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Tag: Impérialisme
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Avec EGA : Battons le gouvernement de droite!
Le gouvernement fédéral actuellement en formation serait le premier si ouvertement de droite depuis 25 ans. Offensive contre les syndicats, accentuation du gel des salaires décidé par le gouvernement précédent, poursuite des privatisations, diminution des allocations familiales et de chômage, attaques contre les pensions, réduction des budgets de la santé, du rail, de l’administration,… Aucun secteur ne serait à l’abri ! L’austérité serait inévitable ? La probable future coalition prévoit pourtant d’acheter de nouveaux F-35 (avions militaires très coûteux) et, surtout, d’arroser les grandes entreprises et les multinationales de cadeaux fiscaux…
Tract de rentrée des Étudiants de Gauche Actifs
Nous avons besoin de notre alternative!
Nous limiter à dénoncer les ‘‘solutions’’ pro-patronales sera insuffisant. Nous devons nous rassembler, nous organiser et agir à travers des actions combatives. C’est ce que les Étudiants de Gauche Actifs défendront dans les écoles, hautes-écoles et universités. Mais pour obtenir une réelle victoire, la jeunesse devra se mobiliser au côté du mouvement des travailleurs, une force sociale décisive grâce à ses méthodes, comme les manifestations de masse et le blocage de l’économie par la grève.
Dans ce combat, le Parti ‘‘Socialiste’’ ne représente aucune alternative crédible. Au pouvoir sans interruption pendant 25 ans, il a démontré être incapable d’éviter l’explosion des inégalités et le sacrifice de nos conquêtes sociales au seul but d’augmenter les profits des grandes entreprises qui, impunément, ne payent plus ou peu d’impôts, ferment les entreprises, détruisent des milliers d’emplois et polluent. Ce parti a loyalement collaboré à la politique qui a conduit le taux de pauvreté à être aujourd’hui de 15% de la population, tandis que les 10% les plus riches possèdent 44% de la richesse nationale !
Il nous faudra donc aussi construire un instrument politique large de la résistance sociale, un parti qui réunira les forces réellement de gauche pour clairement défendre que ceux qui produisent les richesses, ce sont les travailleurs, et que c’est à eux que revient la tâche de décider de leur utilisation !
Rejoins les Étudiants de Gauche Actifs !
Nous sommes des jeunes organisés à travers le pays et luttons contre le capitalisme : système qui ne profite qu’au 1% les plus riches. Nous combattons ce qui découle d’un système de classes : racisme, sexisme, crise écologique, guerre impérialistes, pénuries à tous niveaux et répression.
Nous nous revendiquons du marxisme. Il ne s’agit pas d’un dogme rigide, mais d’une méthode pour comprendre le monde et le changer. Nous défendons une alternative anticapitaliste basée sur le contrôle démocratique de la collectivité sur l’économie, ce que nous appelons le socialisme démocratique. Rejoins-nous et construisons ensemble cette société.
Manifestation contre l’extrême-droite en Europe – Di. 9 novembre !
En avril dernier, une conférence des Comités Antifascistes grecs a lancé un appel pour l’organisation d’une journée européenne d’actions contre l’extrême-droite et le racisme. Le jour du 9 novembre a été choisi en commémoration du 9 novembre 1938, date de de la Nuit de Cristal, pogrome anti-juif en Allemagne nazie.
La crise du capitalisme s’approfondit et alimente le terreau de l’extrême-droite. Celle-ci rejette sur les “étrangers” les différentes pénuries (manque d’emplois, de logements, de places dans les écoles,…) et détourne l’attention de la véritable cause : le système capitaliste. Les politiciens à sa solde nous imposent l’austérité dont le seul but est de faire payer la crise du système à ses victimes : jeunes et travailleurs avec ou sans emploi.
Nous voulons répondre à cet appel du 9 novembre afin de montrer notre solidarité avec le combat des antifascistes grecs. Mais nous voulons aussi prévenir du danger du populisme de droite et de l’extrême-droite que nous avons vu croître en Europe lors des dernières élections européennes. Ainsi, le FN est devenu le premier parti de France et des partis néo-nazis – tel que Aube Dorée (Grèce) – ont faits leur entrée au Parlement Européen à Bruxelles. Par ailleurs, en Flandre, le Vlaams Belang reste une organisation disposant d’un cadre et de militants qui, maintenant que le soutien électoral s’est effondré, peut être tentée d’avoir recours à la violence de rue. De plus, comme l’a illustré l’exemple du FN français que l’on disait à l’époque écrasé par l’UMP, cette organisation peut encore se relever. Du côté francophone, il existe des groupuscules néonazis comme Nation qui obtiennent, avec d’autres organisations populistes de droite telles que le Parti Populaire ou Debout les Belges ! des scores électoraux inquiétants dans certaines régions.
L’extrême droite joue la division en remplaçant la solidarité par le racisme, le sexisme et l’homophobie. Jeunes et pensionnés, chômeurs et travailleurs, d’origine belges ou immigrée : nous avons un ennemi commun et un combat à mener ensemble contre les grands patrons, les spéculateurs et ceux qui les servent !
Mobilisons-nous le 9 novembre à Bruxelles pour cette manifestation contre l’extrême-droite !
Pour un enseignement gratuit et de qualité pour tous !
Le nouveau gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles prévoit d’économiser 420 millions d’euros en 2 ans tout en parlant « d’effort récurrent ». Réagissons !
L’enseignement est sous-financé et fait face à des pénuries croissantes : bâtiments délabrés, manque de places, pas de soutien aux enseignants, classes surpeuplées… En effet, la part du PIB consacrée à l’enseignement ne fait que diminuer, alors que le nombre d’élèves et d’étudiants est en augmentation. En plus, l’idée d’augmenter le minerval, à l’image de ce qui se fait en Flandre (de 600 à 900€), est de plus en plus évoquée.
> Revendiquons 7% du PIB pour l’enseignement : pour des infrastructures scolaires décentes et une réelle gratuité de l’enseignement pour tous.
Face au manque de moyens, le système scolaire se tourne de plus en plus vers le privé. L’instauration d’un “bac” à la belge ne vise qu’à vérifier de manière arbitraire et utilitariste des connaissances directement utiles au monde de l’entreprise, et non pas à encourager la créativité ou l’esprit critique des étudiants. Ces derniers deviennent de plus en plus des clients – notamment via la nécessité croissance des cours particuliers – et l’enseignement de qualité une marchandise de luxe, tandis que les diplômés doivent se vendre au prix le plus bas sur le marché de l’emploi.
> Ce ne sont pas aux entreprises de dicter leur volonté, mais à la collectivité de gérer démocratiquement l’enseignement.
Ensemble, étudiants, professeurs et membres du personnel, nous devons nous unir et lutter pour un système scolaire qui ne soit pas organisé au profit de quelques-uns, mais pour l’ensemble de la société.
> Pour un enseignement de qualité, entièrement public et gratuit.
Seules des actions de masse peuvent stopper l’impérialisme!
Avec la crise économique mondiale, les tensions entre puissances impérialistes vont continuer à augmenter, le spectre de la guerre et de la guerre civile deviendra plus menaçant. Cet été, nous avons activement participé aux mobilisations contre la terreur d’Etat israélienne à Gaza, comme nous avions à l’époque participé aux manifestations contre la guerre en Irak ou encore contre la présence d’armes nucléaires de l’OTAN en Belgique. Seule l’entrée en scène des masses des jeunes, des travailleurs et des pauvres (manifestations, grèves, actions de solidarité, etc.) peut mettre fin aux politiques impérialistes et construire la paix, le respect des minorités et la justice sociale, comme la révolution qui a mis fin à la dictature de Ben Ali en Tunisie en 2011 en a donné un aperçu.
Meeting de rentrée des Étudiants de Gauche Actifs !
Battons le gouvernement de droite ! Organisons-nous !
Nous aurons l’occasion de discuter des multiples mesures d’austérité concoctées par les gouvernements aux différents niveaux de pouvoir et de la manière dont nous pouvons nous organiser pour les combattre au mieux.
BRUXELLES : Rdv mercredi 17 septembre, 18h30 – ULB – Campus Solbosch Local H 32.27
LIEGE : Rdv jeudi 18 septembre à 19h – ULg – Place du XX Août – salle Grand Physique
BRABANT-WALLON : Rdv jeudi 25 septembre, 19h, – Louvain-La-Neuve – Foyer – AGL
NAMUR : Rdv mercredi 8 octobre, 18h – Rue Notre-Dame (à côté de la Place du Grognon) – Le meeting sera suivi d’un souper spaghetti à petit prix.
Plus d’infos : info@gauche.be
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Seules les actions de masse peuvent arrêter les conflits impérialistes
Environ 10.000 personnes ont participé à la manifestation contre la guerre à Gaza du 27 juillet dernier à Bruxelles. Moins d’un mois plus tard, 5000 personnes se rassemblaient à nouveau dans la capitale pour protester contre la violence de l’État israélien. Ces manifestations et la vague d’actions locales qui ont pris place dans notre pays témoignent de l’indignation et du soutien grandissant pour la cause palestinienne.
Par Elise (Charleroi)
Cette colère du public s’est rapidement manifestée à la suite de l’offensive «Bordure protectrice» déclenchée le 8 juillet dernier par le gouvernement Netanyahu. Ce dernier a instrumentalisé la mort de trois jeunes israéliens comme prétexte pour justifier la nécessité d’une intervention militaire à Gaza. Depuis le début de l’offensive, près de 2.000 Palestiniens ont trouvé la mort, dont une grande proportion d’enfants étant donné que l’âge moyen des 1,8 million d’habitants de la bande de Gaza n’est que de 17 ans. Plus de 460.000 personnes ont été déplacées.
Une situation dans l’impasse
Selon le gouvernement israélien, cette attaque était nécessaire pour neutraliser la force militaire du Hamas à Gaza et supprimer les tirs de roquettes. En réalité, cette vague de violence ne fait que renforcer le désespoir du peuple palestinien, encourageant le sentiment de vengeance et le risque d’actes terroristes envers les citoyens israéliens. De plus, l’offensive à Gaza a déjà causé la mort de 53 soldats israéliens, un bilan bien supérieur au nombre de victimes des tirs de missiles effectués par le Hamas et autres milices palestiniennes dans les douze dernières années.
Les négociations n’offrent que peu d’espoir, étant donné que le gouvernement israélien exige une démilitarisation
totale de Gaza par le Hamas comme condition pour un cessez-le-feu, tandis qu’Israël garderait l’ensemble de ses moyens d’agression militaire envers les Palestiniens. Les revendications du Hamas et du Djihad islamique concernent principalement la levée du siège sur Gaza et la fin des agressions israéliennes. Mais celles-ci ne son pas acceptables pour le gouvernement Netanyahu qui s’est engagé dans une guerre de prestige présentée comme la seule solution pour garantir la sécurité du peuple israélien.Même si une trêve durable est finalement négociée, les conditions de vie des Palestiniens resteront épouvantables étant donné les conséquences dévastatrices des attaques des deux derniers mois : pénurie d’eau potable et d’électricité, destruction des systèmes d’évacuation, destruction d’un tiers des hôpitaux… Le risque d’apparition de maladies est augmenté et la population devra affronter une grave crise humanitaire.
Le rôle des puissances impérialistes
Face à cette crise, les gouvernements occidentaux hésitent à prendre position. Il faut dire que ces pays ont du mal à cacher leurs relations lucratives avec Israël. Ainsi, alors que la Maison-Blanche a timidement regretté les attaques de l’armée israélienne sur les écoles de l’ONU, les États-Unis octroient toujours une énorme aide économique et militaire à Israël, ayant ainsi contribué à la création de l’une des plus puissantes armées du monde. Pour la Grande-Bretagne, c’est le commerce d’armes très lucratif avec Israël qui justifie la position pro-Israël du premier ministre David Cameron.
À force de briser et de diviser les différentes autorités palestiniennes qui se sont succédé et de multiplier les colonies et le contrôle sur Gaza, le gouvernement israélien a favorisé la radicalisation du peuple palestinien et la montée de forces islamistes telles que le Hamas ou le Djihad islamique. Une fois de plus, les puissances impérialistes se retrouvent confrontées au monstre de Frankenstein qu’elles ont elles-mêmes contribué à développer. En Syrie et en Irak, aux frontières d’Israël, les milices de l’État islamique sèment la terreur et menacent les intérêts des puissances occidentales dans la région. Comble de l’ironie quand on sait que ces milices djihadistes trouvent leurs racines dans la résistance des sunnites suite à l’invasion américaine de l’Irak en 2003, et qu’elles ont été financées et armées par la Turquie, l’Arabie saoudite et le Qatar avec l’approbation des USA, qui voyaient là un moyen d’affaiblir le pouvoir de Assad en Syrie et de créer un futur ennemi pour l’Iran.
Le peuple palestinien n’a donc rien à espérer des puissances impérialistes pour son salut. La stratégie du Hamas repose pourtant sur des alliances avec les puissances arabes et a déjà montré ses limites. Ainsi, le Hamas a cesser d’avoir le soutien de l’Égypte lorsque les Frères musulmans ont été chassés du pouvoir par l’armée de Sissi. Il a également perdu celui de la Syrie et de l’Iran après avoir refusé d’accorder son soutien au régime d’Assad. Par ailleurs, la stratégie des tirs de roquettes du Hamas n’apporte aucune avancée au peuple palestinien; au contraire, elle permet au gouvernement israélien de justifier ses attaques et, en tuant des civils israéliens, crée une division et diminue le soutien pour la cause palestinienne parmi les Israéliens.
Déjà dans les années 1980, la stratégie de l’OLP de Yasser Arafat était de s’appuyer sur les pays arabes pour mener une lutte armée de libération de l’extérieur. Cependant, le soutien des pays arabes n’était lié qu’à leur propre intérêt économique. Ainsi, le Roi de Jordanie négociait en secret avec Israël pour récupérer la Cisjordanie qu’il considérait comme une province de son royaume. Cette stratégie a causé une faillite complète de la lutte palestinienne, menant à une insurrection des masses et à la première intifada en 1987.
Seules des actions de masse pourront arrêter le massacre
En 1987, la première intifada a mené à une situation de double pouvoir dans les territoires palestiniens, qui n’étaient plus contrôlés ni par l’administration civile israélienne ni par les autorités municipales palestiniennes. Le pouvoir était entre les mains de comités populaires élus dans les villes, les villages et les camps de réfugiés. Le mouvement n’a pu être arrêté que par la trahison de l’OLP de Yasser Arafat qui a repris le pouvoir des comités et créé l’Autorité palestinienne, ce qui n’a pas empêché Israël de continuer à créer des colonies. Cette impasse a débouché sur la Seconde Intifada en 2000, dominée par les attentats-suicides organisés par le Hamas, sans participation des masses et sans processus démocratique.
En Afrique du Nord, seuls les mouvements de masse des travailleurs et des jeunes ont été capables de faire tomber les dictateurs avec qui les puissances impérialistes collaboraient depuis des décennies. Le peuple palestinien ne peut compter que sur ses propres forces et celles des travailleurs israéliens pour mettre fin au conflit. Le 26 juillet dernier, une manifestation antiguerre a rassemblé 6.000 personnes à Tel-Aviv, et une autre près de 10.000 en août, dont une majorité de juifs, et ce malgré la propagande du gouvernement. Cela montre le potentiel pour des mouvements de masse dans la région.
Le monde dans la tourmente
Les minorités nationales ne peuvent espérer la fin de leur oppression sous le système capitaliste. En effet, les impératifs de profits de ce système sont antagonistes à l’octroi de droits démocratiques pour les différentes minorités d’un pays, tels que les droits linguistiques. De plus, dans une période de crise du capitalisme comme celle que nous traversons aujourd’hui, les tensions inter-impérialistes sont brutalement ravivées et donnent lieu à une multitude de conflits locaux. Dans de telles situations, chaque puissance impérialiste instrumentalise chaque nationalité, chaque ethnie pour mieux défendre ses intérêts, et ce y compris militairement. On le voit en Ukraine, où les droits de la population russophone sont utilisés comme prétexte par Poutine qui n’est en réalité guidé que par les intérêts économiques que représentent le passage du gaz russe vers l’Europe ou la base marine russe en Crimée. De la même manière, l’Union européenne utilise le sentiment anti-Poutine pour tenter de développer une emprise sur l’économie ukrainienne. Les tensions impérialistes créées par le système capitaliste mènent inévitablement à la guerre et à la misère pour les masses.
C’est pour cette raison que le Mouvement Socialiste de Lutte, section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Israël-Palestine, section soeur du PSL, soutient non seulement la fin du siège de Gaza et des attaques israéliennes, mais également la création d’organisations indépendantes de travailleurs en Palestine et en Israël, ainsi que la lutte de masse des Palestiniens sous leur propre contrôle démocratique pour leur droit à l’auto-détermination, avec comme objectif la création d’un État palestinien indépendant, socialiste et démocratique, au côté d’un État d’Israël socialiste et démocratique, dans le cadre de la lutte pour un Moyen-Orient socialiste.
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1994 : La tragédie du Rwanda
Il y a vingt ans, presqu’un million de personnes mouraient au Rwanda dans l’indifférence quasi générale des médias de l’époque. C’était la conséquence directe d’un siècle de pouvoir colonial avec complicité de la France sous la présidence socialiste de François Mitterrand. Le dossier dossier ci-dessous a été écrit par Andy Ford et est paru dans les pages du magazine mensuel Socialism Today, publication du Socialist party, section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et au Pays de Galles.
Le génocide au Rwanda s’est étalé d’avril à juin 1994. Il s’agit de l’un des évènements les plus effroyables de l’Histoire. On estime à 900.000 le nombre de personnes qui ont perdu la vie, souvent tuées par des voisins ou des collègues.
Le Rwanda est un petit pays au cœur de l’Afrique au sol est volcanique et fertile. Il y pleut en suffisance et son altitude est assez élevée pour éviter que les habitants ne soient touchés par la malaria ou victimes des mouches tsétsé. C’est pourquoi ce pays a toujours connu une forte densité de population et a tenu les influences européennes quelque peu à distance.
Le Rwanda pré-colonial consistait en une société qui a, petit à petit, pris forme d’État avec l’avènement d’un « roi » et d’un État de structure clanique. La tradition y était orale, l’écriture n’existait pas encore. Le Roi Rwabugiri (1860-95) a consolidé le premier véritable royaume en conquérant d’autres clans ou en collaborant avec eux. Il s’agissait d’une société basée sur l’élevage avec le « système ubuhake » par lequel les éleveurs prêtaient le « bétail » en échange de services et de loyauté et/ou d’accès à des pâturages. Pour ceux qui s’en sortaient un peu moins bien, il y a avait « ubureetwa » – l’utilisation de terres en échange de travail non rémunéré – ou « akaze », simplement du travail non rémunéré.
« Tutsi » était un terme large désignant celui qui avait du bétail, « Hutu » celui qui n’en avait pas. Les liens réciproques et les mariages mixtes étaient très courants et les deux groupes parlaient la même langue. Un missionnaire belge constatait en 1922 : « Les termes Tutsi et Hutu ne réfèrent pas à l’origine mais aux conditions sociales de richesse, en particulier en matière de bétail. Un chef de tribu ou un riche est appelé un Tutsi. » (Catherine Newbury, The Cohesion of Oppression : Clientship and Ethnicity in Rwanda 1860-1960, Columbia University Press, 1993).
Le Rwanda colonial
Au congrès de Berlin de 1884, le Rwanda a été attribué à l’Allemagne. Lors de ce congrès, le continent africain a été réparti entre les puissances européennes. La classe dirigeante allemande n’a effectivement reçu le nouveau territoire qu’en 1894, lorsque le comte de Gatzen arriva à Kigali. L’Allemagne a eu peu d’impact sur la colonie isolée mais elle repoussa quand même les envahisseurs belges qui venaient du Congo, alors sous contrôle du roi Léopold II. Des moyens étaient tirés des colonies sous la forme d’un impôt sur les huttes imposé via le roi rwandais. Le Royaume britannique a lui aussi utilisé des impôts sur les huttes, en fait pour chaque habitation, en Afrique du Sud afin de forcer les agriculteurs auto-suffisants à entrer dans l’économie capitaliste. Ils devaient gagner un salaire en travaillant pour des entreprises britanniques et pouvoir ainsi payer les impôts.
En 1917 se déroula une attaque commise par des troupes belges depuis le Congo, et le Rwanda a été conquis. Une collaboration avec les souverains autochtones s’est établie, certains obtinrent des armes et du soutien en échange d’aide pour le prélèvement d’impôts et l’exploitation de matières premières. L’exploitation des agriculteurs (Hutus) qui existait précédemment a été intensifiée par les Belges qui pour cela firent appel aux chefs de tribus (Tutsis). Newbury écrit : « les chefs de tribus qui voulaient travailler avec les Belges ont vu leur pouvoir et leur richesse augmenter. En échange, ils étaient censés imposer des lourdes charges à la population, initialement pour fournir des porteurs et de la nourriture aux Européens, ensuite, via l’agriculture et la construction de routes forcées. »
La « guerre » contre le royaume Bukunzi en 1923-25 illustre clairement els conséquences de cette politique. Les chefs de tribus Tutsis voulaient le bétail des souverains de Bukunzi et les Belges voulaient les imposer. Bukunzi se situait plus haut dans les montagnes par rapport au reste du Rwanda et les expéditions allemandes qui avaient voulu s’approprier ces territoires en 1907, 1909 et 1914 avaient été vaincues. Sous domination belge, une querelle de succession a offert une opportunité d’intervention. La première expédition belge se perdit en chemin, mais la seconde soumit le territoire à une occupation militaire brutale pour laquelle elle reçut le soutien des troupes rwandaises locales, en échange de bétail. La reine de Bukunzi décéda en 1925, en plein combat contre les Belges.
Les chefs de tribus s’approprièrent des produits ou du travail forcé, souvent, en prétendant qu’il s’agissait d’un service traditionnel non seulement pour servir les maîtres coloniaux mais aussi leurs propres besoins. Les expulsions forcées furent nombreuses, et la violence massive et omniprésente. Newbury cite un agriculteur rwandais qui déclarait en 1970 : « ils arrivaient et prenaient une vache sous prétexte que tu étais un rebelle. Il n’y avait rien à faire : à la moindre résistance, on était arrêté voire assassiné. »
L’ubureetwa et l’ubuhake ont augmenté étant donné que beaucoup d’agriculteurs dépendaient d’agriculteurs mieux lotis qu’eux et de chefs de tribus. Sans protection, ils perdaient facilement leur bétail, leur terre voire les deux. Ainsi, les dominateurs belges décidèrent en 1931 d’intensifier la production de café. Ils imposèrent à chaque chef de tribu Tutsi d’organiser la culture de 1.000 plants de café de sorte que chaque personne qui était dans l’ubereetwa (utilisation de terres) devait obligatoirement cultiver 54 plants dans le cadre du travail non rémunéré.
Les Belges incorporèrent les pratiques rwandaises telles que l’ubuhake et l’ubureetwa dans la législation coloniale, mais un fermier Hutu qui avait un litige avec un chef de tribu Tutsi devait en référer aux tribunaux locaux pour régler le conflit. Les dominateurs coloniaux avaient utilisé et intensifié les obligations pour exploiter davantage leur colonie. Il y avait une codification des formes précapitalistes de travail.
Une exploitation extrême
Dans les années 1920 et 1930, le pouvoir belge au Rwanda est devenu systématique. En 1921, les exploiteurs coloniaux imposèrent un impôt de 10 francs par vache à tous ceux qui possédaient plus de dix têtes de bétail, celui qui avait moins de dix têtes devait payer cinq francs. Cela occasionna une division entre ceux qui avait du bétail et ceux qui en avaient peu ou pas. En 1933, il y a eu un recensement de population tristement célèbre via lequel chacun devait s’enregistrer comme ‘Tutsi’ (15%), ‘Hutu’ (80%) ou ‘Twa’ (5%). Les Twas étaient les chasseurs-cueilleurs originels du pays.
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, il y a eu une forte croissance au Rwanda. Beaucoup de routes ont été construites et le système akaze de travail non rémunéré était de plus en plus détesté. L’objectif était d’utiliser la terre fertile, la population nombreuse et le bétail du Rwanda pour fournir les centres industriels et miniers du Congo en nourriture.
L’exploitation via les chefs de tribus Tutsis fut intensifiée avec culture forcée de plantes (on présentait hypocritement cette culture comme un exercice à but éducatif…), assèchement des marais pour cultiver du café, service obligatoire dans les mines du Congo ou installation obligatoire sur d’anciens terrains boisés. Les fermiers étaient exploités de manière impitoyable. Cela allait si loin que lors d’une « famine » en 1943, il y eut 300.000 morts alors qu’au même moment, de la nourriture était exportée. Le travail forcé ne pouvait continuer, l’opposition massive à son encontre devenait trop forte. L’Ubureetwa fut aboli en 1949 et l’ubuhake en 1954 mais, dans beaucoup de territoires, il subsista cependant.
La politique du « diviser pour régner » par laquelle seuls les Tutsis recevaient une formation et étaient utilisés pour l’administration de l’autorité et les principales positions commerciales assura que cette minorité détenait tout le pouvoir entre ses mains. Telle pratique permettait à un très petit nombre de Belges de contrôler quatre à cinq millions de Rwandais. Il s’agissait de colonialisme classique, à l’instar des méthodes appliquées par la classe dominante britannique en Irlande, au Sri Lanka, en Inde et ailleurs de par le monde. Karl Marx signalait ainsi que la Grande-Bretagne régnait sur l’Inde avec une armée indienne financée de l’extérieur du pays. Le même modèle fut appliqué par la classe dirigeante belge au Rwanda.
Même le gouverneur belge au Congo, Charles Voisin, reconnaissait en 1930: “Sans collaboration avec les autorités locales, le pouvoir occupant serait impuissant et confronté à l’anarchie.” (citation du livre de Newbury). Dans le cas du Rwanda, la ‘division ethnique’ a, en grande partie, été créée par les colonisateurs.
Le soulèvement des Hutus
Une conscience Hutu s’est développée parmi les masses rurales sous la direction de commerçants Hutus et de petits fonctionnaires qui n’avaient pas accès aux hauts postes de l’administration coloniale. Deux des principaux leaders étaient journalistes pour des journaux catholiques qui n’avaient un public que parce qu’ils jouaient sur la colère latente en zone rurale.
Ils ont commencé à semer l’agitation contre la maison royale et la domination des Tutsis, de sorte que le problème fut posé en termes ethniques. Il fut appelé à la suppression du travail forcé et à son remplacement par du travail rémunéré sous contrats. Il fut exigé que les personnes à la campagne puissent avoir accès au crédit et que les Hutus soient admis dans les écoles et l’enseignement supérieur. Ces importantes revendications étaient limitées par la tendance à les placer dans le cadre de l’identité Hutu. En l’absence d’un programme de transformation socialiste de la société, les revendications revenaient en fait à prendre aux Tutsis pour donner aux Hutus. Les leaders hutus dépendaient même de la division de la société rwandaise et s’opposaient même aux cartes d’identité sur lesquelles l’origine tribale n’était pas mentionnée. Ils argumentaient vouloir mesurer le progrès de l’égalité.
Les dirigeants belges essayaient en vain de maintenir leur système en expérimentant la représentation « ethnique » dans les institutions naissantes mais la situation à la campagne restait pratiquement inchangée. Seuls 6% du conseil d’État consultatif étaient Hutus alors qu’ils représentaient 80% de la population. Les leaders hutus mobilisaient autour de la revendication d’un “gouvernement de majorité” même si une division au sein du mouvement hutu même était déjà présente entre ceux qui défendaient un point de vue anti-Tutsis et ceux qui défendaient l’égalité pour tous.
En novembre 1959, les Hutus se soulevèrent massivement. Le mouvement a démarré lorsqu’un leader hutu fut attaqué par des jeunes tutsis. Des huttes ont été brûlées dans tout le pays et il y a eu beaucoup de violence. Les forces tutsies, mieux organisées et armées, essayèrent de réprimer brutalement la protestation. Les Belges ne pouvaient soudainement plus compter sur leur collaborateurs locaux. Ils parvinrent à peine à rétablir ce qui ressemblait à de l’ordre en nommant des Hutus responsables, de sorte que les anciens collaborateurs Tutsis furent abandonnés à leur sort. Lors des élections de 1960, les partis Hutus remportèrent 84% des voix. L’indépendance suivit en juillet 1962.
La France intervient
Avec l’héritage de la division et de l’exploitation ainsi que l’ingérence de la Belgique qui permettait à l’élite hutue de garder un pied dans la porte, le gouvernement du Rwanda n’a jamais été stable. Cela demeura ainsi jusqu’au coup d’État de Juvénal Habyarimana en 1973. Ce coup d’État a été soutenu par les Français, qui utilisaient l’argument qu’un État à parti unique amènerait la “stabilité”. Dans un certain sens, le coup d’État confirmait que la Belgique avait abandonné l’espoir d’une domination néocoloniale sur le Rwanda. Le pays se retrouva sous sphère d’influence française.
Il s’agissait d’un État à parti unique, d’une dictature anti-communiste, un régime-marionnette aux ordres de la France. Habyarimana obtenait régulièrement plus de 90% des voix lors de la tenue d’élections truquées. Son soutien s’est progressivement affaibli. Certains leaders hutus quittèrent le navire à la dérive, d’autres fuirent à l’étranger. La principale base de soutien d’Habyarimana provenait du groupe Akazu, surtout dans sa propre région.
Le régime dépendait de plus en plus de l’extrémisme hutu pour compenser le manque de progrès sur le plan économique et social. Plus de 90 % de la population dépendaient toujours de l’agriculture et moins de 5% avaient accès à l’électricité. En 1989, le prix du café s’est effondré et Habyarimana a accepté un programme du Fonds Monétaire International, ce qui occasionna de fortes mesures d’austérité et la pauvreté allant de pair pour la population.
Le Front Patriotique rwandais (FPR) a joué sur le mécontentement. En 1990, le groupe vint d’Ouganda au Rwanda. Le FPR était surtout composé de membres de la guérilla tutsie et était dirigé par le président autoritaire actuel, Paul Kagamé. Le FPR n’est pas parvenu à renverser le régime parce qu’en février 1993, les Français sont intervenus.
Le régime de Habyarimana a perdu de plus en plus de soutien, le fait que le pouvoir était détenu par des Hutus ne suffisait pas à fournir la population en nourriture, eau potable ou électricité. Habyarimana dut conclure un accord avec le FPR. Cela se fit via les accords d’Arusha en 1993, par lesquels la France et les USA essayèrent d’imposer un partage de pouvoir.
En avril 1994, l’avion d’Habyarimana fut abattu, peut-être par l’Akazu. Ils avaient rassemblé des armes avec la complicité de la France, dont 500.000 machettes, des listes de Tutsis et une milice avait été mise sur pied, l’Interhamwe. Les trois mois qui suivirent, il y eut presqu’un million de morts. La plupart tués à coups de machettes. L’autorité française était au courant du plan mais a laissé faire pour maintenir les liens avec les alliés. Ce qu’on appelle la « mission de paix » de la France a complètement ignoré le bain de sang et juste protégé les criminels. Lorsqu’Interhamwe a été battue par le FPR, les troupes françaises ont couvert ses troupes dans leur fuite vers le Zaïre.
L’impérialisme est coupable
Pour tenter de minimiser leur propre responsabilité dans le terrible bain de sang, les Français ont commencé à parler de “vieille haine” et à dire que de toute façon « les Africains sont comme ça ». L’extrême-droite et certains médias parlaient d’un exemple de primitivité africaine. Une version légèrement sophistiquée consiste à dire que des politiciens sans scrupules ont conquis le pouvoir et l’ont conservé en jouant sur les rapports entre tribus et l’identité ethnique. Les choses sont présentées de cette manière dans un rapport de Human Rights Watch, “None Left to Tell the Story”. La responsabilité des troubles sanglants est reportée sur les Africains. De telles explications ne suffisent tout simplement pas pour comprendre ce qui s’est passé.
Dans le livre ‘Collapse’ de Jared Diamond, les limites de l’histoire de la “haine ethnique” sont expliquées. Il indique que sur l’île d’Ijwi dans le lac Kivu, une île qui est rwandaise ethniquement même si elle fait partie du Congo, les identités Tutsi et Hutu sont plus disparates et moins importantes. Il n’y a pas eu de manipulation ethnique par l’impérialisme belge à cet endroit. D’autre part, la population Twa du Rwanda – ni tutsie ni hutue – a également été attaquée. Dans une région au nord-est du Rwanda où il y avait moins de Tutsis, beaucoup de Hutus ont été assassinés.
Diamond donne une image claire de la vie au Rwanda juste avant le génocide. Il esquisse une image de densité de population croissante avec épuisement et érosion du sol et un morcellement des terres qui a fait que beaucoup de gens n’avaient plus assez de terres arables. Cela a provoqué une large sous-alimentation. Dans les villages, il y avait une polarisation entre un groupe de riches propriétaires terriens impitoyables d’un côté et de pauvres sans terre de l’autre côté.
De plus en plus de conflits ont éclaté à propos de terres entre propriétaires, pères et fils, veuves et beaux-frères,… Les tribunaux traditionnels recevaient de nombreuses affaires de cette sorte. Juste avant le génocide, il y eut d’ailleurs une forte augmentation des conflits juridiques. Toute la société a connu une tension insoutenable qui a finalement conduit aux atrocités du génocide. (Collapse: How Societies Choose to Fail or Survive, Penguin, 2011)
L’impérialisme et le capitalisme ont démontré leur faillite à chaque instant. L’impérialisme belge a, en réalité, créé les identités tutsi et hutu pour pouvoir piller le pays. Les entreprises belges et les administrateurs coloniaux ont renforcé les formes de travail traditionnelles pour favoriser leur propres intérêts. Même après l’indépendance, le Rwanda a été soumis aux dominations étrangères, d’abord avec les Belges puis avec le néo-colonialisme français.
Seul un gouvernement des travailleurs et des pauvres reposant sur une planification socialiste et démocratique de la production est capable de libérer la population du Rwanda des dominations coloniales et de dépasser la division créée par les exploiteurs capitalistes. Une perspective internationaliste claire doit y être combinée, pour une transformation socialiste de la société dans la région subsaharienne et au-delà.
Au lieu de ça, la dictature soutenue par les Français a progressivement perdu le soutien de la population et dépendait de plus en plus des extrémistes Hutus. Le pays stagnait et les tensions augmentaient à la campagne. L’État français soutenait les forces meurtrières afin de maintenir le Rwanda dans sa propre sphère d’influence. En protégeant Interhamwe, des centaines de milliers de personnes ont été massacrées.
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Tensions grandissantes entre les puissances occidentales et Moscou
Au moins 6.000 soldats russes ont pris position dans la péninsule de Crimée, officiellement république autonome de l’Ukraine. Le régime russe affirme que cette mesure a été prise à la demande du gouvernement de Crimée, désireux que la Russie intervienne pour défendre les droits des citoyens russes. Le Kremlin a explicitement indiqué qu’il envisageait d’envoyer des troupes dans d’autres régions d’Ukraine si les droits de l’ethnie russe étaient «lésés», même si Vladimir Poutine a déclaré que pareille mesure ne serait prise qu’en ‘‘dernier recours’’.
Le régime de Poutine s’est vu servir sur un plateau le prétexte pour son intervention : la décision hautement provocatrice du nouveau gouvernement de Kiev de diminuer les droits linguistiques de la population russe et d’autres minorités. Le parti d’extrême-droite antisémite Svoboda dispose de quatre postes ministériels au sein du nouveau gouvernement de Kiev, dont celui de vice-premier ministre. Un co-fondateur de Svoboda dirige également le Conseil national de sécurité et un de ses adjoints est à la tête du mouvement paramilitaire et fasciste Secteur Droit. Le ministère de l’Intérieur a affirmé que la milice instaurée par Secteur Droit allait être intégrée dans les forces de police. La Douma russe s’est précipitée pour décréter une nouvelle loi permettant de délivrer des passeports russes à tout membre de l’ethnie russe en Ukraine. Une loi a également été adoptée pour autoriser qu’une région d’un autre pays soit annexée à la Russie pour autant que le gouvernement de ce pays soit considéré comme ‘‘instable’’.
Ces mouvements militaires russes surviennent après l’éviction du président ukrainien Ianoukovitch et l’arrivée au pouvoir d’un régime pro-occidental. L’ingérence irresponsable des puissances occidentales en Ukraine et la riposte de la Russie ont créé la plus grave crise militaire en Europe depuis la guerre russo-géorgienne en 2008. Ces dernières semaines, un mouvement de masse s’est développé contre le régime corrompu et autoritaire de Ianoukovitch et des oligarques. Ce mouvement avait les traits d’une révolution, et la force des masses a conduit à la désintégration du régime de Ianoukovitch et de l’appareil d’Etat. Mais en l’absence d’organisations représentant les intérêts de la classe des travailleurs, le vide politique a été occupé par des politiciens réactionnaires de l’opposition, des nationalistes ukrainiens radicaux et par le parti d’extrême-droite Svoboda ainsi que par le groupe Secteur Droit, ce qui a suscité de profondes craintes au sein de l’ethnie russe.
L’hypocrisie US
Avec une hypocrisie à peine masquée, le Secrétaire d’État américain John Kerry a condamné ‘‘la violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine’’. Mais lorsque leurs intérêts impérialistes sont en jeu, les États-Unis n’hésitent pas à intervenir militairement et à violer des territoires ‘‘souverains’’. La superpuissance US a ainsi envahi et occupé l’Irak et l’Afghanistan, interventions au coût humain désastreux. Les puissances occidentales hurlent de rage au sujet de la prise de contrôle de la Crimée par les forces russes, mais les forces de l’OTAN ont occupé le Kosovo après avoir armé et soutenu militairement l’Armée de libération du Kosovo dans son conflit avec le régime serbe en 1999.
Face à des mouvements de troupes russes en Crimée, l’impérialisme occidental s’est trouvé militairement paralysé et divisé quant aux mesures à adopter. Les gouvernements européens résistent à la prise de sanctions graves. De nombreux pays européens comptent beaucoup sur le commerce avec la Russie (l’Allemagne reçoit par exemple 40% de son gaz et de son pétrole à partir de la Russie) et ils sont réticents à prendre des mesures qui aggraveraient les problèmes économique de l’Union Européenne. Une photographie d’un document secret détaillant les délibérations des autorités britanniques a révélé une proposition visant à ‘‘ne pas soutenir, pour l’instant, des sanctions commerciales (…) ou à fermer le centre financier de Londres aux Russes.’’
Le nouveau gouvernement de Kiev a déjà de graves problèmes à gérer qui auront une grande incidence, et pas uniquement concernant les droits des russophones, mais concernant ceux de l’entièreté des travailleurs en Ukraine. L’économie est au bord du gouffre et le gouvernement a annoncé d’importantes réductions des dépenses de l’État. Toute aide financière de l’ouest s’accompagne invariablement de sévères exigences en termes d’application de l’austérité.
Afin de mobiliser un soutien à son intervention militaire, des manifestations ont été organisées dans plusieurs villes russes, dont l’une forte de 20.000 à 30.000 personnes à Moscou. Le régime de Poutine instrumentalise les inquiétudes des Russes et promeut un patriotisme très cru alimenté par les sentiments anti-occidentaux qui vivent parmi la population. De nombreux Russes sont, bien entendu, véritablement préoccupés par le sort de l’ethnie russe en Ukraine étant donné le caractère totalement réactionnaire du nouveau régime ukrainien. Mais l’intervention militaire russe n’est pas motivée par le souci du bien-être des travailleurs russophones, de même que les manœuvres cyniques des puissances occidentales ne visent en rien à aider la classe des travailleurs de langue ukrainienne. Le Kremlin est gravement préoccupé par l’arrivée d’un régime pro-Otan et pro-occidental à Kiev, aux frontières occidentales de la Russie. Cela menace les intérêts géostratégiques et économiques vitaux de l’impérialisme russe.
L’intervention de Poutine en Crimée est à considérer dans le cadre des tentatives visant à restaurer le pouvoir et l’influence de l’élite russe qui, après l’effondrement de l’ancienne Union soviétique, s’est transformé en élite capitaliste. En réponse, l’Union européenne et les États-Unis menacent de prendre des sanctions économiques. Le régime ukrainien soutenu par l’Occident a quant à lui ordonné la mobilisation générale pour contrer l’intervention. Les travailleurs d’Ukraine auront cher à payer pour toute escalade du conflit.
Conflits ethniques et nationaux
Le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) appelle à mettre fin à toute ingérence impérialiste et à toute intervention militaire en Ukraine. Ces forces réactionnaires menacent de pousser la crise jusqu’à la guerre, avec la terrible perspective de conflits ethniques et nationaux similaires ceux qui ont démembré la Yougoslavie dans le sang au cours des années 1990. Le CIO appelle à la constitution de comités anti-guerre en Russie et en Ukraine, y compris en Crimée. Des comités au fonctionnement démocratique peuvent organiser la défense inter-ethnique de n’importe quel groupe de la population menacé par l’extrême-droite ou le chauvinisme russe.
Ce dimanche 3 mars, des protestations anti-guerre ont eu lieu en Russie, mais de nombreux manifestants ont été arrêtés, dont des camarades de la section russe du Comité pour une Internationale Ouvrière (photo)Il y a une semaine, un sondage d’opinion indiquait que 73% de la population russe était opposée à une intervention russe. Ce dimanche 3 mars, des manifestations anti-guerre ont eu lieu, mais des centaines de personnes ont été arrêtés par la police, y compris des membres du CIO. Tout comme cela avait été le cas en Ossétie du Sud avant la guerre avec la Géorgie, le régime russe a intensifié sa campagne pour la ‘‘défense’’ de l’ethnie russe en Ukraine. Cette rhétorique va très probablement pouvoir profiter d’un soutien temporaire en Russie tandis que la répression s’abattra sur les voix d’opposition.
Des dizaines de milliers de manifestants pro-russes ont défilé le week-end dernier dans la ville portuaire de Sébastopol, base de la flotte russe en mer Noire, ainsi qu’ailleurs en Crimée et ailleurs et à l’Est de l’Ukraine, notamment à Donetsk. Des groupes ‘‘d’autodéfense’’ apparemment soutenus par Moscou ont été instaurés et ils ont saisi les offices gouvernementaux. Les dirigeants locaux et régionaux ont été rapidement remplacés par d’autres, pro-russes. Un référendum sur la sécession de la Crimée est en préparation. La mobilisation de jusqu’à 130.000 troupes russes à la frontière avec l’Ukraine a rapidement suivi.
En l’absence d’un mouvement indépendant des travailleurs, le danger est réel que de nouvelles manifestations de masse à travers l’Ukraine adoptent de plus en plus un caractère ethnique.
Même si nombreux sont les travailleurs à l’Est du pays à craindre la politique du nouveau régime de Kiev et notamment la participation de l’extrême-droite, l’inquiétude est également grande face à l’intervention russe en Crimée et face au risque de guerre en Ukraine et dans la région. Beaucoup de villes de l’Est ont connu des mobilisations restreintes mais néanmoins importantes contre l’escalade du conflit. Les autorités russes affirment que les russophones fuient la région vers la Russie et que plus de 140.000 personnes ont déjà demandé asile en Russie.
La Crimée doit pouvoir si elle le désire faire usage de son droit à l’auto-détermination. Cette région a longtemps été un pion dans le jeu d’intrigues des élites dirigeantes des grandes puissances. En 1944, Staline a expulsé par la force la population tatare de la péninsule. En 1954, le dirigeant soviétique Khrouchtchev a remis la Crimée et ses habitants à l’Ukraine, sans qu’aucune consultation ne soit organisée. Les peuples de l’ex-Union soviétique n’ont pas non plus été consultés quand leurs dirigeants régionaux ont décidé de prendre le pouvoir au début des années 1990 au sein de nouvelles républiques.
Le CIO soutient le droit du peuple de Crimée de décider librement de son avenir, sans aucune coercition, que ce soit vers une autonomie accrue ou carrément jusqu’à l’indépendance. Une assemblée constituante démocratiquement organisée, représentant toutes les couches de la classe ouvrière, permettrait d’assurer qu’un référendum sur l’avenir de la Crimée soit supervisé par des comités démocratiquement élus de travailleurs. Les droits de 300.000 Tatars de la région et de toutes les autres minorités doivent également être pleinement garantis, y compris concernant leur langue et leur religion. Tout cela est impossible en restant au sein du système capitaliste avec sa pauvreté, son chômage et son exploitation, de même qu’en raison de la logique des élites concurrentes de ‘‘diviser pour régner’’. Seul un gouvernement des travailleurs pourra remplacer ce système capitaliste pourri par une société garante des intérêts des masses, y compris en termes de droits des nationalités et de protection des minorités, dans le cadre d’une fédération socialiste des Etats de la région.
Ce qui se déroule actuellement sous nos yeux ne conduira à aucune réelle autodétermination. La Crimée deviendra simplement un protectorat russe, à l’instar de l’Ossétie du Sud, ou, pire encore, une région occupée sous la poigne d’autorités dictatoriales, comme c’est le cas en Tchétchénie avec le gouvernement Kadyrov. L’expérience du Kosovo et de l’Ossétie du Sud illustrent que l’impérialisme, qu’il soit russe ou occidental, est incapable d’assurer la sécurité économique ou l’unité entre les différents groupes ethniques.
Il existe sans aucun doute une profonde atmosphère d’opposition au nouveau régime de Kiev parmi les Russes ethniques de Crimée. Mais le référendum proposé par le gouvernement pro-russe de Crimée, soutenu par les forces armées russes, ne prendra pas place dans une atmosphère de débat réellement libre, sans considération pour les autres groupes ethniques de Crimée, comme les 300.000 Tatars.
Les travailleurs ont bien plus en commun que de choses qui les séparent
La pauvreté, le chômage, l’exploitation et la dévaluation de la monnaie affectent tous les travailleurs. Les élites dirigeantes des deux pays sont prêtes à instrumentaliser les différences ethniques pour empêcher les travailleurs de s’unir au sein d’une lutte commune. Il semble maintenant qu’elles sont préparées à aller jusqu’à la guerre pour défendre leurs intérêts. Les travailleurs et les jeunes doivent s’unir à travers l’Ukraine pour riposter contre les attaques économiques et sociales qui vont arriver de la part du nouveau gouvernement. Cette lutte ne sera couronnée de succès que si la classe ouvrière est unie contre les oligarques et leurs amis d’extrême-droite actuellement dans le gouvernement de Kiev.
La question clé aujourd’hui est celle de la construction d’un parti de masse des travailleurs armé d’un programme socialiste et internationaliste et visant à la mise sous propriété publique des secteurs-clés de l’économie et des richesse des oligarques et hauts fonctionnaires, afin de garantir à chacun un bon niveau de vie, de bonnes pensions, des soins de santé, un enseignement de qualité et un logement, dans le cadre d’une économie socialiste démocratiquement planifiée.
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Syrie : La Russie fait une proposition concernant les armes chimiques
La campagne anti-guerre doit se maintenir : NON à toute intervention impérialiste !
Alors que le sommet du G20 qui se tenait en Russie prenait fin, les diverses puissances capitalistes internationales étaient divisées en deux camps opposés concernant l’opportunité de lancer une attaque militaire en Syrie. Pendant ce temps, la volonté guerrière d’Obama rencontrait une forte opposition au sein des deux principaux partis politiques américains.
Judy Beishon, Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles)
- Bruxelles : Action contre l’intervention impérialiste en Syrie, le camp pro-Assad rend impossible le développement d’un large mouvement anti-guerre!
- Syrie : Obama bat le tambour de guerre
- Syrie : Non à l’intervention impérialiste !
Aux USA, les membres du Sénat et de la Chambre des représentants étaient sous la forte pression de l’opinion publique, largement opposée à une intervention militaire. Il était bien incertain qu’Obama puisse obtenir l’approbation qu’il souhaitait. Les dirigeants du parti Républicain étaient divisés entre un ‘‘réalisme prudent’’ à l’instar du sénateur Rand Paul et l’interventionnisme agressif de l’ancien candidat républicain à l’élection présidentielle John McCain.
Les Démocrates, quant à eux, désirent éviter d’endommager la réputation d’Obama en votant contre lui, mais nombreux sont ceux qui craignent les conséquences qu’auraient un ‘‘oui’’. Pour Obama, perdre cette consultation constituerait un puissant coup porté à son prestige, à l’image de ce qu’a subi David Cameron face au refus du Parlement britannique. Voilà ce qui explique le changement d’attitude du gouvernement américain, vers d’éventuelles négociations concernant une supervision internationale des stocks d’armes chimiques syriens.
Face à une défaite possible au Congrès américain, il semble bien qu’Obama ait reçu une bouée de sauvetage politique inattendue de la part de son homologue russe Vladimir Poutine. Poutine a proposé que le régime syrien place ses armes chimiques sous la supervision des Nations Unies afin d’éviter les frappes aériennes sous commandement américain contre les bases militaires du régime syrien.
Une agression impérialiste n’est toutefois pas encore définitivement hors de vue. Tôt ou tard, en fonction des événements, il n’est pas exclu que David Cameron fasse par exemple son retour sur cette question en obtenant le soutien de dirigeant travailliste indécis Ed Miliband, dans l’opposition. La campagne anti-guerre doit être maintenue, avec l’implication de syndicalistes, de militants marxistes et autres. Il reste toujours d’actualité de clamer haut et fort : non à toute intervention impérialiste en Syrie ! Mais il faut aller plus loin.
La machine de propagande est lancée
Dans sa tentative de gagner un soutien aux Etats-Unis, la machine de propagande d’Obama a été utilisée à plein régime, notamment en utilisant des vidéos d’images de victimes d’attaques de gaz chimiques réunies par l’opposition syrienne et la CIA. Ces images sont horribles, mais la question de savoir qui est véritablement responsable de ces actes reste en suspend, qu’il s’agisse de Bachar Al-Assad, de commandants militaires agissant sans son approbation (comme le rapporte le journal allemand Bild, en affirmant se baser sur des écoutes de l’armée allemande) ou des forces d’opposition.
De toute manière, la possibilité d’une attaque occidentale n’est pas fondamentalement basée sur l’emploi d’armes chimiques. Dans une lettre publiée par le Times le 5 septembre dernier, Lord Lamont (ancien ministre conservateur de Margareth Thatcher et de John Major) a rappelé qu’en 1988, l’Occident a fermé les yeux lorsque Saddam Hussein a utilisé du gaz moutarde et du gaz sarin contre les troupes iraniennes, tuant ainsi 20.000 personnes. Il a ajouté : ‘‘Un récent article paru dans le magazine US Foreign Policy a affirmé que les responsables américains qui ont donné connaissance à l’Irak des mouvements de troupes iraniennes savaient que des armes chimiques seraient utilisées contre eux.’’
Aucun missile américain n’empêchera que de armes chimiques soient à nouveau utilisées, ne tombent dans les mains de terroristes ou soient cachées ailleurs. Une attaque américaine ne constituerait rien d’autre qu’un acte sanglant destiné à défendre le prestige de la classe dirigeante américaine aux Etats-Unis et dans le monde et à protéger ses intérêts au Moyen-Orient, après qu’Obama ait imprudemment déclaré que l’utilisation d’armes chimiques serait une ‘‘ligne rouge’’.
D’autres répercussions seraient inévitables, comme de possibles attaques contre des bases américaines dans la région, des tirs de roquettes contre Israël, des attentats terroristes aux États-Unis et dans ses pays alliés ou encore une perturbation de l’approvisionnement en pétrole. Les tirs de missiles américains renforceraient également la perspective d’une escalade du conflit syrien et de sa propagation dans les pays voisins. Il y aurait également plus de réfugiés, alors que leur nombre atteint déjà le total phénoménal de six millions de personnes, à l’intérieur et à l’extérieur de la Syrie.
Toute l’ironie du sort est que la population syrienne pourrait bien plus courir le risque d’être victime d’armes chimiques dans le cas de frappes américaines. Il a ainsi été prouvé que les frappes aériennes américaines contre les usines d’armes chimiques de Saddam Hussein lors de la guerre du Golfe de 1991 n’ont pas détruit le gaz sarin mortel qui était visé, mais l’ont simplement répandu jusqu’à 600 km des bases militaires détruites.
Les masses voient à travers les projets des gouvernements
Ce qui se cache réellement derrière ‘‘l’humanitarisme’’ affiché par les gouvernements occidentaux afin de s’assurer le soutien de leur opinion publique est visible aux yeux de la majorité de la population des divers pays. Le soutien indéfectible des impérialistes occidentaux aux élites dirigeantes arabes répressives et dictatoriales ; le massacre de civils irakiens ; le soutien aux assauts du régime israélien contre Gaza ; l’assassinat de civils par des drones américains au Pakistan, en Afghanistan et au Yémen ; leur acceptation de la répression de l’armée en Egypte et beaucoup d’autres exemples illustrent que ces puissances savent soutenir une infâme brutalité lorsque cela leur convient.
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Simplement s’opposer à l’intervention impérialiste est insuffisant, cela laisse la porte ouverte à un soutien au dictateur Assad. Pire, certains vont jusqu’à défendre l’idée erronée selon laquelle ‘‘les ennemis de nos ennemis sont nos amis’’. Il n’est pas non plus possible de prendre parti pour le camp des rebelles, liés soit à l’islam politique réactionnaire, soit à d’anciens dirigeants du régime. Chacune de ces forces défend des intérêts liés à l’exploitation et à l’oppression des masses. Notre seul camp, c’est celui de notre classe, celle des travailleurs, des jeunes, des opprimés ! Nous devons encourager son auto-organisation !
Cette tâche est immense, mais la Syrie n’est pas isolée du reste du monde : les processus révolutionnaires sont contagieux et avancent par vagues. Les luttes de masse en Tunisie et en Egypte s’orientent vers la chute du système lui-même et pas seulement vers celle d’un gouvernement capitaliste autoritaire qui sera remplacé par un autre. La construction d’un rapport de forces vers un régime basé sur la satisfaction des besoins des masses aura ses répercussions sur la Syrie et ailleurs. L’élément crucial sera la construction d’instruments de lutte (comités, syndicat et parti) afin d’unir et de défendre les travailleurs et les pauvres par-delà leur religion ou leur ethnie.
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Pour éviter de subir des pertes humaines et de s’embourber dans une intervention prolongée, les éventuelles frappes américaines prendraient très probablement la forme de missiles tirés à distance plutôt que de bombardements aériens. Cela endommagerait inévitablement les forces armées d’Assad, mais la Russie peut toujours le ravitailler, et sa supériorité militaire sur l’opposition syrienne pourrait être maintenue. Bachar Al-Assad profiterait en outre du ‘‘statut de victime’’, en particulier parmi sa base de soutien syrienne, russe et chinoise.
La guerre civile en Syrie a engendré une dynamique horrible de régulières atrocités, et ce des deux côtés. En laissant faire le régime vicieux d’Al-Assad et les capitalistes en herbe de l’opposition (et ses nombreuses nuances de division et de sectarisme), la guerre est susceptible de perdurer jusqu’à ce que les deux côtés aient utilisé jusqu’au bout leurs capacités militaires.
Beaucoup de puissances capitalistes étrangères se sont mêlées de ce conflit avec leurs prétendues ‘‘solutions’’ qui, toutes, illustrent leur faillite à offrir une solution capable de mettre un terme au cauchemar des masses syriennes.
Seule la construction d’organisations non-sectaires basées sur la force des travailleurs, démocratiquement gérées et coordonnées les unes les autres peut montrer une voie de sortie qui ne soit pas un cul-de-sac. Ces instruments de lutte auraient également besoin d’organiser une résistance armée des masses tant contre les forces du régime d’Al-Assad que contre toutes les milices dirigées par des forces réactionnaires motivées par le profit personnel, la division religieuse ou ethnique, et la vengeance.
Cette unité des travailleurs pourrait se développer grâce à l’attraction d’un programme de rupture anticapitaliste et socialiste posant clairement la question de la propriété collective des secteurs-clés de l’économie, dans le cadre d’une planification économique démocratiquement élaborée et visant à éliminer l’exploitation et la pauvreté.
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Action contre l'intervention impérialiste en Syrie : le camp pro-Assad rend impossible le développement d'un large mouvement anti-guerre!
Ce dimanche, une manifestation a eu lieu à l’initiative d’Intal devant l’ambassade américaine afin de s’opposer à la menace d’une intervention militaire en Syrie. Le PSL défend le droit à l’autodétermination des peuples et s’oppose au déclenchement d’une intervention militaire qui n’a pour but que de remplacer un dictateur par un autre, sans toucher au fond de l’oppression capitaliste.
Par Julien (Bruxelles)
- Syrie : Obama bat le tambour de guerre
Depuis le début des mouvements révolutionnaires en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, le PSL s’est systématiquement placé du côté des pauvres et des travailleurs. Nous ne défendons pas les dictateurs comme Bassar Al-Assad en nous berçant d’illusions sur le fait qu’il constituerait un quelconque bouclier face à l’Islam politique fondamentaliste. Ni Assad, ni la direction des différents groupes rebelles ne se situent du côté des travailleurs et des pauvres. Les masses ont besoin d’un outil de classe indépendant pour renverser le régime et pour décider démocratiquement de leur avenir, tout en réunissant dans la lutte les travailleurs et les pauvres des diverses ethnies et religions. Les mouvements de masses en Tunisie et en Egypte ont montré que les masses sont capables de renverser des régimes à coups de grèves générales, de comités de quartiers, d’occupations,… ce qui doit servir d’exemple pour la Syrie. Ces mouvements ont montré que, dans la région, les masses sont prêtes pour une révolution et n’ont pas besoin de s’en remettre à une élite nationale pour rompre avec l’impérialisme et les sectes religieuses. Mais ils illustrent aussi que la révolution peut dégénérer faute de clarté quant à la nécessité de mettre fin aux causes de l’oppression et en cherchant à nouer des alliances avec des forces opposées aux intérêts de la classe ouvrière.
Il est donc nécessaire de prendre ses distances, tant envers le régime d’Assad qu’envers les rebelles soutenus par l’Arabie-Saoudite, le Qatar et l’impérialisme occidental. Nous déplorons que l’appel d’Intal n’ait pas adopté cette approche en se limitant à manifester contre l’impérialisme. Cela a d’une part permis d’isoler la manifestation vis-à-vis des Tunisiens et Egyptiens, mais aussi vis-à-vis de jeunes et de travailleurs syriens qui s’opposent aux divers dictateurs de la région. D’autre part, cela a attirer des Syriens pro-Assad. Ces derniers n’ont pas hésité à, dans un premier temps, intimider nos membres qui vendaient notre journal (en Syrie, grâce à la dictature, les pro-Assad ne connaissent pas le problème d’être critiqués dans la presse) pour ensuite s’en prendre physiquement à un groupe d’Iraniens qui avait brandi des pancartes contre l’impérialisme et contre le dictateur Assad. Plusieurs manifestants se sont interposés pour les protéger – dont des membres et sympathisant du PSL, des JOC et d’Anonymous – mais la police est venue en aide aux agresseurs pro-Assad en nous repoussant en dehors de la manifestation, en arrêtant deux manifestants et en traitant les opposants à Assad (JOC, PSL, quelques Anonymous et Iraniens de gauche) comme des violents.
Le PSL n’est pas non plus en accord avec la position de la LCR, qui n’est pas claire dans sa critique sur les rebelles et leur armement par l’impérialisme. D’un autre côté, elle s’exprime clairement contre une intervention militaire directe. Sur base de ce dernier point, nous ne comprenons pas pourquoi les organisateurs lui ont demandé de quitter la manifestation. Un mouvement anti-guerre ne peut se développer que sur base de l’espace laissé au débat et à la discussion, et non pas en cédant à la pression pour adopter une position unilatérale sous l’intimidation, pro-Assad dans ce cas-ci.
La communauté kurde a déjà manifesté à Bruxelles, avec 350 personnes, contre les attaques d’Al-Qaïda dans la région kurde de Syrie et contre l’intervention militaire, tout en s’opposant également au dictateur. Le caractère de la manifestation de ce dimanche a assuré leur absence.
Que se passera-t-il si les pro-Assad continuent à attaquer physiquement toute personne opposée au régime? Nous pensons que se limiter à l’anti-impérialisme n’est pas suffisant pour construire un mouvement anti-guerre large. Il est nécessaire de défendre une réelle alternative, une alternative socialiste, dans l’intérêt des pauvres et des travailleurs de la région!
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Syrie : Non à l’intervention impérialiste !
Un flot incessant d’images sanglantes, de vidéos et de rapports de l’insupportable souffrance infligée aux masses syriennes a été diffusé dans le monde entier via les médias sociaux, les smart phones et les canaux d’information traditionnels. Initialement, en 2011, à la suite des révolutions en Tunisie et en Egypte, un soulèvement populaire a pris place contre le régime policier de Bachar el-Assad. Mais les monarchies semi-féodales d’Arabie Saoudite et du Qatar ainsi que les puissances impérialistes sont intervenues et ont livré un énorme soutien financier et militaire dans l’espoir de faire dérailler ce mouvement.
Editorial de l’hebdomadaire The Socialist (journal du Socialist Party, CIO-Angleterre et Pays de Galles)
Le soulèvement contre la dictature d’Assad a été détourné en un conflit sectaire et a, en outre, déclenché une lutte dangereuse entre sunnites et chiites à l’échelle régionale. Le bilan des décès après ces années de conflit est estimé à plus de 100.000 morts. Deux millions de personnes ont fui la Syrie et environ cinq millions de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays. Les horreurs se succèdent les unes aux autres.
Pour l’écrasante majorité des gens, la révélation de l’utilisation d’armes chimiques à Ghouta, un quartier de Damas, parait ouvrir un infernal nouveau chapitre de souffrances pour les masses. Les rapports qui font état de centaines de morts de milliers de blessés sont véritablement horribles.
Compte tenu de tout ce qui s’est déjà passé et de la menace de la déstabilisation régionale qui se profile, l’aspiration à trouver une solution face à cette horreur est une réaction tout à fait humaine. Mais espérer que les gouvernements américain et britannique ainsi que leurs alliés en France, en Allemagne et en Turquie puissent livrer cette solution est une terrible erreur au vu de l’Histoire à la fois récente et plus ancienne.
Les frappes aériennes
Au cours de ces derniers mois, le président américain Barack Obama a averti à cinq reprises que l’utilisation d’armes chimiques en Syrie constituerait une ‘‘ligne rouge’’ qui déclencherait une riposte internationale. Trois navires de guerre américains se trouvent déjà en Méditerranée, et un autre est destiné à les rejoindre. Des pilotes chypriotes ont rapporté avoir aperçu des avions de guerre sur l’aérodrome britannique à Chypre.
Le ministre des Affaires Etrangères britanniques, William Hague, a préparé le terrain pour une intervention en Grande-Bretagne, ce qui indique que l’absence de mandat de la part de l’ONU ne constituera pas un obstacle : ‘‘Il est possible de prendre des mesures fondées sur une grande détresse humanitaire.’’ Il a laissé entendre qu’une intervention, très probablement des bombardements aériens intensifs, pourrait prendre place au cours de ces prochaines semaines, si pas au cours de ces prochains jours. Le conseil de sécurité des Nations Unies est divisé, la Russie et la Chine s’opposant à toute intervention dans l’intérêt de leurs propres classes capitalistes.
Il semblerait également que William Hague soit en contact avec les régimes dictatoriaux et répressifs du Qatar et d’Arabie Saoudite, qui accueilleraient avec bienveillance une défaite d’Assad pour les répercussions que cela aurait sur l’Iran et le Hezbollah. L’Iran a averti que l’intervention militaire occidentale va déstabiliser la région.
Le spécialiste du Moyen Orient Patrick Cockburn (correspondant au Moyen Orient depuis 1979, pour le Financial Times initialement et actuellement pour The Independent). a souligné la difficulté de déterminer qui est véritablement responsable de la récente attaque à l’arme chimique.
Les inspecteurs de l’ONU avaient reçu la garantie de l’accès aux lieux et d’un cessez-le-feu, mais ils ont essuyé des tirs et ont été retirés de la région en quelques heures. Cela n’est pas en soi de nature à démontrer qui est responsable, et ces inspecteurs n’avaient de toute manière pour fonction que de déterminer s’il y avait bien eu recours aux armes chimiques, pas de prendre position quant au responsable.
Avant que les inspecteurs de l’ONU se soient prononcés sur cette question, le secrétaire d’Etat américain John Kerry a déclaré que les Etats-Unis trouvaient ‘‘incontestable’’ l’utilisation d’armes chimiques en Syrie et que les forces du président Bachar el-Assad avaient commis une ‘‘obscénité morale’’ contre son propre peuple.
‘‘Obscénité morale’’, voilà une expression qui pourrait très bien s’appliquer à la destruction de l’Irak et l’utilisation de phosphore blanc et d’uranium appauvri, à la prison à ciel ouvert où sont enfermés les Palestiniens dans le dénis de leurs droits démocratiques et nationaux, au silence face au génocide commis au Sri Lanka contre la minorité tamoule, sans encore mentionner l’emploi massif d’armes nucléaires et chimiques de la part des puissances impérialistes.
En dépit de l’aspiration à mettre fin au massacre en cours en Syrie, il existe une large opposition publique intérieure tant aux Etats-Unis qu’en Grande-Bretagne quant à une intervention militaire. Le souvenir de l’invasion de l’Irak et des ‘‘preuves’’ montées de toute pièce selon lesquelles Saddam Hussein disposait d’armes de destruction massive sont encore vifs. Ce sentiment est encore aggravé par le fait que le gouvernement britannique n’ait pas publié les résultats de l’enquête Chilcot, la commission d’enquête publique concernant l’intervention du Royaume-Uni en Irak.
Dans le cadre de ses promesses électorales, Obama s’était engagé à mettre fin à l’engagement américain en Irak et à en finir avec l’ère belliciste des années Bush. Mais il est au contraire devenu un président en guerre avec la multiplication de l’utilisation de drones meurtriers en Afghanistan et au Pakistan, malgré le retrait d’une partie des troupes sur le terrain, et le maintien de la prison de Guantanamo. 60% de la population américaine s’oppose à une intervention militaire US en Syrie.
Mais tant le gouvernement américain que le gouvernement britannique ont intérêt à apparaître comme des héros et des ‘‘défenseurs de la démocratie’’ aux yeux des masses syriennes, car ils sont embourbés dans cette profonde crise du capitalisme sans avoir de solution pour y faire face, sur fonds d’une colère croissante contre eux.
La guerre d’Irak
Dans la période qui a précédé l’invasion de l’Irak, les Libéraux-Démocrates (actuellement au pouvoir avec les Conservateurs de David Cameron) s’étaient vaguement présentés comme un parti anti-guerre en s’opposant à toute intervention sans mandat de l’ONU. Selon nous, l’ONU ne saurait être invoquée en tant qu’arbitre dans l’intérêt du peuple irakien, car cette institution est dominée et composée de représentants des principaux gouvernements impérialistes et bellicistes. Mais aujourd’hui, l’ancien dirigeant des Libéraux-Démocrates, Paddy Ashdown, fait valoir que, dans le cas de la Syrie, une action unilatérale est préférable à l’inaction.
Le Ministre des Affaires Etrangères du cabinet fantôme travailliste (le ‘‘gouvernement en opposition’’) Douglas Alexander a demandé que le Parlement soit convoqué sur cette question. David Cameron semble enclin à le faire, même s’il fait face à une légère opposition de certains de ses propres députés en raison des complications et des risques qu’une intervention représenterait pour l’avenir de toute la région.
Les Travaillistes n’ont cependant pas indiqué comment ils voteraient au Parlement. Un véritable parti de gauche représentant les intérêts des travailleurs et de leurs familles serait massivement opposé à toute forme d’action militaire en Syrie. Mais le Parti Travailliste a derrière lui une longue expérience de fauteur de guerre, notamment avec l’envoi de troupes en Irak dans le cadre d’une guerre pour le pétrole unilatéralement bénéfique aux intérêts des grandes entreprises et à des fins stratégiques.
Dans l’opposition, les Travaillistes ont fait preuve d’une attitude qui n’a consisté qu’à se prosterner devant les politiques d’austérité pourries du gouvernement. Encore une fois, il est nécessaire de construire une nouvelle force politique large pour donner une voix à l’écrasante majorité de la population qui s’oppose à la guerre et à l’austérité.
Il n’existe aucun espoir qu’une action de la part de ce gouvernement ou de ses homologues internationaux aboutisse au soulagement des peines des populations de Syrie ou du Moyen-Orient. En fait, il est précisément certain que l’augmentation des bombardements conduira à une augmentation des souffrances des masses. Et c’est pourquoi il faut combattre l’intervention impérialiste.
Un ‘‘Changement de régime’’ ne figure pas dans les objectifs publiquement cités, car Assad dispose d’un régime relativement fort, en raison de l’opposition farouche de la Russie et parce que la question de savoir ce qui remplacerait le régime actuel est problématique. Compte tenu de l’importance de la présence d’Al-Qaïda en Syrie, il existe aussi de graves dangers qu’un ‘‘retour de manivelle’’ avec une croissance du terrorisme dans la région et en Grande-Bretagne et parmi ses alliés dans cette aventure.
Le capitalisme n’a aucune solution à offrir dans ce conflit autre que de menacer, comme c’est le cas dans la région, de conduire à un conflit ethnique plus important et qui pourrait durer des années. Il ressort très clairement d’Irak, de Libye et de tous les autres cas d’interventions militaires impérialistes que les intérêts de la classe ouvrière et des pauvres ne sont pas pris en compte.
Il n’existe aucun raccourci permettant d’éviter la question de l’encouragement de la construction des forces indépendantes de la classe ouvrière, seules capables d’unir les pauvres et les opprimés qui souffrent de l’activité des forces impérialistes et de leurs alliés semi-féodaux et capitalistes dans la région.
- Non à l’intervention impérialiste ! Pour le retrait de toutes les forces étrangères de Syrie et de la region.
- Contre toutes les oppressions, le peuple doit démocratiquement décider de son destin.
- Pour la construction de comités de défense unifés et non-sectaires afin de défendre les travailleurs, les pauvres et les autres contre les attaques sectaires de n’importe quel camp.
- Pour la construction d’un mouvement de lutte pour un gouvernement de représentants des travailleurs et des pauvres.
- Pour une assemblée constituante révolutionnaire en Syrie.
- Pour l’instauration des droits démocratiques et nationaux des masses, y compris le droit à l’auto-détermination des Kurdes avec, si tel est leur souhait, le droit de disposer de leur propre Etat.
- Pour la construction de syndicats et de partis des travailleurs avec un programme de distribution des terres aux masses et de gestion des entreprises par les travailleurs, dans le cadre d’un programme pour une économie socialiste démocratiquement planifiée.
- Pour une confédération socialiste démocratique du Moyen Orient et d’Afrique du Nord.
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Manning : Le Soir a choisi son camp
‘‘A peine condamné à 35 ans de détention’’ : c’est ainsi que commence le principal article du Soir consacré aujourd’hui à Bradley/Chelsea Manning, qui a dévoilé des preuves concernant les crimes de guerre commis par l’armée américaine. Mais de ces crimes, l’article n’en fait nulle mention, et ce n’est pas le seul problème…
Selon le journaliste, Bradley Manning (qui désire dorénavant être appelé Chelsea et a décidé de changer de sexe) devrait déjà s’estimer heureux de ne pas avoir été condamné à la peine maximum de 135 ans de détention ! Pour le reste, l’article fourmille d’erreurs et d’imprécisions qui – c’est étrange – caressent toutes dans le sens du poil les autorités américaines.
Ainsi, Manning aurait ‘‘exprimé des regrets’’ à l’issue du procès. Cela tendrait à dire que la leçon est comprise et que, si l’occasion se présentait à nouveau, aucune information ne serait divulguée. C’est faux. Dans sa lettre publiée à l’issue de sa condamnation, Manning déclare effectivement : ‘‘Si mes actions ont nui à quelqu’un ou aux Etats-Unis, je le regrette.’’ Mais la suite précise très clairement que Manning ne regrette en rien d’avoir dévoilé les crimes de guerre dont sont coupables les autorités américaines ! On peut ainsi lire dans ce même texte : ‘‘En toute conscience, nous avons choisi de dévaluer le coût de la vie humaine en Irak et en Afghanistan. En combattant ceux que nous percevions comme nos ennemis, nous avons parfois tué des civils innocents. Chaque fois que nous avons tué des civils innocents, au lieu d’en assumer la responsabilité, nous avons décidé de nous retrancher derrière le voile de la sécurité nationale et des informations classifiées afin de ne pas avoir à rendre de comptes publiquement.’’ (Lettre de Bradley Manning à Obama: “Je suis prêt à payer le prix pour vivre dans une société libre”) C’est pour cette raison que Manning a décidé de dévoiler des informations classifiées.
Sortir une phrase de son contexte de cette manière pour lui faire dire son exact contraire, c’est visiblement considéré comme étant du journalisme à la rédaction du Soir.
Dans le reste de ‘‘l’article’’, Manning en est réduit au simple rang d’espion avec un type de comportement qui est ‘‘susceptible de mettre en danger la vie d’agents en opération ou de militaires engagés sur le terrain.’’ De la vie de civils innocents, il n’est par contre absolument pas question. Son cas est comparé à celui d’un militaire belge ayant vendu des informations aux services secrets de l’armée russe en 1989 pour 4 millions de francs belges. Le parallèle est d’ailleurs grassement souligné par le fait qu’Edward Snowden et Julian Assange (de WikiLeaks) sont qualifiés de ‘‘complices et ‘‘clients’’ du soldat Manning’’. Encore une fois, ce ne sont pas des motivations financières qui ont motivés les divulgations de Manning.
Par ailleurs, nous sommes heureux de pouvoir apprendre au ‘‘journaliste’’ du Soir que Snowden n’a rien à voir avec les documents publiés par WikiLeaks… Edward Snowden est un informaticien qui avait travaillé pour la CIA et la NSA et qui a rendu public diverses informations fracassantes concernant les programmes de surveillance de masse des autorités américaines et britanniques.
Le travail de journaliste n’est pas facile aujourd’hui. A la rapidité de circulation de l’information s’ajoutent, comme ailleurs, les compressions de personnel et l’augmentation de la charge de travail. Il est parfois difficile de traiter correctement d’un sujet dans ces conditions, et nous voyons ici ce que cela peut concrètement signifier en termes de qualité de l’information. Il est toutefois bien plus probable que l’orientation scabreuse de cet article scandaleux n’ait rien à voir avec cela et ait été parfaitement volontaire. Si tel est le cas, nous espérons au moins que la rédaction du Soir et le journaliste directement responsable seront invités au prochain cocktail de l’ambassade américaine. Ce serait un minimum pour ‘‘service rendu’’.
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Bradley Manning : 35 ans de prison pour celui qui dénonce les crimes de guerre, le Prix Nobel pour celui qui les commets
Bradley Manning, le soldat américain qui a dévoilé diverses informations internes concernant l’occupation de l’Irak et des crimes de guerre commis par les Etats-Unis, vient d’être condamné à 35 ans d’emprisonnement. Visiblement, cela ne se fait pas de divulguer des crimes de guerre. Par contre, celui qui porte la responsabilité politique de ces crimes, le président Obama, est Prix Nobel de la Paix.
Les documents du soldat Manning dévoilés par le site WikiLeaks ont donné un aperçu de ce que signifie la rage de l’impérialisme américain dans cette prétendue ‘‘guerre contre le terrorisme et pour la démocratie’’. Mettre en lumière la vérité est un acte pour lequel les tribunaux américains ont la main lourde. Cette peine contraste fortement avec le traitement réservé il y a peu à Zimmerman, ce vigile acquitté après avoir tué un jeune noir désarmé, Trayvon Martin (voir notre article à ce sujet)
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> La crise du capitalisme entraîne une augmentation de la violence d’Etat
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Comme George Orwell le disait il y a déjà quelques temps : ‘‘A une époque de supercherie universelle, dire la vérité est un acte révolutionnaire.’’ Cela, Bradley Manning a pu le vérifier : avoir dénoncé ce que son gouvernement est en train de commettre lui a valu 35 ans de prison pour espionnage et vol de documents secrets. Cette sanction est par exemple beaucoup plus élevée que pour avoir torturé des civils innocents en Irak.
Sous l’administration Obama, le gouvernement américain a déclaré la guerre aux dénonciateurs, et travaille actuellement à un programme qui doit permettre d’éviter toute fuite de ce genre à l’avenir. Il n’a également pas hésité à surveiller la vie privée de soldats et de fonctionnaires Une nouvelle règle de travail stipule d’ailleurs clairement que les collègues doivent se surveiller les uns les autres, sous peine de sanction, et faire connaître les problèmes de stress, de divorce ou d’ordre financier. Pour continuer à nous référer à Georges Orwell, on ne peut que penser à ‘‘Big Brother’’ au vu de tels développements.
Lors de son procès, Manning a vu l’accent de l’accusation se porter particulièrement sur sa vie privée, simple écran de fumée pour masquer le véritable objectif du procès : reclarifier que l’impérialisme américain réduit au silence ceux qui se mettent en travers de son chemin. Bradley Manning n’est pas le seul à avoir pu le constater ces derniers temps. Récemment, Edward Snowden a dû fuir pour avoir divulgué que les services de sécurité américains disposaient d’un mécanisme d’écoute et de lecture de mails à grande échelle. Même le journaliste qui a publié les données de Snowden est sous pression. Le compagnon de ce journaliste du Guardian a même été retenu et interrogé 9 heures durant à l’aéroport de Londres dans le cadre des lois anti-terroristes.
Toute l’hypocrisie de l’impérialisme occidental est ici exposée. Obama représente peut-être bien un meilleur emballage que Bush, mais sous la surface se trouve une politique identique, derrière le Prix Nobel de la Paix se trouve un responsable de crimes de guerre, d’interception d’appels téléphoniques et d’e-mails,… Et gare à ceux qui dénoncent cette mascarade ! Bradley Manning, Edward Snowden, le journaliste Glenn Greenwald et son compagnon David Miranda peuvent en témoigner.
Que penser d’un système qui agit aussi durement contre ceux qui dénoncent son fonctionnement ? Nous nous opposons à la persécution dont sont victimes ceux qui font apparaître la vérité. Pour obtenir la libération de Bradley Manning et la fin de telles persécutions, il est nécessaire de construire un rapport de forces, c’est-à-dire de développer un mouvement de masse des travailleurs et des jeunes aux États-Unis et à l’étranger. Nous soutiendrons chaque pas en cette direction.