Tag: Chasse aux chômeurs

  • Répartissons le temps de travail avec la semaine des 30 heures!

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    En Belgique comme ailleurs, nous sommes confrontés à un chômage de masse. La légère baisse connue l’an dernier par rapport à 2013 a été contrariée au cours des premiers mois de 2015. Avec 600.000(1) chômeurs environ (en dehors des préretraités, des allocataires des CPAS, des exclus…) et un nombre de postes vacants limité, notre pays comprend une énorme armée de demandeurs d’emploi désireux de travailler.

    Par une militante de la CSC, article tiré de l’édition de juin de Lutte Socialiste

    Parallèlement, le nombre de cas d’épuisements professionnels (burnouts) est spectaculaire. La charge de travail demeure trop grande et créée un stress énorme pour les ‘‘chanceux’’ qui disposent d’un emploi. La popularité de solutions individuelles telles que le travail à temps partiel, les crédits-temps, les congés thématiques, les formules de fin de carrière,… illustre le fait que les travailleurs aimeraient lever le pied. Aujourd’hui, la moyenne d’heures de travail prestée est de 31 heures par semaine, mais ce chiffre est atteint par des temps partiels imposés, avec un salaire partiel lui aussi.

    Réduction collective du temps de travail avec embauches compensatoires et sans perte de salaire.

    Cette revendication est de nature à fournir une solution. Notons qu’elle est loin d’être neuve. Au 19ème siècle, le mouvement des travailleurs exigeait la journée de travail de 8 heures (selon la formule des 8 heures de travail, 8 heures de détente et 8 heures de sommeil). Après la Première Guerre mondiale et sous l’impulsion de la menace communiste suite à la Révolution russe de 1917, les premiers pas ont été faits dans cette direction. Il en a été de même pour le suffrage universel masculin. Après la Seconde Guerre mondiale – durant les ‘‘trente glorieuses’’ – nous sommes passés des 45 heures de travail par semaine en 1964 aux 40 heures en 1974(2).

    Néanmoins, depuis lors – avec le choc pétrolier des années ’70, puis l’effondrement du Mur de Berlin et ses conséquences – aucun progrès significatif n’a été réalisé. La revendication de la réduction collective du temps de travail est passée en second plan avec une classe des travailleurs davantage sur la défensive. Pourtant, durant tout ce temps, la productivité a continué de croitre fortement. Aujourd’hui, alors que nous connaissons une nouvelle période d’essor de la lutte des classes, l’appel à la réduction collective du temps de travail refait surface ici et là.

    La semaine des 30 heures – telle que proposée par Femma (équivalent flamand de Vie Féminine) et maintenant par le PTB – assurerait que ceux qui travaillent puissent le faire moins longtemps et disposer de plus de temps pour leurs loisirs. Cela permettrait aussi à de nombreux chômeurs qui le souhaitent de bénéficier de cette redistribution massive du travail.

    Pour l’organisation de femmes Femma, cette mesure permettrait également une plus grande égalité entre femmes et hommes. Les femmes sont plus susceptibles de travailler à temps partiel que leurs homologues masculins, comme elles restent encore le plus souvent responsables des tâches ménagères et des soins à apporter aux enfants, personnes âgées,… Si la semaine des 30 heures devient la norme, un large groupe de femmes connaitraient les conditions du travail ‘‘à temps plein’’ et disposeraient donc du même salaire et des mêmes droits que leurs camarades masculins. Cela signifierait aussi une amélioration des pensions des femmes, bien souvent incomplètes aujourd’hui.

    Le groupe de réflexion Poliargus a réalisé une enquête sur le passage des 39 heures de travail par semaine aux 35 heures, en France. Dans les conclusions de cette étude(3) se trouvent divers effets positifs, comme le fait que 350.000 emplois ont ainsi pu être créés et que le taux de chômage est passé de 10,3 à 7,5%. Les améliorations ont été réelles en termes de qualité de vie, d’égalité des sexes dans la famille, de travail des personnes âgées et de réduction du nombre de travailleurs à temps partiel. Mais cette mesure a également fortement augmenté la charge de travail.

    Femma soutient(4) que l’instauration d’une légère réduction du nombre d’heures prestées par semaine pousserait les employeurs à forcer leurs employés à réaliser le même travail, mais qu’une réduction plus drastique (comme les 30 heures) ne permettrait pas pareille manœuvre. Cela devrait obligatoirement se traduire par de l’embauche.

    Enfin, une répartition collective du temps de travail avec maintien des salaires assurerait enfin que les énormes gains de productivité de ces dernières années ne disparaissent pas uniquement dans les poches des patrons.

    Rompre avec le système

    En France, l’introduction de la semaine des 35 heures a été couplée à une massive réduction d’impôt pour les entreprises ainsi qu’à un accord avec partenaires sociaux pour un gel des salaires. La question est, en effet, de savoir qui paie la réduction du nombre d’heures de travail.

    Selon la théorie de la plus-value de Marx, notre salaire ne représente que les premières heures que nous prestons. Passée cette partie de la journée (partie de plus en plus réduite avec l’accroissement de la productivité), nous commençons à remettre au patron le produit de notre travail, qui essaye de récupérer le plus possible les bénéfices de cette partie de la journée.

    Pour le système capitaliste, l’intérêt de disposer d’une armée de chômeurs est très important. Grâce à celle-ci, le patronat peut mettre sous une énorme pression les salaires et conditions de travail de tous les travailleurs, puisque ces derniers peuvent, après tout, rapidement être remplacés s’ils deviennent trop exigeants. Le projet du gouvernement fédéral visant à introduire une prestation d’un service à la communauté gratuit par les chômeurs peut également être considéré dans ce cadre : des travailleurs pourront tout simplement être remplacés par des ‘‘chômeurs en service communautaire’’. Cette forme de travail obligatoire augmente les heures totales prestées par des travailleurs, sans que cette population ne touche le moindre salaire, mais aussi sans réduction du chômage et de la pression au travail. Au contraire, la répartition du nombre d’heures de travail permettrait de réduire le chômage ainsi que la pression au travail.

    Une réduction du nombre d’heures de travail doit signifier moins de profits pour les patrons. Si cela s’accompagne de réductions des charges patronales et autres (comme en France), cela signifierait en pratique que les travailleurs paieront d’une main ce qu’ils obtiennent de l’autre. Cela reviendrait donc en une attaque frontale contre leurs salaires directs et indirects. Pour mettre en œuvre de manière optimale cette réduction collective du temps de travail, un changement de société est nécessaire. La classe des travailleurs devra reprendre en mains les secteurs clés de l’économie, ce qui signifie concrètement d’en finir avec le capitalisme.

    (1) http://www.abvv.be/web/guest/press-releases-nl/-/press/3262544/
    (2) http://www.socialisme.be/nl/21226/de-strijd-voor-arbeidsduurvermindering
    (3) http://poliargus.be/in-vijf-jaar-naar-35-uur/
    (4) http://www.femma.be/frontend/files/userfiles/files/Verkiezingen2014/2014_05_dossier.pdf

  • Chômeurs : entre criminalisation et exclusions, le gouvernement s’acharne sur les plus faibles

    “Si vous n’y prenez garde, les médias vous feront haïr les opprimés et aimer ceux qui les oppriment.”
    – Malcolm X

    Le chômage de masse s’est inscrit de manière structurelle dans le paysage de la société capitaliste depuis maintenant plus d’une quarantaine d’années. À bien des titres, il peut sembler surréaliste d’imaginer qu’en 1964, le taux de chômage en Belgique était de… 2,2%, soit 55.000 chômeurs!(1) En lieu et place de solutions collectives, les chômeurs sont rendus responsables de leur situation au point d’être littéralement les personnes les plus contrôlées du pays. Le secrétaire d’État en charge de la Lutte contre la fraude sociale, Bart Tommelein (Open VLD), a décidé d’en rajouter une couche en mai dernier en autorisant les contrôles inopinés au domicile de chômeurs.

    Par Nicolas Croes

    Une responsabilité individuelle ?

    Le gouvernement a donc supprimé l’obligation de prévenir le chômeur d’un contrôle à domicile, une mesure introduite sous la pression des mobilisations sociales en 2000, une conquête sociale qui n’aura finalement duré qu’une quinzaine d’années. Et ce n’est pas tout. Quand Tommelein a présenté son plan de lutte contre la fraude sociale, celui-ci comprenait la création d’un point central de contact pour signaler les situations de fraudes avérées ou suspectées, histoire d’encourager la délation. À cela s’ajoute encore le contrôle des factures de gaz, d’électricité et d’eau qui doivent désormais être transmises de manière ‘‘systématique et anonymisée’’ par les entreprises d’utilité publique à la Banque Carrefour de la Sécurité sociale contre la ‘‘fraude au domicile’’. Tommelein veut, de cette manière, doubler les rentrées générées par la lutte contre la fraude sociale, en les faisant passer de 50 à 110 millions d’euros par an.

    Ces dispositions se greffent à toute la batterie de mesures qui stigmatisent les chômeurs et qui vise à les considérer comme d’éternels suspects, des profiteurs, des citoyens de seconde zone, des pestiférés responsables de tous les maux économiques. Et rappelons que l’accord gouvernemental a encore pour objectif d’imposer un service d’intérêt général aux chômeurs de longue durée, c’est-à-dire d’instaurer une forme de service de travail obligatoire et gratuit.

    Pourtant, les chiffres dévoilent une situation bien différente… Selon l’ONEM, on comptait en 2014, 219.576 chômeurs en Flandre et 50.551 ‘‘offres d’emploi en suspens’’. En Wallonie, 237.276 demandeurs d’emploi pour 3.755 offres non rencontrées et à Bruxelles, 107.749 pour 4.300. En additionnant le tout, on parvient à 564.601 chômeurs (sans compter toutes les personnes exclues des allocations dites d’insertion) pour 58.606 ‘‘offres d’emploi en suspens’’.(2) Dans certaines régions, on ne trouve qu’une offre d’emploi pour plusieurs dizaines de demandeurs. Le bon vieux dicton asséné par la majeure partie des politiciens et journalistes de l’establishment selon lequel ‘‘quand on veut, on trouve’’ se heurte brutalement à la réalité. Faire porter sur les chômeurs la responsabilité du chômage est une absurdité intégrale.

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    ‘‘Si vous n’avez rien à vous reprocher, vous n’avez rien à craindre’’ (Joseph Goebbels)

    Concernant les contrôles surprises au domicile, se voulant sans doute rassurant, Denis Ducarme (chef de groupe MR à la Chambre) a déclaré lors d’un débat télévisé que ‘‘Le demandeur d’emploi qui ne fraude pas n’a rien à craindre.’’ Ces gens-là ne se rendent même pas compte de la logique dans laquelle ils rentrent! Involontairement, cette éminente figure publique du MR s’est donc fait l’écho de Joseph Goebbels, ministre du Troisième Reich nazi à l’Éducation du peuple et à la Propagande, dont le nom reste indissolublement lié à l’emploi des techniques modernes de manipulation des masses.

    Pour Yves Martens, coordinateur du Collectif Solidarité Contre l’Exclusion et membre de la plateforme Stop chasse aux chômeurs, ‘‘les chômeurs sont déjà les personnes les plus contrôlées de ce pays. (…) [Les chômeurs] ont systématiquement une présomption de culpabilité, alors que, normalement, même un criminel a une présomption d’innocence (…) On criminalise de plus en plus les chômeurs, c’est inacceptable.’’ Le quotidien La Libre (édition du 8 mai 2015) a interrogé divers magistrats qui pourraient être saisis d’une demande de mandat de perquisition dans le cas où un chômeur refuserait d’ouvrir sa porte aux contrôleurs. Les juges d’instruction sont ‘‘plus que réticents, certains n’hésitant pas à dire que l’exécutif instrumentalise le judiciaire pour légitimer sa politique.’’

    La Ligue des Droits de l’Homme, de son côté, avait déjà vertement dénoncé l’autorisation de l’utilisation des données énergétiques à des fins de contrôle comme ‘‘un pas supplémentaire, inédit et particulièrement dangereux, dans l’intrusivité des autorités dans la vie privée des citoyens.’’ Elle qualifie les contrôles inopinés au domicile de mesure ‘‘injustement stigmatisante (…), particulièrement attentatoire à la vie privée des demandeurs d’emploi et sans commune mesure avec le but poursuivi (…).’’ En conséquence de quoi la LDH a décidé de soutenir une ‘‘initiative citoyenne’’ rappelant aux contrôleurs l’inviolabilité du domicile prévue par l’article 15 de la Constitution. Elle invite à apposer une affichette à sa porte ou à sa fenêtre en solidarité avec les allocataires sociaux.

    Fraude sociale et fraude fiscale

    La Ligue des Droits de l’Homme ainsi que le Collectif Solidarité contre l’Exclusion revendiquent – tout comme le PSL – la nécessité d’en finir avec la différence entre le statut de chômeur isolé et de chômeur cohabitant, en supprimant ce dernier statut et en individualisant le droit à percevoir une allocation. Yves Martens explique : ‘‘Imaginez si, après un accident de la circulation, l’assureur de votre véhicule, vous disait qu’il rembourse moins parce que vous êtes cohabitant? Vous ne l’accepteriez pas. C’est la même chose pour l’assurance chômage, chacun cotise pleinement. Le droit doit être le même pour tous. Il faut une véritable individualisation des droits. Et si cela est fait, cette soi-disant fraude disparaitra d’elle-même.’’ De plus, cette fraude sociale du domicile est, bien souvent, une pure question de survie face à une très claire discrimination dans la législation.

    Concrètement, relever l’ensemble des allocations sociales (non seulement les allocations de chômage, mais aussi celle des CPAS, les allocations de maladie, d’invalidité,…) jusqu’au seuil de pauvreté (900 euros par mois) couteraient à l’État entre 5 et 8 milliards d’euros, selon un avis de la Cour des comptes rendu en 2012. En se référant à ce chiffre, Yves Martens aborde de suite la fraude fiscale qui sévit en Belgique : ‘‘Il y a par ailleurs une étude de l’ULB qui estime qu’une meilleure traque de la fraude fiscale rapporterait 20 milliards d’euros. Ici, on parle de 5 milliards par rapport à 20.’’ Soulignons à nouveau que la batterie de mesures indignes prévues par Tommelein dans le cadre de son plan contre la fraude sociale prévoit de récolter 110 millions d’euros…

    Commentant la somme récoltée par la lutte contre la fraude sociale en 2011, Jean-Claude Heirman (Service d’Information et de Recherche sociale – SIRS) affirmait que ‘‘Ces millions d’euros concernent les fraudes flagrantes, comme celles orchestrées par des bandes organisées qui font travailler des étrangers illégaux dans la construction ou par des entreprises qui vendent de faux C4.’’ Les infractions des chômeurs ? Un poids marginal.

    Le secrétaire général de la FGTB Marc Goblet commentait les nouvelles mesures contre la ‘‘fraude sociale’’ de cette manière : ‘‘le gouvernement s’acharne sur la fraude sociale et sur les plus faibles, mais ne montre pas la même détermination pour lutter contre la fraude fiscale.’’ Concernant la taxe Caïman – ou taxe de transparence – qui vise à lutter contre l’évasion fiscale par le biais de constructions juridiques à l’étranger, il dénonce que : ‘‘Sur 57 milliards d’euros qui, selon les Finances et la Banque Nationale, seraient disponibles dans des paradis fiscaux (hors Suisse, Luxembourg et États-Unis, NDLR), le gouvernement espère récupérer 460 millions d’impôts. Et j’entends les experts fiscaux affirmer qu’il suffira de changer les structures de ces sociétés offshore pour ne rien avoir à payer.’’ La question du domicile n’est pas partout traitée avec la même sévérité…

    Rien que le récent scandale du SwissLeaks a révélé les noms de 3.000 contribuables belges ayant profité du système de fraude fiscale développé par la banque HSBC, avec 6 milliards d’euros en jeu (voir les éditions précédentes de Lutte Socialiste). Il y a deux ans, l’OffshoreLeaks fournissait à l’Inspection spéciale des impôts (ISI, office que les libéraux flamands proposaient de supprimer en 2003) une liste de 200 Belges possédant des sociétés dans des paradis fiscaux. Le LuxLeaks avait aussi dévoilé que 26 des plus grandes et des plus riches familles de Belgique avaient bénéficié de mesures fiscales très avantageuses au Luxembourg pour éviter de payer leurs impôts en Belgique. Les sommes dont nous parlons ici sont tout bonnement phénoménales, pourtant toute l’attention de l’opinion est systématiquement ramenée sur les chômeurs. Comme le disait en son temps le révolutionnaire Malcolm X : ‘‘Si vous n’y prenez garde, les médias vous feront haïr les opprimés et aimer ceux qui les oppriment.’’

    Ajoutons enfin que la fraude patronale et fiscale n’alimente en rien l’économie réelle. Elle vient grossir les bulles spéculatives en bourse, dormir sur des comptes en banques dans des paradis fiscaux, spéculer sur les dettes publiques des États,… Ce qui fait une autre différence de poids face à la ‘‘fraude sociale’’ de pauvres qui essayent de garder la tête hors de l’eau.

    La politique d’activation des chômeurs

    Globalement, cela fait dix ans que la chasse aux chômeurs a été ouverte, avec les mesures d’activation des chômeurs. Depuis des années, la Fédération des Entreprises de Belgique, le Fonds Monétaire International, l’Organisation de coopération et de développement économiques et l’Union européenne réclamaient tous de revoir l’organisation du ‘‘marché de l’emploi’’. Ils veulent réviser le mécanisme d’indexation des salaires, progressivement limiter les allocations de chômage dans le temps et en réduire leur montant, tout en augmentant les sanctions sur les efforts insuffisants de recherche d’emploi. Les salaires ont, de plus, été mis à mal de différentes manières (gel salarial, manipulations du panier de biens de consommation servant de référence à l’index, saut d’index), mais ce sont les allocations de chômage qui ont subi l’essentiel de l’attaque dans le cadre d’une offensive qui a impliqué toutes les majorités gouvernementales fédérales qui se sont succédées.

    Ainsi, en 2004, le Gouvernement Verhofstadt-Onkelinx a mis en place un plan de ‘‘contrôle renforcé des chômeurs’’. À l’occasion des dix ans de cette mesure, le Collectif Solidarité Contre l’Expulsion a fait le bilan : près de 800.000 sanctions entre 2004 et 2012 (dernière année dont les chiffres étaient disponibles au moment de la publication de leur dossier)!(3) Rien que l’an dernier, plus de 62.000 chômeurs ont été sanctionnés d’une manière ou d’une autre. À cela s’ajoute les exclusions des allocations de chômage dites d’insertion, mesure passée sous le gouvernement Di Rupo et durcie par le gouvernement Michel : 21.351 victimes durant les mois de janvier, février, mars et avril 2015 uniquement. Parallèlement, le secteur des activés destinés aux demandeurs d’emploi a connu une croissance gigantesque au point de voir émerger un véritable marché du marché de l’emploi.

    Depuis le milieu des années ’70, toute la politique d’emploi a été dirigée par l’injonction à la modération salariale, selon le principe formulé en 1974 par le chancelier social-démocrate allemand Helmut Schmidt : ‘‘Les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain’’. Et puisque l’augmentation des profits devait augmenter les investissements et ensuite l’emploi, tout a été mis en œuvre pour attaquer les salaires de manière à assurer les profits les plus élevés possible. La part des richesses produites en une année dans un pays (PIB, Produit intérieur brut) consacrée au salaire n’a fait que chuter tandis que celle du capital a augmenté.

    Les mesures qui amplifient la chasse aux chômeurs sont à considérer dans ce cadre : appauvris, précarisés, contrôlés de toutes parts, les jeunes chômeurs se voient forcés d’accepter le premier emploi précaire en vue. Cette situation entraine la précarisation généralisée du travail au grand bénéfice du patronat et des actionnaires.

    L’armée de réserve du capital

    C’est cela qui se trouve derrière le concept d’Armée de réserve de travailleurs pour le capital développé par Karl Marx dans son fameux ouvrage Le Capital. Cette idée a notamment été développée dans le langage moderne des économistes sous le nom de NAIRU (Non Accelerating Inflation Rate of Unemployement) : la nécessité de maintenir un taux de chômage ‘‘naturel’’ qui permet de lutter contre l’inflation et indirectement de protéger les patrimoines financiers et le taux de profit. En Belgique, il ne faudrait ainsi pas descendre sous un taux de chômage de 13%.

    Quand, en 2009, le Bureau du Plan présentait ses ‘‘perspectives économiques 2007-2012’’, on pouvait y lire une analyse des ‘‘tensions sociales’’ sur les salaires rencontrées au début dans années 2000 dans le cadre du boom informatique. Pour le Bureau du plan, c’est le taux de chômage trop bas qui a poussé à ces luttes pour des hausses des salaires.(4)

    La lutte ancienne pour le partage des richesses produites entre les revenus du travail et ceux du capital est toujours bel et bien d’actualité. Les chômeurs, leur nombre et la pression qu’ils exercent sur les conditions de travail et de salaire des travailleurs, est au cœur de ce combat.

    Organisons la riposte!

    En Belgique, environ 85 % des chômeurs sont membres d’une des trois organisations syndicales nationales. Depuis une vingtaine d’années, les chômeurs représentent entre 15 et 20 % des effectifs de la Centrale générale des syndicats libéraux de Belgique (CGSLB), de la Confédération des syndicats chrétiens (CSC) et de la Fédération générale du travail de Belgique (FGTB)(5). Ce taux de syndicalisation élevé des chômeurs est lié à la possibilité pour les organisations syndicales de verser des allocations de chômage, ce qui est (sans surprise) contesté par la N-VA et Bart De Wever qui trouvent ainsi une nouvelle manière de déforcer le poids des syndicats dans le pays.

    Le rapport entre syndicats et chômeurs qui prévaut en Belgique est inédit et puise ses racines dans notre histoire sociale et dans celle de la construction de notre sécurité sociale. Il a fallu attendre le milieu des années ’70 pour que des comités de chômeurs se constituent progressivement, tout d’abord à l’extérieur des organisations syndicales, puis en leur sein (des groupes de chômeurs ont cependant également existé à d’autres périodes). Ce n’est qu’au début des années ’80 que la CSC suivie de la FGTB ont donné à ces groupes de sans-emploi un statut au sein de leurs structures (rien d’équivalent n’existe à la CGSLB).(6)

    Encore aujourd’hui, la lutte pour la défense des allocations de chômage – pourtant un aspect crucial de notre sécurité sociale – est réduite à la portion congrue. Aucune lutte de masse n’a fait suite à l’introduction de la chasse aux chômeurs en 2004 ou à celle de l’exclusion des allocations dites d’insertion en 2012. Lors de l’ambitieux plan d’action de l’automne dernier, le retrait de ces mesures n’était toujours pas explicitement mentionné dans les balises définies par le front commun syndical. Cela n’a pas empêché nombre de chômeurs de rejoindre le combat contre le gouvernement Michel et d’être présents aux différentes actions, notamment sous l’impulsion de divers collectifs, tels que le Réseau Stop Art. 63§2 (du nom de l’article de loi concernant les exclusions des allocations dites d’insertion). La défense et l’extension de notre sécurité sociale, ainsi que la défense de nos salaires et conditions de travail passent par la lutte acharnée pour le droit à percevoir des allocations de chômage décentes et illimitées dans le temps.

    Il nous faut un autre projet de société

    Face au chômage de masse, un partage équitable du temps de travail disponible entre tous est indispensable, sans perte de salaire, avec diminution des cadences et des embauches compensatoires.

    En moyenne, nous ne travaillons déjà en Belgique que 31h/semaine, et ce, sans compter ni le fait que les capacités de production ne sont pas utilisées à 100%, ni les gaspillages inhérents au système. Mais sous le régime capitaliste, cette statistique prend la forme d’une exclusion de masse via le chômage d’un côté, et d’une pression abrutissante au travail de l’autre. Le développement technologique, pour autant qu’il soit orienté vers les intérêts des travailleurs, permettrait de diminuer le temps de travail et de libérer ces derniers des tâches répétitives et abrutissantes.

    Avancer une telle revendication confronte directement la classe des travailleurs, qui doit vendre sa force de travail contre un salaire, à la classe capitaliste, qui détient les moyens de production. Pour permettre de véritablement libérer les travailleurs de l’aliénation du travail, pour permettre de dégager du temps au profit des loisirs, de la vie sociale et de l’implication dans la gestion de la société, la revendication de la réduction du temps de travail avec embauches compensatoires et sans perte de salaire doit absolument être liée à la perspective d’une rupture anticapitaliste et d’un changement socialiste de société. Ce que nous entendons par là, c’est la collectivisation des secteurs-clés de l’économie et des grandes entreprises sous le contrôle et la gestion des travailleurs et de la population au sens large.

    De cette manière, l’emploi ne serait plus le synonyme d’un maillon d’une monstrueuse chaine de production socialement et écologiquement destructrice, mais serait au contraire une contribution importante au développement de soi-même et de son apport à la société.

    Notes

    (1) ‘‘Des années ‘60 à nos jours’’, Marie-Claude Prévost, in Santé conjuguée – janvier 2006 – n° 35
    (2) Fraude, une occasion ratée? Chronique de Philippe Walkowiak, rtbf.be, 5 mai 2015
    (3) Trimestriel Ensemble pour la solidarité contre l’exclusion n°82, mars 2014
    (4) Econosphère : Le NAIRU en Belgique : 13 % de chômage utile ! Le Bureau du plan veut activer les plus de 50 ans !
    (5) L’organisation des chômeurs dans les syndicats, Publié dans Courrier hebdomadaire du CRISP 2006/24 (n° 1929-1930)
    (6) L’organisation des chômeurs dans les syndicats, Publié dans Courrier hebdomadaire du CRISP, 2006/24 (n° 1929-1930)

  • Avoir plus de 50 ans et être à la recherche d’un emploi : témoignage

    En route vers le bureau d'outplacement?

    Dans ma boîte mail, je garde toujours la réponse que j’ai eue suite à une sollicitation d’emploi effectuée en juin dernier. Ce mail était particulier et pas uniquement parce que, cette fois, j’avais obtenu une réponse. Après un entretien suit habituellement une réaction, après une sollicitation spontanée, ce n’est pas le cas.

    Par Wilfried

    La réponse que l’on reçoit contient habituellement des phrases du style: ‘‘Malgré vos points forts, il nous est malheureusement impossible de répondre positivement à votre sollicitation. N’hésitez toutefois pas à regarder nos autres postes vacants, etc., etc.’’ La plupart du temps, les chances que les choses aillent plus loin sont proches de zéro.

    Cette fois-ci, la réponse était différente. ‘‘Nous exprimons des réserves concernant les risques d’intégration et votre âge.’’ J’ai directement répondu en demandant une explication. ‘‘Ce risque d’intégration, je ne comprends pas ce que cela signifie’’, ai-je demandé. ‘‘Monsieur, vous avez passé 28 ans dans la même entreprise. Notre client croit que vous ne serez plus en mesure de vous adapter à un nouvel environnement, à de nouveaux collègues. Par ailleurs, les autres employés sont assez jeunes.’’ Moi qui pensais que ces 28 ans passés auprès du même employeur constituait un élément positif (fidélité à l’entreprise même dans les moments difficiles en continuant à y travailler jusqu’à ce que la société fasse faillite) ! Visiblement non.

    Les étapes du ‘‘marché de l’emploi’’

    Si, quelque part, quelque démissionne ou part en pension, on essayera tout d’abord de modifier la charge de travail en interne. Lisez : faire travailler les autres plus intensément est la priorité. Ce n’est que si cela n’est pas possible que l’on demande aux employés s’ils connaissent quelqu’un.

    Dans ce cas, un réseau comme LinkedIn ou Facebook peut être utile. J’ai bien essayé, mais je n’ai pas vraiment un bon profil LinkedIn. N’avoir travaillé que dans une seule entreprise à mon âge, cela ne se fait pas. Mon profil n’est pas très ‘‘flashy’’. Aujourd’hui, on recherche essentiellement des trentenaires disposant d’une expérience dans plusieurs boîtes. Je ne rentre pas là-dedans.
    L’autre étape, c’est l’intérim ou les offres d’emploi interne. Mais toutes les agences foncent sur la moindre offre d’emploi. Les agences ne l’emportent que si elles disposent du candidat idéal. Cela soulève directement la question du nombre d’emplois effectivement disponibles.

    Les offres d’emploi internes ou à travers les réseaux sociaux restent invisibles. Mais j’ai compté les postes vacants proposés par les agences d’intérim, le VDAB (Service flamand pour la recherche d’emploi et la formation professionnelle, équivalent flamand du FOREM),… J’ai constaté parfois qu’un même emploi était repris cinq ou six fois, mais avec un numéro distinct du VDAB. Lorsque j’en ai parlé aux fonctionnaires, ils m’ont répondu qu’un système de filtrage existait pour éviter ce genre de situation. L’explication convient à ceux qui veulent bien le croire.

    Il ne serait pas nécessaire de créer de nouveaux emplois. J’ai dans ma ‘‘collection’’ une offre d’emploi pour une entreprise de construction daté de septembre 2013, puis de novembre 2013, ensuite de novembre 2014 et à nouveau d’avril 2015. A chaque fois c’est la même mise en page, la même description, les mêmes compétences requises, … Ce ne sont bien entendu pas des emplois différents. Je le sais bien, j’ai sollicité à chaque fois pour cet emploi.

    L’outplacement et sa commercialisation

    L’outplacement a pour objectif d’accompagner un travailleur licencié à retrouver un emploi. En ayant plus de 50 ans et recherchant un nouvel emploi après 28 ans de travail au même endroit, j’ai immédiatement fini dans l’outplacement. Cette formule peut inclure une discussion, les jeux sont tout aussi pipés. L’objectif est d’aider le candidat à se vendre lui-même le mieux possible, même si cela entraine des échecs puisqu’il n’est pas le surhomme qu’il prétendait être.

    Certains peuvent avoir un peu plus de chances de trouver un job de cette manière, mais ça ne crée pas de nouvel emploi (sauf pour l’entreprise d’outplacement). Concrètement, si les 10 premiers peuvent obtenir un emploi à partir du groupe à la ligne de départ, quelques-uns peuvent être plus favorisés car ils peuvent faire la course à vélo, voir en voiture de sport avec les outplacements réservés aux cadres.
    Cela a créé un nouveau marché. Le VDAB recourt à Galilei (une division de Randstad) pour ses outplacements, ou encore à des entreprises comme Skillbuilders ou Mentorprice. Ils reçoivent une belle commission pouvant aller de 300 à 500 euros de l’heure.

    Un dernier commentaire à ce sujet. Pendant mon outplacement, le silence était complet quant à ce à quoi je devaitsm’attendre au niveau du salaire. A mon licenciement, je gagnais environ 3.500 euros bruts. Lors d’une sollicitation, on m’a demandé ce que je recherchais, j’ai parlé de 3.000 euros bruts. J’ai perdu les quelques chances qui me restaient. Le maximum dans le secteur en question était apparemment de 2.500 euros bruts, mais je n’en ai jamais entendu parler lors de l’outplacement.

    Quelles sont mes chances de trouver un emploi ?

    Mes chances de succès ne semblent franchement pas bonnes. Les nouvelles branches d’activité comprennent 5 à 6% de travailleurs âgés de plus de 50 ans. Pour les personnes de plus de 55, il s’agit à peine de 2%, essentiellement à des postes de direction.

    Parmi les chômeurs âgés de 55 à 59 années, seuls 5,5% trouvent un emploi, un taux qui chute à 2,6% pour les personnes de plus de 59 ans.

    Que me reste-t-il après 28 ans de service ?

    Peut-être le lecteur pense-t-il qu’après 28 ans de service, l’indemnité de départ était assez importante pour être capable de s’en sortir quelques années. Selon la formule Claeys habituellement utilisées dans le licenciement d’employés, j’avais droit à 27 mois de salaire. Avec les arriérés et d’autres rémunérations, j’en suis arrivé au chiffre de 127.700 euros bruts.

    Mais le montant que le Fonds d’indemnisation des travailleurs licenciés en cas de fermeture d’entreprises (FFE) paie est limité à 25.000 euros bruts par travailleur. Au final, net d’impôts, il me restait environ 10.000 euros sur un montant initial de 127.700 euros. Et encore, les choses auraient pu être pires puisque le Fonds de fermeture des entreprises n’intervient pas pour les entreprises de moins de cinq travailleurs. Ceux-là, ils n’obtiennent tout simplement rien !

    Qui est ‘‘activé’’ ?

    L’obligation d’être actif sur le marché de l’emploi assure un accroissement des parts de marché pour les cabinets d’outplacement et autres superviseurs. C’est leur chiffre d’affaires qui est activée. Pour moi, cela signifie juste que je dois chercher une aiguille dans une botte de foin sans savoir combien je serai payé. Après 28 ans de travail, j’ai été mis à la porte avec une aumône. Et après ça, les partis de droite dure disent que je dois être plus incité à chercher du travail en entendant de la bouche des patrons que je suis trop vieux ?

  • La lutte continue contre les exclusions de chômeurs !

    stop_art_liege_demoLa logique dominante actuelle vise à individualiser les problèmes sociaux, à tenter de convaincre chacun qu’il est le seul responsable de sa situation. Dans le domaine du chômage, le raisonnement est poussé jusqu’à l’absurde, comme l’illustre l’Article 63§2 qui limite dans le temps les allocations de chômage dites d’insertion.

    Par Nicolas Croes

    Cette mesure profondément antisociale a été votée sous le gouvernement Di Rupo, durcie sous celui de Michel et est entrée en vigueur le 1er janvier dernier. En janvier uniquement, 16.900 personnes ont été exclues de leur droit aux allocations de chômage en vertu de l’application de cet article. 35.000 personnes devraient être touchées en 2015 uniquement.

    Comme vient encore de le dénoncer le centre universitaire anversois OASes (Ongelijkheid Armoede, Sociale Uitsluiting en de Stad), ‘‘Le marché du travail n’est pas adapté aux mesures actuelles. Les emplois manquent, ce qui fait que ce n’est pas la bonne mesure à adopter.’’ Effectivement, le nombre publié chaque mois de personnes partiellement ou totalement sans emploi – et donc disponibles sur le marché du travail – atteint en réalité plus de 900.000 personnes. Selon les chiffres publiés par les services régionaux de l’Emploi (Forem, Actiris, Vdab), ces personnes sont mises en concurrence pour un nombre d’emplois disponibles avoisinant les 40.000 postes de travail (12.000 en Wallonie, 8.000 à Bruxelles et 16.000 en Flandre en décembre 2014). Rendre les chômeurs responsables de cette situation n’a bien entendu aucun sens.

    Les actions du 25 février

    Le 25 février dernier, une journée d’action commune a pris place dans 7 villes du pays suite à un appel du Réseau Stop Art.63§2 (à Charleroi, Namur, Liège, Bruxelles, Anvers et Verviers) et du Comité contre les exclusions à La Louvière. Il s’agissait essentiellement de manifestations démarrant des CPAS pour se rendre au siège local de l’ONEM. L’idée était partie de Liège, notamment portée par la dynamique construite autour de l’Alliance pour des Alternatives à l’Austérité (AAA), un regroupement de divers organisations et individus lancé suite à un rassemblement anti-austérité devant le siège liégeois du MR en septembre dernier.

    A Liège, Thierry Müller, du Réseau Stop Art.63§2, a notamment déclaré à la petite foule réunie pour la manifestation : « Cette mesure est injuste, cynique et absurde tant économiquement que budgétairement et moralement. Elle est d’autant plus contestable qu’elle est discriminatoire sur le plan des genres. Elle est d’autant plus inacceptable que le marché de l’emploi est exsangue et complètement dérégulé, n’offrant que de rares jobs, souvent sans saveur ni valeur, et qui en tout cas ne permettent jamais de quitter le régime du chômage d’insertion. Cette mesure est d’autant injustifiable que la Belgique est le 10e pays européen, le 17e mondial, le plus riche par habitant. Elle l’est d’autant plus qu’il y avait déjà 15% de la population belge qui survivait sous le seuil de pauvreté et que ce type de mesure d’austérité va exploser ce chiffre vers le haut, comme le démontrent les exemples grecs, espagnols, portugais ou irlandais. » Il a notamment conclu par ces mots: ‘‘le fondement même de ces mesures consiste à affaiblir le rapport de force des salariés en tant que classe.’’

    C’est là que réside le véritable objectif de la mesure : instaurer une pression à la baisse sur les salaires et conditions de travail de tous. Les emplois précaires vont continuer à se développer, au grand plaisir des patrons qui seront gagnants sur tous les tableaux avec les réductions de leurs cotisations patronales, sous prétexte de les aider à créer de l’emploi. La Sécurité Sociale continuera à être détricotées. La voie est ainsi ouverte pour la limitation dans le temps de toutes les allocations de chômage.

    Défendons notre sécurité sociale!

    Ce dont nous avons collectivement besoin aujourd’hui est une campagne massive pour fédérer et unifier tous ceux qui sont attaqués et qui doivent résister. Le front commun syndical a fixé plusieurs balises pour son action contre le gouvernement Michel, et parmi elles la préservation d’une sécurité sociale fédérale forte, avec la défense des allocations de chômage, des pensions ou encore des soins de santé. Le retrait des mesures d’exclusion des chômeurs doit faire partie intégrante de ce combat.
    Au-delà de cela, il nous faut dès maintenant défendre la solution de la réduction collective du temps de travail avec embauches compensatoires et sans perte de salaire, une mesure somme toute logique, mais qui ne pourra être réellement mise en œuvre au bénéfice des travailleurs qu’avec le contrôle démocratique des secteurs clés de l’économie.

  • Socialisme 2015 : Discours de Thierry Müller (réseau Stop Art.63&2)

    thierry_soc2015Le samedi 28 mars dernier se déroulait la journée “Socialisme 2015”, à la Pianio Fabriek, à Bruxelles. L’événement, organisé par le PSL, a notamment accueilli un représentant du réseau Stop Art. 63&2 pour son meeting de clôture autour du slogan “Michel dégage”. Nous reproduisons ci-dessous l’intégralité de la prise de parole de Thierry Müller.

    “Bonsoir. Un tout grand merci de me donner l’occasion de prendre la parole, en tant que militant du réseau Stop Article 63§2, dont le PSL a signé l’Appel, tout comme Ega d’ailleurs, et tout comme 104 autres organisations. Merci, camarades, d’être ainsi à nos côtés.

    Cela faisait des mois qu’ils l’avaient annoncé, 3 ans très exactement, et ils l’ont fait. Froidement. Cyniquement. Crapuleusement. Depuis le 1er janvier 2015, plus de 20 000 personnes… DEJA… ont perdu leurs allocations de chômage. Moins de la moitié devrait échouer aux portes des Cpas où ils rafleront un RIS sous le seuil de pauvreté, des CPAS souvent exsangues et englués dans les mêmes travers du contrôle social, de l’activation, de la contractualisation du droit.

    Le PS nous l’avait vendue, cette mesure, comme la concession nécessairement faite aux libéraux, après 500 j de négociation pour la constitution d’un gouvernement, une quasi crise de régime déclarait et déclare encore Elio Di Rupo… Une concession visant à nous préserver de la NVA. Aujourd’hui, Elio, on a l’Article 63§2 et articles connexes, et puis son cortège de misère qui fait saigner ton coeur, mais en prime, Elio, on a la NVA, ce qui a conduit à aggraver encore la mesure : plus d’allocation d’insertion avant 21 ans pour ceux qui n’ont pas un diplôme d’études secondaires supérieures ou d’études en alternance, ce qui crée ce précédent qu’un droit lié à la sécurité sociale est désormais conditionné à l’obtention d’un diplôme qui n’est pas le moindre. Et obligation de demander l’accès aux allocations d’insertion avant 25 ans , ce qui de facto va en exclure une bien grosse part des universitaires.

    Mais de quoi s’agit-il en somme, à quoi riment au fond toutes ces mesures dont l’Article 63§2 ? Fallait-il nécessairement que des sacrifices soient ainsi faits pour sauver le pays, notre pays, sur-endetté ? Tout le monde, nous a-t-on répété devra, doit, faire des efforts, se serrer la ceinture.

    Alors ces exclus de l’Article 63§2 ont- ils été offerts en sacrifice pour renflouer les dettes NATIONALES ? Le gain engrangé sera tout au plus de 50 à 100 millions d’euros ! Et là on vient de nous annoncer qu’il va falloir trouver 2 milliards d’économies… supplémentaires !

    Exclus alors pour relancer l’économie ? Leur retirer des allocations, c’est globalement réduire le pouvoir d’achat de la population, c’est contracter une économie déjà en surproduction, c’est, l’exemple Grec le démontre, aggraver mois après mois la situation, c’est comme le montre chaque exercice d’ajustement budgétaire, répéter le sempiternel discours que l’on vient d’entendre cette semaine encore : il nous faudra trouver plus, toujours plus…Et donc encore plus… d’austérités.

    Ce pays avait-il besoin pour s’en sortir de créer cette misère ? Le 17e pays le plus riche au monde, le 10e le plus riche d’Europe, devant l’Allemagne, la France et l’Italie ! En 2011, quand fut décidée cette mesure, Eurostat déclarait que la Belgique était le pays où le patrimoine financier moyen par ménage était le plus élevé d’Europe. A la même époque, la RTBF titrait sur son site web : « En dix ans, le Belge aurait augmenté son patrimoine financier de 18% ». Elle précisait que «Le Belge dispose en moyenne de 167.600 euros»… moi, pas ! Mais je ne suis qu’un foutu féniasse de chômeur de longue durée ! A côté de cela, en réalité, 15% de la population de notre pays vit en dessous du seuil de pauvreté, comme moi. Fallait-il vraiment renforcer de tels écarts pour sauver les avoirs d’une classe moyenne aux abois ? Qu’y gagne-t-elle ?

    Rien. En réalité, il ne s’agissait pas de sacrifices légitimes, rationnels. La vérité, c’est que ces exclus étaient estimés coupables de quelque chose de répréhensible, de très condamnable même si l’on mesure les effets conséquents de ces exclusions sur leur existence et sur celle de leur famille ?

    Coupable, nous a déclaré Kris Peeters, de pas avoir cotisé suffisamment, ne pas avoir accumulé dans un temps donné suffisamment de temps d’emploi. Il s’agissait pour eux, il s’agit pour eux, car des exclus il y en aura dorénavant tous les mois, de travailler, par exemple s’ils ont moins de 36 ans… 12 mois ETP dans un délai de 21 mois. Tiens ! Tiens ! Juste au-dessus d’un mi-temps ; 10 ans, 20 ans à mi-temps vous replongeront systématiquement en cas de licenciement dans des allocations d’insertion, vous remettront en risque de vous faire couper la tête ! Voilà pourquoi 66% des exclus sont des femmes d’ailleurs.

    Trouver en trois ans… de quoi cumuler 12 mois de travail ETP dans une période de 21 mois, alors que, dans ce pays, chaque mois, sont mis en concurrence, pour 30 à 50 mille jobs à pourvoir…combien de personnes à votre avis ? Combien sont totalement ou partiellement sans emploi, et tenues par la carotte ou le bâton de se sortir de là ? Plus de 900 000, toutes catégories confondues. Cela fait une moyenne nationale de 1 emploi pour 30 personnes susceptibles de vouloir occuper le poste ! En réalité, à chaque job, et même aujourd’hui à chaque formation, pour lesquels vous postulez, vous vous retrouverez en pratique mis en concurrence avec 50, 100 ou parfois 150 candidats ! Qui en tire les choux gras ? Ceux qui sur le marché de l’emploi ne viennent pas se vendre eux mais faire leurs emplettes !

    Mais il y a plus absurde : la plupart de ces jobs « offerts », -ben oui, c’est sûr!-, ne permettent jamais de quitter le régime des allocations d’insertion. La plupart sont des jobs à temps partiels, ou à durée extrêmement courtes, des intérims, pire : des pseudos emplois comme indépendants ou franchisés, qui ne sont aucunement comptabilisables pour ouvrir votre droit à des allocations sur base d’un travail !

    Le réseau Stop Article 63§2 s’est constitué pour dénoncer les dérives et les délires justificatoires extrêmes que renferme cette mesure, mais elle n’est juste qu’emblématique de toutes les autres que nous n’oublions pas.

    Comme bien sûr, et nous le dénonçons avec force, le renforcement draconien et généralisé des contrôles de la disponibilité « active », qui a fait exploser les exclusions ou sanctions pour insuffisance de recherche d’emploi : 62 000 en 2014 ! Et cela va se durcir encore, et bien, selon nos informations ! La chasse est sans pitié contre ceux qui ne cherchent pas assez, comme si partir à la cueillette aux champignons allaient les faire pousser, comme si chercher de l’emploi allait le faire exister ! Tout cela s’ajoutant à toutes les autres mesures prises ces dernières années : généralisation de la dégressivité des allocations sur base d’un travail qui finit par conduire tout chômeur de longue durée sous le seuil de pauvreté, obligation d’accepter un boulot à moins de 60km de votre domicile quelque soit le temps nécessaire pour y arriver, obligation d’accepter n’importe quel job que vous êtes intellectuellement ou physiquement capable d’assumer quelle que soit votre formation si dans les 5 mois après la fin de vos études, vous n’avez pas trouvé dans votre secteur.

    7 ans de menuiserie, vous ne trouvez pas comme menuisier ? Vous ferez bien facteur, barman, call center ou livreur de pizzas ! Y a pas de sots métiers Et si vous avez philo, romane, psycho, entre 5 et 7 ans d’études universitaires, massivement financés avec l’argent de la collectivité ? Pareil : si, dans les 5 mois, vous n’avez pas trouvé comme philosophe, prof de français ou psychologue, vous ferez caissier, ré-assortisseur de rayons ou vous reprendrez une formation comme conducteur de clark, histoire d’enrichir votre profil de compétences ! Une bonne manière de valoriser l’investissement collectif, public, dans la formation des jeunes, non ? !

    Alors que faire ? Sur la question de l’Article 63§2, dont nous faisons une obsession parce que nous ne voulons pas lâcher l’affaire, parce que nous continuons de penser que c’est gagnable, parce que nous continuons de penser que nos luttes ont besoin de victoire et d’arrêter l’infernale spirale des défaites, cette spirale qui entretient l’impuissance, nous avons deux pistes à court terme sur lesquelles nous voulons vous proposer de vous mobiliser avec nous !

    La première est pour tout bientôt. Pour des raisons que nous ne discuterons pas ici, das le courant du mois qui vient, Ecolo et… le PS, si!si !, il faut bien juguler la veine qui suinte, vont déposer chacun,- -c’est inattendu et prequ’inespéré pour nous, comme quoi la lutte paie !-, une proposition de loi visant à abroger l’Article 63§2 et suivants. La pression doit donc être maximale dans les jours qui viennent. La clé sera dans les mains des 18 députés Cd&V. Nous allons faire des propositions dans lesquelles vous pourrez entrer pour aider à faire monter cette pression, à commencer par être présent et présente ce jour-là devant le Parlement. Malheureusement nous ne savons pas encore la date. Nous ne la connaîtrons que deux semaines à l’avance. Sous cette législature, il n’y aura pas d’autres opportunités pour qu’un vote ait lieu sur cette question. Alors SVP, venez !

    La seconde piste : convaincre les organisations syndicales, et surtout leurs dirigeants, que ces questions de régression des droits au chômage méritent une 5e balise. Les attaques contre les droits au chômage ne sont pas des attaques contre les chômeurs, catégorie sociale singulière, qu’il s’agirait d’entendre et de défendre comme les pensionnés par exemple, les jeunes ou les immigrés. Les attaques contre les droits au chômage affectent directement ici et maintenant tout salarié, sans ou avec emploi… Le gars qui tous les jours va travailler, avec dans sa voiture une radio qui lui assène les discours méprisants et stigmatisants sur les chômeurs, lui rabachent les commentaires les plus crapuleux sur ces « sans emploi » qui en profitent, qui entend les mesures que subissent ceux qui en sont et la mise en misère dans laquelle cela les place, eux et leur famille … ce gars-là arrive façonné au boulot, formaté, à accepter ce qui lui sera demandé sans l’ouvrir, à laisser toute exigence au vestiaire voir même au parking, de l’entreprise !

    Il en accepte, nous en acceptons… la déglingue de nos conditions de travail avec toute la souffrance physique et psychique que cela entraîne jusqu’à l’insupportable, qui nous ferait, qui nous fait parfois, haïr ceux qui au chômage y échappent, pourtant nos frères de classe ! Accepter aussi au nom de plus de facilités d’embauche pour les patrons, donc espérons-nous, d’une réduction de la pression que nous subissons tous sur le marché du travail, accepter donc une lente mais sûre déconstruction du fleuron de nos conquêtes politiques qu’est la sécurité sociale ! Réduction des cotisations depuis trente ans, réductions en parallèle des prestations, menace permanente, -chantage en réalité-, sur nos pensions et le remboursement de nos soins de santé… Et à côté…

    A côté quoi ? A côté, durant ces trente calamiteuses, la répartition de la richesse produite par notre travail, que mesure économiquement le Produit Intérieur Brut, a vu la part qui revient au capital, parasitaire, grimper de 10% et celle… qui nous revient à nous, les seuls réels producteurs de cette richesse, chuter d’autant ! En trente ans, camarades, ils en sont arrivés à nous piquer dorénavant 40 milliards de plus que ce qu’ils nous piquaient déjà ! Cela représente un vol mensuel SUPPLEMENTAIRE réalisé sur chaque habitant de ce pays de 300 euros. 300 euros par personne et par mois !

    La capture capitaliste aujourd’hui sur la richesse que nous produisons en commun, en dehors ou dans l’emploi, est de 150 milliards chaque année ! 12 milliards par mois… plus de 1000 euros par habitant, volés au profit en bout ce course d’une poignée de spéculateurs ou de fonds d’investissement sur lesquels nous n’avons aucun contrôle !
    Se battre aujourd’hui pour le renforcement de la sécurité sociale, et particulièrement pour des droits au chômage maximum, c’est se battre pour créer les conditions légales et institutionnelles permettant que l’ensemble des salariés reconquièrent pas à pas ce dont chaque mois, chaque jour, chaque heure les capitalistes les spolient.
    Se battre aujourd’hui pour les droits au chômage, ce n’est pas faire oeuvre de solidarité envers les chômeurs attaqués, ce n’est pas non plus sauvegarder des droits dont on pourrait un jour avoir besoin… En réalité, c’est créer, maintenir ou retrouver les conditions même d’un rapport de force nécessaire à la lutte de classe. Il en va de notre survie, de notre dignité et de celles de nos enfants.”

  • [PHOTOS] Manifestation à Bruxelles contre les exclusions de chômeurs

    Quelque 150 personnes ont participé à cette action organisée à Bruxelles par le réseau "Stop article 63§2" et les JOC, soutenus et rejoins par divers groupes comme "Acteurs des temps présents", Hart Boven Hard / Tout Autre Chose, etc. Le PSL a également participé à cette action.

    => Rapport de l’évènement

  • [VIDEO] Interview de Thierry Müller, du Réseau Stop Art.63§2

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    Interview de Thierry Müller du Réseau STOP Art.63§2 dans le cadre d’un reportage de la RTBF consacrée à la journée d’action contre l’Article 63§2 et les exclusions des chômeurs de leurs allocations dites d’insertion.

    Thierry Müller sera orateur lors de la journée “Socialisme 2015” organisée par le PSL le 28 mars à Bruxelles (plus d’infos).

  • Nous sommes les 35000 ! On rentre chez nous ! [Liège]

    Photo : Réseau Stop At.63§2.“Et pour ne pas se laisser faire, on va foutre leur système en l’air!”

    Nous étions quelque 350 à défiler hier dans les rues de Liège, du CPAS place Saint Jacques aux locaux de l’ONEM, en passant par la Médiacité. la pluie n’a pas su refroidir les arderus des manifestants qui n’ont scandé des slogans tels que “c’est pas les sans-emplois, c’est pas les chômeurs, c’est l’austérité qu’il faut virer!” ou encore “qui sème la misère récolte la colère”.

    Cette manifestation prenait place dans le cadre lancé par le Réseau Stop Art.63§2 qui lutte contre cette mesure adoptée par le gouvernement Di Rupo et durcie par celui de Michel qui réduit fortement les conditions d’accès aux allocations d’insertion. A Liège, Bruxelles, Namur, Verviers, Anvers,… des rassemblements et/ ou manifestations ont donc exigé d’une seule voix l’abrogation pure et simple de l’Article 63§2 et la réintégration des milliers de chômeurs ayant perdu leur droit aux allocations de chômage depuis ce 1er janvier 2015. Les actions prenaient donc place sous le titre “Nous sommes les 35.000! On rentre chez nous!”.

    De nombreuses associations et partis étaient présents (Vie Féminine, Ginger, Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté, Ecolo, PTB, PSL, EA,…) mais aussi la CSC et des militants des Travailleurs sans emploi (TSE) de la FGTB de Luxembourg. Une délégation d’une dizaine de représentants d’organisations a été reçue par le directeur de l’ONEM, qui s’est retranché derrière les missions de l’Onem et les seuls chiffres qu’il est sensé avoir à sa disposition (les chômeurs indemnisés c’est-à-dire ceux auxquels l’Onem verse une “indemnité”, mais certainement pas les offres d’emplois). Un dialogue de sourds qui fut un beau cas d’école…

    Si l’occasion précise de cet évènement était la lutte contre l’article 63§2, les manifestants étaient tout aussi remontés contre toute la politique d’austérité.

    Une prochaine occasion de lutte nous est offerte ce 11 mars à Bruxelles avec le rassemblement du front commun syndical, premier pas d’un deuxième plan d’action contre le gouvernement Michel et contre la politique d’austérité après la réussite du premier. La question des exclusions de chômeurs fait partie intégrante de la lutte anti-austérité.

  • Nous sommes les 35000 ! On rentre chez nous ! [Bruxelles]

    stopArt25A côté des manifestations simultanées à Anvers, Liège, Namur, Charleroi, Verviers et La Louvière, le réseau “Stop Art. 63§2” mobilisait également à Bruxelles ce mercredi après midi.

    Par Nico M. (Bruxelles)

    Quelque 150 personnes ont participé à cette action organisée à Bruxelles par “Stop article 63§2” et les JOC, soutenus et rejoins par divers groupes comme “Acteurs des temps présents”, Hart Boven Hard / Tout Autre Chose, etc. Le PSL a participé à cette action.

    Le manque d’emploi est un problème majeur et structurel de notre société. Toutefois, ce sont systématiquement ses victimes que l’on accuse et sanctionne, comme c’est le cas en ce moment avec les exclusions des allocations dites d’insertion. Face à cela l’action se dirigeait vers les bureaux de l’ONEM afin de faire signer à l’institution une déclaration reconnaissant le manque d’emplois disponibles : en 2013, nous comptions 584.302 demandeurs d’emploi en Belgique (source FOREM) pour à peine 61.630 emplois vacants la même année (source SPF Économie) !

    Pour l’administrateur qui a reçu la délégation, ce type de déclaration ne doit pas être dite, il s’agit d’une position beaucoup trop “politique”. Cette rencontre illustre une nouvelles fois l’hypocrisie des politiques menées. Pour les partis qui se succèdent au pouvoir, la question est d’assainir les dépenses sociales, pas de résoudre un problème structurel au sein du système capitaliste.

    La marche bruxelloise a également fait halte devant les locaux du PS avec la ferme intention de rencontrer Di Rupo. Celui-ci avait pris soin de prévenir qu’il ne serait pas sur place ce mercredi, laissant Laurette Onkelinx rencontrer une délégation. Les militants voulaient également lui faire signer une déclaration concernant les mesures d’exclusion des chômeurs mises en place par le gouvernement Di Rupo. En effet de nouveau de manière hypocrite celui-ci avait déclaré, une fois rejeté dans l’opposition au fédéral : “C’est une mauvaise mesure que je regrette, j’ai le cœur qui saigne quand je pense à ces femmes et ces jeunes qui vont être exclus.”

    Ont participé à cette action également des représentants des TSE de la FGTB et de la CSC. Un délégué CGSP également présent a pris la parole pour expliquer notamment qu’à Woluwe Saint Lambert, la commune veut licencier 8 travailleurs du CPAS afin d’assainir les finances communales. C’est une des trop nombreuses illustrations du fait que les attaques ne sont pas isolées.

    La chasse aux chômeurs est un des bras de la politique d’austérité. De plus, précariser les demandeurs d’emplois accentue la concurrence sur l’ensemble du marché de l’emploi. Ce dont nous avons collectivement besoin aujourd’hui est une campagne massive pour fédérer et unifier tout ceux qui sont attaqués et qui doivent résister. Une campagne sur le modèle du plan d’action qui avait conduit à la grève générale du 15 décembre 2014. Nous avons besoin d’un deuxième plan d’action.

    Ce 11 mars se tient à Bruxelles une concentration de militants en front commun syndical. C’est un premier pas vers l’élaboration d’un tel deuxième plan d’action. Pourquoi ne pas mobiliser pour une nouvelle manifestation nationale massive à la suite de cette concentration. Et cela avec déjà en tête pour chacun les dates pour de nouvelles grèves générales allant crescendo pour dégager toute la politique d’austérité, du fédéral aux régions et communes, là où le parti de Di Rupo est encore aux manettes ! Les chômeurs pourraient dans un tel plan s’investir pleinement pour défendre leurs propres revendications, comme celles de “Stop article 63§2”, aux côtés de l’ensemble des travailleurs et des jeunes.

  • Vers une limitation de l’assurance chômage. Pas d’alternative : vraiment?

    chomage_2015Le manque d’emploi est un problème majeur et structurel de notre société. Toutefois, ce sont systématiquement ses victimes que l’on accuse et sanctionne, comme c’est le cas en ce moment avec les exclusions des allocations dites d’insertion. Quelle alternative crédible le mouvement organisé des travailleurs peut-il mettre en avant ?

    Par Emily (Namur)

    Chômage de masse : à la faveur de qui ?

    Depuis 30 ans, nous subissons un chômage structurel. Le taux d’emploi – qui exprime un rapport entre les personnes qui ont effectivement un emploi sur celles en âge de travailler – n’est que de 57% (2013, Belgique). Un constat ressort : il n’y a pas suffisamment d’emplois pour tous. En 2013, nous comptions 584.302 demandeurs d’emploi en Belgique (source FOREM) pour à peine 61.630 emplois vacants la même année (source SPF Économie) !

    Pourtant, l’idéologie dominante veut faire passer les travailleurs sans emploi pour des fainéants et des profiteurs à sanctionner. Le grand patronat a toutefois intérêt à maintenir un certain taux de chômage : cette armée de réserve du capital lui permet de tirer vers le bas les conditions de travail et salaires. ‘‘Tu n’es pas content de ton boulot? Il y en a 10 qui attendent de prendre ta place!’’ Le monde patronal est, en cela, soutenu par les autorités gouvernementales du pays, dont les efforts visent aussi à favoriser le développement d’un large secteur à bas salaires. Derrière la rhétorique reposant sur la prétendue ‘‘priorité à l’emploi’’ se cache une campagne pernicieuse rendant les travailleurs sans emploi responsables de leur situation.

    Attaquer les chômeurs ou le chômage ?

    emploi_02C’est ainsi que de nombreuses mesures ont été instaurées, dont le mécanisme ‘‘d’activation’’ des chômeurs, mieux connu sous le sobriquet de ‘‘chasse aux chômeurs’’. Cette mesure instaurée en 2004 (à l’instigation de la coalition libérale/social-démocrate de l’époque) se base sur des contrôles permanents et renforcés pouvant conduire à des exclusions temporaires ou définitives du droit aux allocations de chômage. Sa logique est que les chômeurs se complaisent dans leur situation d’isolement social, de détresse psychologique et de précarité financière…

    Le gouvernement Di Rupo en a rajouté une louche en 2011 avec la limitation dans le temps des allocations de chômage dites d’insertion jusqu’à 3 ans à partir du 30e anniversaire, sauf pour les cohabitants non-privilégiés. Cette mesure est entrée en vigueur ce 1er janvier. 37.000 personnes auraient ainsi été exclues depuis le premier janvier (source CEPAG). Ce nombre est malheureusement appelé à augmenter: certaines catégories spécifiques se sont vues accorder un sursis provisoire, tandis que de nouvelles vagues de demandeurs d’emploi se verront exclues d’année en année. Les anciens bassins industriels sont bien évidemment les régions les plus touchées. Les femmes sont aussi surreprésentées dans ces exclusions (65%, source Réseau Stop Art.63§2). Ceci est directement lié à leur surreprésentation dans les emplois à temps partiel qui compromettent la possibilité d’ouvrir des droits à un chômage complet.

    Le gouvernement Michel a poursuivi sur la même voie : l’allocation d’insertion ne serait maintenant accessible avant 21 ans qu’à ceux qui ont obtenu leur diplôme d’enseignement secondaire supérieur et serait limitée à l’âge de 25 ans. Ceux qui étudient trop ou trop peu seront de facto sanctionnés. Ainsi, chaque année, pour 13.000 étudiants belges francophones, la suppression de l’ouverture du droit aux allocations d’insertion se traduirait par une perte annuelle variant de 5.104 euros à 13.269 euros (source CNE).

    Face aux exclusions, le CPAS est le dernier recours. Cela signifie un transfert de charge du fédéral vers les CPAS et donc les communes, avec une situation qui deviendra rapidement ingérable. En effet, les exclusions du 1/1/2015 représenteront une hausse de plus de 20% de leur budget consacré au revenu d’intégration sociale (RIS) avec quelque 10.000 chefs de ménages et isolés qui y émergeront en Wallonie (source CEPAG). En ce qui concerne les cohabitants aucun RIS n’est possible ! Et lorsque le CPAS envisage intervenir, il réalise préalablement une enquête auprès de la famille (parents ou enfants majeurs) pour évaluer sa capacité à verser une pension alimentaire et l’y contraindre. Ce système nous sort du mécanisme de solidarité organisé pour nous mettre dans une situation de dépendance familiale avec tout ce que cela sous-entend.

    Il peut sembler absurde de s’attaquer au chômeur lorsque le problème est l’emploi. Mais si l’on prend en considération que ces mesures sont favorables à la classe capitaliste dominante, cela prend alors tout son sens. Le but des attaques contre les chômeurs n’est pas tant de réduire ce poste de dépense budgétaire, mais bien de dégrader nos conditions de travail et nos salaires tout en stigmatisant une couche spécifique de la population, ce qui permet de dévier l’attention des vrais problèmes. A titre d’exemple, en 2012, le paiement des allocations de chômage a représenté 3% du budget fédéral, contre 20% consacré au remboursement de la dette publique aux spéculateurs ! (Source: CADTM)

    32h/semaine pour assurer un droit au travail pour tous

    emploi_01Il nous faut construire une alternative crédible par rapport à cette problématique de l’emploi reposant sur la force du mouvement organisé des travailleurs. Face au chômage de masse, un partage équitable du temps de travail disponible entre tous est indispensable, sans perte de salaire et avec diminution des cadences. En moyenne, nous ne travaillons déjà en Belgique que 31h/semaine, et ce, sans compter ni le fait que les capacités de production ne sont pas utilisées à 100%, ni les gaspillages inhérents au système. Mais sous le régime capitaliste, cette statistique prend la forme d’une exclusion de masse par le chômage d’un côté et d’une pression abrutissante au travail de l’autre. Le développement technologique, pour autant qu’il soit orienté vers les intérêts des travailleurs, permettrait de diminuer le temps de travail et de libérer ces derniers des tâches répétitives et abrutissantes.

    Avancer une telle revendication confronte directement la classe des travailleurs, qui doit vendre sa force de travail contre un salaire, à la classe capitaliste, qui détient les moyens de production. Pour permettre de véritablement libérer les travailleurs de l’aliénation du travail, pour permettre de dégager du temps au profit des loisirs, de la vie sociale et de l’implication dans la gestion de la société, la revendication de la réduction du temps de travail avec embauches compensatoires et sans perte de salaire doit absolument être liée à la perspective d’une rupture anticapitaliste et d’un changement socialiste de société. Ce que nous entendons par là, c’est la collectivisation des secteurs-clés de l’économie et des grandes entreprises sous le contrôle et la gestion des travailleurs et de la population au sens large. De cette manière, l’emploi ne serait plus le synonyme d’un maillon d’une monstrueuse chaîne de production socialement et écologiquement destructrice, mais serait au contraire une contribution importante au développement de soi-même et de son apport à la société. À terme, cela ouvrirait la voie vers une société sans salariat.

    => 25 février : journée d’action contre les exclusions des chômeurs des allocations d’insertion et pour l’abrogation de l’Art. 63§2.

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