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  • Algérie, 50 ans après la Toussaint 1954. Les éléments d’une explosion sociale sont réunis

    Algérie, 50 ans après la Toussaint 1954

    Que se passe-t-il en Algérie ? Depuis le 1er novembre 54 et le déclenchement de la révolution algérienne, il y a 50 ans, et l’instauration du régime du F.L.N., les travailleurs et les jeunes algériens ont été dépossédés de leur révolution politiquement et économiquement.

    Leïla Messaoudi

    La balance commerciale du pays présente un excédent de 6,5 milliards de dollars pour les neuf premiers mois de 2004. Le FMI déclare la "situation assez favorable" et note les avancées dans les réformes structurelles, notamment la restructuration du secteur bancaire. L’ambassadeur américain annonce que les Etats-Unis appuieront l’Algérie dans son "processus d’adhésion à l’organisation mondiale du commerce (O.M.C.)". Et la France essaie de se maintenir en envoyant régulièrement des ministres en visite.

    Gouvernement d’Ouyahia : un gouvernement pour les capitalistes

    Aujourd’hui, le gouvernement d’Ahmed Ouyahia dépossède les Algériens des richesses produites, exportées en grande partie, comme le pétrole et le gaz. Les importations sont pour "l’équipement industriel". 2003 a été une année de forte croissance économique pour l’Algérie sans que les Algériens en voient les effets sur leurs conditions de vie, bien au contraire. Des émeutes quasi insurrectionnelles se sont développées et se multiplient contre le pouvoir et ses préfectures depuis plus de 6 mois. Là sur l’eau, ici sur le logement ou tout simplement contre le zèle policier et gouvernemental sur les marchés pour contrôler les petits marchands, la multiplication des luttes est avérée. Partout les traces d’une population aux abois, des salariés non payés depuis des mois, soulignent les conditions sociales désastreuses dans lesquelles se trouvent les populations algériennes.

    En 2003, avant les élections, des grèves générales notamment des cheminots contre les plans de privatisation des secteurs publics avaient freiné les privatisations de Bouteflika.

    Un gouvernement "rouleau compresseur" contre les travailleurs

    Certains secteurs sont à nouveau touchés par des mouvements de grève illimitée comme, depuis le 18 octobre 2004, les praticiens de santé publique qui exigent la titularisation de 300000 vacataires dans la Fonction publique. Les dockers de la Coordination nationale des syndicats ont eux aussi mené une action coup de poing "d’alerte" le 26 octobre dernier contre la privatisation des chantiers navals qui menace des milliers d’emplois et plus de 3000 journaliers. Face à ces mobilisations, face aux émeutes, en particulier dans la région du M’zab, le gouvernement Ouyahia joue la carte de l’écrasement judiciaire et militaire des mouvements. De Ghardaia à Constantine, les procès contre les jeunes "émeutiers" se multiplient et sanctionnent par de la prison ferme.

    Quant aux mouvements sociaux, le gouvernement passe à l’offensive contre le droit de grève dans la Fonction publique. Des mesures exemplaires ont été prises contre les grévistes. Ainsi, le conseil de gouvernement a annoncé le non-paiement de tout jour de grève, ce qui brise l’accord fixant 3 jours déduits par semaine de grève. Il a déposé plainte contre les syndicats qui "entravent" le service public de santé par le recours à la grève illimitée et a engagé des procédures de licenciement des personnels en grève illimitée pour abandon de poste !

    Ces luttes sont en général dirigées par des syndicats autonomes et parfois certains affiliés à l’UGTA, le syndicat officiel. Ces mesures répressives sont valables pour tout mouvement illimité à venir! Avec cette batterie de mesures anti-ouvrières, le gouvernement met fin à l’un des derniers acquis gagnés lors du soulèvement d’octobre 1988. Rien de surprenant, non plus, que plusieurs journalistes soient censurés ou en prison. Prévoyants, Bouteflika/Ouyahia, les frères ennemis, montrent quels intérêts ils défendent, ceux des capitalistes algériens et étrangers qui veulent l’ouverture du marché algérien à la concurrence.

    Riposter en construisant l’alternative socialiste dans les luttes !

    Des syndicats autonomes combattent ces attaques mais l’UGTA est absente. Aucun soutien officiel aux luttes actuelles n’est donné par le syndicat majoritaire. Il ne juge pas utile de "déclencher les hostilités" contre Ouyahia comme il n’était pas officiellement opposé aux privatisations malgré sa base mobilisée. Une partie de la Commission nationale de la centrale appartient au RND, le parti de Ouyahia…

    Les nationalisations, le développement industriel du pays sont des acquis que les travailleurs algériens défendent. Les jeunes et les familles réclament des conditions de vie décentes, des loyers modérés et de l’eau et s’affrontent régulièrement au pouvoir qui sert les profits d’une poignée. Cette bataille entre en conflit direct avec les intérêts capitalistes.

    Les revendications sur les services publics, sur les conditions de vie posent la question politique du pouvoir. Le capitalisme cherche à avancer à grands pas en Algérie. Ce système ne pourra pas satisfaire les besoins quotidiens et vitaux des Algériens attaqués précisément par le gouvernement Ouyahia. C’est autour de revendications pour de véritables infrastructures (routes, eau, logements), contre les privatisations que les travailleurs peuvent se rassembler et se doter d’un programme qui s’attaque au système, au capitalisme.

    Renationaliser les secteurs privatisés, avoir des routes, ceci implique de contrôler et gérer l’économie. Qui mieux que les travailleurs peut le faire ? Le socialisme est la seule perspective pour l’Algérie, ce n’est pas "celui" des régimes staliniens mais une société gérée démocratiquement par tous et toutes, pour les besoins de tous, où les Algériens profiteront des richesses du pays. Pour cela, il faut construire un outil de lutte politique, un parti qui défende sans compromis au quotidien cette perspective de lutte et l’alternative socialiste au capitalisme. Le Comité pour une Internationale ouvrière se bat pour ça.

    Cet article a été repris du site de la Gauche révolutionnaire, la section française du CIO.

  • Encore quatre ans avec Bush!

    ÉTATS-UNIS

    LES RÉSULTATS des élections américaines représentent une grosse déception pour beaucoup. Tant aux Etats-Unis que sur le plan mondial, on cultivait l’espoir d’une Ldéfaite du règne haï de Bush. Beaucoup ne pouvaient pas comprendre, ne voulaient pas le croire. Comment peut-on élire à nouveau un président qui est responsable de guerres effroyables et d’une politique asociale sans précédent?

    Katrijn Zaman

    Dans son discours, Bush a indiqué qu’il se servira de sa majorité républicaine confortée à la Chambre et au Sénat pour mettre en oeuvre son programme qui va encore davantage profiter aux riches et qui approfondira le projet impérialiste.

    Pourquoi Bush a-t-il remporté les élections?

    L’actualité des derniers mois n’a pas été favorable au président: le bourbier irakien, le pillage d’un dépôt de munitions, le déficit budgétaire démesuré, les pertes d’emplois. Selon les sondages, 52% des électeurs trouvent que l’économie est mal gérée. 55% jugent que la politique de Bush favorise plus les grandes entreprises que l’Américain moyen.

    Malgré cela Bush a été réélu. Bush a même reçu 34% des voix de ceux et celles qui ont perdu leur emploi ces dernières années. Beaucoup de jeunes et 88 pc des Afro- Américains ont voté pour Kerry. Leurs voix n’ont pas suffi pour battre les millions d’autres, surtout d’inspiration évangéliste chrétienne, qui ont vu en Bush le gardien des valeurs traditionnelles américaines.

    Beaucoup de ceux qui ont donné leur voix à Bush ont dans les faits donné leur voix à leur oppresseur (c’est-àdire les capitalistes qui soutiennent et financent Bush) contre les intérêts de la majorité de la population américaine. C’est le grand paradoxe de ces élections, qui résulte de nombreuses raisons historiques et culturelles. Parmi celles-ci, la volonté de s’accrocher à certaines certitudes (l’Église, la famille), d’autant plus que le monde est devenu plus instable et que la période dans laquelle nous vivons est dominée par la peur, le doute et l’incertitude.

    Kerry était-il une alternative?

    La victoire de Bush résulte surtout de l’échec de Kerry dans ses efforts d’avancer une alternative claire. Les similitudes entre les deux candidats étaient évidentes. Kerry ressort du même milieu élitiste que Bush et défend les mêmes intérêts de cette élite. Seul 40% de l’électorat a voté pour Kerry par conviction. Tous les autres ont voté pour lui dans le but de s’opposer à la politique de Bush.

    Tant Bush que Kerry défendent la politique néo-libérale d’austérité qui enrichit la minorité nantie tandis que les travailleurs et leurs familles paient la note pour la crise du système. Ils défendent tous deux la même politique belliciste. Si Kerry avait gagné, le massacre en Irak n’aurait pas pour autant disparu. Aucun des deux partis n’offre d’issue au bourbier irakien. La seule différence que les Américains ont pu remarquer, c’est que Kerry n’est pas Bush.

    Briser le système bipartite

    Ralph Nader, le candidat indépendant, a connu lors de sa campagne électorale une vague d’opposition de la part des Républicains, des Démocrates et de beaucoup de progressistes. Les Démocrates l’ont empêché de se présenter, notamment par des manoeuvres juridiques. Le coût de cette campagne anti-Nader s’est élevé à 70 millions de dollars.

    Finalement, Nader a récolté moins de 1% des voix. Cela est en partie dû à l’atmosphère «Tout sauf Bush». Ce résultat modique s’explique aussi par le refus de Nader de traduire sa campagne électorale (il a eu de très bons résultats lors des élections de 2000) par un organe politique, sous la forme d’un nouveau parti…

    Après 2000, Nader a disparu de la scène pour ne revenir que lors des élections présidentielles de cette année-ci. Une telle stratégie, purement électorale, ne suffit pas.

    L’opposition écartée?

    La victoire de Bush ne signifie pas que la résistance est brisée. L’opposition va revenir à l’avant-plan. Rien ne change au fait que Bush est un président rejeté par la majorité de la population. Un quart des électeurs est en colère contre le président. Ses mesures antisociales iront de pair avec un mouvement de protestation des travailleurs et de leurs familles aux Etats-Unis et dans le monde.

    Afin de s’opposer aux attaques à venir, il faudra un instrument politique aux travailleurs. Une nouvelle conscience est née des mouvements anticapitalistes, contre la mondialisation et contre la guerre. Le candidat indépendant Nader doit se déplacer du terrain électoral vers la construction d’une organisation politique active sur une base quotidienne. Une telle démarche représenterait un bon point de départ pour la création d’un instrument politique pour les travailleurs américains. Nous craignons cependant que cela ne se produise pas.

    Une telle initiative est pourtant la seule méthode pour éviter que les prochaines élections soient à nouveau dominées par le débat entre deux clones qui défendent la même politique asociale, néo-libérale et impérialiste. Face à cette perspective, il nous faut un parti des travailleurs, un parti indépendant des grandes entreprises et des banques.

  • Kerry contre Bush: La peste ou le choléra!

    Un mois avant les élections présidentielles américaines qui se tiendront le 2 novembre, beaucoup de sondages donnent un léger avantage à Bush. Malgré la polarisation importante dans la société, un soutien faible pour Bush (entre 40 et 45%), les scandales liés à la guerre en Irak, les gigantesques baisses d’impôts pour les riches et le big business (plus de 2 milliards de dollars), le clivage croissant entre les riches et les pauvres, les manifestations de masses, les Démocrates de Kerry n’arrivent pas à infliger une cuisante défaite à Bush.

    Bart Vandersteene

    Pourquoi les Démocrates n’arrivent-ils pas à battre Bush?

    Lors des élections présidentielles précédentes, seulement la moitié des Américains ont jugé utile se rendre aux urnes. Les Démocrates ne réussissent pas à expliquer à la population pourquoi et comment un président démocrate mènerait une politique radicalement différente pour les Américains moyens et pour la population mondiale. Les causes de ce manque d’enthousiasme sont uniquement dues à eux-mêmes.

    Dans un magazine d’opinion destiné aux patrons, Kerry est décrit comme «l’équivalent politique du valium». Kerry bénéficie d’une auréole due à sa réputation de héros de guerre (conflit du Vietnam) et plus tard dans le mouvement contre la guerre au Vietnam. Dans les faits il compte parmi les riches Démocrates qui aspirent au pouvoir et qui sont à la solde du big business. Il est non seulement le sénateur le plus riche. A ce poste il a systématiquement voté selon les intérêts patronaux.

    A propos de la guerre en Irak il emploie un discours vaguement anti-guerre. Mais au parlement il a voté en faveur de la guerre en Irak et des fonds destinés aux efforts militaires. Lors d’une de ses conférences de presse, il a même déclaré que sa première décision après son élection serait d’envoyer 40.000 de soldats en plus en Irak. De temps en temps, il essaie de profiter du sentiment anti-guerre répandu aux Etats-Unis. Mais d’autre part, face aux élites dominantes, il s’efforce de faire preuve d’être un gérant meilleur et plus fiable que l’équipe en place.

    Les élections primaires et le tournant à droite des Démocrates

    Lors des élections primaires, où l’on désigne un candidat démocrate pour les élections présidentielles, divers candidats se sont profilés comme le pôle antagoniste de Bush. Howard Dean, qui pendant longtemps a devancé les autres candidats dans les sondages, avait l’intelligence de ressentir le sentiment anti-Bush profond dans la société. Il a mené une campagne anti-guerre qui a connu un accueil enthousiaste parmi certaines couches de la population. Kerry a été obligé de l’imiter en lançant des slogans radicaux. La direction du Parti démocrate a été très angoissée par cette campagne, susceptible de susciter des espoirs parmi la population, espoirs que les Démocrates sont incapables de combler. C’est pourquoi la direction du Parti démocrate a choisi d’écarter Dean au profit de Kerry. En revanche depuis sa désignation officielle il a fait une courbe rentrante à droite. Si des illusions pouvaient encore subsister quant à l’aptitude du Parti démocrate d’être un instrument de transformation de la société, elles sont maintenant définitivement dissipées.

    Le crédit: une bombe à retardement

    Dans une période de crise économique structurelle, le capitalisme tente de repousser la crise devant lui, soit en l’exportant vers d’autres pays, soit en la repoussant dans le temps. Voilà la profession de foi de la politique économique de Bush. Il est responsable du taux d’intérêts de 1% (le plus bas historiquement) afin d’inciter les consommateurs américains à continuer à consommer à crédit. Mais chaque dollar emprunté devra être remboursé à un moment donné. Pour chaque dollar de croissance économique entre 2001 et 2003, 3,19 dollars de dettes ont été accumulés (par les entreprises, le gouvernement ou le consommateur). Les niveaux de dette des entreprises, du gouvernement et du consommateur, ont atteint des sommets historiques. Cette bulle boursière devra éclater à un moment donné. Tant Kerry que Bush devront procéder à une politique d’austérité dans les dépenses sociales, avec les conséquences à prévoir. Sous la présidence de Bush, le nombre de pauvres a officiellement augmenté de 40 millions à 45 millions de personnes. Pour la plupart des habitants, bénéficiant d’une faible couverture sociale, la crise imminente frappera fort. Ils se rendront compte que la nation du Rêve américain, de la liberté et de la démocratie, n’est plus capable de leur offrir un avenir. L’idée d’une alternative ne sera pas uniquement un sujet de discussion des jeunes et des travailleurs radicalisés, mais imprègnera toute la société. Alors à ce moment-là, un bouleversement dans la réflexion et l’action quotidiennes des Américains est envisageable.

    La nécessité d’en finir avec le bipartisme

    Il faut rompre avec le bipartisme pour arriver à un changement aux USA. La candidature de Ralph Nader montre la faiblesse de ce système. C’est pourquoi Socialist Alternative, la section soeur du MAS aux USA, mène une campagne énergique en soutien à la campagne de Nader, qui en 2000, avec le soutien des Verts, a récolté 2,7 millions de voix. Ils ont leur propre postulant qui se présente uniquement dans ces états où le résultat du vote est connu d’avance et qui est donc dépourvu d’importance. Dans les états où Bush et Kerry se battent coude-à-coude, les Verts appellent à voter Kerry.

    Ralph Nader est un populiste de gauche, qui mène une campagne audacieuse contre le big business et le bipartisme. Son programme est un pôle d’attraction parce qu’il combine des revendications radicales: contre la guerre en Irak et l’occupation, l’abolition du Patriot Act (la restriction des droits démocratiques après le 11/9), la création de millions d’emplois suite à des investissements publics, un salaire minimum de 10 $ l’heure, l’extension des droits des travailleurs, l’abolition de la législation antisyndicale (Taft-Hartley Act), l’égalité des droits pour des homosexuels, lesbiennes et bisexuels, le droit de vote à partir de 16 ans, etc.

    Contrairement au programme des Démocrates, celui de Nader offre la base autour de laquelle des dizaines de milliers d’activistes peuvent être regroupés. Malheureusement, certains souffrent du syndrome Anyone But Bush (Tout sauf Bush), dont Michael Moore. Pour eux, tous les problèmes du monde et aux USA sont l’oeuvre d’une seule personne et non le résultat de la volonté et de la politique d’une force dans la société (la bourgeoisie) qu’elle souhaite imposer à la population mondiale. Chose qu’elle a faite sur base du sentiment d’effroi après le 11 septembre. Bush n’est que l’interprète de cette politique. La chimère de Tout Sauf Bush ignore la question de qui ou en quoi doit consister le Tout.

    Pour les Américains, les élections signifient un choix entre Pepsi-Cola of Coca-Cola. Souvent on choisit pour l’original et non pour la mauvaise copie. Nader l’a posé ainsi: «Dans ce pays, il n’y a pas d’élections libres. Nous avons un parti du Big Business à deux têtes qui sont toutes les deux maquillées à leur façon, qui vendent nos élections et nos gouvernement à celui qui offre le plus».

    Malgré cela Nader refuse toujours jusqu’à présent de mettre sur pied la structure nécessaire, c’est-à-dire un parti, qui encadre la résistance de beaucoup d’Américains. S’il continue à suivre cette politique, on ne pourra pasconstruire un mouvement de contestation que tous les quatre ans. Socialist Alternative, par contre, a lancé un appel à Nader pour convoquer une conférence qui réunisse des militants anti-guerre, des syndicalistes, des minorités ethniques opprimées, des électeurs démocrates désillusionnés et autres pour préparer le lancement d’un nouveau parti. Tel parti pourra faire en sorte que chaque mouvement contre Bush ou Kerry ait une expression politique sur le plan local, régional et national. C’est d’une importance extrême pour toute la population mondiale. Car aux USA une lutte décisive devra être menée si l’on veut construire une autre société, une société socialiste.

    Comment acheter un président

    Pour leur campagne électorale, Bush et Kerry disposent ensemble de plus d’un milliard de dollars. Nader, par contre, tout en refusant des fonds des entreprises, a récolté cet été plus d’un million de dollars. Une paille dans un pays comme les Etats-Unis. Malgré l’avantage financier énorme de Bush et de Kerry, le programme de Nader trouve des échos beaucoup plus positifs parmi ces couches de la population qui ont l’occasion de faire la connaissance avec la version originale, et non via les déformations de ce programme qu’ont fabriquées les Démocrates et les Républicains. Selon les sondages de cet été, pour chaque dollar dont Nader aurait besoin pour gagner une voix, Bush en dépenserait 15,43 et Kerry 11,29. Imaginez ce qui aurait été possible si chaque candidat avait eu les mêmes chances.

  • Travailler plus longtemps pour le même salaire?

    Emploi

    LES DERNIERS mois ont été féconds en exigences patronales, toutes plus exorbitantes les unes que les autres. Semaine de 40 heures sans augmentation de salaire; suppression des prépensions; gel des salaires; assouplissement des heures supplémentaires; annualisation du temps de travail; des crédits-temps à payer de notre poche;… La bourgeoisie belge s’apprête à emboîter le pas aux Pays-Bas et à l’Allemagne qui imposent des mesures d’austérité «historiques». Le patronat belge ne veut pas être en reste.

    Peter Delsing

    Chez Siemens en Allemagne, les syndicats ont été mis au pied du mur en juin: soit le passage des 35 heures aux 40 heures/semaine sans augmentation de salaire, soit la délocalisation en Hongrie avec la perte de 2000 emplois à la clé. La direction syndicale s’y est finalement résignée. Daimler Chrysler et Thomas Cook ont aussitôt emboîté le pas à Siemens. En France et aux Pays-Bas aussi, les patrons «brisent les tabous». En Belgique, la FEB (Fédération des Entreprises de Belgique) pense également qu’il faut «débattre» de la semaine de 40 heures sans augmentation de salaire. Paul Soete, administrateur-délégué d’Agoria, assène que «nous devons choisir entre travailler plus ou perdre notre emploi»(1).

    Le problème avec cette logique de concurrence, c’est qu’on n’en voit pas la fin. En Pologne, le salaire mensuel moyen est de 460 euros. Faudra-t-il s’y aligner?

    Si le phénomène de la délocalisation est réel, il ne faut cependant pas le surestimer. Dans son rapport annuel de 2003, la Banque Nationale dit que les 10 nouveaux Etats-membres de l’UE – à l’exception de la Slovénie – ont une balance commerciale déficitaire. La BN ajoute que les investissements étrangers directs en Europe de l’Est (donc y compris les délocalisations) «commencent à se raréfier». Les investissements directs de l’UE y ont baissé successivement en 2002 et 2003. Les menaces de délocalisation ne sont souvent rien d’autre qu’un chantage mensonger des patrons.

    Dans une tribune de La Libre Belgique, Paul Soete va droit au but: «Mais revenir par exemple dans les secteurs de l’industrie technologique à 40 heures, permettrait de réduire le coût horaire moyen de 7,4%».(2) Les patrons veulent diminuer leurs coûts – à nos frais – pour rester compétitifs vis-à-vis de la concurrence internationale.

    Dans les pays concurrents, on dit la même chose aux travailleurs. Nous ne pouvons pas faire nôtre la logique de profit et de concurrence des patrons sous peine de perdre tous nos acquis. La politique néo-libérale de baisse des allocations et des salaires réels, de flexibilité à outrance, de hausse de la pression du travail,… est à l’oeuvre depuis les années ’80. La grande majorité des salariés, des chômeurs, des pensionnés,… ont vu reculer leur pouvoir d’achat et leurs conditions de vie et de travail. Après 25 ans de politique néo-libérale de régression sociale, les patrons et leurs gouvernements n’ont rien trouvé de mieux qu’un plan d’austérité encore plus drastique. Quel aveu d’échec !

    La Belgique est le pays le plus productif au monde à l’exception des Etats-Unis. Un allongement de la semaine de travail ne fera qu’augmenter le stress. Ce n’est pas ça non plus qui va aider les gens à trouver du travail alors qu’il y avait à la fin de l’année passée 1.143.500 allocataires à charge de l’ONEm. Certains patrons, comme ceux de l’industrie automobile où le marché est déjà saturé, proposent le «gel des salaires» comme alternative à l’allongement de la semaine de travail. Soete (Agoria) et De Muelenaere (Confédération du Bâtiment) plaident en choeur pour l’annualisation du temps de travail. De Muelenaere le dit sans ambages: «C’en est fini des horaires hebdomadaires uniformes pendant toute l’année». (3)

    Herwig Jorissen, qui est pourtant une figure droitière de la FGTB, a dit que l’allongement de la semaine de travail n’était «pas négociable». (4) Cela reflète la pression de la base. Chez Marechal Ketin à Liège, le personnel a rejeté à l’unanimité une proposition de la direction en ce sens. Chez Volkswagen à Forest en revanche, la FGTB tente d’éviter 200 licenciements en liant la baisse du temps de travail à une baisse des charges salariales pour le patron. Cela sape pourtant les fondements de la sécurité sociale qui serait déjà confrontée à un déficit d’un milliard d’euros.

    Les patrons se servent de l’allongement de la semaine de travail comme d’un bélier pour battre en brèche tous les acquis sociaux. Si la logique du capitalisme est incompatible avec les besoins de la majorité de la population, alors il faut en finir avec elle. Nous devons remettre à l’ordre du jour la vieille revendication syndicale de la semaine des 32h avec embauche compensatoire obligatoire pour commencer à résorber le chômage. Sans perte de salaire: on a déjà pris plus qu’assez dans nos poches pendant 25 ans. Seule la formation d’une tendance combative au sein des syndicats, prolongée sur le plan politique par un nouveau parti ouvrier avec des dizaines de milliers de travailleurs et de jeunes dans ses rangs, permettra d’en finir avec les profits d’une petite élite et l’enrichissement d’une minorité au détriment de la grande majorité.



    (1) De Morgen, 19/8/2004

    (2) La Libre Belgique, 12/8/2004

    (3) De Standaard, 25/8/2004

    (4) De Morgen, 19/8/2004

  • Crise et révolte en Amérique latine

    FIN JUILLET, près de 350 camarades provenant de 14 pays se sont retrouvés lors de l’école d’été du CIO, parmi lesquels des camarades du Brésil et du Venezuela. La discussion sur l’Amérique latine, qui a pris toute une journée, était une des discussions les plus importantes.

    Tina De Greef

    Regimes en crise

    Tout le continent est en mouvement et en crise. La profondeur de celle-ci diffère selon les pays. L’industrie textile est presque intégralement délocalisée vers l’Inde et la Chine. Les Etats doivent rembourser des dettes colossales. Actuellement au Pérou, 35% du budget sert au remboursement de la dette. Les richesses naturelles de l’Amérique latine sont en grandes parties tombées entre les mains des capitalistes.

    Presque partout nous voyons les symptômes d’un régime en crise, parfois même avec des composantes pré révolutionnaires. Le Chili et le Pérou sont en ce moment les régimes les plus stables d’Amérique latine. Il y a cependant eu récemment deux grèves générales au Chili. Le gouvernement Fox au Mexique est sur une pente glissante. En Bolivie le président Sanchez de Losada a été chassé car il voulait vendre le gaz aux Etats-Unis. Carlos Mesa, son successeur, essaie quand même d’organiser cette vente, malgré la résistance des masses.

    A Haïti, le revenu moyen par personne de l’ensemble de la population est inférieur à un dollar par jour. Aristide – qui a une approche anti-impérialiste seulement en paroles – a dû s’exiler. Au Pérou, Toledo est pour le moment le dirigeant le moins populaire de toute l’Amérique latine. Il a dû faire face il y a quelques semaines à une manifestation de masse, malheureusement dirigée par Garcia le leader de l’opposition bourgeoise.

    La révolte au Venezuela reflète le refus de la politique néo-libérale menée au cours de la dernière décennie dans toute l’Amérique latine. Le chômage officiel est passé de 12% à 17%. La population pauvre se radicalise et place le populiste de gauche Hugo Chavez au pouvoir en 1998. Celui-ci va décider – sous la pression des masses – d’envoyer 3.500 médecins vers les gens qui n’en avaient encore jamais vus. La Constitution changea de sorte que les propriétaires terriens perdirent leurs terres et que le pétrole soit placé sous le contrôle des autorités publiques.

    Les supermarchés itinérants avec de la nourriture bon marché et une nouvelle entreprise nationale de télé-communications sont les récentes initiatives de Chavez. Pour faire ces concessions, Chavez dépend des prix élevés du pétrole. Pour le moment le Venezuela est le cinquième producteur de pétrole du monde avec 3,1 millions de barils par jour. Cette réforme politique n’est cependant pas tenable à long terme dans un cadre capitaliste. La bourgeoisie, qui a perdu partiellement le contrôle de l’appareil d’état, déteste Chavez car il est a prêt à céder sur de nombreux terrains sous la pression des masses. C’est une situation dangereuse pour l’impérialisme.

    Pour rencontrer fondamentalement les revendications des masses et pour élever leur niveau de vie il faut rompre avec le capitalisme. Contrairement au Chili et à d’autre pays du continent, le Venezuela n’a jamais connu de tradition socialiste ou communiste. Même Chavez ne saisit pas la chance pour mobiliser une véritable révolution socialiste: il veut installer un «capitalisme plus humain».

    Pas de réconciliation avec l’opposition de droite

    Chavez voudrait réconcilier la révolution et la contre-révolution. Il louvoie entre les deux: d’une part entre la pression des masses vénézuéliennes et d’autre part la bourgeoisie et l’impérialisme. Les tentatives pour une réconciliation avec l’opposition de droite vont démoraliser les masses. Seul un parti révolutionnaire – condition décisive pour une victoire révolutionnaire: le facteur subjectif – sera capable de mener les masses vers la révolution. Seul un changement total de la société, rompant avec le capitalisme, pourra mettre un terme à la crise et en finir avec le chômage et la pauvreté.

    Les masses expérimentent aujourd’hui un processus important d’auto-organisation: les comités populaires, et les Cercles bolivariens initiés par Chavez. Ces organes doivent s’élargir vers toutes les couches des opprimés, et se transformer en organes réels de la lutte des travailleurs.

    Des comités populaires dans les entreprises et les quartiers doivent se baser sur les principes de la démocratie ouvrière: éligibilité, révocabilité des élus, un salaire pour les élus qui ne dépasse pas le salaire moyen d’un ouvrier qualifié,…

    La population doit s’armer au travers de cette forme d’auto-organisation, pour se protéger contre de nouvelles tentatives de coup d’état ou de contre-révolution violente. L’armement en soi n’est cependant pas une garantie pour une victoire: il faut aussi un véritable programme socialiste. L’appel de Chavez pour «armer la population» sont des paroles en l’air. De ce fait et si aucun véritable parti révolutionnaire ne se développe, une contre-révolution ne peut être battue.

    L’armée au Venezuela est essentiellement composée de travailleurs qui reflètent clairement la pression de la société. Cette situation est quelque peu comparable avec celle de l’armée durant la révolution des oeillets au Portugal. Au Portugal, le Mouvement des Forces Armées trouvait dans son programme des éléments socialistes qui allaient beaucoup plus loin que le mouvement d’aujourd’hui au Venezuela.

    Un tel parti révolutionnaire pour amener les masses à la victoire, fait défaut aujourd’hui au Venezuela.Toutes les mesures positives entreprises par Chavez jusque maintenant ont été essentiellement mises en avant par le sommet du régime. Les Cercles bolivariens forment le point d’appui dans la société pour Chavez et son gouvernement, mais il y a souvent des tentatives pour les contrôler par le haut.

    Récemment il fallait élire un responsable dans un Cercle bolivarien. Le gouvernement a essayé de mettre en avant son candidat, ce qui a provoqué la protestations des travailleurs qui avaient leur propre candidat. Il y a une grande pression du bas pour une démocratisation de ces organes, où maintenant déjà une couche de la population est représentée.

    L’opposition perd le référendum

    La réaction de Chavez après le référendum de la mi-août – qui portait sur sa révocation – montre qu’il ne cesse de vouloir concilier le processus de révolution et la contre-révolution. Le résultat, après une participation massive, est maintenant connu: Chavez l’a emporté avec 58.25 % des voix (contre 41.74% des voix en faveur de sa révocation). L’opposition ne reconnaît pas sa défaite. Elle a lancé une enquête sur d’éventuelles fraudes électorales.

    Dès l’annonce du résultat, le prix du baril de pétrole à la bourse de New-York a baissé. En fait Bush ne peut intervenir dans l’immédiat. Le prix élevé du cours du pétrole et l’importance du Venezuela comme pays producteur de pétrole, couplé à la guerre en Irak oblige l’administration américaine à remettre à plus tard une intervention dans les affaires intérieures au Venezuela.

    Nouveau parti au Brésil

    Au Brésil le PT social-démocrate, dirigé par Lula, est au pouvoir. Lula, un ancien métallo devenu dirigeant syndical, est arrivé au pouvoir en promettant de donner de la terre aux paysans sans-terres. Juste après avoir été élu, il a fait vote-face. Il a notamment annoncé que les fonctionnaires devaient travailler 12 ans de plus pour toucher leur maigre pension. Le chômage a pris des proportions énormes et plus de gens ont faim qu’autrefois. Quatre parlementaires restés fidèles au programme originel de Lula ont été exclu du PT. Le gouvernement Lula marche sur les traces du précédent gouvernement, qui suivait la politique du FMI.

    Les 200.000 emplois pour les jeunes que Lula avait promis n’ont pas vu le jour. En outre Lula joue localement un rôle impérialiste. Il aide à mener la guerre en Irak pour se procurer une petite place au conseil des Nations-Unies.

    Récemment, en réaction à la politique droitière du PT, un nouveau parti a vu le jour: le PSoL (Parti pour le Socialisme et la Liberté). Notre section au Brésil participe à la construction du PSoL dont les perspectives de croissance sont indubitables. Seul le programme est sur pied. Il comprend de fort accents révolutionnaires mais aussi des éléments de politique de réformisme keynésien. Mais ce n’est pas suffisant: l’action est nécessaire. Le débat interne porte aussi sur les statuts: il y a des propositions pour qu’ils soient très démocratiques. L’impact potentiel d’un parti de masse des travailleurs comme le Psol est important pour toute l’Amérique Latine. A ce jour, 20.000 militants ont pris part aux assemblées locales pour la fondation de ce nouveau parti.

    Le combat entre révolution et contre-révolution aujourd’hui à l’oeuvre en Amérique latine est d’une importance capitale à l’échelle du monde.

  • Contre la guerre, le racisme et le capitalisme

    Résistance Internationale

    LE 1ER SEPTEMBRE n’annonce pas seulement une nouvelle année scolaire, mais aussi une nouvelle année de travail politique pour Résistance Internationale. Résistance Internationale poursuit son activité dans les écoles sur base de trois piliers : antiguerre, antiracisme et anticapitalisme.

    Jasper Rommel

    ANTIGUERRE

    Les conditions de vie en Irak se détériorent chaque jour. La croissance de la résistance a contraint Bush à donner la «souveraineté» irakienne au gouvernement transitoire d’Allawi. Mais ce dernier n’est qu’une façade. Le gouvernement irakien n’est ni plus ni moins un gouvernement fantoche de l’impérialisme américain. La résistance contre l’occupation s’intensifie; à présent, les installations pétrolières sont également visées par les attentats.

    C’est pourquoi la popularité de Bush baisse à vue d’oeil dans son propre pays. Il lui reste deux choix: soit conserver le gouvernement fantoche, ce qui signifierait que davantage de troupes devraient être envoyées en Irak, soit se retirer et abandonner l’Irak à son sort. Cela ferait vraiment perdre la face aux Etats-Unis et plongerait le pays dans un chaos encore plus profond.

    Quoi qu’il advienne, une chose est sûre: les Etats-Unis ne sont pas invincibles. Ils peuvent vaincre un régime dictatorial avec leur supériorité militaire, mais ne peuvent pas imposer leur volonté contre la résistance massive d’une population.

    Résistance Internationale a toujours joué un rôle important dans les mouvements antiguerre. Par la constitution de comités antiguerre dans les écoles et nos mobilisations massives pour le Jour X, nous sommes parvenus à attirer des milliers de jeunes dans la rue.

    Pour le moment, le mouvement antiguerre en Europe ne sait pas bien sur quelle base il peut agir. Nous pensons qu’il est toujours nécessaire de continuer la discussion sur une alternative anti-capitaliste. Le capitalisme sans guerre est d’ailleurs une utopie. Ceci a été clairement démontré au Vietnam, en Irak, au Kosovo et en Afghanistan.

    ANTIRACISME

    Avec les derniers résultats électoraux, le mouvement antiraciste reçoit un nouveau coup. Cela, nous l’avons bien ressenti avec Blokbuster et Résistance Internationale. Nous pensons que la progression du FN et du Vlaams Blok ne peut pas être stoppée avec de simples campagnes moralistes contre le racisme.

    La raison pour laquelle beaucoup de travailleurs et de jeunes votent pour le FN est qu’ils sont confrontés à toute sorte de problèmes sociaux: chômage, jobs intérim mal rémunérés, pénurie de logements… Il est clair qu’aucun parti traditionnel n’offre de solution à cela. Mais le FN n’en a pas non plus: il se propose de faire travailler les gens plus longtemps, de supprimer les prépensions et de s’attaquer aux syndicats. Nous opposons à cela le slogan: “Du travail, pas de racisme!”

    ANTICAPITALISME

    Malcolm X disait: «On ne peut avoir de capitalisme sans racisme.» Jaurès, socialiste français, expliquait: «Le capitalisme porte en lui la guerre, tout comme la nuée porte en elle l’orage.»

    Avec Résistance Internationale, nous voulons intervenir dans les mouvements antiguerre et antiracistes pour apporter une alternative socialiste au chaos capitaliste. Pour nous, c’est le capitalisme qui engendre la militarisation, le racisme, la pauvreté, etc. Il est vain de s’attaquer aux conséquences du capitalisme si on ne lutte pas contre le capitalisme lui-même. Nous vous appelons à lutter ensemble contre le racisme et la guerre sur base d’une perspective anticapitaliste et socialiste. Rejoignez-nous!

  • Un aperçu de notre Université d’été

    Comité pour une Internationale Ouvrière

    LA FIN du mois de juillet, plus de 350 militants venus de nombreux pays se sont réunis à Gand pour assister à l’université d’été annuelle du CIO. A travers les nombreuses discussions animées, les camarades ont pu ainsi partager leurs expériences et leurs idées, et à partir de notre analyse de la situation mondiale nos perspectives furent mises en avant. La séance plénière où étaient présentés les compte-rendus de notre travail politique sur les différents continents a renforcé l’enthousiasme pour la construction future du CIO. Voici un court aperçu des interventions les plus significatives.

    Laurent Grandgaignage

    Les rapports de nos sections du Nigéria, du Pakistan, du Brésil et de la CEI ont montré l’importance de notre travail dans le monde néo-colonial et l’ex-URSS. Au Nigéria, nous avons joué un rôle-clé dans la mobilisation pour les grèves contre l’augmentation des prix du combustible, et, de manière plus large, contre la politique néo-libérale du gouvernement. Malgré les moyens restreints et la répression policière, nous parvenons quand même à organiser des jeunes et des travailleurs dans les écoles, les lieux de travail et les quartiers pauvres. En Asie, nos camarades pakistanais fournissent un travail important au sein des syndicats des chemins de fer, de la poste et du secteur de la téléphonie, pour organiser la résistance contre la vague de privatisation du gouvernement et sa tentative de casser les syndicats. La situation instable sur le continent latinoaméricain amène à une profonde radicalisation de la population laborieuse. En réaction à la faillite de la politique du PT brésilien, un nouveau «Parti pour le Socialisme et la Liberté» a été fondé (voir article page 6), au sein duquel notre organisation joue également un rôle important.

    En Europe aussi, où les attaques néo-libérales sont à la mode, la classe ouvrière et la jeunesse se mettent en action. En Tchéquie nous avons initié la lutte contre la privatisation des logements sociaux. En dépit des faibles forces que nous avons sur place, la campagne fut un succès: nous pouvons à présent compter sur une dizaine d’habitants qui s’activent et s’organisent dans cette lutte. Aux Pays-Bas et en Autriche, nous menons des campagnes antiracistes et antifascistes pour attirer les jeunes radicalisés. La formation de nouveaux membres permet aux plus petites sections de démarrer des activités régionales et locales, afin de construire une organisation nationale solide.

    Sur le plan électoral nous avons également réalisé de belles avancées. Lors des élections européennes en Irlande du Sud nous avons obtenu 5,5% des voix à Dublin ainsi que 4 conseillers communaux. En Angleterre et aux Pays de Galle, il y avaient 48 candidats sur nos listes pour les élections locales: dans un tiers des régions nous avons récolté plus de 10%. En ex-Allemagne de l’Est où nous sommes intervenus dans les mouvements de masse contre l’Agenda 2010 de Schröder et avons mené une action contre l’allongement du temps de travail, notre première conseillère communale a été élue à Rostock. L’intervention de notre section française dans les actions de grève locales et nationales apparaît aussi dans les résultats électoraux locaux. Abstraction faite de ce succès, notre participation électorale est principalement bénéfique pour le renforcement de nos sections. En Suède, par exemple, l’establishment a reçu une grosse claque suite à la perte du référendum sur l’euro. Grâce à notre campagne qui stigmatise la politique d’austérité en Europe, nous nous renforçons et pouvons développer notre influence dans de nouvelles régions.

    Là où le CIO a des membres à l’intérieur des syndicats, ils mènent une lutte combative. En Angleterre et aux Pays de Galles, nous avons 19 militants élus dans les directions nationales de différents syndicats. A partir du plus gros syndicat de fonctionnaires, nous organisons l’offensive contre le gouvernement Blair et son plan de licenciement de 100.000 fonctionnaires. Le CIO appelle à un syndicalisme démocratique et militant. Cette initiative est confirmée en Irlande du Nord par deux importants leaders syndicaux des pompiers qui ont rejoint le Socialist Party. En Ecosse, nous nous battons côte à côte avec des puéricultrices sous-payées pour de meilleures conditions salariales. Nous avons aussi mis sur pied des comités de soutien qui ont appelé à la solidarité entre parents et le personnel. Après 14 semaines de grève, des concessions ont été arrachées. Il est également important pour nous d’impliquer des jeunes au travers du travail syndical. Après de nombreux de piquets de grève et six manifestations, notre campagne de jeunes en Australie en faveur des droits des travailleurs a fait plié la direction d’une multinationale. L’entreprise a été contrainte d’indemniser le travail supplémentaire et de payer en plus le travail de nuit. Aux Etats-Unis, notre opposition à l’intérieur du syndicat des services publics s’est attelée à faire introduire une résolution qui condamne la politique guerrière de Bush et exige le rapatriement immédiat des troupes.

    A partir de perspectives politiques correctes que toutes les sections du CIO se sont échangées, nous sommes en mesure, avec nos idées, d’atteindre les nouvelles générations de jeunes et de travailleurs. A travers nos campagnes et en prenant part à la lutte de classes grandissante, le CIO montre la voie à suivre pour organiser les travailleurs sur tous les continents de la planète.

  • La révolution: un mouvement de masse conscient

    La lutte des classes est le moteur de l’histoire

    L’HOMME, DEPUIS la nuit des temps, par la combinaison de qualités qui lui sont propre, a cherché à diminuer l’emprise des conditions naturelles qui l’entouraient afin d’améliorer ses conditions de vie. Sa socialisation a permit la communication par la parole, son cerveau s’est développé, ses mains lui ont servi progressivement à fabriquer des outils.

    Vincent Devaux

    Dans un premier temps, ceux-ci lui permirent d’améliorer son quotidien (lances et arcs pour ramener plus de nourriture), puis de produire par lui-même ce que la nature ne lui fournissait plus en suffisance (naissance de l’élevage et de l’agriculture). Petit à petit, une division du travail a diversifié et augmenté les richesses produites et a donné naissance aux rapports marchands.

    L’appropriation de moyens de productions et l’accaparement des richesses par une minorité a trouvé sa justification au travers de la magie, la religion,… Dès lors, la société s’est divisée en classes luttant chacune pour ses intérêts. La classe exploitée cherche toujours à s’affranchir de l’oppression de la classe dominante (révolte de Spartacus en 73 avant J.C., les jacqueries et autres révoltes paysannes au moyen-âge, la Révolution française, …). Cette dernière, pour maintenir sa domination, a besoin d’un corps armé: l’Etat.

    La structure de la société est le reflet des relations sociales dans la production et du niveau technologique (outils, machines). Par les découvertes successives et leurs implications dans la production, ces rapports changent, et les anciennes structures deviennent un frein au développement de la société (par l’invention de la machine à vapeur par exemple). L’ancienne classe dominante en déclin cherche à garder ses privilèges et son pouvoir (elle joue dès lors un rôle réactionnaire) tandis que la nouvelle classe montante, en cherchant à s’émanciper, joue un rôle progressiste; la révolution est à ce moment une nécessité historique

    Vous avez dit “Démocratie” ?

    La démocratie parlementaire constitue chez nous la forme de l’Etat sous lequel le capitalisme s’épanouit tout en permettant à la bourgeoisie de justifier de manière déguisée sa domination sur les masses travailleuses. Fondamentalement, tout Etat n’est qu’un appareil d’oppression d’une classe sur une autre, et ce quel que soit la forme que prend cet Etat; monarchie, dictature militaire, démocratie parlementaire,… Contrairement à ce que la bourgeoisie voudrait nous faire croire, la démocratie n’est pas l’affaire de tous. Nous vivons dans une société de classes, et donc dans une démocratie de classes. Sous le capitalisme, c’est la bourgeoisie qui est la classe dominante et possède le pouvoir. Si l’Etat est une démocratie pour cette classe, elle est une dictature pour une autre : le prolétariat.

    Révolution ou coup d’État?

    Un coup d’Etat est la prise de pouvoir par une minorité qui ne possède pas l’appui actif de la majorité de la population, mais qui a le contrôle des armes. Souvent, l’impérialisme américain a aidé et aide encore, notamment en Amérique Latine, à la mise en place de dictatures réactionnaires sanglantes servant ses intérêts (ex: Pinochet en 1973 au Chili). Par la suppression des acquis tels que la liberté d’expression, des droits syndicaux, la bourgeoisie peut brutalement exploiter la classe ouvrière. Une révolution implique de grandes couches de la population aspirant à un changement, sa force tient dans le support actif de la majorité contre le régime oppresseur. La classe dirigeante, qui veut garder ses privilèges, discrédite le mouvement révolutionnaire en le présentant comme le fait de gens violents, comme une menace pour l’ordre publique, et fait son possible pour le réprimer. La classe exploitée doit donc s’organiser en armant le peuple afin de faire face à cette répression. La révolution russe de 1917 n’aurait pas été possible sans un parti révolutionnaire de masse (le parti bolchévique) parvenant à s’appuyer sur le prolétariat et la paysannerie et répondant aux aspirations de la majorité.

    Il faut tirer les leçons du passé Le peuple en armes

    Chili,Venezuela. Même combat?

    La période révolutionnaire au Chili (1970-1973) et la répression qui s’en suivit montre la responsabilité écrasante qu’eut Allende dans l’avènement de la dictature militaire sanglante de Pinochet. Après avoir été élu en 1970 à la tête de l’Unité Populaire (comprenant le PS, le PC et les radicaux), Allende commença par doubler les salaires les plus bas et repris la réforme agraire timidement ébauchée par son prédécesseur.

    En 71, il nationalisa les mines de cuivre. Les Etats-Unis voulurent en finir avec cette radicalisation qui existait au Chili. Pour la bourgeoisie, le masque de la démocratie peut tomber quand il s’agit de défendre ses profits. Aussi, une semaine après une manifestation à Santiago rassemblant 600.000 personnes en soutien à Allende et demandant les armes, le général Pinochet organisa un putsch et une répression féroce envers les syndicalistes, les militants politiques et les travailleurs. Si Allende avait armé les masses, le coup d’Etat aurait avorté.

    De même, le sort des travailleurs au Venezuela dépendra certainement des mesures que prendra ou pas l’actuel gouvernement. Hugo Chavez, élu démocratiquement en 1998, a déjà fait l’objet de deux tentatives de renversement. Il n’a dû son salut qu’aux mobilisations de masses des couches pauvres de la population qui se sont spontanément mises en action. Chavez, qui a introduit d’importantes réformes en faveur des plus pauvres, a appelé en avril 2004 à l’armement du peuple. Le danger est que Chavez fasse la même erreur qu’Allende en reportant l’armement effectif du peuple car la réaction va de nouveau tenter d’en finir avec le processus révolutionnaire en cours.

    Le terrorisme comme levier révolutionnaire?

    La fin du XIXe et le début du XXe ont vu l’émergence du terrorisme individuel comme moyen de changer la société. En Russie, un populiste russe du groupe Narodnaia Volia (La Volonté du Peuple) assassine en 1879 le gouverneur de Saint- Pétersbourg. Les «Narodnikiodniki», regroupant des intellectuels partisans d’un «communisme agraire», réussira, en 1881, à tuer le tsar Alexandre II. D’autres anarchistes en Europe posèrent des bombes dans des cafés, des théâtres, des trains. La pratique du terrorisme individuel qui ne s’en prend pas au système mais à des individus est vouée à l’échec. Elle fournit des prétextes pour renforcer la répression et isole le peuple de la lutte au lieu de l’organiser. Seul un mouvement de masse organisé peut renverser le capitalisme.

    La société socialiste

    La Commune de Paris (1871) et surtout la Révolution Russe (1917) sont deux exemples historiques où le prolétariat organisé a balayé l’ancienne classe dirigeante décadente et a abolit la propriété privée des moyens de productions dans le but conscient de marcher vers une société sans classe, c’est à dire une société communiste. Peut-on arriver du jour au lendemain à cette société? Non. Lénine, dans son livre l’Etat et la Révolution, met en avant la nécessité après l’abolition de l’Etat bourgeois de passer par le stade de «demi-état» s’éteignant progressivement jusqu’à l’obtention d’une société sans classe réalisant le principe «De chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins».

    L’expérience de la Commune de Paris en 1871

    Après que Napoléon III ait déclaré la guerre à la Prusse de Bismarck et que celle-ci ait envahit la France, le gouvernement de Thiers négocia traîtreusement le sort de Paris alors que la ville assiégée et affamée s’opposait à sa reddition et se révolta. La Garde Nationale, au centre de la révolte, élit un comité central préfigurant les soviets (conseils ouvriers) des révolutions russes de 1905 et 1917 avant d’organiser des élections et la défense de la ville. Après dix semaines de siège, Thiers repris le pouvoir et organisa une répression sanglante (50.000 morts).

    Marx, auteur du Manifeste du Parti Communiste, ne se contenta pas d’admirer l’héroïsme des communards «montant à l’assaut du ciel»; il en tira également les leçons. Dans ‘Guerre civile en France’, il cite et commente quelques décrets pris lors de cette première tentative de révolution prolétarienne – qui ont depuis été repris dans le programme des partis révolutionnaires:

  • La suppression de l’armée permanente et son remplacement par le peuple en arme
  • L’électivité et révocabilité de tous les responsables sans exceptions (police, justice, …)
  • Les responsables élus doivent percevoir le salaire moyen d’un travailleur.

    Ces mesures étaient prises pour briser l’ancien appareil d’état, nécessité permettant le passage d’une démocratie bourgeoise à une démocratie prolétarienne et qui, liées à la collectivisation des moyens de pro-ductions, devaient amener la transformation de la société du capitalisme au socialisme.

  • Les réponses des grands partis ne tiennent pas la route

    Il n’y a pas beaucoup d’obserteurs qui font le rapport entre le score de l’extrême droite du 13 juin et les problèmes liés au travail. Cela fait pourtant 25 ans que la bourgeoisie est à l’offensive sur ce front.

    Peter Delsing

    1975-’81: travail et capital sont en équilibre

    En 1975, la crise atteint la Belgique. Le chômage double quasiment: de 96.933 à 174.484. Frappés de plein fouet par la crise pétrolière, les patrons exigent la suppression de l’index qui adapte les salaires à la hausse des prix. La puissance des syndicats y fera obstacle pendant des années. Les grands mouvements de grève du début des années 70 toute l’Europe s’était radicalisée dans la foulée de Mai 68 avaient mis sous pression les bénéfices des entreprises. De 1970 à 1975, les salaires réels ont crû de 44%, la productivité «seulement» de 31%.

    La crise de surproduction était pourtant déjà annoncée. La hausse des salaires des années 60 et du début des années 70 n’avait pas empêché les investissements de croître énormément.

    A tel point que, à cause de la répartition inégale des richesses entre les capitalistes et le reste de la population, la croissance du marché ne pouvait plus suivre celle de la capacité de production.

    Dans un premier temps, le gouvernement cherche la parade dans une politique keynésienne: stimuler la demande. De 1974 au début des années 80, près de 200.000 emplois sont créés dans la fonction publique. On emprunte sans compter pour financer des «programmes d’embauche» et subsidier les industries en crise. Toutes ces mesures n’ont pourtant pas fait baisser le chômage. Elles n’ont fait que limiter les dégâts.

    La bourgeoisie a mis les pouvoirs publics à contribution pour faire face à la crise, ce qui a donné lieu à des déficits budgétaires galopants, une charge de la dette écrasante et de fortes hausses de prix. Tandis que le gouvernement faisait fonctionner la planche à billets, la production cessait d’être rentable: la phase d’expansion généralisée était terminée. Dans les années 60, la croissance économique réelle était de 4,8% en moyenne. Dans les années 70, c’était 3,4%. Dans les années 80, ce n’était plus que 2% malgré la forte croissance de la dette publique. Dans les années 90, elle est passée sous la barre des 2%. Depuis la crise économique de 2001 aux Etats-Unis, les chiffres de la croissance pour l’économie belge sont encore plus faibles.

    1982: l’offensive néo- néolibérale libérale

    C’est le gouvernement Martens V qui a donné le coup d’envoi de la politique d’austérité drastique en 1982. Dès le mois de février, les dirigeants syndicaux pliaient le genou. Le président de la CSC, Jef Houthuys, avait alors permis au gouvernement de dévaluer le Franc belge de 8,5% afin de stimuler la croissance et les exportations. Le pouvoir d’achat des travailleurs a durement accusé le coup.

    Pour achever de les prendre à la gorge, on a effectué plusieurs sauts d’index. De 1981 à 1985, les salaires réels baisseront de 13% à 21% selon les catégories!

    Comment le gouvernement comptet- il résorber le chômage? L’idée de départ est qu’il faut rétablir les profits et la compétitivité des entreprises. Dans cette logique, il faut comprimer les coûts salariaux pour diminuer les frais d’embauche. A côté des attaques directes comme les sauts d’index, il y a eu le plan Maribel de 1981: les cotisations «patronales» à la sécurité sociale faisaient pour la première fois l’objet d’une réduction généralisée. C’est une atteinte au salaire indirect des travailleurs qui doit couvrir le chômage, la maladie et la vieillesse. La politique néo-libérale signifie aussi une percée de la flexibilité au milieu des années 80: on fait table rase des limitations au temps partiel et et au travail en équipes, du congé du dimanche, de la durée maximale du temps de travail,…D’autres mesures contre le chômage étaient les programmes de mise à l’emploi: stages des jeunes, Cadre Spécial Temporaire, Troisième Circuit de Travail, Agents Contractuels Subventionnés,… Il s’agit de statuts subsidiés totalement ou partiellement par les pouvoirs publics.

    L’introduction de différents systèmes de prépension devait aussi contenir le chômage. Tous ces statuts continuent pourtant de dépendre des allocations de chômage.Tous ces cadeaux au patronat n’ont pas fait reculer le chômage. Même pendant le bref regain de croissance de 1986-89, le chômage réel est resté au même niveau (phénomène de la «croissance sans emploi»). Ceci alors que le gouvernement falsifie les chiffres en recourant aux suspensions du droit aux allocations (près de 110.000 exclusions temporaires ou définitives entre 1983 et 1985) ou en évacuant des statistiques les chômeurs âgés, les stages d’attente, les prépensionnés, les chômeurs à temps partiel contre leur gré, les pausescarrières,…

    Plusieurs de ces catégories continuent pourtant de dépendre des allocations de l’ONEm.Si le chômage n’a pas reculé, ces mesures n’ont cependant pas été un coup d’épée dans l’eau pour tout le monde. Les bénéfices des entreprises sont passés de 20 milliards de FB en 1980 à 169 milliards en 1987 (en valeur de 1980).

    La chute du stalinisme (’89- ’92) et ses effets sur le mouvement ouvrier

    L’offensive néo-libérale a été entamée par des politiciens ouvertement de droite : Verhofstadt, Martens, Thatcher, Reagan, etc. Après la chute du stalinisme et l’offensive idéologique de la bourgeoisie en faveur du marché libre, les dirigeants de la socialdémocratie, eux, n’ont pas hésité non plus à saisir cette occasion pour mener une politique antisociale.Dans le cadre de la réalisation des normes du Traité de Maestricht (1993), visant à introduire l’euro, le gouvernement belge ébaucha le Plan Global, un programme d’austérité sévère. Ce plan officialise le lien entre l’emploi et la baisse des ‘charges patronales à la sécurité sociale’. Cette recette s’est déjà avérée inefficace dans les années quatre-vingt. Le Plan Global comprenait les plans d’entreprise qui lient partage du travail, flexibilité et allègement des charges patronales.

    Mais, même lors du boom des années 90, les dépenses de la Sécurité Sociale ont continué à grimper. Entretemps, le taux de chômage n’a pas baissé. La politique d’austérité mise en place dès le début des années 80, comprenant la baisse des salaires réels et des allocations sociales, n’a fait qu’appauvrir le pouvoir d’achat et aggraver la crise de surproduction. A quelle situation était-on confronté à la fin des années 90 ? 35 pc des salariés avaient un statut flexible (travail de nuit, du soir, du week-end, en équipe).

    En 1998, 17,8% des salariés travaillaient à temps partiel (contre 3% en 1973). Seuls la moitié des embauches à temps plein étaient à durée indéterminée. Les entreprises avec 10% d’intérimaires sont devenues la règle. Entre 1993 et 1997, 130 mille personnes, surtout des femmes, ont été virées du chômage. Après 2001, une année de crise, le nombre de sansemplois (de toutes sortes) était supérieur à un million, soit 25% de la population active. En 1970, il n’y avait encore que 71.000 personnes sans emploi, soit 1,9%. La crise du capitalisme est devenue structurelle.

    L’Etat social actif (1999): bosser pour son allocation

    Avec le gouvernement arc-en-ciel, la mise au travail forcée – sous peine de perdre leur allocation – des chômeurs de longue durée et des minimexés est devenue la norme (ce processus avait déjà été inauguré par les emplois-Smet et les ALE). Il s’agit ainsi de veiller à ce qu’ils soient « disponibles sur le marché du travail » et à ce qu‘ils acquièrent une « discipline de travail ».

    On veut insuffler l’idée que les individus doivent faire un effort d’adaptation pour décrocher un emploi. Selon les statistiques du VDAB (l’organe de placement en Flandre) publiées en 2003, il y a 6 chômeurs pour chaque offre d’emploi.Le sommet européen de Lisbonne (2000), qui voulait faire de l’Europe la zone la plus compétitive du monde capitaliste d’ici 2010, fournira une nouvelle occasion d’imposer aux chômeurs n’importe quel emploi-bidon. Le taux d’activité doit augmenter pour pouvoir financer à terme le coût du vieillissement et maîtriser les dépenses de la sécurité sociale. Le but est de démanteler le système des prépensions et de jeter les chômeurs en pâture à un marché du travail répondant aux normes américaines de flexibilité et de coût salarial. Les entreprises devraient ainsi être incitées à investir davantage dans l’emploi dès que l’économie manifestera des signes de reprise. Cette politique ne fera qu’élargir le fossé entre riches et pauvres, comme aux Etats-Unis.

  • L’extrême droite sort grand vainqueur. Qu’est-ce que c’est et comment la combattre?

    L’extrême droite sort grand vainqueur

    Depuis les élections du 13 juin, la presse se répand en analyses de la victoire de l’extrême droite. Comment expliquer ce phénomène ? D’où tire-t-elle son succès et comment pouvons-nous la combattre ? Le MAS a acquis une longue tradition de mobilisations contre l’extrême droite à travers ses campagnes jeunes (Blokbuster) et ses organisations étudiantes (Actief Linkse Studenten/Etudiants de Gauche actifs). Nous ne prétendons pas détenir la vérité. Cet article se propose de donner notre vision des raisons du succès de l’extrême droite et de la façon dont on peut la combattre.

    Eric Byl

    Le Vlaams Blok plonge ses racines dans la collaboration lors de la Deuxième Guerre mondiale. Pendant plus de trente ans, il s’est attelé à construire une organisation de cadres, d’abord au sein du CVP jusqu’en 1954, ensuite au sein de la Volksunie jusqu’en 1970. Dès sa création en 1978, le parti disposait non seulement d’un cadre mais aussi de tout un réseau de connections. L’argent ne lui a jamais fait défaut. Il n’avait qu’à attendre que le contexte politique devienne favorable pour briser son isolement.

    Ce contexte existait depuis le début de la crise économique dans les années septante. A l’époque, le Blok devait toutefois compter avec des dirigeants syndicaux qui savaient encore organiser des actions collectives et avec des partis (le PSB et à partir de 1976 le PS et le SP) qui, s’ils collaboraient déjà avec le patronat, défendaient au moins en paroles les intérêts des travailleurs et plaidaient encore pour le socialisme.

    Du côté francophone, le FN – créé par Daniel Féret en 1985- s’il n’atteint pas le score du Vlaams Blok en Flandre, réussit quand même à doubler et tripler son score par apport aux régionales de 99.Et cela malgré le fait que le FN, contrairement au Blok, n’est pas présent sur le terrain et n’a pas un cadre organisé. Et également en dépit du fait que l’extrême droite est depuis de nombreuses années déchirée par des conflits de chapelles. Il ne faut pas sous-estimer les possibilités de croissance de l’extrême droite en wallonie. Le terreau est présent .

    Avant toute percée électorale, le Vlaams Blok a dû attendre la chute du Stalinisme dans le bloc de l’Est (1989-91). Depuis lors, tant le PS que le SP se sont soumis aux lois du marché libre et au néo-libéralisme. Des pans entiers du mouvement ouvrier se sont sentis exclus, non seulement par la société, mais aussi par tous les partis politiques, y compris le PS et le SP. C’était d’abord les chômeurs, puis les travailleurs intérimaires, ensuite ceux qui travaillent encore dans l’industrie et ils sont de plus en plus nombreux ceux qui ont jadis connu la sécurité d’emploi et qui souffrent aujourd’hui de mauvaises conditions de travail ou qui craignent pour leur emploi (La Poste et la SNCB).

    C’est la combinaison de la crise économique et de la politique antisociale, ainsi que le refus des dirigeants syndicaux de mobiliser et l’obstination du PS et du SP.a à exécuter loyalement la politique d’austérité, qui est à la base du succès de l’extrême droite.

    Le Flamand, un petit blanc apeuré ?

    Certains vont expliquer le résultat électoral du Blok par la psychologie des Flamands. "J’ai honte", "1 Flamand sur 4 est un blokker", etc… Nous comprenons évidemment ce type de réaction, mais elle est inadéquate. Nous n’avons pas plus à avoir honte qu’à être fiers d’être Flamands, Wallons, Bruxellois, immigrés ou quoi que ce soit d’autre. Si nous devons avoir honte de quelque chose, c’est de la politique antisociale, de l’exclusion, de la pauvreté et du chômage. Stigmatiser les victimes de cette politique ne nous avancera à rien, qu’il s’agisse d’immigrés ou qu’il s’agisse de Flamands.

    "C’est un dimanche noir de noir. Tous les Flamands devraient avoir honte", assène Etienne Vermeersch, professeur de philosophie morale à l’Université de Gand (RUG), qui était le philosophe-maison du SP.a dans un passé récent. De quelle autorité Vermeersch se prévaut-il pour parler ainsi? Qu’a-t-il fait pour stopper le Blok? Nous ne l’avons jamais vu à nos côtés lorsque nous menions l’action contre des débats avec le Vlaams Blok ou contre la présence de Roeland Raes, un idéologue révisionniste du Blok, au Conseil d’Administration de la RUG.

    Mais la Flandre n’est-elle pas une des régions les plus riches? Yves Desmet du quotidien De Morgen incrimine ce que l’économiste américain Galbraith nomme "le chauvinisme du bien-être"; plus les gens possèdent, plus il craignent de le perdre. En bref: pour Desmet, la Flandre va bien et si on vote quand-même pour le Blok, c’est que les Flamands sont des écureuils apeurés qui craignent de devoir céder une parcelle de leur bien-être. Si au lieu de parler pour lui-même, Desmet avait essayé de percevoir la signification sociétale de la formule de Galbraith, il aurait peut-être réalisé que le pays le plus riche au monde, les Etats-Unis, est en même temps le pays où le fossé entre riches et pauvres est le plus grand. Desmet aurait alors peut-être vu que le fossé entre riches et pauvres s’est aussi élargi en Europe et en Belgique. Qu’il y a donc des gens qui votent Vlaams Blok parce qu’ils se sentent exclus et d’autres qui votent Vlaams Blok parce qu’ils veulent protéger leurs biens contre ceux qui sont exclus.

    Walter Pauli du Morgen écrit que ça illustre la faillite de la lutte contre l’extrême droite. "On a tout essayé", dit-il, "seule une voie demeure inexplorée". Il se garde bien de l’écrire, mais la voie dont il parle est bien évidemment celle de prendre le Blok dans une coalition et de le brûler au pouvoir. Mais a-t-on vraiment tout essayé? Aucun parti traditionnel ne remet en cause la politique d’austérité néo-libérale qui lèse tant les travailleurs et leurs familles. Blokbuster, la campagne antifasciste du MAS, a toujours dû tout faire soi-même, a été mis sur le même pied que le Blok lui-même par les politiciens traditionnels, mais contrairement à ce dernier n’a pas reçu des millions d’argent public. Essayé? Nous l’avons fait, pas Pauli ni "le monde politique". Pauli conclut: "le droit de vote pour les immigrés était une erreur et il faut aussi rediscuter du cordon sanitaire".

    Tout est socio-économique dans la crise

    Nombre d’analyses pointent du doigt les bévues des excellences libérales pour expliquer le succès du Vlaams Blok. Les bévues libérales ont sans aucun doute joué un rôle important dans la défaite du VLD et du MR. Cette explication est pourtant insuffisante. Le cartel SP.a-Spirit était un modèle d’unité et a quand même perdu près de 4% par rapport à 2003. De plus, le rififi au VLD et au MR ne tombait pas du ciel. Les milieux patronaux voulaient que le gouvernement fasse avaler une politique d’austérité encore plus drastique à la population. Les libéraux devaient coûte que coûte afficher leur détermination. Ils ont pourtant été doublés sur leur droite par les ministres SP.a. Dans cette situation, des pontes libéraux ont essayé de marquer des points à titre individuel en sautant sur le dossier de l’heure sans se soucier des conséquences. Le cas d’Alain Destexhe est assez exemplatif à cet égard.

    Le débat sur le droit de vote des immigrés non-européens a été le principal facteur de dissensions chez les libéraux. Toutefois, là où le MR a su maintenir une unité de façade sous la férule de Louis Michel, le VLD s’est déchiré au grand jour. Si le SP.a a été le seul parti flamand à voter pour, il n’a pas su donner la réplique aux opposants. Il n’a pas su démasquer la politique de diviser pour régner du patronat ni replacer la nécessité des droits égaux entre Belges et immigrés dans le cadre de la lutte commune pour leurs droits. Résultat: les opposants au droit de vote ont monopolisé le débat. C’est trop facile de dire aujourd’hui que le droit de vote aux immigrés était une erreur. La seule erreur qui a été commise dans ce dossier, c’est le mutisme des partisans du droit de vote.

    Il ne fait pas de doute que l’élargissement de l’Europe ira de pair avec une régression au niveau des conditions de vie et de travail. Si le patronat en retirera de plantureux bénéfices, les travailleurs et leurs familles payeront la note. L’"unification européenne" n’a pourtant pas d’autre but. Le commissaire européen Bolkestein fait déjà circuler une proposition de libéralisation des services. Si sa directive passe, des Polonais et des Tchèques travailleront bientôt ici, non pas à un salaire belge, mais à un salaire d’Europe de l’est. Les patrons saisiront l’occasion pour exiger des travailleurs belges de nouvelles concessions en termes de salaires et de conditions de travail. Le PS et le SP.a auraient dû plaider pour la nécessité d’une lutte unifiée des Belges et des immigrés contre le projet européen antisocial. Quiconque divise les travailleurs belges et immigrés en leur refusant l’égalité des droits ne fait que jouer le jeu du patronat européen. Si le SP.a a préféré se taire, c’est parce qu’il est d’accord avec Bolkestein sur le fond même s’il aurait sans doute souhaité plus de doigté dans la forme.

    La faute de la presse?

    Les partis traditionnels ont tout fait pour imposer le silence à leurs concurrents. Du côté francophone, il s’en est fallu de peu que tous les petits partis voient leurs listes invalidées pour le scrutin européen. Ils n’ont finalement pas osé aller jusque là, c’eût sans doute été trop flagrant. Nous avons dû faire une croix sur les médias, qu’ils soient publics ou commerciaux. Qu’on ne vienne plus nous dire que la presse commerciale serait "moins partisane" que les médias publics. Le MAS a dû faire des pieds et des mains pour avoir droit à deux courtes tribunes sur les ondes de la RTBF, l’une en radio, l’autre en télévision à une heure tardive. Plutôt que de permettre à des partis comme le MAS ou le PTB+ de s’exprimer, les médias francophones ont préféré se livrer à une campagne tapageuse contre l’extrême droite. Celle-ci a pu ainsi apparaître comme la seule alternative crédible. Les médias ont sans aucun doute une lourde responsabilité dans le succès du FN comme du Vlaams Blok.

    La question nationale

    A l’exception de Groen!, tous les partis flamands plaident pour des baisses d’impôt… afin de stimuler l’économie et de lutter contre le chômage. Seul Groen! défend l’idée que ces impôts sont nécessaires pour financer les soins de santé et les services à la collectivité. Rares pourtant sont ceux qui croient encore les Verts après leur participation à Verhofstadt I et la kyrielle de taxes écologiques qui s’en sont suivies. Les Verts sont perçus comme des partis qui veulent responsabiliser les petites gens en les accablant de taxes tout en épargnant les gros pollueurs industriels qui tirent à chaque fois leur épingle du jeu.

    De tous les partis flamands, seul le Vlaams Blok a fait ses comptes. Il veut en finir avec les milliards de transfert nord-sud, 10 milliards d’euros paraît-il, et utiliser cet argent pour une politique "sociale" flamande. Les partis traditionnels ont beau promettre des baisses d’impôt, ils ne disent pas où ils vont aller chercher l’argent. Tout au plus se contentent-ils d’assurer qu’il y a assez d’argent en caisse. Mais si c’est vrai, comment se fait-il qu’il y ait de si longues files d’attente dans les institutions de soin, les logements sociaux et que les bâtiments scolaires tombent en ruine?

    Rares sont ceux qui sont dupes des promesses de Verhofstadt et du Ministre-Président flamand sortant Bart Somers. La grande majorité des Flamands craignent la hausse du chômage et de la pauvreté. Ils sont évidemment pour un certain degré de solidarité, mais, du fait que le Blok accuse la Wallonie d’en abuser et que les autres partis flamands se taisent là-dessus, voire abondent dans le même sens, nombre d’entre eux deviennent réceptifs à l’idée que les Flamands doivent d’abord penser à eux-mêmes.

    Il est pourtant facile de répondre à l’argument du Vlaams Blok que chaque ménage flamand transfère une petite voiture familiale (400.000 fr) par an à la Wallonie. La Wallonie a été pendant des décennies le creuset de toute la richesse en Belgique. L’industrie lourde n’en a pas moins exigé un lourd tribut avec beaucoup plus de maladies professionnelles qu’en Flandre. La crise de l’industrie lourde a durement frappé la région qui connaît des taux de pauvreté et de chômage qu’on a peine à imaginer en Flandre. Le Blok utilise les travailleurs wallons et leurs familles comme des boucs-émissaires. Il ne dit pas un mot sur la voiture de luxe que chaque famille belge paye par an aux patrons. Ceux-ci empochent chaque année 25 milliards d’euros de bénéfices, bien plus que les 10 milliards de transfert. Le Blok tait aussi les 15 milliards d’intérêts que nous payons chaque année en remboursement de la dette publique, laquelle n’est que la conséquence des cadeaux plantureux qui ont été faits aux patrons sous forme de baisses de charges et d’impôts. Enfin, le Blok ne dit rien des 20 milliards de fraude fiscale qui minent notre économie année après année. On cherchera en vain dans le programme du Vlaams Blok le rétablissement des pouvoirs de police judiciaire de l’Inspection spéciale des Impôts.

    La question flamande a sans aucun doute joué un rôle important dans la construction du Blok. Tous les sondages démontrent pourtant que ça ne joue pas un rôle significatif dans son succès électoral actuel. Cela se reflète d’ailleurs dans la rhétorique du Blok. Le slogan "que la Belgique crève" a été mis en sourdine, il n’y a plus qu’au CD&V qu’on parle encore d’un big bang communautaire. Le Blok mesure ses propos:

    S’il n’y a pas de réponse collective à la crise, le bras de fer sur la clé de répartition des déficits reprendra de plus belle. Dans ce cas, les contradictions nationales éclateront de nouveau.

    Rompre le cordon sanitaire?

    Maintenant que le Blok est devenu le deuxième parti flamand faute de réponse collective à la crise et à cause de la politique d’austérité néo-libérale, des voix se font entendre, non pas pour remettre en cause cette politique, mais bien pour "brûler" le Blok dans une participation gouvernementale. On espère ainsi obtenir le même résultat qu’avec le FPÖ de Haider en Autriche. Lors des dernières élections, le FPÖ y est passé de 23% à 6%.

    Le Blok se verrait bien au gouvernement flamand. Il est même prêt à soutenir depuis les bancs de l’opposition un gouvernement minoritaire du CD&V-NV-A, éventuellement flanqué du VLD. Le MAS considère le Blok comme un parti néo-fasciste. Néo parce que les conditions sociales d’aujourd’hui sont totalement différentes de celles des années trente, fasciste parce que la direction et les cadres du Blok n’ont pas renoncé à briser les organisations du mouvement ouvrier en mobilisant contre lui les groupes moyens de la société et les éléments déclassés de la classe ouvrière, c’est-à-dire des travailleurs que le chômage et la misère ont rendus étrangers à leur propre classe.

    Le Blok sera obligé de faire des concessions sous la pression de sa base électorale et de carriéristes qui estiment qu’il est temps de rompre avec le passé. Enfin, les voix pour le Blok ne sont pas un vote de soutien à son programme fasciste, mais principalement un vote de protestation. La nature d’un parti, y compris celle du Blok, peut changer. Il semble que la condamnation en justice du parti ait donné à sa direction l’occasion de donner au Blok un visage plus acceptable en le profilant comme un "parti conservateur de droite". Même dans ce cas, le Blok continuera d’abriter en son sein toutes sortes de néo-fascistes.

    Quoi qu’il en soit, la Belgique n’est pas l’Autriche et le Vlaams Blok n’est pas le FPÖ. Les partis traditionnels réalisent qu’ils doivent faire quelque chose, mais personne n’est prêt pour le moment à signer un contrat de mariage avec le Blok. Un meurtre, un grave fait de drogue, un membre en vue qui bat sa femme publiquement et devant ses enfants, il s’en sera passé des choses en pleine campagne électorale. Une candidate d’ouverture, débauchée à la NV-A, qui reconnaît ouvertement être à la tête d’un bureau d’escorte, un joli nom pour une agence de prostituées de luxe, ce n’est pas le genre de choses sur lesquelles les partis traditionnels peuvent fermer les yeux pour entrer dans une coalition. Les points de vue du Blok sur la Belgique et la Maison royale ne trouveront guère plus de succès auprès de l’establishment. De plus, il n’est pas du tout certain que le Blok prendra le même chemin que le FPÖ en cas de participation gouvernementale.

    Il en faudra donc plus avant que l’establishment n’accueille le Vlaams Blok dans ses rangs. Tant que la bourgeoisie et ses laquais politiques auront la politique néo-libérale pour seule réponse à la crise et tant que les syndicats refuseront de mobiliser massivement les travailleurs, l’extrême droite se remettra toujours de défaites temporaires comme celle du FPÖ. La bourgeoisie sera placée tôt ou tard devant un dilemme: ou bien rompre le cordon sanitaire, ou bien abandonner la politique d’austérité. Si c’est ça le choix, alors les jours du cordon sanitaire sont comptés. Il y aura peut-être des coalitions locales avec le Blok après les élections communales de 2006. Il n’y a qu’une seule réponse sensée au Blok, c’est la création d’une véritable alternative de gauche qui joue résolument la carte de la lutte collective pour changer la société.

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