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Tag: Social-démocratie
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Changement de nom au SP.a : d’un parti à une marque électorale
Avec le changement de nom du SP.a en « Vooruit » (en avant), le président du parti Conner Rousseau franchit les dernières étapes d’un processus à l’œuvre depuis un certain temps : le passage d’un parti à une marque électorale. La référence au socialisme disparaît du nom pour se retrouver en simple sous-titre (de socialistische beweging / le mouvement socialiste), à la manière des slogans de marque. Il ne s’agit de rien d’autre qu’une manœuvre électorale visant à ne pas totalement balancer à la poubelle à la fois la référence historique ainsi que le lien avec la mutuelle et le syndicat. Le terme de « mouvement » n’a rien à voir non plus avec ce que les militantes et militants, les jeunes et les travailleuses et travailleurs entendent par un mouvement combatif et démocratique. Il s’agit d’un terme à consonance progressiste adopté pour définitivement abandonner le concept d’un parti d’affiliés, avec des structures démocratiques et des décisions prises démocratiquement.Nous avons demandé leur réaction à deux membres du PSL/LSP qui étaient auparavant membres du SP ainsi qu’au porte-parole du PSL/LSP, Bart Vandersteene :
« Pour le SP.a, le socialisme n’a longtemps été qu’une référence au passé. En ce sens, ce changement de nom est une conclusion logique. Le SP.a avait déjà depuis longtemps embrassé le libre marché : il s’est retrouvé aux commandes des (contre)réformes de nos retraites, des diminutions du budget de l’enseignement, de la privatisation des services publics,… Bref, il a contribué à démanteler ce que le mouvement ouvrier avait construit. Le « clin d’œil » au passé et à la coopérative ouvrière Vooruit est donc un clin d’œil d’adieu. »
Jo Coulier (ancien membre du Bureau national des jeunesses socialistes du SP et de diverses structure de la direction du SP à Gand, aujourd’hui militant de la CGSP Enseignement en Flandre, l’ACOD-Onderwijs)
« Dans ce qui était autrefois un parti ouvriers, les carrières ont depuis longtemps pris le pas sur l’idéologie et encore plus sur la lutte de terrain. Ils ont non seulement chassé leur base en la laissant orpheline, mais ils ont également perdu toute pertinence auprès des jeunes et des travailleurs en quête d’inspiration et d’idées pour s’organiser aujourd’hui et lutter en faveur d’un autre avenir que celui que réserve le capitalisme. Ce parti ne représentera aucun progrès pour la classe ouvrière. »
Eric Byl (ancien membre du bureau national des jeunesses socialiste du SP et ancien secrétaire politique du SP à Grammont, il travaille actuellement pour Alternative Socialiste Internationale, l’organisation internationale dont le PSL/LSP est la section belge)
Bart Vandersteene, porte-parole du PSL/LSP, ajoute :
« Au moment où le capitalisme nous plonge dans une nouvelle crise profonde et où des personnalités telles que Bernie Sanders, Alexandria Occasio Cortez et Kshama Sawant expriment le regain d’intérêt pour le socialisme, Conner Rousseau en éloigne encore plus le parti. Le socialisme vaut bien plus qu’un clin d’œil ou un calcul électoral. Il s’agit du changement de société nécessaire pour lequel nous devons nous battre afin de mettre un terme aux horreurs du capitalisme. L’ambition du PSL/LSP est de donner au socialisme un contenu combatif avec lequel les jeunes et les travailleurs peuvent s’armer pour renverser le capitalisme. »
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Le PS semble finalement rejoindre l’agonie de la social-démocratie européenne
Partout en Europe, les partis historiques de la social-démocratie font triste mine. L’argument du prétendu ‘‘moindre mal’’ est usé jusqu’à la corde, peu de gens se laissent encore convaincre, surtout depuis le début de la crise économique actuelle. Le spectre d’une ‘‘pasokisation’’ hante les partis sociaux-démocrates, en référence au Pasok, le parti ‘‘socialiste’’ grec passé de 43,92 % aux élections de 2009 à 4,68 % à celles de 2015…Par Ben (Charleroi), édito du numéro de mai de Lutte Socialiste
En France, le PS a perdu plus de 40.000 membres durant le quinquennat de François Hollande, une hémorragie qui représente un quart de ses membres. Le magazine Marianne n’hésite pas à dire aujourd’hui que cette campagne présidentielle marque la fin du PS(1). On pourrait encore parler de l’Italie, de l’Irlande, de l’Espagne,… Contrairement à son homologue flamand, le PS francophone semblait jusqu’ici faire figure d’exception à la règle. En dépit de sa participation au pouvoir (ininterrompue au fédéral entre 1987 et 2014), ce dernier parvenait encore à ne pas paraître trop ridicule lorsqu’il brandissait l’image d’un parti de gauche opposé à la droite flamande. Mais, au siège du PS Boulevard de l’Empereur, les derniers sondages ont dû glacer le sang.
Tant va la cruche à l’eau, qu’à la fin elle se casse
Rien d’étonnant à cela. Déjà du temps où la social-démocratie faisait rêver les masses, ce n’est que sous la pression de ces dernières qu’elle promettait, et réalisait même parfois, une redistribution relative des richesses. La social-démocratie s’est construite dès ses origines en organisant la classe des travailleurs pour tirer parti de sa force – ce qui nécessite un discours radical – tout en oeuvrant à limiter l’impact de cette puissance potentiellement fatale pour le système social en place.(2) Pour reprendre la caractérisation de Lénine, il s’agissait de partis ouvriers à leur base, mais bourgeois à leur direction.
En Belgique, au sortir de la grande grève générale de l’hiver 60-61, le PS a obtenu 47,1% des voix à la chambre en Wallonie. Une fois élu, il trahira son programme, une expérience amère qui a ouvert la voie à la frustration, à la colère et aux sanctions électorales. Aux élections de 1965, un quart de l’électorat du PS avait déserté. S’accrochant au pouvoir dans des coalitions de plus en plus improbable, le PS a continué à oeuvrer à sa chute jusqu’à la crise des années ‘70 et son rejet dans l’opposition en 1981.
Quand la social-démocratie revient au pouvoir en 1987, les 43,9% des suffrages obtenus en Wallonie expriment essentiellement le rejet de la droite, ce n’est plus du tout un vote d’adhésion. Depuis lors, tout a reposé sur cette logique de ‘‘moindre mal’’. Suite aux désillusions, aux départs ou aux exclusions de ses éléments les plus combatifs, progressivement :‘‘Voilà le sommet livré à luimême, menacé par les tendances conservatrices et par l’inertie bureaucratique qu’aucune poussée populaire n’équilibre plus. L’organisation reste en place, mais la révolte s’est tue, privant le mouvement d’une dynamique encombrante et précieuse’’.(3)
Combien sont-ils à avoir résolument tournés le dos au parti après les attaques contre les pensions de 2005 (le Pacte des Générations), à l’image de Fréderic Gillot, devenu depuis député wallon du PTB ? Et après l’instauration de la ‘‘chasse aux chômeurs’’ ? Le manque d’alternative crédible a longtemps permis de freiner la chute du PS. Faute de mieux, et en dépit de son dégoût, l’électorat restait présent.
Le vent de la lutte des classes souffle à nouveau
L’arrivée du PTB au parlement a révélé la fragilité de l’électorat du PS. Depuis, au PS, c’est la panique. La direction du parti a bien tenté de se repositionner à gauche. Di Rupo a déclaré que son ‘‘coeur saigne’’ à l’idée de ces dizaines de milliers de chômeurs exclus de leurs allocations. Magnette a saisi l’occasion du CETA pour tenter de donner une image de résistant au PS. C’était trop peu et trop tard. Et puis est arrivé le scandale à tiroirs Publifin-Nethys…
En mars dernier, un sondage RTBF / La Libre / Dedicated présentait le PTB en deuxième place en Wallonie (20,5 %), dépassant de peu le PS (20,3 %). Autre élément, le PS a perdu la moitié de ses membres depuis les années ’70. Sa crédibilité est en chute libre. Le spectre de la pasokisation doit empêcher quelques pontes du parti de dormir… L’immense espace politique qui existe à gauche va continuer de grandir. Ce qui présente de nombreux et passionnants nouveaux défis très concret pour le PTB et tous les opposants de l’austérité et du néolibéralisme. Comment éviter de tomber dans les mêmes travers que Syriza en Grèce ? Comment répondre au piège de la collaboration avec les partis de l’austérité ? Comment transformer un soutien électoral passif en mobilisation sociale active ? Comment construire cette dynamique en Flandre également ? Autant de questions sur lesquelles le PSL est prêt à contribuer de façon constructive.
(1) Marianne N°1046-1047 du 14 au 24 avril 2017
(2) Jean Faniel dans son article intitulé ‘‘le Parti Socialiste est-il populaire ?’’, Revue Politique numéro 62, Décembre 2009.
(3) M. Liebman, les socialistes Belges 1914-1918, Bruxelles, La Revue nouvelle/FJJ/EVO, 1986, pp 66-67 cité par Jean Faniel -
[INTERVIEW] Espagne: un pays et une social-démocratie en crise
Interview de Viki Lara de Socialismo Revolucionario
La social-démocratie espagnole (PSOE) est plongée dans la crise. Les défaites électorales se sont succédées depuis 2011, une chute abyssale qui s’explique par le rejet de son soutien à l’austérité et aux réformes constitutionnelles au bénéfice des banques et de l’élite capitaliste. Début octobre, lors du Comité fédéral du PSOE, cette crise a éclaté aux yeux de tous. Son secrétaire général, Pedro Sanchez, a été forcé de démissionner suite à une manœuvre préméditée par plusieurs dirigeants régionaux et des figures historiques du PSOE.
Propos recueillis par Marissa (Bruxelles)
Quels sont les motifs de cette lutte interne?
Le cycle de luttes et de mouvements sociaux que nous avons connu entre 2011 et 2014 s’est traduit par une crise du système des deux partis (PP et PSOE) et par un blocage institutionnel. Cela fait déjà plus de 300 jours que le gouvernement n’est pas formé. Au final, la décision de convoquer de troisièmes élections ou de faciliter l’arrivée d’un gouvernement minoritaire du PP (droite officielle) se trouvait dans les mains du PSOE. Le parti était divisé. Le coup d’Etat interne qui a forcé la démission de Pedro Sanchez a mis en évidence qu’une partie de la direction est prête à sacrifier sa propre organisation pour assurer la ‘‘stabilité’’, c’est-à-dire, la poursuite de la politique d’austérité budgétaire imposée par l’UE.
Quel sentiment vit à la base du parti?
Une couche importante de la base est issue de la classe ouvrière, en dépit de la bourgeoisification du parti. Elle rejette majoritairement les politiques du PP et désire un changement de gouvernement. Des mouvements ont eu lieu parmi la base avec des assemblées locales, des lettres ouvertes, etc. Une pétition pour la tenue d’un congrès exceptionnel du parti et de nouvelles primaires, pour confirmer Sanchez comme président, a recueilli plus de 80.000 signatures de militants. Mais il n’y a pas eu de vote au niveau fédéral jusqu’à présent.
Peut-on comparer Pedro Sanchez à Jeremy Corbyn?
Une partie de la direction ressent la pression de la base contre un nouveau gouvernement Rajoy. Pedro Sanchez reflète également l’attitude d’une partie de la direction, la plus consciente du danger de la pasokisation, en référence au parti social-démocrate grec, le Pasok, qui a été balayé du paysage politique pour avoir soutenu un gouvernement de droite. Mais Sanchez a très rapidement accepté sa chute. Plutôt que d’assister à une bataille interne, comme c’est le cas avec la campagne de soutien à Jeremy Corbyn dans le Parti travailliste britannique, il y a une mise en scène des contradictions internes du PSOE et de sa décomposition. Autre différence majeure avec le Royaume-Uni : les nouvelles formations politiques comme Unidos Podemos ont capté la moitié de l’électorat socialiste.
Dernièrement, Pablo Iglesias (Podemos) a adopté un virage à gauche dans son discours. Qu’est-ce qui explique ce changement?
Les dernières élections n’ont pas livré un résultat correspondant aux attentes. La gauche anti-austérité n’est pas parvenue à dépasser le PSOE et le PP était de nouveau le plus grand parti. Cela ne signifie toutefois aucunement que la société adopte un virage à droite. Les courants de colère sont profonds sous la surface. Une bataille politique prend également place au sein de Podemos. Le groupe représenté par le leader Pablo Iglesias estime que l’image de transversalité et de modération de la dernière campagne électorale n’est pas la voie à suivre. Récemment, Pablo Iglesias a souligné la nécessité d’une grève générale si le PP arrive au pouvoir. Il propose de la soutenir et d’aider à la préparer avec le parti, ce qu’il n’a jamais défendu précédemment. Ce développement est très positif. Il reflète la pression de la base de Podemos pour reconstruire la mobilisation dans la rue. Ce changement de de rhétorique est très intéressant, mais le facteur déterminant pour que ce changement n’en reste pas au stade de paroles, c’est l’ampleur de la lutte des travailleurs et des mouvements sociaux.
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France. Ni PS, ni droite, ni FN ! Pour une force politique de masse contre le capitalisme
Ces derniers mois, les milliers de luttes et de mobilisation, et centralement la lutte contre la loi La lutte contre la loi El Khomri, avec ses millions de manifestants et de grévistes, sa participation massive des lycéens et des étudiants, son immense soutien dans l’opinion… montre la colère profonde que la grande majorité ressent contre cette société folle et injuste.
Tract édité par la Gauche Révolutionnaire (CIO-France) pour la Convention de la France insoumise (candidature de Mélenchon 2017) à Lille les 15 et 16 octobre 2016
Elle démontre qu’une grande majorité de la population ne veut plus continuer comme cela. C’est une colère qui se transforme peu à peu en révolte contre les politiques de Valls-Hollande mais également contre tout ce système. Il manque une véritable force politique de masse pour lutter contre le capitalisme et enfin changer cette société.
PS, LR, FN, mercenaires des capitalistes
Aujourd’hui, encore plus avec la loi « travail » (et les lois Macron, les plans de cadeaux par milliards aux grandes entreprises tel le CICE) c’est la dictature patronale renforcée, la sur-exploitation, le chantage à l’emploi, le harcèlement dans les entreprises et les services (combien de suicides et de tentatives de suicide de La Poste à Renault en passant par les Universités ou la Santé ?), de dégradation des conditions de travail, de salaires gelés, de privatisations, de plans de licenciements…
L’unique objectif de leurs politiques, c’est d’assurer le maintien des bénéfices pour les multinationales et les grandes entreprises, et les milliards de dividendes pour les actionnaires. Cyniquement, alors que sous sa présidence, il y a eu au moins 1,2 millions de chômeurs en plus, Hollande prétend que la « France va mieux » et la droite promet de faire encore pire tout en agitant sans cesse le clivage raciste, jouant sur le même terrain que le FN.
Toute l’horreur devient « normale » : la précarité est devenue normale, les suicides au travail un fait divers, les migrants qui meurent pour fuir la misère et la guerre n’émeuvent plus ni les journalistes ni les politiciens. L’horreur et l’injustice de cette société qui fabrique la misère alors que les riches n’ont jamais été aussi riches, voilà ce qui nous révolte par millions, voilà pourquoi aujourd’hui il faut se battre non seulement contre les attaques de tous ces valets du capitalisme mais aussi pour changer la société.
Mais nous avons relevé la tête, nous nous sommes unis contre cette politique, nous avons déclenché des centaines de grèves : raffineries, Ports, Propreté, SNCF, RATP, Amazon, personnels communaux, employé(e)s des cantines scolaires et des crèches… Beaucoup de ces grèves sont victorieuses. Durant les luttes du printemps, nous avons également montré que le débat politique n’est pas la propriété des politiciens, qu’il est dans la rue et dans la lutte, et que son objectif doit être de combattre le capitalisme et de ne plus accepter cette course folle imposée par la dictature du profit et de l’exploitation. Il aurait fallu que Mélenchon soit plus présent, qu’il serve de point d’appui à l’extension de la lutte et à l’appel à la grève générale qui était indispensable pour battre la contre révolution sociale qu’est la loi « travail ».
Transformer cette révolte en force politique
Il manque aujourd’hui une véritable opposition politique à tous ceux qui servent le capitalisme : PS et ses alliés, droite, FN… Que certains veuillent encore discuter avec le PS dans le cadre de « primaires », voire pour négocier les législatives de juin 2017, ou trouver un candidat type Montebourg qui a tant accompagné la politique de Hollande, ce n’est pas acceptable. Nous n’avons rien à voir avec ce parti qui est dans le camp de la classe capitaliste. Et les élections ne sont utiles que si nous présentons des candidats issus des luttes et à leur service, s’en faisant l’écho et défendant les revendications des travailleurs et des couches populaires.
Nous pensons que Mélenchon a eu raison de refuser la « primaire », tout comme il a raison de se placer en opposition directe au gouvernement. Mais ce qu’attendent également des millions de personne d’une telle candidature, c’est qu’elle soit dès maintenant un point d’appui, une force politique, pour s’opposer à tous les partis qui ne promettent que des sales coups contre la grande majorité de la population. Ce n’est pas seulement l’élection présidentielle qui importe, mais redonner confiance à des millions de personnes dans leur possibilité de s’organiser tous ensemble pour réellement changer cette société.
Les campagnes autour de candidats comme Bernie Sanders aux USA, ou récemment celle pour soutenir Jeremy Corbyn dans la lutte contre l’aile capitaliste du Labour en Grande Bretagne, montrent ce n’est pas qu’en France : des millions de personnes partout dans le monde cherchent une voie pour construire une organisation de masse pour défendre leurs intérêts et leurs aspirations.
Rendre plus claires certaines propositions
Nous ne partageons pas par exemple, qu’il dise que l’objectif n’est pas de « nationaliser l’économie ». Au contraire, la vraie puissance, ce sont les multinationales qui l’auront tant qu’elles sont la propriété d’une poignée de super riches et de groupes d’actionnaires. Il n’y aura pas de vraie démocratie tant que tous les jours, des millions de travailleurs et travailleuses devront se vendre pour un patron qui amassera des millions sur leur dos. Et il n’y aura pas non plus d’agriculture et d’industrie respectueuses de l’environnement, tant que régnera la loi du profit.
Défendre les revendications de hausse des salaires, d’amélioration des conditions de travail, mais également de mise en propriété publique des principaux secteurs de l’économie, à commencer par le secteur financier (banques, assurances etc.) en monopole public, sous la gestion démocratique des travailleurs et de la population,… tout ceci est indispensable aujourd’hui. Tout comme dire haut et fort qu’on refuse le racisme, le sexisme, l’islamophobie, et toutes les discriminations, et que nous voulons construire un monde ouvert et tolérant. C’est en avançant vers une société réellement démocratique et fraternelle, vers le socialisme authentique, que nous pouvons en finir avec cette société de haine et de misère.
Pour un véritable outil de masse pour discuter d’un tel programme, démocratiquement et collectivement, pour redonner une voix politique aux 90% de la population qui n’en peuvent plus de la dictature des grands patrons, des super riches et des actionnaires, et des politiciens et médias à leur service. C’est la construction d’un outil de masse et de lutte contre le capitalisme, un parti démocratique des travailleurs et des jeunes, qui doit être discussion.
C’est que nous défendons, viens en discuter avec nous !
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Virage à gauche au PS: réaction de panique face au PTB ou quelque chose d’autre?
Les gouvernements de Bruxelles et de Wallonie bloquent le traité de libre-échange Union européenne – Canada (le CETA), qui n’est encore qu’une pâle copie du Traité Transatlantique (TTIP, UE-USA) bien plus controversé. Le PS remet sur table la diminution du temps de travail et la démocratie économique, des revendications traditionnelles du mouvement ouvrier bannies des décennies durant et reléguées aux programmes de la gauche radicale. S’agit-il simplement d’une réaction de panique face à la percée du PTB dans les sondages ou s’agit-il d’autre chose ?
Par Eric Byl, article tiré de l’édition de novembre de Lutte Socialiste. Photo : PPICS
Le programme de Noël (1945) du Parti social-chrétien (PSC, Christelijke Volkspartij, CVP, en néerlandais), abordant la reconstruction d’après-guerre, avait pour titre “qui sera l’architecte ?” Le PSC s’est ainsi présenté comme ‘‘leader de la nation’’. A l’instar de nombreux autres partis traditionnels en Europe, il n’a pu le faire que grâce à l’énorme augmentation des richesses consacrées à acheter la paix sociale dans la période d’après-guerre. Cela résultait de la pression combinée de la force du mouvement ouvrier et de l’existence d’un système alternatif sous la forme des caricatures staliniennes du socialisme à l’Est. À partir de la crise, début années ‘70, il est devenu bien clair que tout cela était exceptionnel et non la règle. Un chômage de masse structurel a fait son apparition et les détenteurs de capitaux exigeaient que leurs profits soient préservés aux dépens des salaires, des conditions de travail et des dépenses sociales.
Tous les partis traditionnels s’y sont pliés, partis populaires et social-démocratie inclus, jusqu’au Parti Communiste en Italie, même au prix de balancer idéologie et programme par-dessus bord. Cela a sapé leur autorité et a conduit, notamment en Flandre, à une fracture politique. Mais la politique d’austérité a seulement conduit à une nouvelle période de Grande Récession (2008-2009). Il est devenu sans cesse plus clair que les politiciens traditionnels n’offrent de solutions ni pour la crise climatique, ni pour l’afflux de réfugiés, ni pour les conflits militaires, ni pour la relance du commerce mondial, ni pour la pauvreté, la mobilité, la question nationale, l’emploi, le vieillissement de la population, etc.
C’est pourquoi de plus en plus de gens sortent des sentiers battus de la politique traditionnelle. Ce sont d’abord les populistes de droite et d’extrême droite qui ont pu en tirer profit. De par leur fortune personnelle ou à l’aide de sponsors richissimes, ils disposent des moyens de détourner la colère vers les ‘‘chômeurs-profiteurs’’, les ‘‘réfugiés économiques’’, les ‘‘paresseux du Sud’’, etc. Le phénomène est important et dangereux, mais surtout basé sur ceux qui cherchent une solution individuelle et qui ne regarde pas les forces sociales. Mais ce qui est beaucoup plus important, c’est qu’il y a aussi des groupes sociaux qui tournent le dos à la politique traditionnelle. Cela explique la croissance des nouvelles formations de gauche qui représentent une réelle menace pour la domination capitaliste puisque leur présence stimule l’action sociale et fait renaitre l’espoir. Pensons à Syriza en Grèce, malheureusement jusqu’à la capitulation de sa direction, à Podemos en Espagne, à Die Linke en Allemagne, au Socialistische Partij aux Pays-Bas, à l’Anti Austerity Alliance – People Before Profit en Irlande, etc. Le phénomène fait tache d’huile. Les sondages montrent que le PTB-Pvda peut revendiquer sa place dans cette liste, surtout en Wallonie (16%) et à Bruxelles (11%).
Le PS s’inquiète, c’est certain. L’introduction d’une semaine de quatre jours au salaire d’une semaine de cinq jours pour le personnel communal de Saint-Josse et pour certains fonctionnaires wallons ayant plus de 60 ans sert à démontrer que les déclarations du PS sur la diminution du temps de travail s’accompagnent d’actes. Evidemment, le PS ne va pas étendre cela à tous les travailleurs des services publics ni l’imposer au privé. Que cela ne retienne pas les syndicats, dans tous les secteurs, de saisir cette revendication comme outil de lutte central contre le chômage. Sa proposition pour le ‘‘double pouvoir’’ (pour des entreprises de ‘‘codécisions’’) dans les entreprises (le conseil d’administration devrait partager son droit de décision avec un conseil des travailleurs) est une manière d’éviter de parler de socialisme. Le danger que cela conduise à la collaboration de classe ou à la cogestion comme en Allemagne est réel. Mais des délégations combatives peuvent aussi saisir l’idée pour contester le pouvoir des actionnaires et la transformer en véritable droit de véto pour les travailleurs. Dans ce cas, les actionnaires s’enfuiraient bien vite. La nationalisation sans indemnisation sous contrôle de la communauté et des travailleurs serait alors la seule issue. Si le PS était vraiment sérieux, pourquoi ne pas commencer avec Caterpillar ?
Mais il y a autre chose. En Grèce, le PASOK a été balayé du paysage électoral. Aux Pays-Bas, le PvdA a chuté de 38 sièges à 10. Le PSOE espagnol a été dépassé par Podemos. En France, François Hollande fait face à une crise profonde. La tendance à gauche s’exprime dans toutes sortes de nouvelles formations. Depuis peu, cette tendance est devenue si forte que Bernie Sanders a été capable d’enclencher une ‘‘révolution politique’’ avec les primaires du Parti démocrate. Au Royaume-Uni, cette tendance s’est traduite avec Jeremy Corbyn aux primaires du Parti travailliste. Face au précipice, certains dirigeants de la social-démocratie se repentent, partiellement en raison du fait que, soudainement, les commentateurs bourgeois plaident eux aussi pour une politique d’investissements publics.
Aux Pays-Bas, une figure d’arrière-garde s’est soudainement proposée comme candidat de gauche pour être tête de liste du PvdA. En Espagne l’aile de droite du PSOE organise un coup d’Etat contre le dirigeant du parti, Pedro Sanchez, en représailles de son refus d’accepter un gouvernement minoritaire du PP. En Belgique francophone, le sommet du PS a lui-même changé de cap. Alors que Jeremy Corbyn est devenu l’expression d’un mouvement par en bas, leur tournant s’assimile plutôt à une tentative de survie désespérée par en haut.
Contrairement à Sanders ou Corbyn, les dirigeants du PS n’ont pas une réputation de fermeté, de crédibilité et d’intégrité. L’incertitude règne donc quant à la mesure jusqu’où ils sont prêts à aller. Mais il est indiscutable que la crise de la social-démocratie entre dans une nouvelle phase. Le PSL continuera à soutenir chaque pas en avant pour le mouvement ouvrier, même de très petits pas. Mais sans entretenir de vaines illusions. La meilleure garantie contre la déception de promesses non-tenues, c’est de construire le mouvement d’en bas et d’exiger de participer à chaque niveau. Sur ce plan-là, il y a encore beaucoup de travail à faire, surtout au PS, mais aussi dans les syndicats et au PTB.
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[DOSSIER] La révolte “Corbyn” : Retour vers le futur
Le Labour et Jeremy Corbyn: Vers une nouvelle force politique anti-austérité de masse ?C’est Margaret Thatcher qui doit se retourner dans sa tombe ! La ‘‘Dame de Fer’’, grande architecte de la contre-révolution néolibérale des années ’70 et ’80 aux côtés du président américain Reagan, considérait que sa plus grande réalisation était le ‘‘New Labour’’. Elle entendait par là la transformation du Parti travailliste en un parti ouvertement capitaliste sous la direction de Tony Blair, par la suite Premier ministre travailliste de 1997 à 2007. Le Labour est aujourd’hui déchiré par une guerre civile politique où s’affrontent d’une part l’appareil du parti ainsi que la majorité de ses élus et, d’autre part, le dirigeant du parti Jeremy Corbyn.
Un dossier de Nicolas Croes tiré de l’édition d’octobre de Lutte Socialiste. Cet article a été écrit avant de connaître le résultat du vote. Pour en savoir plus : Jeremy Corbyn réélu à la tête du Labour à une large majorité.
Tout commence il y a un an. Le parti travailliste britannique doit alors élire son nouveau chef de parti peu de temps après les élections de mai 2015 marquées par la pire défaite travailliste depuis 1987. Le Parti Conservateur (Tory) rempile alors pour un nouveau mandat. Les 5 années précédentes, le gouvernement de David Cameron avait mené une politique d’austérité des plus sauvages : coupes drastiques dans les budgets sociaux, mise en place de la ‘‘Bedroom Tax’’ (un impôt sur les logements possédant une chambre vacante), précarisation accrue du travail (notamment au travers des contrats ‘‘zéro heure’’), augmentation des frais d’inscriptions aux universités jusqu’à 9.000 livres l’année (environ 10.500 euros) ou encore durcissement de la politique migratoire. Résultat : près d’un million de personnes dépendent des banques alimentaires pour nourrir leurs familles tandis que les travailleurs ont souffert de la plus sévère contraction salariale depuis l’ère victorienne !
Pour l’écrasante majorité des commentateurs, un seul constat s’impose: les Britanniques sont résolument passés à droite et, pour reprendre un titre du Financial Times : ‘‘Miliband [figure de proue du Parti travailliste à l’époque] paie le prix de son virage à gauche.’’ Nos camarades du Socialist party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et au Pays de Galles) défendent au contraire que ‘‘Les travaillistes n’ont pas perdu pour avoir été trop à gauche, mais parce qu’ils ne l’ont pas suffisamment été et qu’ils ont refusé de défendre une alternative à l’austérité. Ils se sont limités à soutenir une «austérité-light».’’ En comptant l’abstention, le conservateur David Cameron ne recueille effectivement que 24,4% des voix…
Un effet boomerang qui ne manque pas d’ironie
Face à la défaite de son parti, Miliband remet sa démission. Mais un facteur inattendu s’invite dans la campagne pour la désignation de son successeur… En 2014, la direction du parti avait revu son système électoral interne selon le modèle des primaires américaines afin d’amoindrir le poids des syndicats sur le parti (ce sont les syndicats qui ont créé le parti en Grande-Bretagne, contrairement à la Belgique). N’importe qui peut donc participer aux élections en payant la somme symbolique de 3 livres sterling. L’establishment travailliste était à ce moment à mille lieues d’imaginer le raz-de-marée de 2015. Le nombre d’adhérents au Labour passe de 190.000 membre en août 2014 à près de 300.000 en septembre de l’année suivante !
La candidature de Jeremy Corbyn déchaîne un enthousiasme inédit. Il promet une politique anti-austérité, ce qui le distingue complètement de ses trois challengers (Andy Burnham, Yvette Cooper et Liz Kendall). Il reçoit le soutien des principaux syndicats, sa campagne crée la surprise. Chez les héritiers de Tony Blair, c’est la panique. On s’arrache les cheveux. Corbyn était censé n’être rien d’autre qu’une candidature de folklore et voilà qu’il attire une foule de jeunes et de travailleurs ! Les ‘‘barbares frappent à la porte’’ ! Yvette Cooper parle des élections comme d’une ‘‘bataille pour l’âme du parti’’. Elle et Liz Kendall appellent ensuite à voter pour ‘‘n’importe qui, sauf Corbyn’’. Tony Blair entre lui-même dans la danse et crie qu’une victoire de Corbyn entrainerait la ‘‘déroute, peut-être l’annihilation’’ du parti. Les médias dominants ne restent pas spectateurs et lancent une affolante campagne de dénigrement et de calomnies. En vain.
Le 12 septembre 2015, c’est le scénario de cauchemar de l’appareil du parti qui devient réalité. Corbyn remporte les élections – dès le premier tour – avec 59,5 % des voix. La majorité des trois collèges d’électeurs – les membres du parti, les adhérents des syndicats et les sympathisants qui pouvaient voter après avoir payé 3 livres sterling – le plébiscitent. Le 13 septembre, le parti annonce que 15.000 membres supplémentaires ont rejoint le parti depuis l’annonce de la victoire de Corbyn.
Pour le Premier ministre britannique David Cameron :‘‘le Labour représente maintenant une menace pour notre sécurité nationale, pour la sécurité de notre économie et celle de votre famille.’’ Rien que ça ! Des députés travaillistes qualifient l’élection de ce gauchiste antimilitariste comme un ‘‘putain de désastre’’. Pour Michael Meacher (ministre du gouvernement travailliste entre 1974 et 1979 et à nouveau sous Blair de 1997 à 2003), il s’agissait du ‘‘plus grand bouleversement non-révolutionnaire de l’ordre social dans la politique britannique moderne. Après 20 ans de fanfaronnades capitalistes, les gens ont dit ‘‘assez’’ et le Labour en revient maintenant à ses valeurs et principes réels.’’ (The Guardian, 13 août 2015) L’avenir ne s’annonçait pas aussi simple.
La guerre est déclarée
Une année durant, l’appareil du parti et la majorité des élus tentent de saboter Corbyn. Finalement, le référendum sur l’appartenance du Royaume-Uni à l’Union européenne, le Brexit de juin dernier, donne à l’aile droite l’occasion de tenter un ‘‘coup d’Etat’’. Corbyn est accusé de ne pas avoir suffisamment mené campagne pour le ‘‘Remain’’ (le maintien dans l’UE) et la plupart des membres du ‘‘cabinet fantôme’’ du Labour (sorte de gouvernement fictif de l’opposition) démissionnent. Ils appellent Corbyn à quitter la direction du parti. 80 % des députés travaillistes (172 députés sur 230) votent une motion de défiance contre Corbyn. Mais Corbyn refuse de démissionner. Les principaux syndicats lui renouvellent leur soutien et 10.000 personnes se rassemblent en vitesse devant le Parlement pour le soutenir. De nouvelles élections sont provoquées, dont le résultat sera annoncé le 24 septembre (peu de temps après que ce journal ait été envoyé à l’imprimeur).
Pour la droite, l’été devient l’occasion d’une purge massive de militants soupçonnés de soutenir Corbyn. Son personnel épluche les comptes Facebook et Twitter des adhérents pour y déceler des preuves de manque de loyauté. 130.000 personnes ayant rejoint le Labour depuis janvier sont exclues du vote, tout comme 50.000 des 180.000 sympathisants inscrits. Un seul candidat de droite se présente contre Corbyn, Owen Smith, qui tente de se profiler à gauche. Bien peu de gens sont toutefois dupes de la manœuvre : il est considéré comme une marionnette de l’establishment et des héritiers de Blair. Pendant ce temps, Corbyn accumule les meetings de masse. A Liverpool, le 2 août, 10.000 personnes viennent l’écouter. Au final, plus de 600.000 personnes doivent se prononcer et les derniers sondages pronostiquent une victoire éclatante de Corbyn à plus de 60%. Selon les chiffres officiels, le Labour a gagné 300.000 nouveaux adhérents grâce à ‘‘l’effet Corbyn’’. Une catastrophe pour l’establishment épouvanté du parti. Un riche donateur du parti, Michael Foster, perd ainsi son flegme et compare dans la presse les alliés de Corbyn à un commando de ‘‘stormtroopers nazis’’.
Ce n’est toujours qu’un début
Jeremy Corbyn semble bien être en route vers une nouvelle victoire, mais il ne peut y avoir aucun compromis avec les représentants du capitalisme au sein du Labour. L’ancien conseiller de Tony Blair, John McTernan, a carrément déclaré : ‘‘Les révolutions sont inévitablement sanglantes et, n’ayons aucune illusion, reprendre le Parti travailliste des mains de Jeremy Corbyn et John McDonnell nécessite une révolution.’’ Ce politicien a encore récemment appelé les conservateurs à ‘‘écraser les syndicats des cheminots une bonne fois pour toutes’’ (The Telegraph, 10 août 2016).
Le Financial Times a publié le 24 juillet dernier un article indicatif de la détresse de la droite du parti, sous la plume du député Jon Cruddas, qui défendait que le ‘‘parallèle historique le plus proche (…) ne se trouve pas dans [au Parlement], mais à Berlin en 1918’’, au moment de la révolution allemande. Il compare les députés anti-Corbyn à ‘‘Friedrich Ebert [qui] a dirigé le parti social-démocrate (SPD)’’ et le mouvement en faveur de Jeremy Corbyn aux révolutionnaires ‘‘Spartakistes, dont Rosa Luxemburg et Karl Kautsky, [qui] qui ont reçu [leur légitimité] du mouvement des travailleurs, des comités d’usine et des comités ouvriers.’’ Il ajoute que ‘‘Ebert a finalement lâché les Freikorps contre les dirigeants de l’insurrection’’, ce qui a conduit à l’assassinat de Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht. Aucune complaisance n’est de mise avec ces gens-là.
L’une des possibilités est que la droite finisse par scissionner du parti pour constituer une nouvelle formation. Le challenger de Corbyn, Owen Smith, a lui-même a déclaré : ‘‘Je pense qu’il y a toutes les chances que le parti se divise si Jeremy remporte cette élection.’’ Il est cependant toujours possible que la droite hésite et entretienne l’espoir de renverser Corbyn à l’avenir, où que certains quittent le parti tandis que d’autres y restent. Certains espèrent que la nouvelle Première Ministre, Teresa May, appelle à des élections anticipées en comptant qu’une victoire des Conservateurs pour contraindre Corbyn à démissionner. Il est peu probable qu’elle soit capable de poursuivre son mandat jusqu’à son terme en 2020, mais l’extrême faiblesse de son gouvernement ainsi que les profondes divisions qui existent également chez les Conservateurs la poussent à hésiter devant le risque d’élections anticipées.
Ce qui est essentiel, c’est qu’à la différence de la première victoire de Corbyn en 2015, il n’y ait plus de tentatives de la gauche de trouver un compromis avec les blairistes. Le mouvement autour de Corbyn doit au contraire être organisé et construit afin de consolider et d’accroître les gains jusqu’ici obtenus. Un programme anti-austérité sans équivoque doit être adopté et les députés travaillistes doivent y souscrire comme condition préalable pour siéger comme membre du parti. A gauche, certains redoutent une scission de la droite du Labour. Mais l’empêcher, cela revient à capituler devant les éléments pro-capitalistes du parti. Ces deniers ne condescendront à s’entendre avec l’aile gauche que si on leur laisse le champ libre, si leurs carrières est protégée et, plus important encore, si le Parti travailliste se limite entièrement au cadre capitaliste.
Refonder le Labour
L’élection de Jeremy Corbyn offre l’occasion de créer un parti de masse de la classe ouvrière, que ce soit ou non sous l’appellation de ‘‘Labour’’, capable de regrouper sur une base fédérative des Verts, des organisations socialistes anticapitalistes, des syndicats actuellement affiliés ou non au Labour, des organisations de quartier,… pour lutter ensemble contre l’austérité tout en conservant leurs identités propres. Jeremy Corbyn semble globalement en accord avec cette approche des choses, comme il l’a exprimé en déclarant: ‘‘Nous ne pouvons gagner une élection générale qu’en gagnant des gens qui ne votent pas ou qui votent pour un autre parti. Si quelqu’un a politiquement évolué au point de rejoindre le Parti travailliste, qu’il ait été autrefois membres des Lib-Dems, des Verts ou d’autre chose, c’est très bien. Bienvenue à bord.’’ Interrogé sur la possibilité que le Socialist Party (le parti-frère du PSL en Angleterre et au Pays de Galles) s’affilie au Labour, il a ajouté: ‘‘Je me réjouis d’avoir une conversation avec Peter [Taaffe, secrétaire général du Socialist Party] à un moment donné.’’Un groupe de députés, même très limité, menant campagne sans relâche contre l’austérité et en défense des travailleurs en lutte, ferait beaucoup plus pour la lutte contre les Conservateurs que 232 députés ‘‘travaillistes’’ favorables à l’austérité, aux privatisations et aux guerres. Un Parti travailliste anti-austérité pourrait rapidement engranger des gains électoraux de façon similaire à ce qu’a connu Syriza en Grèce lors de sa victoire de janvier 2015 en défendant à l’époque un programme anti-austérité. Un tel parti pourrait rapidement gagner du terrain électoralement en offrant une alternative aux coupes budgétaires sans fin, aux privatisations et à la misère croissante.
L’élément crucial serait toutefois de soutenir les luttes extra-parlementaires. C’est la grève Ford Dagenham qui a imposé la Loi sur l’égalité salariale entre hommes et femmes. C’est la menace d’une grève générale qui a forcé la libération des dockers emprisonnés en 1972. Ce sont les 18 millions de personnes qui ont refusé de payer la Poll Tax qui ont mis fin au règne de Margaret Thatcher et qui ont forcé le gouvernement de John Major à abolir la taxe.
Imaginez si, après presque une décennie de coupes budgétaires brutales qui ont laissé les budgets municipaux exsangues (en moyenne de 40% moindres à ceux de 2008), un certain nombre de conseils – même une poignée – refusaient de mettre en œuvre les réductions budgétaires (à l’image de la ville de Liverpool dans les années ’80) et se soutenaient les uns les autres. Imaginez si ces conseils disposaient du soutien sans faille du parti de Jeremy Corbyn au Parlement, quel que soit son nom. Une telle lutte – étant donné toute la colère accumulée contre l’austérité – serait très populaire. Il serait non seulement possible de gagner, mais aussi d’organiser la lutter contre les conservateurs pour forcer la tenue de nouvelles élections à partir desquelles serait posée la possibilité de l’arrivée au pouvoir du parti de Corbyn. Il s’agit juste d’un exemple de la manière dont un parti de gauche au Parlement, même avec tout d’abord un petit nombre de députés, pourrait agir en tant que porte-voix de la classe ouvrière et du mouvement anti-austérité, déplaçant ainsi la balance de forces dans la société dans le sens de la classe ouvrière.
Renverser le capitalisme
Nos camarades du Socialist Party soutiennent Jeremy Corbyn tout en cherchant à pousser le mouvement encore plus vers la gauche et en avertissant des retraites qui peuvent, à un stade ultérieur, conduire à des défaites. Les capitalistes résistent avec véhémence à un plus grand rôle de l’Etat et à l’augmentation des taxes. Pour mettre en œuvre le programme, même modeste, de Jeremy Corbyn, ‘‘l’action extra-parlementaire’’ sera cruciale, ce qui signifie la mobilisation active de la classe ouvrière en soutien aux politiques d’un gouvernement de gauche.
Le programme actuel de Jeremy Corbyn représente un véritable pas en avant par rapport aux politiques pro-capitalistes des précédents dirigeants travaillistes. Mais il est encore trop timide. L’expérience de SYRIZA en Grèce, où la direction d’un parti anti-austérité a capitulé sous la pression des grandes entreprises et appliqua actuellement lui-même l’austérité, démontre que vaincre l’austérité est lié à la lutte pour une rupture anticapitaliste et pour le socialisme. Cela nécessite d’exiger la renationalisation totale de secteurs comme les chemins de fer ainsi que la nationalisation des secteurs clés tels que la finance ou la sidérurgie afin d’élaborer la production économique selon une planification démocratique, dans laquelle la population jouera un rôle de décision central.
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[MEETINGS] Révolte en Grande Bretagne – Le Parti Travailliste & Jeremy Corbyn
La lutte pour un parti de la classe des travailleurs – Quelle pertinence pour la résistance sociale en Belgique ?Meetings avec
– Roger Bannister. Militant du syndicat Unison et du Socialist Party (successeur de Militant) à Liverpool.
– Nicolas Croes. Rédacteur en chef de Lutte Socialiste- Ven. 14/10 Bruxelles – 19h, Pianofabrief, 35 rue du Fort, Saint Gilles (sur Facebook)
- Sa. 15/10 Liège – 19h, Fédé, 24 place du XX Août (sur Facebook)
- Di. 16/10 Mons – 14h, Etage du café Le Central, Grand Place (sur Facebook)
Une initiative du Parti Socialiste de Lutte & des Etudiants de Gauche Actifs – Entrée: Donation libre
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Jeremy Corbyn réélu à la tête du Labour à une large majorité
Cette victoire éclatante est une autre étape de franchie dans la transformation du Labour
Il y a trois mois de cela, 172 députés – soit les trois quarts des élus du Parti travailliste au Parlement – ont lancé un coup d’Etat interne contre le leader du parti, Jeremy Corbyn. Afin de renverser ce dernier, ces députés ont reçu le soutien de toutes les forces de l’establishment capitaliste. Les grandes entreprises et les médias de droite ont sans cesse attaqué Jeremy tandis que la machine du parti travailliste a empêché plusieurs milliers de ses partisans de participer aux nouvelles élections pour la direction du parti.
Déclaration du Socialist Party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et au pays de Galles)
Tous ces efforts n’ont abouti à rien. Le 24 septembre, Jeremy a été réélu à une confortable majorité de 61,8% des voix. Cette victoire est donc encore plus grande que celle qui l’avait propulsé à la tête du labour il y a un an de ça. La participation fut très forte, plus d’un demi-million de personnes, et Jeremy a remporté des majorités claires dans toutes les catégories d’électeurs – les membres du parti travailliste, les sympathisants affiliés et les sympathisants enregistrés.
Les partisans de Tony Blair – le dirigeant du Labour qui a incarné son profond virage à droite dans les années ’90 et qui a orchestré la participation de la Grande Bretagne aux aventures guerrières de Georges W. Bush – sont sous le choc face à ce mouvement anti-austérité massif en soutien à la figure de Jeremy Corbyn. Cela ne signifie toutefois pas que les blairistes se sont réconciliés avec la direction de Jeremy Corbyn ou qu’ils ont accepté la perspective que le Parti travailliste devienne un parti anti-austérité.
L’establishment capitaliste a énormément bénéficié de la transformation du Labour en New Labour avec Tony Blair. Cela a permis que le débat politique soit dominé par les idées pro-libre marché au cours des 20 dernières années. Ce sont les forces de cet establishment qui se trouvent derrière le coup d’Etat de cet été à l’encontre de Jeremy Corbyn. La défaite de cette première tentative de le renverser est un coup retentissant qui leur a été porté.
Il est cependant d’ores et déjà clair qu’il ne s’agira pas de la dernière tentative de l’establishment capitaliste pour retrouver son contrôle incontesté du Parti travailliste. Les enjeux sont trop élevés. La question cruciale est de savoir comment consolider la victoire de Jeremy Corbyn en transformant véritablement le Labour en un mouvement de masse de la classe des travailleurs anti-austérité et socialiste.
Aucun compromis avec la droite
Alors qu’il s’approchait de sa première victoire pour la direction du parti l’an dernier, Jeremy Corbyn démontrait un grand optimisme face aux avertissements du danger d’une contre-révolution de l’establishment. ‘‘Complots, doubles-complots et complots derrière des complots, c’est fascinant’’, at-il déclaré à un journaliste du Guardian qui l’a dépeint ‘‘écartant les suggestions selon lesquelles il ferait face à un coup d’Etat interne pour le démettre de ses fonctions s’il devenait dirigeant du Labour’’ (5 août 2015). Il a même déclaré qu’il fallait suivre l’exemple malheureux du président américain Abraham Lincoln en tant qu’image prétendument ‘‘unificatrice’’ après la guerre civile américaine ‘‘démontrant de la malice envers aucun et de la charité envers tous’’.
Les événements de ces douze derniers mois, qui ont culminé avec la tentative de coup d’Etat interne de cet été, démontrent à quel point il était erroné de tenter de concilier les représentants de classe sociales antagonistes. Cette erreur ne doit pas être répétée aujourd’hui.
La position de Jeremy Corbyn est encore fragile. Si trois votes à peine s’étaient exprimés autrement lors de la réunion du comité exécutif national du Labour (NEC) du 12 juillet dernier, les candidats auraient dû demander l’approbation des députés avant de se présenter. Des candidats de l’establishment comme Owen Smith ou Angela Aigle auraient donc pu se présenter sans opposition, comme Gordon Brown l’a fait en 2007 après la démission de Tony Blair. Seules les protestations de milliers de membres du Labour et de syndicalistes ont permis d’éviter l’annihilation de la possibilité de transformer le Parti travailliste, ce que la direction de Jeremy Corbyn représente comme possibilité.
Pour la première fois depuis la seconde guerre mondiale, toutes les réunions régulières du parti ont été annulées par la NEC durant l’été, un certain nombre de sections locales ont été suspendues (parmi lesquelles la plus grande unité locale du parti) et «l’unité de conformité» a conduit à ce que John McDonnell a qualifié à juste titre de ‘‘purge truquée des partisans de Jeremy Corbyn.’’
Les structures et relations de forces développées dans le cadre du New Labour qui avaient détruit la capacité de la classe ouvrière à lutter pour développer son influence au sein du parti sont toujours en place. Le leadership de Jeremy Corbyn est une tête de pont contre les forces du capitalisme au sein du Parti travailliste. Il reste à retirer le pouvoir de la droite parmi les députés du Labour (Parliamentary Labour Party, PLP), l’appareil du parti national et la grande majorité des 7.000 conseillers municipaux travaillistes qui mènent à bien le programme d’austérité des conservateurs.
L’organisation et la politique
Jeremy Corbyn, à la suite de sa victoire, devrait déclarer qu’il va rétablir le rôle central des syndicats au sein du Parti travailliste en raison de leur importance en tant que voix collective de millions de travailleurs. La représentation syndicale au sein du Parti travailliste démocratiquement exercée par les membres du syndicat fournit un moyen potentiel à la classe ouvrière de contrôler ses représentants politiques. Cela caractérisa le Parti travailliste dans le passé – avant le New Labour – en tant que parti ‘‘capitaliste des travailleurs’’. En d’autres termes, alors que le parti avait une direction qui reflétait toujours la politique de la classe capitaliste, sa structure permettait aux travailleurs de contester la direction et de menacer les intérêts des capitalistes. Les droits des syndicats doivent être restaurés.
D’autres mesures sont également nécessaires pour démocratiser les structures du Parti travailliste, stérilisées par le blairisme au fil des ans. L’un des éléments clés est la re-sélection des députés. Mais si permettre aux structures locales de remplacer leurs députés lors des prochaines élections générales est positif, une action plus décisive doit être prise au niveau national avant cela. Les 172 députés qui ont déclenché le coup d’Etat interne contre Corbyn avec leur motion de défiance du 28 juin ne devraient continuer de siéger en tant que travaillistes que s’ils acceptent le mandat renouvelé de Corbyn et souscrivent à des politiques anti-austérité et anti-guerre.
Un réarmement idéologique du parti est également nécessaire. En 1995, Tony Blair a aboli l’engagement historique du labour à «la propriété commune des moyens de production, de distribution et d’échange», la clause 4. Le remplacement de cette clause a mis le labour à la remorque de ‘‘l’entreprise du marché’’ dynamique, de la ‘‘rigueur de la concurrence’’, et du ‘‘secteur privé florissant’’.
Dans le magazine Socialism Today (mensuel de nos camarades en Angleterre et au pays de Galles qui accompagne leur hebdomadaire The Socialist), Hannah Sell (secrétaire général adjointe du Socialist Party) défend que les politiques économiques de Jeremy Corbyn et de John McDonnell représentent une rupture importante, même si elle n’est que partielle, avec le dogme néolibéral blairiste. Elles ont certainement attiré les foudres de l’ancien membre du comité monétaire de la Banque d’Angleterre David Blanchflower qui avait été intégré dans le comité consultatif économique du Labour l’an dernier (ce fut l’une des nombreuses tentatives erronées de trouver un arrangement avec l’aile droite du parti). Ce dernier avait soutenu la candidature d’Owen Smith dans les élections pour la direction du parti en expliquant que Corbyn et McDonnell ‘‘doivent accepter les réalités du capitalisme et des marchés modernes, qu’ils les approuvent ou non.’’ (The Guardian, le 2 Août 2016).
Malheureusement, il est également vrai que les politiques économiques défendues par Jeremy Corbyn, une forme de keynésianisme au final – ne répondent pas à la charge de Blanchflower selon qui «les obligations et les actions des marchés’’, qui seraient encore libres de gouverner l’économie, ‘‘le [Corbyn] mangeraient pour le déjeuner.’’ Corbyn e défend pas un programme clair de propriété publique démocratique des banques, des institutions financières et des grandes entreprises sous le contrôle et la gestion des travailleurs. Cela représente la base essentielle pour une nouvelle forme de société, le socialisme, en opposition au système capitaliste de marché.
Réintégrer les socialistes
Cette discussion nécessaire au sujet des politiques et des idées à défendre est la raison pour laquelle une autre exigence vitale dans la période à venir sera le droit pour tous les socialistes, y compris ceux déjà expulsés ou exclus, de participer à la vie du Parti travailliste et d’y être organisés.
La bataille pour le leadership du parti a révélé la peur morbide des «socialistes organisés» de la part de la classe dirigeante et de ses représentants au sein du Labour. Derrière cette crainte de l’aile droite, illustrée par l’attaque du dirigeant travailliste Tom Watson contre les ‘‘trotskistes’’, est le spectre de la tendance Militant, le prédécesseur du Socialist Party en Angleterre et au Pays de Galles.
Les capitalistes disposent de leurs «tendances» au sein du Labour. Ils les soutiennent matériellement et idéologiquement, y compris avec le poids des médias de l’establishment. Les députés et conseillers municipaux du Parti travailliste actuels ne sont qu’une caste organisée, une ‘‘tendance’’ bénéficiant des moyens de l’Etat. Pourquoi donc les opposants au capitalisme n’auraient-ils pas le droit de s’organiser eux aussi?
La meilleure façon d’atteindre cet objectif et de couper court à la fixation des médias de masse pour les ‘‘conspirations secrètes’’ serait de permettre aux partis et organisations socialistes de s’affilier ouvertement au Parti travailliste.La transformation du Parti travailliste en New Labour n’était pas un acte, il s’agissait d’un processus consolidé au fil des ans. Inverser cette transformation ne se fera pas en un jour. Cela exigera l’organisation d’un mouvement de masse visant consciemment à renverser l’héritage du New Labour, politiquement et organisationnellement. La réélection de Jeremy Corbyn est une autre étape importante sur cette route, mais il faut construire les autres de toute urgence.
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Meetings avec
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Le Parti Travailliste & Jeremy Corbyn: La lutte pour un parti de la classe des travailleurs
La Grande-Bretagne est en eaux troubles. Depuis le Brexit, ce sont les élections pour la présidence du Parti travailliste qui occupent les esprits. Une guerre civile pure et simple est en cours entre l’aile droite autour des parlementaires “blairistes” et la révolte de la base autour de Corbyn et de sa rhétorique de gauche. Les salles et les places sont combles pour venir l’écouter, un peu à l’image de ce qu’a pu faire Bernie Sanders aux USA. Jeunes et moins jeunes prennent la rue pour entendre un discours anti-austérité prononcé. Des revendications telles que la renationalisation des chemins de fer, la fin de la modération salariale ou encore des investissements majeurs dans les soins de santé et l’enseignement sont extrêmement populaires. Des idées socialistes considérées comme dépassées sont à nouveau considérées avec intérêt. Jeremy Corbyn appelle à l’unité de la classe des travailleurs contre la guerre, l’oppression et l’exploitation. L’élite parlementaire travailliste redoute que Corbyn soit en mesure de remporter la prochaine élection sur ce programme. Ce dernier a le potentiel de faire du Parti Travailliste un parti pour et par la classe ouvrière, avec l’implication active d’une base de masse.Roger Bannister était membre de ‘‘Militant’’ à Liverpool dans les années ‘70 et ’80, là où le conseil municipal travailliste a mis en œuvre une politique très à gauche au beau milieu des années Thatcher. Il a été exclu du Parti travailliste par l’aile droite en raison de ses opinions socialistes. Roger est également un syndicaliste reconnu au sein de l’Unison. Il a recueilli 5% des voix à Liverpool aux dernières élections municipales sur une liste de la TUSC (Coalition des syndicalistes et des socialistes).
Quelle pertinence pour la résistance sociale en Belgique ?
En Belgique aussi, les luttes sociales font rage et la colère contre la politique austéritaire est croissante. Fin 2014, un mouvement de grève massif a quasiment renversé le gouvernement Michel, mais les dirigeants syndicaux n’ont pas voulu continuer, notamment faute de véritable alternative politique. Tout comme en Grande-Bretagne, la social-démocratie flamande et francophone a défendu et appliqué une politique néo-libérale aux conséquences dramatiques pour nos soins de santé, nos services sociaux, l’aide aux seniors, l’enseignement, etc. Pour l’instant, cela semble politiquement sans issue et l’opposition se manifeste essentiellement sur le plan syndical. Mais le mouvement des travailleurs a besoin des deux à la fois. Un syndicat ne peut rien faire s’il ne peut pas traduire sa lutte politiquement et un parti des travailleurs ne peut rien faire sans être constamment soutenu et poussé par les luttes en entreprises. Attendre et voir ce que donneront les prochaines élections peut se révéler catastrophique. La droite pourrait à nouveau l’emporter si le mouvement social ne parvient pas à la stopper. En Belgique aussi, il nous faut un nouveau parti de masse des travailleurs avec l’implication active de sa base.
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Jeremy Corbyn: quel type de parti pour les travailleurs et la jeunesse?
Le Parti travailliste britannique est le champ de bataille d’un combat acharné entre la gauche et la droite. Le résultat de cette épreuve de force est très attendu en Europe et au-delà. Jeremy Corbyn, le président de gauche du parti, parviendra-t-il à retirer le Labour des griffes de l’appareil bureaucratique pro-austérité du parti ? Pourrait-il développer un nouveau modèle de parti des travailleurs contrôlé par la base ?
Par Peter Delsing
La droite du Labour a déclenché une procédure de réélection pour la présidence et, en dépit de la manœuvre qui a fait grimper les cotisations des membres à 25£, au moins 183.000 personnes ont à nouveau adhéré. Aucun parti – de gauche ou de droite – ne peut se vanter d’avoir connu un tel afflux en Europe ces dernières années. Les meetings de Jeremy Corbyn bénéficient partout d’une présence massive. A Liverpool, plus de 10.000 personnes se sont retrouvées dans les rues.
Corbyn essayera-t-il de maintenir une nuisible ‘‘unité’’ avec ses opposants néolibéraux ? L’appareil bureaucratique du Labour – soutenu par les médias – pourrait réussir à l’éjecter à un certain stade. Soit maintenant, au cours des nouvelles élections pour la présidence du parti où lui fait face Owen Smith, soit plus tard.
Une revanche de l’Histoire
Depuis le milieu des années ’70, le capitalisme est en crise latente. La période post-stalinienne ouverte après 1989 a conduit la social-démocratie encore plus loin des idées du socialisme. Ses dirigeants ont ouvertement adopté le ‘‘libre marché’’, la privatisation et les coupe antisociales dans les salaires, les allocations sociales et les pensions. Cette absence de ‘‘boussole de classe’’ claire, a ouvert la voie à la croissance du populisme de droite et parfois même de l’extrême droite.
C’est surtout depuis que la crise de 2008 a éclaté que de nouveaux courants de gauche ont fait une percée. En Grèce il y eut l’émergence et la chute de SYRIZA, le développement de Podemos en Espagne et, bien sûr, l’impressionnant mouvement autour de Bernie Sanders. Ces développements politiques se sont construits sur l’essor des conflits sociaux: les Indignés, les occupations de place, le mouvement Occupy aux Etats-Unis,… La lutte contre l’élite capitaliste et leur exploitation pousse inévitablement à la recherche d’une issue, pas toujours sans ambiguïté, comme ce fut le cas avec le référendum sur le Brexit qui est essentiellement une révolte de la classe des travailleurs contre l’establishment et son projet européen.
Il est temps de choisir: un tournant à gauche ou foncer vers le précipice avec la droite?
Le challenger de Corbyn, Owen Smith, essaye naturellement de se profiler à gauche au vu du contexte actuel, mais il se veut le garant d’un Labour inoffensif pour la classe dirigeante et les carriéristes. Peut-être Corbyn parviendra-t-il à nouveau à remporter les élections. 234 des 275 réunions locales du Parti qui se sont tenues en août pour désigner leur candidat ont choisi Corbyn.
Dès le début, la droite a organisé une offensive pour saboter sa présidence, parfois concernant des choses insignifiantes. Portait-il une cravate? A-t-il chanté l’hymne national britannique ? N’a-t-il pas montré bien peu d’enthousiasme pour l’Union européenne néolibérale ? La droite a essayé d’exclure de nombreux nouveaux membres, puis a considérablement augmenté le montant de leurs cotisations. Des dizaines de milliers de personnes ont été exclues pour avoir affiché sur les médias sociaux leurs critiques de l’aile droite du Labour. Il a même été interdit aux réunions locales du parti de se réunir et de discuter de la situation actuelle, sauf pour désigner leur candidat à la présidence.
Malheureusement, Corbyn s’est initialement montré trop conciliant envers l’aile droite. Il a changé de position pour soutenir l’Union européenne. Il s’est prononcé contre la révocation des députés s’ils ne reflétaient pas l’opinion de la majorité démocratique du parti ou s’ils participaient à la politique d’austérité. Il a également refusé que le Labour s’oppose à l’austérité à l’échelle communale et défende des budgets publics visant à mobiliser la rue pour exiger davantage de moyens du gouvernement et des plus riches.
Malgré cela, son programme de renationalisation des chemins de fer, en faveur d’un salaire minimum et en défense des droits syndicaux trouve un écho. Cette guerre civile politique entre deux ailes représentant des intérêts de classe irréconciliables ne peut pas tout simplement être reléguée au frigo. Le groupe autour de Jeremy Corbyn s’est jusqu’ici limité à des perspectives purement électoralistes en essayant de temporiser les choses jusqu’à une victoire électorale en 2020 qui changerait tout. Cette perspective n’est pas réaliste.
Un instrument démocratique pour la classe des travailleurs
Ce que le capital et la bureaucratie travailliste craignent par-dessus tout, c’est la victoire électorale d’un Labour fondamentalement renouvelé par l’implication de la classe des travailleurs et qui aurait absorbé leur défense jusqu’en son cœur. Ils tremblent face à la perspective d’un Labour radicalisé dans une situation déjà rendue périlleuse suite au vote sur le Brexit.
Selon le parti frère du PSL, le Socialist Party, l’enthousiasme basé sur le programme Corbyns doit être libéré des entraves bureaucratiques du parti. Il faudrait refonder le Labour en organisant une grande conférence destinée à rassembler tous ceux, du Labour ou non, mouvements ou individus, qui veulent s’opposer au néolibéralisme. Un tel parti fonctionnerait mieux de manière fédérative (au lieu d’être fortement centralisé), ouverte et inclusive, en assurant la prépondérance de sa base de masse active dans la prise des décisions politiques et organisationnelles centrales. Le Socialist Party participerait avec enthousiasme à un tel projet démocratique. L’expérience de la social-démocrate, des bureaucraties staliniennes du passé, de nombreux dirigeants syndicaux et de leurs approches hiérarchiques et exclusive ne fonctionnerait pas et ne serait pas acceptée par les militants du parti ou syndicaux.
Cela conduirait à une scission? Oui. Mais quelle situation serait la plus favorable aux travailleurs ? Un parti dont les centaines de députés votent pour l’austérité et la guerre? Ou un nouveau parti avec quelques dizaines de membres au Parlement mais qui, avec un programme vraiment à gauche et un passé sans tâche, pourrait certainement réaliser une percée impressionnante ? Si ce parti s’implique dans les luttes syndicales, les campagnes de quartiers,… il pourra rapidement devenir un parti de millions de travailleurs et de jeunes. Un tel parti de masse serait un gigantesque laboratoire d’idées et de lutte pour une société socialiste démocratique.
Le spectre du trotskysme dans les médias capitalistes
Le parti frère du PSL, le Socialist Party, a été touché par la campagne de diffamation des médias de masse contre Jeremy Corbyn. Des figures de droite du parti travailliste ont, avec le soutien des journaux et de la télévision, tenté de démontrer l’existence d’une ‘‘infiltration trotskyste’’. Ils espéraient que Corbyn allait en pâtir par association d’idées.
Mais contrairement aux affirmations de l’aile droite, les méthodes du Socialist Party (ex-Militant) ne reposent pas et n’ont jamais reposé sur l’intimidation ou les complots. La véhémence de nos détracteurs visait particulièrement les succès du passé de notre organisation: la lutte massive de la ville de Liverpool sous la direction de Militant en pleine ère de Thatcher, où le conseil communal a réussi à arracher 60 millions de livres des autorités nationales pour des budgets sociaux, et bien sûr, la campagne contre la Poll Tax durant laquelle 18 millions de personnes ont refusé de payer cette taxe et ont ainsi mis fin au règne de Margareth Thatcher.
Trotsky a lutté contre la bureaucratie stalinienne ainsi qu’en défense de la démocratie soviétique et d’un système multipartite, mais reposant sur l’économie planifiée et la lutte pour le socialisme international. Il fut, avec Lénine, le principal dirigeant et théoricien de la Révolution russe.
Aux yeux de l’establishment capitaliste, cet héritage de défense implacable du drapeau rouge et des meilleures traditions du mouvement ouvrier ne doit évidemment pas être redécouvert par les nouvelles générations. Pourquoi ? Parce que ce sont des idées et une organisation qui peuvent changer le monde.
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Grande-Bretagne: L'insurrection Corbyn. Finissons-en avec la droite!
Jeremy Corbyn semble bien être en route pour être à nouveau élu à la tête du Parti travailliste (le Labour) ce mois de septembre. Mais la lutte acharnée et amère que lui mène la droite démontre qu’il ne peut y avoir aucun compromis avec les représentants du capitalisme au sein du Parti travailliste. Cette fois, il faut en finir et véritablement transformer le Labour en un parti socialiste anti-austérité. L’article suivant est publié dans l’édition de septembre de Socialism Today, le magazine de nos camarades du Socialist Party.
Par Hannah Sell, Socialist Party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et au Pays de Galles)
La guerre civile en cours dans le Parti travailliste atteint un nouveau pic d’intensité. La majorité anti-Corbyn des députés travaillistes (le Parliamentary Labour Party, PLP) et l’appareil du parti mènent une campagne tout aussi désespérée que dégoûtante pour tenter de reprendre le contrôle de la situation. Ils ont face à eux un véritablement mouvement de la classe ouvrière et de la jeunesse. Ces derniers ont fait irruption sur la scène de l’Histoire et exigent de faire entendre leur voix. La «bulle de Westminster» (siège du Parlement britannique) qui a passé des décennies à complaisamment accepter les coupes budgétaires, l’austérité et les privatisations a le sentiment d’être soudainement menacée par des «barbares frappant à sa porte». L’ensemble de l’establishment capitaliste a tout d’abord été secoué par le vote sur le Brexit et, maintenant, les tentatives de se débarrasser de Jeremy Corbyn sont contrecarrées par une énorme vague de soutien pour le dirigeant travailliste qui déborde des limites de la politique habituelle.
Ces dernières semaines ont eu lieu les plus grands rassemblements de masse de la gauche depuis des décennies, à Liverpool, Hull, Leeds, Bristol et dans de nombreuses autres villes. Des 275 réunions locales qui se sont tenues pour désigner leur candidat à la présidence du parti, 234 ont à ce jour choisi Corbyn, avec la plupart du temps une participation de centaines de personnes. Cette «deuxième vague» venue à la rescousse de Corbyn est encore plus grande que la première qui lui avait permis d’être élu à la tête du parti l’an dernier. Elle comprend également un plus grand nombre de travailleurs au côté de l’importante couche de jeunes radicalisés qui avait dominé la première vague.
Toutes les forces de l’establishment capitaliste, à l’intérieur et à l’extérieur du Labour, tentent de vaincre ce mouvement regroupé derrière Jeremy Corbyn. La décision de la Cour d’appel de soutenir celle du National Executive Committee travailliste d’interdire le droit de vote aux 130.000 nouveaux membres ayant rejoint le Labour après le 12 janvier n’est que le dernier exemple en date du soutien que l’establishment capitaliste est capable de donner aux manœuvres les plus antidémocratiques qui soient de la part de la droite du parti. Un incroyable nombre de 183.000 personnes ont payé les 25£ pour s’enregistrer comme supporters du Labour en 48 heures seulement. Mais il a été signalé que plus de 40.000 d’entre eux vont être exclus pour des raisons qui incluent notamment d’avoir apparemment eu la témérité de qualifier les députés «blairistes» (partisans de la ligne droitière de Tony Blair) de “traîtres” sur les réseaux sociaux. Toutes les réunions des sections locales du Labour ont été annulées, à l’exception de celles consacrée à la nomination du candidat. Un certain nombre de réunions de partisans de Corbyn ont été annulées pour des motifs fallacieux.
Étant donné jusqu’où la droite est prête à aller pour essayer de l’emporter, ce serait une erreur de faire preuve de complaisance. Les médias capitalistes mènent une campagne électorale unilatéralement en faveur du challenger de Jeremy Corbyn, Owen Smith. Ce dernier a remarquablement tenté de se profiler à gauche, une stratégie désespérée visant à faire appel aux partisans radicalisés de Corbyn. Il a même prétendu être favorable à une «révolution socialiste»! Parallèlement, il a tenté de s’attirer les voix de ceux qui avaient voté pour le maintien de la Grande-Bretagne à l’intérieur de l’Union européenne durant le référendum sur le Brexit en se disant favorable à la tenue d’un second référendum sur l’appartenance à l’UE. L’axe central de sa campagne est cependant que Corbyn est «inéligible» et divise le Parti travailliste, suggérant ainsi que la seule voie pour un gouvernement travailliste passe par son élection. Une couche plus passive de gens pourrait être affectée par cet assaut des médias.
Jusqu’à présent, la droite semble s’être révélée incapable d’empêcher la réélection de Jeremy. Sa victoire, particulièrement avec une marge confortable, ferait à juste titre le plaisir des centaines de milliers de personnes qui ont rejoint la bataille contre les blairistes. Mais cela ne sera encore que le début et non la fin de cette bataille. Il n’y a aucune chance que la droite accepte l’autorité de Jeremy Corbyn. Elle l’a elle-même explicitement dit. L’ancien conseiller de Tony Blair, John McTernan, a carrément déclaré : «Les révolutions sont inévitablement sanglantes et, n’ayons aucune illusion, reprendre le Parti travailliste des mains de Jeremy Corbyn et John McDonnell nécessite une révolution.» Les gens tels que McTernan sont les véritables «entristes» dans le Parti travailliste, non pas favorables à la révolution, mais à la contre-révolution. Cet homme a encore récemment appelé les conservateurs (les Tories) à «écraser les syndicats des cheminots une bonne fois pour toutes» (The Telegraph, 10 août 2016). De tels propos ne devraient pas prendre place dans un parti précisément historiquement créé par les syndicats afin de promouvoir les intérêts de la majorité de la classe ouvrière.
L’essence de la lutte en cours dans le Parti travailliste se résume aux intérêts de classe qu’il défendra à l’avenir. Défendra-t-il la classe ouvrière, majoritaire dans la société, et la classe moyenne sans espoir pour l’avenir ou alors l’élite capitaliste ? La droite utilisera tous les moyens nécessaires pour faire à nouveau du Parti travailliste un outil fiable pour les capitalistes. Cependant, à l’heure actuelle, rien ne les pousse à imaginer disposer de beaucoup de chances de succès. Ils titubent sous le choc d’une classe ouvrière radicalisée qui ose désormais intervenir dans «leur» parti et menacer leurs carrières.
Le Financial Times a publié le 24 juillet dernier un article indicatif de leur détresse, sous la plume du député Jon Cruddas, qui défendait que le «parallèle historique le plus proche (…) ne se trouve pas dans à Westminster, mais à Berlin en 1918», au moment de la révolution allemande. Il compare les députés anti-Corbyn à «Friedrich Ebert [qui] a dirigé le parti social-démocrate (SPD)» et le mouvement en faveur de Jeremy Corbyn aux révolutionnaires «Spartakistes, dont Rosa Luxemburg et Karl Kautsky, [qui] qui ont reçu [leur légitimité] du mouvement des travailleurs, des comités d’usine et des comités ouvriers.» Il ajoute que «Ebert a finalement lâché les Freikorps contre les dirigeants de l’insurrection», ce qui a conduit à l’assassinat de Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht. Il ne propose pas l’assassinat comme un moyen de sortir de la situation qui prévaut actuellement dans le Labour, mais il est très clairement désespéré.
Une scission de droite ?
L’une des possibilités est que la droite finisse par scissionner du parti pour constituer une nouvelle formation à la suite de l’élection de la direction. Owen Smith lui-même a déclaré : «Je pense qu’il y a toutes les chances que le parti se divise si Jeremy remporte cette élection.» Bien sûr, à ce stade, personne ne va admettre qu’il à l’intention de faire scission. Mais c’est toujours le cas dans une situation de guerre : tout le monde continue de parler de paix jusqu’au moment de déclarer la guerre.
Il est toutefois frappant de constater à quel point la droite envisage ouvertement cette possibilité. Il a été révélé que Stephen Kinnock était au centre d’une discussion portant sur une scission de 150 députés du Labour pour créer un nouveau parti. Un tel parti, qu’importe s’il parvient ou non à garder le nom «Labour» serait en mesure de devenir l’opposition officielle (le plus grand parti d’opposition) et donc de recevoir environ 4 millions £ par an de subventions parlementaires. Kinnock envisage la possibilité d’une scission rapide afin de disposer de suffisamment de temps pour constituer un parti de «centre-gauche», c’est-à-dire pro-capitaliste, avant la tenue de nouvelles élections générales.
Il est cependant toujours possible que la droite hésite et entretienne l’espoir de renverser Corbyn à un moment donné, où que certains quittent le parti tandis que d’autres y restent. Tout comme George Eaton l’a écrit dans le New Statesman: «Nombreux sont ceux qui croient aujourd’hui que ce n’est qu’à travers une élection générale que la lutte interne du parti sera résolue.» Ce qu’ils veulent dire par là est qu’ils attendent que la Première Ministre Teresa May appelle à des élections anticipées donnant la victoire aux Conservateurs pour que la droite puisse espérer vaincre Corbyn et le forcer à démissionner!
C’est espoir est vain. Il est impossible de dire aujourd’hui si Teresa May appellera oui ou non à des élections anticipées. Même s’il est peu probable qu’elle finisse son mandat en 2020 étant donné l’extrême faiblesse de son gouvernement de même que les profondes divisions au sein du Parti conservateur qu’elle n’a pu que temporairement calmer, d’importantes raisons la poussent à hésiter avant de convoquer immédiatement de nouvelles élections. Premièrement, il y a les conséquences du Brexit. La stratégie actuelle des capitalistes est de faire trainer les choses en longueur autant que possible et d’espérer que l’occasion se présente de faire marche arrière. Ce n’est pas un thème sous lequel Teresa May pourrait battre campagne et espérer remporter une élection générale !
L’autre problème, c’est qu’en dépit des sondages actuels qui donnent une avance aux Conservateurs, Jeremy Corbyn pourrait bien remporter les élections pour autant qu’il se batte avec un clair programme de classe anti-austérité. C’est un scénario de cauchemar pour la classe capitaliste, en particulier dans le contexte d’une crise économique grandissante, car cela pourrait réveiller l’appétit de la classe ouvrière pour une alternative à l’austérité, en conséquence de quoi un tel gouvernement pourrait être mis sous pression pour adopter des mesures radicales menaçant le système capitaliste.
Aucun compromis avec la droite !
Même si la droite décide de temporairement raccrocher les gants et d’attendre pour à nouveau partir à l’offensive, cela ne signifierait pas pour autant un retour à la trêve armée qui existait il y a un an. La guerre civile qui a commencé exige une conclusion, presque indépendamment de la volonté de ses protagonistes. Le chef adjoint du Parti travailliste, Tom Watson, a décrit le genre de mesures que la droite défendrait, y compris l’élection du cabinet fantôme (sorte de gouvernement d’opposition) directement par les députés (ce qui laisserait Jeremy Corbyn isolé au beau milieu d’une équipe de droite) ou encore le retour au précédent système de «collège électoral» pour l’élection du président du parti, en donnant un tiers des voix aux députés et députés européens travaillistes. Cela rendrait beaucoup plus facile à l’appareil de garder en main le contrôle du parti. Mais le changement de l’équilibre des forces au sein du Labour leur rend la tâche très difficile. Ils sont également terrifiés d’être pris un par un dans un processus de désélection (de révocation des élus). Les événements peuvent donc pousser la droite sur la voie de la scission même si elle craint que son nouveau parti ne dispose que d’une base sociale extrêmement limitée.
Ce qui est essentiel, c’est qu’à la différence de la première victoire de Corbyn en 2015, il n’y ait plus de tentatives de la gauche de trouver un compromis avec les blairistes. Le mouvement autour de Corbyn doit au contraire être organisé et construit afin de consolider et d’accroître les gains jusqu’ici obtenus.
Un programme anti-austérité sans équivoque doit être adopté et les députés travaillistes doivent y souscrire comme condition préalable pour siéger comme membre du parti. A cela doit être combiné l’introduction d’une procédure de resélection obligatoire permettant aux sections locales du parti de décider démocratiquement de celui qui se tiendra au Parlement en leur nom. La conférence de la fédération syndicale UNITE a adopté une motion proposée par un membre du Socialist Party appelant à la resélection obligatoire. UNITE doit maintenant faire campagne pour que cela soit effectivement adopté lors de la prochaine conférence du Parti travailliste.
Ceux qui, à gauche, craignent une scission de la droite du Labour doivent faire face à ce que la prévention d’une telle scission nécessite: une capitulation complète devant les éléments pro-capitalistes du parti. Rien d’autre ne satisfera la droite. Cette dernière ne condescendra à s’entendre avec l’aile gauche que si on lui laisse le champ libre, si la carrière de ses représentants est protégée et, plus important encore, si le Parti travailliste se limite entièrement au cadre capitaliste de l’austérité, des privatisations et de la guerre.
Certains à gauche essayent d’ignorer cette réalité. Ils font valoir que le Labour a toujours été une grande église où les «factions belligérantes» doivent trouver des compromis. Il est vrai que la plupart de l’histoire du parti est marquée par cette «large église», sous la forme d’un parti ouvrier bourgeois.
Alors que sa direction agissait dans l’intérêt de la classe capitaliste, elle devait composer avec une base de masse à prédominance ouvrière qui, via ses structures démocratiques, a été en mesure d’exercer une influence sur l’orientation du parti. La carrière de l’aile droite dépendait de membres issus de la classe ouvrière. A contre-cœur, elle a été contrainte de tenir compte de leurs opinions. Il y avait une base matérielle derrière cette alliance, particulièrement lors de la période de reprise économique d’après-guerre, alors que le capitalisme s’est vu forcé d’accorder des réformes à la classe ouvrière.
Cette période est toutefois révolue depuis longtemps déjà. Avant même le début de la crise économique mondiale de 2008, les conquêtes sociales passées de la classe ouvrière étaient sous pression systématique, y compris sous l’effet du New Labour lorsqu’il était au pouvoir. Les blairistes sont parvenus à transformer le Parti travailliste en un parti agissant loyalement selon les désirs de la classe capitaliste. Comparer l’attitude du parti lors des guerres du Vietnam et d’Irak illustre l’ampleur de la profonde transformation de la nature du parti. Le Premier ministre travailliste Harold Wilson fut incapable d’envoyer des troupes soutenir l’impérialisme américain au Vietnam, en dépit de sa volonté de procéder de la sorte. Tony Blair, en revanche, a été en mesure de dire à George Bush: «Je serai avec vous, quoi qu’il puisse se passer.» La conférence travailliste de 2004 s’est elle-aussi placée du côté de Bush en votant massivement pour le soutien de l’occupation de l’Irak. Le parti fut imperméable à la plus grande manifestation anti-guerre de l’Histoire de Grande-Bretagne qui avait eu lieu l’année précédente.
Refonder le Labour
L’élection de Jeremy Corbyn représente une rupture essentielle dans l’impasse politique. Cela offre l’occasion de créer un parti de masse de la classe ouvrière, que ce soit ou non sous le nom de «Labour». Il s’agirait d’un grand pas en avant. Les marxistes doivent faire tout leur possible pour aider au développement d’une telle force. Un tel parti, en particulier dans ses premiers jours, serait encore une «large église», dans le sens où il contiendrait inévitablement des groupes aux approches politiques différentes. Le fil rouge devrait toutefois être l’unité contre l’austérité et en défense de mesures visant à améliorer la vie de la majorité sociale – les travailleurs et la classe moyenne.
Cela seul serait une véritable «alliance progressiste» contrairement à l’idée d’une alliance avec des forces pro-capitalistes telles que les libéraux-démocrates, comme l’a suggéré le journaliste de gauche Paul Mason. A l’opposé de cette approche, il faut unir tous ceux qui sont prêts à souscrire à un programme clairement anti-austérité. Un appel peut être lancé en direction des Verts, des organisations socialistes (parmi lesquelles le Socialist Party et la Coalition des syndicalistes et socialistes, TUSC), des syndicats non affiliés au Labour et des organismes communautaires pour se rassembler sous un même parapluie aux élections tout en conservant leurs propres identités. C’est sur une telle base fédérale que le Parti travailliste a été initialement constitué. Cette version moderne serait un vrai pas en avant et pourrait récupérer un grand nombre des près de cinq millions d’électeurs, principalement issus de la classe ouvrière, que le Parti travailliste a perdu entre 1997 et 2010. Beaucoup d’entre eux ont tout simplement arrêté de voter, d’autres ont protesté en votant pour l’UKIP, les Verts ou, dans certains cas, pour la TUSC, coalition à laquelle participe le Socialist Party.
Aux premiers jours du Parti travailliste, le Parti socialiste britannique (l’un des précurseurs du Parti communiste) était affilié au Parti travailliste. Le célèbre marxiste écossais John McLean s’est présenté aux élections pour devenir député en 1918 sous la bannière travailliste (il était aussi Consul écossais de Russie à l’époque!). Jusqu’en 1925, les membres du parti communiste pouvaient avoir une double adhésion. Jusqu’à la victoire du blairisme, il y a toujours eu des forces marxistes et trotskystes significatives au sein du Parti travailliste. Lorsque la Militant Tendency (Tendance Militant, qui existe aujourd’hui sous le nom de Socialist Party), a été expulsée du labour, nous avions prévenu que la direction avait franchi le Rubicon et que le processus se terminerait par l’expulsion des voix de la classe ouvrière.
Il est très positif que Jeremy Corbyn semble globalement en accord avec cette approche des choses. Il a à juste titre rejeté le dossier douteux de Tom Watson paru dans The Observer le 14 août comme étant un «non-sens» et en déclarant: «Nous ne pouvons gagner une élection générale qu’en gagnant des gens qui ne votent pas ou qui votent pour un autre parti. Si quelqu’un a politiquement évolué au point de rejoindre le Parti travailliste, qu’il ait été autrefois membres des Lib-Dems, des Verts ou d’autre chose, c’est très bien. Bienvenue à bord.» Interrogé sur la possibilité que le Socialist Party s’affilie au Labour, il a ajouté: «Je me réjouis d’avoir une conversation avec Peter [Taaffe, secrétaire général du Socialist Party] à un moment donné.»
Cependant, Pati travailliste refondé ne pourrait pas se contenter d’être un rassemblement des forces politiques de gauche. Il lui serait aussi vital de restaurer les droits démocratiques des syndicats au sein du parti. Un aspect central de la destruction des structures démocratiques du labour fut l’affaiblissement du rôle des syndicats. Le Parti travailliste a été créé par les syndicats dans le but de disposer d’un parti spécifique pour la classe ouvrière. Aujourd’hui, les syndicats restent les plus grandes organisations démocratiques de Grande-Bretagne. Elles impliquent plus de six millions de travailleurs. L’action collective des syndicats a été le principal moyen par lequel les travailleurs ont été en mesure de lutter contre l’austérité. Si les dirigeants syndicaux de la TUC (Trade Union Confederation) avaient été prêts à appeler à une action de grève coordonnée contre l’austérité, à commencer par une grève générale de 24 heures, le gouvernement serait tombé. Pourtant, les syndicats sont restés sans voix politique de masse depuis des décennies. Restaurer leur rôle dans le parti ne doit toutefois pas signifier de reproduire à l’identique le «vote par blocs» du passé, parfois utilisé de manière antidémocratique par les sommets syndicaux. Il faudra assurer la participation active des syndicalistes de base. La reconstruction d’une section jeunes massive et démocratique serait également posée.
Les scissions ont une base de classe
Ceux qui excluent l’arrivée d’une scission du Parti travailliste sur des lignes de classe sont les vrais utopistes. Imaginer qu’il soit possible pour Jeremy Corbyn de s’accrocher à la présidence jusqu’à 2020 en mettant la droite en sourdine, comme le font certains à la direction de «Momentum» (un mouvement favorable à Corbyn), c’est entretenir des illusions. Il existe des précédents de scissions au sein du Labour qui ont été, en fin de compte, des manières de protéger les intérêts de la classe capitaliste. En 1981, la scission qui a constitué le Parti social-démocrate (SDP) n’a pas fait beaucoup pour les carrières ministérielles de ceux qui sont partis, mais elle a joué un rôle important pour la classe capitaliste. En emportant 11,5% des voix travaillistes aux élections générales de 1983, elle a contribué, avec la guerre des Malouines, à assurer la défaite du Parti travailliste et Thatcher a pu gagner un second mandat.
En 1931 s’est présenté un cas différent. A l’époque, 15 députés travaillistes, dirigé par le Premier ministre travailliste Ramsay MacDonald, ont fait scission pour constituer un gouvernement avec les Libéraux et les Conservateurs qui a mis en œuvre une offensive sauvages contre la classe ouvrière. L’expérience comprend un certain nombre de leçon pour aujourd’hui. Herbert Morrison, grand-père de Peter Mandelson, a été invité à rester dans le Labour au lieu de rejoindre la scission avec les traîtres afin défendre les intérêts du capitalisme au sein du parti. Sans aucun doute, même si la grande majorité des députés travaillistes quitte le parti, il ne s’agira pas d’une scission chimiquement pure. Certains à droite resteront dans un Labour dirigé par Corbyn pour des raisons identiques à celles de Morrison à l’époque. Il serait donc encore nécessaire pour Corbyn et ses partisans d’exiger de tous les députés travaillistes de souscrire officiellement à un programme anti-austérité qui les engage à défendre cette politique.
De nombreux partisans travaillistes craignent qu’une scission n’affaiblisse le parti. En fait, ce serait très exactement le contraire. Certes, en cas de scission, il y aurait peut-être moins de députés travaillistes à Westminster, du moins dans un premier temps. Mais un groupe de députés même limité menant campagne sans relâche contre l’austérité et en défense des travailleurs en lutte ferait beaucoup plus pour la lutte contre les Conservateurs que 232 députés «travaillistes» dont la majorité voteraient en faveur de l’austérité, des privatisations et de la guerre.
Un Parti travailliste anti-austérité pourrait rapidement engranger des gains électoraux de façon similaire à ce qu’a connu Syriza en Grèce lors de sa victoire de janvier 2015 en défendant à l’époque un programme anti-austérité. En Espagne aussi, la gauche a récemment obtenu des gains rapides sur le terrain électoral. La situation n’est pas directement comparable mais, entre 1931 et 1935, le Labour avait gagné 13,5% aux élections. En 1931, les suffrages travaillistes avaient diminué de près de deux millions par rapport aux élections qui s’étaient tenues deux ans auparavant, mais aux élections générales de 1935, le Labour était de retour au niveau de 1929. Cela, bien sûr, reflétait la colère contre la trahison de Ramsay MacDonald et sa clique. En substance, le rôle d’un nouveau parti de «centre gauche» ne sera pas différent au groupe de MacDonald, il ferait bloc au parlement avec un gouvernement conservateur faible contre Corbyn et la classe ouvrière.
L’impact d’un parti de gauche
Un sondage YouGov (2 août) a récemment été utilisé pour démontrer l’impossibilité d’une scission, mais il ne fait rien de la sorte. Il suggère que si la droite fait scission et que Corbyn conserve le nom de «Labour», la gauche recevrait 21% des voix, alors qu’une scission de gauche où la droite garderait le nom du parti recevrait 14% des voix. La différence relativement faible entre ces deux chiffres exprime l’affaiblissement de la fidélité traditionnelle envers le Labour qui a pris place au cours des décennies. La loyauté au «label» travailliste est très faible. De toute évidence, 21% est préférable à 14%, mais dans ces circonstances, ce serait aussi un très bon début pour la construction d’un nouveau parti autour d’un programme anti-austérité.
Un tel parti pourrait rapidement gagner du terrain électoralement en offrant une alternative aux coupes budgétaires sans fin, aux privatisations et à la misère croissante. En revanche, les présidences du parti de Brown et Miliband ont démontré qu’il existe un appétit limité pour un parti travailliste défenseur d’une austérité «light» et qui appliquerait essentiellement une version édulcorée des politiques conservatrices. Mais même si un Parti travailliste de droite était en passe de conquérir le pouvoir, ce serait pour faire quoi ? Si c’est pour appliquer une politique capitaliste, alors ce sera au détriment des intérêts de la majorité dans la société.
En revanche, un parti dirigé par la gauche, sous le nom de Labour ou sous un autre, serait en mesure de faire avancer les intérêts des travailleurs dès le premier jour, et d’engranger des gains électoraux en raison de cela. Owen Smith a défini ce qui le sépare de Corbyn en disant que toute la question était de savoir si le changement devait venir de l’intérieur ou de l’extérieur du Parlement. Il a notamment reproché à Corbyn de parcourir le pays pour construire un mouvement et de ne pas s’inquiéter des élections.
Tout d’abord, Owen Smith n’a aucune preuve pour affirmer que Jeremy Corbyn ne se soucie pas des élections. Mais suggérer qu’aucun changement n’a été acquis en dehors du parlement depuis l’instauration du suffrage universel est une preuve de complet «crétinisme parlementaire». Les exemples sont innombrables. C’est la grève Ford Dagenham qui a imposé la Loi sur l’égalité salariale entre hommes et femmes adoptée par le Parlement. C’est la menace d’une grève générale qui a forcé la libération des dockers emprisonnés en 1972. Ce sont les 18 millions de personnes qui ont refusé de payer la Poll Tax qui ont mis fin au règne de Margaret Thatcher et qui ont forcé le gouvernement de John Major d’abolir la taxe.
Comme pour résumer leur idiotie, un des films produit par l’aile droite (Saving Labour) commence en expliquant platement que manifester n’a jamais changé quoi que ce soit. Ce slogan était imposé sur deux manifestations à Liverpool, l’une en soutien de Corbyn, l’autre en soutien au conseil municipal de Liverpool en 1984. A l’époque, le conseil municipal travailliste, dans lequel les partisans de la Tendance Militant ont joué un rôle central, a arraché 60 millions £ du gouvernement conservateur et a été en mesure de construire 5.000 logements sociaux, d’ouvrir six nouvelles crèches, quatre collèges, six centres de loisirs et bien plus encore. Il n’aurait pas été possible de faire tout cela en passant tout simplement par le conseil. Une approche audacieuse à l’intérieur du conseil municipal combinée à des manifestations massives, au secteur public en grève générale et à la grève des mineurs qui se déroulait en même temps, c’est tout cela qui a forcé le gouvernement Thatcher à faire de sérieuses concessions.
L’année suivante le conseil de Liverpool et celui de Lambeth ont été défait en raison de la trahison de Neil Kinnock et de la direction du Parti travailliste. Mais ses réalisations sont toujours là, en briques et en mortier. Jeremy Corbyn, qui a soutenu la lutte du conseil municipal de Liverpool à l’époque, a commis une erreur en n’y faisant pas référence dans son discours au récent meeting de masse tenu à Liverpool. Il n’a pas jusqu’à présent pas pris de position sans équivoque concernant le fait que les conseils municipaux travaillistes doivent refuser d’appliquer l’austérité et les coupes budgétaires, en dépit des conférences des syndicats UNITE et GMB appelant à les conseils municipaux à adopter des budgets municipaux sans aucune coupe budgétaire.
Imaginez si, après presque une décennie de coupes budgétaires brutales qui ont laissé les budgets municipaux exsangues (en moyenne de 40% moindres à ceux de 2008), un certain nombre de conseils – même une poignée – refusaient de mettre en œuvre les réductions budgétaires et se soutenaient comme l’avaient fait à l’époque les conseils de Poplar, Liverpool, Lambeth et Clay Cross. Imaginez si ces conseils disposaient du soutien sans faille du parti de Jeremy Corbyn au Parlement, quel que soit son nom. Une telle lutte – étant donné toute la colère accumulée contre l’austérité – serait très populaire. Il serait non seulement possible de gagner, mais aussi d’organiser la lutter contre les conservateurs pour forcer la tenue de nouvelles élections à partir desquelles serait posée la possibilité de l’arrivée au pouvoir du parti de Corbyn. Il s’agit juste d’un exemple de la manière dont un parti de gauche au Parlement, même avec tout d’abord un petit nombre de députés, pourrait agir en tant que porte-voix de la classe ouvrière et du mouvement anti-austérité, déplaçant ainsi la balance de forces dans la société dans le sens de la classe ouvrière.
Renverser le capitalisme
Le Socialist Party soutient Jeremy Corbyn dans son combat contre la droite et soutient chaque étape positive franchie. Mais nous cherchons également à pousser le mouvement encore plus vers la gauche en avertissant des retraites qui peuvent, à un stade ultérieur, conduire à des défaites.
Le programme électoral de 2016 de Jeremy soulève de nombreux aspects positifs qui résonnent parmi les travailleurs et sont très populaires, y compris son appel à l’instauration d’un salaire minimum de 10 £ de l’heure, sa promesse de construire un million de logements (des logements sociaux pour moitié) et d’introduire le contrôle des loyers dans le secteur privé. Ses promesses de renationalisation des chemins de fer et de fin de la privatisation des services de santé aura également un soutien généralisé. L’idée d’une banque nationale d’investissement avec 500 milliards £ à dépenser dans des investissements publics payés par l’augmentation des taxes sur «les plus hauts revenus» est la bienvenue. Dans son interview au magazine The Observer (14 août), Jeremy a réitéré son soutien à l’abolition des frais de scolarité et à la réintroduction d’une bourse d’étude.
Dans le même temps, il a cependant reculé concernant son appel initial à la nationalisation des compagnies d’énergie, plaidant maintenant uniquement pour «une participation accrue de la communauté». Malheureusement, son appel à la renationalisation des chemins de fer se limite à leur reprise en main publique quand les franchises arrivent à échéance, ce qui signifie qu’après cinq ans de gouvernement travailliste, seuls deux tiers des chemins de fer seraient sous propriété publique. Il n’a pas non plus clairement appelé à renationalisation de l’industrie de l’acier, en dépit de cette nécessité écrasante. Cela reflète une réticence à tirer toutes les conclusions qui s’imposent sur la manière de défendre les intérêts de la classe ouvrière. Il ne faut pas accepter mais bien défier ce que l’ancien conseiller économique de Jeremy Corbyn David Blanchflower a appelé «les réalités modernes du capitalisme et des marchés» (The Guardian, 2 août). Blanchflower est maintenant ardent partisan d’Owen Smith.
Les capitalistes résistent avec véhémence à un plus grand rôle de l’Etat et à l’augmentation des taxes. Pour mettre en œuvre le programme, même modeste, de Jeremy Corbyn, «l’action extra-parlementaire» sera cruciale, ce qui signifie la mobilisation active de la classe ouvrière en soutien aux politiques d’un gouvernement de gauche.
Le programme actuel de Jeremy Corbyn représente un véritable pas en avant par rapport aux politiques pro-capitalistes des précédents dirigeants travaillistes. Il se situe toutefois en deçà d’un programme socialiste. La nécessité d’un tel programme sera posée par les événements. L’expérience de SYRIZA en Grèce, où la direction d’un parti anti-austérité a capitulé sous la pression des grandes entreprises et appliqua actuellement lui-même l’austérité, démontre que vaincre l’austérité est lié à la lutte pour le socialisme.
L’austérité sans fin et les inégalités croissantes ne sont pas des accidents. Cela découle des besoins fondamentaux du capitalisme, un système où les profits de quelques-uns sont réalisés au détriment de la majorité. Cependant, l’énorme avantage de la création d’un parti de masse des travailleurs, chose maintenant à l’ordre du jour, est qu’il fournirait un forum où les travailleurs et la jeunesse pourraient discuter et débattre de la manière d’atteindre le renversement du capitalisme et la construction d’une société socialiste démocratique.



