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  • Les politiciens traditionnels sont contre la guerre en paroles seulement : Pour une véritable politique anti-guerre en Belgique !

    Certains politiciens traditionnels de notre pays se prononcent contre le massacre à Gaza. A la manifestation nationale du dimanche 11 janvier, des délégations de la plupart des partis francophones et de quelques partis néerlandophones étaient d’ailleurs présents, mais le gouvernement ne prend pas de position claire contre la guerre.

    Certains politiciens vont même plus loin en soutenant de manière assez étonnante cette guerre brutale, ce qui est entre autres le cas des politiciens du VLD, de la Lijst Dedecker (LDD) et du Vlaams Belang (VB). A la base des positions des politiciens traditionnels, il y a surtout des calculs électoraux. Certains partis espèrent attirer les voix des immigrés et d’autres parmi ceux qui sont choqués par la guerre. Ils participent parfois aux actions de protestation voire même organisent des actions humanitaires pour quelques blessés victimes d’une guerre dont certaines des armes ont été produites en Belgique. Belle hypocrisie. Ces politiciens ne sont apparemment contre la guerre que le dimanche, les intérêts des capitalistes en Belgique pouvant régner le reste de la semaine.

    D’autres donnent leur soutien à Israël, encore pour des raisons électorales. A Anvers, différents politiciens du VLD et du CD&V étaient ainsi présents à une manifestation de soutien à Israël. Filip Dewinter (VB) a expliqué lors d’une session du conseil communal anversois qu’Israël est un bastion de la démocratie et de la libre expression! Les origines du VB puisent leurs racines dans la collaboration avec les nazis et la persécution des juifs, mais Dewinter (contre une partie de sa propre base) essaye aujourd’hui d’obtenir du soutien au sein de la communauté juive dans sa lutte contre les musulmans. Selon Dewinter, la guerre est justifiée parce que « qui veut la paix prépare la guerre ».

    Pour la cessation des envois d’armes vers Israël ! Pour l’expropriation des entreprises qui produisent les armes !

    La Belgique est le cinquième exportateur européen d’armes vers Israël. Des sociétés comme la Sabca et la Sonaca ont signé de gros contrats ces dernières années pour la modernisation de l’arsenal israélien. Cette haute technologie est utilisée aujourd’hui de manière sanglante dans le massacre à Gaza. L’aéroport de Bierset, à Liège, joue en plus un rôle de plaque tournante pour le transport d’armes en provenance des USA vers Israël. Le mouvement pour la paix exige à juste titre que cela cesse. Mais comment faire ? La technologie utilisée pour la production d’armes pourrait pourtant facilement être utilisée pour une production socialement utile, personne ne perdrait son emploi de cette manière. Dans cette société où seuls comptent les profits, la guerre fait beaucoup d’argent.

    Nous appelons les syndicats à jouer un rôle essentiel dans l’arrêt de l’industrie de guerre en exigeant et en forçant une reconversion de ce secteur. Ces sociétés doivent être expropriées et placées dans les mains de la collectivité.

    Ceux qui aujourd’hui manifestent contre la guerre à Gaza ne disposent pas d’un parti politique qui défende une véritable politique anti-guerre. Un véritable parti des travailleurs de gauche utiliserait tout son poids pour une mobilisation aussi forte que possible pour les manifestations, mais il plaiderait en même temps dans les conseils communaux et les parlements pour un arrêt de la complicité des entreprises et des gouvernements à chaque guerre dans le monde. Cela peut uniquement se faire en rompant avec la logique du néolibéralisme et du marché libre. Le PSL (ex-MAS) veut collaborer avec tous ceux qui veulent construire un tel parti anti-néolibéral.

    Des espoirs en Obama ?

    Le futur président américain Obama est particulièrement silencieux concernant la guerre à Gaza. Les militants anti-guerre américains ont entre-temps manifesté pour un rejet clair de l’agression israélienne. Obama affirme qu’il n’est pas encore le président et que c’est à Bush de prendre position mais il prêtera serment dans quelques jours. Au cours de sa campagne électorale, il a exprimé son soutien à la politique du gouvernement israélien et a promis 30 milliards de $ de soutien. Joe Biden, le nouveau vice-président, a expliqué devant un public de juifs américains : « Je suis un sioniste ». Il n’est pas exclu qu’Obama, sous pression des espoirs créés autour de sa personne, tentera d’obtenir une solution négociée après que l’opération militaire ait été en grande partie menée. Mais Israël obtiendra alors encore tous les soutiens en tant qu’allié essentiel pour la politique impérialiste des USA dans le Moyen-Orient.

  • La crise exige une modification de la politique économique – La lutte des classes en déterminera le caractère (Quatrième partie)

    Dans cette partie, nous analysons les propositions à l’approche des négociations pour un accord interprofessionnel. Nous soulevons les difficultés pour boucler les budgets de 2008 et de 2009, qui devraient être finalisés le 14 octobre. Dans la dernière partie, nous révélons les drames sociaux déjà présents même avant que la crise se soit étendue à l’économie réelle.

    Texte de perspectives du Congrès National DU PSL/LSP. Ce texte a été écrit durant l’été.

    Handicap salarial ?

    112. Mais d’où vient alors cette ténacité chez les travailleurs à se mettre tout de même en action ? C’est vrai que nous n’avons pas encaissé les profits des entreprises, les dividendes des actionnaires ou encore les augmentations salariales des managers, mais nos salaires augmentent quand même plus vite que dans les pays voisins, n’avons-nous pas un handicap salarial ? Notre salaire horaire nominal a été relevé de 7,5% en 2007 et 2008, largement plus que la norme salariale de 5,1% que les syndicats avaient eu dans l’accord de février 2007. (1) Mais avec les statistiques, tout peut être prouvé. Le chiffre du Bureau du Plan de 2007-2008 est une estimation. En outre, le Bureau du Plan s’attend à une inflation de 6.5% pour la même période. Après déduction de l’inflation, il ne reste donc que 1% d’augmentation salariale. Cela doit représenter aussi bien l’augmentation de la productivité que les glissements des salaires et les augmentations barémiques. La Banque Nationale estime que l’augmentation de la productivité en 2007 a été plus basse que 1%, et ce pour la première fois depuis 2001. Elle estime le glissement des salaires sur 1% cette même année, c’est le phénomène d’augmentation du salaire moyen par le fait que le nombre d’emplois non qualifiés diminue pendant que le nombre d’emplois qualifiés augmente. (2) De plus, il s’agit ici de moyennes qui sont déformées par certaines catégories.

    113. En août, le Bureau du Plan a dégagé des chiffres qui donnent le vertige. Les salaires bruts réels, adaptés à l’inflation, des ouvriers masculins dans l’industrie auraient, dans le meilleur cas, diminués de 2.6% de juillet 2007 à juillet 2008. (3) Cela confirme une étude similaire précédente du Bureau du Plan en février de cette année, lorsque les salaires bruts réels de ces mêmes travailleurs avaient, à ce moment là, diminué de 2% sur base annuelle. (4) Les chiffres de la Banque Nationale ont confirmé que cette tendance valait aussi pour les employés et les ouvriers des autres secteurs. Comme raison principale, le Bureau du Plan met en avant l’index santé. Pourtant, déjà avant, la situation n’était pas positive. Fin 2007, il semblait déjà que « le paiement des salariés belges », le salaire, y compris les cotisations sociales, était pour la première fois depuis ’71 en dessous de 50 % du PIB. (5) Dans sa réaction, Cortebeeck, le président de la CSC, avait dit: “cela ne peut pas durer”, tandis que Rudi Thomaes de la FEB avait qualifié ces chiffres de “purement symboliques”.

    114. Des études ont paru, pour un oui ou pour un non, afin d’affirmer que les coûts salariaux belges déraillent, que le handicap du coût salarial augmente, etc. La plupart du temps, ce sont des études de l’OCDE qui reçoit ses chiffres des gouvernements nationaux qui, eux, les reçoivent des patrons. Selon la FEB, le handicap salarial s’élève à 12%. On se demande alors comment la Belgique reste un pays si attractif pour les investisseurs. Un coup d’oeil sur les frontières nous l’explique rapidement. Il semble que dans les pays voisins, on raconte les mêmes histoires. Le but de l’OCDE, des gouvernements nationaux,… n’est jamais de parler des salaires à voix haute, au contraire. La Banque Nationale est toutefois, elle, obligée de publier les chiffres réels. Il semble dès lors que les coûts salariaux par heure de travail dans le secteur privé, entre 1996 et 2007, ont diminué en Allemagne de près de 10%, en Belgique de 1% et a augmenté en France et au Pays-Bas de, respectivement, 6% et un peu plus de 15%.(6) La fête en Allemagne se prolonge d’ailleurs jusqu’à la fin. IG-Metall, le syndicat faisant autorité dans toute l’Europe avec ses 3.5 millions de membres, a exigé cette année 8% d’augmentation, revendication la plus élevée depuis 16 ans. Aujourd’hui, près de la moitié a été obtenu, mais cela aurait pu se finir autrement.(7)

    115. Il n’est donc pas étonnant que les attaques du président de la BCE Trichet sur l’indexation aient peu impressionné.(8) Les patrons ne sont pas réellement chauds pour une confrontation là-dessus, mais avec une adaptation de l’index à la fin 2007, deux fois en 2008, et probablement encore une fois dans la première partie de l’année 2009, l’avidité patronale peut être stimulée. Lorsque Thomas Leysen est devenu président de la FEB, qui selon lui représente 33.000 entreprises, il a déclaré : « il faudra bien que quelque chose se passe. » (9) Guy Quaden, gouverneur de la Banque Nationale, a suggéré une indexation en chiffres absolus plutôt qu’en pourcentage. De cette manière, les revenus les plus élevés feraient des économies sur l’indexation. Les syndicats ne sont pas tombés dans le piège. Luc Cortebeeck a répondu : « En tirant une partie de l’index à celui qui gagne un peu plus, on mine la portée de tout le système. » (10)

    Un accord interprofessionnel en fin d’année

    116. Contrairement à ce que les patrons suggèrent tout le temps, le travailleur belge n’a rien à se reprocher. A chaque fois, il apparait qu’il se trouve au top de la productivité. En terme de valeurs produites par heure de travail, avec une moyenne de 53,4$ par heure, il ne laisse passer devant lui que les travailleurs luxembourgeois (71,3$) et norvégiens (53,5$).(11) En Norvège, c’est principalement dû au secteur pétrolier. Les travailleurs américains (52,3$), néerlandais (52,2$), allemands (49,3$), français (51,3$) et surtout japonais (37,5$) sont tous moins productifs. En termes de valeur produite par travailleurs, les belges sont « seulement » à la cinquième place. C’est parce que les travailleurs belges travaillent en moyenne 1.610 heures par an, les américains 1.785 et les irlandais 1.870. Les néerlandais, par contre, travaillent en moyenne 1.413 heures, les français 1.559 et les allemands 1.432. (11)

    117. Mais pour certains, ce n’est jamais assez. Le provocateur Van Eetveelt, d’Unizo, ne nous a pas réellement surpris lorsqu’il a prétendu qu’il n’y aurait pas d’espace pour des augmentations salariales. « Ce serait déjà tout un art de pouvoir sauvegarder notre système d’indexation. » Pour la diminution des charges par contre, il voit encore quelques possibilités. (12) Son rêve ? « Travailler 6 jours, pas d’augmentation. Pourquoi ne pas augmenter la semaine de travail de 38 à 48 heures ? Pendant des périodes chargées, on doit pouvoir prester plus. » (13) Ainsi, Van Eetvelt joue son rôle classique : il lance des pistes là où d’autres n’osent pas se prononcer. La FEB va aussi aux négociations pour l’accord interprofessionnel avec des mots d’ordre clairs. Ils en ont 5 : le pouvoir d’achat n’est pas un problème, les salaires sont trop élevés, le marché du travail n’est pas assez flexible, les belges travaillent trop peu et les autorités n’ont pas une vision à terme car malgré l’augmentation de l’espérance de vie, les carrières restent trop courtes. Peter Timmermans, directeur général, rajoute que les négociations d’un accord seront plus difficiles que jamais.

    118. Il y a déjà quelques années que nous disons que les petites et moyennes entreprises de livraison seront très vulnérables dans le cas d’une récession. Les 8 premiers mois de 2008, on comptait déjà 5.191 faillites, 8,3% de plus qu’en 2007 et nous sommes sur la voie de casser le record de 2004 de 7.935 faillites. Ces faillites ont entrainé la perte de 12.000 emplois, il s’agissait surtout de petites entreprises. L’assainissement du groupe pharmaceutique UCB où 555 emplois sont menacés à Bruxelles et à Braine-le-Comte, n’en fait pas partie. Il ne s’agit pas d’une faillite. Mais c’est bien un affront pour le gouvernement wallon, puisqu’il appartient au secteur de pointe du plan Marshall. La plus grande augmentation des faillites s’est produite à Bruxelles (+20%), en Wallonie (+10%) et beaucoup moins en Flandre (+1,4%) où 2.387 faillites ont néanmoins été enregistrées. Mais tout ceci avant que la récession n’ait réellement commencé. (14)

    119. En septembre, une accélération s’est produite aussi en Flandre. Déjà avant l’été, Beekaert avait fermé sa production de cables d’acier à Lanklaar : une perte de 136 emplois. En été, Punch International a fait de même avec son usine d’enjoliveurs à Hoboken : -315 emplois. En septembre, Barco a décidé de railler 113 emplois dont 2/3 en Belgique. Ce même mois, Picanol a annoncé la perte de 190 emplois à Ypres. L’entreprise de textile Beaulieu restructure à Wielsbeke, -209 emplois et ferme sa filiale à Ninove, -178 emplois. Chez Gilbos à Herdersem, construction de machines de textile, 48 emplois disparaissent en conséquence du démantèlement d’activités de livraison. Domo Gand ferme sa filiale Cushion Floor à Zwijnaarde, 91 ouvriers et 47 employés perdent leurs emplois. En termes de faillites, il y a la fermeture d’UCO-Gand, -400 emplois et du fabricant de meubles Sint-Jozef à Aarschot, -33 emplois. Tout cela seulement en septembre 2008.

    120. Pour le patronat, c’est la situation rêvée pour faire monter la pression et se débarrasser de personnel superflu. Probablement espère-t-il effrayer les travailleurs et en même temps procurer une arme pour paralyser la base aux amis secrétaires syndicaux, tels que Herwig Jorissen de la centrale des métallos de la FGTB qui vient d’être divisée sur base communautaire. Bien que la vague de faillites pourrait provoquer des doutes pendants quelques semaines, nous ne croyons pas que cela va paralyser le mouvement des travailleurs. L’appel confus de la FGTB pour une journée d’action le 6 octobre l’exprime. Les différentes centrales interprètent la situation de manière différente.

    121. Certains plaident à juste titre pour démarrer la mobilisation par une manifestation nationale. Le 25 septembre déjà, les travailleurs des autorités locales et régionales de Bruxelles ont bloqué toute la ville par des blocages filtrants. A Belgacom, les trois syndicats ont organisés une assemblée commune pour la première fois en 40 ans. (15) Dans la centrale des métallos de la FGTB Wallonie et Bruxelles, on voulait partir immédiatement en grève durant 48 heures, entrainant le danger d’être trop en avance sur la conscience qui vit dans d’autres secteurs. La Centrale Générale et le Setca ont plaidé pour organiser d’abord une manifestation nationale. A De Lijn et à la STIB, on a pratiquement immédiatement commencé à organiser la journée de grève du 6 octobre. En Flandre orientale, en préparation, des assemblées interprofessionnelles sont organisée. A Anvers, on veut organiser un blocage filtrant du port. Cette situation chaotique va restaurer l’atmosphère d’action qui existait avant l’été et préparer les forces pour une confrontation à l’approche des négociations sur l’accord interprofessionnel (AIP).

    122. Dans les appareils syndicaux, la contradiction sera poussée jusqu’au bout entre ceux qui veulent totalement atomiser le mouvement et rêvent probablement déjà d’une carrière ailleurs, et d’autres plus sensibles aux pressions de la base et veulent le refléter même si ce n’est que de façon très limitée. Les parties plus radicales des organisations patronales (Voka, Unizo, VKW, Agoria) vont vouloir se baser sur cette contradiction pour lancer des revendications de plus en plus osées et aboutiront probablement à un discours très communautaire. Les parties plus intelligentes du patronat, le sommet de la FEB, reflèteront de temps en temps la pression de ces fragments radicaux et l’utiliseront lorsque cela leur conviendra, mais essaieront en général de temporiser pour permettre aux dirigeants syndicaux de ne pas perdre leur contrôle sur la base et pour permettre aux politiciens de rétablir la stabilité.

    123. Il y a probablement une partie des organisations patronales qui estime ne pas avoir besoin d’un accord interprofessionnel. Les grosses entreprises et leurs représentants, par contre, considèrent un accord interprofessionnel comme un instrument pour freiner une vague d’actions et de grèves dans les secteurs et entreprises et seront probablement en faveur d’un accord même si cela exige des concessions limitées. Mais un des problèmes, c’est que le gouvernement ne dispose pas de moyens pour aider à venir à un accord avec des moyens supplémentaires.

    La création d’un budget

    124. Le gouvernement a d’ailleurs un gros problème. Après s’être chamaillé pendant 15 mois sur le communautaire, il doit toujours faire aboutir son premier budget. Le précédent, était a à l’époque été fait par les ministres de la violette. Le fait que Melchior Wathelet, le ministre du budget sous Leterme Ier, soit devenu le « secrétaire d’Etat au Budget », alors qu’il est en plus responsable de la politique des familles, était déjà un signe. Avec Reynders sur les finances, c’est fatal, celui-ci s’est de nouveau trompé dans ses comptes. Selon le service d’étude des finances, les impôts en 2008 rapporteront 1,1 milliards d’euros en moins que prévu lors du contrôle budgétaire de juillet.(16) Ce sont surtout les revenus de la TVA, et les précomptes professionnels, qui ont été décevant, l’un à cause de l’affaiblissement de la consommation, l’autre à cause des diminutions de charge sur les heures supplémentaires, le travail de nuit et en équipe. Mais pour Reynders, un déficit de -0,3% n’est pas problématique. Cela pourrait d’ailleurs devenir -0,5%. La contribution de Suez de 250 millions d’euros n’est toujours pas réalisée et celle du gouvernement flamand, presque 400 millions d’euros, ne rentrera pas puisqu’il n’y a pas encore de réforme d’Etat.

    125. La construction d’un budget pour 2009 sera encore plus difficile. Pour le Bureau du Plan, la croissance diminue jusqu’à 1,2% et si la politique appliquée n’est pas changée, il faudra au moins trouver 5 milliards pour arriver à un équilibre. De plus, le gouvernement a promis de lier les allocations au bien être (200 millions en 2009), de diminuer encore les charges sur les entreprises et de réaliser une marge de 0,3%. (17) Leterme prétend chercher 5 milliards, mais selon Knack et Trends, il devrait en trouver 7. Le 14 octobre, il doit prononcer son discours sur sa politique dans le parlement fédéral. Luc Coene, vice-gouverneur de la Banque nationale, de cachet VLD, a lancé déjà quelques pistes début septembre. « Les années précédentes, les dépenses sociales ont connu une croissance de 2,3% du PIB de plus que prévu. Ce rythme de croissance des dépenses doit diminuer. » Il trouve aussi que « les dépenses publiques doivent être tenues sous contrôle. »

    126. Coene ne veut évidemment pas dire que le gouvernement doit quitter sa politique de baisse des charges. Evidemment non, car il prétend que « Après la suède, la Belgique est toujours à la deuxième place sur le plan mondial en ce qui concerne la pression fiscale. » Que faut-il alors ? Voici une sélection du Standaard. Celui-ci titre le 6 mai 2008 : « 40% des fonctionnaires partent en pension d’ici 5 ans ». Le 22 mai, « remplacer seulement un fonctionnaire sur 3 ». Le 26 juin, « Avec 72.000 fonctionnaires de moins, cela marche également ». Finalement, Van Eetvelt a écrit dans une carte blanche à la presse : « L’Etat doit vivre selon ses moyens, comme toute entreprise ». Qui vient de décider que l’Etat est une entreprise ? Il ne le mentionne pas. Pour Van Eetvelt, les dix prochaines années, 11.000 fonctionnaires peuvent disparaitre, et ceci sans bain de sang social et sans diminuer l’efficacité des autorités. Ainsi Van Eetvelt veut répondre à quelques experts financiers qui venaient de déclarer il y a quelques jours qu’ils ne croient pas en des économies sur les fonctionnaires et les soins de santé. (18)

    127. Selon ces experts, une économie sur les 80.000 fonctionnaires fédéraux ne rapporte que très peu. Le gros des coûts salariaux se trouve d’ailleurs dans les communautés et les administrations locales. Ils disent ne pas conseiller d’économiser sur les enseignants. Et évidemment, Van Eetvelt et compagnie ne sont pas d’accord. Ils savent aussi qu’une entreprise sur trois est en infraction selon l’inspection sociale (19), que l’administration fiscale est en manque systématique de personnel. Ne plus remplacer les fonctionnaires fédéraux qui partent en pension signifie parallèlement l’érosion de services publics gênants tels que l’inspection sociale et la lutte contre la fraude fiscale. En ce qui concerne l’enseignement, Van Eetvelt et compagnie ont leur réponse : l’immigration économique, c’est meilleur marché. Avec la ministre Open-VLD Turtleboom, ils ont installé une dame de fer sur cette matière.

    128. Les spécialistes trouvent aussi que faire des économies sur les soins de santé est irréaliste. « A cause du vieillissement, les dépenses pour les soins de santé croissent systématiquement ce qui rend difficile d’économiser. » Marc Devos, du groupe de réflexion ultralibéral Itinera, totalement hors de soupçon d’une quelconque sympathie de gauche, dit que les soins de santé sans réforme vont directement vers des déficits. Ce que les patients paient pour les soins de santé a augmenté systématiquement contre la tendance européenne et ceci pendant que la qualité a systématiquement reculé. L’OCDE place nos soins de santé à la 18e place (sur 26) en termes de performance. Le nombre de soins prestés est bon mais les résultats sur la santé, tels que l’espérance de vie, la mortalité infantile, les décès dus à des cancers guérissables,… tirent notre système vers le bas. Aux USA, au Canada, en Suisse, en Espagne et au Portugal, les patients eux-mêmes paient une plus grande partie de soins de santé. Pourtant, Itinera plaide pour une limitation de la croissance du budget : « Puisque, autrement, la volonté de réforme n’est pas stimulée. »

    129. Van Eetvelt a calculé qu’en diminuant la norme de croissance de 4,5 à 2,8% en 2009, 365 millions d’euros peuvent être économisés sur les soins de santé. « Sans problème pour la santé de la population », ajoute-t-il. Sur le terrain, on n’en est pas convaincu. Là, on montre du doigt le fait qu’il faut tenir compte des développements techniques et scientifiques. Les prothèses des genoux, des hanches, ou les opérations de la cataracte sont heureusement devenus beaucoup plus accessibles qu’à la fin des années ‘80, mais la facture augmente. La norme de croissance actuelle menace d’ailleurs tout le secteur. Des hôpitaux se plaignent de déficits structurels. A Bruxelles, plusieurs hôpitaux sont au bord de la faillite. Au rythme actuel, on évolue de plus en plus vers des soins de santé à 2 vitesses, avec des soins de base pour ceux qui ne peuvent plus se le permettre. On fait d’ailleurs appel de plus en plus à des aides soignants mal payés et la charge du travail est systématiquement augmentée.

    130. Où les experts voient-ils alors les possibilités pour équilibre le budget ? « Du côté des revenus, il y a encore des possibilités. C’est déjà la deuxième année consécutive que les revenus des impôts sont en retard de 1 milliards sur le schéma. Avec plus de contrôle, une partie du problème budgétaire serait résolu. » Et plus encore : « Le gouvernement fédéral doit quitter les recettes classiques et taxer le capital. » La crise de crédit internationale et l’indignation généralisée sur l’avidité d’une infime minorité aux dépend de la grande majorité de la population traversent toute la société. C’est ce qui explique le sens soudain des réalités de quelques experts qui voient dans l’avidité de Van Eetvelt et compagnie une menace pour la légitimité du système de profits. Nous sommes ici témoins d’un phénomène classique, c’est-à-dire que la révolution se manifeste d’abord au sommet de la société et non comme on le pense souvent à la base de celle-ci.

    131. Pour la majorité des stratèges (petits-) bourgeois et leurs marionnettes politiques, le danger n’est aperçu que lorsqu’il se trouve déjà sous leur nez. En général, ils y ajoutent encore une cuillère. En juin encore, le VLD a revendiqué une baisse des charges à hauteur de 4,4 milliards d’euros. Au niveau de la Flandre, le VLD voulait en plus une diminution de taxe, de ce que l’on nomme le job-korting, à la hauteur de 600 euros, une diminution de l’impôt des sociétés à hauteur de 350 millions d’euros et une augmentation de l’exonération des précomptes professionnels sur le travail de nuit et d’équipe de 10,7 à 15,6%. Finalement, le VLD veut aussi de plus grands avantages fiscaux pour des heures supplémentaires.(20) A la fin de février 2009, tous les flamands qui ont un travail recevront une diminution de taxe de maximum 300 euros, avec un maximum de 600 euros par foyer. Cette diminution ne sera cette fois pas éparpillée sur les 12 mois, mais calculée dans le précompte professionnel sur le salaire de février, trois mois avant les élections. « De cette manière, la diminution est visible pour chaque flamand. »

    132. Sur le plan fédéral, le VLD a aussi un liste de revendications : activation plus intensive des 50 ans et plus, réduction des termes d’invitation des chômeurs à un entretien de contrôle, dégressivité des allocations, remplissage plus souple de la semaine de 38 heures et immigration économique. Et, enfin, l’Open-VLD veut s’attaquer aux fraudes sociales. Selon Rik Daems, on peut aller y chercher 3 milliards d’euros, ce qui n’est pourtant qu’un dixième de la fraude fiscale estimée dans une étude de Mc Kinsey et de la VUB à 30 milliards d’euros annuellement. Daems ne vise évidemment pas les cotisations sociales non payées par les patrons, ni les heures supplémentaires payées en noir ou les patrons qui emploient illégalement des travailleurs. Il vise exclusivement ceux qui combinent une allocation avec un peu de travail en noir à gauche et à droite. Selon la criminologue de l’ULB Carla Nagels, Daems a une vision extrêmement libérale de la lutte contre la fraude sociale.

    Drame social en construction

    133. Daems et compagnie sont à peine capables de s’imaginer ce qui pousse des gens à accepter du travail au noir, pour autant que ça les intéresse. Dans une étude pour l’institut du développement durable, Philippe Defeyt, président du CPAS de Namur, est venu à la conclusion que de plus en plus de familles refusent dorénavant de prendre en charge leurs enfants. Un jeune de moins de 25 ans sur vingt est dépendant d’une allocation du CPAS.(21) Le nombre de personnes dépendantes d’un revenu d’insertion sociale a augmenté de 75.400 en 2005 à 82.000 en janvier 2008.(22) Un belge sur 7 (14,7%) a un revenu inférieur à 60% du revenu médian, le seuil de pauvreté officiel. Celui-ci est de 860€ pour une personne isolée et de 1.805€ pour une famille avec deux enfants. (23) En Wallonie, ils sont 17%, en Flandre 11,4%. Le salaire minimal est de 1.355,78€ brut. 260.000 belges combinent deux ou plusieurs emplois. Selon Elsy Verhofstadt, chercheur à la RUG, ils le font principalement « pour pouvoir gérer les prix de mazout, d’immobilier ou de nourriture. » (24)

    134. Les propositions du VLD pour augmenter la politique d’activation et pour la dégressivité des allocations arrivent à un moment où une personne sur 8 en Belgique vit dans une famille sans emploi. En Europe (27), seules le Royaume-Uni et la Hongrie font un plus mauvais score sur ce plan là. 16% des européens vivent avec un revenu en dessous du seuil de pauvreté, dont la moitié fait partie d’un foyer où au moins une personne travaille. Le phénomène du « travailleur pauvre » se produit donc aussi en Europe.(25) Depuis 2004, 12.516 chômeurs se sont vus suspendre leurs allocations, dont 3.605 définitivement, les autres temporairement, en général pour 4 mois. Plus de la moitié des suspensions ont été faites sur la seule année 2007 ! En Flandre, on laisse sousentendre systématiquement que la politique d’activation en Wallonie et à Bruxelles serait appliquée de manière insuffisante. Pourtant, bien que la Flandre compte 32,96% des chômeurs au niveau national, « seulement » 28,63% des suspensions y ont été appliquées. La Wallonie, avec 49,62% des chômeurs, compte 50,02% des suspendus. Pour Bruxelles, 17,42% des chômeurs et 21,35% des suspendus. (26)

    135. On aurait l’impression que le chômage n’est pas vraiment un problème, à l’exception de quelques profiteurs acharnés. En 2007, 116.000 emplois auraient été créés. Le nombre total de travailleurs est de 4,4 millions contre 3,6 millions au début des années 80. Nous avons toujours dit que des bons emplois étaient remplacés par des mauvais, des emplois flexibles, partiels et temporaires, évidemment aussi avec un salaire bas et partiel. De plus, la majorité de ces emplois font partie de ceux qui sont payés avec des moyens publics tels que les chèques-services. Selon l’enquête des forces de travail (EFT) du service public fédéral, 3,9% de la population active en Flandre était sans emplois, 10,3% de celle en Wallonie et 16,3% de celle à Bruxelles. Les chiffres d’EFT utilisent la définition de sans-emploi du Bureau International du Travail et sont plus bas que ceux de l’ONEM. (27)

    136. En 1964, le nombre d’heures de travail prestées annuellement en Belgique a reculé pour la première fois en dessous de 8 millions, en 1973 en dessous de 7 millions. En 1964, cela se faisait avec 3.740.000 travailleurs, en 1973 avec 3.777.000 travailleurs. C’était la conséquence de la réduction du temps de travail arraché par la lutte des travailleurs. En 1999, nous étions pour la première fois plus de 4 millions de travailleurs et ensemble nous avons presté 6,5 millions d’heures de travail. Ce n’était plus le résultat d’une lutte pour une réduction du temps de travail, mais plutôt de l’augmentation de l’emploi à temps partiel jusqu’à 19,5%. En 2007, 4.337.000 travailleurs, dont déjà 23,7% à temps partiel, ont presté 6,9 millions d’heures de travail, fortement moins que pendant les golden sixties. (28) A cette époque, un salaire par foyer suffisait pour s’en sortir, aujourd’hui c’est devenu intenable. Surtout ceux qui gagnaient le moins dans le foyer, sont obligé de combiner l’entretien de la famille avec un emploi à temps partiel ; 42,6% des femmes travaillent à temps partiel, 7,8% des hommes. (29)

    137. Mais tout ceci, c’était avant que la crise ne se traduise dans l’économie réelle. Entre-temps, le nombre de faillites augmente de manière spectaculaire. Les récessions précédentes menaient systématiquement à de fortes explosions du chômage. Celle de 74-75 a rayé 350.000 emplois dans l’industrie. Ceci a été compensé parce que les autorités ont créé à peu près 250.000 emplois dans les services publics, mais les chiffres de chômage de la période précédente, autour de 75.000, appartenaient définitivement au passé. La crise de ‘81-83 a doublé le nombre de chômeurs officiels jusqu’à 500.000, un chiffre en dessous duquel on n’a plus jamais réellement été. Depuis, les gouvernements consécutifs ont commencé à modeler les statistiques. Mais cela n’a pu empêcher une augmentation forte du degré de chômage officiel lors de la crise de ‘90 de moins de 9% à 15% dans la deuxième partie de ‘95. La mini crise de 2008 a fait sauter le nombre de chômeurs de presque 200.000. Ces dernières années, le chômage est descendu, mais malgré les chèques services et d’autres types de statuts, même pas jusqu’au niveau du point le plus bas précédent, de juin 2001, ne parlons même pas de celui du début des années ‘90. (30) En août 2008, De Tijd s’est demandé : « Un orage d’automne menace-t-il le marché de l’emploi ? » Le journal fixe notre attention sur le fait que le marché du travail ne réagit qu’avec un retard d’une demi-année sur des changements conjoncturels et que pour la fin de l’année, il y a bien des raisons de se faire des soucis. (31) A Bruxelles, depuis, le chômage est remonté de 18,8% avant l’été à 19,4% en septembre 2008. (32)

    138. Leterme avait probablement espéré autre chose, mais il peut se préparer à une augmentation forte des dépenses sociales. Celles-ci avaient légèrement reculé dans la période 2003-2007 de 23% du PIB à 22,5%. Pendant cette même période, la sécurité sociale a connu trois fois un surplus, une fois un déficit (2003) et une fois un équilibre (2005). En 2007, les recettes de la sécurité sociale étaient de 64 milliards d’euros. C’est composé principalement de salaires différés – nommées cotisations patronales et les cotisations des travailleurs – pour 43 milliards d’euros et de ce que l’on nomme les contributions des autorités, pour 18 milliards d’euros, principalement des financements alternatifs (presque 10 milliards d’euros). Encore en 2007, la sécurité sociale a dépensé 62,5 milliards d’euros, principalement dû à ce qui était son but, c’est-à-dire les allocations sociales et les coûts du personnel, mais aussi de plus en plus pour des subsides aux entreprises (1,6 milliards déjà). Des allocations sociales en 2007, 21 milliards ont été dépensés aux soins de santé, 19 milliards aux pensions, 7,8 milliards au chômage (comprenant aussi une partie des prépensions), 4,5 milliards aux allocations familiales, et 4 milliards aux incapacités de travail. (33)

    139. Pendant des années, on nous a effrayé avec le vieillissement et le fait que nos pensions seraient impayables. Pour chaque personne de plus de 60 ans, il y a aujourd’hui 2,5 travailleurs actifs, en 2015 ce ne sera plus que 2,1 travailleurs actifs. Presque tout le monde connait l’ordre de grandeur de ces chiffres. Via la télé et d’autres médias, ils ont été imprégnés dans notre conscience de la même manière que l’on marque le bétail au fer rouge. Cela servait à nous faire accepter l’érosion de notre pension. Pendant des décennies, des économies à charges de nos personnes âgées n’auraient provoquées que des indignations. Encore aujourd’hui, il n’y a rien de pire que quelques jeunes qui se moquent, volent ou maltraitent des personnes âgées, ou qui les laisse tout simplement à leur propre sort. C’est pourtant l’exemple que nos gouvernements donnent depuis des années. L’allocation de retraite moyenne d’un salarié masculin n’est plus que de 1.000 euros, d’une salariée féminine, de 700€. Les recherches démontrent que les « pensions supplémentaires » arrivent pratiquement exclusivement chez ceux qui ont déjà une pension légale élevée. (34)

    140. Entretemps, la pension moyenne après taxation n’est plus que de 64,4% du salaire moyen. En Grèce et aux Pays-Bas, c’est plus de 90%. Au Luxembourg, un pensionné reçoit, pendant sa vie, si on totalise toutes ses allocations, en moyenne 664.240€ contre 179.056€ en Belgique, moins qu’en Grèce qui connait pourtant un niveau de vie en moyenne beaucoup plus bas (35). Délaisser les personnes âgées de telle manière est l’expression la plus écoeurante d’une société basée sur l’avidité. Après avoir réalisé ce drame, le Bureau du Plan nous amène des nouvelles : le vieillissement sera dans les prochaines années moins fort qu’on ne l’avait prévu. Mais ceci n’est pas une raison de ne plus rien faire : en 2050 (la date a reculé de 35 ans), il y aura 44 personnes âgées de plus de 65 ans (on n’y a ajouté 5 ans) sur 100 travailleurs actifs. Les voyants du Bureau du Plan prévoient 30,38 personnes âgées de plus de 65 ans sur 100 travailleurs actifs pour la région Bruxelles-Capitale, 42,68 en Wallonie et 47,38 en Flandre. (36)

    141. Nous avons déjà traité des économies sur les salaires et sur les conditions de travail des salariés, des emplois flexibles et sous-payés des jeunes, de l’immigration sélective, des attaques sur les chômeurs, les malades et les pensionnés. Et pourtant nous ne sommes pas encore à la fin. Selon l’Agence flamande des personnes handicapées, les listes vacantes pour les personnes handicapées ont augmenté de 5.689 en 2003 à 8.200 en 2007. (37) Pour une région qui est capable de donner le fameux « job-korting » et d’autres cadeaux à l’approche des élections, cela témoigne de mauvais goût.


    (1) Bureau Fédéral du Plan, communiqué du 12 septembre 2008

    (2) Rapport annuel de la Banque Nationale, 2007, p. 97 et 99

    (3) De Tijd, 27 août 2008, Reële lonen werknemers dalen

    (4) De Tijd, 27 février 2008, Lonen kunnen prijzen niet volgen

    (5) De Tijd, 3 octobre 2007, Lonen stijgen trager dan BBP. Entre 2002 et 2006, les salaires (nominaux) et les allocations sociales ont augmenté de 13% pour atteindre 158,2 milliards €, dans cette même période, le surplus d’exploitation brut et les revenus mixtes, principalement composé des revenus des entreprises, a connu une croissance de 26% pour atteindre 121 milliards €. Le PIB était de 316,6 milliards €.

    (6) Rapport annuel de la Banque Nationale, 2007, p. 103, graphique 41

    (7) De Tijd, 9 septembre 2008, IG Metall eist 7 tot 8 procent meer loon

    (8) Des 15 Etats-membres, 6 possèdent une indexation automatique ou partielle : la Belgique, le Luxembourg, l’Espagne, la Slovénie, Chypre et Malte. Dans certains pays, il existe en plus une indexation du salaire minimum.

    (9) De Morgen, 19 avril 2008, De index is geen ideaal systeem

    (10) La Belgique et le Luxembourg sont les seuls pays avec une indexation automatique. Le système se base sur les prix de 507 produits. Dès que l’index atteint un certain, niveau, appelé l’index pivot, une adaptation à l’index s’applique. Pour les allocations dans le mois qui suit, pour les services publics et quelques secteurs du privé dans le deuxième mois qui suit. Si certains perdaient une partie de leur indexation, cela minerait leur attachement à l’index et détricoterait le front en défense de l’indexation.

    (11) The Conference Board & Groningen Growth and Development Centre – summary statistics et total economy database, janvier 2008 – en 2007 US $

    (12) De Tijd, 25 juillet 2008, Unizo trekt streep onder loonsverhogingen

    (13) Het Nieuwsblad, 17 septembre 2008, Zes dagen werken, geen opslag

    (14) De Tijd, 2 septembre 2008, Faillissementen op record na acht maanden

    (15) De Tijd, 2 septembre 2008, CAO-overleg Belgacom nog onzeker

    (16) De Tijd, 3 septembre 2008, Belastingsinkomsten met 1,1 miljard in het rood

    (17) Knack, 24 septembre 2008, Rolverdeling met een hoge prijs

    (18) De Tijd, 4 septembre 2008, We moeten besparen, maar waar?

    (19) De Tijd, 8 février 2008, Een op drie bedrijven overtreedt wet

    (20) De Tijd, 6 juin 2008, Open VLD eist 4,2 miljard minder lasten

    (21) Le Soir, 12 septembre 2008, Un tiers de jeunes dans les CPAS

    (22) Le Soir, 5 juillet 2008, Le public des CPAS continue de s’élargir

    (23) Le revenu médian est la somme qui compte autant de gens avec un revenu supérieur que de gens avec un revenu inférieur. Le revenu moyen est la somme de tous les revenus divisée par le nombre de personnes ayant un revenu.

    (24) Laatste Nieuws, 26 mars 2008

    (25) De Tijd, 26 février 2008, Een op de acht Belgen leeft in gezin zonder job

    (26) De Tijd, 21 février 2008, RVA-activeringsbeleid leidde sinds 2004 tot 12.500 schorsingen

    (27) De Tijd, 15 mai 2008, 116.000 extra banen in recordjaar 2007

    (28) The Conference Board & Groningen Growth and Development Centre –total economy database, janvier 2008

    (29) Site des autorités fédérales, emploi et chômage

    (30) Taux de chômage en pourcentage de la population active

    (31) De Tijd, 2 augustus 2008, Dreigt herfststorm op arbeidsmarkt

    (32) Le Soir, 4 septembre 2008, Deuxième mois de hausse consécutive pour le chômage

  • 1885 – Naissance du Parti Ouvrier Belge

    Aujourd’hui, lorsqu’on regarde les partis sociaux-démocrates, le PS et le SP.a, il est bien difficile de croire que ces partis-là soient les successeurs du Parti Ouvrier Belge, un parti puissant qui a conquis le suffrage universel pour les hommes et la journée de travail de 8 heures. Le POB a joué un rôle central dans l’obtention de grandes avancées pour le mouvement ouvrier, bien que cela se soit toujours produit malgré sa direction plutôt que grâce à celle-ci. Contrairement au POB de jadis, les partis sociaux-démocrates actuels jouent un rôle central dans le démantèlement de ces acquis.

    Anja Deschoemacker

    PS et SP.a : des partis ouvriers?

    Il est très important d’étudier la dégénérescence de ces partis et d’en tirer les leçons correctes. Les défaites les plus importantes du mouvement ouvrier peuvent être mises sur le compte de leurs directions. Nulle part ces dernières n’ont été capables d’arriver même aux chevilles de beaucoup de leurs membres en termes de combativité, de détermination et d’esprit de sacrifice. Ce n’est pas sans raison que Lénine décrivait ces partis comme « des partis ouvriers avec une direction bourgeoise ». Aujourd’hui, ces partis sont néanmoins devenus des partis proprement bourgeois. Leur très longue participation à la politique néolibérale – en combinaison avec leurs méthodes de travail, la suppression des revendications socialistes de leur programme et leur recherche d’un nouveau public petit-bourgeois – ont chassé les travailleurs de leur base.

    Ce processus, qui a débuté lors de la période de croissance économique exceptionnellement longue qui a suivi la Deuxième Guerre Mondiale, est arrivé à son terme lorsque la social-démocratie a été placée devant le choix d’accepter la logique néolibérale ou d’adopter un programme anticapitaliste et socialiste. La Chute du Mur a accéléré ce processus en éliminant une alternative au capitalisme. Rien ne bloquait plus l’assimilation totale de ces partis au sein de l’élite capitaliste. Willy Claes est alors devenu dirigeant de l’Otan, Karel Van Miert s’est offert du bon temps à l’Union Européenne et de plus en plus d’ex-« socialistes » ont fait leur entrée dans les conseils d’administration des entreprises capitalistes.

    La disparition de ces partis en tant que partis ouvriers a signifié un énorme pas en arrière pour le mouvement ouvrier. Les travailleurs ont besoin de leur propre parti; son absence empêche les revendications syndicales ou celles issues des mouvements sociaux d’être traduites sur le terrain politique. De plus en plus de syndicalistes aboutissent à ce constat.

    Le MAS/LSP mène une propagande pour un nouveau parti des travailleurs depuis 1995 déjà. Le manque objectif d’un tel parti est devenu clair au cours de la lutte contre le programme d’austérité de Dehaene en 1993, le Plan Global. Cette lutte a pu être stoppée par la direction syndicale, à l’aide de l’argument selon lequel faire tomber le gouvernement (chrétien-démocrate et social-démocrate) n’avait aucun sens puisqu’il était le « gouvernement le plus à gauche possible ». Bien que la colère des travailleurs contre le PS et, à ce moment encore, le SP (présents depuis 1988 au gouvernement) ait régulièrement explosé dans les années ’90 – entre autres contre le Plan Global, les privatisations de la Sabena et de Belgacom ainsi que les coupes budgétaires drastiques dans l’enseignement francophone – l’absence d’alternative a eu pour résultat que beaucoup de syndicalistes conscients et combatifs ont tout de même voté pour « le moindre mal » ( la social-démocratie), bien souvent avec une pince à linge sur le nez.

    En 2005, la lutte contre la réforme des pensions du Pacte des Générations, et surtout le rôle proéminent qu’y ont joué des politiciens du SP.a comme Freya Van den Bossche ont entraîné un débat passionné à la FGTB. La direction du syndicat a réussi à canaliser la discussion sur son lien avec le SP.a dans une voie inoffensive, mais une cassure importante a pris place dans les esprits de beaucoup de syndicalistes et de socialistes. De plus, les victoires électorales importantes remportées par des formations comme le SP aux Pays-Bas et Die Linke en Allemagne ont frappé les imaginations, y compris en Belgique. Une première initiative hésitante s’est formée sous le nom de Comité pour une Autre Politique, mis sur pied par Jef Sleeckx. Si cette initiative a échoué l’an dernier, elle a toutefois eu le mérite de rassembler pour la première fois quelques centaines de syndicalistes, d’activistes, de jeunes, de socialistes plus âgés,… pour discuter de la nécessité d’un nouveau parti pour la classe ouvrière.

    Avec cet article, nous voulons utiliser la fondation du POB pour mettre en lumière le processus par lequel ce parti ouvrier est né. Malgré les énormes différences qui existent entre la situation de cette époque et la nôtre, de riches leçons sont à tirer pour aujourd’hui.

    Les antécédents: Le développement de la lutte des travailleurs en Belgique

    L’histoire est un processus continuel et compliqué, ou plutôt une série de processus liés entre eux et qui s’influencent continuellement. On ne peut l’expliquer en aucune façon comme un processus qui va unilatéralement vers l’avant. Des reculs apparaissent souvent nécessaires afin de créer les conditions pour poser de nouveaux pas en avant. La fondation du POB en 1885 n’est donc qu’un point dans ce processus. D’importants événements de grande ampleur se sont déroulés avant, mais également après, lesquels ont assuré que la fondation formelle d’un parti ouvrier puisse réellement conduire au développement d’un tel parti sans subir le sort de ses précurseurs. Les données utilisées pour cet article proviennent presque exclusivement du brillant ouvrage « Wat zoudt gij zonder ‘t werkvolk zijn ? » de Jaak Brepoels (« Que seriez-vous sans les travailleurs ? », ouvrage qui n’a malheureusement pas encore trouvé de traduction en français).

    Dès 1800, le capitalisme a fait son entrée dans ce qui deviendra plus tard la Belgique, à l’époque intégrée dans l’empire français. L’industrie traditionnelle (exploitation du charbon, usinage du fer, tissage du coton, manufacture de drap et industrie textile) connaissait alors un énorme développement grâce, entre autres, à la protection française contre la concurrence britannique. Ce processus ne s’est pas arrêté après la défaite de Napoléon lorsque nos régions ont été ajoutées au Royaume des Pays-Bas, qui servait les intérêts de la bourgeoisie commerciale et coloniale. Les frontières étaient ouvertes aux produits britanniques et la concurrence croissante pressurisait énormément les conditions de travail : des journées de travail de 14 heures n’étaient pas exceptionnelles et les enfants travaillaient dès l’âge de 6 ou 7 ans. Les salaires se situaient loin en-dessous du minimum vital, les patrons pouvant compter sur une réserve de travail rurale presque inépuisable poussée vers la ville par les famines et les prix bas pratiqués pour les produits agricoles.

    A côté de la bourgeoisie industrielle en essor, l’aristocratie et l’église avaient toujours voix au chapitre en tant que grands propriétaires fonciers. Au cours de la révolte populaire de 1830, la bourgeoisie a saisi l’opportunité pour dévier ce mouvement vers un mouvement « contre l’occupant hollandais ». Sous le contrôle étroit des grandes puissances du moment, la Belgique indépendante a été mise sur pied, en tant qu’Etat-tampon contre la France.

    La législation de cet Etat est restée la même que celle introduite par les Français : la liberté brutale du patronat et du propriétaire foncier était garantie pour exploiter le peuple jusqu’à l’os. Ainsi toute collusion entre travailleurs était légalement interdite et, selon l’article 1781 du code civil, le patron avait automatiquement raison en cas de contestation sur la somme ou le paiement du salaire. Le jeune royaume de Belgique avait aussi réintroduit le « livret du travailleur », tombé en désuétude durant l’époque néerlandaise. Le patron pouvait y écrire son appréciation du travailleur ou garder ce livret quand il le licenciait, afin qu’un travailleur ne puisse pas chercher d’autre emploi. Chaque mouvement des travailleurs devait de plus faire automatiquement face à une répression brutale de la part des forces armées.

    Karl Marx n’a donc pas exagéré en décrivant ainsi la Belgique de 1869, dans un texte du Conseil Général de la Première Internationale:

    “Il n’y a qu’un pays dans le monde civilisé où on considère avec désir et plaisir chaque grève comme une excuse pour tuer des travailleurs. Ce pays unique est la Belgique, le pays modèle du constitutionalisme, le paradis douillet du propriétaire foncier, du capitaliste et du prêtre…

    “Le capitaliste belge est généralement connu pour son amour fou de la liberté du travail. Il est tellement attaché à la liberté de ses travailleurs de travailler pour lui pendant toute leur vie, sans exception d’âge ou de sexe, qu’il refuse chaque loi du travail avec indignation. (…)

    “Donnez maintenant aux mains de ce capitaliste tremblant, cruel par lâcheté, la maintenance indivisible et incontrôlée de la dictature absolue, ce qui est le cas en Belgique, et vous n’allez plus vous étonner que dans ce pays le sabre, la baïonnette et le fusil fonctionnent régulièrement et légalement comme un instrument pour pousser vers le bas les salaires et garder hauts les profits. » (4 mai 1869, The Belgian Massacres).

    On ne peut décrire la vie des travailleurs à cette époque autrement qu’en disant qu’elle était synonyme de misère pure et dure. Les crises économiques périodiques, la concurrence internationale et l’importation accélérée de machines permettaient de payer des salaires qui ne suffisaient même pas pour vivre, y compris quand toute la famille travaillait. De ces maigres salaires, à peu près 70% étaient consacrés à la nourriture. De l’Etat, il ne fallait rien attendre. Bien qu’il intervenait constamment dans l’économie afin de soutenir la bourgeoisie industrielle qui se développait, chaque intervention sur le plan social était vue comme diabolique. A la fin du 19e siècle, la Belgique se situait loin derrière les autres pays capitalistes sur le plan des droits sociaux et de la législation du travail. Les premières organisations ouvrières prenaient alors la forme de mutuelles, d’assurances et de coopératives qui – avec la charité sur laquelle seuls les travailleurs « obéissants » pouvaient compter – devaient occuper la place d’une politique sociale totalement absente de la part de l’Etat.

    Mais la résistance ne tarda pas à arriver. En 1830 déjà, des explosions de rage ouvrière spontanées se déroulèrent dans le Borinage, à Lokeren, à Bruges, à Gand, à Namur, à Liège, à Tournai et ailleurs, souvent contre les machines mêmes, et résultant le plus souvent dans des affrontements avec les forces de l’ordre. L’apogée fut atteinte lors de la « Révolte du Coton » de Gand, du 30 septembre au 2 octobre 1839, situation sanglante où une personne a rencontré la mort et où de nombreux travailleurs ont été gravement blessés. En fait, les mutuelles et toutes les formes de caisses de solidarité, les seules organisations ouvrières permises par l’Etat, étaient de plus en plus utilisées comme des organisations de lutte déguisées.

    Entre-temps, les idées socialistes commençaient aussi à faire leur entrée, surtout dans le cadre du radicalisme bourgeois : des libéraux qui se préoccupaient des besoins de la classe ouvrière. Davantage sous l’influence de Saint-Simon et de Fourier que de Marx, ces derniers développèrent un socialisme sentimental et romantique qui se perdait souvent dans des rêveries. Ils n’étaient dangereux qu’en contact avec la masse des travailleurs, ce qui n’était pas le cas de la majorité d’entre eux. Jakob Kats constitua une exception. Cet enseignant-tisseur, implanté parmi les travailleurs bruxellois, menait propagande pour l’obtention de droits égaux, du suffrage universel, des impôts progressifs et de l’enseignement généralisé.

    En 1848, la domination capitaliste croissante en Belgique et la révolte qui se répandait de Paris (où Louis-Philippe avait été déposé) ont rendu la bourgeoisie belge réellement consciente de sa classe. Dès ce moment, la gauche et ses organisations ont dû faire face à des tentatives de se faire briser. Au fur et à mesure des mouvements, de nouvelles générations de dirigeants émergeaient, qui ne venaient plus des cercles bourgeois, mais plutôt de l’artisanat. Dès 1870, le prolétariat industriel commença à jouer lui-même le rôle dirigeant dans les mouvements. La conscience ouvrière grandissait, ce qui mena à la recherche de nouvelles formes d’organisation.

    Les travailleurs du textile de Gand montrèrent la voie avec la fondation des Tisseurs Fraternels et la Société des Fileurs. Sous couvert de mutuelles, ils formèrent les premiers syndicats industriels du pays et organisèrent la résistance ouvrière, qui éclata entre 1857 et 1861 sur fond de crise du secteur textile, crise que les patrons voulaient faire payer aux travailleurs sous forme de diminutions salariales. La planification était devenue partie prenante du mouvement, et la solidarité n’était plus limitée à une seule entreprise. Malgré une répression très brutale et des condamnations sévères, malgré les provocations des forces de l’ordre et malgré encore la saisie continuelle des fonds pour la lutte, l’organisation des travailleurs gantois continua son existence, avec des hauts et des bas. En 1862, la Ligue des Travailleurs fut mise sur pied entre les tisseurs, les fileurs et les métallos.

    La lutte se développa ensuite pour la première fois autour de revendications politiques, comme l’abolition de la loi sur la collusion. Les premiers contacts entre les centres ouvriers de Gand, d’Anvers (la Ligue Générale des travailleurs, mise sur pied en 1861) et de Bruxelles (l’Association Générale Ouvrière) aboutirent à une plate-forme politique minimale.

    Dans la Flandre de 1860, le mouvement social s’était constitué une assise plus profonde, bien que les jeunes organisations ouvrières étaient fréquemment réduites à néant à cause de la répression et de la démotivation de devoir tout recommencer à zéro. Entre-temps, la lutte commençait aussi à prendre son essor en Wallonie, de façon moins organisée mais très explosive. Le Hainaut devint entre 1860 et 1870 la scène d’une lutte violente contre les patrons des mines, qui essayaient d’imposer un règlement de travail commun. Le mouvement put alors compter sur le soutien des travailleurs d’autres secteurs et la grève se répandit – malgré les morts au cours de la lutte – pour finalement aboutir à une victoire et à la suppression du règlement.

    En 1864, la recherche de l’unité dans la lutte ouvrière trouva une plate-forme internationale : l’Association Internationale des Travailleurs, qui voulait rassembler toutes les organisations ouvrières pour discuter de l’action et des tactiques communes. En Belgique, l’Internationale obtint une influence par l’intermédiaire de l’organisation bruxelloise « Le Peuple », mise sur pied sous l’influence des idées proudhoniennes (1) et de son dirigeant César de Paepe. Dans les polémiques entre les différentes opinions présentes dans la Première Internationale, de Paepe développait une position de compromis entre Marx d’un côté et les anarchistes de l’autre.

    L’influence du proudhonisme freinait l’action, mais les Internationalistes se réveillèrent après un mouvement de grèves particulièrement dur contre les licenciements dans les mines, contre les salaires de famine qui continuaient à baisser, et contre la hausse des prix de la nourriture. L’armée avait occupé la région et tué plusieurs travailleurs. Dès lors, le principe de la grève fut reconnu et les Internationalistes commencèrent à intervenir dans la lutte concrète en développant des noyaux à Gand, Anvers et Verviers.

    Durant la période de croissance économique de 1871-72, la lutte des travailleurs obtint ses premiers succès: les métallos arrachèrent la journée de travail de 10 h à Verviers et Bruxelles et les charpentiers et travailleurs de l’industrie marbrière obtinrent une sérieuse augmentation de salaires après cinq mois de grève à Bruxelles. La conscience parmi les travailleurs et la solidarité faisaient des sauts de géant.

    La défaite de la Commune de Paris (en 1871) entraîna néanmoins dans la Première Internationale d’énormes tensions entre marxistes et anarchistes. Dans la section belge, l’aile anarchiste était de loin la plus forte. Quand, en 1871, le dirigeant anarchiste Bakounine fut exclu de l’Internationale par un vote, la section belge le suivit. La crise économique de ’72-’73 fit le reste et, en 1874, l’Internationale était morte dans les faits.

    Avancées et reculs: La fondation d’un parti ouvrier belge.

    Après la chute de l’Internationale, l’expérience de l’époque précédente ne reposait que sur les épaules de certains petits groupes. En Flandre surtout, les ex-Internationalistes essayèrent de rassembler et de réorganiser les forces dispersées. Gand s’accrochait à la coopérative neutre des Boulangers Libres. A Bruxelles, l’organisation explicitement neutre de la Chambre du Travail fut mise sur pied en 1875, exemple suivi par la Fédération des Organisations des Travailleurs d’Anvers. La défaite de la Commune de Paris avait temporairement étouffé le socialisme, et le pragmatisme caractérisait la plupart des initiatives.

    Néanmoins, sur le plan politique, les choses ne restaient pas statiques. A Gand, on regardait vers la social-démocratie allemande qui avait obtenu plusieurs sièges au parlement. A Bruxelles aussi, les premiers pas étaient faits sur le terrain politique de façon hésitante. En Wallonie, par contre, les tendances anarchistes qui avaient fait leur apparition de par le travail de la Première Internationale continuaient à dominer.

    Les Flamands et les Bruxellois impatients n’avaient pas d’autre issue que de s’organiser dans le Vlaamse Socialistische Partij et dans le Parti Socialiste Brabançon. En 1879, ces deux partis rassemblaient aussi quelques noyaux wallons et, en avril, une fusion conduisit à la formation du Parti Socialiste Belge. Le programme était celui du VSP et du PSB, c’est-à-dire une copie du programme de Gotha de la social-démocratie allemande. La base du parti était néanmoins limitée à quelques clubs de propagande, à des cercles d’étude et à quelques organisations syndicales. En Wallonie, on restait très hésitant vis-à-vis de ce nouveau parti et les organisations ouvrières plus neutres étaient effrayées par l’étiquette socialiste. Dans leurs actions, ces dernières continuaient d’être plus proches de l’aile progressiste du Parti Libéral et de sa lutte pour l’élargissement du droit de vote. Le BSP ne décollait pas.

    Dans les années 1880, différents courants se retrouvèrent sur base d’un programme pragmatique et radical-démocrate. En 1884, la défaite électorale de la libéral-progressiste Ligue de la Réforme Electorale, qui avait du soutien parmi les milieux d’artisans bruxellois, ouvrit la voie à la formation d’un parti ouvrier indépendant. En avril 1885, à Bruxelles, le Parti Ouvrier Belge (POB) devint un fait lors d’un rassemblement de 112 travailleurs, qui représentaient 59 groupes de base (des syndicats – neutres et socialistes – des coopératives et des mutuelles).

    Le pragmatisme caractérise le programme et les actions du POB

    Un esprit très pragmatique dominait à la direction du parti, et ce dès le début. Le dirigeant du BSP, Edouard Anseele, défendit pendant le rassemblement à Bruxelles le programme et le nom du BSP, mais il se résigna ensuite face à la crainte des organisations ouvrières neutres qu’un programme radical et le terme « socialiste » puissent effrayer les masses. Les discussions théoriques furent balayées de la table et, en terme de doctrine, le document de fondation affirmait juste que le POB allait essayer «d’améliorer le sort de la classe ouvrière par l’entente mutuelle ».

    Le programme se limitait à un cahier de revendications radical-démocrate avec notamment des revendications telles que le suffrage universel, l’enseignement obligatoire, gratuit et neutre, l’autonomie communale, l’abolition du travail des enfants en-dessous de 12 ans en plus de propositions de lois sur les accidents de travail, la sécurité au travail, la transformation graduelle de la charité publique en un système de sécurité sociale, le retrait de toutes les privatisations de propriétés publiques (Banque Nationale, chemins de fer, mines, propriétés communales,…) et leur transfert vers la collectivité, représentée par les communes et par l’Etat.

    Ce n’était pas vraiment une nouvelle organisation mais plutôt un rassemblement d’organisations existantes. La vie du parti se déroulait surtout autour de noyaux locaux agissant largement de façon indépendante. La première priorité était la construction locale de coopératives, de mutuelles et de syndicats et, à mesure que le mouvement grandissait, cela était suivi par des fanfares, des clubs de gym, des cafés, etc. Lentement, des fédérations furent créées à partir de groupes de base, fédérations qui envoyaient annuellement des délégués à un Congrès où un Conseil Général était élu pour prendre en main la direction du parti. Ce CG choisissait alors un bureau de neuf membres, dont le secrétaire et des délégués des syndicats, des mutuelles et des coopératives.

    Avec le soutien des milieux des artisans à Bruxelles et à Anvers, le bastion du POB était sans aucun doute basé à Gand, où les militants étaient presque exclusivement des travailleurs industriels. En Wallonie, région industriellement plus développée, le parti n’était réellement représenté qu’à Verviers, et cela malgré les mouvements consécutifs de luttes spontanées et inorganisées des travailleurs wallons. Ce n’est qu’en 1886, lorsqu’un énorme mouvement de masse va se conclure par une défaite sanglante, que la nécessité d’une organisation permanente va s’installer profondément dans la conscience.

    Cette grève générale de 1886 se déroula à Liège, et fut de suite confrontée à une occupation brutale de la ville par l’armée. Mais la lutte s’étendit rapidement à Charleroi, et peu après vers le Borinage et le Centre avant les carrière de Lessines, de Soignies, de Tournai et de Dinant. Les travailleurs s’armaient, des machines étaient détruites, des usines et des châteaux de patrons incendiés. La réaction du gouvernement fut sanglante. L’armée colora les rues de rouge avec le sang de dizaines de tués et de blessés. Les ténors du mouvement socialiste, dont Anseele, reçurent des peines de prison ou de grosses amendes (des travailleurs arbitrairement arrêtés furent condamnés jusqu’à la prison à vie). Pourtant, le mouvement n’était pas sous la direction du POB, qui n’avait aucune implantation dans la région concernée. La direction du POB fit même tout pour éviter un élargissement vers la Flandre. A Gand, elle ne put qu’à grand peine convaincre les travailleurs de garder le calme. Les grévistes reçurent certes du soutien du POB, mais sous forme de pains des coopératives, d’accueil des enfants de grévistes dans des familles flamandes et de défense des travailleurs arrêtés devant la justice.

    En Wallonie, la grève avait profondément fait sentir la nécessité d’une organisation solide. En 1887, beaucoup de travailleurs wallons marchaient déjà aux côtés de leurs camarades flamands, dans une manifestation pour le suffrage universel. De plus en plus de travailleurs wallons rejoignaient le POB où, très vite, se déroulèrent des affrontements entre les tendances révolutionnaires et anarchisantes wallonnes – sous la direction d’Alfred Defuisseaux – et des coopératives modérées et orientées vers le parlement (et donc vers la lutte pour le suffrage universel). La direction du POB exclut les frères Defuisseaux au congrès de 1887, avec pour résultat que toute la classe ouvrière du Hainaut les suivirent vers la porte de sortie. Leur attitude révolutionnaire, mais aventuriste, poussa la classe ouvrière du Hainaut à entamer la « grève noire » massive (de nouveau, des machines et des usines furent détruites et des attentats à la dynamite prirent place). Elle ne connut cependant pas d’élargissement faute de soutien actif de la part du POB. Totalement isolé, le mouvement s’affaiblit.

    Plus tard, il fut mis au clair que la direction de la grève avait été infiltrée par la sécurité d’Etat et que celle-ci était responsable des attentats à la dynamite. Le mouvement ouvrier, frappé d’épouvante, fraternisa. La tactique modérée de la direction du POB l’emporta. Toutefois, avec les travailleurs du Hainaut, un courant oppositionnel avait pris naissance dans le parti. Ce courant fera plus tard parler de lui, à nouveau au sujet de la défense de la grève générale comme moyen de lutte, mais aussi en faisant de la propagande pour la combativité et contre la direction modérée et sa volonté de faire des compromis avec les patrons et de coopérer avec la bourgeoisie « modérée ». Plus tard encore, les travailleurs du Hainaut prendront position contre les participations gouvernementales du POB (pour la première fois dans le gouvernement – non élu – mis sur pied pendant la Première Guerre Mondiale).

    Pas un instrument idéal, mais un énorme pas en avant

    Une certaine bureaucratisation des syndicats à mesure que la concertation sociale se développait, la dégénérescence d’un certain nombre de coopératives les plus importantes qui se transformaient en entreprises capitalistes, la pression pour une politique modérée de la part des mutuelles et de la part des premiers représentants parlementaires du parti,… Ce sont des éléments qui étaient en germe dans le POB dès ses débuts. A tous les moments décisifs de la lutte de classes, les masses de travailleurs étaient beaucoup plus radicaux que la direction du POB, qui courait la plupart du temps derrière les explosions plus ou moins spontanées de rage ouvrière pour, à chaque fois, canaliser la lutte dans des voies inoffensives.

    Le POB était très clairement ce que Lénine appelait un parti ouvrier avec une direction bourgeoise. Mais ce parti offrait au mouvement ouvrier un instrument pour mener la lutte nationalement et pour rassembler les forces ; des victoires importantes sur le patronat étaient ainsi acquises. Cela aussi bien sur le plan des droits démocratiques (le droit de vote, mais aussi le droit d’association et de grève) que sur le plan du standard de vie et des conditions de travail (diminution du temps de travail, négociations salariales collectives, salaire minimum, sécurité sociale,…).

    Cette réalité, en combinaison avec les fautes du Parti Communiste, qui fut mis sur pied après la Première Guerre Mondiale, mena à une très grande fidélité parmi les travailleurs socialistes, qui étaient préparés à de grands sacrifices pour leur parti. Leurs dirigeants, à l’inverse, allaient résolument pour leur propre carrière dans le parlement -et plus tard dans le gouvernement- et luttaient contre chaque expression d’idées radicales et socialistes. Même avec la trahison répétée de la direction à des moments décisifs, cette situation a perduré jusqu’à il y a très peu de temps, avant que le parti, entre-temps scissionné régionalement en PS et SP, ne soit plus vu par la masse des travailleurs comme « leur » parti (pour le PS, dans une certaine mesure, ce sentiment reste encore présent parmi certaines couches de la classe ouvrière). Ils y revenaient en masse à chaque fois jusqu’à la fin des années 1980, et faisaient constamment des tentatives de pousser le parti vers la gauche.

    Un parti des travailleurs offre à l’énorme masse de travailleurs la possibilité de discuter ensemble sur les idées, d’élaborer une stratégie et des tactiques communes, de défendre collectivement un cahier de revendications pour aujourd’hui et un programme à plus long terme. Un tel parti organise la solidarité; et la longue existence du POB sur le plan national a été certainement un élément dans la prévention d’explosions plus violentes de la question nationale. C’est au travers d’un parti ouvrier – même avec une direction bourgeoise – que le mouvement ouvrier belge a été capable d’obtenir un système large de sécurité sociale, de services publics et une concertation salariale centrale.

    Les dernières décennies d’érosion néolibérale de “l’Etat-Providence” -ce dernier étant une conséquence de la lutte du mouvement ouvrier, la bourgeoisie n’ayant jamais donné de cadeaux – ont été combinée avec la bourgeoisification des partis sociaux-démocrates.

    Des leçons pour la construction d’un nouveau parti des travailleurs

    Dans les années à venir, la Belgique va rejoindre la série de pays où des nouvelles formations de gauche et/ou ouvrières sont déjà nées. Comme dans le temps avec la fondation du POB, ce processus sera fait d’avancées comme de reculs, de tentatives avortées aussi bien que de pas en avant. Il faut tirer collectivement les leçons des victoires et des défaites des mouvements de masse de la classe ouvrière. Il existe aujourd’hui dans une série de pays des exemples dont nous devons discuter et nous inspirer quant à la manière avec laquelle de telles formations peuvent se développer. Il y a le P-Sol au Brésil, mais il y a déjà depuis des années des développements dans le même sens dans plusieurs pays européens également. Le SP aux Pays-Bas, Die Linke en Allemagne (qui montre tous les jours au travers de hauts scores électoraux dans les sondages qu’une rhétorique socialiste et de « vieilles » revendications de gauche comme la nationalisation des secteurs-clé de l’économie sont tous sauf un frein pour l’attraction et la sympathie de couches larges de travailleurs) , le PRC en Italie, Syriza en Grèce,…

    Aucun de ces développements n’aboutit à une situation “idéale”, et beaucoup de ces nouvelles formations sont extrêmement vacillantes. Les obstacles généraux sont devenus clairs : dans toutes les nouvelles formations, la discussion sur la participation gouvernementale se joue d’une manière ou d’une autre. Choisir cette voie a presque été fatale pour la PRC en Italie, et en Allemagne le développement de Die Linke est freiné dans un certain nombre de régions de l’ex-Allemagne de l’Est, comme à Berlin, par la présence du parti dans le gouvernement régional et par sa participation à la politique néolibérale.

    Dans ces partis, une orientation étroite vers les élections, l’électoralisme, va le plus souvent de pair avec une intervention extrêmement limitée dans la lutte réelle, avec une surestimation des figures dirigeantes et avec une sous-estimation de la construction d’une base active, qui ne peut se faire que par l’intervention dans la lutte réelle. Manier correctement la pression pour une politique plus sociale, qui peut s’exprimer dans une tendance dans ces nouvelles formations de gauche à faire des coalitions politiques, le plus souvent avec les vieux partis ouvriers bourgeoisifiés, est une question fondamentale. Un refus principiel de fonctionner dans un gouvernement néolibéral, va être un élément décisif dans le développement d’un nouveau parti ouvrier et dans sa capacité à s’enraciner de façon permanente dans la classe ouvrière. Une vraie participation de ses membres au travers de structures démocratiques est d’une importance primordiale afin de mettre une nouvelle formation sur le bon chemin, c’est-à-dire vers le développement d’un véritable parti des travailleurs.

    Après la chute du CAP, le Comité pour une Autre Politique, la question d’un nouveau parti en Belgique apparaît provisoirement absente de l’agenda (cliquez ici pour une évaluation du développement du CAP ). Mais les conséquences de la crise vont résulter dans le fait que cette question va revenir à l’agenda avec une force plus grande encore. Pour disposer d’une chance de réussite, chaque initiative va devoir montrer aux travailleurs et aux jeunes qu’ils ont une « plus-value » à offrir.

    En l’absence de partisans dans au moins certaines franges des syndicats, surtout dans les secteurs les plus combatifs, une telle initiative en Belgique n’aura pas beaucoup de chances d’aboutir. Une telle formation va devoir défendre les revendications du mouvement syndical sur le terrain politique; mais pas seulement les revendications syndicales. Un parti des travailleurs doit prendre en main la lutte pour la défense de toutes les couches opprimées et exploitées de la population, afin de se renforcer fondamentalement dans la lutte contre le patronat et le gouvernement. Un gouvernement qui, par manque d’un parti des travailleurs, est de toute façon un gouvernement au service du patronat, quelle qu’en soit sa composition. En d’autres termes, un tel parti des travailleurs va donc devoir défendre explicitement, ou au moins implicitement, des idées et des valeurs socialistes, comme la solidarité et la lutte contre chaque forme de discrimination.

    De nouvelles initiatives vont voir le jour, et le MAS/LSP, comme par le passé, donnera son soutien et sa coopération active à chaque initiative qui présente le potentiel et la volonté de devenir une nouvelle formation de la classe ouvrière. Mais nous allons – comme nous l’avons fait au sein du CAP – s’appuyer sur les leçons de l’histoire. Démontrer la nécessité d’intervenir dans la lutte réelle et d’impliquer autant de travailleurs possible dans la construction. L’époque du POB, en particulier celle de ses débuts, fournit des tas d’exemples de comment, dans tout le pays, des milliers et des milliers de travailleurs s’engageaient activement sur le plan politique, exerçaient constamment une pression sur les directions pour passer à l’action et pour adopter des points de vue plus radicaux. En outre, la nécessité d’une démocratie interne, dont l’absence a généré tellement de dégâts au sein du POB, est une condition essentielle – surtout après les expériences négatives du bureaucratisme stalinien – pour un nouveau parti des travailleurs sain. Chaque membre et chaque groupe de membres doit y avoir la liberté de défendre son programme : une véritable discussion et confrontation d’idées doit pouvoir y trouver sa place.

    Au travers de la lutte contre les attaques néolibérales des prochaines années, un tel parti peut émerger. La classe ouvrière belge, fortement organisée sur le plan syndical, disposera alors d’un instrument puissant en plus pour mener sa lutte, non plus seulement sur le plan syndical, mais aussi sur le plan politique.


    > Rubrique "Nouveau Parti des Travailleurs"

  • Défendons notre droit de grève!

    Ces derniers mois, le droit de grève a été fortement remis en cause dans notre pays. Plusieurs actions chez Carrefour ont eu à faire face aux menaces d’huissiers et même à la violence physique de policiers, le tout destiné à briser les piquets. Dans d’autres conflits aussi, le droit de grève a été attaqué. Et les libéraux flamands ont déposé une proposition de loi pour miner le droit de grève dans le secteur public (via un service minimal dans les aéroports, à la SNCB ou dans les prisons). Bientôt, on ne pourra plus faire grève que si personne ne le remarque…

    Par Geert Cool

    D’où vient le droit de grève?

    C’est par la lutte que le droit de grève a été arraché. Lors des débuts du capitalisme industriel, tout a été fait pour interdire l’organisation des travailleurs. La bourgeoisie arrivant au pouvoir considérait la liberté d’entreprise comme centrale et refusait aux travailleurs le droit de s’organiser.

    Ainsi, en France, la loi Le Chapelier de 1791 affirmait que tout regroupement de travailleurs était interdit parce que cela s’opposait « au libre exercice de l’industrie et du travail ». C’est exactement le raisonnement qui est repris aujourd’hui par la direction de Carrefour lorsqu’elle demande une interdiction pour « des actes qui empêchent l’employeur de se servir de l’entrée de l’entreprise (qui) sont des faits établis qui portent atteinte au droit de la liberté d’entreprise ».

    La loi Le Chapelier de 1791 est allée de pair avec le décret D’Allarde la même année (l’ensemble fut introduit chez nous par les Français en 1795) qui définissait la liberté d’entreprise. La direction de Carrefour s’est basée sur le décret D’Allarde pour imposer les astreintes contre les grévistes. En d’autres termes, nous ne remontons pas au 19e siècle, mais bien au 18e !

    Un siècle plus tard, la loi Le Chapelier a été reformulée pour devenir l’article 310 du code pénal, qui interdisait les attroupements devant une entreprise. Cet article a été supprimé en 1921 sous la pression du mouvement ouvrier qui luttait depuis des années des actions pour exiger le suffrage universel et le droit de s’organiser librement. Les mouvements à la fin de la Première Guerre mondiale ont connu leur apogée avec la Révolution russe de 1917 et avec la révolution manquée en Allemagne en 1918. La bourgeoisie a ressenti une grande frayeur devant la force du mouvement ouvrier organisé et a dû faire des concessions.

    Arraché par la lutte des travailleurs, le droit de grève a été reconnu plusieurs fois juridiquement, notamment dans la Charte sociale européenne. Les piquets de grève et les barrages routiers font partie de ce droit de grève et du droit de s’organiser, ce qui a été confirmé en Belgique par différents tribunaux (entre autres par la Cour de Cassation en 1997 et par la Cour d’Appel à Anvers en 2004).

    Le Comité européen des Droits sociaux a rendu il y a quelques années un jugement dans un rapport sur la Belgique dans lequel il est stipulé que les piquets de grève pacifiques font partie du droit garanti à l’action collective. Les astreintes contre les piquets de grève sont donc inacceptables. La Cour européenne de Justice, qui n’est pas connue pour ses sympathies socialistes, a déclaré que la liberté de manifester (ce qui comprend les barrages routiers) ne peut être limitée qu’exceptionnellement (Schmidberger, arrêté du 02.08.2003).

    Une réponse à l’argumentation juridique

    Lors de différentes actions du personnel de Carrefour et de leurs sympathisants, des requêtes unilatérales ont été signifiées aux militants. Une intervention judiciaire générale préventive a été réclamée (et obtenue), ce qui a été contesté notamment par le professeur Gilbert Demez de l’UCL, qui parle d’un dépassement du cadre du pouvoir judiciaire.

    Nous avons examiné la base de telles requêtes unilatérales et avons trouvé trois arguments défendant son contenu : le droit de propriété, la liberté d’entreprendre et le droit au travail.

    Le droit des travailleurs à s’organiser sur le lieu de travail est attaqué car il irait à l’encontre du « droit de propriété » du patron. Pourtant, les piquets de grève ne revendiquent pas encore la propriété de l’entreprise ! Non, les piquets de grève doivent partir pour laisser entrer les non-grévistes – qui sont souvent des intérimaires qui ne sont pas certains de pouvoir continuer à travailler ensuite dans l’entreprise, surtout s’ils ont fait grève. Apparemment, le patronat considère que la main d’œuvre intérimaire est également sa propriété.

    Le deuxième argument de Carrefour est le droit au travail et au salaire des employés qui ne font pas grève. La direction se base pour cela sur l’article 23 de la Constitution dans lequel on peut lire que chacun a le droit de mener « une vie décente » et a pour cela le droit « au travail et au libre choix du travail professionnel dans le cadre d’une politique générale d’emploi qui vise, entre autres, à garantir un niveau d’emploi aussi haut et stable possible, le droit à des conditions de travail et de salaire raisonnables, aussi bien que le droit d’information, de concertation et de négociations collectives ».

    Les négociations collectives ainsi que le droit à des emplois décents avec de bonnes conditions de salaire se trouvent donc bien dans la Constitution. Ce n’est pas un hasard si les libéraux veulent changer cet article de la Constitution en faveur du principe de la « liberté d’entreprendre. Mais différents juges n’ont pas eu besoin d’une modification de la Constitution pour suivre la direction de Carrefour dans son application de la « liberté d’entreprendre ».

    En résumé, la base juridique est donc formée par un principe général datant de 1791 et une interprétation fortement unilatérale de l’article 23 de la Constitution.

    Les avocats de Carrefour ont demandé (et obtenu) une décision judiciaire dans laquelle « la mission du pouvoir public » est précisée. Celle-ci explique qu’ « il est donc utile de préciser sa mission (celle du pouvoir public) et de lui ordonner de donner suite aux ordres que l’huissier de Justice lui donne, si nécessaire en utilisant la contrainte physique pour assurer l’entrée pacifique des bâtiments ». C’est donc en fin de compte le patronat qui décide des missions de la police.

    Comment défendre le droit de grève ?

    Les arguments juridiques en défense du droit de grève ont été arrachés par les luttes des travailleurs. Pourtant, la base juridique pour les patrons briseurs de grève a beau être limitée, ce sont ceux-ci qui obtiennent le plus souvent raison auprès des juges. Il y a heureusement des exceptions, comme ce juge malinois qui a expliqué que le droit de grève est un droit fondamental. Mais la plupart des juges appuient le patronat et lui donnent les moyens de pouvoir recourir aux huissiers et à la police, un peu à la manière d’une milice privée.

    L’utilisation des astreintes lors des grèves déjà conduit à des protestations à plusieurs reprises. En 2002, une pétition syndicale a obtenu 80.000 signatures et patrons et syndicats ont fini par conclure un « gentlemen’s agreement », c’est-à-dire une convention non contraignante. Le patronat y promettait d’éviter de recourir aux interventions judiciaires lors de grèves. De cet accord, il ne reste plus rien.

    Pour la défense du droit de grève, nous ne pouvons pas compter sur la justice, le patronat ou les politiciens traditionnels. Chaque pas légal fait en défense du droit de grève doit être évidemment soutenu mais nous allons surtout devoir construire un rapport de forces au moyen pour empêcher, dans la pratique, les patrons de recourir à des requêtes unilatérales. C’est de cette manière que le droit de grève a été obtenu et c’est comme cela qu’il va devoir être défendu.

    Il est évidemment important de convaincre tous les travailleurs de l’entreprise de participer à la grève : s’il n’y a plus de non-grévistes, les huissiers devront se mettre eux-mêmes aux caisses de Carrefour ! Mais, à côté de cela, la force du nombre est importante : notifier une contrainte à 50 ou 100 personnes est encore faisable pour un huissier. Mais que faire s’il y a 1.000 militants ou plus au piquet ? Après les précédents des dernières semaines, d’autres attaques viendront. Pour conserver notre droit de mener des actions collectives, nous devons réagir sans faiblir.

  • Scandales chez les libéraux flamands

    La chronique des scandales touchant les libéraux flamands va finir par devenir plus longue que la liste des rediffusions de Derrick à la TV…

    La série avait été lancée fin 2007 par Fientje Moerman, ministre flamande de l’Economie et vice-ministre-président du gouvernement flamand, qui avait dû démissionner après avoir été, entre autres, accusée de passer des commandes publiques de préférence à ses copains du VLD. Depuis, c’est une véritable vague qui déferle. Patrick Dewael, ministre de l’Intérieur, a été mis sous pression parce qu’un des hauts responsables de la police sous ses ordres est suspecté d’avoir accordé quelques « promotions canapé » à de secrétaires. Karel De Gucht est accusé de délit d’initié pour avoir revendu au bon moment un paquet d’actions Fortis appartenant à sa belle-mère.

    Tout dernièrement, c’est Noël Slangen, le gourou de la communication de Verhofstadt et du parti, qui a été poussé vers la sortie du VLD pour avoir mélanger un peu trop gaillardement intérêts privés et position publique. Son entreprise de consultance, le groupe C, a ainsi obtenu un contrat de 6,5 millions d’euros pour donner des avis dans un dossier de grands travaux urbains à Anvers, sans avoir été mis en concurrence avec d’autres bureaux d’études.

    Pour sa défense, Slangen a déclaré “Je n’ai jamais été condamné”. Mais qu’est-ce que cela signifie dans un pays qui n’a jamais condamné quelqu’un pour grande fraude fiscale au cours de ces 20 dernières années ? Tout le monde est égal devant la loi, mais certains un peu plus que d’autres…

  • Le néolibéralisme est à bout de souffle, les idées socialistes s’envolent

    Succès de nos meetings dans les universités

    Avec la crise économique, de plus en plus de personnes se posent des questions sur le fonctionnement du système capitaliste. Ainsi Paul Krugman, le tout récent prix Nobel d’économie 2008, a récemment déclaré : « Nous n’allons pas revenir à Karl Marx, mais nous allons redécouvrir des choses qu’avait découvertes le président Franklin Roosevelt il y a 75 ans. Laisser les marchés se débrouiller avait été désastreux dans les années 1930 et nous a de nouveau amené au bord du désastre. »

    Par Boris (Bruxelles)

    Mais certains ont bien l’intention d’aller plus loin dans la réflexion que Roosevelt et Krugman. Au mois d’octobre, Karl Marx a fait plusieurs fois la une des rubriques économiques (et même du Magazine Littéraire !) avec des titres tels que “Marx, l’invité surprise” ou encore “La crise financière remet Marx à la mode”. Les ventes de ses ouvrages sont en pleine expansion et Le Capital redevient un best-seller 141 ans après sa publication. Les librairies allemandes ont par exemple enregistré ces derniers mois une hausse de 300% des ventes du Capital tandis qu’à Paris, le nombre d’exemplaires vendus aux presses universitaires a doublé en septembre et triplé en octobre.

    Alors que les bases idéologiques du capitalisme vacillent, Etudiants de Gauche Actifs (notre organisation étudiante) s’est engagé à plein dans le débat avec une série de meetings de rentrée dans les universités. Ceux-ci ont rencontré un vif succès, comme en témoigne la participation et la qualité des débats. EGA a tenu des meetings sur le thème « Pourquoi le capitalisme est-il en crise ? Une réponse marxiste » à Bruxelles (ULB et VUB), Gand, Louvain, Anvers et Liège. A Gand, 60 étudiants étaient présents, 25 à Liège, 30 à Bruxelles. D’autres meetings sur la situation en Amérique Latine, sous-titrés « Capitalisme ou socialisme : pas de compromis possible ! », ont attiré 50 étudiants à Gand et 35 à l’ULB. Notre meeting sur la Chine et Cuba à la VUB a aussi été une réussite.

    Une nouvelle génération de jeunes comprend l’impossibilité d’aménager ce système et cherche une alternative. L’intérêt pour nos meetings de rentrée est une première indication de l’ouverture croissante pour les idées socialistes et marxistes parmi une couche grandissante de jeunes et de travailleurs. Ne reste pas sur le bord de la route. EGA combine la théorie et la pratique. Participe aux réunions ou aux cycles de formation marxiste mais aussi aux campagnes que nous menons (cf pages 10-11-12). Toi aussi, rejoins-nous.

  • Des huissiers employés pour casser les piquets de grève

    Le porte-parole de Carrefour était on ne peut plus clair le weekend passé: avec une requête unilatérale et des astreintes juridiques, l’entreprise peut briser un piquet de grève. Ce n’étaient là que des mots mais samedi, à la filiale de Carrefour de Sint-Pieters-Leeuw, les ordonnances du juge ont effectivement été notifiées de façon arbitraire à des personnes présentes. Parler à un client devant le magasin suffisait pour se voir notifier une contrainte.

    Par Geert Cool

    Des dizaines de militants syndicaux et de sympathisants ont reçu de telles ordonnances des huissiers qui avaient reçu du juge la compétence de recourir à la force publique pour interdire chaque empêchement ou chaque obstacle à l’entrée des locaux, du parking,… Tomber en panne sur le parking tombait donc également sous la compétence des huissiers qui peuvent dès lors imposer une astreinte.

    Tiré par les cheveux? Et bien non, car cela faisait partie de la décision juridique remise aux militants syndicaux. La direction de Carrefour a fait appel à quelques avocats du cabinet Claeys & Engels pour casser la grève. Une requête a été dressée dans laquelle trois arguments sont utilisés:

    • violation de la liberté de commerce, d’industrie et du droit de propriété,
    • violation du droit de travail et de salaire des travailleurs non-grévistes et
    • violation du droit au travail des tiers entreprises et clients.

    Base juridique: un décret de… 1791

    Le principal argument est celui du droit d’industrie et de commerce. Les avocats se basent pour cela sur le décret D’Allarde de 1791 (introduit chez nous après l’annexion à la France en 1795). La raison pour laquelle les ordonnances de ce décret ont aujourd’hui force de loi chez nous nous échappe. A partir du décret D’Allarde, il n’y a qu’un petit pas vers une autre loi datant de 1791, la loi Le Chapelier qui déterminait que chaque attroupement de travailleurs était interdit parce que cela allait à l’encontre du «libre exercice de l’industrie et du commerce». C’est exactement le raisonnement que Carrefour suit et qui, curieusement, a été soutenu par les juges bruxellois.

    Nous ne sommes donc pas les seuls pour qui ces attaques contre le droit de grève datent du 18e siècle… Le premier et principal argument des avocats de Claeys & Engels commence par une référence au décret D’Allarde. Mais alors que, en 1791, cette loi était liée à une interdiction des travailleurs de s’organiser, elle est aujourd’hui liée aux «faits établis» qui vont de pair avec cette organisation. «Des actes qui empêchent l’employeur de se servir de l’entrée de l’entreprise sont des faits établis qui portent atteinte au droit de la liberté d’entreprise», selon un juriste auquel se réfère la requête.

    La base juridique reste donc à ce jour limitée à un principe général datant de 1791 ainsi qu’à l’interprétation de ce principe par un juriste et au fait que cette interprétation a été suivie par un juge liégeois. C’est un peu faible comme réponse sur le droit de grève et comme base juridique, mais cela a laissé le juge en question de marbre. Ce dernier a ainsi approuvé sans rechigner la requête de Carrefour.

    Comme autre argument, on peut lire le droit de propriété garanti par la Constitution. Est-ce que ce droit a été remis en cause par les piquets de grève? Pour autant qu’on le sache, les militants syndicaux présents n’ont procédé à aucune collectivisation (sans parler de nationalisation). L’argument que la pleine jouissance de la propriété est entravée par des travailleurs qui bloquent une entreprise est en fait utilisé pour faire rentrer des non-grévistes. Apparemment, le patronat voit la force de travail des non-grévistes comme faisant également partie de sa propriété…

    On en vient au deuxième argument: la violation du droit de travail et de salaire des non-grévistes. Pour cela, Carrefour se base sur l’article 23 de la Constitution, dans lequel on trouve par ailleurs également le droit de chacun à «mener une vie digne de l’être humain». Tout le monde «a droit au travail et au libre choix de travail professionnel dans le cadre d’une politique générale d’emploi qui vise, entre autres, à garantir un niveau d’emploi aussi haut et stable possible, le droit à des conditions de travail et de salaire raisonnables, aussi bien que le droit d’information, de concertation et de négociations collectives».

    Pourquoi Carrefour ne reconnait-elle pas le droit à un salaire raisonnable aux travailleurs de la filiale de la Tour Bleue à Bruges? Pourquoi Carrefour ne reconnaît-elle pas le droit de concertation et de négociations collectives en présentant l’action comme un droit individuel et non pas collectif? C’est évidemment un peu faible d’attaquer sur base d’une disposition qu’on ne suit pas soi-même…

    Enfin arrive le dernier argument: «les faits établis violent le droit de travail des tiers entreprises et clients». Pour cet argument, aucune disposition légale n’est citée. Pour résumer, la base juridique est donc un principe général datant de 1791 et une interprétation très unilatérale de l’article 23 de la Constitution. Le droit de grève et le droit de mener des actions collectives doivent s’effacer devant cela.

    Ampleur de la disposition

    Les avocats de Carrefour demandent au juge de préciser la mission de la police pour que celle-ci ne se limite pas à la protection de l’huissier. «Il est donc utile de préciser sa mission (celle du pouvoir public) et de lui ordonner de donner suite aux ordres que l’huissier de Justice lui donne, si nécessaire en utilisant la contrainte physique pour assurer l’entrée pacifique des bâtiments.» Qui décide donc des missions de la police? Le patronat!

    L’ampleur et la durée de la disposition constitue un autre point particulièrement grossier: la durée de validité est d’un mois, dès le 17 octobre, et peut être rallongée si la crainte existe que d’autres «faits établis» puissent être «commis». Jusqu’au 16 novembre, il est interdit aux militants de mener une action à une filiale de Carrefour sur le territoire de l’arrondissement juridique de Bruxelles. A Sint-Pieters-Leeuw, l’huissier a déclaré à un militant arrêté que «mener une action» peut être interprété largement : faire ses courses suffit. C’est littéralement qu’a déclaré ce huissier! Que cette menace puisse de cette façon violer «le droit du client» et «d’accès à l’entreprise» n’est sans doute qu’une coïncidence toute ironique.

    Le fait qu’une intervention juridique est préventivement demandée est tout aussi contestable. Le professeur Gilbert Demez de l’UCL (université de Louvain-la-Neuve) déclarait encore début 2006 dans une interview au quotidien Le Soir que de telles interventions préventives de la justice constituent un dépassement du pouvoir juridique. Il ajoutait encore qu’une intervention juridique n’est utilisée que comme moyen de pression patronal, où ce n’est pas tant la protection des droits qui est en jeu que la limitation du droit de grève. Le professeur Demez était d’opinion que limiter les moyens d’action du «contrepouvoir social» mène à une forme de «dictature»

    La base du droit de grève

    Ce n’est qu’après la Première Guerre Mondiale que le droit de faire grève et de se syndiquer ont été reconnus en Belgique, bien évidemment dans le contexte des mouvements qui ont suivi la guerre, dont la Révolution russe était un des points culminants. Partout en Europe se développaient des mouvements et les travailleurs se sont révoltés dans différents pays. La bourgeoisie avait peur de la force du mouvement ouvrier organisé et elle a donc dû faire des concessions.

    Ainsi a entre autres été instauré le suffrage universel (masculin uniquement), mais la liberté syndicale a aussi été reconnue. En 1921 une loi a garanti «la liberté d’organisation». En même temps, une loi antigrève a été abolie (le fameux article 310 de la loi pénale qui interdisait tout attroupement à une entreprise) et la journée des 8 heures (ainsi que la semaine de travail de 48 heures) a été introduite.

    Le droit de grève est le fruit de la lutte des travailleurs et a plusieurs fois été reconnu juridiquement (entre autres dans la Charte Sociale de l’Europe). Les piquets de grève et les barrages routiers font partie du droit de grève et du droit de s’organiser. Cela a été confirmé par plusieurs Cours de justices en Belgique (notamment la Cour de Cassation en 1997 ou la Cour d’Appel à Anvers en 2004).

    Le droit de mener des actions collectives ne peut tout simplement pas être limité. Le Comité Européen des Droits Sociaux a jugé il y a quelques années dans un rapport sur la Belgique que les piquets de grève pacifiques font partie du droit garanti de mener des actions collectives, des astreintes contre un tel piquet de grève ne sont donc pas acceptables.

    Mettre sur pied des piquets de grève et même des barrages routiers fait partie de la liberté d’expression. D’ailleurs, dans le cas des barrages routiers, nous ne sommes pas les seuls à les considérer comme partie intégrante de la liberté d’expression. La Cour Européenne de Justice, qui n’est pas connue pour ses sympathies avec les idées du socialisme, a déclaré que la liberté de manifester (y compris les barrages routiers) ne peut être limitée que de façon exceptionnelle (arrêt de Schmidberger du 02/08/2003). La liberté d’expression lors d’un barrage routier a priorité sur le libre trafic de marchandises et de personnes, a déclaré la Cour.

    Juridiquement, il y a donc une base pour défendre le droit de grève, alors que celle sur laquelle se reposent les casseurs de grève est très, très, limitée. Néanmoins, ces derniers semblent toujours obtenir gain de cause chez les juges. Seuls quelques juges échappent à l’attrait de l’illusion que c’est eux qui décident dans des conflits collectifs. Qu’il s’agit bien d’une illusion est évident : ce sont les patrons qui décident, qui utilisent la justice pour pouvoir recourir à des huissiers ou qui encore peuvent considérer la police comme leur propre milice privée.

    Il faut une campagne

    L’utilisation des astreintes pendant les grèves a déjà plusieurs fois mené à des protestations. En 2002, une pétition syndicale a rassemblé 80.000 signatures et syndicats et patronat ont négocié pour conclure un «gentlemen’s agreement», un accord qui n’est pas imposable. Dans cet accord, le patronat a promis d’éviter de recourir à des interventions juridiques. Il ne reste rien de cet accord.

    Pour la défense du droit de grève, nous ne pouvons pas compter sur la justice, le patronat ou les politiciens traditionnels. Nous soutenons évidemment chaque pas pour la défense du droit de grève, mais il va falloir construire un rapport de force avec lequel on peut en pratique imposer que les patrons n’osent plus utiliser de requêtes unilatérales. Voilà comment le droit de grève a été obtenu et voilà comment il va devoir être défendu.

    Evidemment, il est important de convaincre tous les travailleurs de participer à la grève: s’il n’y a plus de non-grévistes, les huissiers peuvent se mettre eux-mêmes aux caisses de Carrefour. A coté de cela, la force du nombre est importante : notifier une contrainte à 50 ou 100 personnes est encore faisable pour un huissier. Mais que faire s’il y a 1.000 militants ou plus au piquet? Ce n’est pas une option théorique, un appel des syndicats avec une mobilisation générale à une filiale de Carrefour dans la région bruxelloise aurait très certainement un grand effet.


    Comment réagir face à un huissier?

    A côté du droit de mener des actions collectives, il y a aussi des possibilités de résister à un huissier qui veut imposer une astreinte. Un huissier présent à un piquet ne peut pas simplement demander la carte d’identité d’un participant pour effectivement notifier la contrainte. La police n’a droit à faire un contrôle d’identité que pour une infraction ou un crime (par exemple perturber l’ordre public). L’huissier doit pouvoir s’identifier et prouver qu’il est compétent pour l’arrondissement juridique en question. S’il ne peut pas le prouver, il ne peut rien notifier.

  • Fuite en avant pour sauver la planète ?

    Relance du nucléaire

    De plus en plus confrontés à l’évidence du réchauffement de la planète, les politiciens traditionnels sont à la recherche de toutes sortes de mesure qui leur permettraient de produire de l’énergie plus proprement. Une des solutions avancées est une extension du parc nucléaire en Europe, afin de remplacer les vieilles centrales au gaz et pétrole. Or ceci constitue plus une fuite en avant qu’une véritable solution.

    Par Gilles, MAS Mons

    En Belgique, on trouve deux centrales nucléaires en activité : celle de Tihange (Huy, 3 réacteurs) et celle de Doel (Anvers, 4 réacteurs). Toutes deux ont été construites il y a environ 30 ans et l’âge de la retraite devrait approcher… si ce n’est que les gouvernements successifs n’ont cessé de repousser encore et encore la date de fermeture de ces réacteurs. Alors que la durée d’usage avait déjà été prolongée à quarante ans, le gouvernement Leterme a décidé d’octroyer vingt ans de plus aux centrales belges : il faudra donc attendre jusqu’à 2035 pour assister à la fermeture des centrales (au lieu de 2005 comme initialement prévu).

    Le gouvernement et leurs amis d’Electrabel se justifient en disant que la remise à neuf des centrales coûterait cher et que cette hausse des coûts serait d’office répercutée sur la facture (comme si Electrabel ne pouvait pas se permettre cet investissement !). D’autre part, ils prétendent que les centrales nucléaires sont sûres et non polluantes. Leurs arguments semblent avoir porté, puisque récemment 6 Belges sur 10 se disaient d’accord pour ce maintien. Mais le récent incident de Fleurus (près de Charleroi) a remis en question tous ces beaux discours sécurisants.

    Que s’est-il passé à Fleurus ? Une fuite s’est produite à l’Institut des Radio-Elements (IRE), un établissement public-privé chargé de produire des isotopes radioactifs à des fins médicales, et celle-ci a contaminé toute la région. Ceci représente le plus grave incident nucléaire en Belgique. Cependant la population locale n’a été prévenue qu’une semaine après les faits, avec des avertissements du type « Ne mangez pas les légumes de votre jardin ». L’exploitant a tenté d’étouffer l’affaire jusqu’au dernier moment par crainte des répercussions, tandis que l’Agence Fédérale de Contrôle Nucléaire (AFCN) s’est révélée totalement inefficace : incompétence des responsables (beaucoup ont obtenu leur poste uniquement via leurs relations politiques), matériel inopérant, etc.

    Les incidents nucléaires se sont multipliés au cours des dernières années : en 2006 en Suède, on est passé à deux doigts d’un nouveau Tchernobyl lorsque le système de secours de la centrale de Forsmark est tombé en panne. Les scientifiques chargés de la surveillance ont avoué que seul le hasard a permis d’éviter la catastrophe. Cet été en France, des fuites ont été révélées près d’une centrale de la Drome, contaminant le personnel et peut-être les récoltes. Des accidents graves et parfois mortels se sont également produits en Hongrie et au Japon au cours des cinq dernières années.

    Plutôt que de vouloir sérieusement investir dans des énergies inoffensives telles que la biomasse, l’éolien, le marémoteur, le solaire… les capitalistes et leurs politiciens préfèrent se tourner vers des solutions hautement rentables sur le court terme, mais pleines de risques pour le présent comme pour l’avenir. Car où stocker de manière sûre les déchets nucléaires provenant des centrales ? Même les agences de contrôle sont soumises à la loi du profit et des jeux politiques, ce qui les rend inaptes. Et évidemment, on cache tout cela à la population.

    Une production véritablement verte est incompatible avec le système capitaliste. Pour sauver la planète, préparons la révolution écologique ! Qui sera aussi une révolution socialiste.


    Le prestige et les profits avant l’environnement et le pouvoir d’achat

    Sous la pression des entreprises et des politiciens, sans participation ni consultation de la population, plus d’un milliard d’euros des impôts va être consacré au projet de prestige de la liaison Oosterweel!

    Cette liaison doit passer au dessus de certains quartiers et mettre en danger la santé des habitants avec la masse de particules fines diffusée par les voitures et les camions. Résistance Internationale lutte pour plus d’investissements pour des transports en commun gratuits et des solutions comme un tunnel qui pourrait récupérer et purger l’air des particules fines.

    Le 25 octobre il y aura un festival anticapitaliste pour l’environnement à Anvers, nous discuterons entre autres de la lutte contre le projet de la liaison Oosterweel, en plus de discussions sur l’énergie, la surpopulation, la crise alimentaire, les catastrophes naturelles, etc. Un meeting et des concerts suivront en soirée. Participe à nos campagnes sur l’environnement ! (Plus d’infos : 02/345.61.81)


    Liens:

  • Luttons pour les droits des femmes !

    Cette année, cela fait 60 ans que les femmes belges ont obtenu le droit de vote, un acquis pour lequel une lutte de longue haleine a dû être menée. La lutte pour les droits des femmes est cependant loin d’être terminée.

    Marlies (EGA-Gand)

    En Belgique, les femmes gagnent en moyenne 26% de moins que les hommes. Même à travail égal, la différence reste de 6%. Les travailleuses oeuvrent souvent dans des secteurs qui reflètent leur rôle traditionnel ; emplois à mi-temps ou rémunérés par titres-services sont bien plus souvent détenus par des femmes que des hommes. Le salaire d’une femme est également toujours vu comme étant un complément à celui que reçoit son mari, cela fait donc des travailleuses féminines une sorte de “réserve de travail”, grâce à laquelle il est facile pour la classe dirigeante de faire pression sur les salaires des travailleurs masculins.

    Tout ceci, plus la double journée de travail (le fait que les femmes aillent travailler, mais doivent aussi s’occuper de leur ménage et des enfants), les relègue à une position de second rang sur le plan économique. Par conséquent, les femmes se retrouvent souvent dépendantes de leur partenaire, et n’ont pas la possibilité de quitter le foyer en cas, par exemple, de violence familiale, qui reste la première cause de mortalité des femmes en Europe.

    De plus, la femme est aussi confrontée à l’image de la femme en tant qu’objet sexuel. Une lutte très importante a été menée par les générations précédentes pour la libération sexuelle de la femme, mais aujourd’hui, cette liberté est détournée par le capitalisme qui la réduit à une pure chasse aux profits. Nous nous opposons à l’utilisation de la sexualité à des fins commerciales, car pour nous, la liberté sexuelle ne signifie pas qu’une femme ne doit être perçue qu’en tant qu’objet sexuel, mais bien en tant que femme capable de faire ses propres choix, et donc également libre de dire “non”. A cause de la position de second rang des femmes sur le plan économique, des secteurs tels que la prostitution ou l’industrie pornographique deviennent de plus en plus souvent la seule issue pour nombre d’entre elles, même pour les jeunes. Il y a une augmentation du nombre d’étudiantes qui se prostituent pour pouvoir payer leurs études.

    Face à ces problèmes, nous nous basons sur une approche de classe : les femmes ne doivent pas combattre les hommes, mais hommes et femmes doivent lutter ensemble contre la classe dirigeante qui emploie des techniques de “diviser pour régner” pour pouvoir opprimer le reste de la société. Nous voulons nous battre pour une société basée sur les besoins de tous, et non pas sur le profit !


    LUTTER CONTRE LE SEXISME EST NECESSAIRE !

    – Brochure du MAS/LSP, 1e partie

    – Brochure du MAS/LSP, 2e partie


    CALENDRIER de nos campagnes:

    • De la colère à l’action organisée: Résistance Internationale!
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      Versez votre don ou un soutien mensuel (par ordre permanent bancaire) sur le compte n° 001-2260393-78 avec la communication « don ».

      Pour toute information supplémentaire, n’hésitez pas à nous contacter : info@socialisme.be ou finances@lsp-mas.be.
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    • 4 octobre: Action contre la conférence du Front National à Molenbeek (BXL)
    • 25 octobre: Festival "Environnement" de Résistance Internationale à Anvers
    • 6 décembre: Action pour le Climat à Bruxelles
    • 5 mars 2009: Manifestation anti-NSV à Louvain
    • 8 mars 2009: Action dans le cadre de la Journée Internationale des Femmes


    Liens:

  • 4 Octobre : Mobilisation contre le meeting raciste du Front National

    Le Front National organise un meeting raciste le 4 octobre dans la commune de Molenbeek, sur le thème "L’insécurité, une catastrophe bruxelloise". Le but est clairement de stigmatiser les communautés d’origine immigrée, et plus particulièrement arabe et musulmane, comme responsables de la pauvreté et de l’insécurité à Bruxelles et en Belgique.

    Pablo (EGA-ULB)

    Bien sûr les problèmes de chômage, de logements trop chers, d’enseignement à deux vitesses sont réels, mais les véritables responsables ne sont pas dans les quartiers, ils sont au gouvernement et à la bourse! Par exemple, les 30.000 plus grandes entreprises ont réalisé 77 milliards d’euros de bénéfices en 2007 !

    En septembre, le Front National part en campagne électorale avec un nouveau président et veut se montrer comme un parti exempt de problèmes de corruption. En exploitant la misère sociale, le chômage de masse et le ras-le-bol envers les partis politiques traditionnels, les partis d’extrême droite comme le FN ou le Vlaams Belang ont un potentiel pour croître… mais ces partis ne valent pas mieux que les autres. Ils veulent instaurer une politique raciste et encore plus antisociale, au service des grands patrons ! Ces racistes veulent s’attaquer aux syndicats « qui paralysent le développement économique et sont aujourd’hui l’une des causes du chômage » en leur donnant entre autre une personnalité juridique, alors, que les syndicats défendent les intérêts des jeunes et des travailleurs, dans une période où la question des salaires et du pouvoir d’achat est cruciale pour nos familles. D’ailleurs ils trouvent que « Nos entreprises sont handicapées par un coût de main d’oeuvre parmi les plus élevés du monde »… Pourtant, le FN prétend être le parti « proche des gens »…

    De plus, il ne cache pas ses sympathies pour les régimes fascistes et nazis. Leur principal dirigeant est un fanatique de Franco et de Léon Degrelle, chef des fascistes wallons pendant la 2ème Guerre Mondiale. En fait les néofascistes du Front National veulent appliquer la politique du « diviser pour mieux régner » sur la population en suivant les intérêts des capitalistes, et veulent exploiter et dominer encore plus les jeunes et les travailleurs, qu’ils soient d’origine belge ou étrangère.

    Tout ce qui nous divise nous affaiblit ! Il faut réagir contre les fascistes et les racistes, partout où ils se trouvent. Mais aller à la confrontation, c’est leur donner raison en nous traitant de sauvages ou de casseurs. Nous devons être organisé et montrer que nous sommes pour l’amélioration de nos quartiers et pour l’amélioration des conditions de vie de nos familles et de nos voisins contrairement à eux. Participe à la manifestation de Résistance Internationale et des Etudiants de Gauche Actifs pour des emplois, contre le FN et le racisme.


    DOSSIER:

    ISLAM & SOCIALISME


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