Tag: Russie

  • 60 ans aprĂšs la Seconde Guerre mondiale

    On commémore ces temps-ci le 60ème anniversaire de la fin la Seconde Guerre mondiale. Les médias nous ont abreuvés d’articles et de témoignages historiques sur ce qui fut la plus grande boucherie à ce jour de l’histoire humaine (60 millions de morts). Un dossier de plus? Non, car les commémorations occultent trop souvent les tenants et aboutissants de cette guerre qui a changé pour près d’un demi-siècle les rapports de force au niveau mondial.

    Thierry Pierret

    La Première Guerre mondiale avait été une guerre de repartage du monde entre puissances impérialistes. Pendant des décennies, il y avait une course de vitesse entre les différentes puissances européennes pour s’emparer des différents pays d’Afrique et d’Asie. La Grande-Bretagne et la France étaient sorties gagnantes de cette course de vitesse, l’Allemagne devant se contenter des “miettes” du monde colonial.

    C’est la volonté de l’Allemagne d’imposer un repartage du monde à son avantage qui a plongé le monde dans la “Grande Guerre” en 1914. Les principaux partis sociaux-démocrates s’étaient rangés derrière le drapeau de leur propre impérialisme. C’est la Révolution russe qui a mis fin à la Grande Guerre sur le front de l’est avec l’armistice de Brest-Litovsk. Quelques mois plus tard, la révolution en Allemagne mettait fin aux hostilités sur le front occidental. Malheureusement, la révolution en Allemagne n’a pas abouti à la prise du pouvoir par les travailleurs comme en Russie. Le Parti social-démocrate (SPD) y était autrement plus puissant que les mencheviques en Russie et le jeune Parti communiste allemand (KPD) a commis des erreurs tactiques. La défaite de la révolution en Allemagne, mais aussi en Italie, en Hongrie, en Slovaquie,
 ouvre désormais la voie à une période de contre-révolution en Europe qui sera le prélude à une nouvelle conflagration mondiale.

    La montée du fascisme

    La petite-bourgeoisie était prise en tenaille entre le mouvement ouvrier d’une part, la grande industrie et les banques d’autre part. La faillite les guette et, avec elle, la nécessité de vendre leur force de travail pour vivre. Ils aspirent au retour à l’ordre, c’est-à-dire à la situation qui prévalait avant l’industrialisation, à savoir une société de petits producteurs. Les fascistes les séduisent avec leurs diatribes contre “le capital financier” et contre le communisme. La crise économique des années trente verra les secteurs décisifs de la bourgeoisie soutenir le fascisme pour rétablir ses profits en écrasant le mouvement ouvrier et en forçant l’ouverture des marchés extérieurs aux produits allemands.

    Il est donc faux de prétendre que la mégalomanie de Hitler et de Mussolini serait la cause de la Seconde Guerre mondiale. En fait, le programme des partis fascistes correspondait aux nécessités du capitalisme en période de crise aigüe. La seule façon pour la bourgeoisie des pays vaincus (Allemagne) ou mal desservis par la victoire (Italie) de restaurer sa position, c’était d’imposer un nouveau partage du monde par la guerre. Or seuls les partis fascistes étaient déterminés à le faire là où les partis bourgeois classiques étaient soucieux de préserver les équilibres internationaux. Il y a donc un lien entre le fascisme et la guerre dans la mesure où ce sont deux conséquences parallèles de la crise du capitalisme en décomposition.

    Capitulation du mouvement ouvrier

    La victoire du fascisme n’était pas inéluctable. En Allemagne, les partis ouvriers et leurs milices – SPD et KPD – étaient plus puissants que le Parti nazi. Mais le SPD refusait l’affrontement sous prétexte de respecter la légalité là où les nazis n’en avaient cure. Plutôt que d’organiser les travailleurs, il préférait s’en remettre au Président Hindenburg comme “garant de la démocratie”.

    Quant au KPD, il suivait la ligne de Moscou qui professait la théorie absurde selon laquelle la social-démocratie et le nazisme étaient des frères jumeaux (théorie du social-fascisme). Le KPD a même organisé des activités en commun avec les nazis! Cette attitude des dirigeants des deux grands partis ouvriers allemands a complètement désorienté les travailleurs allemands face aux nazis. En 1933, Hitler prenait le pouvoir sans coup férir avec la bénédiction de Hindenburg


    Le Pacte germano-soviétique

    L’arrivée au pouvoir de Hitler – dont Staline était pourtant largement responsable – a semé la panique à Moscou. Pour assurer sa défense, l’URSS va désormais privilégier une stratégie d’entente avec la France et la Grande-Bretagne. Pour ce faire, il ne fallait rien faire qui puisse effrayer les bourgeoisies française et britannique. Par conséquent, les partis communistes occidentaux devaient adopter un profil bas et privilégier des alliances non seulement avec la social-démocratie, mais aussi avec la “bourgeoisie progressiste”.

    Cette stratégie débouchera sur la formation de gouvernements de front populaire en France et en Espagne en 1936. Pour maintenir coûte que coûte ce front de collaboration de classe, le PC n’hésitera pas à casser la grève générale en France et à liquider la révolution en Espagne. Mais en 1938, Paris et Londres repoussent l’offre de Staline d’agir de concert pour contrer les visées de Hitler sur la Tchécoslovaquie.

    Staline change alors son fusil d’épaule et signe le Pacte germano-soviétique en 1939. Il croit ainsi assurer ses arrières. Bien plus qu’un pacte de non-agression, le Pacte germano-soviétique comportait un protocole secret qui organisait le dépeçage de l’Europe de l’est entre l’Allemagne et l’URSS. Alors que les bolcheviques avaient rendu publics tous les traités secrets en 1917, Staline renouait avec les pires méthodes des puissances impérialistes.

    Une nouvelle guerre de repartage

    La Seconde Guerre mondiale fut, en Europe de l’Ouest, en Afrique et en Asie, une nouvelle guerre de repartage du monde. L’Allemagne, qui avait été privée de toutes ses colonies en 1918, voulait prendre sa revanche. L’Italie, mal desservie par sa victoire en 1918, avait annexé l’Albanie et envahi l’Ethiopie en 1935. Mais l’Ethiopie était le seul pays africain qui restait à coloniser. L’Italie ne pouvait plus étendre son empire colonial qu’en empiétant sur les colonies françaises et britanniques. Il ne faut pas chercher ailleurs les raisons de son entrée en guerre aux côtés de l’Allemagne en 1940. En Asie, le Japon, après avoir annexé la Corée et la Mandchourie, s’était lancé à la conquête de la Chine toute entière. Il lorgnait sur les colonies françaises, britanniques et hollandaises en Asie. Mais les Etats-Unis s’opposaient aux prétentions impériales de Tokyo en Asie et lui ont coupé son approvisionnement en pétrole.

    D’où l’attaque sur Pearl-Harbour en décembre 1941 pour avoir les mains libres dans le Pacifique. Pearl-Harbour a fourni le prétexte rêvé au Président Roosevelt pour engager les Etats-Unis dans la guerre, puisque le Japon était un allié de l’Allemagne et de l’Italie. La guerre est désormais mondiale. Elle oppose les puissances impérialistes établies (Etats-Unis, France, Grande-Bretagne) aux forces de l’Axe (Allemagne, Italie, Japon), c’est-à-dire l’axe des mal servis du partage colonial. Mais entre-temps, il y a eu l’offensive allemande contre l’URSS en juin 1941. Cette nouvelle donne va non seulement changer le cours de la guerre, mais aussi en changer partiellement la nature.

    La victoire soviétique

    Staline avait cru gagner un répit de 10 ans en signant le Pacte germano-soviétique. Il en avait également profité pour ramener la frontière occidentale de l’URSS à celle d’avant 1914 (annexion de l’est de la Pologne, des pays baltes, de la Bessarabie). En revanche, l’invasion de la Finlande se solda par un fiasco. Staline, dans sa lutte acharnée contre l’opposition de gauche, avait liquidé tous les officiers qui avaient été formés par Trotsky. Privée de ses meilleurs officiers, l’Armée rouge s’est révélée incapable de venir à bout de l’armée finlandaise. Hitler en a conclu que l’Armée rouge n’était qu’un tigre de papier et qu’elle s’effondrerait sous les coups de la Werhmacht. Or les nazis, dans leur entreprise de destruction systématique du mouvement ouvrier organisé, ne pouvaient pas tolérer l’existence de l’état ouvrier – tout bureaucratisé qu’il fût – soviétique. Le 22 juin 1941, la Werhmacht envahissait l’URSS à la stupéfaction de Staline qui croyait dur comme fer au Pacte. Les premières semaines de l’offensive ont semblé donner raison à Hitler.

    L’Armée rouge, mal préparée, privée d’officiers compétents, s’effondrait sous les coups de butoir de la Wehrmacht, perdant des centaines de milliers de prisonniers et de tués en quelques jours. Mais Hitler avait sousestimé la capacité de résistance et d’auto-organisation de la population russe.

    Surtout, Hitler avait sousestimé le potentiel d’une économie planifiée même bureaucratiquement. Jamais un pays relativement arriéré comme l’URSS n’aurait pu fournir un tel effort de guerre dans les conditions d’une économie de marché. L’Armée rouge a pu stopper l’offensive hitlérienne avant de partir à la contre-offensive.

    L’URSS payera sa victoire de quelque 27 millions de morts. Les pertes sont d’autant plus lourdes que le régime nazi se déchaîne contre les “sous-hommes” (Juifs, Slaves, Tsiganes). Si l’antisémitisme du régime avait d’abord eu pour but de désigner un bouc-émissaire pratique aux souffrances de la population, il acquiert dès lors une dynamique propre qui conduira à la Solution finale.

    Mais cette pulsion mortifère exprime surtout l’impuissance des nazis à retourner la situation en leur faveur. A partir de ce moment, la guerre change de nature. On assiste à une course de vitesse entre l’Armée rouge et les anglo-américains. Ceux-ci ne se décident à ouvrir un nouveau front (débarquement de juin 1944) que pour endiguer l’avance soviétique. Après la capitulation allemande, cette course se poursuivra en extrême-orient où les Etats-Unis n’hésiteront pas à utiliser l’arme atomique pour contraindre le Japon à capituler sans délai et éviter une partition du Japon comme en Allemagne et en Corée.

    La révolution met fin à la guerre

    Les dirigeants américains et britanniques envisagent même de faire une paix séparée avec l’Allemagne pour repousser l’Armée rouge. Mais les nazis s’obstinent à vouloir mener la guerre sur les deux fronts et le putsch contre Hitler échoue. Surtout, les travailleurs n’auraient pas toléré la prolongation de la guerre et sa transformation en guerre est-ouest. En Italie, en France, en Yougoslavie, en Grèce, les partisans communistes libèrent la majorité du territoire. Ils sont une force avec laquelle les alliés doivent compter. La prise du pouvoir par les communistes était possible dans plusieurs pays, y compris à l’ouest. Mais Staline le leur a interdit et a ordonné aux partisans de rendre leurs armes en échange d’assurances de la part des Alliés. On peut dire que le stalinisme a joué le même rôle contre-révolutionnaire en 1945 que la social-démocratie en 1918. Dans les pays occupés par l’Armée rouge, nombre de communistes actifs dans la résistance sont liquidés car jugés peu fiables. Alors que c’est la révolution (ou la menace de révolution) qui a empêché les Alliés de continuer la guerre contre l’URSS, Staline a cru pouvoir opter pour la coexistence pacifique avec l’impérialisme (accords de Yalta). Mais Staline ne recueillera pas davantage les fruits de sa “modération” que dans les années trente. En 1949, les puissances impérialistes créent l’OTAN pour endiguer l’URSS et le monde bascule dans la guerre froide. Pendant près d’un demi-siècle, la violence de l’impérialisme sera contenue par l’existence du bloc de l’est. Mais les tares du stalinisme ont fini par avoir raison des états ouvriers bureaucratisés. La chute de l’URSS ouvre la porte à une nouvelle ère de tensions interimpérialistes.

  • OuzbĂ©kistan. L’armĂ©e massacre des centaines de manifestants

    Ouzbékistan

    La dictature de Karimov, soutenue par les USA, se déchaîne dans un bain de sang. A la mi-mai, au moins 700 personnes ont été brutalement massacrées par les troupes gouvernementales en Ouzbekistan. Il est difficile d’avoir des informations précises, l’Ouzbekistan étant l’un des Etats les plus dictatoriaux au monde, et ce même avant ce massacre. Les transmissions télévisées locales ou étrangères y sont dorénavant bloquées.

    Rob Jones

    Les troubles ont débuté quand un groupe de protestataires armés a décidé de prendre d’assaut la prison d’Andijan après avoir demandé sans succès la libération de centaines de prisonniers. Ceux-ci, libérés, allèrent manifester devant l’hôtel de ville. L’armée ouvrit alors le feu, tuant par centaine à Andijan, et répéta le massacre dans d’autres villes, au fur et à mesure que les manifestations s’étendaient.

    Le président ouzbek, Karimov, a déclaré qu’il s’agissait d’un soulèvement organisé par des fondamentalistes islamistes. Cela fait des années qu’il utilise la peur d’une croissance des fondamentalistes dans la région, en particulier dans la région de la vallée de Ferganna, comme justification de la répression de toute forme d’opposition à ses lois dictatoriales. Ce n’est pas surprenant que dans unedes nations les plus pauvres au monde, la patience des masses se transforme en colère et aboutisse à des actions de grande ampleur. Les dernières que les rues ont vues se sont tragiquement terminées dans un bain de sang. Les travailleurs et les pauvres d’Ouzbekistan ont désespérément besoin d’organisations de masse capables de s’ opposer à Karimov et de lutter pour des droits démocratiques et un changement radical du système.

    Les premiers rapports indiquaient que les manifestants demandaient à la Russie d’être un intermédiaire dans les négociations. Le ministre russe des affaires étrangères a rapidement exprimé son souhait de voir le conflit se régler par n’importe quel moyen, tout en qualifiant le régime Ouzbek de « doux ».

    L’Angleterre et les USA quant à eux, portent une bonne part de responsabilité pour ce qui c’est passé. Karimov est allié des Etats-Unis, membre de la “coalition” partie mener la guerre en Irak et de la « guerre au terrorisme ». Londres et Washing-ton ont ainsi ignoré ses méthodes dictatoriales. Le gouvernement de Blair a même récemment révoqué Craig Murray, ambassadeur britannique à Tachkent, pour avoir émis des critiques trop franches à l’encontre de Karimov. Murray explique que les puissances occidentales acceptent ces méthodes répressives car Karimov a autorisé les USA d’ établir une base aérienne, et les ressources en énergie dans le pays intéressent également ces puissances. Les Etats-Unis demandent simplement aujourd’hui que les deux parties règlent leurs problèmes « pacifiquement ».

    Il est vrai que les fondamentalistes islamistes construisent une base dans la région, et beaucoup de ceux trouvés dans l’Afghanistan voisin étaient Ouzbeks. Même avant la chute de l’Union Soviétique, la vallée de Ferganna, la région la plus densément peuplée de l’Asie centrale, était un refuge pour beaucoup de fondamentalistes. Mais c’est l’extrême pauvreté de la région résultant de la restauration du capitalisme, ainsi que les méthodes répressives, qui ont causé le désespoir qui mène autant de gens à soutenir les fondamentalistes.

    D’autre part, plusieurs rapports font état d’un soutien secret aux fondamentalistes provenant d’une partie de la clique dirigeante du pays. Pensant que tôt ou tard, Karimov sera renversé par une version ouzbèke de la “révolution qui a eu lieu dans la Kirghizie voisine”, ils se préparent ainsi à être du côté des vainqueurs.

    Pour l’instant, il est inévitable que jusqu’à ce qu’une force capable de mener la lutte pour la libération générale de cette région du capitalisme émerge, il y aura encore des heurts et une répression brutale.

  • Les derniers acquis de la RĂ©volution d’Octobre attaquĂ©s en Russie

    C’était en janvier-février de cette année, à Saint-Pétersbourg et ailleurs en Russie; des dizaines de milliers de personnes étaient descendues dans les rues, bloquant voies ferrées, autoroutes,
 Tout en réclamant la démission de Vladimir Poutine. Pour la première fois depuis son accession au pouvoir en 1999, les sondages faisaient apparaître une majorité de russes le contestant.

    Nicolas Croes

    En cause, ce que l’on appelle la " monétarisation " des allocations. Les pensionnés bénéficiaient jusqu’alors de 50% de réduction pour leurs loyers et des transports en commun gratuits, avantages dont bénéficiaient également plusieurs secteurs de l’Etat. Tout cela fut supprimé et remplacé par une compensation financière ridicule. Les mobilisations qui suivirent furent les plus massives de l’ère Poutine, et prirent un tournant particulier, car ces attaques visaient les derniers acquis sociaux issus de la période soviétique, et se déroulaient très exactement un siècle après la révolution avortée de 1905. Ce n’était pas seulement Poutine qui était décrié, mais également le régime, et, de plus en plus, le capitalisme en lui-même.

    Différentes études parues lors des élections présidentielles de 2004 notamment avaient déjà permis de démontrer que l’offensive extrêmement violente menée à l’encontre du passé soviétique de la Russie n’avait pas abouti aux résultats attendus. Malgré le flot ininterrompu depuis 1991 d’articles, d’analyses d’archives, de livres ou d’émissions télévisées ou radio dénonçant le "communisme" et promouvant les "valeurs marchandes démocratiques", 57% des Russes veulent revenir au régime soviétique, même dégénéré et bureaucratisé comme il l’était.

    Quinze années après la chute de l’Union Soviétique, 45% de la population considèrent encore ce système comme meilleur que l’actuel, et 43% veulent une "révolution bolchévique". Quant à l’opinion des russes concernant les privatisations, 80% les définissent comme criminelles
 Il faut toutefois nuancer cela, les jeunes n’ayant pas ou peu connu l’URSS sont de loin plus perméables à la propagande du Kremlin actuel.

    Les raisons d’un tel sentiment, malgré l’absence de démocratie ouvrière que connaissait l’URSS depuis le milieu des années vingt? C’est qu’à côté de la bureaucratisation de la société sortie de la révolution d’octobre subsistaient encore des acquis de cette révolution. Mais ceux-ci n’étaient plus que l’ombre de ce qui fut décidé à l’origine. On trouve à ce sujet d’intéressantes données dans le livre de Boukharine et Préobrajensky L’ABC du Communisme, publié en 1919. Ainsi, il était interdit d’utiliser le travail des mineurs âgés de moins de 16 ans, alors qu’ils étaient encore envoyés dans les mines en Belgique. Ceux-ci étaient graduellement retirés du travail et, tout en assurant leur vie matérielle, placés dans des écoles. Les femmes enceintes, ou ayant accouché, recevaient une allocation spéciale égale à leurs appointements, pour tout le temps de leur inactivité, ainsi qu’un subside supplémentaire pour les soins à apporter à l’enfant. De plus, les journées de travail étaient fixées à un maximum de 8 heures, moins pour les travaux plus pénibles, qui étaient par ailleurs interdit pour les adolescents et les femmes.

    Il existe une multitude d’exemples, comme l’assurance en cas d’accident, qui permettait d’indemniser toute la famille,
 Les malheurs que connurent les travailleurs russes à ce moment n’étaient pas dus à de mauvaises lois, mais à une grande insuffisance découlant du blocus décrété par les puissances impérialistes et de la guerre civile.

    Tout cela peut se réduire au fait que la priorité n’était pas de faire du profit. Il y eut durant les premières heures du régime soviétique un réel accent sur le bien-être des travailleurs, et ce en dépit de l’isolement, de la guerre et de la famine. Non pas secondairement et dans le seul but de justifier le pouvoir accaparé par la bureaucratie comme ce fut le cas sous Staline et ensuite, mais tout simplement parce que là est le seul objectif du socialisme.

  • 120e anniversaire de la fondation du POB. Leur socialisme et le nĂŽtre

    120e anniversaire de la fondation du POB

    Pour le centenaire de sa création, le slogan mis en avant par le PS était "100 ans de socialisme". 20 ans plus tard, les dirigeants du PS ne jugent plus utile de faire référence au socialisme, et parlent de "120 ans de progrès social"
 Cela pourrait être vu comme la parfaite confirmation de la thèse selon laquelle il fut un temps où les intérêts de la classe ouvrière étaient réellement défendus par la social-démocratie. Rien n’est pourtant moins certain.

    Nicolas Croes

    La création d’un parti ouvrier était un pas en avant, mais la direction sociale-démocrate fut d’emblée gênée par la référence au socialisme. On préféra dès lors parler de Parti Ouvrier Belge, "ouvrier" étant moins contraignant que le terme de "socialiste", qui, beaucoup plus qu’aujourd’hui, faisait directement référence à un changement radical de la société: d’un système de production géré pour et par une infime minorité d’exploiteurs vers une gestion collective des moyens de production dans l’intérêt de tous.

    Fossé entre le programme minimum et l’objectif du socialisme

    Le choix du nom reflète d’ailleurs bien l’orientation suivie par la social-démocratie. Le congrès de fondation du POB fut un rassemblement de groupes hétéroclites, et il n’y eut aucune confrontation programmatique, les différentes revendications avancées furent donc extrêmement basiques. Le futur Parti Socialiste se développa uniquement autour de projets compatibles avec la "démocratie" bour-geoise, tels que le suffrage universel et la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Et de fait, il n’y eut jamais vraiment de réflexions sur la future société socialiste, même si tout un tas de problème se voyaient relégués à cet avenir dont les dirigeants ne voulaient pas parler. Les travailleuses, par exemple, n’eurent pendant longtemps comme unique réponse à leurs problèmes que l’assurance que l’émancipation des femmes se ferait naturellement sous le socialisme. Quant à savoir comment et que faire en attendant


    De plus, le mouvement ouvrier ne fut jamais vu par la direction du POB comme autre chose qu’un outil qu’il fallait contrôler. Jamais il ne fut question de donner un appui à la légitime révolte des travailleurs, et lorsqu’un an à peine après sa fondation éclatèrent les grèves spontanées de 1886, le POB déclara qu’elles étaient "prématurées" et qu’il ne fallait pas les supporter.

    Mais le parti se renforça, étant à l’époque la seule organisation politique ouvrière en Belgique, et son discours prôna de plus en plus clairement l’entrée au gouverne-ment, l’entente avec les libéraux, et en définitive l’hostilité envers la lutte des classes.

    Soutien du POB à la guerre impérialiste

    Arriva alors la première guerre mondiale. Tout naturellement, à l’instar de la quasi-totalité de ses organisations sƓurs à l’étranger, la social-démocratie belge se rangea derrière sa bourgeoisie nationale. Au nom du patriotisme, le POB entra dans un gouvernement bourgeois (avec catholiques et libéraux) et appela les ouvriers belges à tirer sur leurs frères allemands. Pourtant, quelques mois plus tôt, promesse avait été faite d’éviter à tout prix une guerre qui ne servait que les intérêts des capitalistes. Mais que valent l’internationalisme et la solidarité face à cette entrée au gouvernement tant désirée et au nom de laquelle toute la politique sociale-démocrate avait été subordonnée


    A tel point d’ailleurs qu’Emile Vandervelde, futur président du POB, se rendit en Russie en 1917 afin d’exhorter les soldats russes à bout de souffle à continuer le combat plutôt que de penser à la révolution socialiste. Il dut pourtant les remercier d’avoir accordé à ses paroles leur juste valeur, car c’est avant tout grâce à la révolution russe et à la vague révolutionnaire qui déferla ensuite en Europe que le suffrage universel fut appliqué en Belgique. Suffrage universel qui profita au POB, mais fut utilisé par la bourgeoisie pour évacuer la pression née de l’émancipation des travailleurs russes. Les capitalistes avaient grand peur d’une classe ouvrière en mouvement. Même si le Parti Ouvrier Belge pouvait être dépassé par sa base, ses dirigeants étaient fort utiles pour canaliser et annihiler la colère ouvrière. Il faut dire que les ouvriers commençaient à sympathiser avec les soldats allemands, et défilaient ensemble, le drapeau rouge remplaçant ceux du capitalisme allemand ou belge.

    Participation à des gouvernements bourgeois

    Les succès électoraux qui suivirent le suffrage universel amenèrent la social-démocratie à participer frénétiquement aux différents cabinets ministériels, même si presque aucun espace n’existait pour des réformes. Réfractaire à toute offensive de la classe ouvrière, le POB fut totalement désarmé quand survint la crise des années trente, quand la bourgeoisie jugea qu’elle ne pouvait plus se permettre de "faire joujoux". Revenu dans l’opposition, le parti se redynamisa quelque peu, et Henri de Man présenta en 1933 son célèbre Plan du Travail. Celui-ci visait à renforcer le rôle de l’Etat bourgeois dans l’économie la nationalisation de banques et d’industries, et prévoyait également une réduction du temps de travail et une augmentation des salaires. Ce plan n’était qu’un aménagement du capitalisme, mais il souleva un véritable enthousiasme et des mobilisations massives. Elles permirent au POB de revenir aux affaires en 1935, à l’intérieur d’un cabinet de coalition avec les catholiques. Prisonnier de ses habitudes et de ses dirigeants, le POB "oublia" le Plan, et mena au gouvernement une politique au strict service de la bourgeoisie. Elle ne l’oublia pas, et récompensa le parti en l’acceptant dans tous ses gouvernements jusqu’en 1940.

    Le POB, dissout au début de la Deuxième Guerre mondiale, res-surgit en 1945 sous la forme du Parti Socialiste Belge, qui devait, en 1978, se scinder sur base linguistique. Commença alors une période d’avancées sociales: devant le prestige et l’influence de l’Union Soviétique, face à une reprise économique visible par tous, il était plus sage de lâcher quelques concessions aux ouvriers.

    Le PSB ne lutta pour des réformes que dans le seul but de ne pas être dépassé par sa base, et n’hésita jamais à appliquer lui-même des mesures qu’il avait dit vouloir combattre. A titre d’exemple, la loi unique qui mena aux grèves de 60-61 fut morcelée et appliquée sous la législature suivante par le PSB que ces grèves avaient porté au pouvoir. Et quand la crise revint, le rôle du PSB, puis du PS et du SP, fut de plus en plus clairement de faire avaler aux travailleurs les plans d’austérité de la bourgeoisie.

    Mais l’activité du PS ne s’est pas limitée à cela. Hésitant à défendre les intérêts des travailleurs, la social-démocratie fut fort prompte à renforcer l’appareil répressif de l’Etat bourgeois, et ne souffrit d’aucun état d’âme en envoyant gendarmerie et matraques contre les ouvriers et les étudiants. Il est vrai que ce ne fut jamais le PS, mais bien ses ministres de l’Intérieur, bourgmestres, 
 En définitive, ces élus pour lesquels la social-démocratie s’est exclusivement battue, de tous temps, arguant que l’on ne pouvait changer la situation que par ce biais, ne furent et ne sont que des freins aux luttes des travailleurs.

    Construire un nouveau parti des travailleurs

    Nos acquis ne furent aucunement l’Ɠuvre des mandataires du PS ou de ses ancêtres, mais bien des luttes des travailleurs, des mobilisations. Contrairement aux sociaux-démocrates, nous pensons que la politique se mène prioritairement dans la rue, dans les usines, bureaux, écoles
 Nous sommes pour une démocratie ouvrière où l’ensemble de la population est associée aux décisions économiques et politiques et où les délégués sont élus et révocables à tout moment. Si pour Di Rupo la lutte s’effectue en siégeant au conseil d’administration de Dexia, pour nous, elle s’effectue à l’exemple de la Commune de Paris, de la Révolution russe, espagnole, de celle dite "des Ɠillets" au Portugal, de Mai 68, 


    Un parti ayant la volonté de défendre les travailleurs doit être sous leur contrôle, et ne peut qu’être le relais politique de leurs luttes. Jusqu’à la fin des années 80′, la base ouvrière du PS pouvait encore remplir ce rôle, mais le PS possède dorénavant plus de liens avec l’Etat bourgeois ou les entreprises qu’avec la classe ouvrière, ce qui laisse l’opportunité à la direction de suivre de plus en plus facilement les caprices de la bourgeoisie. Le PS ne peut pas être un relais politique des luttes des travailleurs, il ne peut que les étouffer par peur de perdre son pouvoir. C’est pourquoi nous appelons depuis mi-90′ à la création d’un nouveau parti des travailleurs.

    L’ouverture officielle du 120e anniversaire de la social-démocratie belge se tiendra les 18 et 19 mars prochain. Mais à cette date, ceux qui veulent réellement parler du socialisme seront dans la rue, à l’occasion de la Marche des Jeunes pour l’Emploi.

  • Russie: ‘La rĂ©volution de Coton’ secoue le regime de Poutine

    Les manifestations de pensionnés balayent le pays.

    Après la ‘révolution orange’ en Ukraine, la Russie a été frappée par ce que l’on a appellé la ‘révolution de coton’. Une énorme vague de manifestations, essentiellement de pensionnés, a ballayé le pays contre la réforme sur les subventions traditionellement payees aux pensionnés pour le logement, la santé et les transports.

    Rob Jones, Moscou

    La vitesse à laquelle le régime de Poutine a du faire des concessions a fait de ces manifestations quelque chose d’important. Les tactiques ‘militantes’ des manifestations ont été encouragées par les pensionnés de la ville de Khimki – une banlieu de Moscou située juste à l’ extérieur de la ville. Ils bloquaient la principale autouroute Moscou – St Pétersbourg. Cela est aussi d’ une importance particulière parce que c’ est aussi la route qui conduit au principal aéroport international. Des centaines, et parfois des milliers, de personnes agées dans d’autres villes ont suivi les actions, bloquant des routes, assiégeant les bâtiments gouvernementaux, et dans le cas des pensionnés Sibériens, menacant de bloquer la voie ferrée trans-Sibérienne.

    La colère des pensionnés était dirigée contre ce qu’on appelle la ‘monetarisation’ des allocations. Transports gratuits et 50% de réduction dans les coûts du logement pour les pensionnés et d’autres categories de la population, incluant les soldats et la police, ont été aboli ce 1er janvier 2005, pour être remplacé par une ‘compensation monétaire’. Traditionellement, les pensionnés recevaient 200 roubles supplémentaires par mois (+- 5euros) mais leurs coûts de transport absorbent à eux seuls rapidement ce payement ‘extra’ (un ticket dans un bus coûte aujourd’hui 20 eurocents et fréquemment les pensionnés doivent changer de bus ou tram). Les nouvelles factures pour le logement sont attendues cette semaine, ce qui pourrait conduire à une nouvelle vague de manifestations.

    Peut-être que le pire element de cette réforme n’ a pas encore frappé – le changement dans les subventions pour les soins de santé. Celles-ci vont être supprimées et chaque pensionné sera payé une somme standard. L’argument du gouvernement est que cela donne au pensionné le ‘droit de choisir’. Mais on ne peut alors pas parler de soins de santé standards : par exemple, une personne peut n’ avoir besoin que de simples cachets pour les maux de tête, pendant qu’un autre peut avoir besoin de médicaments chers.

    Poutine, et en particulier les ministres neolibéraux qui ont poussé à mener cette réforme ont été ‘confinés dans un coin’. Ils ont essayé d’ attributer la responsabilité aux autorités régionales pour leur incompetence dans la distribution des nouveaux payements. Mais beaucoup de personnes sont conscientes que le gouvernement est en train de recolter d’ énormes surplus dans les budgets, pendant qu’il continue de couper dans les allocations des travailleurs.

    Pour éviter les protestations se développant dans certaines regions, beaucoup d’autorités régionales annoncèrent que plusieurs allocations, tels que les coûts de transport gratuits, seraient financés par les budgets locaux. Mais cela na pas été assez pour enlever la pression sur le gouvernement fédéral. L’augmentation de la pension convenue pour avril a été avancée et le gouvernement a annoncé qu’il va dégager jusqu’à plus de 3 milliards de dollars de son ‘fond de stabilité’ – argent gagné par les prix élevés du pétrole qu’il avait mis de côté pour les mauvais jours. Il reste à voir si ne serait ce un de ces ministres directement impliqué dans l’application de cette réforme sera forcé de quitter son poste. Il y a pour le moment une discussion ‘radicale’ sur le sort du Premier Fradkov qui n’aurait plus que quelques mois devant lui.

    Ces évènements confirment que les tentatvies de Poutine d’ amener tout sous son contrôle personnel sont en train d’ échouer. La réaction de son régime au moment des permières manifestations – une chasse aux sorcières pour trouver le ‘coupable’ – était caractéristique pour ce qui en réalité est un peu plus qu’ un Etat policier. En particulier, il s’est avéré qu’un ordre avait été donné à la police d’ arrêter n’importe qui en dessous de 45 ans dans les manifestations parce qu’ils sont ‘probablement des faiseurs de troubles’. Des activistes du Socialisticheskoye Soprotivleniye (CIO en Russie) ont été victimes de cette mesure.

    En meme temps, une remarquable caractéristique de ces manifestations est qu’elles ont été généralement spontanées, avec très peu de participation de tous les partis politiques. Seulement au moment ou les manifestations s’ étendaient, le Parti Communiste, qui est bien sur principalement aujourd’hui un parti de pensionnés a essayé de mobiliser ses partisans.

    Néanmoins, cela ne veut pas dire que les manifestants sont apolitiques. De plus en plus de revendications anti-Poutine sont mises en avant et il y a une soif de recherche d’idées politiques, et cela malgrès l’ âge élevé des manifestants. Pour donner un indice de cette radicalisation, plus de 250 copies du journal du CIO ont été vendues dans les manifestations à Khimki.

    La revolution de 1905 invoquée par les manifestants

    Un autre élément important est la grande conscience parmi les manifestants que ce mois c’est le centième anniversaire de la première Révolution Russe, et, le 22 janvier il y avait une initiative d’envoyer une petition à Poutine de la même facon qu’il y a cent ans quand des manifestants avaient essayé d’envoyer une pétition au Tsar pour la justice, avant que celui-ci n’envoya les troupes sur les manifestants. Comme la ‘monetarisation’ a conduit a un minement du soutien à Poutine, avec une chute de 20% dans les sondages de popularité ces dernières années, ses politiques de casse des acquis sociaux ont mené à des mobilisations massives qui ont force le gouvernement à faire des concessions. Le Ministre de la Défense a été forcé d’annoncer que la réforme de la conscription (annoncée en décembre dernier), et qui aurait entrainé que les étudiants auraient perdu le ‘postposement’ de leur conscription pendant leurs etudes, ne sera pas appliqué dans le futur proche. Le gouvernement est conscient qu’une fusion du mouvement des pensionnés avec celui des étudiants serait trop difficile à controler.

    Sans aucun doute, les évènements de l’année dernière en Ukraine, qui ont montré qu’en descendant dans la rue, les masses pouvaient changer les rapports de force, ont encourage ce mouvement en Russie. En même temps, les manifestations en Russie sont un avant gout de ce qu’il pourrait se passer dans le future en Ukraine. Le nouveau Premier Ministre de l’ Ukraine, Viktor Yuschenko, est entouré de conseillers économiques, incluant ceux de l’ ONU, qui essayent de le pousser aussi à opérer la ‘monétarisation’ des allocations.

    Après plusieurs années de ‘calme’ dans les mouvements de protestation en Russie, et à travers la plupart des pays du CIS, il apparait maintenant que de nouveau les masses dans ces pays recommencent à se lever et à lutter pour leurs droits.

    Clairement, toutes les allocations qui ont été ‘monétarisées’ doivent être rétablies immédiatement. Mais les problèmes dont les pensionnés doivent faire face ne se limitent pas et sont plus profonds que seulement l’ etat de leurs allocations. La privatisation du système de transport a mené à une situation ou les compagnies privées refusent de transporter les passagers qui ne savent pas payer, argumentant qu’ils prennent les places des passagers qui payent. Les loyers et les charges de logement ont aussi augmentées. Les soins de santé deviennent de plus en plus chers, et ce en grande partie dû aux coupes dans les listes de médicaments disponibles sur prescription (remboursables), laissant ceux qui ont besoin des médicaments les plus chers les payer eux-mêmes. Stop aux privatisations, stop aux attaques sur les droits démocratiques !

    Les socialistes disent que les privatisations doivent être stoppées et que les soins de santé, le logement et le transport doivent retourner sous possession et contrôle du public, avec de propres resources et subventions payees par les énormes augmentation de profit que l’ Etat fait avec la vente de pétrole et de gaz. Les plans de réformes du système des pensions par le gouvernement devraient être retirés et les pensionnés devraient recevoir une pension décente.

    La persecution d’ activistes par l’ Etat doit cesser et tous les prisonniers politiques doivent être libérés immédiatement. Récemment un groupe d’ activiste du Parti National Bolchévik (un parti d’extrême droite qui utilise des symboles de gauche pour attirer les jeunes) ont été condamnés à 5 ans de prison pour avoir occupé les bureaux du Ministère de l’ Education. Bien que n’ayant aucune sympathie pour les vues et positions de ce parti, ces condamnations extremes doivent être vues comme un avertissement à tous les opposants du régime de Poutine. Une fois de plus des activistes du Sotsialisticheskoe Soprotivleniye (CIO en Russie) sont sous attaque.

    Nous supportons aussi complètement les revendications de beaucoup de manifestations qui appellaient le gouvernement de Poutine à quitter le pouvoir. Mais cela pose alors aussi la question de qui va les remplacer. Clairement, meme le Parti communiste, qui a une certaine base electorale chez les pensionnés, est néanmoins incapable de résoudre aucun des problèmes que les pensionnés et les travailleurs sont en train de subir. La période à venir va certainement amener son lot de manifestations, vu que la population a vu qu’il était possible de vaincre le gouvernement, et ce vu que les attaques sur nos niveaux de vies et sur nos droits démocratiques vont continuer. Les activistes dans ce mouvement doivent se lier aux étudiants engagés, aux soldats conscrits, travailleurs et aux minorités oppressées. Un tel mouvement pourrait créer les bases de la formation d’une réelle alternative à l’ actuel gouvernement et pourrait commencer à construire un parti des travailleurs massif, capable de combattre jusqu’à la fin cet immonde système capitaliste qui permet aux Abramovichs et Khordokovskiis (oligarches) d’ amasser des milliards, pendant que des millions de pensionnés sont laissés sans les moyens basiques nécessaire pour avoir une vie tolérable.

  • UKRAINE. Les travailleurs n’ont pas de candidat!

    AUTREFOIS région économique de premier plan pour l’URSS, l’Ukraine est tombée dans le capitalisme le plus sauvage après la chute du stalinisme. Dans les années 90, la libéralisation de l’économie a mis sur la paille des millions de travailleurs. Aujourd’hui, la population ukrainienne possède le niveau de vie le plus bas d’Europe.

    Stéphane DelcrosEn novembre dernier, la fraude massive qui a entaché le résultat du second tour de l’élection présidentielle en Ukraine a débouché sur un mouvement de protestation de grande ampleur dans la partie occidentale du pays. Des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue pour protester contre la victoire frauduleuse du premier ministre Viktor Ianoukovitch, le candidat de l’ancienne bureaucratie reconvertie dans le capitalisme mafieux. Non content d’avoir truqué le scrutin, le régime n’a pas hésité à empoisonner le candidat de l’opposition Viktor Iouchtchenko qui représente la nouvelle bourgeoisie ukrainienne. L’invalidation du scrutin sous la pression de la rue a déclenché des manifestations de masse dans la partie orientale de l’Ukraine qui avait voté pour Ianoukovitch. En effet, cette région de l’Ukraine est la plus industrialisée et ses habitants, majoritairement russophones, craignent que Iouchtchenko ne ferme les mines et toutes les entreprises nonrentables.

    Le Président russe Poutine, qui soutient Ianoukovitch, a tenté d’exploiter cette situation en agitant la menace d’une partition de l’Ukraine. Ce qui se passe en Ukraine pourrait être le prélude à des mouvements analogues en Russie et dans d’autres républiques exsoviétiques. Poutine s’efforce de consolider son pouvoir en utilisant les méthodes et les symboles de l’ancien régime stalinien. Mais la destruction de tous les acquis sociaux qui ont accompagné le rétablissement du capitalisme a créé une situation sociale potentiellement explosive qui pourrait emporter le régime Poutine.

    D’un autre côté, l’Union européenne et les Etats-Unis soutiennent ouvertement Iouchtchenko qui n’a aucune alternative à offrir à la population ukrainienne. Sous couvert de soutenir la démocratie, les dirigeants occidentaux ne pensent qu’à élargir leur sphère d’influence. Partisan de la nouvelle bourgeoisie ukrainienne, ancien gouverneur de la banque centrale et artisan des réformes néolibérales qui ont notamment poussé à la fermeture de nombreuses mines dans l’est du pays, Iouchtchenko est passé maître dans l’art d’exploiter les travailleurs au profit des banques privées.

    Le mouvement de protestation en Ukraine combine des éléments de révolution et de contre-révolution. D’un côté, la population s’insurge pour la défense de ses droits démocratiques (à l’ouest) ou pour la défense de l’emploi (à l’est). En occupant les rues jour et nuit et en bloquant le système administratif du pays, la population a utilisé les méthodes de lutte du mouvement ouvrier. D’un autre côté, la direction politique du mouvement dans les deux régions du pays est une direction bourgeoise.

    L’absence d’une alternative politique qui pourrait unifier les travailleurs ukrainiens de l’ensemble du pays ouvre la voie à des tentatives de fractions diverses de la classe dirigeante pour récupérer le mouvement à leur profit et dresser les travailleurs les uns contre les autres, avec tous les risques de guerre civile qui en découlent.

    La population de l’Ukraine occidentale s’oppose davantage à Ianoukovitch qu’elle ne soutient Iouchtchenko. Si celuici devait être finalement élu au “ troisième tour “, le 26 décembre, la population devra utiliser les mêmes armes contre lui pour lutter contre sa politique néo-libérale. Le seul moyen de surpasser les intérêts impérialistes – d’est ou d’ouest – et d’empêcher les divisions ethniques, c’est d’unifier les travailleurs de toutes les régions afin qu’ils luttent pour leurs droits démocratiques et sociaux. La classe ouvrière ukrainienne a besoin d’un parti des travailleurs défendant ses intérêts!

  • ComitĂ© ExĂ©cutif international du CIO. APRES LA VICTOIRE DE BUSH: VERS UN NOUVEL ORDRE MONDIAL?

    Comité Exécutif international du CIO

    LE COMITÉ POUR UNE INTERNATIONALE OUVRIÈRE (CIO), qui possède des sections dans 36 pays et sur tous les continents et dont fait partie le MAS/LSP, a tenu en Belgique son exécutif durant la 3ième semaine du mois de novembre. Les délégués – venus de tous les continents – ont brossé l’état de la situation politique et économique internationale et avancé des perspectives de développement.

    Vincent Devaux

    C’est reparti pour un tour

    L’actualité a partout été dominée par la question des élections américaines. Bush a été réélu alors qu’il est certainement le président US le plus haï depuis longtemps. Mais s’il a remporté les élections, son soutien s’est érodé et il est loin des 90% qu’il avait dans les sondages peu après le 11 septembre.

    Kerry ne représentait pas une alternative à la politique de Bush. Le slogan «Tout sauf Bush» appelant à voter démocrate a érodé le résultat de Ralph Nader (moins de 1%), seul candidat qui présentait un programme défendant les couches opprimées. Une grande partie des votes engrangés ne le sont pas sur base de la politique étrangère (Irak), ni même de sa politique intérieure, mais plutôt sur base des valeurs morales traditionnelles avancées par Bush dans sa campagne avec l’appui des évangélistes.

    L’incertitude sur la ligne politique pour son second mandat est tombée. On constate qu’il va poursuivre sa politique agressive. Il a déjà déclaré qu’il voulait un budget de 2.200 milliards de $ pour le budget de la défense jusqu’en 2008 et une diminution de l’impôt sur les plus-values.

    L’économie mondiale tirée par les Etats-Unis et la Chine est en porte-à-faux

    Bush va devoir tenir compte de deux déficits jumeaux colossaux: le déficit public et celui de la balance des paiements. Le financement de sa dette se fait au travers de l’émis-sion de bons du trésor, les 3/4 des investissements dans des bons d’états par les banques étrangères sont le fait de l’Asie, principalement la Chine et le Japon. Si la croissance US en 2004 a été de 4.4 %, elle est due partiellement à la baisse continuelle du taux d’intérêt passant de 6.25% à 1.25% en quelques années provoquant une surconsommation et la naissance d’une bulle immobilière. La baisse d’impôt – pour les plus riches- au début de la première législature de Bush et la guerre en Irak, remplissant les poches des marchands de canons par une politique de «keynésianisme négatif», a également permis de soutenir la croissance.

    La baisse du dollar permet de réduire artificiellement la dette US et permet d’écouler ses produits plus facilement sur le marché mondial et donc d’exporter la crise. Mais cette dépréciation du dollar mine la confiance des investisseurs qui choisissent de se tourner vers d’autres devises comme l’euro. L’importante croissance économique de la Chine ces dernières années (+/-9%) ne doit pas cacher son caractère inégalitaire entre les différentes provinces ; l’intérieur du pays principalement rural restant très pauvre. Le pouvoir central tente de contrôler l’ouverture de l’économie chinoise au capitalisme afin d’éviter l’implosion de cet énorme pays comme en URSS. L’économie chinoise, basée sur l’exportation de biens et l’importation d’énergie et de matières premières est très sensible à l’économie américaine et aux variations de ses taux d’intérêts. Une élévation des taux d’intérêts aurait un impact sur la croissance chinoise.Bien que les achats massifs de bons d’états US permettent de soutenir artificiellement la croissance des Etats-Unis et donc l’exportation de produits chinois, la Chine ralentit ses investissements dans la dette US car elle doit également diversifier ses investissements dans le secteur énergétique pour garantir son approvisionnement. Les deux économies sont très liées et sont actuellement la locomotive de l’économie mondiale, mais elles se soutiennent artificiellement et pourraient s’écrouler tel un château de carte.

    On a vu ces derniers mois une augmentation du prix du pétrole dépassant les 45 dollars le baril, due à la combinaison d’une croissance de la consommation d’une part et à l’instabilité de certains pays producteurs d’autre part: l’Irak qui ne peut rétablir son ancienne production, instabilité politique au Vénézuela, grèves à répétition au Nigéria, affaire Ioukos,… d’autre part il y a eu peu de découvertes de nouvelles ressources pétrolières ces dernières années et les installations n’ont pas été suffisamment développées, certains économistes pensent qu’il faudra 15 ans pour rétablir la situation. La production de l’acier au niveau mondial est également sous pression de la demande chinoise. Cette montée du cours du brut a des conséquences directes sur les prix des biens à la consommation et réduit le pouvoir d’achat des populations et cela même dans des pays comme l’Iran ou le Nigéria, exportateurs de brut mais qui doivent importer des produits raffinés.

    Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte en elle l’orage. (Jaurès)

    Les Américains n’ont pas les moyens de leur ambition: jouer les gendarmes du monde. S’ils ont annoncé la prise de Falluja en Irak comme une victoire, provoquant le déplacement dans des conditions précaires de 200.000 personnes, il est clair que c’est plutôt une défaite et que la résistance devient plus expérimentée. De plus le risque d’une guerre civile n’est pas exclu si les Sunnites ne sont pas représentés au parlement.

    La politique guerrière de Bush est partiellement responsable de la reprise de la course à l’armement. La Corée du Nord et l’Iran, qui développent un arsenal nucléaire, sont sous pression de l’Occident. Une intervention militaire en Iran n’est pas exclue mais beaucoup d’obstacles sont présents; accords gaziers avec la Chine et autres fournitures pétrolières avec autres pays, comme la Russie,… le pays est en pleine croissance ce qui n’était pas le cas de l’Irak après une guerre et une décennie d’embargo.

    De plus, avec une population trois fois plus nombreuse et un pays quatre fois plus grand que l’Irak il va être plus difficile d’y intervenir. Enfin, l’administration doit compter avec le mécontentement croissant parmi la population et l’armée américaine. Une intervention en Corée du Nord pourrait dégénérer en guerre régionale avec la proximité de la Corée du Sud et de la Chine.

    Une montée de la lutte des classes

    Le Nigeria a déjà vu 7 grèves générales contre l’augmentation du prix de l’essence depuis qu’Obasanjo est au pouvoir et qu’il mène une politique dure de privatisation des services publics. En Chine des mouvements à caractère insurrectionnels se multiplient.

    Une manif a rassemblé‚ 40 à 50.000 personnes à Wanzhou pour protester contre la bastonnade d’un travailleur par un fonctionnaire. Une grève de sept semaines a eu lieu dans une usine textile qui était privatisée, 7.000 personnes protestant contre leurs nouvelles conditions de travail et les licenciements, ce qui est une première depuis 1949. On doit également citer une occupation d’un barrage par des paysans qui est passée de 40.000 à 100.000 personnes après la mort d’un manifestant et qui a finalement obligé la police à se retirer. En Amérique Latine, la plupart des gouvernements – au Pérou, Brésil, Venezuela, Argentine,
- tiennent un discours anti-libéral. La Colombie a vu l’élection d’un président social-démocrate après 100 ans de pouvoir aux mains des conservateurs, signe de l’élévation de la conscience de la population. On voit néanmoins actuellement les limites de tous ces gouvernements qui ne cassent pas avec le capitalisme.

    L’Europe entre en marche Les attaques sur les conditions de vie des ouvriers entraînent la réaction de la classe ouvrière par des manifestations rassemblant des centaines de milliers de personnes (grèves générales en Italie…).

    En Angleterre, le syndicat des pompiers a consciemment brisé ses liens avec le Labour Party qui mène les attaques sur le niveau de vie des gens. L’Allemagne qui a certainement vu les pires attaques, a vu se développer les Journées du Lundi (contre le plan Hartz IV) ainsi qu’une nouvelle formation électorale qui pourrait être le point de départ d’un nouveau parti des travailleurs. Aux Pays-Bas, le modèle « Polders », basé sur la paix sociale a montré ses limites, la manif du 9 octobre dernier contre la politique de Balkenende a rassemblé entre 200.000 et 300.000 manifestants. En Pologne, avec un taux de chômage moyen de 20-30 %la population n’a plus d’illusions sur les soi-disant bénéfices de l’intégration au sein de l’U.E.

    Partout dans le monde nous voyons une montée de l’instabilité politique des tensions entre les grands blocs économiques, un pourrissement de la société dans les pays où intervient l’impérialisme et une escalade militaire. Seul un changement de société, porté par le développement de la lutte des classes peut éviter une explosion de barbarie.

  • FSE. Le capitalisme Ă  nouveau contestĂ©… mais pour aller oĂč?

    FORUM SOCIAL EUROPÉEN

    Du 15 au 17 octobre se tenait la 3e édition du forum social européen. Autour de la vieille rengaine «un autre monde est possible», plus de 20.000 personnes ont convergé dans la ville de Londres.

    Cédric Gérôme

    C’est cependant 2 fois moins que lors des éditions précédentes à Florence et à Paris. Cela peut en partie s’expliquer par l’état actuel du mouvement anti-guerre, mais cela reflète également les courtes vues de la structure du FSE et sa faillite à avancer une alternative cohérente au capitalisme et la guerre. En effet, la logique de simple opposition dans laquelle se cantonnent les dirigeants officiels du forum semble de plus en plus mener le mouvement dans l’impasse…

    Le fait d’organiser le FSE dans une des villes les plus chères du monde avec 30 livres (entre 40 et 50 euros) de prix d’inscription en a déjà découragé plus d’un. Il est d’autant plus déplorable que l’événement, qui inscrit dans sa charte que les partis politiques n’ont pas leur place dans le forum, accepte en tant qu’individus des membres de partis pro-capitalistes, pour certains à la tête de la politique de régression sociale. Aussi, comme orateur (et sponsor principal), on retrouvait ainsi Ken Livingstone, maire de Londres, membre du Labour Party, et défenseur de la politique économique de Blair malgré son profil anti-guerre.

    Ceux qui, dans le FSE, mettent l’accent sur la résistance au néo-libéralisme, comme s’il s’agissait d’un phénomène distinct du système capitaliste, créent l’impression qu’un capitalisme « à visage humain» est possible. Cette idée est renforcée par des organisations comme le SWP, la LCR ou Rifondazione Comunista qui se refusent à mettre en avant le besoin d’une alternative socialiste ou même de parler des luttes de la classe ouvrière pour contrer l’offensive de la bourgeoisie. Beaucoup d’organisations limitent leur stratégie à organiser des manifestations et des débats interminables, sans élaborer un plan afin d’élargir la lutte en la rattachant à celle du monde du travail. En général d’ailleurs, personne dans la ville n’avait vent de l’événement en-dehors des participants.

    Le CIO, organisation internationale du MAS/LSP, était présent au FSE. Nous avions des camarades d’Irlande, de Belgique, d’Allemagne, de Russie, de Grèce,… Durant le meeting de deux heures que nous avions organisé, on a entendu plus parler des luttes du mouvement ouvrier que pendant les 30 heures de conférences organisées pendant le reste du forum. Si le FSE permet de fournir un lieu de débat au mouvement antimondialisation, il se heurtera toujours à certaines limites tant qu’il ne tirera pas la conclusion que ce sont les travailleurs seuls qui ont le pouvoir de changer la société.

  • L’Irak au cƓur des Ă©lections amĂ©ricaines

    La situation en Irak aujourd’hui évoque de plus en plus celle qui existait au Vietnam au début des années 70: une population massivement opposée à la présence d’une armée US, un pouvoir local incapable de faire face aux escarmouches et aux attaques de la guérilla, une armée américaine incapable de former une relève locale et forcée de rester en première ligne, un gouvernement fantoche qui, jour après jour, annonce des victoires partielles devant mener à une victoire totale proche… qui s’éloigne pourtant de jour en jour! La principale différence, c’est que l’intervention américaine au Vietnam a duré dix ans, avec un effectif qui a atteint 500.000 soldats, et que la déroute risque d’arriver beaucoup plus vite en Irak.

    Jean Peltier

    La situation n’a en effet pas cessé de se dégrader pour les USA et leurs marionnettes au cours des derniers mois. Les actions de commando s’intensifient dans la plupart des villes, l’armée US a perdu le contrôle de très nombreuses régions du pays, le gouvernement installé par les Américains n’a aucune autorité, la coordination grandit entre les diverses fractions engagées dans la résistance armée, les bombardements massifs de l’aviation US en riposte aux attentats frappent durement la population civile et augmentent la haine envers les Américains et le soutien à la résistance armée.

    Il est certain qu’une fois n’est pas coutume, les questions internationales, et en particulier le terrorisme et l’Irak, joueront un rôle important dans la campagne électorale américaine. Mais il n’est pas encore clair dans quel sens elles feront pencher la balance. Car les Américains semblent très partagés sur le sujet. La domination des chaînes radio et télévision conservatrices – la grande majorité des chaînes radio et de télévision sont propriétés de quelques groupes financiers hyper puissants, dont les dirigeants sont étroitement liés aux cercles conservateurs à la tête du parti républicain – fait que la moitié au moins des Américains sont toujours persuadés qu’il y avait des armes de destruction massive en Irak, que Saddam Hussein était lié à Al Qaïda et que l’armée américaine est en train de gagner la partie en Irak.

    Bush joue à fond la carte de la peur, se présentant comme le seul dirigeant capable d’en finir avec le "terrorisme international". Kerry, par contre, peine à trouver une ligne claire. Il n’est évidemment pas simple pour lui d’avoir soutenu Bush dans son escalade contre Saddam, voté pour la guerre l’an dernier et dire aujourd’hui que cette guerre était une erreur et qu’il avait été "trompé" par les informations trafiquées données par Bush ce qui ne fait pas très sérieux pour un candidat à la présidence de la première puissance mondiale.

    Mais, au delà de ses petits problèmes personnels, les difficultés de Kerry viennent de ce qu’il est pris dans le dilemme qui étreint toute la classe dirigeante US. Bush est intervenu en Irak, avec le soutien de toute la bourgeoisie américaine, pour restaurer le prestige des USA ébranlé par le 11 septembre et pour prendre le contrôle des richesses pétrolières de l’Irak. Mais, un an et demi après, passée l’euphorie de la chute de Saddam, gagner la guerre apparaît de plus en plus impossible. Mais devoir quitter ce pays en l’abandonnant au chaos ou, pire encore, à un nouveau régime ennemi est une option encore plus impossible à envisager pour les dirigeants américains. D’où les propositions avancées par Kerry pour "internationaliser" le conflit et impliquer l’ONU dans la gestion de la crise, ce qui ouvrirait peut être une porte de sortie honorable aux Etats Unis. Mais les pays qui ont soutenu Bush rechignent à en faire plus et ceux qui s’opposaient à la guerre: France, Allemagne, Russie, Chine, Brésil, Inde,… n’ont aucune envie d’aller s’embourber dans les sables irakiens et de devenir des cibles ouvertes pour la ré&sistance irakienne.

    Bush et la victoire rapide impossible. Kerry et le désengagement progressif tout aussi impossible. Nuits blanches et avenir noir sont au programme des futurs stratèges de la Maison Blanche.

  • L’insoluble conflit tchĂ©tchĂšne dĂ©gĂ©nĂšre en massacre dans une Ă©cole

    Personne n’a oublié les images choquantes du dénouement sanglant de la prise d’otage de Beslan, début septembre dernier. 1.200 enfants, parents et enseignants étaient enfermés dans une école de la république russe d’Ossétie du Nord par un commando pro tchétchène. Les otages ont été privés d’eau et de nourriture par les ravisseurs qui portaient des ceintures d’explosifs. La prise d’otage a pris fin après quelques jours lorsque les troupes russes ont attaqué le bâtiment. 335 personnes sont mortes dans cet assaut dramatique, dont beaucoup restent encore à identifier. L’opinion publique mondiale et plus particulièrement russe en restera très longtemps choquée.

    Laurent Grandgaignage

    La manière brutale et chaotique employée par l’armée russe nous rappelle évidemment le tragique événement du théâtre de Moscou en 2002. A l’époque, il y eut 700 ou 800 otages d’une cinquantaine de Tchétchène lourdement armés. Les terroristes revendiquaient le retrait des troupes russes de Tchétchènie. L’armée réagit par des gaz toxiques, faisant plus de 120 victimes. Couplée aux récentes attaques contre deux avions et contre une station de métro à Moscou, le drame de Beslan ne peut que réaffirmer l’impasse du conflit tchétchène.

    La Tchétchènie opprimée depuis des siècles

    Le peuple tchétchène est depuis longtemps opprimé par des forces d’occupations étrangères. En 1830 le tsar Nicolas I envahit le pays. Ce n’est qu’après la Révolution russe de 1917 que le pays reçu le droit à l’autodétermination et, comme beaucoup d’autres républiques de la région, rejoignit librement l’Union soviétique.

    Après la contre-révolution stalinienne les nationalités furent à nouveau opprimées et en 1944 la plus grande partie du peuple tchétchène subit la déportation. En 1991 le pays devint indépendant, mais trois ans plus tard Boris Eltsine l’envahit. Face à la résistance, le pays finit par sombrer dans le chaos. La lutte entre différents seigneurs de guerre fit rage, parallèlement à l’extension de l’influence islamiste. En 2000 Poutine ordonna le rétablissement de l’ordre prorusse à Grozny et l’escalade de violence consécutive à la répression militaire a provoqué des centaines de milliers de victimes des deux côtés. En fait, la politique intérieure du président russe est essentiellement préventive: si une région revendiquant l’indépendance parvenait enfin à l’obtenir, d’autres régions risqueraient de s’engager dans la même voie.

    L’Occident se tait face à l’occupation russe

    Les décennies passées furent donc très dures pour le peuple tchétchène. La répression russe – villes détruites, massacres d’hommes, femmes et enfants – a créé le terreau sur lequel les mouvements réactionnaires et terroristes ont grandi. L’hypocrisie règne quand Poutine présente l’occupation comme une pièce de la stratégie de la "guerre contre le terrorisme international". Les puissances occidentales ne critiquent pas cette guerre car beaucoup d’entre-elles sont impliquées dans cette alliance antiterroriste. De plus, il est important pour l’Europe et l’Amérique du Nord de garder de bonnes relations avec la CEI qui possède un potentiel économique important. La région caucasienne est aujourd’hui très importante au point de vue de la production du pétrole et du gaz. La Russie est le premier exportateur de gaz naturel au monde et le deuxième exportateur de pétrole après l’Arabie Saoudite.

    Le capitalisme russe en déclin

    La colère du peuple russe face aux attaques terroristes n’est pas seulement dirigée contre les organisations pro Tchétchènes armées mais également contre le président Poutine. Beaucoup l’estiment responsable de la persistance du conflit tchétchène. Le peuple subit les conséquences de ces tensions ethniques et doit en plus endurer les effets de la politique néo libérale du président Poutine.

    Les récentes coupes dans la sécurité sociale ont plongé des dizaines de millions de travailleurs russes dans la misère. Depuis la réintégration du capitalisme, la pauvreté et l’inégalité n’a cessé de croître dans le pays. La "guerre contre le terrorisme" est habilement utilisée par Poutine pour détourner l’attention du mécontentement grandissant. En tant que marxistes, nous condamnons non seulement le terrorisme mais également la répression militaire de la Russie. Les marxistes ont pour tâche de construire un mouvement de masse qui uni travailleurs tchétchènes et russes en surmontant les différences nationales, ethniques et religieuses. Ce n’est qu’en luttant ensemble que l’on pourra enfin sortir de cette spirale de violence découlant de la crise capitaliste.

0
    0
    Your Cart
    Your cart is emptyReturn to Shop