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Tag: Bernie Sanders
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Solidarité avec Kshama Sawant : Bernie Sanders apporte son soutien

Nouvelle de taille pour la campagne de solidarité de Councilmember Kshama Sawant à Seattle ! Bernie Sanders a apporté son soutien officiel !
“Une fois de plus”, a déclaré Bernie dans sa déclaration de soutien, “les riches et les intérêts privés mènent une attaque contre le siège de Kshama Sawant parce qu’elle a le courage de défendre les travailleurs. Nous devons nous unir pour mettre fin à cette procédure de rappel sans fondement. Votez ‘NON’ d’ici le 7 décembre”.
Les campagnes présidentielles de Bernie en 2016 et 2020 ont été des exemples importants de la façon dont les travailleurs peuvent s’organiser et se battre. Mais elles ont également démontré à quel point la classe capitaliste et son personnel politique ne ménagent aucun effort pour vaincre les élus qui dirigent des mouvements de lutte favorables à la classe ouvrière.
Les médias de masse et l’establishment politique des deux partis de Wall Street (Démocrates et Républicains) s’en sont pris à Bernie parce qu’ils considéraient que le large élan en faveur de ses revendications (salaire minimum à 15 dollars de l’heure, un système universel de soins de santé,…) représentait une menace pour leur pouvoir économique et politique.
Aujourd’hui, à Seattle, plus de 500 donateurs républicains, 130 donateurs de Trump, plus de 850 millionnaires et plus de 100 PDG et dirigeants d’entreprise s’en prennent à Kshama pour la même raison. Après avoir vu Kshama diriger des mouvements pour obtenir le salaire minimum historique de 15 dollars de l’heure à Seattle (instauré pour la première fois dans une grande ville américaine à la faveur de sa campagne 15NOW) et pour instaurer la Taxe Amazon pour des logements abordables et un Green New Deal, et avoir constaté qu’elle était l’élue la plus cohérente de Seattle à se tenir aux côtés de Black Lives Matter l’été dernier, les grandes entreprises et la droite sont déterminées à éliminer la seule élue socialiste de Seattle. L’approche de Kshama, qui consiste à utiliser sa position pour construire des mouvements de lutte, et non pour conclure des accords et des compromis avec l’establishment, a été une expression puissante du message “Pas moi, nous” (Not me, us) au cœur de la campagne de Bernie en 2020.
Il ne reste que quelques jours avant le jour de l’élection, le 7 décembre. La campagne de Kshama est engagée à parler à des milliers d’électeurs pour vaincre cette attaque de la droite. Cette campagne de destitution a été organisée de telle manière que beaucoup d’électeurs ne sont même pas au courant qu’elle a lieu ! Ce message de soutien de Bernie Sanders tombe à point pour renforcer la campagne de terrain menée avec acharnement par des centaines de militantes et de militants.

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États-Unis : Trump vaincu, il faut maintenant s’attaquer à son monde !

Au moment d’écrire cet article, Trump niait toujours sa défaite. Il venait même de limoger le patron de l’agence gouvernementale en charge de la sécurité des élections car ce dernier contestait les accusations du milliardaire républicain de fraudes « massives » à la présidentielle. Alors que la pandémie faisait toujours rage (elle a tué à ce jour plus de 242.000 personnes aux USA), Trump et ses partisans les plus fidèles préfèrent s’enfermer dans un étrange monde parallèle régi par les « faits alternatifs ».
Dossier de Nicolas Croes publié dans l’édition de décembre-janvier de Lutte Socialiste
Trump restera président jusqu’au 20 janvier, date à laquelle le président élu Biden devrait entrer en fonction. D’ici là, Trump jettera-t-il le gant ? Son incroyable égo le poussera-t-il toujours plus loin dans la provocation ? La mobilisation du 14 novembre constitue en tout cas un dangereux avertissement . Ce jour-là, des dizaine de milliers de personnes ont convergé vers Washington pour scander leur soutien à Trump. Parmi eux se trouvaient nombre de militants et de groupes d’extrême droite. La menace qu’ils représentent n’a cessé de croître ces 4 dernières années et, une fois libéré de la fonction présidentielle, un Trump déchaîné pourrait servir de figure de ralliement à ces multiples courants réactionnaires, du KKK aux Proud Boys. Pour efficacement faire face à ce danger ainsi qu’aux défis à venir, il faut correctement estimer ce que représente la photographie des États-Unis illustrée par ces élections et la placer dans le film des événements.
« Au plus je regarde ces élections, au moins je les comprends »
Cette citation provient du Prix Nobel de l’économie Paul Krugman, l’un des rares à avoir anticipé la crise économique de 2008-09. « La Floride fut une triomphale surprise pour Trump et a également voté pour un salaire minimum de 15 dollars de l’heure », a-t-il poursuivi. « Selon un sondage de sortie des urnes de Fox News, une majorité se dégage en faveur d’un plan sanitaire du gouvernement et d’une plus grande intervention de l’État en général alors que des sénateurs républicains qui veulent noyer l’État ont été élus ».
Le résultat des élections fut très serré en de nombreux États, beaucoup plus que ce que les sondages laissaient présager. Pour les responsables officiels du Parti démocrate, l’explication ne fait aucun doute : on a trop entendu de voix de gauche durant la campagne électorale. On a trop entendu parler de ce maudit Bernie Sanders durant la primaire démocrate avec ses appels au socialisme ! On a trop entendu la congressiste Alexandria Ocasio Cortez et sa clique de gauchistes ! Les États-Unis ne sont pas prêts pour ces discours ! C’est évidemment ce message qui est relayé dans les médias internationaux dominants. Et tant pis si cela ne résiste pas à l’épreuve des faits.
Différentes élections se déroulaient au même moment que la présidentielle. Pour la Chambre et le Sénat fédéraux, mais aussi pour les États fédérés. Parmi toutes les candidates et candidats, 112 soutenaient ouvertement le projet d’une assurance maladie universelle (Medicare for All). Toutes et tous ont été élus. 98 soutenaient le plan d’investissements massifs dans les infrastructures et pour une transition écologique Green New Deal : un seul n’a pas été élu. Les quatre élues démocrates qui se disent « socialistes » – The Squad (La Brigade) – Ilhan Omar, Alexandria Ocasio-Cortez, Rashida Tlaib et Ayanna Pressley ont toutes été brillamment réélues au Congrès.
Divers projets de loi étaient également présentés aux électeurs, dont en Floride comme cela est sus-mentionné. Au Nevada – l’un de ces fameux « swing state », les États-charnières au vote indécis d’une élection à l’autre – c’était le cas du mariage homosexuel. Il y a dix-huit ans, les électeurs avaient largement voté pour réserver l’institution du mariage aux couples hétérosexuels et uniquement à eux. Cette fois-ci, les électeurs se sont très majoritairement (62%) prononcés pour la suppression de la mesure et l’inscription dans la Constitution de l’État de la reconnaissance des unions entre époux du même sexe, une première aux États-Unis. C’est une claire illustration du changement d’atmosphère qui saisit le pays. Mais, dans ce même État, Biden et Trump ont fini au coude-à-coude : 50.06% contre 47.67%. Et Paul Krugman continue à se gratter la tête.
Les Démocrates ont mené une lutte acharnée… contre la politique progressiste
Une chose est certaine : de plus en plus de gens en ont marre. Marre de ces milliardaires et de Wall Street qui s’enrichissent tandis que des gens dorment dans la rue et que les infrastructures s’effondrent. Marre de ces entreprises qui profitent de l’incarcération de masse dans des prisons privées. Marre que les jeunes sortent de leurs études la corde au cou. En 2019, 45 millions d’Américains cumulaient une dette de 1.600 milliards de dollars (1.482 milliards d’euros) pour payer leurs études supérieures !
Si Bernie Sanders avait été le candidat démocrate aux élections, il aurait remporté ses élections à la suite d’un véritable tremblement de terre politique. Mais l’appareil et la direction du Parti démocrate ont déployé beaucoup plus d’efforts pour lui barrer la route au cours des primaires démocrates que pour vaincre Trump. L’establishment démocrate était horrifié par la perspective d’une victoire d’un candidat qui faisait appel à la volonté de se battre des travailleuses et des travailleurs. Il est d’ailleurs scandaleux que Sanders ait accepté la situation et soit resté dans le parti.
L’establishment démocrate n’a renoncé à aucune manœuvre pour l’écarter et présenter un candidat gênant au point d’être le pire (à l’exception d’Hillary Clinton, peut-être) pourvu qu’il soit inoffensif aux yeux des grandes entreprises. Au vu de la manière dont ces primaires se sont déroulées, on peut comprendre que certains doutent de la validité du processus électoral.
Au final, Biden et Trump ont tous les deux mené une campagne déconnectée de la réalité, chacun dans son style. Il faut savoir que bien que le pays ait été confronté au plus grand mouvement de masse de son histoire – contre le racisme systémique et les violences policières – Biden a recommandé à deux reprises que la police prenne plutôt l’habitude de tirer dans les jambes ! Beaucoup d’électeurs démocrates ont plutôt voté « contre Trump » que « pour Biden » (58% selon un sondage Axios). Les Démocrates ont tout fait pour aider Trump à se présenter comme un outsider anti-système alors que ce milliardaire était le président sortant !
Trump a cherché à mobiliser les électeurs blancs conservateurs avec un cocktail de racisme, de sexisme, d’autoritarisme, d’appels à l’extrême droite, de théories du complot et de rhétorique de maintien de l’ordre. Mais ses électeurs n’étaient pas qu’un bloc monolithique d’électeurs blancs racistes. Beaucoup de gens ont été horrifiés par la gestion calamiteuse de la pandémie par Trump. Mais ses appels répétés à « ouvrir l’économie » ont trouvé un écho parmi une masse de gens inquiets pour leur avenir dans un pays où la sécurité sociale telle que nous la connaissons n’existe pas.
Les sondages de sortie des urnes montrent que les électeurs qui ont considéré la pandémie comme l’enjeu principal ont voté pour Biden avec une marge de 82 %, tandis que ceux qui considéraient l’économie comme l’enjeu principal ont voté pour Trump avec une marge tout aussi importante. C’est ainsi que beaucoup de personnes d’origine latino-américaine ont voté pour Trump en dépit de son discours ouvertement raciste. En fait, sans la pandémie et sa gestion criminelle aux Etats-Unis, Trump aurait probablement facilement vaincu Biden.
Sortir de la camisole de force Démocrate
Entre 2008 et 2010, les Démocrates contrôlaient les deux chambres du Congrès. Pendant cette période, ils ont prolongé les réductions d’impôts de Bush et ont renié leurs engagements pour faciliter l’organisation des syndicats. Ils ont rejoint les Républicains dans une campagne acharnée pour privatiser et détruire l’enseignement public. Pour couronner le tout, la réponse d’Obama à l’immigration à travers la frontière sud a été d’expulser plus de personnes que tout autre président précédent.
Les dirigeants des syndicats et d’autres organisations progressistes avaient refusé de résister à ces attaques en raison de leur totale soumission à l’establishment démocrate. L’aile populiste du Parti républicain a saisi ce vide pour exploiter le mécontentement économique, ce qui a conduit à la naissance du Tea Party en 2009, qui à son tour a ouvert la voie à Donald Trump. De même, sous une présidence Biden, la menace de l’extrême droite pourrait bien s’accroître.
Le Parti démocrate est totalement inféodé aux intérêts capitalistes. Dans un premier temps, il est possible que l’élection de divers élus de gauche sous l’étiquette Démocrate entretienne l’illusion que c’est par ce biais que l’on peut offrir un outil politique pour les luttes sociales. Mais l’administration Biden/Harris ne résoudra aucun des problèmes cruciaux auxquels sont confrontés les travailleuses et travailleurs. L’école de la réalité donnera plus d’écho à l’idée de la création d’un nouveau parti, un parti de lutte, un parti reposant sur la force des travailleuses et des travailleurs, un parti totalement indépendant de Wall Street, un parti qui réunira dans l’action les différents mouvements sociaux (de Black Lives Matter aux syndicalistes des fast-food et d’ailleurs) pour repousser les racistes et défendre un programme qui découle des intérêts des masses. Un tel parti entrerait directement en confrontation avec les limites du capitalisme et devrait revendiquer son renversement pour construire une société socialiste démocratique. Nos camarades de Socialist Alternative feront tout leur possible pour aider chaque pas en cette direction.
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USA. Trump ? Plus jamais ! Il nous faut un parti de la classe ouvrière
Aux États-Unis, les travailleuses et travailleurs sont confrontés à une crise de grande ampleur. Des décennies d’attaques néolibérales contre les syndicats et les conquêtes sociales ont engendré le plus haut niveau d’inégalité en un siècle ainsi qu’une précarité massive. Les coupes budgétaires drastiques opérées dans les hôpitaux publics ces dernières années, auxquelles s’ajoute le fait que des millions de personnes sont privées d’assurance maladie, ont laissé le pays dans un dangereux état d’impréparation face à cette pandémie, tout particulièrement pour les pauvres.Par Tom Crean, Socialist Alternative (partisans d’Alternative Socialiste Internationale aux USA)
Dans l’immédiat, il n’existe aucun plan national pour faire face à la pandémie. Le nombre de nouveaux cas de contamination atteint des records et les hôpitaux de nombreuses régions du Midwest se dirigeant vers l’effondrement total. Le fait que les Républicains et les Démocrates n’aient pas accepté de prolonger l’allocation exceptionnelle de chômage de 600 dollars signifie que des millions de personnes vivent sur leur carte de crédit et ne peuvent rester chez elles qu’en raison du moratoire fédéral sur les expulsions. Sans assistance supplémentaire, des centaines de milliers de petites entreprises vont faire faillite.
Entre-temps, l’épidémie de brutalité policière a déclenché une rébellion antiraciste de masse qui transcende la couleur de peau. A cela s’ajoute le plus grand défi auquel nous sommes confrontés : celui du désastre climatique, illustré aux Etats-Unis par la saison des feux de forêt dévastateurs dans les États de l’Ouest.
Toutes ces catastrophes sont des sous-produits du capitalisme en déclin de cette période. Donald Trump est également un sous-produit du capitalisme en déclin et, pendant ses quatre années de mandat, il s’est efforcé d’aggraver presque tous les problèmes auxquels les travailleuses et travailleurs sont confrontés. Mais il n’a certainement pas créé ces problèmes. Si des dizaines de millions de personnes ici et dans le monde entier se réjouissent, à juste titre, de la fin de son règne, il nous faut aller plus loin que son éviction pour résoudre ces problèmes. Pour cela, il faut analysé la manière dont le système politique pro-entreprises à deux partis – et en particulier le Parti démocratique – a travaillé sans relâche afin de maintenir la domination de l’élite milliardaire.
Les Démocrates, le parti du capitalisme néolibéral
Les Démocrates, l’un des deux principaux partis capitalistes aux États-Unis depuis le XIXe siècle, ont derrière eux une histoire longue et complexe. Le parti de l’après-Seconde Guerre mondiale reposait sur une alliance entre les ségrégationnistes du Sud (les “Dixiecrat” ) et une coalition de travailleurs, d’immigrés blancs et de noirs du Nord. Dans le sillage du mouvement des droits civiques, les blancs conservateurs du Sud ont commencé à se rapprocher des Républicains.
Cela a été suivi par le changement d’orientation de la classe dirigeante vers ce que l’on appelle aujourd’hui le néolibéralisme, à la fin des années ’70. Les Démocrates ont adopté le programme néolibéral de déréglementation, de réduction du rôle des autorités, de promotion du libre-échange et de recul des syndicats (tout en acceptant des dizaines de millions de dollars de contributions des syndicats à leurs campagnes électorales). Cela représentait l’abandon de la prétention de représenter les intérêts des travailleuses et des travailleurs, une prétention qui remonte au New Deal. Au lieu de cela, le parti a prétendu se soucier des discriminations racistes et sexistes afin de se distinguer des Républicains qui, de leur côté, ont de plus en plus utilisé des sujets tels que les armes à feu, l’avortement et la discrimination positive pour mobiliser leur base.
Au cours des huit années de mandat de Bill Clinton, de 1992 à 2000, les Démocrates se sont appuyés sur ce que les régimes réactionnaires de Ronald Reagan et George Bush « père » avaient accompli au cours des douze années précédentes. Ils ont entrepris de « mettre fin à l’assistance sociale telle que nous la connaissons », en vidant de leur substance les programmes de lutte contre la pauvreté qui avaient été adoptés sous pression de la lutte de masse dans les années ’60 et ’70. Ils ont adopté la Crime Bill de 1994, une législation qui a accéléré l’incarcération de masse visant la population noire. Ils ont adopté le plus grand accord commercial néo-libéral, l’ALENA (Accord de Libre Échange Nord Atlantique), qui a entraîné la perte de centaines de milliers d’emplois industriels. A la demande de Wall Street, ils ont même abrogé la loi Glass Steagall des années 1930 qui avait imposé une réglementation de base aux banques. Cela a contribué à alimenter le casino financier qui a déclenché la crise économique de 2008-2009.
Après l’arrivée au pouvoir de George W. Bush en 2000 au cours d’une élection volée, les Démocrates ont capitulé, une question après l’autre. Après le 11 septembre 2001, ils ont voté pour le Patriot Act qui a massivement augmenté les pouvoirs de surveillance du gouvernement. La plupart des Démocrates ont soutenu avec enthousiasme la désastreuse invasion de l’Irak deux ans plus tard. Un grand nombre d’entre eux ont également soutenu les réductions d’impôts pour les riches et la réduction de l’impôt sur les sociétés de Bush, ce qui a contribué à accroître encore les inégalités.
Les Démocrates sont revenus à la Maison Blanche en 2008 avec la victoire d’Obama, alors que l’économie était au milieu de sa crise la plus grave depuis la Seconde Guerre mondiale. L’élection du premier président noir avait suscité un immense espoir, mais la rhétorique d’Obama ne contenait aucun engagement à changer de cap par rapport au néolibéralisme de Bill Clinton. Une fois au pouvoir, la solution de son administration à l’effondrement économique a été de renflouer les banques à hauteur de milliers de milliards de dollars tout en restant sourds aux millions de personnes qui perdaient leur maison.
Entre 2008 et 2010, les Démocrates contrôlaient les deux chambres du Congrès. Pendant cette période, ils ont prolongé les réductions d’impôts de Bush et ont renié leurs engagements pour faciliter l’organisation des syndicats. Ils ont rejoint les Républicains dans une campagne acharnée pour privatiser et détruire l’enseignement public. Pour couronner le tout, la réponse d’Obama à l’immigration à travers la frontière sud a été d’expulser plus de personnes que tout autre président précédent.
Les dirigeants des syndicats et d’autres organisations progressistes ont refusé de résister à ces attaques en raison de leur totale soumission à l’establishment démocrate. L’aile populiste du Parti républicain a saisi ce vide pour exploiter le mécontentement économique, ce qui a conduit à la naissance du Tea Party en 2009, qui à son tour a préparé le terrain pour Donald Trump. De même, sous une présidence Biden, la menace de l’extrême droite pourrait bien s’accroître, les Démocrates supervisant une crise massive sans indiquer aucune issue.
Voilà le bilan désastreux du Parti démocrate au cours des quarante dernières années. Ils défendent des politiques rejetées par leur base au niveau local et national, comme le fait de donner à la police et à l’armée toujours plus de moyens. En même temps, ils refusent de soutenir des politiques comme l’assurance maladie pour tous et la taxation des riches, mesures soutenues par des majorités importantes de toute la population, tout simplement parce que cela s’oppose aux grandes entreprises qui sont les bailleurs de fonds des Démocrates.
Au cours des dix dernières années, d’énormes luttes ont contribué à reconstruire la gauche aux États-Unis, du mouvement Occupy à la révolte des enseignants de 2018 en passant par le mouvement Black Lives Matter. En 2016 et de nouveau en 2020, les campagnes présidentielles de Bernie Sanders ont démontré le potentiel dont dispose une alternative de gauche de masse construite autour d’un programme de lutte pro-travailleurs. Sanders était le défenseur de l’assurance maladie pour tous, d’un New Deal vert, de la fin des incarcérations de masse, d’un salaire minimum fédéral de 15 dollars et d’un enseignement gratuit.
Mais malgré la radicalisation massive de ces dernières années, en particulier parmi la jeunesse, le changement que les gens veulent réellement n’était pas au programme lors des élections de novembre. De façon incroyable, nous avons eu Joe Biden, le pire représentant du néolibéralisme démocrate à l’exception peut-être d’Hillary Clinton. Joe Biden, qui a été au Sénat ou à la Maison Blanche (comme vice-président) pendant 44 années consécutives, a été l’architecte du projet de loi sur la criminalité de 1994 et un ardent partisan de l’ALENA et de la guerre en Irak. Cette situation s’explique par le fait que le Parti démocrate est fermement détenu par les grandes entreprises américaines. Et tant que Sanders, AOC, les syndicats et les forces progressistes accepteront le cadre des Démocrates, ce genre de résultat se produira encore. Il est aujourd’hui bien tragique de voir Sanders briguer un poste dans le cabinet de Biden.
Faut-il s’attendre à une différence ?
A quoi ressembleront les Démocrates au pouvoir cette fois-ci ? Ils ont promis de “dépenser de l’argent”. Cela peut sembler être un mouvement vers la gauche par rapport à leur soutien passé aux coupes budgétaires dans les services sociaux. Cependant, ce n’est pas du tout radical dans le contexte de la crise économique mondiale actuelle. Toutes les principales institutions financières capitalistes du monde, y compris le FMI, la Banque mondiale et la Réserve fédérale américaine, préconisent des mesures de relance budgétaire massives en plus de ce qui a déjà été dépensé (bien plus que les années 2008-09). Elles craignent à juste titre que l’économie ne soit au bord d’un profond marasme si elles ne continuent pas à injecter de l’argent.
Mais il y a une grande différence entre “dépenser de l’argent” pour une extension temporaire des allocations de chômage et de l’aide aux petites entreprises – ce qui est tout à fait nécessaire – et s’engager réellement dans des programmes à plus long terme. Biden et Harris ont clairement indiqué qu’ils s’opposeraient activement à l’assurance maladie pour tous malgré sa grande popularité. Au cours de la campagne, ils ont renouvelé leur opposition à l’interdiction de la fracturation hydraulique et, tout en affirmant qu’il faudrait s’éloigner des combustibles fossiles, ils se sont catégoriquement opposés à un Green New Deal, qui créerait pourtant des millions d’emplois décents. Ils ont même déclaré qu’ils seraient favorables à un financement accru de la police !
Dans les jours qui ont suivi l’élection, la députée Abigail Spanberger s’est exclamée avec insistance que la raison pour laquelle le parti a perdu des sièges à la Chambre est qu’il s’est associé à la politique progressiste. La conclusion de Spanberger à l’intention du parti est la suivante : “Ne dites plus jamais ‘socialisme’.”
Les Démocrates chercheront à la première occasion à mettre en œuvre des coupes d’austérité sauvages pour faire payer à la classe ouvrière le coût de la crise. Ils résisteront à toute proposition sérieuse de taxation des riches et des grandes entreprises et ils chercheront à maintenir autant que possible le programme néolibéral. Mais ils seront confrontés à d’énormes problèmes parce que la masse de la population rejettera l’austérité et la poursuite des politiques des dernières décennies.
Construire un nouveau parti
Si les Démocrates ne sont pas le véhicule qui nous permettra d’arracher le changement dont nous avons besoin, comment gagner l’assurance maladie pour tous, le Green New Deal, et placer la police sous un véritable contrôle démocratique ? L’histoire de ce pays montre que les gains réels pour les travailleuses et les travailleurs ne sont obtenus que par des mouvements de masse et la lutte sociale. Citons par exemple la campagne de syndicalisation de masse et la vague de grèves des années 30 ou encore le mouvement des droits civiques des années 50 et 60.
Face à une classe de milliardaires qui a amassé près d’un trillion de dollars supplémentaires au cours de cette pandémie, il est clair que nous devons de toute urgence reconstruire un mouvement ouvrier combatif. Les enseignants, les travailleurs de l’hôtellerie et de l’automobile ont montré la voie en 2018-19.
Mais pour prendre en charge les intérêts bien ancrés de la classe des milliardaires, nous avons également besoin d’un parti politique qui représente nos intérêts. Les deux campagnes présidentielles de Bernie Sanders ont montré non seulement le niveau de soutien potentiel pour une alternative politique de gauche, mais aussi concrètement comment des centaines de millions de dollars pourraient être récoltés auprès des gens ordinaires sans accepter un centime de l’argent des entreprises. Depuis des décennies, on nous dit qu’il est impossible de mener des campagnes sérieuses sans l’argent des entreprises. Si les campagnes de Sanders n’ont rien fait d’autre que de détruire ce mythe, elles ont fait une chose très précieuse.
À quoi devrait ressembler un nouveau parti de gauche basé sur les intérêts des travailleuses et des travailleurs ? Avant tout, ce devrait être un parti de lutte, et non pas simplement une machine électorale. Comme Socialist Alternative l’a démontré en organisant des campagnes victorieuses à Seattle qui ont permis d’élire Kshama Sawant au conseil de ville à trois reprises, la clé est de construire des mouvements dans la rue et d’imposer ces mouvements dans les couloirs du pouvoir. C’est ainsi que nous avons gagné pour la première fois les 15 dollars de l’heure de salaire minimum dans une grande ville et que nous avons gagné la Taxe Amazon, qui permettra de récolter des centaines de millions de dollars auprès des grandes entreprises pour construire des logements abordables et répondre à d’autres besoins essentiels à Seattle.
Un parti national de travailleuses et de travailleurs devrait représenter toutes les luttes de la classe ouvrière, de plus en plus multiraciale et multigenre, y compris la lutte pour mettre fin aux politiques d’expulsion massive et pour les droits de citoyenneté des travailleurs immigrés ; pour défendre le droit à l’avortement et les droits des personnes LGBTQI contre les attaques de la droite réactionnaire enhardie ; pour mettre fin à toutes les politiques de “gerrymandering” (découpage électorale des quartiers pour noyer le vote progressiste) et de suppression des électeurs.
Nous avons besoin d’un parti où nos représentants élus sont responsables devant les membres et où ils sont tenus de voter pour les revendications figurant dans le programme du parti. La responsabilité signifie également que les représentants publics du parti ne gagnent pas plus que le salaire moyen des travailleurs, à l’instar de Kshama Sawant.
Dans un tel parti, les marxistes se battraient pour une plate-forme anticapitaliste claire qui préconise de faire entrer dans le giron de l’État des secteurs clés de l’économie, notamment les banques, les soins de santé, les grandes entreprises ainsi que les secteurs de l’énergie, de la logistique et des transports. C’est la seule façon de commencer à orienter les ressources de la société vers l’élimination des inégalités massives et du racisme structurel, ainsi que vers une transition rapide des combustibles fossiles vers les énergies renouvelables.
Une question qui est souvent posée est de savoir d’où viendront les forces de ce nouveau parti. Notre réponse est qu’il existe un énorme potentiel de soutien de la part de ceux qui ont soutenu les campagnes de Sanders, de syndicalistes progressistes et de jeunes gens actifs dans la lutte contre le racisme, le sexisme et les catastrophes climatiques. Mais il est absolument vrai qu’il faudra d’importantes organisations importants pour lancer ce parti.
La gauche américaine compte des personnalités de premier plan comme Sanders, AOC et la nouvelle élue Cori Bush, membre du Congrès du Missouri. Nous avons besoin qu’ils entendent leurs partisans qui ont tiré la conclusion que le Parti démocrate ne peut pas être réformé. Nous applaudissons des personnalités comme Cornel West, Nina Turner (présidente de Our Revolution) et Roseann De Moro (ancienne présidente de National Nurses United), qui vont déjà dans cette direction. Nous avons besoin que les démocrates-socialistes d’Amérique (DSA), qui ont atteint les 70.000 membres ces dernières années et se sont formellement engagés à soutenir la formation d’un parti ouvrier, fassent réellement de cet effort une priorité. Une mesure immédiate pourrait consister à commencer à présenter des candidats socialistes pour les postes locaux sur une base indépendante du Parti démocrate, avec une plate-forme commune et un objectif de construction du mouvement.
Plus jamais de Trump
Nous devons être très clairs sur le fait que, si nous ne commençons pas à prendre des mesures plus sérieuses pour construire une nouvelle force politique basée sur la classe ouvrière multiraciale et multigenre, nous serons confrontés à de sérieux dangers dans les années à venir. Donald Trump et la droite populiste ont construit une base politique massive, qui comprend une aile d’extrême droite croissante.
Si la situation de 2008-10 se répète, avec des travailleurs et des sections de la classe moyenne qui souffrent du fait que les banques et les entreprises sont dirigées par une administration démocrate, l’extrême droite aura la possibilité de se développer davantage.
Aux États-Unis, il aurait été possible de créer un parti des travailleurs dans les années 1930, 1970 et 1990. Pour diverses raisons, ces possibilités ont été dilapidées. Aujourd’hui, il est plus clair que jamais pour des millions de personnes, en particulier les jeunes, que le capitalisme est un système en faillite. Le temps est venu de construire un puissant mouvement, organisé sur les lieux de travail, dans les quartiers et les universités et reflété dans les urnes, qui peut remettre en cause de manière décisive le règne des milliardaires. Ce mouvement ne doit s’arrêter à rien pour mettre fin à la domination destructrice et parasitaire du capital en Amérique et s’unir aux travailleuses et travailleurs du monde entier pour construire un avenir socialiste pacifique, prospère et égalitaire.
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Trump est battu : analyse socialiste et prochaines étapes de la lutte

Joe Biden supervisera l’une des crises les plus profondes de l’histoire du capitalisme américain. Il s’efforcera de servir les intérêts de la classe des milliardaires, comme il l’a fait tout au long de sa carrière politique. Cela conduira des millions de personnes à chercher une alternative à la direction du Parti démocrate et plus généralement.
Déclaration de Socialist Alternative (partisans d’Alternative Socialiste Internationale aux USA)
Les célébrations ont commencé. Trump a clairement perdu, et il quittera la Maison Blanche au début de l’année prochaine. Des dizaines de millions de personnes dans tout le pays et des centaines de millions dans le monde entier poussent un soupir de soulagement. Pourtant, nous devons reconnaître que la pandémie, le changement climatique, la crise économique et le racisme institutionnel ne disparaîtront pas lorsque Trump quittera ses fonctions. Biden lui-même a déclaré qu’il ne souhaitait pas de changement fondamental et qu’il “tendrait la main” aux républicains. Nous aurons encore besoin de mouvements de masse déterminés pour arracher des conquêtes sociales pour les travailleurs, pour lutter contre l’extrême droite et pour contester le règne désastreux de la classe des milliardaires.
Bien entendu, Trump continue de prétendre que les résultats sont frauduleux et que l’élection lui a été volée. On ne peut pas exclure que certaines parties de ses partisans se mobilisent pour s’opposer à ce qu’il quitte ses fonctions. Si Trump tente de rester, il faudra organiser des mobilisations de masse pour le chasser.
Mais il est également assez évident que la classe dirigeante ne veut pas de nouveau chaos. Les médias et même certaines sections de l’establishment républicain ont eu du mal à souligner que la démocratie capitaliste “fonctionne”. Même les tribunaux, dont Trump espérait qu’ils interviendraient pour arrêter le comptage des voix totalement ou en partie, ont jusqu’à présent refusé de le faire. Il est également peu probable que les comptages effectués dans plusieurs États modifient le résultat.
Pourquoi Trump était-il si proche de la victoire ?
Les sondages et les experts se sont encore trompés. Il n’y a eu ni large percée de Biden ou de vague démocrate prenant une majorité au Sénat. Les Démocrates ont également perdu un certain nombre de sièges à la Chambre et subi des pertes au niveau des États. Quelques victoires progressistes ont toutefois eu lieu à la Chambre avec l’élection de Cori Bush et de Jamaal Bowman qui vont maintenant rejoindre “The Squad” aux côtés d’Alexandria Ocasio-Cortez, Rashida Tlaib et d’autres.
Durant la campagne électorale, la répression des électeurs (décourager les électeurs d’aller voter, une spécialité républicaine) a atteint des niveaux inédits dans le contexte de la pandémie. De plus, le collège électoral figure parmi les institutions les plus antidémocratiques (avec la Cour suprême) dans un système politique américain déjà conçu à la base pour masquer la domination de la classe des milliardaires. Cette répression des électeurs a eu un effet mais, en réalité, les propos incessants de Trump sur la fraude du vote par correspondance et l’état du service postal n’ont fait que rendre les gens plus déterminés à venir voter. C’est ce qui a conduit à une participation électorale vraiment remarquable, le plus haut pourcentage d’électeurs inscrits depuis 1908.
Les experts libéraux supposaient que cette participation massive favoriserait fortement les Démocrates. Mais l’issue fut loin d’être décisive. En fait, Trump aurait facilement pu être battu, surtout si Bernie Sanders avait été le candidat démocrate. Trump a l’un des taux d’approbation les plus faibles de tous les candidats présidentiels en exercice, et les Démocrates ont mené une très faible campagne contre lui avec un candidat pro-entreprise horriblement peu inspirant.
Dans un sondage de Fox News, 72% des électeurs se sont déclarés en faveur d’un programme de santé géré par le gouvernement. En Floride, où Trump l’a emporté, 61% des électeurs ont également voté pour une mesure en faveur d’un salaire minimum de 15 dollars de l’heure dans tout l’État. Cela illustre qu’un appel clair aux électeurs de la classe ouvrière, ce que Bernie Sanders aurait pu faire efficacement, aurait probablement battu Trump d’une manière écrasante.
Trump a mal géré la pandémie de COVID-19 (qui a fait des centaines de milliers de morts aux États-Unis) et a supervisé le développement d’un chômage de masse tandis que des millions d’Américains sombraient dans la pauvreté. Et pourtant, les Démocrates ont quasiment fait tout ce qu’ils pouvaient pour perdre.
Ils ont présenté un candidat gênant au point qu’il a été tenu à l’écart du public. Ils n’ont pas mené de campagne de terrain dans les principaux États charnières. Ils ont refusé de défendre des politiques très populaires comme l’assurance maladie pour tous et la taxation des riches. Ils n’ont pas mené de campagne d’inscription massive sur les listes d’électeurs afin de gagner des millions de nouveaux électeurs qui méprisent Trump. Pourtant, les plus grands échecs des Démocrates n’étaient en aucun cas des “erreurs” : il s’agit plutôt d’une expression de leur nature fondamentale de parti pro-entreprises contrôlé par des bailleurs de fonds milliardaires.
Les sondages de sortie des urnes montrent que les électeurs qui ont considéré la pandémie comme l’enjeu principal ont voté pour Biden avec une marge de 82 %, tandis que ceux qui considéraient l’économie comme l’enjeu principal ont voté pour Trump avec une marge tout aussi importante. Ces chiffres montrent que le Parti démocrate n’a littéralement rien eu à dire aux travailleurs ou même à une grande partie de la classe moyenne, qui a extrêmement peur de l’avenir ou qui est déjà aux prises avec des dettes, des pertes d’emploi, etc. Le message de Trump “d’ouvrir l’économie” a résonné chez beaucoup de personnes inquiètes pour leur avenir. Il n’est pas exagéré de dire que sans la pandémie et la mauvaise gestion criminelle de Trump – ou s’il avait été un peu plus compétent – il aurait facilement vaincu Biden.

L’hostilité des Démocrates à l’égard de la politique progressiste
Au cours des derniers jours de la campagne, Biden a clairement fait savoir qu’il n’interdirait jamais la fracturation hydraulique, qu’il ne réduirait jamais le financement de la police et qu’il accepterait un nouvel ajout de droite à la Cour suprême. En réponse aux meurtres racistes de la police, il a (encore !) déclaré que les flics devraient plutôt tirer dans la jambe des suspects ! Il a refusé de soutenir le principe d’une assurance-maladie pour tous alors que ces élections prenaient place au plus fort de la pandémie. Il n’est pas surprenant qu’un sondage Axios ait montré que plus de 58% des électeurs démocrates étaient été motivés à voter “contre Trump” plutôt que “pour Biden”.
Tout cela a laissé de la place à Trump pour se présenter comme un “outsider” malgré sa présence à la Maison Blanche ! Trump a critiqué Biden de la “gauche” au sujet de son projet de loi raciste de 1994 concernant la criminalité, ainsi que pour son soutien aux guerres en cours et aux accords commerciaux favorables aux entreprises. Il a combiné ces attaques à un cocktail de racisme, de sexisme, d’autoritarisme, d’appels à l’extrême droite, de théories du complot et de rhétorique de maintien de l’ordre qui a permis à Trump de trouver un écho auprès d’une certaine partie des électeurs blancs conservateurs.
Dans sa déclaration aux médias du 4 novembre, Trump est allé jusqu’à dire que “les Démocrates sont le parti des grands donateurs, des grands médias, de la grande technologie, semble-t-il. Et les Républicains sont devenus le parti du travailleur américain“. Bien sûr, pour un milliardaire qui a rempli son cabinet d’autres super riches, dire cela est très absurde. En fait, les électeurs qui gagnent moins de 100.000 $ par an ont voté pour Biden plutôt que pour Trump avec une marge importante. Mais le fait que cela puisse trouver un écho nous en dit beaucoup sur l’establishment démocrate.
Pourtant, les experts libéraux chercheront à prétendre que cette situation est due à des personnes qui n’ont pas voté (surtout les personnes de couleur), à des électeurs qui ont voté pour des candidats indépendants, aux idées racistes dans la classe ouvrière blanche (ce qui est un facteur réel que nous abordons plus bas), ou à l’association des Démocrates avec la “gauche radicale”. La direction du Parti démocrate doit plutôt se regarder dans le miroir pour constater qui a offert à Trump la possibilité de tenter de voler ces élections. Sanders lui-même n’aurait pas dû capituler devant Biden. Il n’aurait pas dû s’autocensurer au sujet de ses précédentes critiques du Parti démocrate. Cela a permis à Trump de se présenter comme un candidat anti-establishment.
Le jeu des reproches
Les experts libéraux et certains activistes de gauche minimisent la nature peu inspirante et pro-entreprises de la campagne de Biden. Ils affirment que l’augmentation du vote de Trump à partir de 2016 n’est due qu’au racisme de la classe ouvrière blanche. Bien sûr, la société aux États-Unis est profondément raciste. L’extrême droite s’est développée et continuera à constituer une menace contre laquelle les socialistes et le mouvement ouvrier doivent lutter.Mais cela seul n’explique pas les gains réalisés par Trump lors de cette élection et ce serait une très grave erreur de passer cela sous silence en considérant que ses partisans ne sont qu’un seul bloc monolithique d’électeurs blancs racistes. En fait, le seul segment de la population où son pourcentage de soutien a diminué est celui des électeurs blancs non diplômés de l’enseignement supérieur. Cela ne change rien au fait que les deux tiers de cette population ont soutenu Trump, mais cela montre que c’est loin d’être monolithique.
Le soutien de Trump s’est par contre accru parmi les électeurs noirs et latinos, des votes considérés comme acquis aux Démocrates depuis longtemps. En fait, il a remporté le plus grand nombre de voix parmi les personnes de couleur de tous les candidats républicains à la présidence en 60 ans ! Un certain nombre de facteurs entrent en jeu, mais un élément important qui explique pourquoi une partie des électeurs noirs et latinos de la classe ouvrière a choisi Trump est à nouveau dû à l’économie et à l’échec complet des Démocrates à parler de la crise à laquelle les travailleurs sont confrontés en ce moment.
Les organes capitalistes comme le New York Times voient un avantage à résumer cette élection de cette manière, puisque cela peut ébranler la foi dans le potentiel de solidarité multiraciale de la classe ouvrière tout en détournant l’attention des échecs des démocrates. Bien qu’ils ne le disent pas ouvertement, ils s’opposent activement à l’émergence d’un mouvement de masse multiracial centré sur la classe ouvrière qui prendrait le pouvoir de la classe des milliardaires qu’ils défendent. Quand les grandes entreprises se saisissent de la question du racisme, ce n’est que dans le but de défendre la domination capitaliste.
Là encore, il est cependant indéniable que Trump a profité des sections de la société américaine ayant les idées les plus arriérées concernant le racisme en utilisant une rhétorique de maintien de l’ordre.
Le besoin d’une véritable unité de la classe ouvrière face au racisme est crucial. Mais par quels moyens réaliser cette unité dans une société aussi extrêmement polarisée ? La réponse est complexe. Nous estimons que c’est possible sur base d’un programme de lutte qui comprend à la fois des revendications qui améliorent la vie des travailleurs dans leur ensemble et une position claire en faveur de la libération des Noirs et des droits des immigrants.
Le soulèvement multiracial massif de cet été – et le large soutien au soulèvement dans la société – à la suite du meurtre de George Floyd par la police a précisément illustré le potentiel d’une lutte unie contre le racisme et les inégalités économiques. Mais le manque de leadership, d’organisation et de stratégie claire a donné à la classe dirigeante l’occasion de se ressaisir. Cela a également donné à Trump et à l’extrême droite une possibilité d’exploiter les craintes des gens vis-à-vis du chaos. La réaction contre le soulèvement (en particulier dans les zones rurales) est réelle mais ne doit pas être exagérée.
À quoi ressemblera cette présidence ?
Il est clair qu’une administration Biden/Harris ne résoudra aucun des problèmes clés auxquels sont confrontés les travailleurs. Il est prévisible qu’ils se cacheront derrière le contrôle républicain potentiel du Sénat pour justifier l’impossibilité d’apporter des changements. Même pendant la campagne, alors que les Démocrates essayaient de gagner le contrôle du Sénat, Biden a déclaré qu’il “travaillerait avec les républicains”, l’excuse éternelle pour accepter des attaques massives contre les intérêts des travailleurs. Il y a plus de chances de voir de riches républicains dans le cabinet de Biden que Bernie Sanders.Dès le départ, ce sera une administration faible qui supervisera la crise profonde de la pandémie et la dévastation économique. La Réserve fédérale et les économistes capitalistes sont presque unanimes pour dire qu’il faut beaucoup plus de mesures de relance budgétaire pour éviter un effondrement encore plus important. Mais si le complément de 600 dollars aux allocations de chômage doit être rétabli d’urgence, ce n’est pas du tout la même chose que d’apporter des changements fondamentaux dont nous avons besoin comme le New Deal vert et l’assurance maladie pour tous. Malheureusement, les dirigeants démocrates sont très clairement opposés à ces deux programmes pourtant très populaires.
Une victoire finale
Nous devons de toute urgence construire un mouvement de masse pour lutter en faveur d’un plan de relance d’urgence pour les travailleurs, d’un Green New Deal socialiste, d’un contrôle communautaire de la police, d’un système de santé pour tous, et bien plus encore.Nous ne pouvons pas compter sur les Démocrates contrôlés par les entreprises pour changer fondamentalement la situation. Biden a répété à maintes reprises qu’il ne proposera pas les politiques dont nous avons si désespérément besoin.
Biden supervisera l’une des crises les plus profondes de l’histoire du capitalisme américain. Il s’efforcera de servir les intérêts de la classe des milliardaires, comme il l’a fait tout au long de sa carrière politique. Cela conduira des millions de personnes à chercher une alternative à la direction du Parti démocrate et à la politique mainstream en général.
Dans ce contexte, l’extrême droite pourrait se développer encore plus sous une présidence Biden. Afin de lutter efficacement contre les racistes, nous avons besoin d’un programme qui puisse mobiliser les travailleurs dans l’action. Nous ne pouvons pas limiter nos exigences à ce qui est acceptable pour la direction du parti Démocrate et ses bailleurs de fonds milliardaires. Nous devons plutôt nous battre pour les besoins de milliards de personnes dans le monde entier plutôt que pour les milliardaires. Ce type de lutte entrerait inévitablement en conflit avec le système capitaliste lui-même.
Cette élection montre que les Démocrates ne peuvent pas vaincre l’extrême droite de manière décisive. Socialist Alternative estime que nous avons besoin d’un nouveau parti reposant sur la classe ouvrière. Nous préconisons que ce nouveau parti s’empare des richesses des grandes entreprises et les place sous le contrôle et la gestion démocratiques des travailleurs. Trump n’est qu’un symptôme. La maladie, c’est le capitalisme et le remède : le socialisme.

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Sanders suspend sa campagne – Les travailleurs ont besoin de leur propre parti

Photo: Wikimedia Commons Ce mercredi, Bernie Sanders a annoncé qu’il suspendait sa campagne pour la présidence, ce qui y a mis fin dans les faits. Il se trouvait 300 délégués derrière Joe Biden et le chemin pour l’emporter était très difficile, mais se retirer à ce stade a profondément déçu des millions de partisans. Comme nous l’avons fait valoir avec Socialist Alternative, cette primaire a été volée par l’establishment capitaliste du Parti démocrate, comme c’était déjà le cas en 2016.
Par Kshama Sawant
Sanders a décidé de laisser tomber à un moment où les travailleurs sont confrontés à une crise sans précédent, alors que la nécessité d’un changement socialiste n’a jamais été aussi évidente. L’épidémie de coronavirus a pleinement mis en évidence l’inégalité massive de la société américaine et les effets catastrophiques de décennies d’attaques sur les gains durement acquis des travailleurs et de coupes budgétaires dans les services sociaux, y compris les soins de santé.
En plus des ravages causés par le coronavirus dans de nombreuses communautés de la classe ouvrière, en particulier parmi les travailleurs immigrés à New York et dans les communautés ouvrières noires de nombreuses villes, s’ajoute la nouvelle réalité du chômage de masse à une échelle qui ne peut être comparée qu’à la Grande Dépression. À la fin du mois d’avril, 50 millions de personnes auront perdu leur emploi, 35 millions auront perdu leur couverture de santé fournie par leur employeur et des dizaines de millions de personnes devront choisir entre payer leur loyer et acheter de la nourriture.
Cette crise démontre la faillite complète du système capitaliste à un degré qui n’a quasiment jamais été atteint.
Joe Biden, ce désastre
Le candidat démocrate présumé est maintenant Joe Biden, un fidèle serviteur de Wall Street depuis de nombreuses décennies qui a soutenu la réduction de la sécurité sociale et de Medicaid. Il fut l’un des principaux partisans des politiques d’incarcération de masse. Il a mené la charge au Sénat américain contre Anita Hill qui a témoigné du harcèlement sexuel dont elle a été victime par le candidat à la Cour suprême Clarence Thomas. Il a soutenu vigoureusement la guerre en Irak. Les facultés mentales de Biden ne sont manifestement pas non plus ce qu’elles étaient. Il a été absent pendant l’essentiel de la crise du coronavirus. Il se pourrait que l’establishment essaye de le remplacer par quelqu’un d’autre plus tard cette année. Mais toute tentative de ce type risque de discréditer encore davantage la direction du Parti démocrate dont on ne saurait trop insister sur le manque d’autorité.
Cela reflète le désespoir de l’establishment regroupé autour de Biden pour arrêter Sanders après l’élan qui était le sien suite à sa victoire dans les trois premières primaires. Après avoir désespérément cherché un autre candidat, l’establishment a dû s’en remettre à Biden, en dépit de ses faiblesses évidentes. Mais si Bernie a effectivement été bloqué, cela ne fait que retarder le décompte. Même si Biden bat Trump d’une manière ou d’une autre, il devra faire face à une crise comparable à la Grande Dépression qui mettra complètement en évidence l’insuffisance de la direction du Parti démocrate et alimentera le désir de millions de personnes de créer un nouveau parti de la classe ouvrière.
C’est la crainte d’un second mandat de Trump, le président le plus réactionnaire depuis des décennies, qui a ouvert la porte à l’establishment pour s’engager dans une campagne de manipulation de masse après les primaires de Caroline du Sud. L’ironie de la chose est que si beaucoup de ceux qui ont soutenu Biden ont adhéré à l’argument selon lequel Sanders serait un candidat “trop radical” pour battre Trump, ils ont également soutenu des éléments clés de la plate-forme de Sanders. Lors des 20 premières primaires, les sondages de sortie des urnes ont démontré qu’une majorité de personnes soutenaient le programme “Medicare for All”.
Malgré tout cela et en dépit des sondages qui montrent que Sanders battrait Trump, Bernie a accepté la défaite et a clairement fait savoir qu’il soutiendrait Biden. L’équipe de Sanders en est réduite à espérer obtenir des “concessions” verbales de la part de Biden en faveur d’une politique progressiste. Biden pourrait en effet jeter quelques miettes pour essayer d’empêcher des millions de progressistes, en particulier des jeunes, de rester chez eux en novembre prochain. Mais il serait franchement illusoire d’accepter les promesses farfelues de Biden qui, il y a encore quelques semaines, a déclaré qu’il opposerait son veto à l’assurance maladie pour tous si le Congrès l’adoptait !
Nous comprenons pourquoi des millions de personnes sont si désespérées de se débarrasser de Trump qu’elles soutiendraient presque n’importe quel adversaire. Mais nous savons aussi qui est Joe Biden et il n’est certainement pas un “ami” des travailleurs, des femmes, des noirs ou des immigrés. Nous ne le soutiendrons pas et Sanders ne devrait pas non plus le faire.
Pourquoi avons-nous soutenu Bernie Sanders ?
Socialist Alternative a officiellement soutenu Sanders en novembre et a tout fait pour que cette élection soit gagnée. Nous ne regrettons pas cette position, qui repose sur les éléments extrêmement positifs du mouvement qu’il a contribué à créer. En 2016, Sanders a électrisé des millions de personnes grâce à son programme radical en faveur de la classe ouvrière et son appel à une “révolution politique contre la classe des milliardaires”. Il a popularisé le terme de “socialisme démocratique”. Cette fois, Sanders est allé plus loin en disant que les milliardaires “ne devraient pas exister”, tout en parlant d’un “gouvernement de la classe ouvrière” et en déclarant que son rôle de président serait d’être “l’organisateur en chef” (des luttes sociales, NdT). Il a appelé à un Green New Deal et même à la prise en charge de certaines parties de l’industrie énergétique par le secteur public.
Mais la raison principale pour laquelle nous avons soutenu Bernie avec tant de force est la même que celle pour laquelle la classe dirigeante le craignait. Sa campagne de 2016 a contribué à inspirer les gens à entrer en lutte. Ce fut notamment le cas avec la révolte des enseignants en 2018 et 2019. Cela a contribué à la renaissance du mouvement ouvrier aux Etats-Unis. S’il avait d’une manière ou d’une autre surmonté tous les obstacles et remporté la présidence en 2020, la classe dirigeante craignait que l’énorme augmentation de la confiance des travailleurs ne conduise à une vague de lutte sans précédent. Les entreprises donatrices des démocrates ont clairement indiqué qu’elles préféraient quatre années supplémentaires de Trump à l’arrivée de Sanders à la Maison Blanche.
En même temps, nous avons toujours été francs concernant les limites de Sanders et les divergences importantes que nous avons avec lui. En 2016, nous avons souligné le caractère contradictoire de sa campagne : d’une part, en refusant tout argent des entreprises, il a mis en évidence le potentiel d’un nouveau parti, mais en même temps, il a ramené les gens vers les démocrates. En 2018, nous avons assisté à un nouveau virage de la gauche vers la tentative de réforme des démocrates, encouragé par l’élection d’Alexandria Ocasio-Cortez et d’autres en tant que socialistes démocratiques. Nous avons également soutenu cette évolution, car elle a exacerbé les contradictions au sein du Parti démocrate lui-même, un parti qui a été un obstacle majeur sur la voie du développement d’une gauche puissante aux États-Unis depuis les années 1930.
De plus, nous n’avons jamais été d’accord avec l’explication de Sanders sur le socialisme, qui semble selon lui être une combinaison du New Deal de Roosevelt et de la politique des gouvernements sociaux-démocrates européens. Ces exemples ne représentent que des tentatives de sauver le système capitaliste en faillite et une démarche visant à s’en débarrasser. Ce projet a échoué, comme le souligne la pandémie actuelle et la menace d’une catastrophe climatique.
Les dirigeants de la plupart des syndicats, à d’honorables exceptions près, ont joué un rôle dans la défaite de Sanders. Ils craignent davantage la lutte des classes que les attaques des patrons contre les travailleurs. Nous devons également mentionner le rôle terrible joué par Elizabeth Warren, qui a refusé de soutenir Bernie lorsque tous les candidats pro-entreprises se sont alignés derrière Biden.
Malgré les défis croissants auxquels sa campagne s’est retrouvée confrontée, Sanders a continué à défendre des propositions audacieuses pour faire face à la double crise émergente de la pandémie et de l’effondrement économique. Il a récemment appelé à verser à tous les travailleurs leur ancien salaire complet pour la durée de cette crise. Mais alors que lui et AOC ont émis un certain nombre de critiques sur le projet de loi de relance qui contenait un plan de sauvetage stupéfiant pour les entreprises américaines, ils ont voté fait l’erreur de céder à la pression et de voter en faveur de ce plan.
Cette situation et le fait que Biden soit constamment appelé “mon ami” par Sanders indiquent un problème plus important. Comme l’ont fait remarquer plusieurs personnes à gauche, une approche plus combative envers Biden dès le début aurait été bénéfique à Sanders en l’aidant à révéler qui est vraiment Biden. Il est temps de résister aux faux appels à l’”unité” de la classe dirigeante, de désigner les responsables de la catastrophe et de construire une résistance féroce, indépendamment des hurlements des médias dominants.
Et maintenant ?
Des millions de personnes se posent cette question. La décision de Sanders de suspendre sa campagne est sans aucun doute un véritable revers pour la gauche. Mais elle devrait aussi mettre fin aux illusions sur la capacité de la gauche à transformer le Parti démocrate. Il y a un réel danger de démoralisation mais des millions de personnes ont également les yeux ouverts. Cela oblige beaucoup de gens à se demander – en ces temps de crise profonde – de quel type de direction la classe ouvrière a besoin.
Alors que Sanders se dirigeait clairement vers la défaite à l’approche de la Convention démocrate de 2016 après des primaires truquées, nous l’avons appelé à continuer à se présenter en tant qu’indépendant. Cela a été largement relayé et a été considéré par beaucoup comme la prochaine étape logique. Il est possible qu’il ait pu gagner une course à trois avec Clinton et Trump. Un appel similaire aujourd’hui ne recueillerait probablement pas le même soutien en raison de la crainte prédominante parmi les millions de personnes d’une réélection de Trump. Toutefois, la principale contribution que Sanders pourrait apporter à la poursuite du développement du mouvement qu’il a créé, selon nous, est d’admettre l’impossibilité de réformer le Parti démocrate et de contribuer à l’effort de création d’un nouveau parti.
En attendant, les meilleurs militants, en constatant que la route est bloquée sur le terrain politique, se tourneront vers les luttes de masse qui se développent même en plein confinement. Des travailleurs de première ligne dans tout le pays réclament des mesures de sécurité et des primes de risque, notamment par la grève. Les travailleurs des industries clairement non essentielles ont exigé la fermeture de leurs lieux de travail.
Avec des dizaines de millions de personnes incapables de payer leur loyer, il existe objectivement les bases d’une grève des loyers à l’échelle nationale le 1er mai. Nous demandons que celle-ci soit combinée à des actions sur le lieu de travail dans tout le pays, même si elles sont de courte durée, et à des actions de solidarité en respectant la distance sociale dans les quartiers populaires. C’est à travers ces luttes du 1er mai et dans les mois à venir que la solidarité et la conscience de la classe ouvrière pourront être construites, ce qui aidera à poser les bases d’une révolte de la classe ouvrière contre le pouvoir des entreprises. C’est ce dont nous avons si désespérément besoin. Nous appelons celles et ceux qui veulent prendre part à cette lutte pour un changement révolutionnaire à contacter Socialist Alternative et à nous rejoindre.
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USA. Face au capitalisme malade, un plan anti-crise socialiste

Le monde a été bouleversé. Des millions de travailleurs voient maintenant leur santé et leurs moyens de subsistance mis en danger en raison de l’épidémie mortelle de COVID-19 et de l’effondrement de l’économie capitaliste à une échelle encore plus grande que celle de la Grande Récession de 2008-9.
Par Tony Wilsdon, Socialist Alternative (partisans d’Alternative Socialiste Internationale aux USA)
La pandémie et l’effondrement économique sont présentés comme le résultat d’un “acte divin” imprévisible. En réalité, les épidémies ont été multipliées par quatre au niveau mondial au cours des cinquante dernières années, principalement en raison de la destruction de l’environnement. Cette pandémie était tout à fait prévisible et, en fait, elle a été prédite par les scientifiques. Une chose qui n’était certainement pas inévitable, c’est l’absence totale de préparation.
Ce qui a vraiment été exposé aux États-Unis et en Europe, c’est l’effet dévastateur des réductions des budgets publics des soins de santé combinées à la privatisation. Le néolibéralisme, qui a massivement accru les inégalités sociales, va maintenant faire payer un tribut encore plus lourd aux masses populaires.
Si le coronavirus est le déclencheur de la crise économique, il met également en évidence l’énorme fragilité d’une économie mondiale qui était déjà au bord de la récession sans qu’aucun des problèmes sous-jacents à l’origine de la crise de 2008-2009 ne soit résolu. Aujourd’hui, Trump et les capitalistes sont contraints d’injecter des centaines de milliards dans l’économie, y compris directement dans les poches des travailleurs. Ce n’est pas parce qu’ils s’inquiètent soudainement de notre sort, mais pour sauver leur système d’un effondrement total. Leurs mesures ne feront que ralentir la crise, pas la résoudre.
C’est une crise créée à tous les niveaux par le système malade du capitalisme où les besoins de la grande majorité sont subordonnés aux diktats du profit pour les milliardaires égoïstes.
Une inaction criminelle
La Chine est maintenant présentée comme le “modèle” pour contenir le virus, mais la vérité est que le régime capitaliste d’État brutal a couvert l’étendue du problème fin décembre et début janvier tout en persécutant les travailleurs de la santé qui dénonçaient la situation. L’occasion de contenir l’épidémie au départ a donc été gâchée.
Pendant des semaines, Trump a été le pendant du comportement criminel du régime chinois en niant l’existence d’une menace quelconque et en ne faisant rien pour intensifier les tests ou préparer les soins de santé à faire face à la pandémie. Il cherche maintenant à détourner l’attention de cette inaction en attisant la xénophobie et en appelant le coronavirus le “virus chinois”. En raison de la négligence criminelle de cet égocentrique délirant, des milliers et probablement des dizaines de milliers de personnes mourront inutilement.
Trump envisage maintenant de “rouvrir l’économie” et d’exhorter les gens à reprendre le travail en avril afin d’éviter un effondrement plus profond de Wall Street. Cela va à l’encontre de l’avis quasi unilatéral des experts de la santé. En réponse à cela, au moment d’écrire ces lignes, le hashtag #NotDying4WallStreet (nous ne mourrons pas pour Wall Street) est devenu viral sur Twitter alors que les gens exprimaient leur indignation face à un système qui fait passer les profits avant la vie des gens.
Mais il n’y a pas que Trump. Les Démocrates au Congrès, ainsi qu’au niveau des États et des collectivités locales, à d’honorables exceptions près, ont été complices du maintien de ce qui se rapproche dangereusement d’un code du silence sur la véritable ampleur de la crise. Cela alors qu’au même moment, les médecins et les épidémiologistes du monde entier tiraient la sonnette d’alarme.
Même aujourd’hui, les États-Unis n’ont testé que 125 personnes par million, contre 5.000 par million en Corée du Sud qui a connu la première épidémie après la Chine et où elle a été relativement contenue, du moins pour l’instant.
Révision immédiate des soins de santé !
Des décennies de politiques capitalistes, conçues pour maximiser le profit sans se soucier des conséquences pour la société ou les travailleurs, sont responsables de l’état de vulnérabilité dans lequel nous nous trouvons aujourd’hui. Les longues chaînes d’approvisionnement et les coupes dans les hôpitaux publics nous ont laissés totalement démunis face à cette crise.
Nous sommes maintenant confrontés à une grave pénurie d’équipements de protection dans les hôpitaux, à un manque lamentable d’équipements de test et à une absence totale de préparation à cette pandémie.
– Nous exigeons que le gouvernement affecte immédiatement des ressources publiques à la production d’équipements médicaux, pour assurer des tests rapides pour l’ensemble de la population et pour doter le personnel médical et le public des équipements de protection nécessaires.
– Réouverture des hôpitaux fermés, construction immédiate de nouveaux hôpitaux pour faire face à l’afflux de patients à venir. Recrutement et formation accélérés et massifs du personnel médical. Le tout avec des droits syndicaux et de bons salaires.
– Création de cliniques médicales gratuites dans tous les quartiers. Réquisition des bâtiments vides lorsque cela est nécessaire.
– Investissements publics massifs dans la mise au point d’un vaccin. Non au plan de Trump de privatiser le vaccin. Nous avons besoin d’une entité publique pour assurer la production rapide d’un vaccin, gratuit pour tous, en toute transparence.Assurer des conditions de travail sûres
Dans tout le pays, les travailleurs ont subi des pressions de la part de leurs patrons pour qu’ils continuent de travailler malgré l’absence totale d’équipements de protection. Les travailleurs de première ligne comme les infirmières, les caissiers de supermarché, les camionneurs, les magasiniers et les livreurs ne devraient pas avoir à compromettre leur santé afin d’aider la société et recevoir un salaire. Nous avons besoin de syndicats forts pour lutter en faveur de mesures de sécurité, de droits au travail et d’une augmentation des salaires pour les travailleurs à risque.
– Tous les travailleurs ont droit à un lieu de travail sûr. Personne ne devrait avoir à choisir entre revenu et sécurité.
– Les travailleurs ont le droit de faire grève et de refuser de travailler jusqu’à ce que la sécurité soit assurée. Nous appelons à la création de comités de travailleurs élus pour protéger les travailleurs sur leur lieu de travail.
– Non aux attaques contre les droits syndicaux ! Pas de suspension de la négociation collective ou du droit de constituer un syndicat.
– Pour une “indemnité de risque” à tous les travailleurs essentiels. Tous les travailleurs essentiels devraient être payés au moins à 150% pendant la pandémie.
– Les entreprises qui refusent de fonctionner selon ces règles devraient être prises en charge par le secteur public, avec un contrôle et une gestion démocratiques des travailleurs.Plein salaire pour les chômeurs
– Tous les travailleurs doivent recevoir un salaire complet s’ils perdent leur emploi en raison de la pandémie ou de la récession. Cela inclut les millions de travailleurs qui sont faussement étiquetés “entrepreneurs indépendants” ou qui travaillent dans la « gig economy » (terme populaire aux USA qui désigne principalement les plateformes comme Uber ou Deliveroo).
– Tous les travailleurs sans travail rémunéré devraient avoir droit à des paiements fédéraux mensuels équivalant à un salaire de subsistance de 15 dollars de l’heure ou 600 dollars par semaine.
– Gel de tous les loyers et des hypothèques. Pour un plan d’urgence visant à loger les sans-abri.
Protéger les gens, pas les profits
Les travailleurs ne sont pas responsables de ces deux crises. Cependant, selon la logique du capitalisme, ce sont les travailleurs qui connaîtront les plus grandes difficultés, tandis que les PDG super-riches et les milliardaires, dont les politiques ont provoqué cette crise, reçoivent des billions de dollars en renflouements gouvernementaux. Et maintenant, il est révélé que des sénateurs investissaient des millions dans les stocks lorsqu’ils ont été avertis de l’ampleur de la pandémie à venir.
Les politiques néolibérales promues par les politiciens capitalistes ont saigné l’éducation publique et les services publics en général au cours des dernières décennies. Comme l’a souligné Bernie Sanders, l’absence d’un système d’assurance-maladie pour tous a laissé le public sans protection contre cette pandémie. La moitié des familles de la classe ouvrière n’ont pas les ressources nécessaires pour faire face à une urgence de 400 dollars. Ces politiciens capitalistes ne méritent rien de notre part. Nous devons être prêts à prendre des mesures décisives contre ceux qui nous ont mis dans ce pétrin.
– Soins de santé gratuits pour tous. Mettons un terme à la logique du privé dans le domaine de la médecine : propriété publique des installations médicales, de l’industrie pharmaceutique et des entreprises de dispositifs médicaux.
– Réorganisation rapide de l’industrie pour créer davantage de fournitures médicales, de masques, de désinfectants pour les mains et d’autres articles nécessaires.
– Toute entreprise cherchant à exploiter cette crise à des fins lucratives devrait être mise sous propriété publique avec gestion et contrôle démocratique des travailleurs.
– Confisquer les richesses des milliardaires avec une compensation qui ne sera accordée que sur la base d’un besoin prouvé. Utilisons ces ressources pour financer les fournitures médicales d’urgence, la nourriture et les services nécessaires à tous les travailleurs.
– Mettons fin à l’incarcération massive et à la détention inhumaine des migrants. Libération immédiatement de tous les délinquants non violents et les personnes accusées de délits mineurs. Fournissons immédiatement un espace public sûr pour héberger les sans-abri, où ils pourront avoir accès à des ressources médicales gratuites.Le capitalisme a échoué – pour une société socialiste
Le crash de Wall Street en 2020 et les attaques contre le niveau de vie et les programmes sociaux des travailleurs sont le résultat direct de la logique du capitalisme. Nous ne pouvons pas attendre du système capitaliste qu’il fasse autre chose que de maximiser la richesse des milliardaires qui thésaurisent les ressources et cherchent à tirer profit de notre misère. Cette crise a révélé qui fait réellement fonctionner la société : les infirmières, les magasiniers, les employés des épiceries, les livreurs. Nous exigeons que les ressources de la société soient planifiées démocratiquement par ceux d’entre nous qui font tout le travail – la majorité. Cela signifie qu’il faut remettre en question le règne des milliardaires et leur retirer les leviers du pouvoir.
Cela ne peut se faire que par la propriété publique de la richesse des plus grandes banques et entreprises et par une planification démocratique de l’économie par les représentants élus de la classe ouvrière sur le lieu de travail et dans la communauté. La nécessité d’une transformation socialiste de la société n’a jamais été aussi urgente.
Nous avons besoin d’un nouveau parti pour faire face à la crise
Les travailleurs peuvent encore agir pour changer les choses ! Les pétitions en ligne, les grèves, l’organisation des lieux de travail et d’autres efforts ont suscité des concessions de la part des démocrates et des républicains aux niveaux fédéral, étatique et local. Plus nous exigeons et nous nous battons, plus ils seront obligés de céder. Dans le même temps, les directions des deux partis sont achetées et payées par la classe des milliardaires, et ils feront ce qu’il faut pour soutenir ces mêmes milliardaires qui nous ont mis dans des lieux de travail dangereux, refusent de payer leurs impôts et cherchent à profiter de notre mort et de nos souffrances.
Le Sénat a adopté un projet de loi de relance qui prévoit des paiements uniques de 1 200 $ pour la plupart des adultes et une extension importante de l’assurance chômage. Mais il comprend également un plan de sauvetage de 500 milliards de dollars pour les entreprises américaines. Dans le même temps, la Réserve fédérale affirme qu’elle est prête à injecter littéralement un billion de dollars par jour sur les marchés financiers si nécessaire.
Le gouvernement a déjà donné des billions pour soutenir Wall Street qui joue sur nos vies. Cela n’a pas empêché l’effondrement économique. La seule raison pour laquelle ils aident maintenant les travailleurs est pour essayer de soutenir l’économie capitaliste. Trump se fait passer pour un homme fort populiste, mais nous nous opposons à toute tentative de militarisation de la société ou d’attiser la haine nationaliste contre les personnes de couleur ou les immigrants. Les ennemis des travailleurs sont les milliardaires et leurs représentants des deux partis, et non les immigrés ou les travailleurs d’autres pays. Nous ne pouvons pas laisser les riches diaboliser les malades et les personnes vulnérables et laisser les milliardaires égoïstes qui ont créé cette crise s’en tirer à bon compte.
Nous devrons compter sur notre propre force, notre engagement et notre organisation pour surmonter cette crise. Le Parti démocrate a bloqué Bernie Sanders, le seul candidat ayant un programme et un mouvement qui pourrait sérieusement s’attaquer aux crises auxquelles les travailleurs sont confrontés. Le soutien du parti démocrate à Joe Biden donne à Trump l’occasion de se présenter à nouveau comme le candidat le plus anti-establishment pour faire face à cette situation. Et ce en dépit du fait qu’il ait supprimé les tests pendant des mois et qu’il ait supervisé l’imprudence capitaliste qui a intensifié cette tragédie.
– Transformons la campagne de Bernie Sanders en un mouvement de lutte contre la pandémie grâce à l’organisation en ligne, sur le lieu de travail et au sein de la communauté, afin de gagner nos revendications socialistes.
– Bernie ne devrait pas se ranger derrière le raciste, sexiste et milliardaire Biden et plutôt lancer un nouveau parti des travailleurs.
– Organisons immédiatement des conférences en ligne des partisans de Sanders afin de s’organiser ensemble pour faire face à la crise et poser les bases d’un nouveau parti par, de et pour les travailleurs sans aucun don des entreprises ou des milliardaires.
– Pour un Green New Deal qui profite aux travailleurs. Assurons que les entreprises de combustibles fossiles deviennent propriété publique pour lutter immédiatement contre le changement climatique. Embauchons et formons des dizaines de millions de travailleurs pour aider à construire une nouvelle économie démocratiquement planifiée basée sur une énergie non carbonée. Pour les gens et la planète, pas pour les profits des entreprises ! -
[VIDEO] Kshama Sawant lance un appel en faveur d’un “nouveau parti de, par et pour les travailleurs”

Ecoutez la prise de parole de notre camarade Kshama Sawant (Socialist Alternative) lors de l’impressionnant meeting de Tacoma hier. Kshama Sawant vient de lancer un appel en faveur d’un “nouveau parti de, par et pour les travailleurs” lors d’un rassemblement de Bernie en présence de plus de 15 000 personnes, et la foule s’est déchaînée !
La bataille pour la présidence américaine fait rage. Bernie Sanders, qui se déclare socialiste, s’en tire très bien dans les sondages. Venez en discutez avec Ginger Jentzen, membre de Socialist Alternative aux Etats-Unis et activiste chevronnée. Cette fin février, elle prendra la parole en Belgique lors de sept meetings.
• Mer. 19 fév. Gand. UGent Complex Blandijn, Blandijnberg 2, 9000 Gand
• Jeu. 20 fév. Bruxelles. 19h30 ULB Campus Du Solbosch – H2111
• Ven. 21 fév. Bruges. Hollandse Vismijn, Vismarkt 4, 8000, Bruges
• Sam. 22 fév. Anvers. UAntwerpend, R Blok, Rodestraat 4
• Dim. 23 fév. Louvain. Hostel De Blauwput, Martelarenlaan 11A, 3010 Louvain
• Dim. 23 fév. Liège. 16h, Aquilone, 25 Blvd Saucy.
• Lun. 24 fév. Mons. 19h, UMons Warocqué, salle 110.
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[VIDEO] Bernie président ? Tournée de meetings en Belgique avec Ginger Jentzen
La bataille pour la présidence américaine fait rage. Bernie Sanders, qui se déclare socialiste, s’en tire très bien dans les sondages. Venez en discutez avec Ginger Jentzen, membre de Socialist Alternative aux Etats-Unis et activiste chevronnée. Cette fin février, elle prendra la parole en Belgique lors de sept meetings.
• Mer. 19 fév. Gand. UGent Complex Blandijn, Blandijnberg 2, 9000 Gand
• Jeu. 20 fév. Bruxelles. 19h30 ULB Campus Du Solbosch – H2111
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• Lun. 24 fév. Mons. 19h, UMons Warocqué, salle 110.
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Pourquoi soutenir la campagne de Bernie Sanders ? Entretien avec Ginger Jentzen

La bataille pour la présidence américaine fait rage. Bernie Sanders, qui se déclare socialiste, s’en tire très bien dans les sondages. Nous en avons discuté avec Ginger Jentzen, membre de Socialist Alternative aux Etats-Unis et activiste chevronnée. Fin février, elle prendra la parole en Belgique lors de sept meetings.
Interview réalisée par Bart Vandersteene
Ginger, tu étais candidate de Socialist Alternative au conseil de ville de Minneapolis en 2017. Avec 44% des voix dans ton district, tu as manqué le siège de peu. La campagne de Bernie Sanders en 2016 a-t-elle influencé ta décision de te présenter ?
Sans aucun doute. Car malgré l’administration réactionnaire de Trump à la Maison Blanche il existe sur le terrain un espace croissant pour les idées socialistes. La preuve en est l’élection de Kshama Sawant (Socialist Alternative) au conseil de ville de Seattle en 2013, avec 100.000 voix de préférence. Elle était largement considérée comme la candidate du mouvement Occupy, et a été élue avec le mandat de faire passer le salaire minimum à 15 dollars de l’heure pour la première fois dans une grande ville américaine. Son élection en tant qu’activiste socialiste et anticapitaliste a attiré l’attention des médias nationaux et même internationaux. La jeunesse d’aujourd’hui est la génération la plus radicale depuis les années 1970. Elle est confrontée à un avenir sombre écrasé sous le poids de la dette étudiante et des salaires de misère. Kshama Sawant et Socialist Alternative ont montré en 2013 qu’un parti révolutionnaire organisé pouvait enthousiasmer les travailleurs pour organiser des mouvements qui défient les inégalités du capitalisme et qui luttent pour une alternative socialiste radicale.
J’ai étudié attentivement la campagne ‘‘15 dollars l’heure’’ menée à Seattle. Je suis devenue directrice exécutive de la campagne 15 Now et j’ai dirigé d’abord cette campagne à Minneapolis en 2017, puis à St. Paul, l’autre grande ville du Minnesota.
La campagne de Bernie en 2016 appelant à une ‘‘révolution politique contre la classe des milliardaires’’ a sérieusement accru la confiance des travailleurs. Notre campagne pour le conseil de ville de Minneapolis en 2017 a appelé les travailleurs à s’organiser. Comme Bernie, je n’ai pas accepté un cent de la part des entreprises. Une fois élue, je n’aurais accepté que le salaire moyen d’un travailleur. Nous avons fait campagne pour le contrôle des loyers, pour taxer les grands promoteurs immobiliers et les riches afin de construire des logements sociaux abordables et de financer les transports en commun. Une fuite a démontré que les grandes entreprises considéraient notre campagne populaire comme la plus grande menace lors de cette élection locale.
Bien que nous n’ayons pas gagné l’élection, nous avons lancé un débat à l’échelle de la ville sur le contrôle des loyers et le logement abordable, la taxation des riches et l’organisation politique nécessaire pour défier l’élite des entreprises. Ce qui est semblable aux leçons que les mouvements progressistes tirent de la campagne électorale 2020 de Bernie, plus militante et centrée sur la classe ouvrière.
Kshama Sawant a été réélue pour la deuxième fois il y a quelques mois. La personne la plus riche du monde, Jeff Bezos, le propriétaire d’Amazon, a investi beaucoup d’argent pour essayer de la détrôner.
Oui ! En novembre, Socialist Alternative a remporté une très grande victoire aux côtés des travailleurs en battant Jeff Bezos. Amazon et d’autres grandes entreprises ont essayé d’acheter les élections locales. Mais nous avons développé le mouvement de base le plus fort possible et nous avons gagné. Maintenant, nous poursuivons cet élan avec une coalition pour taxer Amazon (dont le siège est à Seattle) afin de construire des logements sociaux.
Pour remporter cette victoire à Seattle, il fallait une organisation solide, soudée, des discussions politiques approfondies et constantes sur le terrain et une armée de camarades pour faire du porte-à-porte et répondre aux mensonges et aux attaques constants lancés contre nous.
Nous concevons la politique comme la construction de mouvements combinée à une lutte de classe déterminée. Nous lions cela à la nécessité d’une transformation de la société. Nous estimons que la même approche est nécessaire pour faire élire Bernie et vaincre la classe des milliardaires.
Les médias ont longtemps essayé de minimiser la campagne de Bernie, mais il est devenu le favori dans de nombreux sondages. Comment sa campagne a-t-elle atteint un tel point ?
Cette campagne est plus radicale et plus orientée vers la classe ouvrière qu’en 2016. Sanders affirme vouloir devenir ‘‘l’organisateur en chef’ en tant que président et travailler pour un ‘‘gouvernement de la classe ouvrière’’. Contrairement aux autres candidats – qui prétendent ne pas reconnaître les pressions de Wall Street et des grandes entreprises – Bernie est le premier à dire que le simple fait de gagner l’élection ne sera pas suffisant : les travailleurs doivent s’organiser et lutter.
La question clé pour des millions de personnes est de savoir qui peut vaincre le bigot en chef soutenu par les milliardaires, le président Trump – et Bernie est le meilleur pari. Son slogan “Not Me, Us” (‘‘Pas moi, Nous’’) est de réveiller les gens habituellement privés de leurs droits politiques. Et contrairement à tous les autres candidats démocrates, y compris Elizabeth Warren, il sait que nous sommes dans une lutte contre la classe des milliardaires.
Alexandra-Occassio Cortez (AOC), qui est une alliée de Bernie Sanders, a déclaré lors d’une récente interview que dans tout autre pays, elle-même et Joe Biden (candidat de l’establishment démocrate et ancien vice-président) ne feraient pas partie du même parti. Combien de temps cette contradiction au sein du Parti démocrate peut-elle encore durer ?
Étant donné la colère généralisée contre l’establishment, il est inhérent à la situation que nous puissions voir de nouveaux partis à droite et à gauche des démocrates et des républicains. Depuis 2016, nous avons vu les débuts d’un mouvement féministe de masse, des manifestations contre la violence armée et plus récemment contre le changement climatique. La vague de grève la plus importante depuis des décennies a commencé avec la révolte des enseignants et s’étend maintenant à d’autres secteurs, y compris les travailleurs de l’automobile. Il y a un intérêt croissant pour les idées socialistes, plus que jamais auparavant avec le DSA (Democratic Socialists of America) qui compte 60.000 membres.
AOC et Sanders représentent une menace pour le projet politique du Parti démocrate, qui est d’être un partenaire fiable des grandes entreprises. L’appareil du parti démocrate préférerait encore quatre ans de Trump à la Maison Blanche plutôt que d’accepter une présidence de Sanders. Si M. Sanders et son million de bénévoles parviennent à surmonter tous les obstacles de la primaire, et il y en a beaucoup, beaucoup, il aura besoin d’une organisation de masse de membres derrière lui. En effet, il aura besoin d’une fraction solide, un parti au sein du parti, pour repousser le sabotage de l’establishment démocrate.
Il est encore très probable que Sanders soit bloqué par l’establishment démocrate, même s’il obtient le plus de voix dans les primaires. Dans un tel scénario, les partisans de Sanders devront convoquer une conférence de masse. En 2016, l’establishment politique a fait dérailler la campagne de Sanders en faveur d’Hillary Clinton. De nombreux travailleurs et jeunes se sont retrouvés sans alternative de gauche. Le potentiel existe pour organiser un nouveau parti de masse à la gauche des démocrates. Socialist Alternative défend que cette conférence pose les bases d’un parti de la classe ouvrière, une étape vitale pour briser le pouvoir de la classe des milliardaires.
Socialist Alternative a décidé de soutenir la campagne de Bernie Sanders. Quelles sont les principales raisons de cette décision ?
La campagne de Sanders sert à rallier les forces qui aspirent à un changement réel dans l’intérêt des travailleurs. Mais la campagne de Sanders comprend des limites. Sanders n’explique par exemple pas qu’un autre type de société est nécessaire pour que ses propositions puissent voir le jour : une société socialiste. Nous devons briser le pouvoir de la classe des milliardaires une fois pour toutes. Cependant, Bernie s’adresse clairement à la classe ouvrière en lui demandant de s’organiser, et c’est un grand pas en avant.
Socialist Alternative s’implique dans la campagne de Sanders. Nous mettons en avant des résolutions dans nos syndicats pour le soutenir. Nous défendons que les syndicats soient gérés démocratiquement et se battent pour tous les travailleurs et travailleuses au lieu d’essayer d’attendrir les grandes entreprises et leurs politiciens. La campagne Sanders est une occasion de réunir les travailleurs qui veulent lutter contre le capitalisme.
Pour aller plus loin, il faut combattre l’industrie des combustibles fossiles qui profite de la destruction de notre planète. Pour ce faire, il faudra faire en sorte que l’industrie devienne une propriété publique et organiser une transition vers un réseau d’énergie entièrement vert sous le contrôle démocratique des travailleurs et, ce faisant, créer des millions d’emplois verts et syndiqués.
Pour gagner l’assurance-maladie pour tous, nous devons démanteler les assurances privées et les grandes sociétés pharmaceutiques, et construire un système de santé public et national gratuit au point d’utilisation.
Nous devrons faire plus pour transformer cette campagne en un formidable mouvement vers la victoire. Sanders pointe dans la bonne direction, mais le Parti démocrate est fermement contrôlé par des intérêts capitalistes et ne peut être réformé en un parti des travailleurs. C’est une contradiction qui ne peut pas durer plus longtemps. Nous nous battons pour une victoire de Sanders tout en discutant de la nécessité d’un nouveau parti basé sur les intérêts des travailleurs, qui positionnerait au mieux Sanders, ses partisans et la révolution politique pour battre la classe des milliardaires une fois pour toutes.
Participez à nos MEETINGS !
La popularité du socialisme aux USA / Les victoires pour les 15$/heure : Venez en discuter avec Ginger Jentzen, de Socialist Alternative, notre section-soeur aux USA !
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Malgré le sabotage de l’establishment, Sanders remporte le vote populaire en Iowa

Par Tom Crean and Keely Mullen, Socialist Alternative
Bien que nous n’ayons pas encore le résultat complet des caucus de l’Iowa, il est clair que Bernie Sanders a remporté le vote populaire. L’armée de Bernie se dirige maintenant vers le New Hampshire, le Nevada et la Caroline du Sud, où il pourrait gagner ou arriver en deuxième position. Cela le mettra en bonne position pour le Super Mardi du 3 mars, lorsque 14 États voteront en même temps et que la plus grande partie des délégués sera attribuée. Sanders est actuellement en tête des sondages dans le plus grand de tous, la Californie. Autre signe de l’élan dont profite Sanders, les sondages de sortie des urnes dans l’Iowa ont montré que 43 % des personnes de couleur ont voté en sa faveur.
Ce que ce moment révèle de façon frappante, c’est le défi que les travailleurs et les jeunes de ce pays doivent relever pour tenter d’obtenir un véritable changement : vaincre un système politique dysfonctionnel et truqué, dominé par les intérêts des grandes entreprises. Le caucus de l’Iowa a sombré dans le chaos et la farce alors qu’a échoué une application créée par des personnes entretenant des liens étroits avec l’establishment démocrate, y compris des proches de Clinton. Puis, pour aggraver la situation, le Comité national démocrate, un organe qui n’essaie même pas de cacher ses positions anti-Sanders, a pris en charge le processus de tabulation du vote mardi soir.
Ce moment d’incompétence et d’ingérence de l’establishment survient à la veille de l’acquittement de Trump dans le “procès” du processus de mise en accusation du Sénat. Comme nous l’avions prévenu dès le début, l’accent mis par les démocrates sur l’appel téléphonique de l’Ukraine et non sur les véritables crimes de Trump – contre les travailleurs, les pauvres, les migrants, les femmes et l’environnement – risquait de rater le but. C’est exactement ce qui s’est produit. Il n’a pas été condamné et sa popularité est au plus haut niveau depuis son entrée en fonction !
La direction du Parti démocrate est pathétique. Leur incompétence dans l’Iowa fait la une des journaux tandis que Trump se pavane avec son discours sur l’état de l’Union. Pendant ce temps, tout ce que la Démocrate Nancy Pelosi peut offrir à des millions d’Américains enragés, c’est du théâtre, en déchirant sa copie du discours du président.
Mais si les démocrates disent vouloir se débarrasser de Trump, leur véritable priorité est de stopper le mouvement autour de Sanders, le candidat qui a précisément le plus de chances de vaincre Trump ! Ils crient à l’”unité” et au “vote démocrate, peu importe qui” tout en sabotant Sanders et en préparant toutes sortes de sales coups au nom de leurs maîtres : la classe dirigeante qui craint par-dessus tout l’émergence d’une force politique reposant sur la classe ouvrière.
La panique de l’establishment
Le tout premier caucus des primaires de 2020 s’est tenu à Ottumwa, dans l’Iowa, où 14 des 15 participants au caucus ont voté pour Bernie. La grande majorité d’entre eux sont des migrants éthiopiens qui travaillent chez JBS Pork, une usine de porc où les bénévoles de Bernie se sont installés entre minuit et 2 heures du matin pour y discuter avec les travailleurs pendant le changement d’équipe. Chris Laursen, représentant syndical des travailleurs de JBS Pork, a déclaré : “C’est ce qui fait la particularité de la campagne de Bernie. Ce n’est pas une campagne, c’est un mouvement. Bernie dispose littéralement d’une armée”.
C’est précisément ce qui terrifie le Parti démocrate et l’a plongé dans le chaos. Leur crainte n’est pas seulement due au fait que Bernie Sanders défend l’assurance maladie pour tous, le contrôle universel des loyers ou un New Deal vert. Ce n’est même pas parce qu’il se dit “socialiste démocratique”. C’est précisément à cause des millions d’Américains issus de la classe ouvrière déterminés à lutter à ses côtés pour un changement radical. Ils ont peur du million de personnes qui s’est engagée comme volontaire pour sa campagne et des milliers de personnes qui sont venues de tout le pays dans l’Iowa pour construire le mouvement derrière Bernie.
En réponse à cela, les dirigeants du parti discutent de la modification des règles de la Convention nationale démocrate afin de réintroduire la prééminence des superdélégués. Les superdélégués sont des initiés et des élus autoproclamés du parti qui ont joué un rôle important pour faire pencher la balance vers Hillary Clinton en 2016. Ce sont des délégués “non engagés” qui peuvent voter à la Convention nationale du parti démocrate en faveur du candidat de leur choix. Historiquement, ils se sont presque toujours entièrement alignés derrière le choix de l’establishment. En 2018, les règles de la Convention ont été modifiées de sorte que les superdélégués ne peuvent plus voter au premier tour et que leur vote n’est déclenché que s’il n’y a pas de vainqueur incontestable. Les dirigeants du parti démocrate ont discuté ces dernières semaines de la suppression de cette règle et de la possibilité pour les superdélégués de voter à nouveau au premier tour. Don Fowler, un ancien président du Comité national démocrate, a lui-même admis que cela créerait “le combat le plus salutaire que vous ayez jamais vu à une convention démocrate”.
La direction et l’appareil du parti sont prêts à utiliser les mêmes sales tours qu’en 2016 et probablement bien pire pour refuser la nomination de Bernie. Leurs manœuvres en 2016, qui ont permis à la candidate pro-entreprises Hillary Clinton d’obtenir l’investiture, ont finalement ouvert la voie à la victoire de Trump et le danger d’une répétition en 2020 est clairement présent.
Biden fait flop…La direction du Parti démocrate a perdu le contrôle de la situation. Comme nous l’avons écrit depuis le début de la bataille des primaires démocrates, l’establishment n’a pas réussi à trouver un candidat de consensus pour se rallier comme il l’a fait avec Hillary Clinton en 2016. Joe Biden a réussi à mobiliser la nostalgie de l’époque d’Obama et sa politique de “pragmatisme” pour soutenir sa campagne et maintenir son statut de premier plan pendant des mois, mais ses résultats dans l’Iowa ont permis de lever le voile sur l’énigme à laquelle sont confrontées les élites du parti.
Joe Biden va arriver en quatrième position et pourrait même ne pas atteindre le seuil de 15 % requis pour obtenir de véritables délégués à la convention. L’argument colporté par les médias dominants selon lequel Biden est le candidat le plus susceptible d’être élu dans la course s’effondre.
Pendant ce temps, Pete Buttigieg est arrivé en deuxième position lors du vote populaire. Il a été qualifié du titre de “MaireTricheur” après avoir déclaré prématurément sa victoire mardi soir avec 0% des voix comptées. Malgré sa deuxième place, Buttigieg devra encore se battre pour devenir le favori de l’establishment. Il sera presque certainement confronté à une défaite écrasante dans de nombreuses primaires à venir, y compris en Caroline du Sud où il n’a pas réussi à gagner à lui les électeurs noirs, et ce problème ne fera probablement que s’aggraver au fur et à mesure du déroulement du processus des primaires.
Le fiasco de Biden et le manque de soutien de Buttigieg parmi une grande partie de la base électorale du Parti démocrate constituent un véritable défi pour l’establishment du parti qui cherche désespérément à se rallier autour d’un candidat capable de vaincre non pas Trump, mais Sanders.
Un Parti démocrate pas très démocratique…
Aujourd’hui, des millions de partisans de Bernie sont furieux contre ce qui est au mieux l’incompétence du Parti démocrate et au pire un sabotage pur et simple. Les événements totalement antidémocratiques qui ont entouré le caucus de l’Iowa démontrent le type de transactions opaques et louches auxquelles nous serons confrontés de la part de la direction du Parti démocrate.
Alors que le parti intensifie sa tentative d’empêcher Bernie de devenir candidat, nous devons construire un mouvement encore plus puissant derrière sa campagne. Nous devons nous préparer à organiser des mobilisations de masse pour bloquer leurs manœuvres antidémocratiques, dont nous sommes certains qu’elles seront plus nombreuses.
Il est clair que nous devons sortir de l’étau du Parti démocrate et construire un nouveau parti politique doté de véritables structures démocratiques. Bernie est extrêmement bien placé pour initier une telle chose. Le point de départ devrait être une conférence des partisans de Sanders, en cas de victoire ou de défaite, après la Convention nationale démocrate, pour commencer à discuter de la formation d’un nouveau parti.
Il est encore très difficile de savoir si Sanders va lui-même s’impliquer dans ce projet, car il a déjà déclaré qu’il soutiendrait le candidat démocrate, quel qu’il soit. Nous demandons à Sanders de ne pas s’aligner derrière les démocrates capitalistes et en démobilisant ainsi ses partisans, mais plutôt de donner une impulsion aux millions d’entre nous qui soutiennent sa campagne. S’il ne prend pas les mesures nécessaires pour se séparer du Parti démocrate malgré leur opposition féroce à notre mouvement, ceux d’entre nous qui soutiennent sa vision d’une révolution politique devront le faire eux-mêmes.
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