Tag: Espagne

  • Manifestation contre l’avortement: Défendons les droits des femmes, non à la réaction!

    Tout comme l’an dernier, un appel à manifester contre l’avortement a été lancé pour ce 27 mars. En 2010, cette "marche pour la vie" avait notamment pu compter sur le soutien de diverses organisations d’extrême-droite telles que "Belgique et Chrétienté", "Nation" et le Vlaams Belang. Une contre-manifestation se tiendra également ce jour-là à l’appel de la fédération laïque des centres de planning familial (FLCPF).

    POUR LE DROIT DE TOUTES A DISPOSER DE LEUR CORPS! Contre-manifestation ce 27 mars, à 15h, place d’Espagne à Bruxelles

    L’an dernier, la manifestation contre l’avortement qui portait le nom «Pour la vie» avait rassemblé entre 500 et 1000 personnes (1.600 selon Le Soir!). En Europe, le droit à l’avortement n’est toujours pas reconnu en Irlande, à Chypre, à Malte et en Pologne. La politique du Vatican concernant les droits des femmes, et d’autres sujets de société comme les droits des LGBT, a pris un tournant encore plus réactionnaire ces dernières années dû entre autres à l’élection de Benoit XVI qui représente l’aile conservatrice de l’Eglise catholique. En Belgique, la nomination de Mgr Léonard est une conséquence logique de l’idéologie prônée par l’Eglise. Ce dernier a d’ailleurs ouvertement soutenu la manifestation contre l’avortement de l’année dernière, et y était présent.

    Avec la crise, l’augmentation de la pauvreté et de l’insécurité socio-économique pousse de nombreux travailleurs à rechercher une certaine sécurité dans la famille. Depuis les années ‘80, la privatisation et le sous-financement chronique des services publics a forcé de plus en plus de familles à prendre en charge une plus grande part des tâches domestiques comme l’éducation des enfants, les soins de santé… Les premières personnes touchées sont les femmes et les jeunes. Les valeurs familiales traditionnelles telles que le mariage et le retour de la femme au foyer sont des idées défendues depuis des dizaines d’années par les organisations fascistes et catholiques conservatrices.

    Aujourd’hui, ces dernières profitent des conséquences de la crise pour remettre à l’ordre du jour leur idéologie sexiste et nauséabonde qu’elles diffusent parmi les travailleurs et leur famille. Contre ce retour galopant des idées d’extrême-droite et face au silence des partis traditionnels, nous devons nous organiser. Le PSL se bat activement contre le sexisme, le fascisme et toute autre forme d’oppression contre les travailleurs. Nous luttons pour, entre autres, un emploi de qualité pour tous et toutes, un salaire étudiant, des services publics gratuits et de qualité et d’autres revendications qui permettent aux femmes et jeunes de décider eux-mêmes de leur vie.

    Tout en défendant le droit à l’avortement – personne ne doit avoir le pouvoir de décider à la place de la femme si elle veut des enfants ou pas – nous pensons aussi que beaucoup de femmes qui se font avorter ne le feraient pas si leur situation financière était meilleure.

    Nous revendiquons un véritable choix pour les femmes, et donc le maintien du droit à l’avortement et de préférence même un allongement du temps pendant lequel on peut légalement faire un avortement. Mais nous revendiquons également le droit à un revenu stable et suffisant pour vivre confortablement par une augmentation des salaires et de toutes les allocations sociales. A cela doivent être combinées des allocations familiales couvrant réellement le coût d’un enfant et des services publics permettant aux femmes de combiner travail et famille. Ce programme doit garantir qu’aucune femme ne se fasse avorter pour des raisons principalement financières.

    • STOP AUX IDEES REACTONNAIRES! POUR LE DROIT DE TOUTES A DISPOSER DE LEUR CORPS! Maintien du droit à l’avortement et allongement du temps durant lequel on peut légalement se faire avorter!

    L’avortement n’est bien entendu pas une partie de plaisir, et c’est pourquoi nous joignons cette revendication à d’autres:

    • Avoir un enfant ne doit pas être un luxe ou un sacrifice financier. Pour un logement et un revenu décents pour tous!
    • Les moyens de contraception sont encore méconnus et trop chers, pour l’accès à une contraception gratuite et de qualité pour tous!
    • Le droit à avoir des enfants doit être aussi défendu: plus de moyens pour la recherche et pour la gratuité de l’assistance artificielle!
  • Un gouvernement pour s’en prendre aux banques et aux spéculateurs, pas aux travailleurs et à leurs familles!

    Manifestation «Shame», record du monde du pays sans gouvernement,… néerlandophones et francophones expriment leur mécontentement face à l’impasse politique. A part la surenchère communautaire, les politiciens traditionnels n’ont pas de solution. A travers toute l’Europe, les gouvernements essaient de faire payer les conséquences de la crise par les travailleurs et leurs familles, par les pensionnés et les chômeurs, qui ne sont pourtant pas les responsables: la cause de la crise réside dans la course aux profits des entreprises et la spéculation des banques.

    Tract du PSL/LSP-Bruxelles

    Nos politiciens se disputent sur le communautaire, mais sont tous d’accord sur l’austérité

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    AUSTERITE EN EUROPE :

    GRANDE-BRETAGNE

    • Minervals des unifs à 10.600€
    • 500.000 fonctionnaires licenciés
    • 19% de coups budgétaires dans tous les services publics

    ESPAGNE

    • TVA de 16% à 18%
    • 5% perte de salaire secteur public
    • Pensions à 67 ans

    IRLANDE

    • Salaire minimum –11%
    • Chute de 25% du niveau de vie
    • 1.500 Irlandais émigrent chaque semaine pour échapper au chômage

    Après l’Irlande, la Belgique est le pays qui a dépensé le plus par habitant pour sauver les banques!

    L’AUSTERITE BIENTOT CHEZ NOUS AUSSI ?

    Tout le débat concernant la réforme d’Etat concerne essentiellement les moyens pour mener l’austerité le plus efficacement en Belgique. De la NVA jusqu’au PS, tous sont d’accord que ce sont les travailleurs et leurs familles qui doivent payer la crise. Les régionalisations serviront à diviser les assainissements pour mieux diviser la résistance.

    Ils ont tous été d’accord avec le projet initial d’AIP (accord interprofessionel). Pour eux, les travailleurs ne doivent pas recevoir une partie de la croissance économique actuelle et doivent accepter le recul social. Par contre ils ont tous été d’accord pour sauver les profits des banques avec l’argent de la colléctivité (20 milliards € et encore 80 milliards € de garanties). Ce montant, ils sont aussi tous d’accord d’aller le récupérer en imposant des coupes budgétaires dans les prochaines années: le plus grand plan d’austérité jamais vu en Belgique! Ces coupes budgétaires sont impossibles sans un lourde attaque contre nos pensions, notre enseignement, nos soins de santé et nos salaires.

    Partageons les richesses au lieu de diviser les travailleurs !

    Aujourd’hui, déjà 15% de la population belge vit sous le seuil de pauvreté, un bruxellois sur quatre est sans emploi, alors que les actionnaires renouent avec les profits exorbitants! Pour eux le luxe, pour nous la misère!

    Il nous faut un plan d’action national des syndicats pour commencer dès maintenant à organiser la riposte! Nous pensons que ceci doit se faire sur base d’une programme offensif qui n’accepte non seulement aucune attaque contre notre niveau de vie et notre sécurité sociale, mais qui revendique aussi des solutions pour les problèmes de la majorité de la population : chômage, bas salaires, contrats précaires, loyers chers, services publics mal gérés, manques dans les soins de santé, …

    • Stop à la détérioration de notre pouvoir d’achat! Augmentations des salaires et des allocations!
    • Partageons l’emploi disponible en diminuant le temps de travail sans pertes de salaire et avec embauches compensatoires pour s’attaquer au chômage et aux mauvaises conditions de travail!
    • Nationalisation de tout le secteur bancaire pour financer publiquement les besoins réels : logements sociaux, soins de santé, enseignement,…

    “ Une alternative unitaire à gauche d’Ecolo et du PS ”

    Aucun parti représenté au Parlement ne représente les intérêts de tous les travailleurs et de leurs familles. Le PSL/LSP est impliqué dès le départdans la création du Front des Gauches en mai 2010, une alliance de gauche qui rassemble six organisations (PC-PSL/LSP-LCR-PH-CAP-V!) et des militants syndicaux ou associatifs.

    Le Front des Gauches veut construire “une alternative qui refuse que les crises – financière, sociale, écologique – soient payées par les victimes et non par les véritables responsables capitalistes: patrons, gouvernements et financiers”. Cette alternative doit se contruire non seulement dans les élections mais aussi dans les luttes.

    Avec le PSL/LSP, nous défendons une alternative socialiste à cette crise du capitalisme : une société démocratique où la production est orientée vers les besoins de la population et non dictée par les profits de quelques-uns.

    Des loyers abordables! Plus de logements sociaux publics!

    Crise du Logement :

    BRUXELLES

    • 36.687 familles sont sur des listes d’attente alors qu’il n’y a que 35.946 logement sociaux.
    • plus de la moitié de la population a droit à un logement social mais à peine 8% des habitants voient ce droit satisfait.
    • les 5 dernières années, la population s’est accrue de plus de 10%, et dans les 20 ans à venir, on attend encore 200.000 Bruxellois de plus.
    • pour un appartement d’une chambre le loyer moyen est de 513 €, pour trois chambres on doit déjà 831 €.
    • un appartement sur dix à Bruxelles n’a pas de toilette ni de salle de bain, seulement 62% des appartements disposent de leur propre salle de bain et du chauffage central.

    PERIPHERIE

    • coût moyen pour une maison dans la périphérie : 235.000€, comparé à 185.000€ dans la reste de la Flandre.
    • seulement 7.000 logements sociaux dans les communes à facilités et 3.000 familles sur des listes d’attentes.

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    Le manque de logements sociaux est dramatique: depuis fin 2009, dans la Région de Bruxelles Capitale, il y a plus de familles sur liste d’attente pour un logement social qu’il y a de familles qui en ont un. La croissance de la population implique en plus 11% de croissance sur les listes d’attente. Cette pénurie stimule des prix de loyers exorbitants sur le marché privé. En moyenne, une famille bruxelloise consacre plus de 30% de son budget pour le logement. Un cadre favorable aux affaires des promoteurs immobiliers et des “marchands de sommeil”, comme nous l’a rappelé le récent scandale qui a touche une échevine de Saint-Josse (PS).

    Ceux qui veulent se tourner vers la Périphérie n’y trouvent pas de solution : les prix y sont en moyenne encore plus élevés… Pour nous, ceci est la véritable crise BHV : néerlandophones ou francophones, Bruxellois ou habitants de la périphérie, nous faisons tous face à un manque de logements sociaux et des loyers beaucoup trop élevés!

    Le gouvernement Picqué promet beaucoup, mais ne fait rien!

    Malgré cette crise de logement dramatique, le gouvernement de la Région de Bruxelles Capitale ne fait à peu près rien. Entre 2000 et 2009, seulement 338 nouveaux logements sociaux ont été construits dans toute la Région! Dans sa première législature, le gouvernement Picqué n’a construit que 20 nouveaux logements sociaux par année! Avec la coalition olivier (PS-Cdh-Ecolo) il faudrait plus de 1830 années pour donner un logement à chaque famille en attente. En 2010, tous les partis ont promis de faire mieux, mais ils ne sont pas arrivés plus loin que des estimations et des promesses… Le PSL/LSP défend la construction de 20.000 logements sociaux publics par an afin de résoudre le problème en deux ou trois années à Bruxelles.

    Anja Deschoemacker

    “Les partis traditionnels, francophones et néelandophones, battent le tambour communautaire pour masquer qu’ils n’ont pas de solution contre les pénuries toujours plus grandes sur tous les plans, que ce soit au niveau du logement, de l’emploi, de l’enseignement, des soins de santé,… que leur politique a engendré. La surenchère communautaire sert à diviser pour régner afin de nous faire payer leur crise. Toutes les conquètes sociales des travailleurs ont été obtenues par une lutte unifiée sur le plan national. Seule la classe des travailleurs en Wallonie, en Flandres et à Bruxelles, unie en un mouvement combatif, peut empêcher l’austérité. Ce combat doit également être mené sur le plan politique. Un nouveau parti pour et par les travailleurs est plus que jamais nécessaire!’’

    Anja Deschoemacker habite à Saint-Gilles et était tête de liste de la liste bilingue du Front des Gauches à Bruxelles-Hal-Vilvorde lors des élections de 2010. Elle est l’auteur du livre: La question nationale en Belgique – une réponse des travailleurs est nécessaire.

    Dimanche 13 mars à 10h30

    Anja Deschoemacker sera en débat avec des syndicalistes régulièrement confrontés à la question communautaire qui viendront témoigner de la façon dont ils se comportent en réaction. Levi Sollie est délégué à Bayer pour la Centrale Générale de la FGTB. Karim Brikci est délégué CGSP à l’hôpital public Brugmann à Bruxelles, où tant le personnel que les patients sont francophones, néerlandophones, ou ont une autre langue maternelle. Yves Cappelle est délégué SETCa à Steria Benelux, et membre de la section bilingue du SETCa-BBTK à Bruxelles-Hal-Vilvorde. Wouter Gysen est délégué CGSP à la SNCB, où l’unité des deux côtés de la frontière linguistique est une condition cruciale pour pouvoir contrer les attaques de la direction contre le statut et les conditions de travail.

    Socialisme 2011 se déroulera le 12 et le 13 mars au centre “De Kriekelaar’’ rue Gallait n°86, 1030 Schaarbeek. Un Baby-sitting sera organisé. Des snacks et des repas chauds seront disponibles à la cafétéria à prix démocratiques.

    Les inscriptions pour Socialisme 2011 via info@socialisme.be ou au 02/345 61 81

    Prévente: (n° de compte: 001-2260393-78) Week-end entier: 10€ non salariés / 15€ pour les salariés (Une journée: 6€ / 8€).

    Sur place: Week-end entier: 15€ non salariés / 20€ pour les salariés. (Une journée: 7€ / 10€)

  • La jeunesse européenne en résistance contre l’austérité. A nous maintenant…

    Irlande, Espagne, Italie, Grande-Bretagne, France, Autriche,… dans tous ces pays, des protestations ont eu lieu ces 12 derniers mois contre les coupes budgétaires dans l’enseignement. Dans quelques cas, ces mouvements ont directement abouti à des protestations anti-gouvernementales. Fil rouge remarquable : une plus grande politisation des jeunes et une organisation spontanée qui a souvent dépassé les syndicats étudiants.

    Par Marc, Gand

    Dans plusieurs pays, le potentiel qui existe parmi la jeunesse a largement été démontré. Les étudiants, les écoliers et les jeunes travailleurs sont descendus dans les rues pour refuser les attaques et revendiquer leurs droits. Pour réclamer leur droit à un avenir, en fait.

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    Socialisme 2011 – Les jeunes en lutte pour leur enseignement et leur avenir

    L’impact de la crise du capitalisme frappe les jeunes de plein fouet. On parle d’une "génération perdue" confrontée à un chômage de masse, à la pauvreté, à la dégradation de l’enseignement. Des mouvements de masse des jeunes n’acceptant pas cette fatalité et contestant les plans d’austérités a déjà vu le jour dans plusieurs pays en Europe. Blocages d’écoles et d’unifs, grèves et manifestations de masse,… Cette résistance de la jeunesse peut jouer un rôle crucial dans le développement de mouvement plus large dans la société. Une commission de Socialisme 2011 est consacrée à ce thème.

    Samedi 12 mars, de 15.30h à 18.00h

    Avec: Paul Cannalan, organisateur national de la campagne "Youth fight for jobs and éducation" qui joue un rôle important dans le mouvement des étudiants en Angleterre, Alex Lecoq, étudiant à Rouen a été l’un des organisateurs dans sa fac de la lutte contre la réforme des pensions de Sarkosy et Mathias Vanderhoogstraten des Etudiants de Gauche Actifs, qui apportera le point de vue d’EGA sur la manière de préparer également la résistance en Belgique.

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    Des attaques sévères, profondes et impitoyables

    Dans la plupart des pays européens, la crise a durement frappé. Les jeunes n’ont pas été les derniers à en subir le choc et beaucoup de mesures d’assainissement introduites à seule fin de contenter les marchés financiers s’en prennent encore à eux. Augmentation des droits d’inscriptions aux études, réduction des allocations, diminution des droits et de la protection pour les jeunes travailleurs (et, par contre, augmentation de la pression et de la charge de travail).

    En Grande-Bretagne, les droits d’inscription ont été augmentés à environ 11.000 euros. En Italie, les étudiants sont descendus dans les rues contre la réforme de l’enseignement supérieur qui s’en prend à sa démocratisation. En Espagne, l’introduction des Accords de Bologne (1) a conduit à de grandes protestations d’étudiants qui s’opposaient à la commercialisation de l’enseignement. En Irlande et ailleurs, le prétexte de la crise a servi d’excuse pour augmenter les droits d’inscription, et absolument aucune mesure n’est prévue pour ceux qui seraient dorénavant incapables de payer leurs études. Bien au contraire! Dans la plupart des cas, les bourses et allocations sont en même temps rabotées.

    Face à la protestation, la répression a également été très dure. L’establishment et les gouvernements sont en train de tester jusqu’où ils peuvent aller avant d’être forcés à faire des compromis. Bien que des victoires partielles aient été arrachées en Grande-Bretagne, il est clair qu’il sera nécessaire de faire plus pour sauver la démocratisation de l’enseignement supérieur et, plus généralement, l’avenir des jeunes.

    Comment s’organiser ?

    Les fortes mobilisations ont été accompagnées d’une très faible direction. Dans les pays où existent des organisations reconnues défendant les droits et les intérêts des jeunes, elles ont souvent constitué un frein sur la lutte. La dynamique du mouvement s’est souvent développée sans la participation de ces organisations. En même temps, l’absence de leadership à d’autres endroits a été une faiblesse afin de donner une orientation capable de maintenir en vie la mobilisation.

    Le potentiel est pourtant énorme : une grande partie de la jeunesse est déterminée à ne plus se complaire dans l’apolitisme et la passivité inhérents à la période qui a précédé la crise. La politique de concessions aux marchés financiers et au grand capital est de plus en plus remise en cause, les jeunes contestent de plus en plus les discours officiels au sujet de la crise évitant de montrer les véritables responsables. Il existe un grand potentiel pour le développement d’une conscience anticapitaliste.

    Cette dimension idéologique du mouvement est un élément vital, car cela représente déjà une grande part des perspectives de poursuite de la lutte. Cela aide à formuler une alternative et à discuter au sein du mouvement. Le caractère démocratique nécessaire de ce mouvement est également crucial. Les intérêts des jeunes et des étudiants doivent être défendus de façon démocratique, de la même manière que des groupes d’action peuvent s’organiser plus efficacement par la formation de comités.

    Organiser et politiser la lutte

    Ici et là, on a pu voir cette façon de procéder se développer. En Grande-Bretagne, la direction du syndicat étudiant officiel a été très critiquée et cela a conduit à des initiatives parallèles qui n’acceptaient aucune forme ‘‘d’assainissement négocié’’. De telles initiatives ont notamment vu le jour là où les bâtiments scolaires et universitaires ont été occupés par les étudiants. Lorsqu’il existe des possibilités pour élaborer un programme politique, ces discussions peuvent constituer une bonne base pertinente pour tracer des perspectives dans lesquelles intégrer les différentes actions. Ici aussi, des erreurs peuvent être commises, mais le processus démocratique et la politisation au sein des mouvements sont des éléments fondamentaux. D’où l’importance, dès le début du développement de la lutte, de l’idée d’assemblées générales afin de gagner des couches plus larges à la lutte et d’assurer une large discussion au sujet de la plate-forme de revendications et des décisions à prendre pour faire progresser la lutte.

    A différents endroits, les organisations-sœurs du PSL sont intervenues dans ce sens et ont ainsi pu développer et renforcer les mobilisations et la lutte. Au cours de la prochaine période, ce travail de politisation et de démocratisation des mouvements devra bien entendu se poursuivre, il s’agit d’une priorité pour éviter que les bureaucraties étudiantes ne tentent de jouer leur rôle de frein. Il faut assurer que les mouvements à venir, dès leur naissance, soient ouverts à discuter démocratiquement du contenu des revendications de la lutte ainsi que des perspectives d’actions.


    (1) Accords de Bologne: Accords visant officiellement à uniformiser l’enseignement au niveau européen mais qui, dans les faits, ont uniquement créé un cadre pour coordonner les attaques contre l’enseignement supérieur.

  • Union européenne: de l’euphorie à la récession

    Le début de la première décennie du 21e siècle a été caractérisée par une euphorie jamais vue autour du projet européen. Avec quelques retards, le premier janvier 2002, l’euro a été introduite comme monnaie physique. Mais, en moins de 10 ans, la question de la survie de la zone euro s’est posée avec force. Après l’euphorie a suivi la récession…

    L’Union européenne n’est plus un modèle

    Le développement de la zone euro n’a pas mis fin aux contradictions entre les différentes économies nationales qui en font partie. Aujourd’hui, toutes ces contradictions refont surface et il y a des spéculations ouvertes sur une possible fin de la zone euro telle que nous la connaissons.

    Le ‘Center for Economics and Business Research’ de Grande-Bretagne affirme que l’euro a seulement 20% de chance de survivre à la nouvelle décennie, les différences économiques entre pays étant tout simplement trop grandes. L’économiste américain Krugman confirme : ‘‘Si la zone euro veut survivre, cela va devoir changer. La chance que la stratégie actuelle – simplement guérir de la crise en transpirant – marche, est faible… Les pays européens les plus forts vont devoir faire un choix.’’

    L’Union européenne n’est plus le modèle pour un capitalisme stable et prospère. Au contraire, des éléments de l’Afrique et de l’Amérique Latine arrivent en Europe. Les éléments centraux là-dedans sont une croissance limitée, de l’austérité et des crises sur les plans politique et social. Mais les travailleurs de différents pays font leurs premiers pas dans la la résistance, et c’est une donnée d’importance.

    Dettes de l’état

    Dans des pays comme le Portugal, l’Espagne et peut-être même en Belgique, existe la menace de crises en conséquence des dettes des Etats. En Grèce et en Irlande, le FMI et l’UE sont intervenus pour stabiliser les marchés mais, malgré cela, le spectre d’une faillite n’est pas à exclure.

    Une étude de Credit Market Analysis estime la probabilité de défaut de payement de la Grèce dans les cinq années à venir à 58,8%. En Irlande, cela serait 41,2% et au Portugal, à 35,9%. Une telle faillite aurait aussi des conséquences extrêmes pour d’autres pays. Les banques allemandes ont ainsi pour 28 milliards d’euros de bons d’Etat grec et pour 29 milliards de bons d’Etat portugais, 114 milliards de bons d’Etat irlandais et 147 milliards de bon d’Etat espagnols.

    Leur réponse: faire payer la crise aux pauvres!

    La réponse des différents gouvernements et des institutions internationales est claire : une politique d’austérité dure qui présente aux travailleurs et leur famille la facteur des jeux des spéculateurs et de la faillite du système de marché. Grâce à cela, ‘‘les marchés’’ sont calmés, mais les vautours financiers n’en n’ont jamais assez.

    Les assainissements vont très loin et entraînent une résistance: différentes grèves générales ont eu lieu entre autres en Grèce, en Espagne et au Portugal, tout comme de grandes journées d’action en France, en Irlande et en Grande-Bretagne. Aucun parti traditionnel n’est prêt à contrer les diktats des marchés financiers et, au niveau syndical, il manque souvent une direction capable d’offrir des réponses sérieuses. C’est la pression de la base qui a initié la résistance en Europe.

    Construire la résistance

    Les mouvements de lutte ne sont pas finis, même là où il y a une pause temporaire. La grève générale en Grèce le 15 décembre, la première depuis le printemps, l’a illustré de façon éclatante.

    Il est important de construire un plan d’action et de mettre en avant des idées concrètes. Cela peut prendre la forme d’une grève générale de 24 heures. Là où il n’y a pas encore d’actions, une manifestation nationale ou une grève du secteur public peuvent constituer un bon premier pas en direction d’une grève générale. La résistance doit également être coordonnée au niveau européen. La journée d’action du 29 septembre était un bon début, mais sans que suive un quelconque prolongement: pas de grève générale européenne, et une action symbolique le 15 décembre à la place, action pour laquelle aucune mobilisation n’a été effectuée.

    La crise est bien structurelle et pas seulement conjoncturelle. Au plus ses effets se feront sentir et au plus les protestations contre les symptômes de la crise pourront se développer rapidement vers des mouvements avec une conscience anticapitaliste plus large, dans laquelle existera beaucoup d’ouverture pour des points de vue socialistes. A travers des revendications comme le refus de payer les dettes et la nationalisation des banques sous contrôle et gestion des travailleurs, la voie vers une autre société peut être ouverte.

    Où est la gauche?

    Les partis de gauche actuels sont le plus souvent caractérisés par la confusion et le manque de réponses concrètes face à la crise du capitalisme. Là où la gauche est absente, il y a un espace pour des forces diverses de l’extrême-droite, ainsi que pour une place plus grande pour des discussions autour de la question nationale.

    Des formations de gauche qui s’opposent clairement à la dictature des marchés et qui aident à la Construction de la résistance contre cette dictature peuvent cependant marquer des points. L’initiative réussie de l’United Left Alliance en Irlande en est un bon exemple.

    La classe ouvrière peut temporairement être poussée à la passivité ou même subir un certain nombre de défaites, surtout quand il n’y a pas de forts partis des travailleurs et si les forces numériques des marxistes sont encore modestes. Mais, en même temps, il y a une forte dimension internationale dans les mouvements de lutte qui se développent. Les étudiants grecs ont été inspirés par les actions étudiantes en Grande-Bretagne, qui s’inspiraient des actions en France.

    L’Europe va vers une longue période d’instabilité sur les plans financier, économique, politique et social. Les travailleurs et leurs familles doivent unir leurs forces dans la résistance et dans la discussion pour une alternative au chaos capitaliste. Pour notre part, dans le mouvement, nous défendrons l’idée d’une réponse socialiste.

  • Dans le collimateur des “marchés”

    Ces dernières semaines la Belgique s’est retrouvée le couteau sous la gorge du fait des marchés. En conséquence, les autorités devront payer plus d’intérêts à long terme qu’en Allemagne pour la dette publique, à un certain moment jusqu’à 1,4% en plus. Pour le quotidien flamand De Tijd, cela coûterait annuellement 230 millions d’euros en plus, soit 21 euros par Belge. Le coût des crédits d’investissement ou des crédits au logement montent aussi en flèche. De plus, le doute s’installe concernant la solvabilité du secteur financier belge. Si les autorités doivent à nouveau venir en aide aux banques, cela risque de totalement miner les finances publiques. La Belgique devient-elle la ‘‘Grèce de la mer du Nord’’ ?

    Par Eric Byl

    Selon tous les économistes, l’économie belge ne peut être comparée à celles des ‘PIGS’ (Portugal, Irlande, Grèce et Espagne). Le déficit budgétaire reste dans la marge du pacte de stabilité européen: 4,6% du PIB, 0,2% de mieux que l’objectif. La dette publique reste encore très considérable mais, à 97,2%, elle n’est pas plus élevée qu’en 2003. A l’époque, la moyenne de la zone euro était à 69%, contre 84% en 2010. La Belgique a donc rattrapé une bonne partie de son retard. Comment l’expliquer?

    Le travailleur belge est toujours parmi les plus productifs au monde. Il ou elle créée plus de valeur par heure de travail et preste chaque année plus d’heures que ses collègues des pays voisins, y compris d’Allemagne. Les travailleurs belges ont aussi arraché un système de sécurité sociale qui a amoindri les pires effets de la crise, notamment grâce au chômage temporaire. L’économie belge, important sous-traitant l’économie allemande, a ainsi pu s’accrocher à la machine d’exportation allemande quand elle s’est mise en branle. C’est ce qui explique aussi que la fortune financière nette ‘des Belges’ est de quelques 750 milliards d’euros (soit 210% du Produit Intérieur Brut, contre 130% au grand maximum dans les pays voisins).

    Pourquoi alors les spéculateurs étrangers, surtout eux, se débarrassent-ils des obligations d’Etat belges ? Pensent-ils vraiment que le pays va éclater et que la dette publique devra être renégociée ? Plus de 6 mois après les élections, des investisseurs aspirent à un gouvernement qui introduise la casse sociale, comme cela se fait déjà depuis quelques temps dans les pays voisins. Tous nos politiciens sont d’accord là-dessus, y compris du côté de la NVA et de son donneur d’ordres, la fédération patronale flamande Voka. Ils tremblent devant l’idée d’être dominés par la bourgeoisie belge principalement francophone, mais ils ne voient aucun inconvénient à nous livrer aux caprices du capital spéculatif international. Au contraire, avec la régionalisation, ils espèrent faire des travailleurs flamands, wallons et bruxellois des proies encore plus attractives pour ‘les marchés’ internationaux.

    L’exemple de l’Irlande a démontré que la production de richesses n’est pas une garantie de stabilité économique. Dans les sondages, les représentants locaux du néolibéralisme commencent à glisser en faveur de la gauche radicale. Déjà 45% de la population se dit en faveur de ne pas amortir les dettes des banques, 25% n’a pas d’opinion à ce sujet. La population irlandaise réalise bien que “les marchés” sont ces mêmes banques qui, à chaque fois que leurs mises tournent mal, font appel à ‘‘l’autorité’’. Dans notre pays non plus, la production de richesses n’est pas une garantie de stabilité. Dès la création de la Belgique, cette richesse a été écrémée par une poigné d’investisseurs, principalement financiers, d’où la prépondérance du secteur financier dans notre économie. Ce secteur financier a investi partout dans le monde dans des produits très rentables, mais aussi très douteux. Les autorités ont déjà dû injecter 20 milliards d’euros pour sauver les banques et, de plus, ils ont dû garantir les dettes du secteur bancaire à hauteur de 80 milliards d’euros.

    A travers ces filiales en Europe de l’Est, en Irlande et en Angleterre, la KBC s’est engagée sur une voie peu sûre tandis que Dexia serait vulnérable à travers ses partenaires en Espagne et en Italie. Ces deux banques seraient fortement exposées à des produits à risque issus des pays ‘PIGS’. Nous savons déjà ce qui s’est passé avec Fortis.

    Tout comme un fruit pourri infecte le reste du panier, le mauvais crédit détruit le crédit plus fiable. Lorsque ces obligations d’Etat perdent en crédibilité, cela mine encore plus la position des banques. Ageas, l’assureur de l’ancienne Fortis notamment, possède pour 10 milliards d’euros de bons d’Etats belges, Dexia 8 milliards et la KBC 22 milliards. S’il faut les passer en pertes, Dexia et la KBC feront probablement à nouveau appel aux autorités, ce qui minerait à son tour la solvabilité de l’Etat Belge.

  • Luttons contre les assainissements sur tous les front!

    Des syndicats combatifs et démocratiques et un nouveau parti des travaill eurs, voilà ce dont nous avons besoin !

    Le système a tremblé sur ses bases sous le choc de la pire crise du capitalisme depuis la deuxième guerre mondiale. Pendant une brève période, la chute de l’économie mondiale, la ‘‘Grande Récession’’, a supprimé une bonne part des profits des patrons. Des entreprises multinationales renommées, comme General Motors, et des dizaines de grandes banques ont flirté avec la faillite. Le terme de ‘‘socialisme pour les riches’’ est apparu au moment où les différents Etats ont allongé des milliards d’euros pour sauver la peau des industriels et des banquiers, menacé par la crise de surproduction et l’explosion des bulles spéculatives.

    Par Jan Vlegels, article tiré de l’édition de décembre-janvier de Lutte Socialiste

    La facture a été livrée à ceux qui gèrent l’Etat, les laquais politiques du patronat. En 2009 déjà, les banques et les grandes entreprises ont déjà recommencé à réaliser des profits records, alors que les Etats les plus touchés (la Grèce, l’Irlande, les Etats baltes,…) ont rapidement fait face à des plans d’austérité draconiens. Là où restait un peu plus de marge, surtout dans les grandes puissances traditionnelles et leur périphérie directe, il semblait qu’on voulait surtout relancer la production avec des mesures de stimulation de l’économie avant de sabrer dans les conditions de vie et de travail de la population. Le calme n’a duré que peu de temps avant la tempête.

    Dans la plupart des pays européens, les grandes vacances ont été la période de préparation pour l’épreuve de force inévitable avec la classe ouvrière. Les mois qui ont suivi, d’immenses paquets de mesures d’austérité ont été rendus publics. Malgré la menace, plus que probable, de l’arrivée d’une ‘‘double dip’’ (une rechute de l’économie notamment basée sur une demande trop fiable), les gouvernements ont attaqué les moyens des ménages.

    La confrontation avec la classe des travailleurs est inévitable, même en Belgique où la bourgeoisie essaie généralement d’éviter une telle attaque frontale et où l’offensive patronale a déjà du retard à cause de la crise politique.

    Augmentation de l’âge de la pension, augmentation de la TVA, démantèlement des services publics, privatisations, accroissement du contrôle des chômeurs, multiplication du minerval des universités,… L’impact de telles mesures sur la vie des travailleurs est incalculable. On serait découragé pour moins que ça, et c’est d’ailleurs le pari des capitalistes européens : écraser tout le monde sous l’austérité et espérer que les masses se redressent trop tard. Bien que ce ne soit pas totalement dénué de fondement – dans un certain nombre de pays, il n’y a provisoirement pas encore de mouvements de résistance généralisés -, les premières réactions du mouvement ouvrier européen nous renforcent dans la conviction que le ‘‘pari’’ de la bourgeoisie s’avérera perdu : des actions de grande envergure ont déjà eu lieu en France, en Grèce, en Espagne, au Portugal, en Italie, en Irlande, en Grande-Bretagne,…

    Petit à petit, il deviendra clair pour tout le monde, y compris la bourgeoisie, que la classe ouvrière européenne ne va pas accepter l’austérité sans combat. Nous pouvons nous attendre à une intensification des luttes dans la période à venir. Il n’est cependant pas garanti que ces mouvements conduisent directement à des victoires au vu des difficultés déjà présentes dans les premières phases de protestations.

    Partout, les directions syndicales évitent d’organiser efficacement la résistance, aucune stratégie claire avec un plan d’action n’est mise en avant. Cela, en combinaison de l’absence d’une traduction politique de cette résistance, est un sérieux handicap pour le mouvement ouvrier dans la construction de son rapport de forces.

    La création de nouveaux partis des travailleurs – basés sur des membres actifs et ouverts à tous les courants présents dans le mouvement ouvrier – sera cruciale pour lutter contre la bourgeoisie sur le plan politique. Il nous faut aussi défendre la démocratisation des syndicats et appeler les directions syndicales à organiser la résistance, en mettant entre autres en avant l’organisation d’actions européennes, comme une grève générale européenne.

  • 2011 : Une année de luttes qui se durcissent

    2010 – L’année la plus turbulente depuis deux décennies

    Peter Taaffe, secrétaire général du Socialist Party, passe en revue les développements et événements de 2010 au Royaume-Uni et dans le monde, et anticipe les luttes à venir en 2011.

    Sur le plan social et politique, 2010 était méconnaissable par rapport à 2009. Cette année a très certainement été l’année la plus tumultueuse depuis plus de deux décennies, surtout au Royaume-Uni. Les élections générales au Royaume-Uni ont eu lieu il y a à peine sept mois et pourtant, telle est la vitesse et l’ampleur des événements, que maintenant nous vivons presque dans un “autre pays”. Dès le moment de leur installation, les Con-Dem (coalition des Conservateurs et des “Libéraux-Démocrates” qui ont bradé leurs beaux principes en échange de postes au gouvernement) ont subi un état de siège.

    Peter Taaffe, secrétaire général du Socialist Party (CIO-Angleterre et pays de Galles)

    Si les dirigeants syndicaux avaient ne serait-ce que levé leur petit doigt et appelé rapidement à l’action – et organisé cette action méthodiquement – alors le gouvernement aurait pu être submergé sous des protestations de masse. Mais, en trainant des pieds comme toujours, “menant à partir de l’arrière”, la seule politique de l’aile droite des syndicats est une politique d’indécision et de pratiques corrompues, en plein milieu du massacre de nos emplois, de nos services publics et de notre niveau de vie.

    Le rôle dirigeant a donc été repris par les étudiants qui, dans leur bataille contre le triplement des frais d’inscription aux études et le retrait criminel de l’allocation de maintien de l’éducation, sont parvenus à percer une faille dans l’apparente “intransigeance” du gouvernement. Remplissant par là le rôle historique des étudiants lors des périodes critiques en tant que “cavalerie légère” du mouvement ouvrier, ils se sont mobilisés d’une manière audacieuse, hautement originale et improvisée afin de briser les défenses du gouvernement. C’est cela qui a ouvert la brèche à travers laquelle les bataillons lourds de la classe ouvrière – les syndicats – peuvent maintenant s’engouffrer en un mouvement de masse pour vaincre ce gouvernement.

    Le degré de liberté par rapport aux structures bureaucratiques qui a été affiché – le Syndicat national des étudiants ayant été complètement poussé de côté, de l’aveu même de son président Aaron Porter – montre que les étudiants ont ouvert un nouveau chapitre dans le manuel de comment défier et terrifier un gouvernement “fort”. Leurs mots d’ordre ont parfaitement résumé le sentiment qui vit non seulement parmi les étudiants, mais parmi l’ensemble de cette génération, révélant son énorme mécontentement par rapport à des décennies de marginalisation et de répression, et contre le système qui leur ôte tout espoir d’un avenir sous le capitalisme. "Whose streets? Our streets!", "No ifs, No buts, No education cuts!" (« Les rues de qui ? NOS rues ! », « Pas de SI, pas de MAIS, pas de coupes dans l’éducation ! »). Ils ont réaffirmé le droit de manifester, et l’intransigeance de cette génération, qui se dresse contre toutes les coupes, contre la perte de chaque emploi et des services. La manière dont les jeunes ont ridiculisé le New Labour et d’autres, même à gauche, qui étaient prêts à hisser le drapeau blanc avant même que la bataille ne commence et à accepter “certaines” coupes.

    La répression de l’État

    Et quelle est la réaction du gouvernement et de la classe dirigeante en général ? C’est menacer le droit de protester et de manifester lui-même – le Commissaire de la Police métropolitaine Paul Stephenson a laissé entendre que les manifestations pourraient être interdites. La Secrétaire à l’Intérieur Theresa May a appelé à l’usage de canons à eau, mais le lendemain elle a été forcée de revenir sur cette motion à cause de l’outrage. Il a même été suggéré que des “drones” comme on en utilise en Afghanistan soient utilisés pour espionner les prochaines manifestations au Royaume-Uni et que des voitures blindées soient déployées en cas de conflit social.

    Par-dessus tout, dans une démonstration crasse de ce que Karl Marx avait appelé le ”crétinisme parlementaire”, les Con-Dems pensent qu’en faisant passer de force le vote sur la hausse des frais d’inscriptions au parlement, cela mettra un terme au mouvement. Tout comme les Bourbons en France, ils n’ont rien appris et rien oublié de l’Histoire. La poll tax était déjà devenu une “loi” en 1988 mais a été supprimée en 1991 après la campagne de désobéissance de masse qui a été menée par la fédération panbritannique contre la poll tax, dirigée par Militant – qui est maintenant le Socialist Party –, lorsque 18 millions de gens ont refusé de payer cette taxe. De la même manière, le CPE en France a été annulé en 2006 à la suite d’un mouvement de masse de la jeunesse, même alors qu’il était devenu loi. La pression et le pouvoir des masses contre l’injustice ne peuvent pas être supprimés d’un simple trait de stylo, quand bien même il s’agirait d’un stylo sanctifié par la “loi”.

    La révolte des étudiants au Royaume-Uni a eu des répercussions dans le monde entier. De Rome, où les étudiants ont revendiqué le renversement du gouvernement Berlusconi tant détesté et qui s’accroche au pouvoir par le bout des doigts, aux États-Unis en passant par l’Asie, etc. Par exemple, il y a eu une large couverture médiatique au Pakistan et ailleurs des événements qui se déroulent au Royaume-Uni, précisément parce qu’ils se déroulent au Royaume-Uni. Jusqu’à présent, elle était censée être le bastion de la “tranquille démocratie parlementaire” où les protestations et l’opposition est en général contenue dans des canaux sécurisés. Le fait que cette opposition ait débordé de ses digues et ait transformé le centre de Londres en une “zone de guerre” est en soi un facteur qui a attiré l’attention et fait vibrer l’imagination du monde entier, en particulier des jeunes, des travailleurs et des pauvres.

    La crise mondiale du capitalisme

    La toile de fond et l’élan de ces événements et de ceux qui vont se produire en 2011, sont ceux de la crise mondiale du capitalisme qui, depuis qu’elle a commencé en 2007, a dévasté des économies entières et a ravagé la vie de la population laborieuse. L’OCDE a estimé que 17 millions de travailleurs et travailleuses ont été expulsés des usines depuis le début de la crise rien que dans les pays capitalistes “avancés”. Neuf millions de travailleurs américains ont été jeté à la rue au cours de la même période. Cela aurait été encore pire si ce n’avait été les plans de sauvetage des banques par les gouvernements capitalistes. Selon des documents qui ont récemment été divulgués au grand jour, le gouvernement américain a à lui seul fait des crédits pour 3300 milliards de dollars – ce qui équivaut à un quart du PIB américain – aux banques et aux firmes en détresse ! Ceci a sauvé un million d’emplois, mais c’est tout de même neuf fois ce nombre qui ont été virés. Qui plus est, ce sera aux travailleurs américains de payer la facture pour ce sauvetage.

    Cependant, comme tentent de l’expliquer les économistes capitalistes, la délivrance est à portée de main, sous la forme de la “reprise”. Mais ces déclarations ne résistent pas à l’épreuve des faits. Ne serait-ce que pour commencer à faire diminuer le chômage, 300.000 emplois devraient être créés chaque mois aux États-Unis. Mais dans le troisième trimestre de 2010, on n’a vu la création que de 150.000 nouveaux emplois. En plus, la plupart d’entre eux sont maintenant ouvertement décrits comme étant des emplois “de survie”. Incapables de trouver des emplois semblables à ceux qu’ils avaient autrefois, c.à.d relativement bien payés et permanents, des millions de travailleurs sont à présent forcés de prendre le premier boulot qui passe afin d’éviter de se retrouver à la rue et la famine, dans le pays le plus riche de la planète. Une existence “précaire”, l’insécurité massive et la spirale du déclin du niveau de vie et des opportunités futures, voilà les perspectives pour des millions de gens au Royaume-Uni et dans le monde entier.

    C’est cependant le caractère “inattendu” et soudain du changement brutal du mode de vie qui alimente une révolte colossale au niveau européen en particulier. Selon le Guardian, 17,5 millions de gens, sont descendus dans les rues en l’espace de trois semaines (certains participant à plus d’une manifestation) lors de la récente révolte de masse contre le gouvernement Sarkozy en France. Des grèves générales ont ébranlé l’Espagne, la Grèce, le Portugal, la France, la Roumanie, l’Inde et l’Afrique du Sud. Nous sommes véritablement entrés dans une ère de participation et d’implication de masse, de lutte et de tentatives de changer la situation et le cours de l’Histoire.

    L’Irlande résume toute la situation. Il y a six ans, un “indice du bonheur” révélait que ses habitants se déclaraient les “plus heureux” parmi les 100 pays interrogés. Plus maintenant. Le niveau de vie a dégringolé d’au moins 15% à cause des dernières coupes draconiennes dans les budgets. Le plan d’austérité annoncé reviendra à diminuer de 25% le train de vie du peuple irlandais. Cela est comparable à la dépression aux États-Unis dans les années ‘1930. Et l’Irlande est le miroir du futur des autres pays d’Europe – y compris du Royaume-Uni – qui leur est réservé sur base de la continuation du système capitaliste.

    En fait, la crise irlandaise est en réalité une crise européenne ; il s’agit en particulier d’une crise potentiellement dévastatrice pour le système bancaire européen. Le chancelier Tory George Osborne, dans une personnification de la “froide cruauté” de la classe dirigeante britannique, lance l’assaut contre les étudiants, les allocataires sociaux et les chômeurs, mais vole au secours des banques irlandaises. Il ne faut pas être astrophysicien pour comprendre ce qui est en train de se passer. Si les banques irlandaises devaient crouler, elles emporteraient avec elles des pans entiers du système bancaire britannique, ce qui à son tour serait le détonateur de toute une série de nouvelles crises dans les banques européennes et ferait s’effondrer l’ensemble du système bancaire du continent.

    L’austérité pour toujours

    La faillite complète du capitalisme se reflète dans l’avenir qui s’étend à présent devant le peuple irlandais. C’est un avenir fait d’une austérité éternelle, d’un retour à l’émigration de masse, et de basse croissance ou croissance nulle de l’économie, et par conséquent également du niveau de vie de la population irlandaise pour le futur prévisible. Ceci pourrait en outre s’appliquer au monde capitaliste dans son ensemble. Les organes du monde des affaires tels que le Financial Times admettent maintenant ouvertement que d’autres pays pourraient souffrir de “contagion” de la part des banques irlandaises. Le Portugal, la Grèce, l’Italie, l’Espagne, et même le Royaume-Uni et l’Allemagne sont menacés d’une attaque de ceux qu’on appelle les “bond vigilantes” – des spéculateurs milliardaires – qui cherchent à s’engraisser sur base du pillage de différents pays. Dans cette crise de la dette “souveraine”, la Grèce représente ce que l’effondrement de Bear Stearns était pour le secteur bancaire, et l’Irlande est l’équivalent de la chute des Lehman Brothers.

    Mais la dette de l’Espagne est tellement grande – c’est la quatrième plus grande économie de l’UE – qu’elle pourrait se révéler “trop grosse pour être sauvée”. Ceci pourrait être le déclencheur d’une autre crise bancaire, cette fois-ci pour l’UE toute entière, qui pourrait avoir pour conséquence un effondrement total de l’euro, qui ne tient déjà plus qu’à un fil à cause des crises d’Irlande et de Grèce.

    La crise a déjà détruit des quantités énormes de forces productives – l’organisation du travail, de la science et de la technique – qui dans le cas du Royaume-Uni ont connu leur plus forte chute depuis 1945. En tout c’est 10% de l’industrie qui a été détruite, juste pour qu’un système basé sur la production pour le profit et non pour satisfaire aux besoins soit maintenu pour le bénéfice d’une poignée de millionnaires et de milliardaires. La perte de foi palpable en leur système auprès des classes dirigeantes se manifeste dans l’incapacité des patrons à réinvestir dans la production le surplus extrait du travail de la classe ouvrière. Les promesses de “lendemains meilleurs”, par conséquent, seront mortes-nées. Une crise bancaire à l’échelle européenne serait similaire à la crise bancaire qui s’est produite en Europe deux ans après le crash de Wall street et qui a renforcé la dépression.

    Dans cette situation, un expédient désespéré après l’autre est déployé par les gouvernements capitalistes. Les plans de relance n’ont pas fonctionné assez bien que pour éviter le chômage de masse. Maintenant, un nouveau tour de “facilitation quantitative” – càd l’injection de cash, de “liquidités” dans le secteur bancaire – a été entrepris par la Réserve fédérale aux États-Unis, et la Bank of England est sur le point de l’imiter. Toutefois, les problèmes qui se sont accumulés ces dernières trente années à partir de l’énorme bulle financière sont tels que ces mesures n’ont aucune garantie de fonctionner. Dans cette situation qui est celle d’une dette excédentaire massive, l’injection de capital n’a aucune garantie de fonctionner parce que, comme l’économiste capitaliste Keynes l’avait fait remarquer, ça reviendrait au même que de “pousser sur une ficelle”.

    La stagnation économique

    La propension des banques à prêter plus à leurs emprunteurs, ou pour les investisseurs à investir, est non-existante, ce qui a pour conséquence un paradoxe de non dépense. Au mieux, cela signifie la stagnation économique, au pire, un approfondissement de la crise. Le chômage s’est graduellement accru au Royaume-Uni jusqu’à toucher un million de jeunes. À Liverpool, 34% des ménages n’ont pas un seul membre de leur famille au travail. Ceci va être accentué avec la destruction en gros des emplois dans les secteurs public et privé qui va suivre les énormes coupes dans les dotations des communes qui sont effectuées par le Ministre tory Eric Pickles. Malgré des hauts et des bas temporaires, le caractère général du capitalisme mondial en cette période est fait de stagnation et de déclin. La politique déflatoire du gouvernement – des coupes dans le niveau de vie par le gel des salaires ou par les coupes dans le budget d’État (ou les deux) – qui est en ce moment suivie par le gouvernement de David Cameron au Royaume-Uni va aggraver la crise et provoquer des convulsions de masse, d’une ampleur jamais vue depuis des générations.

    C’est pourquoi, en coulisses, un “plan B” est déjà en cours de préparation – si pas par le gouvernement lui-même, alors certainement par les hauts responsables de l’administration non élus – afin de couvrir l’échec du programme d’austérité de ce gouvernement. Au fur et à mesure que le chômage montera, la fureur autour des frais d’inscription universitaires aura l’air d’un pique-nique champêtre comparé à la vague d’opposition massive qui va se dresser. Les SDF et les allocataires sociaux dont le revenu est en train d’être passé à la hache ajouteront eux aussi leurs voix enragées dans ce vacarme.

    Tout comme le gouvernement Heath qui avait été menacé d’une grève générale dans les années ’70, ce gouvernement va être forcé de modifier sa trajectoire ou de s’effondrer. Certains analystes, par exemple Steve Richards dans The Independent, admettent maintenant ce que le Socialist Party explique depuis le début : que la façade d’“unité” du gouvernement va se fissurer. Les Libéraux-Démocrates en particulier, qui sont déjà en train de scissionner, vont encore plus se décomposer en diverses factions et se voir contraints de quitter le gouvernement. Nick Clegg et l’aile du “Livre orange” des Libéraux-Démocrates, qu’on reconnait déjà comme étant des Tories déguisés, seront absorbés dans les rangs du parti de Cameron. Les autres sur la “gauche” vont rejoindre le New Labour – encouragés par la cour que leur fait Ed Miliband. Il ne restera plus qu’un moignon de ce parti. Il pourrait se voir réduit à une secte capitaliste.

    Toutefois, Ed Miliband ne représente pas une “remise au gout du jour” réussie de cette marchandise de seconde main qu’est le New Labour. Avec quelques différences mineures, il représente plus un New Labour rafistolé à la va-vite. Lorsque les étudiants étaient en train de faire le siège du parlement, il a “considéré” les rencontrer, mais a préféré rejeter une telle mesure “audacieuse”, pour lui en tous cas. Sur la question du programme, et en particulier des coupes budgétaires, il n’y a en substance aucune différence avec le gouvernement, mais seulement une question de timing : une mort prolongée par mille blessures plutôt que la grosse hache un peu trop directe qui se trouve entre les mains de Cameron. Ce qui est scandaleux, c’est qu’il a clairement fait un appel du pied aux conseils communaux Labour pour qu’ils n’organisent pas la moindre résistance contre le gouvernement, comme cela avait été fait par la commune de Liverpool dans les années ’80, mais au contraire d’appliquer les coupes dans leurs dotations par le gouvernement tory, sans oublier de s’en plaindre bruyamment bien entendu. Au mieux, les conseillers New Labour joueront le rôle de Ponce Pilate, et y a-t-il figure plus méprisable dans l’Histoire !

    Une nouvelle perspective socialiste

    Une nouvelle route doit être ouverte par le mouvement ouvrier, une toute nouvelle perspective socialiste, pour tous ceux qui sont affectés par cette nouvelle crise du capitalisme qui ne va que s’approfondir, et pour tous ceux qui attendent la riposte. La résistance doit être centrée sur les syndicats. Nous accueillons chaleureusement la nouvelle génération d’étudiants dans notre combat, bon nombre d’entre eux remplissent aujourd’hui les rangs du Socialist Party. Nous acclamons et encourageons leur flair, leur spontanéité et leur détermination. Mais il est entièrement faux, comme certains groupes de gauche l’ont fait, de donner l’impression que c’est à travers le soi-disant “pouvoir étudiant” qu’ils seront capables de vaincre ce gouvernement par eux-mêmes. Ils peuvent jouer une fonction auxiliaire extrêmement importante, mais ce sont les bataillons lourds de la classe ouvrière, dont les éléments les plus conscients sont rassemblés au sein des syndicats, qui ont le réel potentiel de briser le programme de ce gouvernement et de l’expulser du pouvoir.

    2011 va probablement excéder dans l’ampleur de la lutte tout ce que nous avons vu en 2010, au Royaume-Uni comme partout ailleurs dans le monde. À travers l’expérience des batailles qui ont eu lieu jusqu’ici, une nouvelle génération est en train de recevoir son “premier sang”, presque littéralement, et de s’entrainer dans les réalités de la société capitaliste. Cette nouvelle couche est à la recherche d’une alternative, nombre d’entre eux sont dégoutés par le capitalisme et reprennent les idées du socialisme. Beaucoup sont en train de rejoindre le Socialist Party, qui a connu sa meilleure période de croissance depuis deux décennies, grâce à l’implication de cette nouvelle génération. Cette dernière a rencontré beaucoup de représentants de la vieille génération, qui maintenant reviennent à la lutte et au Socialist Party à travers ce processus. Cela jette les bases pour une croissance encore plus spectaculaire et soutenue des forces du marxisme authentique et du socialisme au Royaume-Uni au cours de la prochaine période. Une force socialiste puissante est maintenant la précondition pour la réalisation de l’étape cruciale d’un nouveau parti des travailleurs de masse.

    Des processus similaires sont en train de se développer à une échelle mondiale, comme cela a été démontré par lors du formidable Congrès mondial du Comité pour une Internationale Ouvrière qui s’est déroulé en décembre. De nouvelles forces sociales à une échelle de masse, liées à la construction d’une véritable internationale démocratique de masse peuvent être amenées un pas plus loin dans ce qui promet d’être une année fructueuse et pleine de rebondissements.

  • Irlande: La complicité du Labour Party et du Fine Gael

    Le Fianna Fáil et le Green Party, les partis au poiuvoir, ne sont pas seuls à prendre position pour l’austérité. Les deux plus grands partis de l’opposition n’ont eux non plus rien d’autre à offrir.

    Joe Higgins, Eurodéputé du Socialist Party (CIO – Irlande)

    Une intense attention est actuellement accordée au budget d’austérité sauvage qu’on a balancé à la figure du peuple irlandais, sur ordre de la Commission de l’Union Européenne, du Fonds Monétaire International et de la Banque Centrale Européenne – toutes ces institutions jouant le rôle d’huissiers au service des plus grands spéculateurs financiers et bancaires européens.

    La population de cet État se retrouve maintenant prise dans une situation pour le moins bizarre, et qui ne devrait tout bonnement pas être tolérée. Le gouvernement est composé de partis politiques qui ne sont soutenus que par un électeur sur cinq, et il est maintenant en train d’imposer des mesures économiques et fiscales désastreuses, censées être prolongées non pas sur un an, ce qui serait déjà assez mauvais en soi, mais sur quatre ans.

    La question qui se pose alors est la suivante: comment est-il possible qu’un tel gouvernement puisse se permettre de ne fût-ce qu’envisager pareille idée ? La réponse à cette question se trouve confortablement assise sur les fauteuils de l’opposition au Dáil Éireann (le Parlement), car c’est la complicité du Fine Gael et du Labour Party qui permet cet état de fait.

    Envisageons l’hypothèse où ces partis se seraient déclarés absolument opposés aux mesures draconiennes qui sont proposées en ce moment, et auraient refusé tout net de les mettre en œuvre s’ils venaient à prendre le pouvoir. C’en serait fini de ce gouvernement, et des élections générales seraient immédiatement convoquées. Cependant, en acceptant le programme de coupes budgétaires et de nouvelles taxes du gouvernement pour les quatre prochaines années, le Fine Gael et le Labour approuvent de manière implicite le concept fondamental de ce plan, et donnent la possibilité politique à ce gouvernement entièrement discrédité de continuer à aller de l’avant.

    C’est maintenant un véritable dilemme qui se pose à la population, et qui se posera encore plus à elle lorsqu’elle ira voter lors des élections générales. Les deux grands partis d’opposition offrent exactement le même menu que le Fianna Fail et le Green Party : l’austérité.

    Le Fine Gael a très clairement annoncé son plan de coupes et de hausses de taxes pour un montant de 6 milliards d’euros pour l’an prochain, c’est à dire exactement le même que celui du gouvernement. Le Labour Party, quant à lui, tente désespérément de cacher le fait que lui aussi est prêt à tailler à la hache dans les revenus et les services publics.

    Le document du Labour appelé “Propositions pour le budget 2011”, n’est qu’une tentative de masquer le véritable rôle qu’il jouerait au cas où il entrerait au gouvernement avec le Fine Gael, quelle que soit la répartition et le nombre de postes. Le mots “coupes” n’y est à aucun moment utilisé. On préfère y parler d’“ajustement budgétaire”, pour un montant de 4,5 milliards d’euros en 2011, qui combine en réalité des coupes et des hausses de taxes. C’est 1,5 milliards en moins que le plan du Fine Gael, mais le Labour est d’accord sur le fait que ces 1,5 milliards vont devoir être trouvés, mais à un peu plus long terme.

    En d’autres termes, le Labour Party, tout comme le Fianna Fáil, le Fine Gael et le Green Party, accepte les dictats des marchés financiers, selon lesquels c’est aux travailleurs, aux chômeurs, aux pensionnés et aux pauvres de payer pour la crise économique et fiscale monumentale qui a été causée par la rapacité sans fin des spéculateurs fonciers et des banquiers qui les ont financés. Le dirigeant du Labour, Eamon Gilmore, a en réalité accepté la responsabilité des idées fondamentales du gouvernement Fianna Fáil/Green Party lorsqu’il a déclaré que le Labour, une fois au gouvernement, n’annulerait pas les coupes budgétaires qui ont été votées au budget.

    Le prochain gouvernement sera très certainement composé du Fine Gael et du Labour Party. Dans quelques journaux, on a mentionné une éventuelle coalition de la “gauche” qui serait composée du Labour, du Sinn Fein (le parti nationaliste officiellement “de gauche”) et de la United Left Alliance (Alliance de gauche unie – la toute nouvelle coalition de la gauche radicale irlandaise, dans laquelle sont impliqués nos camarades du Socialist Party). Mais ceci n’est que pure spéculation, car il y a un désaccord fondamental entre la vraie gauche et les autres partis de la pseudo-“gauche”, un désaccord qui porte sur la solution à apporter face au désastre économique actuel.

    La Gauche insiste sur le rejet immédiat de la charte des vassalité qui a été imposée par le FMI et la Commission européenne et qui, si elle est mise en application, fera du peuple irlandais un peuple d’esclaves, transfusant à jamais son sang économique dans les coffre-forts des marchés financiers mondiaux, laissant derrière elle un véritable sillon d’effondrement social qui parcourra l’ensemble du paysage irlandais. La Gauche insiste donc sur le fait que PAS UN CENT ne sera payé aux spéculateurs financiers qui ont joué et qui ont perdu dans ce casino détraqué qu’était le marché immobilier irlandais.

    La position de la Gauche est que toutes les plus importantes institutions financières doivent être placées sous le contrôle public, mais restructurées afin d’être soumises au contrôle populaire, et gérées d’une manière entièrement différente. Ceci rendrait possible non seulement le fait de pouvoir fournir des prêts à de bonnes conditions pour tous les indépendants et les petites entreprises, mais également l’investissement dans des projets d’infrastructure majeurs et dans les services publics, et par là même, créer les dizaines de milliers d’emplois nécessaires.

    Le lancement de la United Left Alliance a généré énormément d’intérêt. Ceci est justifié, car elle va figurer en première ligne des changements d’une ampleur sismique qui vont se faire jour dans la politique irlandaise au cours des mois qui viennent, et elle va amener à l’avant-plan la réalisation qu’il existe bel et bien une alternative socialiste et démocratique au système brisé qui prévaut en ce moment.


    Interview de Joe Higgins : ”Le peuple irlandais n’a aucun compte à rendre aux banques et aux milliardaires”

    ‘L’Irlande est confrontée aux plus importantes coupes budgétaires et hausses de taxes de toute son histoire – c’est là le tribut qu’elle doit payer pour avoir reçu un renflouement international. Mais l’eurodéputé socialiste Joe Higgins croit que le système financier irlandais est déjà complètement démoli et ne pourra pas être réparé.

    ”La réalité pour l’économie irlandaise et pour le capitalisme irlandais est que, qu’elle se trouve dans l’euro ou en-dehors de l’euro, elle est confrontée à un désastre parce qu’elle est tellement faible qu’elle est incapable de développer la société. Mais je prédis par contre que le niveau de la dette à présent est tout simplement impossible à rembourser, il ne fait absolument aucun doute que l’on va devoir déclarer le non-payement d’ici les prochaines années, alors nous disons : pourquoi attendre ce moment-là, et soumettre notre peuple à une immense peine et à une énorme souffrance, pour rien !

    ”Nous devrions refuser de payer les débiteurs maintenant immédiatement, c’est là le point central ; et il faut développer un plan afin de relancer notre économie. Ce pour quoi nous allons faire un sacrifice en réalité, c’est pour les banques internationales et pour des spéculateurs milliardaires, qui parcourent les marchés financiers à la recherche d’un bénéfice rapide. Nous ne leur devons absolument rien en ce qui concerne le peuple irlandais. Ces spéculations autour de la dette ont été effectuées par des banques privées, lors de contrats privés. Nous disons : on ne peut pas réparer ce système, il est complètement démoli ; il cause des souffrances sans fin à des dizaines de millions de gens partout en Europe ; les spéculateurs sont déjà en train de se tourner vers leur prochaine cible qui sera soit le Portugal, soit l’Espagne, maintenant qu’ils ont eu ce qu’ils voulaient en Irlande.”

  • 10e Congrès Mondial du Comité pour une Internationale Ouvrière

    Relations mondiales : ‘‘Tout est changé, complètement changé’’

    Rapport de la discussion sur les relations mondiales au 10ème Congrès mondal du CIO

    Le 10e Congrès Mondial du Comité pour une International Ouvrière (CIO) a commencé la semaine dernière en Belgique. Ont participé à cet événement entre autres des délégués et des visiteurs en provenance d’Afrique du Sud, d’Allemagne, d’Angleterre et du pays de Galles, d’Argentine, d’Australie, d’Autriche, de Belgique, du Chili, de Chypre, d’Écosse, d’Espagne, des États-Unis, de France, de Grèce, de Hong Kong, d’Inde, d’Irlande, d’Israël, d’Italie, du Kazakhstan, de Malaisie, des Pays-Bas, du Nigéria, de Pologne, du Portugal, du Québec, de Russie, du Sri Lanka, de Suède, de Taïwan, de Tchéquie, et du Venezuela. Malheureusement, les délégués de Bolivie et du Pakistan n’ont pas pu venir, à cause du refus de leur visa.

    Sarah Sachs-Eldridge, délégation du Socialist Party (CIO – Angleterre et pays de Galles)

    Ce Congrès a duré une semaine et a discuté des principaux enjeux auxquels est confrontée la classe ouvrière internationalement dans cette période d’attaques d’austérité sauvages ainsi que des tâches du CIO.

    Les principales discussions lors du Congrès ont porté sur les relations mondiales, sur l’économie mondiale, sur l’Europe, l’Asie, l’Amérique latine, l’Afrique, et sur la construction du CIO.

    Le CIO est une organisation internationale socialiste et démocratique. Au cours du Congrès, les documents et les résolutions ont été discutés, amendés, puis soumis au vote. Un nouveau Comité Exécutif International a également été élu.

    Nous publierons les versions finales des principaux textes du Congrès. Notre site international (www.socialistworld.net) a déjà publié le projet initial de document de Congrès concernant les relations mondiales. Une version mise à jour de ce document sera publiée par la suite, avec les documents concernant l’Europe, le Moyen-Orient, l’Asie, la Russie et l’Europe de l’Est, de même qu’un document sur la situation en Afrique.

    Ci-dessous, nous publions un rapport de la première discussion du Congrès, celle sur les relations mondiales, rédigé par Sarah Sachs-Eldridge, de la délégation d’Angleterre et Pays de Galles (Socialist Party). D’autres rapports des principales discussions qui ont eu lieu tout au long du 10e Congrès suivront au cours des prochains jours.


    Des millions de personnes ont participé aux manifestations et aux grèves en France. Il y a eu des grèves générales en Grèce, au Portugal – la plus grande depuis la révolution de 1974 -, en Espagne et en Inde où une grève générale a impliqué 100 millions de travailleurs. Un immense mouvement partiellement victorieux s’est développé en Afrique du Sud et de nombreuses autres expressions de colère ont éclaté face à la crise la plus dévastatrice depuis les années ’30.

    Dans son introduction à la discussion, Peter Taaffe du Secrétariat international (SI) du CIO a cité William Butler Yeats, un célèbre poète nationaliste irlandais, qui avait dit : ‘‘Tout est changé, complètement changé’’ à propos des évènements d’Irlande. Pour décrire les événements de ces derniers mois, cette phrase reste d’actualité. Les contributions au débat portant sur les pays d’Afrique, d’Asie, d’Amérique latine, d’Amérique du Nord, du Moyen-Orient, d’Europe et d’Europe de l’Est ont bien démontré que pas un pays au monde n’a été épargné par la crise économique mondiale.

    Une crise prolongée

    Les gouvernements de plusieurs pays et régions peuvent bien clamer haut et fort que leurs économies sont à l’abri de tout danger et sur la voie de la reprise, il existe un potentiel pour une nouvelle chute de l’économie mondiale, ou en tous cas pour une stagnation prolongée avec une croissance faible. En fait, il n’y a aucun “remède” clair à appliquer pour la bourgeoisie, et des divisions existent entre et à l’intérieur des différentes classes dirigeantes quant à savoir quelles mesures devraient être prises.

    En cette époque de changements rapides, les gouvernements peuvent être enclins à des revirements soudains. La situation est lourde de troubles sociaux et politiques d’une ampleur tragique.

    Les relations mondiales sont dans un état d’instabilité croissante. Nous ne vivons plus dans un monde “unipolaire” où le pouvoir ultime des États-Unis, en tant que plus grande économie au monde, est accepté. Ceci peut mener à une hausse des frictions et des conflits.

    L’impression prédominante est que nous sommes dans une période de flux. Des luttes de la classe ouvrière ont lieu ou sont à l’ordre du jour dans chaque région du monde. Les socialistes doivent être prêts à ajuster leur tactique et leurs méthodes organisationnelles au fur et à mesure que la lutte de classe se développe et que les conditions objectives changent. De nouveaux mots d’ordre et revendications seront lancés lorsque cela sera requis.

    Des changements soudains

    Dans son introduction, Peter Taaffe a décrit comment, au cours d’un intervalle relativement court, l’économie irlandaise a été noyée, passant d’une des économies les plus prospères au monde à, non pas la récession, mais la dépression. Dans un sondage effectué il y a six ans auprès de 100 pays, on avait révélé que le peuple irlandais était le plus heureux au monde, sur base de la hausse des salaires et d’une phase de croissance apparemment sans fin. Mais ce 27 novembre, 100.000 manifestants sont descendus à Dublin malgré le froid polaire pour y exprimer leur rage, leur dégout et leur amertume face à la situation complètement différente, dans laquelle la majorité de la population est maintenant confrontée à des coupes sévères dans leur niveau de vie.

    La classe ouvrière irlandaise a montré qu’elle était capable de trouver par elle-même le chemin de la lutte, même lorsque les dirigeants syndicaux ont abandonné de la manière la plus poltronne qu’il soit leur responsabilité qui était de mener celle-ci. La survie du gouvernement, élu il y a moins de deux ans, ne tient plus qu’à un fil.

    La présence en Irlande du CIO et de Joe Higgins, l’eurodéputé socialiste de Dublin, signifie qu’il existe une voix qui est présente afin d’articuler l’opposition à la politique pro-marché, et qu’il existe le potentiel pour défier cette politique lors des élections générales de 2011, autour de l’Alliance de la Gauche Unie (United Left Alliance) récemment établie.

    L’ampleur de la crise économique mondiale, qui a commencé avec la crise des subprimes aux États-Unis en 2007, s’est largement fait ressentie lors de la crise bancaire de 2008. Le CIO a averti du fait que les patrons, dont la rapacité et le système du “tout pour le profit” sont responsables de la crise, ne seraient pas capables de trouver une issue facile pour sortir de cette crise, et qu’ils chercheraient à en faire payer le cout par les travailleurs.

    Cette crise a été si grave que, au départ, il n’était pas évident de voir comment une dépression de l’ampleur de celle des années ′30 pouvait être évitée. Toutefois, de nombreux gouvernements, après avoir jeté un œil par-dessus le gouffre et ayant aperçu le danger de la répétition d’une dépression qui durerait une décennie entière, ont pris peur et ont mis en place de grands plans d’urgence de relance de l’économie afin d’amortir les pires effets de la crise.

    Les travailleurs payent la facture

    De nombreuses contributions ont illustré à quel point les dirigeants ne sont pas parvenus à protéger les travailleurs et les pauvres. Par exemple, depuis le début de la crise, les plans de relance aux États-Unis ont empêché un million de pertes d’emplois, mais huit millions d’autres emplois ont été perdus depuis 2007. Dans les pays de l’OCDE, c’est 17 millions de travailleurs qui ont été virés des usines. On ne tient pas compte ici des travailleurs qui subissent le travail temporaire et/ou précaire, ce qu’on a commencé à appeler aux États-Unis des “jobs de survie”.

    À la grand’ messe du G20 à Toronto, il y a eu un accord général pour cesser l’intervention politique et financière et les plans de relance, et pour passer à des plans d’austérité, destinés à satisfaire les marchés. Il n’y a pas une confiance totale dans cette politique, qui a eu pour conséquence des coupes énormes dans de nombreux pays, suscitant déjà la colère et l’action de la classe ouvrière.

    Mais la colère, la frustration et l’opposition n’ont pas encore trouvé une expression dans la formation de nouveaux partis de masse de la classe ouvrière. Ce facteur représente un grand obstacle dans la lutte. Comme le document sur les relations mondiales l’a fait remarquer : ‘‘S’il existait des partis de masse de la classe ouvrière – même à l’image des partis ouvrier-bourgeois du passé – alors, en toute probabilité, les idées réformistes de gauche, centristes et révolutionnaires seraient en ce moment en train d’être largement discutées dans la société, et en particulier dans les rangs du mouvement ouvrier organisé.’’

    La Chine

    Un aspect important de la discussion a été le rôle de l’énorme plan de relance en Chine. Celui-ci a été combiné à une expansion massive du crédit, principalement de la part des banques d’État. L’investissement dans la construction de routes, de bâtiments et d’autres projets d’infrastructure a été une tentative de focaliser les mesures d’incitation sur la hausse de la demande intérieure.

    Un impact très important de ce plan a été de donner aux travailleurs la confiance de lutter. L’année 2010 a vu une nouvelle vague de grèves balayer la Chine, d’une nature en grande partie offensive, dans le but d’obtenir de meilleurs salaires. Les travailleurs ont vu l’économie s’accroitre, et en ont réclamé leur part. La croissance de ce mouvement et son développement va être crucial dans le développement de la lutte des travailleurs partout dans le monde.

    Dans sa réponse lors de la discussion, Robert, du Secrétariat International du CIO, a souligné les questions importantes qui sont posées : quel est l’attitude de ces travailleurs par rapport à la lutte pour les droits démocratiques, et syndicaux, par rapport aux syndicats officiels, à l’État et au gouvernement ?

    Toutefois, la discussion a bien clarifié le fait que les conséquences du plan de relance en Chine se sont fait ressentir dans de nombreux domaines. La croissance économique dans toute une série de pays, tel qu’en Allemagne, est liée au plan de relance chinois.

    Anthony, d’Australie, a expliqué le fait qu’une des raisons pour lesquelles l’économie australienne est jusqu’à présent parvenue à éviter les pires effets de la crise qui a touché les autres pays est la force du secteur minier et l’exportation massive de matières premières vers la Chine. Tout ralentissement de la croissance de l’économie chinoise aurait des répercussions désastreuses.

    Après être sortis de 30 ans de guerre civile, la classe ouvrière et les pauvres du Sri Lanka sont confrontés aux conditions les plus difficiles. Siritunga, du Sri Lanka, qui a passé la moitié de sa vie dans cette guerre, a décrit comment les “retombées de la paix” tant promises ne se sont absolument pas concrétisées. Au lieu de cela, le budget de 2010 a vu une hausse des dépenses militaires, qui constituent maintenant près du quart des dépenses de l’État, ce qui illustre la montée de la répression employée par le régime Rajapakse.

    Les puissances régionales, telles que l’Inde et la Chine qui ont soutenu l’effort de guerre, continuent à intervenir au Sri Lanka dans leur propres intérêts économiques et stratégiques, sans que cela ne profite le moins du monde aux populations laborieuses de la région.

    Toute une série de personnes ont pris la parole au sujet de la lutte d’influence entre les États-Unis et la Chine, en particulier dans certaines régions comme l’Asie-Pacifique.

    Derrière les statistiques qui montrent une croissance économique, la Chine est en train d’exporter son modèle de production basé sur la surexploitation de la main d’œuvre, avec des bas salaires et sans aucun droit syndical ou autre pour le personnel.

    André du Brésil et Patricio du Chili ont tous les deux expliqué comment l’exportation de matières premières vers la Chine a eu un effet d’amortir la crise économique mondiale dans toute une série de pays d’Amérique latine. Au Brésil, un processus de “reprimairisation” de l’économie est en cours (un développement du rôle de la place de l’extraction de matières premières), avec une désindustrialisation de plus en plus grande. Si cette tendance venait à se confirmer, elle sera accompagnée d’attaques sur les droits des travailleurs, d’une dégradation de l’environnement, et de traitements horribles pour les peuples indigènes.

    Des mouvements de masse

    Lors des précédents Congrès du CIO, au début des années ′2000, c’était le processus révolutionnaire en cours en Amérique latine qui se trouvait à l’avant-plan de la lutte. Tandis que ce processus s’est pour le moment temporairement ralenti, c’est la classe ouvrière européenne qui est aujourd’hui entrée en action.

    Là, même en l’absence de leurs propres partis de masse ou même semi-de masse, les travailleurs ont entrepris une action extrêmement audacieuse, et développent d’instinct leurs propres revendications. Andros de Grèce a expliqué comment l’expérience du mouvement de masse en Grèce a mené à ce qu’aujourd’hui, un Grec sur deux est en faveur de la nationalisation des banques, et un sur trois est pour le non-payement de la dette de l’État, pour laquelle on demande à la classe ouvrière de payer la facture. De telles idées ont été capables de se développer même sans que la plupart des partis d’une certaine taille ne les aient mises en avant, à l’exception de la section grecque du CIO, Xekinima.

    Rob de Russie a décrit le massacre affligeant des services publics, des salaires et des pensions qui s’est produit à travers toute l’Europe de l’Est. Dans toute une série de pays, les mouvements de protestation ont été énormes, avec par exemple le mouvement de masse dans les rues de la Lettonie qui a fait tomber le gouvernement. Mais en l’absence de tout parti ouvrier capable de prendre le pouvoir, c’est tout simplement une autre version de l’ancien gouvernement qui a été mise en place.

    La présence du CIO au Kazakhstan signifie qu’il existe le potentiel pour construire un nouveau parti des travailleurs de masse. La campagne ‘Kazakhstan 2012’, dans laquelle sont actifs les membres du CIO, a lancé plusieurs campagnes visant à défendre la population contre les expulsions de domicile, et à construire des syndicats indépendants. Elle se déclare en faveur de la ‘‘renationalisation de tout ce qui a été privatisé, sous le contrôle des travailleurs.’’ 2012 sera la date des prochaines élections présidentielles, où l’on espère que le régime répressif au pouvoir en ce moment sera remplacé. Un nouveau centre syndical y a aussi été récemment fondé.

    Le Moyen-Orient

    Les dernières fuites organisées par Wikileaks ont brutalement mis au grand jour les frictions qui existent entre les différents régimes du Moyen-Orient, comme le CIO l’avait fait remarquer auparavant.

    Yasha d’Israël a expliqué que les derniers documents suggèrent le fait que le régime israélien est sérieusement en train de se préparer à une attaque contre l’Iran, même si ce scénario est improbable. Robert a décrit comment l’intervention américaine en Irak a mené au renforcement du rôle régional de l’Iran. Mais le régime iranien n’est pas stable, comme l’a bien montré le mouvement de 2009.

    La classe ouvrière égyptienne a trouvé sa force dans le nombre de luttes qui se sont déroulées au cours des dernières années. Le taux de participation de 15% à peine lors des dernières élections montre à quel point aucun des partis politiques ne parvient à susciter le moindre enthousiasme parmi les travailleurs et les jeunes. Mais comme l’a fait remarquer Igor de Russie, une fois qu’un mouvement va commencer à se développer contre le régime détesté de Moubarak, la classe ouvrière pourrait jouer un rôle très important.

    Avec la “contagion” de la crise économique qui s’étend à partir de la Grèce jusqu’en Irlande, et maintenant potentiellement à l’Espagne, au Portugal, à la Belgique et au Royaume-Uni, c’est la question de la survie même de l’euro qui est posée.

    Illustrant les tours de passe-passe financiers qui ont conduit à la crise économique, Robin d’Angleterre a décrit comment la valeur notionnelle de tous les “dérivatifs” est équivalente à onze fois la valeur de production annuelle mondiale ! Il a expliqué que la crise économique mondiale en cours en ce moment n’est pas juste une crise cyclique faisant partie du cycle normal de croissance et décroissance du système capitaliste, mais que c’est une crise basée sur l’absence de demande. Les plans d’austérité massifs ont réduit le pouvoir d’achat des travailleurs.

    Aron d’Allemagne a fait une contribution au sujet de la tendance vers des mesures protectionnistes, dans la lutte pour une plus grande part du marché mondial. C’est là la trame de fond derrière la “guerre des devises” qui se déroule en ce moment. Les États-Unis ont lancé un autre tour massif de “facilitation quantitative” (c’est à dire, la création d’argent à partir de rien) et tentent d’inonder le monde de dollars afin d’améliorer leurs opportunités d’exportation. Paraphrasant un politicien américain, Aron a résumé ainsi l’attitude de l’administration américaine : ‘‘C’est notre monnaie, mais c’est votre problème’’.

    Cependant, les États-Unis ne peuvent pas simplement claquer des doigts et s’attendre à ce que le reste du monde accoure se mettre en rang. Peter a expliqué que l’État chinois est loin de se porter volontaire pour prendre les coups, et a exprimé la menace comme quoi si la Chine devait réévaluer sa monnaie, le monde assisterait à la fermeture de 40 millions d’usines chinoises, ce qui pourrait entrainer un mouvement de masse de la classe ouvrière chinoise, une perspective qui suscite des sueurs froides chez les gouvernements de tous les pays.

    Les conflits

    Mais la guerre des monnaies n’est pas le seul conflit qui menace le monde. La friction entre les Corées du Nord et du Sud pourrait se développer. L’Irak est une plaie béante et Judy d’Angleterre a montré que la guerre d’Afghanistan, qui est maintenant perçu comme la guerre d’Obama, est impossible à remporter pour l’impérialisme.

    Ceci sape le soutien en faveur d’Obama mais, comme Philip des États-Unis l’a dit, ce n’est pas le seul facteur de mécontentement : il y a aussi la colère croissante de la classe ouvrière et de la classe moyenne face au chômage, aux expulsions de domicile, et à d’autres effets de la crise sur leur vie de tous les jours.

    Sur base de cette expérience, c’est un sentiment anti-establishment qui a dominé les élections de novembre aux États-Unis. Le Tea Party, qui cherche à se faire passer comme l’alternative au statut quo tout en étant en réalité lié à des personnes telles que les dirigeants de la chaine Fox News, chaine droitière et pro-capitaliste, pourrait bien tirer profit de ce sentiment et de l’absence d’une alternative ouvrière de gauche. Toutefois, un sondage a révélé la nécessité urgente et le potentiel pour un tel parti, puisque plus de la moitié des personnes qui y ont répondu déclaraient avoir une mauvaise image du Parti démocrate tout comme du Parti républicain. En fait, le Tea Party a lui-même provoqué deux contre-manifestations à Washington.

    La riposte de la jeunesse

    Ty, des États-Unis, a décrit les batailles héroïques qui se sont déroulées dans le secteur de l’éducation. Des étudiants, des enseignants et des parents se sont organisés contre les coupes budgétaires et contre les attaques brutales contenues dans le programme scolaire Charter.

    Même alors qu’ils sont en train de mettre en place des plans de relance pour les grandes boites, les gouvernements vont tenter de forcer leur agenda néolibéral qui consiste à reprendre l’ensemble des précédents acquis de la classe ouvrière, tels que l’éducation, la santé et les pensions.

    Mais l’action estudiantine aux États-Unis n’est qu’un exemple parmi une nouvelle vague de mouvements de la jeunesse qui est en train de se développer. Vincent de Hong Kong a raconté comment 2.000 étudiants chinois ont démoli la cafétéria privatisée de leur campus lors d’une bataille autour de l’augmentation du prix des bouteilles d’eau. Au Royaume-Uni, les étudiants et les lycéens sont en marche en ce moment-même. En Grèce, en Malaisie, en Italie et en Irlande, les étudiants se battent pour leur avenir.

    Au Nigéria, où l’âge moyen est de 19 ans, la lutte pour l’avenir fait partie de la vie de tous les jours. Segun du Nigéria a dépeint l’horreur de la vie des travailleurs sous le capitalisme dans le monde néocolonial. Toutes les promesses rompues en terme de route, d’écoles, etc. a mené certains vieux travailleurs à commencer à penser que la vie était peut-être meilleure du temps de la colonie. Il a décrit à quel point la privatisation et la soif de profit peuvent devenir extrêmes, avec l’exemple d’une route privatisée de 6 km mais qui compte trois péages !

    Cependant, la classe ouvrière a montré sa force potentielle dans les huit fantastiques grèves générales de la dernière décennie. Le défi est maintenant de mobiliser ce potentiel dans une lutte pour changer la société.

    La crise environnementale

    La crise du changement climatique et la destruction de l’environnement ne sont qu’une des nombreuses preuves qui toutes démontrent à quel point l’idée du capitalisme en tant que système progressiste a été discréditée. Bart de Belgique a proposé des mots d’ordre qui puissent trancher à travers le scepticisme qui peut se développer face à des mesures soi-disant “vertes” telles que les taxes environnementales. Les socialistes doivent lier ce problème à celui de la crise générale, en remettant en question le droit à la propriété privée de la recherche scientifique, et avec des revendications telles que des emplois écologiques et la reconversion des usines.

    La discussion a bien confirmé que le sentiment et la compréhension de la classe ouvrière, de la jeunesse et de certaines couches de la classe moyenne est en train de changer et d’évoluer à travers l’expérience de la crise économique, politique et sociale, et surtout l’expérience des luttes émergentes.

    Le sentiment parmi les travailleurs et la jeunesse

    Les sentiments anti-banquiers, anti-establishment et anti-politiciens sont très vivaces. Sascha d’Allemagne a expliqué qu’il y a un potentiel pour un développement très rapide de ce sentiment, et que parmi certaines couches, il a acquis un caractère anticapitaliste plus prononcé. Au fur et à mesure que s’accentue l’expérience de la pire crise depuis les années ′30 et que pleuvent les coupes budgétaires qui s’abattent sur la classe ouvrière, il va y avoir une mise en question de plus en plus grande de la manière dont ces coupes peuvent être combattues et de quelle est l’alternative.

    Mais cela ne veut pas dire que les attaques violentes sur le niveau de vie vont automatiquement conduire à une plus grande volonté de se battre et une plus grande ouverture aux idées socialistes. Il peut y avoir un effet d’hébétement sous le choc de la crise, comme on l’a vu en Grèce au début de la crise. La question de la direction de la classe ouvrière va également jouer un rôle dans l’évolution d’une conscience combative et socialiste.

    Ce qui est propre à cette situation, c’est le potentiel qu’a la classe ouvrière d’infliger des défaites aux gouvernements, divisés et hésitants. Des revirements soudains de tactique de la part de la bourgeoisie peuvent se produire. Tout en essayant de forcer la mise en œuvre de leur agenda néolibéral, ils peuvent passer en un tour de main de la hache de l’austérité à la planche à billets virtuelle afin de se lancer dans de nouveaux plans de relance. Lynn a souligné le fait que toute une série d’économistes qui naguère prêchaient le monétarisme sont maintenant en train d’appeler à de nouvelles mesures de relance.

    Kevin d’Irlande a décrit la situation du sud de l’Irlande comme étant “en gestation d’une révolte”, et la discussion a amené à la conclusion que, en ce qui concerne l’Irlande comme en ce qui concerne les relations mondiales, nous sommes véritablement entrés dans une période différente.

  • Nous ne voulons pas payer leur crise: Pour un plan d’action vers une grève générale

    Partout en Europe, les gouvernements lancent un assaut frontal contre le niveau de vie des travailleurs et de leurs familles. En Belgique, nous sommes encore en retrait de ce processus, surtout parce que notre pays a pu profiter d’une croissance limitée dans le sillage de l’Allemagne. Mais cela aura une fin, la crise frappera à nouveau impitoyablement, et le prochain gouvernement procèdera à l’élaboration d’un programme d’austérité.

    Par Geert Cool

    Pour les capitalistes et les grands banquiers, la crise est déjà passée, ils renouent à nouveau avec les profits en faisant supporter le poids de la crise par la collectivité. Cette logique est faite d’attaques contre les acquis du mouvement ouvrier. En bref, nos conditions de vie, de travail, nos salaires, nos services publics,… sont sous pression alors que les riches n’ont jamais été aussi riches !

    Dans les différents pays européens, il est nécessaire de résister aux plans d’austérité et de renforcer la lutte. Ces derniers mois, plusieurs grandes mobilisations se sont déroulées (voir cadres). Mais ces protestations ne suffisent pas encore à faire émerger une autre politique que celle des patrons. Il est important que le mouvement ouvrier prenne sa lutte en mains, tant sur le plan syndical que politique. Nous avons besoin de syndicats combatifs et démocratiques, de même que de notre propre instrument politique afin de briser l’omniprésence de partis qui sont tous favorables aux plans d’austérité.

    L’establishment tout entier s’accorde à vouloir nous faire payer la crise. Cela, nous ne l’acceptons pas et nous voulons construire un rapport de forces pour non seulement contester la logique actuelle des partis traditionnels, mais aussi la stopper. La journée d’action européenne du 29 septembre dernier était un bon premier pas en ce sens, mais hélas sans une suite de la même ampleur. La mobilisation pour la nouvelle journée d’action de la Confédération Européenne des Syndicats du 15 décembre était considérablement plus limitée.

    Manifester de temps à autre ne suffira pas. Nous avons besoin d’un plan d’action démocratiquement élaboré pour aller en direction d’une grève générale de 24 heures organisée à l’échelle européenne. Cela toucherait les capitalistes là où cela leur fait mal: au portefeuille ! Faire grève partout en Europe renforcerait la résistance au niveau national et pourrait compter sur une grande solidarité. Qu’attendent encore les syndicats pour lancer un tel mot d’ordre lors de la journée d’action du 15 décembre ?

    La politique d’austérité va à l’encontre des intérêts de la majorité de la population. Cette majorité doit commencer à prendre les choses en main. Lorsqu’une telle chose se produit, les possibilités d’obtenir de véritables changements deviennent réelles. En organisant notre lutte et en l’orientant vers le renversement de ce système capitalisme en faillite totale, nous pourrons construire cette alternative socialiste qui nous est tellement nécessaire !


    Grande-Bretagne. Plus de 50.000 étudiants dans les rues le 9 novembre dernier contre le triplement des frais d’inscription à 9.000 £ (10.500 euros).

    Irlande. Début novembre, plus de 30.000 étudiants ont manifesté à Dublin contre le doublement des frais d’inscription (dorénavant jusqu’à 3.000 euros par an).

    France. Deuxième partie de 2010, 8 journées d’actions se sont déjà déroulées, avec de très grandes manifestations contre la réforme des pensions du gouvernement de Sarkozy. 70% des Français se sont dit solidaires du mouvement. A suivre…

    Portugal. 50.000 manifestants à Lisbonne et 20.000 à Porto le 29 septembre. Grève générale le 24 novembre.

    Allemagne. Quatre mobilisations en 10 jours à Stuttgart, en réaction à un projet de prestige local. La manifestation du 9 octobre comptait 150.000 participants, dans une ville de 600.000 habitants.

    Belgique. 100.000 manifestants lors de la journée d’action européenne du 29 septembre, avec de grandes délégations issues de France et d’Allemagne.

    Grèce. Six grèves générales en moins d’un an, suivies de mobilisations dans presque tous les secteurs. Une nouvelle grève générale se prépare pour le 15 décembre.

    Italie. Plus de 500.000 manifestants le 16 octobre à Rome, suite à un appel de la FIOM, le syndicat combatif des métallos.

    Espagne. Dix millions de grévistes et 1,4 millions de manifestants le 29 septembre.

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