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  • Japon : Le désastre frappe d’abord les travailleurs

    La première réaction face au séisme a été le choc et l’incrédulité face aux images de la région de Tohoku. Même si Osaka est à plusieurs centaines de kilomètres de la région touchée par le tremblement de terre et par le tsunami, beaucoup de personnes ont ici de la famille ou des amis dans ces zones. L’atmosphère générale est faite de dépression et de découragement. Les comparaisons avec les désastres de la seconde guerre mondiale ne manquent pas, même si la zone affectée est bien plus limitée.

    Carl Simmons, Kokusai Rentai (Solidarité Internationale, CIO-Japon)

    Il existe aussi une grande nervosité au sujet des perspectives de désastre nuclaire, les autorités luttant pour empêcher une fusion totale de trois réacteurs nucléaires au moins. Les représentants du gouvernement et de la Compagnie de l’énergie électrique (TEPCO) se sont efforcés de faire croire que la situation est sous contrôle et que les personnes irradiées n’ont pas été fortement exposées. Les gens sont généralement très sceptiques à ce sujet.

    Il faut dire que l’industrie nucléaire et les entreprises énergétiques privées ont au Japon une longue histoire concernant les tentatives de dissimulation d’incidents de ce type, comme en 1995 à Monju (préfecture de Fukui) et de Tokaimura en 1999. La plupart des gens considèrent que le gouvernement sous-estime la sévèrité de la crise afin de ne pas provoquer de panique.

    Une bonne partie des milieux d’affaires étrangers fuient déjà Tokyo. La septième flotte américaine, avec le porte avion ”Ronald Reagan”, (dont nous n’avons apris que le 13 mars qu’elle était présente afin dans la région afin de ”livrer des secours”), s’est retirée à bonne distance de Fukushima en raison de la radioactivité. Mais la majeure partie de la population japonaise n’a nulle part où aller pour se mettre à l’abri d’une alerte nucléaire, mis à part trouver refuge sur le sol rugueux d’une salle de gymnastique, d’une classe d’école primaire ou d’un autre bâtiment des services publics. Près de 60.000 personnes ont dû évacuer leur foyer dans la région autour des réacteurs.

    Le mouvement antinucléaire au Japon a depuis longtemps prévenu des dangers de construire des réacteurs au dessus ou près des lignes de faille majeures. Les signaux d’avertissement n’ont pas manqué, comme avec les dommages subis à un site de TEPCO lors du tremblement de terre de Chuetsu-oki en 2007.

    Mais la capitalisme japonais est devenu extrêmement dépendant de l’énergie atomique, les réacteurs nucléaire fournissant 30% de l’alimentation énergétique du pays. Mais cette fois-ci, même si un désastre nucléaire majeur est évité, une crise énergétique majeure est face à nous, plusieurs réacteurs étant de toute façon hors d’état de marche. Dans le cas de Fukushima, l’utilisation d’eau de mer pour refroidir les barres signifie très certainement que ces réacteurs ne seront jamais remis en marche. Les autorités organisent dorénavant un roulement des coupures d’électricité dans le Japon oriental, et invitent la population à économiser sa consommation d’énergie.

    L’industrie énergétique au Japon est dominée par dix entreprises privées régionales et il n’existe pas de standard. Même si le Japon occidental n’a pas été touché par cette crise, il est difficile de détourner de la puissance énergétique de cette région vers l’autre, car l’Ouest du pays fonctionne avec du 60Hz, et l’Est avec du 50Hz. Seules trois usines sont capables de convertir le courant créé à l’Ouest pour qu’il soit utilisé à l’Est.

    Un vértitable parti des travailleurs réclamerait la nationalisation de ces 10 entreprises sous le contrôle et la gestion des travailleurs. Cela permettrait de progressivement éliminer l’énergie nucléaire et de développer des sources d’énergie alternatives. Comme le Japon est le seul pays au monde à avoir subi une attaque nucléaire, sa population a une très grande peur de l’impact des radiations et est très sensible à la question du nucléaire. Cette crise donnera assurément une nouvelle impulsion au mouvement antinucléaire, et ce même si un désastre nucléaire important est évité. Ce thème sera encore plus important si ce n’est pas le cas, et jouera le rôle d’un élément radicalisant sur le terrain politique.

    Au cours de ces prochains jours, l’essentiel de l’attention portera sur les secours. Comme lors du tremblement de terre de Hanshin en 1995, les syndicats et les collectivités locales lanceront leurs propres initiatives de secours. Les syndicats de la région de Kansai en discutent d’ailleurs déjà en ce moment. De très nombreux jeunes des zones intactes interviewés par les chaînes de télévision parlent de leur volonté de venir en aide aux sinistrés et d’aller dans les régions affectées. Mais au fur-et-à-mesure que les jours et les semaines passeront, le point central qui focalisera l’attention sera le travail de reconstruction.

    On a beaucoup parlé dans la presse étrangère des réglementations stricts régissant la construction de bâtiments. Mais tout ce qui a été dit est fort loin de la réalité concrète vécue ici. Bien que les lois sont devenues plus dures au fil du temps, les efforts des grands constructeurs, des services d’urbanisme et des politiciens ont assuré que les législations à ce sujet ne sont pas souvent respectées. D’autre part, des années après le séisme de Hanskin en 1995, beaucoup de pauvres et de personnes âgées vivaient toujours dans des constructions provisoires parce qu’elles ne pouvaient pas se permettre de reconstruire un logement. La majeure partie de l’argent prévu pour la reconstruction a dans les faits été réservée à des travaux d’infrastructure, ce qui a donné de beaux bénéfices aux entrepreneurs, mais qui a très peu aidé les personnes qui avaient tout perdu dans le tremblement de terre.

    La reconstruction ne doit pas servir les intérêts du secteur privé

    C’est ce que défend le CIO. Les grandes entreprises de construction devraient être nationalisées sous le contrôle et la gestion des travailleurs et de la collectivité afin de procéder à la reconstruction des zones sinistrées selon un plan démocratiquement élaboré par les comité de quartier et les organisations ouvrières.

    L’impact économique du désastre sera très grave. La Bourse japonaise est tombée de 7% en une seule journée, et se retrouve maintenant à nouveau sous la barrière des 10.000 points. Le Premier Ministre japonais, Naoto Kan, a parlé d’une sorte de ”New Deal”, la reconstruction devant servir à relancer l’économie du pays.

    Il est vrai qu’après le tremblement de terre de Hanshin, après les effets négatifs immédiats du tremblement de terre, il y a eu un rétablissement limité de l’économie, avec l’aide des travaux de reconstruction. On ne peut pas dire que quelque chose de semblable ne se produira pas cette fois, mais la destruction est ici d’un niveau beaucoup plus grand qu’en 1995. De plus, les caisses de l’Etat se trouvent dans une bien pire position.

    Le gouvernement est déjà revenu sur ses promesses concernant l’augmntation des allocations familiales et essaye maintenant de construire un certain soutien pour une augmentation des taxes à la consommation, en expliquant que cela est nécessaire pour l’effort des pensions dans le cadre d’un vieillissement rapide de la population. Cela donne une très petite idée de ce qui se trouve face à nous

    Il ne fait aucun doute que les capitalistes japonais essayeront de faire payer cette crise aux travailleurs et aux pauvres. Cela provoquera inévitablement une résistance. Cette crise dévoile à court terme l’avenir que nous réserve le capitalisme, un système assailli de problèmes majeurs.

  • Japon. Tremblement de terre & cauchemar nucléaire

    Le système capitaliste est incapable de faire face aux désastres naturels – pour un contrôle démocratique sur l’aide et la reconstruction

    Le tremblement de terre massif qui a ébranlé le Nord-est du Japon ce vendredi 11 février et les destructions causées par l’un des plus puissants tsunamis jamais vu est la “pire crise depuis 1945”, selon les termes employés par le Premier Ministre japonais, Naoto Kan. Les terribles évènements du Japon soulèvent de nombreuses questions concernant les folies du capitalisme, et plus particulièrement le développement massif du nucléaire – qui n’est jamais entièrement sûr – dans une région connue pour ses secousses sismiques.

    Par des correspondants du CIO en Chine, Hong Kong et Taiwan, de chinaworker.info

    L’épicentre du tremblement de terre de ce vendredi est situé dans la préfecture de Miyagi, à 400 kilomètres au nord-est de Tokyo. Il aurait atteint 8.9 sur l’échelle de Richter, ce qui en fait le 5e séisme le plus puissant depuis 1900. Sa puissance a été telle qu’elle a, aux dires des géologues, fait bougé 2,5 mètres l’île principale de l’archipel du Japon et que l’axe de rotation de la terre lui-même a bougé de 10 cm. Depuis lors, il y a eu au moins 67 autres chocs, d’une magnitude de 5, y inclus le puissant contrecoup d’une magnitude de 7 qui a lancé un tsunami d’une hauteur de 10 mètres qui a englouti de nombreuses villes côtières de l’Est du pays. La vague monstrueuse a causé d’incroyables destructions aux docks, aux chemins de fer et autres, des navires de plusieurs milliers de tonnes étant tout simplement balayés. Au moins deux trains ont totalement été engloutis dans les eaux. La puissance de l’onde de choc a été ressentie jusqu’à la côte pacifique des Etats-Unis, causant même la mort d’un homme qui filmait les vagues en Californie.

    Les premiers reportages sur le réseau de télévision japonaise NNT parlaient de 1.000 personnes décédées. Mais des dizaines de milliers de personnes sont toujours disparues. Dans la préfecture de Miyagi, fortement touchée, la police a déclaré qu’il y avait encore de “nombreuses” personnes disparues et dans la préfecture de Sanrikucho, la région la plus touchée, un million de personnes sont toujours recherchées. La police a parlé de centaines de milliers de personnes évacuées et que le nombre de bâtiments et de routes détruits était incalculable. Deux millions de maisons sont toujours sans électricité, dans le froid hivernal. Le Shinkansen (train à grande vitesse) et d’autres moyens de transport majeurs sont toujours hors d’état pour la troisième journée consécutive. Les zones affectées par la catastrophe incluent la ville de Tokyo, où de nombreux travailleurs n’ont eu d’autre choix que de marcher pour rejoindre leur foyer après le travail, parfois à plusieurs heures de marche.

    Les explosions de Fukushima – ‘le troisième plus grave incident nucléaire de l’histoire’

    Mais il y a aussi les explosions dans deux réacteurs nucléaires. Le jour suivant le séisme (le 12 mars), le réacteur n°1 a explosé à la centrale nucléaire de Fukushima, à cause d’une fissure dans l’unité de refroidissement. Une seconde explosion a été rapportée, sur le même site hier (le 13 mars). Le porte-parole du gouvernement Yukio Edano a révélé qu’il pourrait y avoir une “fusion partielle” des barres de combustible au réacteur n°1 de Fukushima.

    Le gouvernement a annoncé l’état d’urgence dans la région ainsi que l’évacuation de tous les habitants dans un rayon de 20 km autour du complexe de Fukushima, soit un total d’environ 300.000 personnes. Des fuites radioactives ont été officiellement confirmées, mais le Premier Ministre Kan a déclaré que le niveau n’était pas “élevé” et a assuré la population que cela était “fondamentalement différent de l’accident de Tchernobyl” – une référence à la catastrophe nucléaire de 1986 en Ukraine. Quelque 160 personnes évacuées sont examinées, suspectées d’avoir été irradiées. Les expertes disent qu’il s’agit du troisième plus grave accident nucléaire de l’histoire, après Tchernobyl et la crise de Three Mile Island, en 1979 aux Etats-Unis. Le niveau de radiation par heure dans les centrales affectées au Japon est égal au niveau normalement autorisé en une année. Même les navires et avions américains envoyés pour prendre part à l’effort d’aide ont été déplacés des zones côtières en raison du taux trop élevé de radiations, qui constitue une menace pour le personnel US.

    Au moment d’écrire ces lignes, 11 des 55 réacteurs japonais étaient à l’arrêt, et on parle d’un incident à une troisième centrale à Ibaraki, à 120 km au nord de Tokyo. La méfiance et le scepticisme à l’encontre du gouvernement se répandent. C’est bien compréhensible dans ce pays, le seul à avoir subit une attaque nucléaire, avec toutes les horreurs que cela suppose.

    Cet incident souligne les dangers du nucléaire, qui n’est en rien une solution à la crise énergétique et constitue de nombreux risques pour les hommes et la nature. Les désastres naturels, comme les séismes et les inondations, ou encore les guerres, peuvent causer de dangereuses déstabilisations des centrales nucléaires, avec des dégâts à long terme pour la société humaine. Sous les conditions capitalistes, depuis que les énergies fossiles se raréfient, on assiste à un virage en direction de l’atome. Cette tendance a été renforcée par la pression pour diminuer les émissions de gaz carbonique et pour sembler plus “verts” au vu de la croissance des inquiétudes concernant le climat.

    En Asie et dans le Pacifique, au Japon mais aussi en Chine, en Russie et aux USA, il y a une extension massive du nucléaire. Dans son dernier plan quinquennal, la Chine a prévu de largement étendre ses capacités nucléaires. Il est globalement question de construire 350 nouveaux réacteurs nucléaires pour les 20 prochaines années. L’industrie nucléaire se frotte les mains en imaginant les profits à venir, mais les experts avertissent des nombreux dangers.

    “Les centrales nucléaires japonaises étaient sensées résister aux séismes et être les mieux préparées au monde pour résister aux catastrophes, mais voyez ce qui s’est produit.” a déclaré un porte-parole de Greenpeace. L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a averti que 20% des centrales nucléaires au monde se situent sur des zones d’activité sismique (comme les séismes) “significative”.

    Le ministre chinois de la science et de la technologie, Wan Gang, a récemment annoncé qu’au cours du prochain plan quinquennal, les investissements dans les alternatives aux énergies fossiles seraient principalement concentrées sur le nucléaire et non sur le vent, l’énergie solaire ou d’autres formes d’énergie renouvelable. La Chine est aussi hautement sous le risque de séismes, et a subi les deux tremblements de terre les plus mortels au cours du demi-siècle dernier (Tangshan en 1976 et Sichuan en 2008). Il est donc particulièrement insouciant de la part des autorités chinoises de construire plus de centrales nucléaires. A Taiwan aussi, la crise nucléaire japonaise provoque un grand débat. Il y existe une grande panique concernant d’éventuelles retombées radioactives. Le parti écologiste a connu un certain progrès dans sa popularité avec son opposition à la construction de réacteurs nucléaires, Taïwan en ayant construit deux juste au-dessus d’une faille sismique.

    Sur le front économique, le Japon est en crise depuis 20 ans, et cela va encore être aggravé par le tremblement de terre. La région du Japon la plus affectée a une forte concentration de fer et d’acier, d’entreprises pétro-chimiques, de fabriques, de centrales nucléaires et autres industries clés du pays. Une explosion et un incendie à la COSMO Oil Company, dans la ville de Chiba, a fait fermer la raffinerie. De nombreuses compagnies dans cette region ont été forcées de fermer leurs portes, y compris Mitsui Chemicals, Mitsubishi Chemical, JFE Steel, Sumitomo Metal Industries, Maruzen Oil Company et d’autres grandes entreprises. Nissan Motor et Honda ont annoncé qu’ils allaient stopper la production dès le 14 mars faute de fournitures. Sony et d’autres producteurs d’électronique ont aussi leur chaîne de production affectée par la catastrophe. En raison du poids de l’économie japonaise dans l’économie globale, la catastrophe du 11 mars aura un impact significatif sur les USA, la Chine, l’Union Européenne et d’autres économies.

    Quelques économistes parlent en des termes positifs des investissements qui ont suivi le séisme de Kobe en 1996, et voient une possible croissance dans l’infrastructure. Le Premier Ministre a fait écho à cette théorie en disant à la population de ne pas être pessimiste car le Japon connaîtra une sorte de “ New Deal” avec la restauration de l’économie, sur base des travaux massifs nécessaires à la reconstruction. Mais alors que le gouvernement japonais va être force de faire de grandes dépenses d’urgence, ses caisses sont vides, et le pays connaît le plus grand taux de dette au monde (la dette publique équivaut à 200% du Produit Intérieur Brut), juste après le Zimbabwe. Dans un environnement de crise économique globale, ce tremblement de terre peut avoir des conséquences très néfastes pour le capitalisme. Cela a été illustré par la chute massive sur les marches asiatiques, au vu du fait que les spéculateurs ont pris peur.

    Ces processus exposent entièrement les conséquences de la soif de profit capitaliste, sans aucune considération pour la vie humaine et l’environnement naturel. La théorie économique capitaliste de la “fenêtre brisée” montre aussi la logique complètement folle du système, où la perspective de profits élevés est acclamée, même si cela doit être réalisé par la destruction économique ou la guerre. Le capitalisme et ses idéologues sont les seuls véritables éléments “antisociaux”.

    La reconstruction et l’aide causera de sérieux problèmes spéculatifs. La nécessité d’un grand nombre de projets de reconstruction et d’investissements lies aux assurances provoquera certainement une réduction de liquidités dans l’économie, le tremblement de terre aura donc aussi probablement comme conséquence de pousser le Yen encore plus haut, et affaiblira la position des exportations. Au même moment, les capitalistes lancent partout des attaques massives contre la classe ouvrière – de l’Union Européenne au Wisconsin et d’autres Etats américains – et la classe ouvrière japonaise devra faire face à des mesures similaires de la part de son gouvernement, qui voudra leur faire payer la crise pour sauver les capitalistes.

    Nous revendiquons :

    • L’auto-organisation immédiate des travailleurs et des communautés locales dans les régions affectées afin de gérer les secours et de démocratiquement déterminer les besoins liés à la reconstruction. Pour la solidarité internationale et le soutien actif à la population japonaise !
    • Pour une révision urgente de la politique énergétique et des investissements massifs dans les énergies propres, en alternative au nucléaire! Pour la nationalisation du secteur énergétique sous le contrôle des travailleurs !
    • Aucune confiance envers les profiteurs, les spéculateurs et les capitalistes dans l’organisation des secours et de la reconstruction du pays. Luttons pour le socialisme et la propriété démocratique et publique de l’économie japonaise, seule façon de concilier les besoins des travailleurs et le développement de la nature et de la terre.
  • Le capitalisme sur le sentier de la guerre des monnaies

    Prendre du speed ou d’autres stimulants au cours d’une soirée peut rendre infatigable et libéré de freins physiques ou moraux. Le crédit, pour le capitalisme, c’est l’équivalant du speed de notre fêtard : cela suscite l’euphorie, mais cela rend inévitablement le corps dépendant, l’épuisera et le démolira, pour finalement conduire à une dépression profonde. De la même façon, tant qu’il y a suffisamment de doses, les toxicomanes sont des amis inséparables. Par contre, en cas de manque, ils deviennent d’impitoyables concurrents.

    Par Eric Byl

    Concernant le crédit, les dealers sont les autorités. Pour sauver les spéculateurs, elles ont fait des emprunts massifs. C’est pour les amortir que les français devront économiser 1.700 € par personne durant les prochaines années, entre autres en travaillant plus longtemps. En Angleterre, il s’agit de 1.600 €, de 1.100 € en Allemagne et de 1.400 euros aux Pays-Bas. En Belgique, les politiciens ne savent pas encore trop comment, mais il s’agira de 2.200 à 2.500 € par habitant d’ici fin 2013. Ce n’est visiblement toujours pas très clair pour la N-VA. Le ministre flamand Bourgeois (N-VA) a ainsi déclaré à la radio qu’il sera difficile de trouver 22 à 25 milliard d’€… en une année (au lieu de 4).

    Pendant le grand crash des années ’30, qui a conduit à la deuxième guerre mondiale, chaque pays a essayé de protéger son marché face aux concurrents étrangers. C’est ce qu’on appelle le ‘‘protectionnisme’’. Dès le début de la crise immobilière déjà, des économistes avaient averti de surtout éviter cette erreur.

    Mais la crise immobilière refuse de passer et, de plus, elle a entrainé une crise bancaire dont le sauvetage a provoqué une crise des Etats. On deviendrait même désespéré de constater, à la fin du processus, que de rusés banquiers ont instrumentalisé la situation pour exproprier à tort des milliers de familles.

    Celui qui voit mourir son enfant intoxiqué est capable de tout, y compris de ce qu’on ne l’imaginait pas capable de faire. Pour les politiciens capitalistes, ce n’est pas différent. Tous essayent de diminuer les déficits en stimulant les exportations dans l’espoir de récupérer une partie du marché des autres pays. Au début, cela se faisait de façon cachée, en diminuant les taux d’intérêts où en créant de l’argent, le “quantitative easing” (voir notre dossier à ce sujet). Ils affaiblissent ainsi leur propre monnaie en comparaison des concurrents extérieurs, qui eux réagissent par des mesures similaires annulant cet effet.

    Dans son introduction au “Capital” de Marx, Friedrich Engels avait décrit une dépression comme une longue période de stagnation économique accompagnée d’un chômage structurel où chaque mesure provoque un effet contraire à son objectif. Le ‘‘Quantitative easing’’ a permis à de rusés spéculateurs d’emprunter des dollars à un taux de 0,25% pour acheter des obligations brésiliennes rapportant 5% de rendement. On appelle cela du Carry trade. Cela provoque des bulles au Brésil, mais aussi en Thaïlande par exemple, ces deux pays essayent de contrarier cet effet en introduisant une taxe supplémentaire sur les obligations achetées par des “investisseurs” étrangers.

    La création d’argent aux Etats- Unis provoque inévitablement le même réflexe en Chine, et au Japon, et en Corée du Sud, et… Cela menace de faire encore plus exploser les dettes publiques. Aux USA, les démocrates et les républicains, au congrès et au sénat, ont déjà menacé d’introduire des taxes supplémentaires sur les produits chinois au cas où la Chine refuserait de revaloriser sa monnaie (on songe à une augmentation de 20 à 40%). La Chine ne veut et ne peut pas appliquer cela.

    La possibilité que cette guerre des monnaies conduise à une guerre commerciale réelle et, finalement, à un crash encore plus profond que celui que nous venons de vivre semble inévitable. Cela s’explique par le fait que le système capitaliste n’est plus capable de gérer les forces productives qu’il a suscitées. Seule une économie démocratiquement planifiée est apte à utiliser ses capacités harmonieusement, en fonction de tous.

  • Capitalisme en crise : socialisme ou barbarie ! (1)

    Chaque jour, le capitalisme démontre l’ampleur de sa faillite : extrême pauvreté, guerres, famine, destruction de l’environnement,… Nous refusons ce constat, nous opposons résolument au capitalisme et luttons pour une société socialiste démocratique. Dans ce cadre, notre réflexion et nos actions sont basées sur le marxisme. Ce dossier vous présente nos critiques contre le capitalisme ainsi qu’un petit aperçu de ce qu’est notre vision du socialisme. Ce texte est largement basé sur le livre «Le socialisme au 21e siècle» de notre camarade britannique Hannah Sell.

    Qu’est-ce que le capitalisme?

    En 300 ans d’existence, le capitalisme a changé la face du monde à coups de voies ferrées, de lignes électriques, d’avions, d’ordinateurs,… Au cours du dernier siècle seulement, l’économie mondiale est devenue 17 fois plus grande !

    Cependant, malgré les capacités technologiques actuelles, malgré tout le potentiel aujourd’hui présent, 1,2 milliard de personnes n’ont aucun accès à l’eau potable, 841 millions de personnes sont sous-alimentées et jusqu’à 28 millions d’Africains sont infectés par le virus du SIDA. Alors que le capitalisme consacre des milliards d’euros au bombardement d’une population pauvre comme celle d’Afghanistan, au même moment, ce système n’a aucune solution pour la pauvreté, la faim ou les maladies. En fait, le capitalisme est même une menace pour l’avenir de la planète. L’avidité conduit à une production aveugle qui ne tient aucun compte de l’homme ou de l’environnement.

    Les forces productives ont amplement été développées, mais elles ne sont pas systématiquement utilisées. Seul compte le profit à court terme. De leur côté, les gouvernements et les politiciens traditionnels sont au service des intérêts du capital et c’est à cet objectif que l’appareil d’Etat ou le pouvoir judiciaire est utilisé. Le capitalisme est soi-disant un ‘‘marché libre’’ et une ‘‘démocratie’’ mais quelle participation démocratique avons-nous concernant la manière de produire ? Des milliards de personnes à travers le monde n’ont que la liberté d’être exploités ou de connaître la misère et la guerre.

    Qu’est-ce que le socialisme ?

    Une société socialiste assimilerait l’énorme potentiel des talents de chacun et de la technologie pour édifier une société et une économie au service des besoins de tous. Cela ne signifie pas que tous les problèmes seraient immédiatement résolus, loin de là, mais la suppression du profit marquerait le début de la construction d’une nouvelle société, ce qui n’est possible qu’à l’échelle internationale.

    Les marxistes sont en faveur d’une économie démocratiquement planifiée, une économie où les grandes entreprises qui dominent aujourd’hui plus de 80% de l’économie seraient mises sous le contrôle démocratique de la collectivité, ce que nous appelons le contrôle ouvrier. Cela ne signifie toutefois pas que tous les petits commerces, les boulangeries, les boucheries,… seraient nationalisés.

    Un régime socialiste nous permettrait d’avoir bien plus à dire que sous la ‘‘démocratie’’ parlementaire capitaliste, qui ne nous accorde que des élections fort médiatisées après quelques années, tout ça pour élire des représentants qui ne défendent pas nos intérêts et qui ne doivent en rien se justifier auprès de leurs électeurs. Pour les marxistes, tout le monde doit pouvoir participer au processus de prise de décision quant à la manière dont sont gérées l’économie et la société.

    Les élus devraient toujours avoir à se justifier et être révocables, à tous niveaux, par leurs électeurs. De plus, les représentants ne toucheraient que le salaire moyen d’un travailleur, afin de garder un lien concret avec le quotidien de la majorité de la population. Un parlementaire marxiste (comme notre camarade irlandais Joe Higgins au Parlement Européen) ne gagnerait ainsi que l’équivalent du salaire moyen d’un travailleur.

    Les marxistes luttent pour la démocratie des travailleurs, ce qui implique que toute la collectivité travaillerait ensemble à la planification de la production. A tous les niveaux, sur les lieux de travail et dans les quartiers, des comités de représentants seraient organisés, sur les plans régionaux et nationaux, sous le contrôle d’assemblées générales de base. Chacun aurait ainsi la possibilité de réellement participer aux décisions et à la gestion de la société.

    Le capitalisme a développé plusieurs outils pour nous faciliter cette tâche, comme l’enseignement, qui fournit un niveau supérieur d’éducation, ou encore les nouvelles technologies, qui rendent la communication beaucoup plus facile et potentiellement bien plus accessible. La planification de l’économie n’est pas une utopie, les grandes entreprises et les multinationales fonctionnent d’ailleurs sur base d’une planification de leurs activités à grande échelle. Mais porter cela au niveau de la société signifie de s’attaquer à leur propriété.

    Le socialisme va bien au-delà du simple partage des richesses. Il s’agit également de décider de ce qui est produit et de quelle manière. Nous voulons immédiatement en finir avec le gaspillage consacré à des industries comme celle de la publicité. Nous voulons répartir le travail disponible au lieu de demander à une couche de travailleurs de travailler plus dur et plus longtemps alors qu’une autre couche (y compris beaucoup de jeunes) est au chômage.

    Mais aujourd’hui, dans le cadre d’une société où le profit est sacré et où l’humanité souffre sous ses diktats, il n’est pas possible de donner une vue complète de ce que sera une société socialiste. Nous ne pouvons que donner un léger aperçu en mettant en lumière les conditions qui permettront au potentiel existant d’être utilisé dans l’intérêt de la majorité de la population.

    Le socialisme n’aboutira-t-il pas à une dictature bureaucratique comme en Russie ?

    Les monstrueuses dictatures bureaucratiques et sanglantes de Russie, de Chine, d’Europe de l’Est et d’ailleurs étaient une négation totale du véritable socialisme démocratique. Mais il est fondamental que les marxistes d’aujourd’hui étudient l’expérience de la Révolution russe afin d’expliquer les raisons qui ont conduit à sa dégénérescence bureaucratique. En fait, ce processus trouve ses racines dans des conditions historiques spécifiques et non dans la nature humaine.

    La Révolution russe de 1917 a constitué la première fois où la classe ouvrière a renversé le capitalisme et a commencé à instaurer une nouvelle société socialiste. L’Union Soviétique des premiers temps était le gouvernement le plus démocratique que le monde ait jamais connu: ouvriers et paysans dirigeaient la société démocratiquement par l’intermédiaire de conseils ouvriers (c’est-à-dire, en russe, des soviets). C’est le premier Etat au monde à avoir donné aux femmes la totalité des droits légaux, comme le droit de vote et celui d’avorter. L’Union Soviétique avait aussi légalisé l’homosexualité.

    Les dirigeants bolcheviks Lénine et Trotsky, ont toujours expliqué qu’il était impossible d’instaurer le socialisme dans un seul pays, et plus particulièrement dans les conditions semi-féodales de la Russie de l’époque. Pour eux, la Révolution russe ne pouvait parvenir à survivre qu’en s’étendant aux puissants pays capitalistes d’Europe occidentale.

    Les principales puissances impérialistes ont elles-mêmes reconnu que la Révolution russe n’était pas une affaire purement locale et que le capitalisme était mondialement menacé. Elles ont donc participé à une sanglante guerre civile du côté des capitalistes et des propriétaires terriens russes afin de renverser le nouveau gouvernement soviétique. 21 pays ont envahi la Russie pour soutenir la contre-révolution (États-Unis, France, Allemagne, Grande-Bretagne, Belgique, Japon,… ) Pour que les bolcheviks arrivent à remporter la guerre civile (1918-1921), la vague de révolutions qui a déferlé sur toute l’Europe et dans le monde a été décisive. La Révolution russe et l’appel des bolcheviks aux travailleurs du monde entier au soulèvement contre la Première Guerre Mondiale avait mis le feu aux poudres. Les soulèvements révolutionnaires en Allemagne et à travers l’Europe ont entraîné la fin de la guerre et ont forcé les classes dirigeantes à retirer leurs troupes hors de Russie afin d’éviter d’autres bouleversements dans les pays capitalistes.

    Malheureusement, ces révolutions n’ont pas réussi à renverser le capitalisme. A la différence de la Russie, il n’existait aucun parti révolutionnaire de masse disposé à mener les révolutions jusqu’à leur terme. Au lieu de cela, les partis ouvriers de masse en Europe ont été dominés par les dirigeants réformistes qui ont joué un rôle décisif pour sauver l’économie capitaliste. Ainsi, alors que l’Union Soviétique a vaincu la contre-révolution, la jeune république Soviétique est restée isolée. La première guerre mondiale puis la guerre civile avaient laissé le pays dans une situation désastreuse, les masses épuisées, au chômage et affamées. Tout cela a constitué la base pour l’accession au pouvoir d’une caste bureaucratique conservatrice. La bureaucratie, groupée autour de Staline, a concentré le pouvoir dans ses mains dans les années ’20 et ’30 et a démoli les droits démocratiques que la classe ouvrière russe avait réussi à obtenir.

    Les nombreuses révolutions qui, plus tard, ont pris place dans le monde néocolonial et en Europe ont malheureusement regardé la Russie comme le modèle à suivre, et le gouvernement bureaucratique soviétique a pu exporter son modèle stalinien vers la Chine, l’Europe de l’Est, et ailleurs.

  • Ecole d’été 2010 – Crise économique: aucune solution sur base capitaliste

    Aujourd’hui, nous ne parlons pas seulement d’une crise économique, notre environnement est également en jeu. Et si nous analysons les développements actuels, c’est pour nous préparer pour le futur, pour nous préparer à intervenir. Il est vrai qu’il est difficile de déterminer exactement la façon dont les choses peuvent se dérouler, mais il est très clair qu’un certain nombre de pays font face à l’imminence d’une explosion sociale. La crise a déjà entraîné une diminution du niveau de vie de millions de personnes et des dizaines de millions connaissent l’insécurité, la peur du lendemain.

    Vers une plus grande instabilité

    La crise économique mondiale est parfaitement illustrée par la crise que traverse l’Europe. Newsweek et Times (deux magasines américains) ont consacré tous les deux et au même moment leur première page à l’Europe. Il y était notamment dit que le grand secret de l’Europe était que son secteur bancaire était plus touché que Wall Street et que les banques européennes sont tout aussi voraces que les américaines quand il s’agit de jouer avec des actifs toxiques.

    Les commentateurs bourgeois ne peuvent plus maintenant se permettre de parler d’un éventuel progrès, ils ne parlent que d’assainissements. La perte de confiance des classes dirigeantes et de leurs partisans, un peu partout dans le monde, est un élément important qui dans un certain sens exprime le cul-de-sac dans lequel se trouve le capitalisme. Toutefois, nous savons que le système capitaliste ne disparaitra pas de lui même, cela ne pourra arriver que par l’intervention consciente de la classe des travailleurs. Mais la division au sein même des élites dirigeantes est un élément important. Les tensions augmentent (comme les tensions commerciales entre différents pays ou encore les tensions entre différents niveaux de pouvoir). Au niveau international, de façon générale, nous allons vers une période caractérisée par de plus en plus d’instabilité.

    En 1938, Trotsky a publié le ‘‘Programme de transition, L’agonie du capitalisme et les tâches de la IVe Internationale’’ dans lequel il disait notamment que la bourgeoisie ferait tout pour éviter la déroute. C’est encore tout à fait vrai aujourd’hui, et on peut d’ailleurs le voir à la façon dont la bourgeoisie se défend.

    Le pouvoir le plus puissant que le monde ait jamais connu – l’impérialisme américain – est embourbé depuis 10 ans en Afghanistan. Ce que l’impérialisme américain espère, c’est de gagner assez de traitres à ses côtés pour pouvoir aboutir à une situation de ‘calme’ comme en Irak mais, même là, il n’est pas question de victoire. Tout comme Tacite le disait de l’empire romain, c’est une paix de désolations (‘‘ils firent un désert et le nommèrent paix’’). En Irak, la guerre civile a été temporairement gagnée par les chiites. Le pays est divisé sur base communautaire, mais ces délimitations peuvent voler en éclat à tout moment. Au lieu d’un Saddam Hussein, on peut en voir émerger une dizaine.

    Quant à la catastrophe de BP, où l’actionnariat est majoritairement américain, elle constitue une parfaite illustration de l’incapacité du capitalisme à gérer l’environnement. La détérioration de la planète est inévitable dans le système capitaliste. Les problèmes ne vont faire qu’empirer, y compris en termes de guerre. Si ce système continue ses méfaits, nous connaîtrons d’autres guerres pour les ressources, comme la guerre pour le pétrole au Moyen-Orient. Déjà aujourd’hui, il y a de plus en plus de conflits autour de l’approvisionnement en eau potable. On estime actuellement à 50 millions le nombre de réfugiés sur la question de l’eau, et ils seraient issus de 27 pays. Dans ce cadre, le sommet de l’ONU au sujet des changements climatiques de Copenhague a été un échec total.

    D’une politique de stimulants à une politique d’austérité

    L’incapacité du capitalisme à faire la moindre mesure progressive peut se voir concernant la crise économique. Dans un premier temps, on a tenté de se limiter à des plans de relance mais, puisque ces programmes de sauvetage n’ont plus d’effet, dans un deuxième temps, on passe maintenant à des plans d’austérité, à des attaques contre les travailleurs. Lors du dernier G20 à Toronto, les partisans des plans de relance étaient minoritaires, l’optique générale est maintenant de passer à des plans d’austérité très durs. Après ce sommet, seul Obama était en faveur de plans de relance. S’il n’avait pas adopté cette position, il aurait eu des problèmes et se serait retrouvé en minorité, y compris au sein de son parti. Mais le fait même qu’il ait été mis en minorité à Toronto illustre que l’impérialisme américain a perdu sa capacité d’imposer sa volonté.

    A certains moments les assainissements sont très brutaux, comme en Roumanie, à d’autre c’est plus léger. Le gouvernement britannique veut par exemple réduire le déficit budgétaire de 40 à 50% dans les 5 prochaines années. Les conséquences de ce genre de politique ont été illustrées, en Irlande notamment. Il y a quelques semaines, des milliers de personnes y ont manifesté: des parents d’handicapés mentaux qui s’occupent de leur enfant déficient à la maison. Ils avaient une institution où ils pouvaient déposer leur enfant une ou deux nuits pour souffler un peu, et une des premières conséquences des coupes budgétaires était, entre autres, la suppression de cette institution. Angela Merkel a déclaré que l’Allemagne devait donner l’exemple pour le reste de l’Union Européenne avec son plan d’austérité. Ces assainissements vont très certainement empirer la situation dans les autres pays, et pas seulement en Allemagne.

    Essai après essai, les entreprises veulent augmenter leur profitabilité, avec l’aide des gouvernements. Dans les environs de Venise, une commune a été jusqu’à interdire de faire des châteaux de sable. La raison est toute simple: les amendes rapportent de l’argent. Cela indique à quel point de désespoir se retrouvent parfois confrontées les autorités. Ce n’est certes pas un élément de ce type qui va déclencher une révolution, mais il suffit parfois d’une étincelle, aussi absurde soit-elle. Le doute qui subsiste dans l’esprit de la bourgeoisie est de savoir jusqu’où elle sera capable d’attaquer les travailleurs sous l’argument "Vous êtes obligés d’accepter les coupes, sinon c’est la Grèce qui vous attend". Cette menace est même utilisée aux Etats-Unis.

    La Grèce est le maillon faible du capitalisme européen. La situation qui s’y développe est un test pour la bourgeoisie et pour la classe ouvrière, mais aussi pour le CIO: comment une de ses sections peut-elle réagir et adapter son intervention dans une telle situation. La grève du 5 mai était la plus grande depuis 25 ans, de même que la taille des manifestations. L’attaque du Parlement avait été le fait de travailleurs du service public. Il y a aussi eu des mouvements de masse dans les secteurs de l’enseignement, des hôpitaux,… En fait, tous les secteurs les plus importants, du privé ou du public, ce sont mis en action durant cette période. A Athènes, il y a eu des mobilisations contre le gouvernement chaque semaine. Nous sommes dans une phase où les commentateurs ont peur que l’expérience grecque rate son coup à cause d’une trop grande mobilisation. Les jeunes, les travailleurs et les commentateurs font le parallèle avec l’Argentine du début de ce siècle. Mais le gouvernement tient bon, parce que les directions syndicales n’ont aucune idée de la manière de réagir, aucune réelle stratégie ni alternative.

    Nos slogans sont "abolition de la dette – nationalisation du secteur financier", tout en appelant à des actions communes pour rassembler les grévistes. La lutte est actuellement en pause, mais le sentiment général est que les luttes recommenceront en septembre. Nous devons aussi renforcer la revendication de nationalisation sous le contrôle démocratique de la population du secteur financier. C’est une revendication qui avait suscité un grand enthousiasme quand Joe Higgins en avait parlé lors d’un grand meeting de la formation large de gauche grecque Syriza. Nous sommes les seuls à accorder autant d’attention à cela. Une banque publique ou des mesures visant à rester dans le cadre de la compétition entre banques sont des mesures insuffisantes.

    De sombres perspectives économiques

    Tous ces budgets d’austérité seront incapables de solutionner quoi que ce soit. Les capitalistes se réfèrent à la Suède ou au Canada au début des années ‘90, et ils caricaturent ce qui y a été réalisé. A l’époque, le capitalisme était en croissance, différence fondamentale avec aujourd’hui. Les éléments actuels de rémission du capitalisme sont avant tout circonstanciels et non structurels, on ne parle pas de croissance des moyens de productions.

    De toute façon, avant même de discuter de cette soi-disant reprise économique, de sa nature et de sa durée, il faut bien se rendre compte que, pour l’écrasante majorité des travailleurs et des jeunes, la reprise économique n’a pas ouvert de meilleures perspectives d’avenir. Cela est tout au plus considéré comme un évènement temporaire. Même dans les pays où la reprise a été plus importante, quand on regarde les chiffres, on se rend compte qu’il s’agit pour beaucoup d’un écran de fumée. Ainsi, dans les médias, on s’est moqué de la reprise économique allemande comme d’un conte de fée. Cette année sera certes un record en termes d’exportations des automobiles allemandes, mais les ventes au sein même du pays vont reculer de 30% pour cette année. La fragilité de la reprise est notamment illustrée par l’utilisation de la capacité de production de l’économie allemande, qui se situe sous les 80% alors que la moyenne était précédemment de 84%. De plus, aucune certitude n’existe quant à la durée de cette reprise économique. Nous devons regarder tous ces chiffres avec beaucoup de prudence. Par exemple, selon les chiffres, le pays qui a connu la plus forte progression de sa production industrielle est Singapour (+64% en une année), mais ce n’est que le reflet de l’ampleur de la chute connue l’année d’avant! Aucun commentateur bourgeois n’a en fait de réelle confiance dans le système. Le dernier rapport du FMI a d’ailleurs revu à la baisse ses prévisions économiques.

    Le mieux auquel s’attendre, c’est une stagnation avec un chômage de masse. Mais nous nous dirigeons vers une nouvelle récession, et très probablement vers une nouvelle crise bancaire. Les Etats réinterviendront encore avec l’argent de la collectivité (comme ils l’ont déjà fait), mais une nouvelle crise bancaire combinée à une récession aurait un grand effet. Le résultat serait une nouvelle dégradation importante du niveau de vie des masses, mais l’impact politique serait également énorme. Ce serait une défaite gigantesque pour la classe capitaliste et cela provoquerait une remise en question encore plus grande du système capitaliste, avec la recherche d’une alternative.

    La dette publique a remplacé la crise des dettes financières. Mais quelle classe sociale est responsable de cette dette publique? D’un pays à l’autre, les conditions sont différentes, mais c’est généralement une conséquence du renflouement des banques. C’est encore une conséquence du fait que l’Etat a dû garantir la faillite financière et immobilière. Nous devons expliquer que la crise n’est pas provoquée par les pensionnés grecs ou par les travailleurs des services publics. Il y a 3 ans, en 2007, tous les Etats avaient un déficit d’à peine plus de 1%. Depuis lors, la moyenne est montée de 1.7% à plus de 8%, malgré l’absence d’augmentation des pensions par exemple.

    Les plans d’austérité vont encore aggraver les conséquences de la crise. Les keynésiens classiques ont raison de dire que le problème fondamental, c’est la demande insuffisante. Le prix Nobel d’économie Paul Krugman a raison d’affirmer que les capitalistes sont repartis vers la politique de Hoover en 1929: liquider les acquis des travailleurs. Il a aussi raison quand il indique que les politiques actuelles vont poser les bases d’une seconde crise, beaucoup plus profonde.

    En cas d’augmentation des dépenses publiques: qui va payer ? Si on fait payer les bourgeois, ils vont se retirer et arrêter d’investir. L’idée générale est de s’en prendre aux travailleurs et à leurs familles, mais il faut s’attendre à ce qu’un tsunami de résistance accompagne le tsunami d’austérité. De plus, malgré toutes les coupes, les déficits des budgets des Etats seront encore plus profonds à la fin de l’année qu’au début et les milliards retirés de l’économie par les plans d’austérité vont peser sur elle. La Chine est le seul pays à avoir connu une bonne reprise sur base des investissements d’Etat, mais cette reprise se place dans le contexte d’une grosse surchauffe de l’économie.

    Remontée de la lutte des classes

    Quant aux travailleurs, l’impact de la crise les frappe de plein fouet. Ceux qui retrouvent un emploi après l’avoir perdu connaissent des conditions de travail bien pires. En Grèce, la possibilité d’un effondrement complet des conditions de travail n’est pas à exclure. En Espagne, 90% des emplois disparus concernaient les couches de travailleurs précaires, mais une bonne partie de la population connait ces conditions. Tous les regards se portent vers le sud de l’Europe, et l’atmosphère combative qui y existe est inspirante. En Angleterre, certains Tories (les conservateurs) ont même été jusqu’à dire qu’ils allaient faire des manifestations contre leur propre gouvernement suite à l’annonce d’attaques contre les budgets des écoles! Tout a été utilisé pour décrédibiliser le mouvement qui se développe en Grèce. Mais toute cette propagande capitaliste a ses limites. Jusqu’ici, les capitalistes se basaient beaucoup sur l’idée que les richesses se répartiraient, que ‘‘demain sera meilleur’’. Cette idée est en train d’être réduite en morceaux.

    Aujourd’hui, les protestations se généralisent. Grèce, Portugal, Espagne, France,… les luttes se développent, mais les directions syndicales jouent un rôle de frein. Lors d’une grande manifestation à Bologne, en Italie, le dirigeant syndical local a notamment dit "personne ne remet en cause qu’il doit y avoir des coupes budgétaires, mais il faut les faire autrement". Avec des dirigeants pareils, on n’est pas encore sortis de l’auberge. Quand Rosa Luxembourg décrivait le rôle des dirigeants sociaux-démocrates durant la première guerre mondiale, elle était particulièrement virulente. Mais que dirait-elle aujourd’hui? L’attitude des dirigeants syndicaux actuels est de compliquer la situation. En Belgique, cela a laissé une certaine ouverture pour approfondir la crise communautaire et aux USA cela s’exprime avec le Tea Party. En Hongrie et en Grèce, l’extrême-droite se renforce. Des questions comme l’immigration commencent à devenir des questions clés, auxquelles nous devons apporter une attention toute particulière.

    Le mouvement de résistance ne se développe pas partout de la même manière. En Grande-Bretagne par exemple, les mesures mises en avant par le gouvernement actuel sont les plus dures depuis 1922, ce qui avait jeté les bases pour la grande grève générale de 1926. Nous en sommes encore loin aujourd’hui. Le niveau de conscience des masses a fortement chuté depuis la chute du mur. Avant, une grève générale posait très rapidement la question du pouvoir et de la confrontation avec l’Etat capitaliste. D’une certaine manière, toutes les grèves générales font cela. Mais l’absence actuelle d’un facteur subjectif de masse, même sous la forme d’un parti réformiste très confus, complique les choses.

    Le capitalisme est incapable de résoudre les problèmes qu’il engendre. Il connaît sa plus grande crise, mais la conscience des masses n’est pas à la hauteur de la situation. Cela ne signifie toutefois pas dire qu’on ne peut pas vaincre la bourgeoisie, comme en France, en 1995, quand le premier ministre Alain Juppé avait connu une défaite avec son ‘‘plan Juppé’’.

    Nouveaux partis des travailleurs, ouverture pour les idées socialistes

    Un des points cruciaux pour reconstruire la conscience des masses est la création et le développement de nouvelles formations politiques larges capables d’orienter des couches larges de la population dans les luttes afin qu’elles puissent apprendre de leur expérience pratique de lutte. Mais il existe le danger de l’électoralisme. Le point le plus important est de maintenir une orientation claire vers les entreprises et le monde du travail. Ces nouvelles forces peuvent se développer très vite, mais également s’effondrer très vite, comme l’illustre l’exemple de Rifondazione Comunista en Italie. Cette formation avait un grand potentiel, qui a beaucoup souffert de sa participation au gouvernement capitaliste de Prodi ainsi qu’à des coalitions locales. Aujourd’hui, l’état général de l’opposition est tel qu’il n’est pas impossible que Berlusconi remporte d’autres victoires malgré les scandales, les conséquences de la crise économique, les attaques contre les travailleurs,…

    L’espace laissé vacant par le mouvement ouvrier se rempli d’autre chose, et nous avons eu différents exemples dans plusieurs pays. Nous pouvons comprendre ces développements au vu de la pourriture des anciens dirigeants politiques. En Italie, il y a le Mouvement Violet. Vu la chute du PRC, il est quasiment inévitable de voir même des couches syndicales développer un état d’esprit antiparti et antipolitique. On peut également voir se développer des tendances au terrorisme, comme en Grèce où l’on assiste à des attentats contre des commissariats ou des banques. L’absence de formulation d’une riposte face à la crise par les directions syndicales est à dénoncer dans ces actes. Les camarades grecs ont ainsi parlé de dirigeants syndicaux qui appelaient à faire grève, mais qui étaient incapable de participer aux actions car les travailleurs les attaquaient dès qu’ils les voyaient pour leur mollesse.

    Pour l’instant, ce sont surtout les organisations d’extrême droite ou populistes de droite qui connaissent une petite poussée. Même si des organisations de gauches de masses existaient, avec le racisme latent dans la société, ces organisations auraient de toute façon connu une poussée dans un premier temps. La question nationale refait également son apparition (Ecosse, Belgique, Pays Basque,…)

    Les choses ne se développent pas qu’en Europe. Au Moyen-Orient, face à la corruption des régimes en place, de plus en plus de travailleurs sont ouverts à nos idées. En Russie, une opposition se développe contre Poutine. Au Kazakhstan également, avec une petite organisation, nous avons pu lancer une organisation ouvrière de masse, Kazakhstan 2012. En Chine, de gigantesques usines existent, avec des conditions de travail véritablement horribles. Des filets ont par exemple été fixés sous les fenêtres d’une usine Foxconn où 12 travailleurs se sont suicidés cette année. L’Etat est bien conscient du problème et essaye de créer de nouveaux syndicats "patronaux", pour tenter d’étouffer la contestation. Mais les grèves continuent de se développer.

    Dans toute une série de pays, de grands mouvements ont déjà pris place. Plusieurs syndicats ont déjà appelé à une grève générale en septembre. Dans d’autres pays, on parle surtout de manifestation ou de journée d’action (de la part des directions syndicales), d’où l’importance de la manifestation du 29 septembre à l’appel de la Confédération Européenne des Syndicats. Il est important de voir comment nous allons intervenir dans ces évènements et comment cadrer cela dans les évènements qui forment la conscience et la combativité de la classe ouvrière. Nous ne devons pas seulement intervenir pour construire le mouvement mais aussi pour voir quel élément mettre en avant et pourquoi. Il est important de comprendre que les attaques antisociales peuvent provoquer différents types de réactions à différents moments.

    Cette crise économique et sociale a aussi son impact politique avec la chute du soutien des partis au pouvoir en Allemagne, en France, en Italie ou même au Japon. La semaine dernière, des élections se sont déroulées pour le parlement japonais. Le premier ministre, élu depuis juillet seulement, a reçu une raclée électorale de grande ampleur, parce qu’il a commencé à parler d’assainissements et du doublement d’une taxe. Quant aux conservateurs britanniques, ils avaient banni le terme "austérité" de leur vocabulaire pendant la campagne, mais ce n’était qu’une opération de communication. Dans différents pays, il y a de grands changements d’état d’esprit très rapide, et une des conséquences de ce processus est que cela mine le soutien des gouvernements en place. Du point de vue des mouvements futurs, l’intervention des camarades de Chypre était intéressante, avec un gouvernement de centre-gauche qui essaye de prendre des mesures également contre les riches, mais qui est de suite bloqué au Parlement. Ce qui est encore possible, ce sont des gouvernements élus sur base de populisme,… mais qui peuvent provoquer des mouvements sociaux importants. C’est entre autres le cas de la Grèce, où le gouvernement est en place depuis 9 mois seulement, élu sur base du moindre mal et de la promesse de ne pas appliquer l’austérité, et a suscité des mouvements sociaux de grande ampleur.

    Ce que le capitalisme nous propose, c’est un monde où chacun est en lutte contre chacun. Notre tâche est de préparer la classe ouvrière pour prendre le pouvoir et s’émanciper. En ce sens, la moindre erreur théorique se paye très cher dans la pratique. Mais nous avons réussi à démontrer ce que nous sommes capables de faire. Dans une telle période, un petit groupe avec des idées claires et qui est enraciné dans les masses peut avoir un impact énorme. A la fin des années ’80, dans des circonstances spécifiques, nous avons pu diriger un mouvement de masse contre la Poll Tax en Angleterre, un mouvement qui a rassemblé 18 millions de personnes, et nous étions à l’époque quelques milliers dans le pays. Cette école d’été a pour vocation de nous préparer à cela. A travers son expérience de lutte, la classe ouvrière va arriver à la conclusion que la seule façon de sortir de ce système, c’est la voie vers le socialisme.

  • Thaïlande : Affrontements dans les rues de Bangkok – Aucun parti de la majorité n’a de solutions pour l’emploi et la précarité

    Bangkok et d’autres villes thaïlandaises connaissent maintenant un calme temporaire. Mardi, le dirigeant des protestataires Prateep Ungsong Hata a déclaré à l’agence de presse AFP : "nous avons menés des discussions entre leaders la nuit dernière et nous sommes tombés d’accord sur le fait que nous disperserons nos partisans pour un moment."

    Claire Doyle, CIO, traduction par Khadija (Bruxelles)

    Quelques jours durant, des affrontements et combats ont déferlé dans les rues de Bangkok. L’armée a recouru aux tanks et munitions contre des milliers de jeunes contestataires, les Chemises Rouges, des bus ont pris pour cible les barrages de la police, des buildings, voitures et pneus ont été incendiés, la voiture du premier ministre a été attaquée et des véhicules blindés ont été déplacés par la foule en colère. Le bilan fait état de 2 morts et de 100 blessés sérieux.

    Le but des Chemises Rouges est d’évincer Abhisit Vejjajiva – le quatrième premier ministre de la Thaïlande en 15 mois – et de faire revenir le multimillionnaire Thaksin Shinawatra dont le gouvernement a été renversé par un coup d’état militaire en 2006.

    Le 11 avril, apparemment sans encombre, ses partisans ont envahi et occupé l’hôtel Royal Cliff Beach à Pattaya, forçant 16 chefs d’Etat asiatiques présent pour le congrès à quitter l’hôtel par le toit en hélicoptère. L’état d’urgence a été déclaré et les Chemises Bleues (les paramilitaires thaïlandais) ont été déployés. mais les sympathisants présents à Bangkok ont pris d’assaut le ministère de l’intérieur et encerclé les bâtiments du gouvernement dans le centre de la capitale. Leur parti est connu comme étant le Front Unis pour la Démocratie contre le système Dictatorial.

    A la fin de l’année passée, les partisans d’Abhisit, les chemises jaunes, avaient occupé le siège du gouvernement pendant 2 mois et envahi et occupé 2 aéroports où s’était réfugié le gouvernement. Finalement, le gouvernement a été forcé de céder. L’armée n’a peu ou rien dit, étant du côté des chemises jaunes. Le 12 décembre, le parti d’Abhisit, "l’Alliance du Peuple pour la Démocratie" (APD) avait gagné suffisamment de parlementaires pour former un gouvernement (pour certains grâce à l’argent, d’autres dénoncent des menaces de l’armée.)

    L’APD est essentiellement basé sur les classes moyennes urbaines et certaines sections de la classe ouvrière et soutient la participation de la monarchie et de l’armée au gouvernement, qui comptent 70 % de représentants non-élus. Le soutient de Thaksin est principalement issu de paysans pauvres dont il a su s’assurer les faveurs avec des mesures populistes. Mais en même temps, il a mené une politique néolibérale pour apaiser les investisseurs et la classe bourgeoise, chose qui a irrité les ouvriers et les milieux plus urbains.

    Malgré les 50.000 personnes rassemblées au moment de la crise gouvernementale de l’an dernier, quelques jours après l’arrivée d’Abhisit au pouvoir, Thaksin est toujours absent et a été condamné par contumace à deux ans de prison pour conflit d’intérêts. Le 12 avril, ce dernier a déclaré à ses partisans: "Maintenant que les tanks sont dans la rue, il est temps pour le peuple de mener la révolution !!" Après une victoire de ses partisans, il aspire à un retour triomphal.

    Si la situation des défavorisés de Thaïlande n’était pas si tragique et que plusieurs d’entre eux n’avaient pas perdu la vie, les événements de ces derniers jours pourraient paraître comiques. Dans le contexte économique actuel – la Thaïlande est l’un des pays les plus affecté par la crise capitaliste mondiale – aucun parti n’a de programme ni de mesures pour sortir le pays de la grande précarité et de l’angoisse. C’est ce qui se cache derrière la colère et la haine qui a éclaté dans les rues, principalement du fait de la jeunesse. Mais il n’existe aucun parti qui se positionne à la fois contre l’élite dirigeante et contre le populiste milliardaire.

    Le congrès, finalement annulé, de l’Association des Nations Asiatiques du Sud Est (Asean), avec la Chine, le Japon, l’Inde, la Corée du Sud et enfin la Nouvelle-Zélande était consacré à la recherche de remèdes contre les problèmes économiques, mais sur base du capitalisme, aucune solution n’existe.

    Ce qui se passe en Thaïlande, un pays qui a vu au total 18 coups d’Etat depuis 1930, est une indication politique importante de l’agitation et de l’instabilité qui pourrait se répéter à une échelle encore plus grande dans d’autres pays d’Asie sous l’impact de la crise actuelle. Il est urgent de créer des partis représentant la classe ouvrière et les pauvres afin de se battre pour une transformation sociale en Asie mais également sur le plan international.

  • III. NOTRE PROGRAMME

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    "Le PSL – LSP, un parti pour changer de société"

    Préface

    I. Histoire du PSL/LSP

    II. Perspectives, tâches et objectifs

    – IV. Notre fonctionnement interne

    Cette brochure peut être commandée via redaction@socialisme.be et revient à 3 euros (que vous pouvez verser sur le n° de compte 001-2260393-78 du PSL/LSP avec la mention "brochure PSL").
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    Idéologie

    Beaucoup de gens disent qu’ils n’adhèrent à aucune idéologie particulière, il est même devenu assez «tendance» de se dire pragmatique. Depuis la chute du stalinisme, à la fin des années ’80 – début des années ’90, la classe dominante et ses collaborateurs intellectuels ont déclaré avec grand fracas que le débat idéologique avait pris fin. Seul le marché «libre» était dorénavant considéré comme étant efficace. Pour reprendre la célèbre expression du philosophe Francis Fukuyama (qui a très peu fait parlé de lui par la suite) la «fin de l’histoire» a été explicitement proclamée.

    La raison pour laquelle peu de gens parlent encore de cette prétendue «fin de l’histoire» n’est pas compliquée à trouver: les contradictions de classes n’ont fait que s’accroître durant les années 1990 et 2000 et le clivage entre riches et pauvres est aujourd’hui gigantesque. De plus en plus de travailleurs et de jeunes se retrouvent sur le côté. Cette situation conduit inévitablement à de nouveaux questionnements ainsi qu’à la recherche d’une réponse générale contre le capitalisme ; autrement dit : une autre idéologie, capable de mieux expliquer les développements sociaux que l’ancienne.

    A travers l’histoire, les classes dirigeantes ont toujours essayé de présenter leurs idées comme «naturelles», «éternelles», et «normales». La bourgeoisie n’agit pas différemment au travers de ses partis, de son enseignement, de ses médias et de ses intellectuels. Attardons nous sur quelques clichés de la vision capitaliste :

    – «La société n’est pas constituée de différentes classes économiques, mais bien d’individus indépendants.»

    Cela est totalement faux. Il existe une classe dirigeante qui dispose de la propriété privée des machines, des ressources, etc. Cette propriété privée des moyens de production entraîne inévitablement l’exploitation de la majorité de la population et une compétition mortelle, contrairement à ce que permettrait une économie démocratiquement planifiée. Il y a donc bien des groupes aux intérêts divergents et irréconciliables dans la société capitaliste. Un tel système contradictoire conduit immanquablement à des crises de surproduction.

    – «Les restructurations et les licenciements sont déplorables, mais sont un phénomène temporaire, et nécessaire à la viabilité de l’économie.»

    Tout aussi faux. Le chômage a, en Belgique, augmenté de 70.753 personnes au début des années ’70 à plus d’un demi-million de personnes qui dépendent de l’ONEM aujourd’hui. Le licenciement des travailleurs est seulement «nécessaire» afin de garantir les profits des patrons et PAS pour maintenir une économie saine. Les profits d’une petite élite priment sur tout le reste.

    – «Celui qui est sans emploi l’est uniquement par sa propre faute. C’est un problème personnel, pas social.»

    Une fois de plus, c’est un mensonge. Le chômage structurel – alors que tant de besoins ne sont pas satisfaits dans la société (garderies à bon marché, facilités de loisir, enseignement de qualité,…) – est une maladie liée à la crise de surproduction capitaliste.

    Les frais salariaux sont seulement une excuse pour des capitalistes à la mémoire courte. Dans les années ’50 et surtout ’60, un système de sécurité sociale a été construit, et les salaires réels sont montés de manière significative. Mais ce processus a pris place dans une période de forte croissance capitaliste. Depuis la politique néolibérale, au début des années ’80, nos salaires directs et indirects (pensions, allocations, etc.) ont fortement diminué en termes de pouvoir d’achat. Cela n’empêche pas les patrons de systématiquement parler du coût salarial comme d’un facteur «destructif pour l’emploi». La seule chose destructive pour l’emploi est pourtant le système capitaliste qu’ils défendent.

    – «L’idée de redistribuer les richesses est le reflet d’une jalousie vis-à-vis de ceux qui ont réussi dans la vie. La position de quelqu’un dans la société correspond à ses efforts et à ses talents.»

    Faux. La redistribution des richesses signifie de réclamer aux grands actionnaires le travail non-payé, grands actionnaires dont l’activité ne consiste d’ailleurs qu’à s’asseoir sur leurs culs de fainéants, à remplir des coupons et à les commercialiser. Etre riche aujourd’hui signifie avant tout être né dans une «bonne famille». Les efforts et les talents de la majorité des travailleurs sont constamment niés par le capitalisme. Par la routine robotique, le manque de contrôle et de démocratie, ces talents sont à peine utilisés.

    – «Le socialisme ne correspond pas à la nature humaine, car la majorité des gens est égoïste.»

    Encore une autre désinformation. Dans la nature humaine, on peut indubitablement constater des éléments d’altruisme, par exemple dans la relation des parents envers leurs enfants. Mais la lutte pour le socialisme ne se base pas sur l’idée que nous devrons faire «plus avec moins». Bien en contraire. C’est dans la lutte pour les intérêts matériels de la majorité de la population que se trouve le fondement même des mouvements de lutte à venir.

    – «La révolution, c’est un coup d’Etat chaotique réalisé par une petite minorité, comme cela a été le cas en Russie en octobre 1917.»

    C’est quelque chose que l’on entend également très souvent, mais là encore, c’est très loin de correspondre à la réalité. Les révolutions ont lieu seulement quand les masses ne veulent plus vivre de l’ancienne manière : quand les masses laborieuses arrivent sur la scène de l’histoire. Nous parlons d’une intervention consciente et organisée des masses pour prendre la gestion de la société entre leurs mains. La révolution de 1917 était portée par la majorité des travailleurs et des paysans pauvres, organisée dans des conseils (soviets) démocratiquement élus.

    – «Une économie planifiée n’est pas réaliste. Qui voudrait encore travailler?»

    Cette idée rejoint la thèse sur la nature humaine «égoïste». La satisfaction du travail pour les masses trouvera sa source dans le fait qu’elles contrôleront elles-mêmes les produits de leur travail, et ce d’une manière démocratique. Ce sera un stimulant économique et social énorme. Les conditions de vie pourraient de nouveau augmenter sur toute la planète, avec des possibilités gigantesques pour les nouvelles technologies et les sciences, tout en tenant compte de l’environnement. C’est seulement sur base d’une économie démocratiquement planifiée que l’on pourra réellement respecter l’environnement, nécessité vitale pour chacun.

    Ce sera l’intérêt commun et non le profit d’une petite élite qui sera mis en avant par des discussions dans les conseils ou comités de travailleurs. La technologie, qui actuellement conduit à plus de chômage au fur et à mesure des progrès en entraînant des crises de surproduction, pourrait sous une économie planifiée élargir le temps libre, la liberté humaine et la connaissance de ce que la planète a à nous apporter de façon considérable.

    On pourrait encore aborder beaucoup d’autres questions. Est-ce que les travailleurs d’aujourd’hui sont encore exploités, comme au 19e siècle ? La majorité d’entre nous n’est-elle pas devenue heureuse grâce au capitalisme, à l’exception de quelques problèmes provisoires et marginaux ? En fait, la machine de propagande bourgeoise tourne tellement bien que certaines finissent pas la croire, malgré des statistiques qui prouvent le contraire.

    Il en va ainsi du «Quart-Monde», que beaucoup de gens considèrent comme ayant toujours existé, et destiné à disparaître à terme. En réalité, la notion de «Quart-Monde» est née dans les années ’80 suite aux économies opérées dans les services sociaux. Depuis quelques années, même ceux qui ont un emploi ne sont plus certain d’échapper à la pauvreté.

    En fait, les idées capitalistes sont quotidiennement diffusées par des milliers de canaux tandis que la réponse socialiste à ce flot de propagande ne dispose bien évidemment que de peu de moyens. Ainsi, quand la presse bourgeoise parle des grèves, elle parle essentiellement de la nuisance de celles-ci. Pourquoi n’entend-t-on jamais dire de leur part que sans les grèves, les grèves générales et les manifestations de travailleurs, nous n’aurions jamais eu le droit de vote ou la sécurité sociale? Ce n’est pas un fait objectif peut-être? Ou est-ce simplement parce que cela déplaît à l’idéologie dominante, celle de la classe dominante et de ceux qui servent ses intérêts?

    Et d’ailleurs, est-ce qu’il existe encore des idéologies? On prétend aujourd’hui facilement qu’au 19e siècle, à l’époque de Marx, il y avait encore de grandes contradictions de classes, mais que celles-ci ont entre-temps disparu. La raison avancée pour étayer cette thèse est que la classe ouvrière de l’époque de Marx n’existe plus aujourd’hui. C’est un argument auxquelles nos oreilles auraient à force presque tendance à s’habituer, alors qu’il n’y a pas la moindre parcelle de vérité là-dedans.

    Au 19e siècle, la classe ouvrière était une petite minorité largement désorganisée. Politiquement, elle était proche du parti Libéral, et on ne parlait même pas encore d’un parti ouvrier (de tels partis sont nés seulement vers la fin du 19e siècle). Une des tâches les plus importantes de Marx a consisté à donner une idéologie propre et globale à la classe ouvrière ainsi qu’à créer des organisations ouvrières indépendantes de la bourgeoisie. Marx parlait de transformer la classe ouvrière d’une classe «en soi» (qui existe) en une classe «pour soi» (conscience de son existence en tant que classe aux intérêts communs).

    Aujourd’hui, la classe ouvrière constitue la majorité de la population. Elle est bien éduquée, organisée dans des syndicats, possède un certaine degré d’indépendance politique et, depuis le 19e siècle, elle a obtenu le droit de vote, la liberté de la presse, le droit de grève, etc. Il est normal que la bourgeoisie essaie de s’en prendre à ces droits. Les patrons font bien entendu tout pour miner et diviser cette force potentielle en scissionnant des entreprises (la scission de Bayer à Anvers en Bayer et Lanxess, par exemple) ou à l’aide de la sous-traitance.

    C’est dans ce cadre qu’il faut replacer les attaques contre le droit de grève. Les patrons veulent limiter le pouvoir potentiel des travailleurs, avant que ce pouvoir ne se manifeste de manière trop évidente. En France, Sarkozy a fait voter une loi qui oblige les grévistes, dans le secteur des transports publics, à annoncer préalablement une grève à la direction. Ils veulent ainsi pouvoir anticiper les effets de la grève et soumettre les travailleurs à l’intimidation. Les politiciens et les patrons rêvent d’élargir cet exemple à d’autres secteurs.

    En Belgique, comme en France, la discussion sur le «service minimum» est lancée. A quoi sert une grève, si des remplaçants sont sur place? Les directions syndicales nationales de la CSC et de la FGTB n’ont pourtant pas émis de forte résistance contre une telle idée. Dans certains cas, ils ont même aidé la droite dans ses réflexions sur le sujet, tant leur peur des actions spontanées et des mouvements généralisés est profonde. Comme Trotsky l’a déclaré il y a quelques décennies, si les dirigeants syndicaux ne rejettent pas le système, alors ils s’y incorporent de plus en plus.

    Les dirigeants syndicaux ne portent pas juste une «petite» part de responsabilité sur leurs épaules dans l’absence de perspectives de toute une génération et d’une jeunesse immigrée abandonnée par le capitalisme. Aujourd’hui, dans beaucoup de villes européennes, on assiste à l’émergence de ghettos auxquels aucun politicien bourgeois ne s’intéresse. L’aliénation que ceci peut amener, nous avons pu la voir à l’œuvre dans les explosions violentes des banlieues françaises en 2005. Des voitures et des entreprises ont été incendiées. Des attaques ont été commises contre des bus dans lesquels se trouvaient des travailleurs ordinaires victimes de la politique néolibérale au même titre que les jeunes. On a pu voir également les attaques de la part de jeunes immigrés contre leurs compagnons d’âge pendant les manifestations et les grèves contre le CPE (Contrat Première Embauche), tout cela parce qu’ils faisaient selon les jeunes des banlieues partie des «riches». Ces exemples sont tous des signes d’une société malade. De nouveaux partis des travailleurs doivent, avec l’aide des syndicats, défendre toutes les couches de la population, même les plus opprimées. Ne pas le faire ouvre la porte aux islamistes radicaux, et, parmi la jeunesse blanche, à l’extrême-droite.

    Il y a encore de grands débats idéologiques en vue. Ni la classe ouvrière, ni l’exploitation n’ont disparu et, en conséquence, pas non plus la nécessité d’un fondement idéologique. Ce qui a disparu, c’est les idéologies réformistes des sociaux-démocrates, ainsi que des dirigeants staliniens.

    Ces derniers, après la chute des régimes staliniens, ont couru à toute vitesse vers le camp du marché libre, parfois avec quelques «corrections sociales» mais sans le plus souvent. A tel point que l’ancien premier ministre britannique Tony Blair prétend maintenant que le Parti Travailliste n’aurait jamais dû rompre avec les libéraux! En fait, ce que Blair demandait en disant cela, c’était un retour à la période qui a précédé Marx.

    C’est assez logique pour quelqu’un qui a intérêt à ce que l’idéologie capitaliste reste la seule en course, ce qui concrètement signifie que tout doit rester comme avant. «Pas d’idéologie» ou le «pragmatisme» néolibéral, ce ne sont rien d’autre que des formes revêtues par l’idéologie bourgeoise qui a entre autres conduit aux libéralisations, aux privatisations, à la chute du pouvoir d’achat et à une flexibilité croissante.

    Le fait que la discussion sur le «socialisme du 21e siècle» ait été lancée au Vénézuela et en Amérique Latine n’arrive pas au bon moment pour la classe capitaliste. Pour nous, ce n’est que le début du type de discussions qui vont gagner en intensité dans les années à venir, en Europe et dans les pays développés également. Très certainement dans le cadre de cette crise économique qui risque d’être la plus importante jamais connue et si la tendance à la formation de nouveaux partis des travailleurs se confirme.

    Chavez a mené une série de mesures positives pour la population pauvre en partie grâce au prix élevé du pétrole, dont le Vénézuela regorge. Nous soutenons bien entendu ces mesures (supermarchés spéciaux pour les pauvres, campagnes d’alphabétisation, meilleurs soins de santé avec l’aide de médecins cubains,…). Mais, malheureusement, Chavez n’est pas clair sur la nécessité d’opérer une véritable rupture avec le capitalisme. Il n’y a pas encore autant de nationalisations qu’il y en a eu au Nicaragua dans les années ’80, où d’ailleurs le processus révolutionnaire avait été renversé. Suite à la crise économique, au fur et à mesure de la baisse des revenus pétroliers, cela va fortement limiter l’espace dont dispose Chavez pour l’application de mesures sociales et le soutien pour le régime pourrait en sortir considérablement miné. De plus, le développement d’organes de classe indépendants (comités de lutte élus, partis, etc.) est freiné par l’approche «de haut en bas» du régime.

    Les références de Chavez au socialisme reflètent une pression de la base. Elles expriment la volonté des masses d’abandonner la misère du capitalisme pour construire un nouvelle société.

    IDEOLOGIE ET PROGRAMME

    Le mot «programme» est souvent compris comme «cahier de revendications». Mais un programme, c’est bien plus que cela. Le cahier de revendications n’est que la pointe de l’iceberg, autrement dit l’application concrète d’un programme sous certaines conditions.

    Par exemple, il est possible que l’on soit complètement d’accord avec le cahier de revendications du MR aujourd’hui, sans nécessairement souscrire à tout le parcours historique de ce parti, aux différentes réponses que les libéraux ont offert à travers l’histoire. Pour être un vrai libéral, il ne faut pas seulement souscrire à leur cahier de revendications actuel, mais aussi à la manière avec laquelle ils sont arrivés à cela.

    En d’autres termes, un programme signifie: un cadre idéologique consistant et historiquement construit, une analyse de la situation actuelle, une orientation générale, une stratégie et une tactique. Sans cela, on peut être d’accord avec le MR aujourd’hui mais être complètement en désaccord avec eux demain, lorsque les conditions auront changé. A l’inverse, il est possible d’être d’accord avec le populiste de droite Jean-Marie Dedecker sur un cadre historique libéral, mais avec un autre cahier de revendications.

    Dans un parti qui souscrit à l’idéologie dominante, l’idéologie bourgeoise, cela ne joue pas un rôle tellement important. Par contre, lors d’une révolution ou de grands mouvements de lutte, ces différences peuvent comporter des conséquences catastrophiques.

    C’est pour ça qu’un programme, au sens marxiste du terme, ne peut pas se limiter à un simple cahier de revendications. Le Manifeste du Parti Communiste, écrit par Marx et Engels comme proposition de programme pour la «Ligue des Communistes», était en premier lieu une analyse historique du développement du capitalisme, une perspective sur son futur développement, une orientation générale vers le mouvement ouvrier, et enfin une discussion sur la stratégie et la tactique à adopter vis-à-vis d’autres courants socialistes. Une page seulement sur les 80 à 100 pages du Manifeste (en fonction de l’édition), contient un cahier de revendications en 10 points.

    Les thèses d’Avril de Lénine, le document programmatique des Bolcheviks pour la révolution d’Octobre ‘17, ou encore le programme de transition élaboré par Trotsky en 1938 nous donnent la même image. Autrement dit : on n’est pas pour autant marxiste parce qu’on est d’accord avec une ou même toutes les revendications du cahier de revendications. On le devient réellement sur base d’une analyse historique et actuelle de l’évolution de la lutte des classes et des grandes tâches générales qui en découlent.

    Le PSL/LSP et le Comité pour une Internationale Ouvrière basent leur programme sur l’œuvre de Marx, Engels, Lénine et Trotsky; sur les textes des quatre premiers Congrès de la Troisième Internationale, sur le Congrès fondateur de la Quatrième Internationale et sur les textes du CIO (créé en 1974) et de ses pionniers depuis la Deuxième Guerre Mondiale. Cela n’est pas rien et cela ne signifie pas non plus que nous sommes d’accord avec ces textes à la virgule près. Nous utilisons ces documents comme référence, comme méthode d’analyse et comme fil rouge pour nos orientations et tâches pratiques.

    LE PROGRAMME DE TRANSITION

    Naturellement, nous comprenons que tous les travailleurs et les jeunes ne souscrivent pas à 100% de notre programme. C’est pour cela que Trotsky a développé la notion de programme de transition. Par «programme de transition», il entendait un programme qui part de ce qui est nécessaire pour les travailleurs et leurs familles à un moment précis et qui met en avant la transition socialiste de la société.

    Trotsky affirmait qu’il ne sert à rien d’élaborer un programme ou des revendications pour une gestion «plus humaine» du capitalisme, mais qu’il faut cependant offrir des solutions qui partent des besoins des travailleurs et de leurs familles. Trotsky a argumenté que le capitalisme ne sera jamais capable de satisfaire ces besoins, que seule une société socialiste pourrait offrir une solution durable.

    En fait, il n’a rien fait d’autre que d’exprimer sous une forme plus claire un concept que Marx avait déjà élaboré dans le Manifeste du Parti Communiste et Lénine dans ses Thèses d’Avril. Lénine utilisait le slogan «Terre, pain et paix» pour arriver à la conclusion que le gouvernement transitoire qui a succédé au tsarisme après la révolution de février 1917 ne pourrait jamais satisfaire ces revendications pourtant primordiales. A travers cela, il est arrivé au slogan «Tout le pouvoir aux soviets».

    De même, le PSL/LSP parle aujourd’hui de la «nécessité que la production soit basée sur les besoins de la population et pas sur les profits d’un petit groupe de capitalistes» pour arriver à la conclusion que cela n’est possible que par un changement socialiste de la société.

    Le programme du PSL/LSP exprimé ci-dessous n’est rien d’autre qu’une application actuelle de ce programme de transition. Il doit être lu en prenant en considération les remarques ci-dessus à propos de l’idéologie et du programme.

    LE PROGRAMME DE TRANSITION AUJOURD’HUI

    La classe ouvrière est soumise à un recul perpétuel sous le capitalisme. La «cathédrale» de la sécurité sociale et d’autres acquis sont sous attaque depuis des décennies par le patronat et leurs politiciens. Ce n’est pas un processus économique inévitable. Le passé nous apprend que lorsque les travailleurs s’organisent dans des syndicats et des partis, la situation peut se retourner.

    D’une lutte défensive visant à défendre nos intérêts par entreprise ou par secteur, nous devons reprendre tous ensemble l’offensive et réclamer la richesse que nous avons créée : pour créer des emplois décents, bien payés et stables; pour augmenter les allocations ainsi que les retraites et disposer d’un pouvoir d’achat digne de ce nom; pour initier un programme de construction massif de logements sociaux et plafonner les prix des habitations; pour renationaliser, sous le contrôle démocratique de la population, les services privatisés et libéralisés ; pour refinancer l’enseignement; pour organiser collectivement les tâches ménagères qui actuellement pèsent toujours sur les épaules des femmes ;… En bref, pour mettre réellement en avant les besoins de la majorité, au lieu de la soif de profit d’une minorité de grands actionnaires et de patrons.

    Tous ensemble, jeunes et vieux; Flamands, Wallons ou Bruxellois; Belges ou immigrés; hommes et femmes;… nous sommes plus forts !

    1. La technologie : un ami ou un ennemi ?

    Cette situation est navrante lorsque l’on considère que les possibilités n’ont jamais été aussi grandes qu’aujourd’hui.

    Un vol jusqu’en Amérique dure à peine 5 heures. Grâce aux ordinateurs, le boulot de centaines de milliers d’employés et de travailleurs peut être réalisé avec beaucoup moins de personnes. Internet, les e-mails et les GSM rendent la communication plus facile pour ceux qui y ont accès et créent pour beaucoup de jeunes et de travailleurs le sentiment d’appartenir à une communauté internationale. La médecine peut résoudre des problèmes dont nous ne pouvions que rêver auparavant. Mais, malgré toutes ces avancées, la chasse au profit joue un rôle extrêmement désastreux.

    Les fonds gouvernementaux pour la recherche scientifique sont drastiquement réduits. Seule la recherche servant directement les intérêts des entreprises et leur fournissant des bénéfices est encore subventionnée. Et quand les entreprises prétendent vouloir financer la recherche, ils la déduisent en réalité de leurs impôts.

    Les seuls qui en profitent sont les patrons. Les centres de recherches perdent ainsi leur indépendance. De plus, cela entraîne une concurrence entre les différents centres pour tenter d’obtenir des fonds. Les scientifiques sont isolés ; ils ne peuvent pas se concerter ni échanger des expériences, ce qui entraîne un gaspillage énorme d’énergie, de temps et d’argent.

    Et même si l’on fait de la recherche utile, et que l’on arrive à trouver des solutions – pensons aux différents traitements des problèmes cardio-vasculaires – les traitements sont pour beaucoup de gens inaccessibles à cause de leur coût.

    Pendant ce temps-là, les problèmes pour lesquels il faut urgemment trouver une solution continuent de s’empiler. Pensons au SIDA, aux catastrophes naturelles qui coûtent la vie à des millions de gens, aux traitements des cancers, à la production des déchets et à la pollution, à la famine dans de larges parties du monde,… Prenons plus particulièrement la famine. Un raisonnement logique serait: il y a une grave pénurie de nourriture, il faut donc produire plus. Et pourtant, les usines tournent au ralenti en craignant la surproduction, alors qu’une énorme quantité de nourriture est détruite tout simplement pour garder les prix à un certain niveau.

    L’écrasante majorité des scientifiques sont d’accord pour affirmer que le réchauffement de la planète aura des conséquences désastreuses pour de larges parties du globe si on ne commence pas à y remédier maintenant. Selon des centaines d’experts présents lors du sommet sur le climat à Bruxelles (en avril 2007) l’Antarctique, l’Afrique Subsaharienne, les îlots et les grands deltas asiatiques sont les régions qui souffriraient le plus du réchauffement de la planète. On parle d’inondations, de tempêtes et de glissements de terrain qui se produiront plus fréquemment. Les franges les plus pauvres de la population mondiale seront les plus touchées par ces catastrophes naturelles. Mais l’existence d’une quantité inquiétante d’espèces de la faune et de la flore est également menacée, entre autres, par le réchauffement de la planète.

    Une économie planifié à l’échelle mondiale et sous le contrôle démocratique de la population permettrait de prendre des mesures immédiates pour réduire «l’empreinte écologique» de l’Homme, notamment par un usage massif de transports publics gratuits mais également par des investissements massifs dans la recherche de sources d’énergie alternatives. Il est difficile de se rendre actuellement compte du potentiel de ces alternatives, du fait que l’industrie pétrolière et automobile leur mettent souvent des bâtons dans les roues.

    La question-clé est qu’aujourd’hui, la science et la technologie sont aux mains et au service des multinationales. Ainsi, les différents gouvernements bourgeois ne peuvent pas prendre les mesures qui s’imposent, ou alors uniquement de façon ambiguë quand il est déjà trop tard. Leur politique est destinée à satisfaire la soif de profit, et pas à satisfaire les besoins de l’Homme et de son environnement. Nous devons exiger le contrôle démocratique de la science, au nom des scientifiques et de la population mondiale.

    Aussi longtemps que les banques, les multinationales,… disposent du monopole de toutes les solutions possibles, nous sommes totalement impuissants. Ce n’est pas le développement de la science et de la technologie qui est en soi désavantageux, mais bien leur contrôle par les groupes mentionnés ci-dessus. Au service de la population, la technique et la science pourraient sauver et améliorer la vie de millions de personnes.

    2. Pour des emplois décents, stables et bien payés.

    • RETABLISSEMENT DE NOTRE POUVOIR D’ACHAT!
    • STOP A LA FLEXIBILISATION!
    • REDUCTION DE LA CHARGE DE TRAVAIL PAR LA REDISTRIBUTION DU TRAVAIL DISPONIBLE!
    • 32 HEURES PAR SEMAINE SANS PERTE DE SALAIRE ET AVEC EMBAUCHES COMPENSATOIRES!

    Les paroles du gouvernement contrastent de façon criante avec ses actes. Dans de larges parties de Bruxelles et de Wallonie, il y un chômage massif et structurel. En juin 2007, le chômage dans la région Wallonne était de 14,4% (allocataires au chômage complet et élèves ayant quitté le système scolaire). Presque la moitié de cette catégorie était au chômage depuis plus de 2 ans. Dans la région Bruxelloise, à la même période, le nombre de chômeurs était de 19,9%. Des générations entières sont exclues par l’économie de marché !

    En Flandre, certains essaient de donner l’impression que le chômage a baissé considérablement dans le courant de 2006-2007 et qu’il y a même une pénurie dans certains métiers. Beaucoup de ces métiers sont flexibles (nettoyage, construction) et ne sont pas toujours rémunérés convenablement pour les efforts supplémentaires demandés. Que veulent les patrons? Des travailleurs prêts à se faire exploiter pour une bouchée de pain? La soi-disant pénurie est utilisée pour importer, de façon sélective, des travailleurs bon marchés en Belgique. Des travailleurs qui disposent de moins ou, dans le cas des sans-papiers ou des travailleurs au noir, d’aucun droits sociaux du tout. Le PSL/LSP défend les droits égaux pour tous les travailleurs. Ce n’est que de cette façon que l’on pourra combattre la pression sur les salaires et la politique de diviser pour régner appliquée par le patronat. Tout ce qui nous divise nous affaiblit!

    Au niveau national, plus d’un million de personnes sont totalement ou partiellement dépendantes d’une allocation de chômage. Ce niveau est un record historique. Au début des années ’70, le taux de chômage officiel tournait autour des 70.000-80.000. En 1995, on comptait déjà 505.944 chômeurs : une croissance de 1,9% à 12,3% de la population active !

    Depuis la moitié des années ’80, les chômeurs les plus âgés (de + de 50 ans) ne sont plus comptabilisés dans les statistiques. C’était déjà le cas pour les prépensionnés, et depuis 1986, pour ceux qui sont en pause carrière. Aujourd’hui, tous ces groupes constituent ensemble plusieurs centaines de milliers de personnes, qui reçoivent une allocation de l’ONEM mais ne sont pas comptées dans les statistiques.

    Le chômage partiel et temporaire – pour ceux qui ont signé un contrat de travail mais qui, pour des raisons particulières, ne peuvent pas travailler – n’est pas non plus repris dans les statistiques. C’est également le cas pour les gens qui sont «activés», pour qui on utilise l’allocation de chômage comme une subvention salariale! Les patrons sont ravis! Depuis juillet 2004, les chômeurs entre 50 et 58 ans sont réinscrits comme demandeurs d’emploi à cause de la politique «d’activation» des chômeurs, sauf s’ils peuvent prouver au gouvernement que leur carrière a été suffisamment longue. Le gouvernement force les travailleurs à travailler plus longtemps à travers le Pacte des générations. Mais lorsqu’ils sont licenciés sur le tard, la réalité nous montre que peu d’employeurs acceptent de leur offrir une seconde chance!

    En septembre 2007, le chômage officiel en Flandre était de 6,43% (selon le VDAB). Il faut tenir compte qu’il y a plus de gens en pause carrière et de prépensionnés en Flandre qu’en Wallonie ou à Bruxelles. En outre, la politique d’activation et de suspension commence à «payer»: c’est-à-dire que des dizaines de milliers de personnes ont perdu leur allocation de chômage ces dernières années.

    A Ostende, suivant le modèle de «l’activation», les jeunes sont massivement soumis à des sessions intensives pour la recherche d’un emploi, afin de leur apprendre à solliciter collectivement. Il ne s’agit même pas de formations professionnelles, et il n’y a aucune garantie d’avoir un emploi à la fin du parcours. De cette façon, les statistiques du chômage peuvent être embellies. D’autre part, le système incertain et extrêmement flexible des chèques-services connaît un succès grandissant. En juillet 2007, 4,38 millions de chèques ont été utilisés. Le système s’est rapidement répandu, surtout en Flandre (66,2% pendant la première moitié de 2007). A Bruxelles (5,9%) et Wallonie (27,8%), c’est moins le cas.

    L’introduction d’emplois à 10, 20 ou 30% permet de beaucoup jongler avec les statistiques. Ainsi, si vous allez repasser ou nettoyer 3 à 4 heures par semaine grâce aux chèques-services, le gouvernement vous raie déjà des statistiques officielles de chômage. Ce genre d’emploi est largement subventionné par le gouvernement, et le système risque de devenir impayable. Sans parler du fait que les contrats flexibles, temporaires et intérimaires sapent de plus en plus la position des travailleurs qui bénéficient encore un emploi stable.

    Ceux qui plaident pour une limitation du paiement des allocations de chômage dans le temps afin d’obliger les gens à dépendre du CPAS vivent sur une autre planète ou se foutent tout simplement des conséquences sociales de telles mesures. S’il est vrai que les gens choisissent de vivre d’une allocation plutôt que d’aller travailler parce que la différence entre les deux est trop faible, alors il faut augmenter les bas salaires plutôt que de réduire encore les allocations.

    Les bureaux d’intérims sont devenus aujourd’hui des entreprises florissantes. Cela n’a rien d’étonnant. De cette manière, les entreprises n’ont plus à assumer la responsabilité d’un employé fixe. L’entreprise se dirige directement vers l’agence d’intérim qui lui fournit des travailleurs, parfois même avec des contrat à la journée! Vous n’avez plus besoin de travailleurs? Licenciez-les sans en subir les conséquences. Certains intérimaires travaillent depuis plus de 3 ans pour le même patron, ils fournissent à ce patron toute leur expérience, mais ne reçoivent ni la sécurité d’emploi, ni un salaire décent.

    Les Etats-Unis sont cités comme l’exemple à suivre en matière de lutte contre le chômage. Le taux de chômage y serait très bas (entre 4 et 5 %). Ce que l’on ne raconte pas, c’est que la majorité des gens sont obligés de prendre un deuxième boulot après avoir fini le premier pour pouvoir s’en sortir. Ce modèle est en réalité un champ de bataille social. Pourtant, on voit que notre marché du travail évolue vers une croissance des contrats à temps partiel et des chèques-services, de plus en plus comme le système américain.

    Un argument trop souvent cité est le manque de formation. Quelle hypocrisie! Les entreprises exigent que les élèves qui quittent l’école soient formés pour un job spécifique dans l’entreprise. La subvention des écoles par ces entreprises, pour pouvoir utiliser ces jeunes une fois sortis de leurs études, n’est plus un phénomène exceptionnel depuis longtemps. Une fois que le jeune – spécialement formé – n’est plus utile pour l’entreprise, il est mis à la porte.

    Le patronat exige d’assainir le financement de l’éducation. Le raisonnement est toujours le même : les écoles doivent fournir des travailleurs formés, alors pourquoi organiser une formation large quand il s’agit d’emplois précaires ou de rester au chômage? La revendication du mouvement ouvrier comme quoi l’enseignement doit fournir une formation générale est un luxe qui doit être réservé aux enfants de la bourgeoisie. Voilà les pensées cyniques qui se cachent derrière les chiffres et les plaidoyers des chefs d’entreprises et de leurs organisations.

    La crise du capitalisme mène de plus en plus à la croissance du chômage et des emplois précaires à bas salaires. L’ironie est que cela renforce la position des capitalistes, parce qu’ils peuvent menacer les travailleurs avec l’argument que si ces derniers n’acceptent pas les conditions qu’on leur impose, il y en a d’autres qui accepteront de travailler aux conditions imposées.

    Le PSL/LSP défend un rétablissement complet de l’index et un salaire minimal de 1.500 euros net; dénonce le démantèlement de la sécu et « l’érosion » des contrats de travail. Nous nous opposons à chaque fermeture d’entreprise car, dans le cadre du système capitaliste, chaque fermeture mène au chômage et à la pauvreté. La seule revendication capable de commencer à résoudre le problème du chômage est l’introduction de la semaine des 32 heures, sans perte de salaire et avec des embauches compensatoires.

    3. Stop aux libéralisations et aux privatisations ! Renationalisation sous contrôle démocratique de la population!

    Dans les années ‘90, après la chute du Bloc de l’Est, l’idée selon laquelle le marché libre était le seul système viable a été largement diffusée. Tant la social-démocratie que les dirigeants syndicaux ont cru à cette fable et ont refusé de continuer à résister à l’offensive idéologique de la bourgeoisie. En utilisant l’unification européenne comme excuse, nos services publics ont été attaqués les uns après les autres, libéralisés et préparés à la concurrence privée. Au vu de la croissance plus lente de beaucoup d’autres secteurs – en conséquence de la crise de surproduction – le capital a cherché de nouveaux créneaux pour faire du profit.

    Aujourd’hui, beaucoup de travailleurs commencent à percevoir les conséquences de cette politique – ou à la sentir dans leur portefeuille ! On pense par exemple à l’augmentation des prix de l’électricité en Belgique : "Test achat" a ainsi calculé que le prix pour un kilowattheure (kWh) chez Electrabel a augmenté de 50% entre janvier 2005 et décembre 2006.

    Peu après les élections de juin 2007, Electrabel a annoncé qu’elle augmenterait à nouveau ses prix de 13% à 20% ! Après d’énormes protestations, l’entreprise a donné l’impression qu’ils n’allaient finalement pas mettre en place cette décision. Mais en réalité, le CREG, la Commission de Régulation de l’Electricité et du Gaz, a publié un peu plus tard les résultats de sa recherche sur les augmentations des prix du gaz et de l’électricité. La commission a confirmé que, pour les particuliers, l’augmentation sera de 17% en 2008. Une famille moyenne va donc payer environ 172 euros de plus par an pour sa consommation d’énergie.

    Et ceci alors que, selon le VREG qui est le régulateur flamand des marchés du gaz et de l’électricité, le nombre de familles qui ne sont pas capables de payer leur facture d’énergie a augmenté pour atteindre 91.600 en 2006. Une augmentation de 50% par rapport a l’année passée ! Le nombre de « mauvais payeurs » en Flandre a donc atteint un niveau record en 2006. Déjà 4,5% des ménages flamands sont dépendants du tarif social pour leur électricité. Le VREG affirme, à propos de ce scandaleux bradage d’un besoin essentiel, que « Les clients sont seulement intéressants pour les fournisseurs s’ils rapportent quelque chose. Les mauvais payeurs sont donc mis plus vite à la porte par leurs fournisseurs. »

    Sur le marché du gaz, au début de la libéralisation, Electrabel a temporairement baissé ses prix pour attirer le plus de clients possible. Du moment que le marché a été divisé entre plusieurs concurrents, les prix ont augmenté assez vite pour assurer un maximum de profits pour les patrons et les gros actionnaires du secteur. C’est l’évolution naturelle à attendre de chaque forme de libéralisation et de privatisation d’un service public.

    Le PSL/LSP se demande pourquoi la collectivité n’a pas de contrôle sur le marché de l’énergie. Pourquoi le profit est-il central s’il s’agit de notre consommation d’énergie ? Le PSL/LSP exige l’abolition des 21% de TVA sur l’énergie, qui représente un besoin essentiel pour chaque famille et revendique un gel des prix de l’énergie comme première mesure dans le processus de mise sous contrôle démocratique de tout le secteur de l’énergie. C’est seulement sur cette base que seront pris en compte les besoins des travailleurs et de leurs familles (y compris les besoins écologiques).

    La libéralisation et la privatisation signifient toujours un drame social concernant le nombre d’emplois et les conditions de travail. A La Poste, 9.000 des 35.000 emplois ont été supprimés ce qui équivaut à la fermeture de deux grandes usines d’assemblage de voitures. Les travailleurs de La Poste qui sont restés ont été confrontés au système « géoroute » qui conduit à une augmentation perpétuelle de la charge de travail pour moins de personnel. Cela a mené, ces dernières années, à une vague de grèves spontanées dans de nombreux bureaux de poste à travers tout le pays. A quand un mouvement unifié pour jeter tout le plan « géoroute » à la poubelle et stopper net les pas « en avant » vers la libéralisation ?

    Au début des années ’90, 26.500 personnes travaillaient encore chez Belgacom alors que ce chiffre est descendu à 15.000 début 2007. Aujourd’hui, la direction veut encore éliminer 1.500 places. A la classe ouvrière de supporter drames sociaux et pertes d’emplois tandis que les profits exorbitants sont réservés aux patrons. En 2006, Belgacom a ainsi réalisé 6,1 milliards d’euros de profit. La même année, le top manager Didier Bellens a reçu 1,85 millions d’euros de salaire, en plus des 480.000 euros de dividendes pour ses actions. Il en avait d’ailleurs également vendu pour une valeur de 6 millions d’euros. Les ex-« services publics » sont de véritables « jackpots » pour les capitalistes. Et bien sûr, les libéraux, les sociaux-chrétiens et les sociaux-démocrates trouvent que ce genre de profits ne devraient surtout pas être attaquables. Pour eux, les profiteurs sont les chômeurs, dont il faut au plus vite suspendre les allocations ou limiter celles-ci dans le temps.

    Dans les chemins de fer, le transport de marchandises a déjà été libéralisé, et le transport de voyageurs est en train d’y être préparé. L’avenir en Belgique sera-t-il le même qu’en Grande-Bretagne ? Les divers accidents et autres misères qu’y ont connus les chemins de fer privatisés sont loin d’être des coïncidences pour l’opinion publique qui a, depuis, clairement changé d’opinion vis-à-vis de la privatisation. Aujourd’hui, la revendication de la renationalisation du secteur trouve de plus en plus d’échos en Grande-Bretagne, ce qui représente un sérieux changement par rapport aux années ’90.

    En Amérique Latine également, les ravages de la politique de privatisation ont provoqué un changement dans la conscience. Aujourd’hui, les « gouvernements de gauche » en Bolivie et au Venezuela sont mis sous pression pour nationaliser les richesses naturelles. Les pillages et les expropriations par les multinationales sont de moins en moins tolérés par les masses. Comme l’expliquait Engels, le compagnon de Marx, les nationalisations apparaissent déjà comme des «éléments de socialisme» qui s’imposent à la veille société en crise. Ils démontrent la faillite du capitalisme et du libre marché.

    Pendant que les gouvernements néolibéraux organisent la casse sociale, le nombre de personnes ayant besoin de services publics de qualité augmente de jour en jour. Par exemple, de nombreux parents qui travaillent ont un réel problème concernant la garde de leurs enfants. Ils seraient sans aucun doute enchantés d’avoir à disposition des crèches dignes de ce nom, et organisées par l’Etat.

    Chaque jour, des milliers d’ouvriers et d’employés vont au boulot en transport en commun. Quelqu’un est-il capable de nous expliquer pourquoi les transports en train, en tram et en bus sont de plus en plus chers ? Quelle est la logique derrière cela ? A Bruxelles, n’est-ce pas scandaleux de devoir payer 2 euros pour un ticket de la STIB si celui-ci n’a pas été acheté à l’avance à un guichet ? Est-ce comme cela que l’on pense pouvoir résoudre les problèmes des embouteillages ? Un gouvernement au service de la population rendrait directement tous les transports publics gratuits pour faire face au problème des embouteillages et à la pollution. Dans le secteur de transports, il existerait des règles beaucoup plus strictes pour éviter que la pression du travail – en réalité la pression des profits – n’impose à des chauffeurs fatigués de devoir prendre la route.

    Aujourd’hui, la destruction du système des soins de santé est une réalité flagrante et mène parfois à des situations dramatiques. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, les Belges doivent déjà payer eux-mêmes 33% de leurs coûts médicaux. L’OCDE estime ce pourcentage à 28%. Le sous-financement des hôpitaux devient une excuse pour les médecins pour commencer à organiser des consultations « personnalisées », pour lesquelles ceux qui paient le plus sont évidemment les plus vite servis. Les médecins sont rémunérés selon leurs prestations, ce qui favorise les abus.

    Le PSL/LSP veut mettre fin à la course aux profits dans l’industrie pharmaceutique, à la commercialisation rampante et aux abus de la médecine de prestation. Nous sommes pour la création d’un service de soins de santé public et national, avec des statuts fixes – qui sont de plus en plus minés dans les hôpitaux publics – et des salaires décents pour tout le personnel. Selon nous, des éléments tels que le profit ou le prestige de certains individus ou de multinationales ne peuvent intervenir dans le secteur des soins de santé.

    L’argument invoqué en permanence pour la privatisation est le manque de "rentabilité" des services publics. Mais comment un service public peut-il être rentable ? Un service public a pour objectif de rendre un certain nombre de services le plus accessible possible pour chacun, qu’il soit riche ou pauvre.

    Une prestation de services est par définition non rentable parce qu’elle ne peut générer de bénéfice. Ce qu’on oublie, c’est que le droit à des services publics – tout comme à la sécurité sociale – a été arraché par la lutte dans l’objectif de pourvoir à certains besoins sociaux.

    En réalité, la libéralisation et la privatisation signifie la vente de nos services, avec moins d’emplois disponibles et des conditions de travail diminuées, pour nous faire payer doublement le prix. Ainsi le gouvernement économise-t-il sur les dépenses publiques, mais au détriment de qui ? Nous ne payons pas un centime de moins d’impôts, tandis que les managers de nos ex-services publics s’en mettent plein les poches !

    Le PSL/LSP lutte contre la privatisation, pour la gratuité des transports publics, des soins de santé, de la distribution postale et de la collecte des déchets, parce que tous ces services doivent être accessibles a tout le monde, quelque soit l’âge, la situation professionnelle, le sexe,…

    L’argument selon lequel un service public fonctionne mal par définition est largement répandu dans les consciences. Les services publics ont toujours été victimes de ragots. Ils seraient "inefficaces", "bureaucratiques", "tout sauf ponctuels", etc. Et, au contraire, dans le privé, tout marche évidemment à merveille.

    Cette image est complètement fausse. Il y a toujours eu trop peu d’argent disponible pour les services publics, et ce même dans les "golden sixties". Mais même avec suffisamment d’argent, le problème n’est pas totalement résolu. Pour qu’un service fonctionne le plus efficacement possible, la participation de tous ceux qui l’utilisent ou y travaillent est également nécessaire.

    Par exemple, les chemins de fer seraient bien plus efficaces et accessibles en impliquant les travailleurs et les voyageurs dans le fonctionnement du service. Cela permettrait à beaucoup de travailleurs de laisser leur voiture chez eux pour se rendre sur leur lieu de travail en prévoyant suffisamment de correspondances aux heures opportunes. Ces services seraient gratuits et donc accessibles a tous. Les points de départ du PSL/LSP sont l’efficacité et l’accessibilité pour tous, et non pas la logique de privatisation pour le profit de quelques-uns.

    4. Et la concurrence alors ? Qui va payer tout cela ? Il n’y a pas d’argent pour cela ? Les patrons ne vont jamais l’autoriser…

    Une citation des ouvriers des Forges de Clabecq, à l’époque de leur lutte dans les années ’90 pour le maintien de leur usine : « Si tu mets une pile de briques sur le sol, elles ne vont pas se mettre l’une sur l’autre d’elles-mêmes pour former un mur une maison. C’est pour cela que l’intervention humaine est nécessaire. C’est le travail qui génère la richesse. ». Des richesses, il y en a assez. La question est : qui en bénéficie ?

    Si nous regardons à quel point la productivité a augmenté durant les dernières décennies, il apparaît que la durée du travail n’a pas augmenté aussi vite. Si c’était le cas, nous ne travaillerions qu’une paire d’heures par jour. Tous les profits que les patrons ont amassés, ils les ont gardés dans leurs poches.

    Pour résoudre le chômage, le travail disponible doit être partagé entre tous les travailleurs disponibles. Cela déterminera la durée hebdomadaire du travail, qui pourra ainsi être fortement diminuée. Mais attention, nous voulons que le salaire soit totalement conservé, car nous y avons droit.

    Naturellement, le patronat et le gouvernement vont refuser, car cela signifierait qu’une grosse partie de leurs profits leur échapperaient. Cela signifierait aussi que leur position concurrentielle serait menacée. Mais la concurrence est aussi vieille que le capitalisme. Les travailleurs doivent-ils tout avaler pour être « concurrentiels » ? Si on pousse la logique à l’extrême, cela peut être lourd de conséquences. Cela signifierait que nous devrons accepter à terme les mêmes salaires que les ouvriers chinois ou indiens surexploités.

    Si les travailleurs et leurs organisations avaient suivi le même raisonnement au début du 20e siècle, nous serions encore en train de travailler 12, 13 ou 14 heures par jour au lieu de 8. Lorsque la classe ouvrière a fait pression pour la journée des huit heures, après la 1ère guerre mondiale, il n’était pas question de pertes de salaire.

    Au lieu de partir de la question « Qu’est-ce qui est supportable et réaliste pour les entreprises », nous préférons nous demander « Qu’est-ce qui est nécessaire pour les travailleurs ». Nous trouvons simplement logique que la richesse produite par les travailleurs serve à subvenir à leurs besoins.

    5. Pour un syndicat combatif !

    Une des conditions pour atteindre les objectifs ci-dessus, c’est que les travailleurs puissent compter sur des organisations, tant sur le plan politique que syndical, avec lesquelles pouvoir mener le combat pour ces revendications.

    C’est certain, une bataille sera nécessaire à l’intérieur des syndicats, pour remettre en avant le syndicalisme de combat. Le modèle de négociation par lequel la direction des syndicats essaye de convaincre le patronat a échoué. La force des syndicats réside dans leur capacité à mobiliser les travailleurs dans la défense de leurs intérêts immédiats, comme l’histoire l’a démontré à mainte reprises.

    C’est de cela que les patrons ont peur. Au contraire, si le patron sait que la direction syndicale est prête à accepter un petit accord, il n’a aucune raison de faire des concessions. Si par contre, il comprend que le syndicat est prêt à se dresser comme un seul homme pour défendre les intérêts des travailleurs, il réagira de façon plus prudente. Ce qui importe, c’est que les travailleurs se lancent avec un peu plus de confiance dans la lutte, en sachant qu’ils ont la possibilité d’y gagner quelque chose.

    Les syndicats ne servent pas à aider les patrons dans leurs « restructurations », ils servent à défendre les intérêts des travailleurs. A la place du syndicalisme de concertation, nous défendons le syndicalisme de combat. Nous soutiendrons chaque lutte dans ce sens. Il est crucial de se battre pour chaque emploi et pour le maintien de tous les acquis.

    Un nouveau parti des travailleurs devra aussi organiser une aile gauche combative à l’intérieur des syndicats pour offrir une alternative à la « stratégie » d’enterrement des mouvements de lutte des directions syndicales. C’est la principale raison pour laquelle beaucoup de travailleurs sont aujourd’hui cyniques par rapport au rôle des syndicats. C’est aussi pour cette raison que les militants syndicaux ont du mal à convaincre les jeunes de s’engager dans un travail syndical.

    Pensons par exemple à l’arrêt du mouvement contre le Pacte des Générations en 2005. Au cours de cette lutte, la base a été « consultée », dans le meilleur des cas, au cours d’assemblées régionales sans avoir la possibilité de décider réellement. Le mouvement a été stoppé arbitrairement par la direction de la FGTB et de la CSC. Pourquoi les militants ne pourraient-ils pas décider eux-mêmes de la fin ou non d’un mouvement ? Nous avons besoin d’une réelle démocratie syndicale, fondée sur une base active et impliquée qui peut décider elle-même du déroulement de la lutte par des votes démocratiques. La force de la classe ouvrière est potentiellement présente mais nous avons besoin de leaders syndicaux qui osent utiliser leur force pour défendre nos emplois, nos salaires, nos pensions, etc. Et qui puissent concilier ce combat quotidien avec la recherche d’une autre société.

    6. Appel pour la formation d’un nouveau parti des travailleurs

    Mais la classe ouvrière a aussi besoin d’un parti capable de traduire cette stratégie politiquement. Il est clair que le PS et le SP.a sont toujours considérés par une majorité de travailleurs comme « leurs » partis. Mais ces partis ne sont plus prêts à mener la lutte.

    Au contraire, ils sont devenus parmi les meilleurs exécutants des politiques d’austérité. Leur participation aux gouvernements durant de nombreuses années – ainsi que la désorientation et la démoralisation qui ont suivi la chute des régimes dits « socialistes » avec comme conséquence le triomphe des dogmes du libre marché – ont totalement corrompu ces partis.

    Si nous voulons une traduction politique de nos revendications de travailleurs, nous devons en conséquence construire un nouveau parti, mais nous savons qu’un tel parti ne tombera pas du ciel. Comme le dit l’adage populaire, Rome ne s’est pas construite en un jour. Celui qui n’est pas prêt à se retrousser les manches pour franchir les premières étapes vers un nouveau parti oublie que le Parti Ouvrier Belge (POB, l’ancêtre du PS) n’est pas apparu du jour au lendemain.

    Nous sommes conscients qu’un tel nouveau parti des travailleurs ne sera vraiment viable que s’il est soutenu par une partie importante du mouvement ouvrier, et en particulier par des fractions syndicales, sur base d’expériences de mouvements et de luttes massives. Mais si nous devons attendre les directions syndicales, cela peut encore durer longtemps. C’est seulement s’il y a suffisamment de pression de la base que les meilleurs d’entre eux seront prêts à se mettre en avant.

    Ce parti doit être ouvert à tous ceux qui veulent lutter contre la casse sociale. Des discussions libres doivent être ouvertes pour les différents courants, syndicats, groupes d’actions,… qui veulent défendre leurs points de vue propres. Ce parti doit se battre contre chaque division des travailleurs, que ce soit sur base de la nationalité, de la race, du sexe, ou de la religion. Les seuls qui trouvent un intérêt quelconque dans ces divisions sont les patrons et leur système. Tous ensembles, nous sommes forts et, en luttant pour des droits égaux pour tous, nous renforcerons cette unité.

    Ce parti large doit aussi lier la lutte contre l’exploitation de tous les ouvriers, y compris ceux du monde néo-colonial. Les intérêts des travailleurs des autres pays sont souvent présentés comme étant opposés aux intérêts des travailleurs d’ici, mais c’est là une tentative de briser la lutte internationale. Les travailleurs de VW Forest auraient certainement été plus forts dans leur combat contre la restructuration s’ils avaient été capables de convaincre leurs collègues des autres sites VW de mener une lutte efficace à l’échelle internationale contre la fermeture. Mais la lutte internationale ne peut pas être une excuse pour ne pas mener le combat dans son propre pays. Les deux sont indissociablement liés.

    Un nouveau parti des travailleurs doit respecter le droit à l’autodétermination des Flamands, des Wallons et des Bruxellois, sans tomber dans le piège de ceux qui veulent affaiblir les travailleurs par la surenchère communautaire. Le PSL/LSP estime que chaque peuple doit avoir le droit de prendre ses propres décisions. Si un peuple veut vivre avec un autre peuple dans le cadre d’un Etat national, cela doit être possible. Mais sur un pied d’égalité et sur une base complètement libre.

    Être obligés de vivre dans un Etat où une partie de la population a moins de droits que l’autre, cela ne peut mener qu’à des situations désastreuses. Nous sommes par conséquent pour toutes les facilités susceptibles de mettre un terme aux sentiments d’oppression nationale. Donc également pour les facilités linguistiques.

    Beaucoup d’Etats capitalistes sont basés sur l’oppression de peuples ou de groupes de population. La Belgique a sur ce plan une mauvaise réputation. Les Flamands ont ainsi été empêchés durant 100 ans d’aller à l’école dans leur propre langue. Toute l’administration était francophone. Il était donc facile d’affaiblir les travailleurs en les divisant sur une base linguistique. On pouvait par exemple lire dans le journal wallon « Les Nouvelles », du 25 octobre 1904 : « Les Flamands de La Louvière ont reçu hier leur salaire et l’ont directement dépensé pour se saoûler et provoquer des bagarres pendant toute la nuit. Il faut relever qu’à chaque fois que des telles bagarres générales se déroulent à La Louvière, on y trouve des Flamands qui jouent avec des couteaux ».

    Entre temps, l’image s’est transformée. Selon le modèle propagé aujourd’hui, le Flamand est le travailleur courageux, le Wallon le profiteur et l’immigré celui qui sort son couteau. Fondamentalement, c’est toujours la même rengaine : les patrons empochent les profits tandis qu’ils dressent les travailleurs les uns contre les autres. C’est surtout la sécurité sociale qui constitue une épine dans le pied des patrons et du gouvernement. En brandissant la menace d’une scission, ils font du chantage sur les travailleurs wallons et, en même temps, ils nourrissent la Flandre de l’illusion que cela serait bon « pour tous les Flamands ».

    Les seuls qui tireraient avantage de la scission de la sécurité sociale sont les patrons, aussi bien les Wallons que les Flamands. Ils feraient pression sur nos salaires, nos pensions, nos pécules de vacances et nos prestations de santé en menaçant de déménager vers l’autre région. Aucun travailleur n’y a intérêt, ni les Wallons, ni les Flamands, ni les immigrés. Seuls les patrons y gagneraient.

    Un tel parti devrait agir pour la nationalisation des secteurs les plus importants de l’économie, sous contrôle ouvrier, car aux mains du privé, ces secteurs ne servent qu’à générer des profits pour les patrons et leurs actionnaires (banques, investisseurs, etc.).

    La seule manière pour que la population puisse profiter des revenus et/ou des services de ces secteurs (énergie, transport, banques…) est de les nationaliser. Mais il ne faudrait pas s’arrêter là. Dans les mains de l’Etat actuel, qui n’est ni plus ni moins qu’une marionnette aux ordres de la classe capitaliste, ces services devraient toujours être rentables et ne pas trop coûter à l’Etat. La même argumentation est actuellement utilisée pour privatiser les entreprises publiques.

    La participation et le contrôle des travailleurs et de leurs familles dans et sur la politique sont essentiels. En tant qu’utilisateurs et qu’employés, ils savent mieux que quiconque où se situent les déficiences et quelle est la meilleure manière d’y remédier.

    7. Révolution

    Au regard du fait que les multinationales travaillent main dans la main avec les régimes les plus sanguinaires ; que des guerres sont menées pour le pétrole en faisant des milliers et des milliers de victimes innocentes ; que ces multinationales dressent des populations entières les unes contre les autres pour qu’elles finissent, à la longue, par s’entretuer ; qu’elles préfèrent encore laisser les gens mourir de faim plutôt que de toucher à leurs profits et qu’au besoin l’armée choisit la solution militaire, il est clair que ce programme ne peut être atteint autrement que par une lutte résolue.

    Bien plus, pour avoir la possibilité de pouvoir décider nous-mêmes de ce qu’on veut faire de la richesse produite, un mouvement déterminé des travailleurs sera nécessaire pour arracher le pouvoir des mains de la petite minorité des capitalistes.

    Beaucoup feront remarquer que cette minorité est très puissante, car elle dispose de tous les instruments nécessaires pour maintenir les gens sous contrôle. Elle utilise tous les canaux pour diffuser son idéologie, comme l’enseignement, les médias,… afin de faire croire aux gens que le système capitaliste est le seul système qui peut fonctionner.

    Et si ce n’est pas suffisant, elle contrôle encore la police, l’armée et la justice pour faire respecter les lois capitalistes par la force. Les tentatives visant à briser le droit de grève se situent complètement dans cette logique, tout comme la tentative d’exercer un contrôle policier plus sévère au travers d’un appareil policier unifié. Comme nous le voyons à chaque grève, la justice et la police ne sont pas de notre côté.

    Mais cela ne peut pas nous arrêter. C’est le rapport de forces qui sera déterminant. Une classe ouvrière convaincue, dont le noyau le plus dynamique est décidé à ne plus se laisser berner, et déterminée à prendre le pouvoir ne peut pas être arrêtée, même par mille armées.

    Nous devons tenir compte du fait que le capitalisme en crise est continuellement pendu à un fil. Si le système ne parvient plus à convaincre dans ses propres rangs, ce qui est souvent le cas lors d’une révolution, alors il est pour ainsi dire mort.

    Le meilleur exemple est celui de la révolution russe, mais aussi de Mai 68 en France, ou plus récemment les révolutions en Serbie, Géorgie, Ukraine, etc. Ces révolutions ont montré comment une classe dirigeante peut perdre prise sur ses propres troupes face à un mouvement de masse qui se développe. On peut encore parler de la radicalisation énorme en œuvre en Amérique Latine avec les mouvements de masse au Mexique, en Bolivie et dans beaucoup d’autres pays ainsi qu’avec le processus révolutionnaire qui se déroule au Venezuela. Selon nous, c’est un avant-goût des mouvements révolutionnaires qui vont se développer en Europe et dans le monde industrialisé.

    Ce qui a manqué dans beaucoup de ces exemples, c’est une organisation prête à mener le combat contre l’impérialisme jusqu’au bout, en faisant clairement le choix d’un autre type de société. C’est à la construction d’une telle organisation que travaille le PSL/LSP.

    8. Que sera le nouveau système ? Cela ne va-t-il pas dégénérer de la même manière qu’en Russie ?

    Pour éviter une situation où l’élite bureaucratique tire tous les avantages vers elle et rend impossible toute participation démocratique comme cela a été le cas dans l’ancien Bloc de l’Est, nous devons veiller à ce que le système et son économie fonctionnent pour satisfaire les besoins réels de la population.

    La discussion sur le stalinisme n’est pas seulement une discussion historique. Nous ne pouvons pas simplement dire que des « fautes » ont été commises dans l’ancienne Union Soviétique. Trotsky et ses partisans sont les seuls à avoir expliqué l’avènement d’une élite bureaucratique en Russie sur base d’une analyse marxiste. Le stalinisme était la conséquence de l’isolement de la révolution dans un pays arriéré sur le plan industriel et culturel. Trotsky a laissé deux possibilités ouvertes : soit la nouvelle élite régnante était chassée par une révolution politique qui aurait préservé l’économie planifiée, mais qui aurait réinstallé les soviets (ou démocratie des conseils), soit la bureaucratie se réformerait d’elle-même pour devenir une nouvelle classe capitaliste, lorsque l’économie bureaucratiquement planifiée arriverait à bout de souffle. C’est malheureusement cette deuxième possibilité qui s’est produite. Une économie planifiée a besoin de démocratie ouvrière tout comme le corps humain a besoin d’oxygène.

    Le Socialisme suppose un système dans lequel le plus possible de travailleurs, ainsi que leurs familles, puissent participer et exercer un contrôle sur les prises de décision et ce tant sur le plan économique et social que politique. Un plan de production démocratiquement établi et contrôlé par des conseils composés de représentants des travailleurs, des syndicats nationaux et de la population dans son ensemble doit pouvoir faire une estimation correcte de ce qui est nécessaire et prioritaire. Chaque décision doit ensuite pouvoir être évaluée.

    Mais que se passera-t-il avec ceux qui seront au pouvoir ? N’est-il pas exact de dire que le pouvoir corrompt ? Si être au pouvoir signifie pouvoir rester à son poste sans aucun contrôle de la collectivité, cela pose effectivement un problème.

    Ce que nous défendons au contraire, et que nous mettons déjà en pratique dans notre organisation, c’est que chaque fonctionnaire doit être élu mais aussi révocable à tout moment, au cas où il n’a plus la confiance de ses électeurs. De même, il ne doit pas disposer d’un salaire plus élevé que la moyenne des travailleurs qu’il représente.

    La situation que nous connaissons actuellement, dans laquelle les parlementaires touchent des milliers d’euros par mois fait en sorte que ceux qui nous représentent vivent bien loin de notre réalité. Comment peuvent-ils savoir quels sont nos besoins ? Ils ne vivent pas dans les quartiers ouvriers, ils ne fréquentent pas les mêmes endroits, ils ne savent pas ce que c’est que d’arriver péniblement à payer toutes ses factures chaque mois, etc.

    Joe Higgins, jusqu’il y a peu notre parlementaire en Irlande, mais aussi nos parlementaires à l’intérieur du Labour Party dans les années ’80, ne gardaient comme salaire que l’équivalent d’un salaire moyen. Tout le reste était consacré aux campagnes et aux luttes des travailleurs, et non à la construction d’une villa dans le sud de la France…

    9. Pour le socialisme et l’internationalisme !

    Si les travailleurs d’une entreprise se mettent en grève, le patron fera tout pour briser cette grève. Il va proposer un accord aux leaders syndicaux, essayer par tous les moyens d’isoler le noyau dur de la grève et faire appel aux gardes de l’entreprise ou à la police et aux tribunaux pour briser les piquets.

    Il essayera, si la grève dure trop longtemps, de compenser ailleurs les pertes de production, si possible dans une société sœur à l’intérieur ou à l’extérieur du pays mais, s’il le faut, chez la concurrence. En d’autres mots, le capitaliste fera appel à sa classe, à ses représentants politiques, aux médias, et à l’appareil de répression pour briser la grève.

    A l’ère de la production internationale et des flux financiers mondiaux, le capitaliste fera de plus en plus appel à la « solidarité » des patrons à travers les frontières. Les travailleurs doivent en tirer les leçons. Ils doivent aussi faire appel à leur classe pour faire triompher leur lutte. Ils doivent aussi, et plus que jamais, s’appuyer sur leurs collègues à l’étranger.

    Aucune lutte n’éclate partout en même temps, chaque lutte commence quelque part. Les chances de réussite augmentent à mesure que la lutte s’élargit. Cela vaut pour les grèves, pour les mouvements de désobéissance civile, pour les marches de protestation… mais aussi pour la révolte et la révolution.

    Même une révolution socialiste éclate à une échelle nationale, mais sa réussite finale est déterminée par les événements internationaux. La solidarité a une importance majeure, mais avec un soutien moral ou même des collectes, etc. on ne remporte pas une victoire. C’est pour cela que le soutien actif des travailleurs d’autres entreprises, secteurs et pays et un élément d’importance cruciale. La révolution va donc débuter sur un plan local, mais sans élargissement national et international, elle est condamnée à l’échec. La démocratie ouvrière et la planification socialiste ne peuvent pas être limitées à un seul pays, comme cela a été démontré en Russie. L’isolement de la Russie soviétique a conduit à sa dégénérescence à partir de 1924.

    La Révolution russe, la seule dans laquelle la classe ouvrière a réussi à prendre le pouvoir pendant une courte période, a été l’événement le plus important de l’histoire. L’expérience n’a été que partiellement réussie, mais nous pouvons en tirer des leçons énormes et entre autres que nous devons nous organiser au niveau international, dans le cadre d’un parti mondial. C’est pourquoi le PSL/LSP fait partie du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO).

    Le CIO est actif sur tous les continents. Nous avons des sections aux États-Unis, mais aussi au Chili, au Brésil et au Venezuela. En Afrique, nous sommes présents au Nigeria et en Afrique du Sud. En Asie, nous avons des sections au Sri Lanka, en Inde, au Pakistan, au Kazakhstan et au Japon.

    En Europe, nous sommes présents en Belgique, en Suède, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Angleterre, en Écosse, en Irlande (Nord et Sud), en Autriche, en Tchéquie, en Russie, en Ukraine, en Pologne, en Italie, en Grèce, à Chypre, en Espagne et en France. Au Moyen-Orient, nous avons des sections en Israël et en Palestine et des sympathisants au Liban. Le CIO a aussi une section en Australie. Le PSL/LSP voit donc sa lutte en Belgique dans le cadre de la lutte des travailleurs du monde entier, pour une société socialiste.

  • Fuite en avant pour sauver la planète ?

    Relance du nucléaire

    De plus en plus confrontés à l’évidence du réchauffement de la planète, les politiciens traditionnels sont à la recherche de toutes sortes de mesure qui leur permettraient de produire de l’énergie plus proprement. Une des solutions avancées est une extension du parc nucléaire en Europe, afin de remplacer les vieilles centrales au gaz et pétrole. Or ceci constitue plus une fuite en avant qu’une véritable solution.

    Par Gilles, MAS Mons

    En Belgique, on trouve deux centrales nucléaires en activité : celle de Tihange (Huy, 3 réacteurs) et celle de Doel (Anvers, 4 réacteurs). Toutes deux ont été construites il y a environ 30 ans et l’âge de la retraite devrait approcher… si ce n’est que les gouvernements successifs n’ont cessé de repousser encore et encore la date de fermeture de ces réacteurs. Alors que la durée d’usage avait déjà été prolongée à quarante ans, le gouvernement Leterme a décidé d’octroyer vingt ans de plus aux centrales belges : il faudra donc attendre jusqu’à 2035 pour assister à la fermeture des centrales (au lieu de 2005 comme initialement prévu).

    Le gouvernement et leurs amis d’Electrabel se justifient en disant que la remise à neuf des centrales coûterait cher et que cette hausse des coûts serait d’office répercutée sur la facture (comme si Electrabel ne pouvait pas se permettre cet investissement !). D’autre part, ils prétendent que les centrales nucléaires sont sûres et non polluantes. Leurs arguments semblent avoir porté, puisque récemment 6 Belges sur 10 se disaient d’accord pour ce maintien. Mais le récent incident de Fleurus (près de Charleroi) a remis en question tous ces beaux discours sécurisants.

    Que s’est-il passé à Fleurus ? Une fuite s’est produite à l’Institut des Radio-Elements (IRE), un établissement public-privé chargé de produire des isotopes radioactifs à des fins médicales, et celle-ci a contaminé toute la région. Ceci représente le plus grave incident nucléaire en Belgique. Cependant la population locale n’a été prévenue qu’une semaine après les faits, avec des avertissements du type « Ne mangez pas les légumes de votre jardin ». L’exploitant a tenté d’étouffer l’affaire jusqu’au dernier moment par crainte des répercussions, tandis que l’Agence Fédérale de Contrôle Nucléaire (AFCN) s’est révélée totalement inefficace : incompétence des responsables (beaucoup ont obtenu leur poste uniquement via leurs relations politiques), matériel inopérant, etc.

    Les incidents nucléaires se sont multipliés au cours des dernières années : en 2006 en Suède, on est passé à deux doigts d’un nouveau Tchernobyl lorsque le système de secours de la centrale de Forsmark est tombé en panne. Les scientifiques chargés de la surveillance ont avoué que seul le hasard a permis d’éviter la catastrophe. Cet été en France, des fuites ont été révélées près d’une centrale de la Drome, contaminant le personnel et peut-être les récoltes. Des accidents graves et parfois mortels se sont également produits en Hongrie et au Japon au cours des cinq dernières années.

    Plutôt que de vouloir sérieusement investir dans des énergies inoffensives telles que la biomasse, l’éolien, le marémoteur, le solaire… les capitalistes et leurs politiciens préfèrent se tourner vers des solutions hautement rentables sur le court terme, mais pleines de risques pour le présent comme pour l’avenir. Car où stocker de manière sûre les déchets nucléaires provenant des centrales ? Même les agences de contrôle sont soumises à la loi du profit et des jeux politiques, ce qui les rend inaptes. Et évidemment, on cache tout cela à la population.

    Une production véritablement verte est incompatible avec le système capitaliste. Pour sauver la planète, préparons la révolution écologique ! Qui sera aussi une révolution socialiste.


    Le prestige et les profits avant l’environnement et le pouvoir d’achat

    Sous la pression des entreprises et des politiciens, sans participation ni consultation de la population, plus d’un milliard d’euros des impôts va être consacré au projet de prestige de la liaison Oosterweel!

    Cette liaison doit passer au dessus de certains quartiers et mettre en danger la santé des habitants avec la masse de particules fines diffusée par les voitures et les camions. Résistance Internationale lutte pour plus d’investissements pour des transports en commun gratuits et des solutions comme un tunnel qui pourrait récupérer et purger l’air des particules fines.

    Le 25 octobre il y aura un festival anticapitaliste pour l’environnement à Anvers, nous discuterons entre autres de la lutte contre le projet de la liaison Oosterweel, en plus de discussions sur l’énergie, la surpopulation, la crise alimentaire, les catastrophes naturelles, etc. Un meeting et des concerts suivront en soirée. Participe à nos campagnes sur l’environnement ! (Plus d’infos : 02/345.61.81)


    Liens:

  • Consommer moins ?

    Ces dernières années, l’idée que nous devons revoir notre consommation pour préserver l’environnement s’est de plus en plus répandue. La hausse des prix actuelle sonne à ce titre comme une bénédiction aux oreilles de certains partisans de cette théorie, car elle pourrait forcer la population à moins consommer…

    Il faut un sacré paquet de cynisme pour se réjouir de l’appauvrissement de la population mondiale (nous sommes passés de 750 millions de victimes de la faim en 1995 à 950 millions aujourd’hui), peut-être en pensant que c’est une solution pour la surpopulation? Mais s’il n’y a qu’une minorité qui tend jusqu’à cet extrême, l’idée d’une baisse volontaire de la consommation est néanmoins présente.

    On estime que 20 à 30% de la population mondiale (principalement aux Etats-Unis, en Europe et au Japon) consomment 70 à 80% des ressources tirées de notre planète. Et chaque année, c’est environ 4 milliards de tonnes de déchets qui sont déversées dans les dépotoirs officiels, presqu’arrivés à saturation. En fait, l’espèce humaine vit aujourd’hui à crédit en consommant chaque année plus que ce que la nature ne peut lui fournir en se reconstituant (la plupart des matières premières ont mis des millénaires à se constituer). Alors oui, il faut consommer mieux. La question est de savoir comment y arriver.

    Certains considèrent la révision du mode de consommation comme une démarche individuelle. Face aux médias, à la publicité, aux films, aux feuilletons, aux magazines “people”, etc., ce type d’exemple individuel ne peut que rester marginal et donc inoffensif pour le système. D’autant plus que dans beaucoup de cas, consommer mieux (des produits locaux ou issus du « commerce équitable »,…) signifie dans une société basée sur la concurrence de consommer plus cher…

    La question qui se pose ici est une question de société. Or, la consommation n’est pas le point de départ du système. Parler du “mode de consommation des pays industrialisés” est une façon commode de masquer la nature du système de production capitaliste et de l’exploitation impérialiste. C’est pourtant là que se situe le principal problème. Le plus grand gaspillage n’a pas ses racines ancrées dans la consommation des particuliers – qui n’ont d’ailleurs rien à dire sur ce qui est produit, où et de quelle manière,… – mais dans le chaos de l’économie capitaliste (voir notre dossier central). La consommation découle de ce système, s’attaquer seulement à cet aspect, c’est comme s’en prendre uniquement à une des branches d’un arbre malade.

    D’autres sociétés ont déjà dû faire face au danger de l’épuisement de leur environnement. Les Indiens Anasazis ou encore les Mayas n’ont pas su réagir, mais d’autres bien, et à chaque fois sur base d’un contrôle central des ressources (les habitants de l’île de Tikopia ou encore les Japonais de l’ère Tokugawa). Aujourd’hui, les moyens technologiques nous permettent de faire de même à l’échelle planétaire tout en impliquant chacun dans l’élaboration et la réalisation d’un plan de production et de distribution des ressources.

    Selon le rapport 2006 du WWF, au rythme d’aujourd’hui, l’actuel système de production de l’humanité prélèvera en 2050 deux fois plus de ressources que ce que la Terre ne pourra renouveler. Les ressources ne vont pas disparaître du jour au lendemain, mais si la crise du crédit aux Etats-Unis a bien illustré quelque chose, c’est qu’une vision à court terme a des limites… à court terme. La terre elle aussi réagira quand la dette du système envers elle sera trop lourde. Dans les deux cas, au niveau de la crise économique et de la crise environnementale, la classe ouvrière doit se battre pour obtenir le contrôle de la production et de la société.


    CALENDRIER de nos campagnes:

    • De la colère à l’action organisée: Résistance Internationale!
    • 20 septembre: Manifestation contre un Congrès anti-islam organisé avec la participation du Vlaams Belang
    • 25 octobre: Festival "Environnement" de Résistance Internationale à Anvers
    • 6 décembre: Action pour le Climat à Bruxelles
    • 5 mars 2009: Manifestation anti-NSV à Louvain
    • 8 mars 2009: Action dans le cadre de la Journée Internationale des Femmes

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  • Débat : La spéculation est-elle fondamentale dans les causes de la hausse des prix?

    DEBAT

    Quelques temps après la publication de notre tract sur la crise alimentaire, nous avons reçu cette lettre d’un lecteur de notre site. Nous la publions ici, ainsi que notre réponse. Vous aussi, n’hésitez pas à réagir vis-à-vis de nos articles, idées, méthodes,… La polémique est souvent une bonne manière d’aller au fond des choses !

    Bonjour camarades,

    Je voudrais réagir à l’article et au tract intitulés "Prix de l’alimentation. Ils spéculent. Nous payons la note!"

    Dans ce texte, il est indiqué que la spéculation est le facteur prépondérant dans la flambée des prix. Je pense que cette analyse est erronée et peut déboucher sur de mauvaises conclusions. Voici en gros, mon analyse :

    • 1. Il est clair que la spéculation joue un rôle. Mais pas forcément le 1er rôle. Il faut d’abord regarder les fondamentaux du marché. Or nous sommes dans une situation où la demande augmente de manière régulière depuis plusieurs années, sous l’impulsion des pays émergeants.
    • 2. La production ne suit pas la même courbe et les stocks baissent pour atteindre des niveaux très bas ces derniers mois.
    • 3. Les coûts de production augmentent fortement (notamment à cause du pétrole). Les petits producteurs ont donc des difficultés à investir pour produire plus, à cause du renchérissement des intrants. Et s’ils peuvent investir, ils ont la possibilité de s’orienter vers les agrocarburants…
    • 4. La spéculation vient s’ajouter à tout ceci. Mais la spéculation ne fonctionnerait pas si le marché n’était pas tendu. En d’autres termes, dans un contexte de surproduction, même en achetant des centaines de tonnes de céréales, il sera très difficile de faire monter les prix ne fût-ce que de 1%. Aujourd’hui, beaucoup de denrées alimentaires sont à la limite de la rupture, donc la spéculation peut fonctionner à plein rendement. Sur les matières premières, le déterminant essentiel des prix ce n’est pas l’offre ou la demande mais bien le niveau des stocks ; or, pendant des années on a fait face au surcroît de demande de céréales en puisant dans les réserves, à tel point que celles-ci ont désormais atteint des niveaux proprement intenables, d’où l’extrême violence des "ajustements" actuels, amplifiés par les restockages prudentiels de nombre de pays importateurs… La spéculation n’est donc pas indispensable ni nécessaire pour faire monter les prix. Pour preuve, certaines denrées sont inaccessibles aux spéculateurs (pas de marchés à terme), et les prix ont doublé en quelques mois (ex : les lentilles, le riz…). Il est vrai que le Japon détient des stocks pharaoniques de riz, mais c’est la conséquence d’une contrainte imposée de longue date par l’OMC…
    • 5. Les inégalités croissantes de revenus jouent un rôle important dans la flambée des prix, car la différence entre ce que peuvent payer les uns et les autres pour se nourrir est… énorme.

    En conclusion, la spéculation joue certes un rôle, mais globalement marginal. Pointer le doigt vers elle, c’est désigner la partie visible (et particulièrement abjecte) de l’iceberg du capitalisme.

    Ce qu’il faut dénoncer, c’est le fonctionnement global du système capitaliste : laisser la production des denrées alimentaires, et donc la survie d’une grande partie de l’humanité aux mains des capitalistes, c’est courir à la catastrophe, de manière certaine et répétée. La situation actuelle était prévisible, mais personne n’a voulu l’éviter. Seule une planification démocratique de la production et une organisation structurelle de la surproduction peut faire face aux aléas du climat et à l’augmentation des besoins de la population.

    En l’absence d’une telle planification démocratique organisée au niveau mondial, chaque Etat doit avoir le droit de prendre des mesures pour garantir sa sécurité alimentaire.

    J.L.

    Cher camarade,

    Différentes données démontrent le rôle prépondérant de la spéculation dans la hausse des matières premières, notamment de l’alimentation et du pétrole. Cela découle de la crise inhérente au capitalisme. Faute de pouvoir investir dans la production par crainte d’une crise de surproduction, les capitalistes spéculent en injectant leur argent non pas pour de nouveaux appareils dans les entreprises par exemple, mais en entretenant différentes "bulles" économiques. L’éclatement de celles du crédit et de l’immobilier a poussé les spéculateurs à chercher d’autres débouchés chez les valeurs "sures" comme les matières premières. Une récente enquête réalisée par des parlementaires américains et révélée par le Wall Street journal indique par exemple que la spéculation représente autour de 71% des échanges sur le Nymex, le New York Mercantile Excange (bourse spécialisée dans l’énergie et les métaux). En 2000, ce pourcentage était "seulement" de 37%. Il est vrai qu’il ne s’agit pas ici de denrées alimentaires, mais le principe est le même.

    Le magazine britannique New Statesman a par exemple publié un article ("La folie commerciale à l’origine de la flambée des prix") qui parle bien sûr de l’augmentation de la population mondiale et de la place occupée par les agrocarburants, mais continue en affirmant que :"Ces facteurs à long terme sont importants, mais ne sont pas les raisons véritables pour lesquelles les prix alimentaires ont doublé ou pourquoi l’Inde rationne le riz ou pourquoi les éleveurs britanniques tuent les cochons pour lesquels ils ne peuvent plus payer la nourriture animale. C’est la crise du crédit. (… la crise alimentaire s’est développée au cours) d’un laps de temps incroyablement court, en essence au cours de ces 18 derniers mois. (…) La raison de la "pénurie" alimentaire est la spéculation sur le marché à termes de marchandises, suite à l’effondrement des marchés à termes des instruments financiers. En désespoir de cause d’obtenir un rendement rapide, les courtiers ont retiré des millions de dollars investis en actions et dans des prêts immobiliers pour les placer dans les denrées alimentaires et les matières premières. A Wall Street, on parle alors de "super cycle des matières premières" et il est probable que cela conduise à une famine à une échelle épique." Avec un certain cynisme, la première banque belge, la KBC, a eu comme slogan pour un de ses "produits" financier: "Tirez avantage de la hausse du prix des denrées alimentaires !".

    Sean Corrigan (Diapason Commodities Management, Suisse, en charge d’un portefeuille de 6 milliards de dollars) a déclaré en 2007 que : "S’il y a un ralentissement mondial de l’activité, ça n’affectera pas les produits agricoles car les gens continueront de manger (…) L’acier, le fer et le nickel souffriront, mais les gens continueront d’acheter du pain et des pommes de terre."

    De son côté, l’ancien associé de George Soros Jim Roggers disait aussi au même moment "Il y a trois milliards d’asiatiques (…) qui ne perdront pas leur appétit à cause d’un problème aux Etats-Unis.".

    Pour Marc Faber, financier spécialiste des matières premières, les prix des matières premières agricoles sont relativement "attractifs". Il précise aussi que les perturbations climatiques vont faire monter les prix.

    Il existe, comme tu le mentionnes, différents facteurs qui jouent dans la hausse des prix. Mais la spéculation en est le facteur fondamental. Et au plus les prix augmentent, au plus ils attirent d’autres investissements.

    Le Monde Diplomatique, dans son édition de mai, a aussi déclaré que "Les indices agricoles font un tabac auprès des fonds d’investissement. Entre la fin du premier trimestre et la fin du quatrième trimestre 2007 (…) le volume des capitaux gérés par les fonds d’investissement cotés sur les produits agricoles européens a quintuplé" et est passé de 99 millions d’euros à 583 millions. Aux USA, c’est par sept que les fonds d’investissement sur les produits agricoles ont été multipliés l’année dernière…

    Mais, bien évidemment, nous nous rejoignons sur la nécessité d’une économie planifiée et sur le fait qu’il faut dénoncer le capitalisme… Laisser à la soif de profit et au chaos du secteur privé des secteurs aussi fondamentaux que ceux de l’énergie et de l’alimentation, par exemple, signifie de laisser consciemment un gaspillage immense s’effectuer, en terme de ressources et de vies humaines.

    Pour plus d’informations, nous invitons les lecteurs à lire notre dossier Crise internationale du pouvoir d’achat, crise alimentaire,… Le malheur des uns fait le bonheur des autres!.


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