raison pour laquelle nous connaissons la situation actuelle, c’est que nous vivons dans une société où les décisions politiques et économiques sont dictées par le profit des entreprises privées. Agir sérieusement nécessite de s’attaquer directement aux intérêts d’une grande partie des entreprises américaines. C’est pourquoi l’establishment politique s’oppose à toute proposition visant à passer rapidement à une énergie 100% renouvelable.
Même en restant dans le cadre du capitalisme, un mouvement de masse suffisamment fort pourrait concrétiser certains aspects du Green New Deal. Mais pour parvenir à une transition complète vers une économie reposant sur les énergies renouvelables d’ici 2030, il faudra prendre des mesures sans précédent contre la propriété privée des secteurs clés de l’économie. Malheureusement, ni Ocasio-Cortez ni Bernie Sanders n’acceptent de sortir du cadre du capitalisme pour atteindre ces objectifs. C’est la faiblesse fondamentale de leur approche.
Tant que les principales compagnies énergétiques appartiendront au secteur privé et seront gérées sur base de la recherche de profit et du principe de concurrence, elles lutteront contre le Green New Deal. Le financement, la planification et la coopération crucialement nécessaires pour ce projet ne pourra tout simplement pas être obtenus. Nous devons assurer que les entreprises énergétiques appartiennent au secteur public, sous contrôle démocratique des travailleurs, pour mettre en œuvre un plan d’une telle envergure, surtout dans un si court laps de temps.
La transition devra s’accompagner d’une refonte complète de l’infrastructure, ce qui nécessitera que des secteurs clés de l’industrie manufacturière et de la construction deviennent également propriété publique. Sur base d’une planification démocratique, les transports publics pourraient être massivement développés. De nouvelles voies ferrées et de nouveaux trains à grande vitesse pourraient être construits, et l’industrie automobile pourrait enfin se séparer des grandes entreprises pétrolières et passer rapidement à la production de véhicules écologiques. L’infrastructure routière devrait s’adapter à ce changement.
Comme nous l’avons mentionné précédemment, un plan de cette envergure coûterait environ 900 milliards de dollars par an, un chiffre énorme. Mais les ressources existent déjà pour cela. Collectivement, les quinze plus grandes banques des États-Unis détiennent à elles seules 13,5 mille milliards de dollars. Elles ne renonceront jamais volontairement à cet argent pour le bien commun. L’expropriation des grandes banques et des grandes institutions financières fait également partie de la transition.
Étant donné que la classe des milliardaires s’opposera farouchement à ce que ces industries clés lui soient retirées, cela ne se produira qu’à la suite d’un mouvement de masse des travailleurs, uni dans une lutte consciente pour y parvenir. Dans ce combat, il est vital de construire un nouveau parti de la classe des travailleurs avec un programme clairement socialiste.
Nous sommes tout à fait d’accord avec les objectifs du Green New Deal visant à mettre fin à la pauvreté et à l’oppression. Mais cela ne peut être atteint en restant dans le cadre de ce système. Cela exige un changement révolutionnaire. La collectivisation des principaux leviers de l’économie pour instaurer une économie démocratiquement planifiée, reposant sur les besoins humains, jetterait les bases du développement d’une société socialiste égalitaire, dans laquelle l’exploitation et toutes les formes d’oppression pourraient être éradiquées.
Avec l’escalade de la crise climatique internationale, la nécessité pour l’humanité de passer du capitalisme au socialisme n’a jamais été posée aussi clairement. Rejoignez Socialist Alternative pour nous aider à lutter pour un Green New Deal pour ls travailleurs et en faveur du socialisme !
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‘‘Green Book’’ un rappel opportun du racisme aux États-Unis

On parle du film de Peter Farrelly comme d’un road trip, mais c’est beaucoup plus que ça. Même s’il aurait été possible d’en faire encore plus… Le film repose sur une histoire vraie, celle de Tony ‘‘Lip’’ Vallelonga (interprété par Viggo Mortensen), engagé comme chauffeur par le pianiste afro-américain Don Shirley (Mahershala Ali) pour le conduire en tournée dans le Sud des États-Unis au début des années 1960. Un blanc employé par un noir dans le Sud profond américain : qu’est-ce qui pourrait mal tourner ?
Par Clare Wilkins, Socialist Party, Angleterre et Pays de Galles
Le titre du film fait référence au ‘‘Negro Travellers Green Book’’, un guide annuel publié entre 1936 et 1966 qui indiquait les lieux où la population noire était acceptée à l’époque des lois ‘‘Jim Crow’’ et de la ségrégation raciale dans le sud des États-Unis. La maison de disque de Shirley en a offert un exemplaire à Tony.
Don Shirley était un pianiste et compositeur de jazz. Sa mère, née en Jamaïque, lui a appris à jouer de l’épinette à l’âge de deux ans, ils avaient l’habitude de jouer ensemble à New York. Il fut le premier étudiant noir au Conservatoire de musique de Leningrad. Ses performances ont été saluées par les Américains blancs libéraux, y compris John et Robert Kennedy.
Don a décidé de faire une tournée dans le Sud, sans bien savoir comment s’exprimait la ségrégation pour les travailleurs noirs. Le film traite d’un certain nombre d’incidents autour du racisme et des lois Jim Crow, qui sont poignants, mais ne dominent pas le film. Leur voyage a dû en connaitre bien plus. Viggo Mortensen a précisé que l’objectif était du film était de souligner l’histoire du racisme en Amérique, mais que l’objectif était aussi de produire un film grand public.
Durant la tournée, Don n’a pas pu dormir dans certains hôtels ou se rendre dans certains restaurants. Tony est un chauffeur et tous les autres chauffeurs qu’il rencontre sont des noirs employés par la bourgeoisie blanche. Le film souligne les intérêts communs qu’il partage avec ces chauffeurs. Malgré le fait que Tony ait lui-même des stéréotypes racistes, le film souligne de manière juste qu’il est en fait plus proche de la population précaire noire de son quartier. Malheureusement, le film semble mettre l’accent sur le fait que c’est en connaissant quelqu’un, en développant une amitié, qu’on peut mettre fin aux préjugés.
Le film est un rappel opportun du racisme qui prévalait aux États-Unis avant les réalisations obtenues par le mouvement des droits civiques, il illustre tout le chemin parcouru grâce à cette lutte. Il en reste encore à parcourir. À l’époque du Trumpisme, certains ont dit que le Green Book devrait être relancé. Mais ce qu’il faut, ce n’est pas un guide pour vivre en toute sécurité en tant que noir dans une Amérique raciste, mais une lutte de classe visant à mettre un terme au racisme et au système capitaliste qui le perpétue.
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Critique de film : VICE

Dick Cheney : Faucon de guerre, politicien d’entreprise… Les profits avant les gens depuis 1969
Par Genevieve Morse, Socialist Alternative (USA)
VICE tente de montrer les véritables rouages internes de la Maison-Blanche sous l’administration de George W. Bush. Cette administration était l’une des plus secrètes, des plus trompeuses et des plus manipulatrices que les États-Unis aient jamais vues. Bien qu’il se concentre sur l’ancien vice-président Dick Cheney, le film parle de bien plus que d’un seul homme. Il est question de la brutalité d’une partie de l’élite politique américaine dans la sauvegarde et la lutte pour les profits sans fin des grandes entreprises au détriment de la vie des gens partout dans le monde. Contrairement à ce que peuvent en dire les critiques mitigées de ce film, tous ceux qui sont en colère contre l’état du monde aujourd’hui et le pouvoir que détient le président Trump devraient le regarder !
Au fur et à mesure que le film avance, le schéma devient très clair, surtout à la fin. On commence à se rendre compte que les escroqueries massives perpétrées par Cheney et d’autres à Washington pour déclencher les guerres en Irak et en Afghanistan, la prison de Guantanamo Bay, le Patriot Act – tout cela a contribué à ouvrir la voie à une nouvelle ère de la politique américaine qui nous amène à notre époque.
Aujourd’hui, Trump remplit son cabinet de milliardaires et déchire les réglementations environnementales et autres qui contrôlent les profits tout en prétendant défendre la classe ouvrière. Cheney a pratiquement écrit le livre sur la façon d’utiliser le gouvernement comme un instrument pour les sections les plus rapaces et les plus parasites de la classe dirigeante – compagnies pétrolières, entrepreneurs militaires et banques – sans aucun contrôle démocratique en préconisant une concentration toujours plus grande du pouvoir dans l’organe exécutif.
Cheney faisait partie d’un mouvement du Parti républicain dans les années 70 et 80 qui cherchait à réaffirmer la puissance militaire et économique des États-Unis à travers le monde à la suite du mouvement contre la guerre du Vietnam. La différence entre Cheney et les hommes politiques qui l’ont précédé était son allégeance aux sections les plus brutales et à courte vue du capital : les sociétés de combustibles fossiles, le complexe militaro-industriel et les grandes banques qui les soutenaient. Arnaquer les personnes qu’il prétendait protéger – des travailleurs américains ordinaires – n’était qu’une partie de l’accord. Sa montée au pouvoir est due à sa loyauté totale envers les grandes compagnies pétrolières et les entreprises de défense, qui souhaitaient s’assurer des profits toujours plus importants. Il l’a fait sans se soucier le moins du monde des conséquences, et des personnes qui en souffriraient.
Dans le film, les membres de l’administration Bush rappellent l’arrogance et le manque total d’empathie qui existe parmi l’élite capitaliste. Donald Rumsfeld, Paul Wolfowitz, Scooter Libby et Anthony Scalia, pour n’en nommer que quelques-uns, vont justifier et rationaliser leurs actions criminelles du moment que c’est “pour le bien de l’Amérique”. Selon Cheney, il ne s’agissait pas de savoir ce qui serait bon pour les travailleurs ou les pauvres, mais ce qui ferait le plus de profits pour les entreprises et les PDG américains. Cheney et sa cohorte n’ont jamais eu la moindre autre préoccupation.
Sous la présidence de Bush II, les néo-conservateurs étaient déterminés à restructurer le Moyen-Orient pour maintenir le contrôle des réserves pétrolières et réaffirmer la puissance américaine sur la scène mondiale. Lors d’une réunion du Cabinet, c’est Cheney, et non Bush, qui a ordonné à Colin Powell de mentir aux Nations Unies sur le fait que l’Irak avait un vaste réseau terroriste lié aux attaques du 11 septembre et un arsenal d’armes de destruction massive. Par contre, le film dépeint Powell comme s’il était opposé à la guerre. Mais il était contre le rythme effréné de l’invasion et non contre l’invasion elle-même, en craignant la réaction du public. L’administration Bush a clairement menti à la population américaine et au monde entier. Leurs décisions ont été prises sans la participation ou la connaissance même du peuple, sans aucune surveillance et en ne tenant aucun compte de l’impact des décisions sur les gens ordinaires. Mais c’est à cela que ressemble la concentration du pouvoir. C’est ainsi que Cheney a fonctionné et cherché à acquérir de plus en plus de pouvoir.
9/11 : Tragédie ou opportunité ?
Les attaques du 11 septembre 2001 ont envoyé des ondes de choc à travers les États-Unis. Dans le film, Cheney a été dépeint comme calme et serein alors que les tours s’effondraient. Le film explique qu’il a immédiatement vu l’opportunité d’une vie, là où tout le monde a vu une crise.
Alors que le processus de concentration du pouvoir au sein du pouvoir exécutif se poursuit depuis des décennies, Cheney et Bush ont saisi l’occasion que le 11 septembre a présentée pour adopter le Patriot Act, qui consistait à réduire considérablement les libertés civiles et déclencher une guerre du pétrole, le tout appuyé par les votes démocrates. Autrement, il leur aurait fallu des années pour défaire les règlements et les libertés civiles que les travailleurs et les travailleuses avaient gagnés par la lutte.
Selon MSN Money, la division KBR, Inc. de Halliburton a escroqué des agences gouvernementales à hauteur de 17,2 milliards de dollars en revenus liés à la guerre en Irak pour la seule période 2003-2006. Cet argent a servi à financer la construction et l’entretien de bases militaires, la réparation de champs de pétrole et divers projets de reconstruction d’infrastructures dans un pays ravagé par la guerre. Ce conflit d’intérêts était un élément régulier qui est apparu plusieurs fois dans le film. Interrogés par deux généraux au sujet de l’absence de contrats, Cheney et Rumsfeld ont tous deux répondu qu’ils n’étaient tout simplement pas inquiets. Pourquoi le seraient-ils ? Ce type de libre circulation des profits et l’absence d’intervention gouvernementale étaient exactement leur vision.Des milliers d’hommes et de femmes de la classe ouvrière qui sont allés à la guerre croyant protéger leur famille contre le mal du terrorisme. Au lieu de cela, ils ont été envoyés à la mort pour payer un autre yacht, une troisième maison ou quelques voitures neuves pour les dirigeants du secteur pétrolier. Des centaines de milliers d’Irakiens, hommes, femmes et enfants, sont morts. D’innombrables autres personnes ont été déplacées et des vies ont été ruinées. Le cycle n’a fait que se poursuivre et s’aggraver, car cela a conduit à la persistance de la violence sectaire et à la montée d’ISIS.
Les mensonges et les faux liens avec le terrorisme qui ont mené à la guerre en Irak se concrétisent maintenant, et c’est grâce à la politique étrangère des États-Unis. Comme je n’avais que 16 ans lorsque le 11 septembre s’est produit, j’avais oublié ou je n’avais jamais réalisé certains des détails et des problèmes soulevés par le film. Surtout pour les jeunes, VICE vaut la peine d’être vu car il donne un aperçu de la façon dont nous nous sommes retrouvés dans le pétrin politique dans lequel nous nous trouvons aujourd’hui.
Où diable était le Parti démocrate ?
Ce qui n’a été que très peu abordé, c’est le rôle que le parti démocrate a joué dans l’arène politique pendant cette période. À un moment donné, lorsque le film a projeté une vidéo d’Obama, une personne dans le cinéma a applaudi alors qu’il régnait un mépris silencieux. La plupart des démocrates du Congrès, y compris Hilary Clinton (représentée dans le film), ont accepté de financer la guerre et les attaques contre les libertés civiles. En fin de compte, l’establishment démocrate sert également les intérêts des entreprises américaines, y compris leurs guerres sans fin.
Le Parti démocrate, bien qu’il ait parfois essayé de se présenter comme un parti anti-guerre, n’a servi qu’à démobiliser, discréditer et démanteler les mouvements anti-guerre. Alors que le président Obama terminait la guerre en Irak (avant d’en commencer une autre), à la fin de son gouvernement, “les États-Unis larguaient en moyenne 72 bombes par jour, soit l’équivalent de trois par heure”. Pendant les années Bush, le Parti démocrate s’est engagé à continuer à financer les efforts de guerre tout en n’offrant aucun moyen d’en sortir. Guantanamo Bay -la chambre de torture des États-Unis- est restée ouverte sous Obama même avec sa promesse de la fermer.
Il s’en est sorti indemne
VICE nous rappelle l’impact sauvage que Cheney et toute l’administration Bush ont eu sur notre système politique, sur les droits civils et sur le monde. De par sa nature, le capitalisme donne des médailles et de larges sommes d’argent aux politiciens comme lui.
L’inconvénient réel de VICE, c’est qu’il donne l’impression que la justice sociale ne l’emportera jamais, que les vieux blancs malfaisants vont toujours diriger le monde et que nous ne pouvons pas y faire grand-chose. Un élément d’espoir qui aurait pu être mentionné dans le film fut la chute du pouvoir de Cheney et Rumsfeld due à la mission en Irak qui ne se déroulait pas comme prévu et à la pression massive exercée par le mouvement anti-guerre.
Cheney a récemment déclaré que Trump “avait l’air d’un libéral” (Cheney veut dire par là que Trump à l’air d’un « démocrate », ndT) après avoir critiqué l’invasion de l’Irak pendant sa campagne. Cheney est aujourd’hui un homme ‘bionique’ (en référence à sa transplantation du coeur, cela réfère aussi au fait qu’il n’est plus dans la ‘course’, ndT); mais ses idées et leurs conséquences peuvent et doivent être arrêtées.
En 2019, beaucoup plus de gens voient la nécessité de lutter non seulement contre Trump, mais aussi contre tous ceux qui lui ressemblent, ceux de sa classe, la classe capitaliste. Les travailleurs en ont assez de ceux qui, au pouvoir, font passer le profit avant le peuple. Si vous voulez savoir à quoi ressemble une véritable arme de destruction massive, allez voir VICE. Si vous voulez en savoir plus sur la façon de riposter, passez à l’étape suivante et rejoignez-nous !
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USA. Utiliser la campagne ‘‘Bernie 2020’’ pour lancer une riposte de masse des travailleurs

Bernie Sanders a officiellement lancé sa course à la présidence des États-Unis pour 2020, jurant d’organiser ‘‘une campagne populaire historique et sans précédent qui débutera avec au moins un million de personnes de tout le pays’’. 24 heures après l’annonce de sa candidature, il avait déjà recueilli 5,9 millions de dollars en dons et comptait plus de donateurs individuels que tous les autres candidats actuels à la présidence réunis !Par Kshama Sawant, Socialist Alternative
La nouvelle campagne de Bernie Sanders commencé à un point beaucoup plus élevé que lorsque le sénateur du Vermont avait appelé pour la première fois à une ‘‘révolution politique contre la classe des milliardaires’’ au printemps 2015. Il avait alors massivement été ignoré par les grands médias. Même s’il est encore tôt dans la campagne, Sanders est bien placé pour définir politiquement la nature des prochaines primaires démocrates.
L’annonce vidéo de Sanders commençait par la déclaration : ‘‘Le vrai changement n’a jamais lieu du haut vers le bas, mais toujours du bas vers le haut.’’ Je suis tout à fait d’accord avec cela. C’est pourquoi Socialist Alternative et moi-même allons travailler avec d’autres pour lancer des campagnes de base dans les communautés locales, les syndicats, les écoles et les lieux de travail à travers les États-Unis afin de construire une lutte de masse de la classe des travailleurs autour de la campagne de Sanders.
Les enjeux de ces élections sont considérables. Il est urgent de chasser Trump, et les socialistes et la gauche doivent profiter pleinement du potentiel actuel pour s’organiser aux côtés des millions de personnes qui se battent déjà et qui seront maintenant mobilisées autour de Bernie.
Mais nous devons aussi tirer les leçons de 2016. Les primaires démocrates avaient été truquées contre Bernie. Le Comité national démocrate (DNC) s’était mobilisé contre lui, les manœuvres furent légion dans une série de caucus et de primaires, le système antidémocratique des super-délégués avait été utilisé contre lui tandis que les grands médias et les figures démocrates ‘‘progressistes’’ n’avaient pas économisé leurs attaques cinglantes. Les travailleurs ont besoin de leur propre parti, un parti indépendant du monde de l’argent et des entreprises, un parti qui lutte aux côtés des mouvements sociaux plutôt que contre eux.
Je pense que Bernie devrait se présenter aux élections en tant que socialiste indépendant – tout comme je l’ai fait moi-même à Seattle – et utiliser sa campagne pour lancer un nouveau parti de masse pour les travailleurs, au lieu de se présenter dans un parti capitaliste dont la direction est déterminée à l’arrêter à n’importe quel prix. Bernie a malheureusement pris sa décision et se présente aux primaires démocrates. Mais il n’est pas acceptable que notre mouvement politique soit emprisonné dans ce processus. Les élections de 2016 ont eu de terribles conséquences politiques. Avant de lancer sa première campagne il y a quatre ans, Sanders a dit qu’il envisageait de se présenter en tant qu’indépendant ou démocrate et qu’il voulait savoir ce que les gens pensaient. Cette fois-ci, il a court-circuité cette discussion et il commet une erreur fondamentale, même si de nombreuses personnes sont sans doute d’accord avec lui sur une base pragmatique ou dans l’espoir que le Parti démocrate puisse être transformé d’une manière ou d’une autre en un parti du peuple.
Il est certain que Bernie disposera d’une énorme plate-forme dans les primaires démocrates, mais déclarer maintenant qu’il se présente comme indépendant et utiliser sa campagne pour poser les bases d’un nouveau parti créerait un séisme massif dans la politique américaine.
Dans un article du New York Times intitulé ‘‘L’Amérique devient-elle un État à quatre partis ?’’, Thomas Friedman attaque Alexandria Ocasio-Cortez, qui se décrit elle-même comme socialiste démocratiques, mais il souligne à juste titre que ‘‘les partis politiques du monde démocratique explosent’’ et que les bases existent pour fonder un véritable parti de gauche aussi bien qu’un parti d’extrême droite.
Si l’establishment démocrate réussit une fois de plus à bloquer Bernie, il devrait poursuivre sa campagne en tant que candidat indépendant jusqu’en novembre 2020. L’histoire n’offre pas un nombre illimité d’occasions de bâtir le genre de force politique dont les travailleurs ont besoin, et nous devons tirer les leçons du passé. Si la direction démocrate réussit une fois de plus à faire élire un autre candidat opposé au changement, nous courons le risque que Trump soit réélu malgré son impopularité et sa mauvaise position dans les sondages à l’heure actuelle. Il est certain qu’un candidat de l’establishment pourrait aussi être en mesure de vaincre Trump, à l’image de ces candidats qui ont remporté les élections de mi-mandat de l’automne dernier qui étaient essentiellement un référendum sur l’administration Trump. Mais la politique capitaliste en faillite des Démocrates Joe Biden ou Kamala Harris n’est pas un atout pour vaincre la droite ou représenter les besoins des travailleurs. C’est tout l’inverse !
Sanders est aujourd’hui l’homme politique le plus populaire du pays, et les revendications de la classe ouvrière au centre de sa campagne de 2016 – Medicare for All, un enseignement supérieur public gratuit et un salaire horaire minimum fédéral de 15 dollars – ont été au centre du discours politique américain. Bien que populaires depuis longtemps, elles jouissent maintenant d’un soutien écrasant dans les sondages grâce à l’appui de Sanders et des forces populaires. De nombreux politiciens du Parti démocrate, y compris des candidats comme Kamala Harris, ont été forcés de se prononcer en leur faveur, même si ce ne sont que des paroles en l’air.
En 2016 et depuis lors, le fait que Sanders se soit défini comme ‘‘socialiste démocratique’’ a joué un grand rôle dans la création d’un débat de masse sur les idées du socialisme, un processus qui existe principalement suite à l’échec du capitalisme et à son incapacité à assurer un niveau de vie décent à la classe ouvrière ou un avenir aux jeunes gens. Comme Sanders l’a souligné dans sa récente réponse au discours sur l’état de l’Union de Trump, aux États-Unis, les travailleurs gagnent moins qu’en 1973, lorsque l’on prend l’inflation en compte, et 80 % des Américains vivent maintenant de chèque de paie en chèque de paie sans pouvoir mettre d’argent de côté.
Aujourd’hui, les sondages montrent qu’une majorité de jeunes considèrent le socialisme d’un bon œil.
Ces derniers mois, Sanders s’est joint à Ocasio-Cortez dans l’appel pour un “Green New Deal”. Cette demande extrêmement populaire a le potentiel de rallier des millions de jeunes et de travailleurs dans le contexte actuel de catastrophe climatique imminente.
Quand la chaîne CBS lui a demandé en quoi sa nouvelle campagne serait différente, Sanders a répondu : ‘‘Nous allons gagner.’’ Mais comme mon organisation, Socialist Alternative, l’a souligné, aucune des revendications des travailleurs – ni Bernie Sanders lui-même – n’est acceptable pour la classe dirigeante. Sanders devra faire face à une lutte acharnée à chaque étape, et toutes sortes de manœuvres et de tactiques vicieuses seront déployées si jugées nécessaires pour empêcher Sanders de remporter les primaires démocrates.
L’appel de Bernie en 2016 pour une ‘‘révolution politique contre la classe des milliardaires’’ a surpris l’establishment démocrate et la classe dirigeante. Ils s’attendaient à ce qu’il soit totalement marginalisé. Mon organisation a été l’une des rares à reconnaître le potentiel de développement de la politique que Sanders représentait. Mais cette fois-ci, si la campagne de Bernie prend de l’ampleur, il devra faire face à une riposte plus immédiate et plus décisive de la part de l’élite.
L’affluence de candidats aux élections primaires démocrates est également une situation différente de celle qui s’est créée en 2016 où Sanders a affronté Clinton.
Beaucoup de travailleurs et de jeunes prendront le temps d’évaluer les différents candidats qui se présentent sur des plateformes progressistes, y compris Elizabeth Warren et Beto O’Rourke. C’est compréhensible, mais soyons clairs : malgré les faiblesses politiques de Sanders – qui sont réelles – aucun des divers candidats qui se présentent comme progressistes ne représente une force plus forte ou plus fiable en faveur de la classe des travailleurs ou n’est prêt à affronter la classe des milliardaires.
Elizabeth Warren, la progressiste la plus constante après Sanders parmi les candidats actuels ou potentiels, a ses propres faiblesses politiques. Warren ne s’oriente pas vers les mouvements de la classe des travailleurs, des mobilisations sans lesquelles les revendications clés de sa plate-forme progressiste ne pourraient être obtenues.
Warren s’est également montré moins disposée à tenir tête à l’establishment démocrate que Sanders. Les partisans de Bernie se souviendront que Warren s’est retirée des primaires de 2016, alors qu’elle était bien placée pour influer sur la lutte pour une politique pro-travailleurs en faisant campagne pour Bernie. Ce n’est que lorsque Sanders a été clairement battu que Warren est intervenue, et uniquement pour soutenir pleinement Hillary Clinton sans la moindre critique. Cela a contribué à conduire à la situation où le candidat confronté à Trump était un candidat démocrate impopulaire et clairement identifié aux grandes entreprises.
Comme les travailleurs l’ont vu à Seattle, où je siège au conseil municipal, peu d’élus sont prêts à tenir tête aux grandes entreprises et à l’establishment politique. Ce qu’il faudra vraiment pour gagner nos revendications et vaincre le prochain assaut de la classe dirigeante contre Sanders, c’est une vaste campagne populaire indépendante du Parti démocrate faite de millions de travailleurs, avec des structures démocratiques et visant à mobiliser la force la plus puissante possible.
En tant que membre du conseil municipal de Seattle, j’ai lutté aux côtés des mouvements sociaux et des syndicats pour obtenir le salaire minimum horaire de 15 $, des millions de dollars pour des logements abordables et une série de victoires historiques sur les droits des locataires. Tous ces gains ont été remportés en dépit de l’opposition farouche de l’establishment démocrate, qui dirige depuis longtemps la mairie de Seattle. Mon organisation, Socialist Alternative, a été l’épine dorsale de nos victoires progressistes. Même les membres les plus mieux intentionnés du conseil du Parti démocrate cèdent aux pressions énormes des grandes entreprises et des dirigeants de leur propre parti, comme nous l’avons vu encore une fois à Seattle quand ils ont trahi les travailleurs en capitulant face à Amazon au printemps dernier.
Le site Web de Sanders s’ouvre sur le thème familier mais puissant de sa campagne de 2016 : ‘‘Not me. Us.’’ Nous devons faire en sorte que cela devienne une réalité – non seulement dans la lutte pour la campagne de Bernie et contre l’establishment politique – mais aussi dans la lutte pour une politique fondamentalement différente.
Plutôt que d’attendre de voir ce qui nous attend aux primaires démocrates, commençons maintenant.
Commençons à mettre sur pied des campagnes locales indépendantes dans nos collectivités locales et nos lieux de travail, présentons des motions dans nos syndicats pour appuyer la campagne de Bernie et lançons des groupes étudiants sur nos campus. Profitons de ce moment historique pour lancer la contre-attaque de la classe ouvrière !
Mais pour vraiment vaincre la droite et gagner la lutte pour une société basée sur les besoins des travailleurs et un environnement durable, nous devons lutter pour une alternative socialiste. J’espère que vous envisagerez de rejoindre mon organisation.
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USA. La caravane des migrants : la corruption du capitalisme mise en lumière

Une caravane de milliers de migrants s’est constituée à Tijuana, à la frontière américano-mexicaine, près de San Diego. Migrants demandeurs d’asile fuyant la violence dans leurs pays d’origine, le Honduras, le Guatemala et le Salvador, ils ont voyagé pendant des semaines rien que pour atteindre la frontière. À leur arrivée, ils ont été accueillis avec une frontière militarisée et des gaz lacrymogènes. L’administration Trump a qualifié la caravane d’invasion de terroristes et de gangsters financée par George Soros. Cependant, les travailleurs doivent voir cette manifestation tragique pour ce qu’elle est vraiment : une mise en accusation du capitalisme mondial.
Par Christopher Carroll, Socialist Alternative (Etats-Unis)
La réponse de Trump et le manque de réponse des démocrates
À l’approche des élections de mi-mandat, Trump a commandé à la hâte 5 800 soldats à la frontière américano-mexicaine. Nous devrions voir cela pour ce que c’est : une manœuvre électorale grossière et farfelue, conçue pour enflammer la base électorale de Trump. Suite à cette manœuvre cynique, Trump a presque complètement cessé de parler de la caravane après le jour du scrutin, comme l’ont souligné certains médias.
Pendant ce temps, les troupes sont occupées à installer des barbelés tout en pratiquant des scénarios de jeu de guerre contre une caravane de personnes âgées, d’enfants et de parents épuisés. Faisant écho à son allié, le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, Trump a déclaré : «?S’ils lancent des pierres, nos militaires réagiront. J’ai dit [aux officiers de la garde nationale] de considérer [les pierres] comme un fusil?». Les groupes anti-immigrés ayant des antécédents violents, comme les Minutemen, sont également à la frontière, sous l’impulsion de la rhétorique vile et haineuse de Trump.
L’asile est un processus d’obtention de la résidence dans un autre pays, car il n’est pas sûr pour vous de rester dans votre pays d’origine en raison de la persécution ou d’autres raisons. Pour pouvoir demander l’asile aux États-Unis, vous devez déjà être aux États-Unis. Ainsi, le fait de refuser l’entrée aux personnes est l’une des tactiques de la droite pour empêcher les migrants de recevoir l’asile. L’une des premières démarches de Trump a été de refuser l’asile à toute personne entrant dans le pays en dehors d’un point d’entrée, créant ainsi un nouvel obstacle à l’application. En réalité, Trump tente de mettre fin à l’application d’un droit humain internationalement reconnu (même s’il est souvent violé dans la pratique) à la frontière du sud. Bien entendu, cette «?interdiction d’asile?» serait contestée devant les tribunaux, mais même si un juge fédéral l’invalide, nous ne pouvons pas compter sur la Cour suprême pour défendre le droit d’asile.
Les migrants ont commencé à atteindre la frontière le 20 novembre. Trump a ordonné que seuls 100 demandeurs d’asile par jour puissent être traités. Cela a entraîné des retards importants et une tension accrue, aboutissant à l’utilisation de gaz lacrymogène et de balles en caoutchouc par les troupes américaines sur des migrants sans défense. Certes, une poignée de roches ne fera pas tomber les militaires les plus puissants de la planète. Comme pour toutes choses venant de Trump, cette crise de l’immigration actuelle a été dramatisée à l’extrême. Ce n’est pas seulement aux États-Unis : le nouveau gouvernement italien dans lequel un parti d’extrême droite joue un rôle clé refuse d’autoriser tout navire de migrants en provenance d’Afrique du Nord à débarquer. En Hongrie, le gouvernement de droite a construit une barrière frontalière pour empêcher l’entrée de migrants en provenance de «?pays musulmans?».
Ces dernières années, la xénophobie à ciel ouvert a pris de l’ampleur, et est activement encouragée par la droite, en particulier par Trump. Historiquement, des sections de la classe dirigeante ont attisé la xénophobie afin d’exploiter la peur et l’insécurité économique de certaines couches de la classe ouvrière. La grande majorité des travailleurs américains font face à une économie sans emplois aux salaires décents, offrant des emplois de plus en plus mal rémunérés, non syndiqués, et les privant de services sociaux vitaux.
Le discours anti-migrants ressemble à ceci : les migrants viennent soit pour occuper des emplois de travailleurs américains, soit pour se livrer à des activités criminelles. Le nouveau tournant dans l’ère post-11 septembre est la désinformation selon laquelle des terroristes djihadistes pénètrent dans la frontière au sud alors qu’ils se cachent parmi les demandeurs d’asile. Mais les migrants n’ont pas créé les conditions économiques qui laissent tant de travailleurs américains sans emploi, appauvris et profondément anxieux – ce sont les grandes entreprises et le système économique capitaliste qui le font. Les migrants réagissent simplement à des conditions économiques similaires, souvent plus graves, dans leur propre pays.
Pendant ce temps, la classe dirigeante bénéficie une fois de plus de l’opportunité de semer une division artificielle parmi la classe ouvrière. Manipulant ses conditions économiques médiocres et à l’étranger, la classe dirigeante s’engage dans un exercice d’équilibre qui cherche à acquérir un flux constant de main-d’œuvre migrante exploitable, tout en menaçant d’expulsion ces travailleurs afin de renforcer leur statut de deuxième classe. Dans le passé, les grandes entreprises américaines ont soutenu la «?réforme de l’immigration?» tant qu’elles conservent un statut de deuxième classe pour la plupart des «?sans-papiers?» actuels.
Cette main-d’œuvre migrante bon marché contribue également à réduire les niveaux de salaire des travailleurs nés aux États-Unis. La déportation sert également à intimider les travailleurs immigrés pour qu’ils n’adhèrent pas à un syndicat, tout comme la menace de sous-traiter leurs emplois à l’étranger dissuade les travailleurs nés aux États-Unis de s’engager dans des activités syndicales.
La direction du parti démocrate se présente comme opposée au fanatisme de Trump et aux attaques contre les migrants. Elle s’est opposée à la construction du mur et à la séparation des familles; certains démocrates influents sont allés plus loin et ont soutenu l’appel à «?abolir ICE?» (United States Immigration and Customs Enforcement, agence de police douanière et de contrôle des frontières). Mais ont cédé maintes et maintes fois au moment décisif. Et bien sûr, l’administration Obama a déporté plus de personnes que toutes les autres administrations précédentes combinées! À ce stade, les démocrates ne semblent avoir aucune politique d’immigration cohérente.
La politique d’immigration américaine est un désastre humanitaire. Elle est anti-ouvrière et de plus en plus agressive et brutale. ICE détient actuellement 44.000 personnes. Des archives judiciaires récentes montrent qu’il reste encore 171 enfants séparés de leur famille et détenus aux États-Unis plus de quatre mois après qu’un juge ait ordonné à l’administration Trump de réunir toutes les familles séparées à la frontière américano-mexicaine.
Mais à un niveau plus profond, toute la «?crise?» à la frontière du sud est fabriquée. Plus tôt cette année, un titre dans le New York Times disait tout : «?Les postes-frontière ont diminué depuis des années, malgré les déclarations de crise de l’immigration clandestine?» (20/06/18). La plus grande source d’immigration aux États-Unis aujourd’hui vient d’Asie.
Pourquoi la caravane s’est-elle développée?
Toutes les démarches de l’administration Trump ont été soutenues par une campagne de propagande soutenue qui tente de décrire les migrants désespérés comme une armée envahissante de terroristes et de gangsters.
Cependant, il y a de vraies personnes et d’importants problèmes en jeu. Les migrants de la caravane sont des personnes en quête d’asile qui fuient la misère et la désintégration violente de la société.
Voici un échantillon de ce que les migrants ont dû affronter au cours de leur voyage depuis l’Amérique centrale : extorsion de fonds par la police; extorsion par des gangs organisés; les violences d’État commises par des militaires mexicains à la frontière entre le Guatemala et le Mexique; traversées de rivières dangereuses avec des nourrissons, des enfants et des personnes âgées; faim constante, déshydratation et épuisement. Historiquement, la migration en solo a été une expérience encore plus périlleuse pour les travailleurs, en particulier les femmes victimes d’agression et de viol. Il convient de noter que les caravanes de migrants ne sont pas un phénomène nouveau. En raison des dangers de voyager à travers le Mexique, les migrants trouvent qu’il est plus sûr et moins coûteux de voyager par groupes au Nord. La caravane actuelle a été créée au départ pour des raisons de sécurité, pas pour envahir les États-Unis.
Histoire de l’impérialisme américain
La politique étrangère américaine, particulièrement brutale en Amérique centrale, a conduit à des régimes particulièrement brutaux et à des zones de domination des cartels de la drogue. C’est le résultat de la politique de «?guerre à la drogue?» menée par les administrations américaines successives. Des centaines de milliers de personnes fuient la violence et l’instabilité. L’argent des contribuables américains a également été utilisé pour financer la School of the Americas de Fort Benning, en Géorgie, où des officiers de l’armée de plusieurs pays d’Amérique latine ont été formés à la contre-insurrection et à la torture.
Un exemple récent est le Honduras où Barack Obama et Hillary Clinton (quand elle était secrétaire d’État) ont soutenu le coup d’État militaire de 2009 du président Zelaya, un populiste de gauche qui avait adopté de légères réformes du travail et de la terre. Après des élections factices soutenues par l’administration Obama, plusieurs militants du Front national de résistance populaire et plusieurs journalistes ont disparu, rappelant ainsi l’histoire profondément répressive de la région. Notamment en 2016, la dirigeante environnementale et autochtone Berta Caceres a été assassinée après des années de lutte contre les inégalités, la dégradation de l’environnement et le pouvoir des multinationales centrées autour du barrage hydroélectrique Agua Zarca.
Sur le plan économique, les accords commerciaux multinationaux successifs, tels que l’Accord de libre-échange centre-américain (CAFTA), ont entraîné une augmentation des inégalités et une pauvreté extrême. Ces accords garantissent le statut d’une toute petite élite dirigeante qui supervise le sous-développement permanent de leurs pays respectifs pendant que les États-Unis exploitent leurs matières premières et leur main-d’œuvre bon marché. Les peuples d’Amérique centrale ont besoin d’une coopération régionale fondée sur la solidarité de la classe ouvrière et non sur les bénéfices des multinationales. Une telle confédération socialiste des Amériques entraînerait un transfert massif de ressources qui profiterait énormément aux pays et régions les plus pauvres et permettrait aux populations de vivre en sécurité avec des emplois décents dans leur pays d’origine.
Solidarité des travailleurs et travailleuses!
Soyons clairs, chers collègues : les migrants sont des travailleurs et travailleuses qui demandent l’asile à des gouvernements répressifs et cherchent désespérément du travail pour pouvoir subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. Ce ne sont pas des terroristes. Ils et elles ne sont pas des gangsters. Ce sont des ouvriers. Nos sœurs et frères, nos nièces et nos neveux. Des innocents liés dans un système coupable. Un système coupable d’exploitation, de privation et de désespoir. Coupable de négligence cruelle ou d’oppression meurtrière.
Le Capital ne reconnaît pas les frontières nationales. Il traverse librement les frontières à la recherche de profits, laissant derrière lui la misère et la destruction. Les forces puissantes qui contraignent ces migrants, ces réfugiés économiques et demandeurs d’asile, sont produites par le capitalisme. Le chaos du marché mondial et la soif de profit impérialiste déplacent des millions de travailleurs et de pauvres dans le monde entier.
Le seul moyen de garantir l’élévation du niveau de vie de tous les travailleurs est d’exiger des droits et des avantages pour tous les travailleurs. De plus, les syndicats doivent jouer un rôle actif et décisif dans le dossier de l’immigration, rejetant et plaidant contre les idées anti-immigration.
Ce que Socialist Alternative demande :
• Retirer les troupes de la frontière immédiatement. Non à un mur frontière militarisé.
• Construire un mouvement pour défendre les immigrant·e·s de la violence et de l’intimidation de la droite;
• Embaucher plus de personnes pour traiter toutes les demandes d’asile dès que possible;
• Les entreprises américaines ont réalisé des milliards de dollars en exploitant l’Amérique centrale, qu’on impose à ces grandes entreprises de payer pour la réinstallation des réfugié·e·s et des demandeurs d’asile, tout en construisant des logements abordables pour tous;
• Abolir ICE et mettre fin aux politiques de détention inhumaine et d’expulsion massive, ainsi que redonner des droits légaux complets pour tou·te·s les immigrants;
• Mettre sur pied un programme massif de reconstruction des infrastructures nationales sur des lignes vertes, créant des millions d’emplois syndiqués bien payés pour les non-migrants et les migrants. Taxer les grandes entreprises pour financer une éducation, un logement et des soins de santé de qualité pour tous;
• Instaurer un salaire minimum national de 15 $ et des droits syndicaux pour tous les travailleurs.La caravane de migrants à laquelle nous assistons n’est pas le théâtre de l’absurde. C’est le réel dans sa forme la plus brute et inflexible. C’est une mise en accusation du capitalisme et de l’impérialisme en temps réel. Un miroir brisé appelant tous les travailleurs à la solidarité. Dernière révélation du choix ultime de l’humanité : la barbarie ou le socialisme.
