Your cart is currently empty!
Tag: Gouvernement fédéral
-
Un retour au train-train du marchandage et de la politique antisociale ? Pas question !

Contrairement à ce que De Standaard titrait le 13 août, ce n’est pas la FGTB qui a ‘‘mis sous tension la formation d’un gouvernement fédéral’’. Non, ce sont les nombreuses années de politiques d’austérité – dont l’échec a été durement démontré au cours de la crise sanitaire – ainsi que le début de la vague de licenciements et l’insécurité qui en découle. Le retour à la situation antérieure n’est guère soutenu, le marchandage communautaire s’inscrivant dans le cadre de l’effondrement social. Peu importe les efforts déployés par les sociétés de communication politique ! Le sommet de la FGTB a annoncé qu’il ne fallait pas toucher à la sécurité sociale. Mais pourquoi s’arrêter aux mots ? Qu’attendent les dirigeants syndicaux pour lancer une vaste campagne pour établir un rapport de forces capable de faire respecter les revendications du monde du travail?
Edito de l’édition de septembre de Lutte Socialiste, par Geert Cool
Retour à la case départ pour le PS et la N-VA
Depuis les élections de mai 2019, PS et N-VA ont répété qu’une coopération l’un avec l’autre était exclue. La crise sanitaire et le spectaculaire effondrement économique ont changé la donne et créé une ouverture. En mars, le projet d’un gouvernement d’union nationale est resté lettre morte, puis l’idée tyrannique d’un gouvernement minoritaire avec pouvoirs spéciaux est vite tombée à l’eau. Une fois de plus, l’ouverture n’a pas suffi à mettre en place un gouvernement comprenant le PS et la N-VA.
Plus encore que les libéraux, Bart De Wever (N-VA) se rend compte qu’il est impossible de faire des économies supplémentaires dans les soins de santé dans les circonstances actuelles. La N-VA est prête à relever le niveau de croissance des soins de santé à 2,5 %. Pourtant, avant le déclenchement de la pandémie, le parti défendait que de nouvelles coupes budgétaires ne pouvaient être envisageables qu’au niveau de la sécurité sociale. Préoccupée par la pression du ralentissement économique sur les bénéfices, la N-VA semble disposée à accepter des salaires minimum légèrement plus élevés et une augmentation de la pension minimum. De cette façon, le parti espère relancer la demande et donc l’économie.
Il existe de nombreux obstacles à la formation d’un gouvernement sur base de cette nouvelle position de la N-VA. La N-VA exige une réforme de l’État dans laquelle des pans entiers de la sécurité sociale et des soins seraient régionalisés. C’est inacceptable pour les syndicats et pour de nombreux soignants qui se rendent compte que la régionalisation des soins aux personnes âgées a accéléré le processus pernicieux de commercialisation. En outre, la question demeure de savoir qui paiera en fin de compte les dépenses supplémentaires. Le comité de monitoring prévoit un déficit budgétaire de 12,3 % du PIB cette année. Au premier semestre 2020, les recettes fiscales ont diminué de 10 milliards d’euros : de 57 à 47 milliards. Qui va payer ? Chercher de l’argent chez les riches est tabou dans les milieux de droite flamands et libéraux.
À la mi-août, Magnette et De Wever ont jeté l’éponge, après un communiqué de presse commun des partis libéral et vert qui semblait dévoiler qu’une deuxième bulle émergeait à côté de la ‘‘bulle des cinq’’. Il existe bien sûr un nombre limité d’autres options. Le temps presse : en septembre, les pouvoirs spéciaux expirent et les critiques de l’opinion publique sur la durée de la crise politique se font de plus en plus acerbes. Les négociations sur d’autres options, comme une coalition Vivaldi (sociaux-démocrates, libéraux, verts, sociaux chrétiens), laissent également de nombreux problèmes en suspens, notamment concernant d’éventuelles mesures sociales et leur financement.
Si rien ne réussit, de nouvelles élections seront à l’ordre du jour. Ce serait certainement partir à l’aventure en Flandre avec les partis traditionnels qui déroulent le tapis rouge au Vlaams Belang. Le racisme s’épanouit avec le manque de moyens. A Blankenberge, l’extrême droite n’a pas dénoncé la privatisation de l’espace public et l’absence d’investissements dans les structures de loisirs publics. Non, pointer du doigt les jeunes issus de l’immigration est plus facile et permet d’éloigner l’attention des divisions à sa base concernant les mesures autour du coronavirus. On ne peut pas compter sur les partis traditionnels pour faire face à l’extrême droite. A chaque crise, ils font une surenchère de répression autoritaire et de racisme à peine masqué. Le Vlaams Belang n’a ensuite qu’à donner des centaines de milliers d’euros à Facebook pour s’attirer un énorme flux d’électeurs.
Non, neen !
‘‘Si c’est pour obtenir deux symboles (relèvement des pensions et du salaire minimum), sans savoir comment ils vont être financés, contre une réforme institutionnelle qu’on ne veut pas. Si c’est pour avoir un gouvernement qui n’enclenche pas de profondes réformes à gauche, c’est non.’’ C’est ainsi qu’a réagi le nouveau président de la FGTB Thierry Bodson au sujet de la formation du gouvernement. Peu avant, la FGTB de Charleroi avait pris position contre une nouvelle division de la sécurité sociale.
Dans le contexte d’une vague de licenciements et de défaillance des soins de santé en raison d’années successives d’économies et de la marchandisation de tout le secteur (des centres de soins résidentiels aux hôpitaux en passant par les produits pharmaceutiques), le mouvement ouvrier doit imposer une alternative. Il existe un large soutien en faveur d’un plan massif d’investissements publics dans les services publics (tous les soins devraient devenir un service public), d’un salaire minimum de 14 euros de l’heure, d’une pension de 1.500 euros par mois minimum, du retrait des attaques sur les droits à la retraite et à la préretraite, de la réduction du temps de travail sans perte de salaire et avec embauches compensatoires, de la nationalisation des entreprises qui licencient et du renforcement de la sécurité sociale. Aucun marchandage n’est possible autour de ces exigences. Nous ne les imposerons pas non plus en les quémandant gentiment : il faudra un rapport de forces gagné par la lutte.
En période de récession profonde, il n’est pas exclu que les partis traditionnels fassent des concessions limitées, comme les propositions autour de la pension minimum ou les moyens supplémentaires pour les soins de santé. Les capitalistes n’acceptent cela que pour soutenir l’économie, non pas parce qu’ils se soucient de nos conditions de vie. Dès qu’ils verront une opportunité, ces concessions limitées seront à nouveau menacées. Lors de la précédente grande dépression, dans les années 1930, c’est sur la base des luttes ouvrières que des concessions et des conquêtes sociales importantes ont été imposées. La croissance des luttes ouvrières aux États-Unis a forcé Roosevelt, dans son deuxième New Deal, à introduire des éléments de sécurité sociale. En Belgique, la grève des mineurs de 1932 a imposé une augmentation de salaire de 1%, la grève générale de 1936 a arraché les congés payés pour tous, la semaine de 40 heures et l’introduction d’un salaire minimum fédéral.
Une profonde récession peut initialement avoir un effet paralysant sur la classe ouvrière, surtout si la lutte n’est pas, ou à peine, organisée au niveau syndical et politique. La vague de licenciements qui a commencé, augmente le chômage, en particulier chez les jeunes. Cependant, le mécontentement s’accumule et s’exprimera inévitablement. Le capitalisme échoue sur tous les fronts : il est incapable d’apporter des réponses à la crise sanitaire, à la récession économique ou à la crise écologique. Il est nécessaire de renverser ce système et de construire une société socialiste dont l’axe central sera constitué des besoins des travailleurs et de leur famille. Ces derniers constituent la grande majorité de la population et sont capables de ‘‘prendre d’assaut le ciel’’. Organisons nos forces pour y parvenir et développons le programme nécessaire à cette fin, voilà les tâches qui nous attendent.
-
Vers un gouvernement fédéral sans la N-VA ?
Dans le cadre des négociations menées par l’informateur, Paul Magnette, il n’y a toujours pas de discussion officielle sur une éventuelle coalition. Dans les médias, la discussion est sortie du cadre stérile ‘‘PS et N-VA doivent se retrouver’’. Alors que le choix entre les deux options – violette-jaune ou arc-en-ciel – divise les deux candidats du second tour à la présidence du MR (Bouchez et Ducarme), Mathias De Clercq, Bourgmestre Open-VLD de Gand, défend ouvertement une coalition arc-en-ciel dans une carte blanche du Standaard (8 novembre).Par Anja Deschoemacker
Magnette déclare avec optimisme : ‘‘Un véritable dialogue a commencé’’ (De Standaard, 19/11), faisant état d’un ‘‘consensus croissant’’ dans le domaine de la justice, sur l’augmentation des pensions les plus basses et du taux d’emploi et sur la nécessité de maîtriser le déficit budgétaire croissant.
Le fait qu’il souligne l’importance de la société civile – encore une fois fortement attaquée par le gouvernement flamand – indique clairement qu’il va dans le sens d’un gouvernement sans la N-VA. Un gouvernement arc-en-ciel serait majoritaire au parlement, même si ce n’est qu’avec un seul siège.
Querelles chez les Bleus
Aucun des deux candidats à la présidence du MR n’est issu de l’aile sociale-libérale du parti. Leur duel semble pourtant se dérouler entre une ligne de droite dure (Georges-Louis Bouchez) proche d’une coalition violette-jaune, et une ligne de centre-droit (Denis Ducarme) plus proche de l’arc-en-ciel.
Ainsi, dans une double interview dans Le Soir, Bouchez avançait que les pensions des fonctionnaires devaient être réduites pour augmenter celles des indépendants. Ce à quoi Ducarme répondait que Bouchez menaçait d’isoler le MR avec une telle proposition: ‘‘Sur un sujet aussi sensible (…) il est prématuré de donner des signaux qui seront considérés comme courageux par une série de catégories sociales’’.
Ces discussions ressemblent à celles qui divisent l’Open-VLD entre d’une part ceux qui soutiennent l’appel de De Clercq en faveur de l’arc-en-ciel (le clan Verhofstadt, par exemple) et la droite dure incarnée par des personnalités telles qu’Alexander De Croo et le leader de la fraction parlementaire Egbert Lachaert.CD&V : Quels liens avec le mouvement ouvrier chrétien ?
En novembre, plusieurs personnalités du mouvement ouvrier chrétien flamand (ACW) se sont ouvertement prononcées contre la violette-jaune et contre l’actuel accord de la coalition de droite en Flandre. Ces derniers mois, Luc Van Gorp, Président national de la mutualité chrétienne, et Marc Leemans, Président national de la CSC, ont tous deux fait des déclarations soulignant la distance entre leurs mouvements respectifs et le CD&V.
Dans De Gids (magazine de Beweging.net, l’ACW), Peter Wouters (Président) et Sandra Rosvelds (Cheffe du bureau d’études) déclarent qu’il est ‘‘troublant’’ de voir ‘‘comment dans chaque domaine politique la société civile est mise sous pression’’. Et aussi ‘‘Ceux qui sont critiques, paient la note dans la société civile. Qui plus est, nous craignons que ce ne soit aussi l’intention sous-jacente.’’ Une carte blanche au nom personnel de Renaat Hanssens (Bureau d’études de la CSC) dans De Standaard du 18/11 répond à l’opinion exprimée par Eric Van Rompuy qu’une coalition arc-en-ciel/orange serait ‘‘trop à gauche’’ : ‘‘Lors de la coalition précédente le CD&V a choisi une coalition très à droite (…). Cela a mené à un affrontement quasi permanent avec le syndicat chrétien, à l’aliénation d’une partie importante de la base et à une défaite électorale historique. Et maintenant, le parti opte pour… remettre le couvert’’.
Le 21 novembre, l’hebdomadaire Knack rapportait que des sources au sein du CD&V indiquent que le parti est prêt à abandonner sa résistance à ‘‘l’arc-en-ciel’’. L’extension de l’arc-en-ciel au CD&V ajouterait 12 sièges; le CDH en apporterait 5 autres.
L’avertissement de la Commission européenne est clair : ‘‘l’arc-en-ciel’’ sera aussi un gouvernement d’austérité
L’avertissement que la Belgique a reçu de la Commission européenne dissipe les illusions de tous les gouvernements régionaux – flamand, bruxellois et wallon – qui voudraient considérer certaines dépenses comme ‘‘hors du budget’’. La Belgique ne serait pas éligible à la ‘‘flexibilité des investissements’’ (Le Soir, 21/11), ce qui ‘‘n’encourage pas’’ les efforts de Magnette pour aboutir à un gouvernement de centre-gauche progressiste.
Lutte Socialiste ne s’est jamais fait d’illusions : la description que fait Geert Bourgeois du PS comme un parti avec des ‘‘recettes d’extrême gauche’’ vient d’une autre planète. Le PS n’a pas été le défenseur des revendications de la classe ouvrière depuis des décennies. Plutôt que d’être fondamentalement différent des autres partis traditionnels, il tente de limer les contours les plus tranchants de la politique d’austérité pour planter à travers la gorge du mouvement ouvrier l’exigence de la bourgeoisie belge de démantèlement de l’État-providence.
Au sein des syndicats, les délégués combatifs n’ont pas à déposer les armes, bien au contraire. Si un gouvernement arc-en-ciel/orange est formé, les miettes que le mouvement ouvrier ramasserait d’une part ne serviront qu’à voler des morceaux entiers du gâteau d’autre part. Seules des luttes de masse dans la rue et dans les entreprises peuvent arracher de véritables réformes progressistes et empêcher une nouvelle destruction de l’État-providence – dont il ne reste que peu de choses. Le message est le suivant : Pas d’illusions ! Et préparons-nous à la bataille !
-
Attendre le gouvernement ? Entrons en action ! Pour nos soins de santé, pensions, salaires, notre enseignement,…

‘‘Je ne me sens pas Première ministre d’un pays en crise’’ affirmait la Première ministre par intérim Sophie Wilmes (MR) dans la presse 13 novembre. Après 11 mois de gouvernement en affaires courantes, des élections désastreuses pour la coalition suédoise et un déficit budgétaire parmi les plus élevés d’Europe, il faut vraiment ne pas avoir peur du ridicule ! Pendant ce temps, 16,4% de la population est officiellement pauvre et les conditions de vie et de travail se dégradent. Devons-nous vraiment attendre qu’un nouveau gouvernement austéritaire soit sur pied pour nous mettre en ordre de bataille ?Les résultats élections de juin sont l’expression d’une crise sociale qui s’approfondit : l’ensemble des partis dominants ont été sanctionnés pour leur politique antisociale, quel que soit le niveau de pouvoir où ils gouvernaient. Toutes les possibilités pour un nouveau gouvernement semblent compliquées et comportent des risques pour tous les partis qui y participeront.
Une chose est certaine : se contenter d’attendre signifie de se retrouver démunis quand le prochain gouvernement lancera son offensive antisociale. Car, quelle que soit sa composition, c’est très précisément cela qui nous attend. Voilà le sens de l’avertissement lancé par la Commission européenne à l’État belge le 20 novembre : ‘‘Dépêchez-vous de former un gouvernement, de réduire le déficit budgétaire (1,7% en 2019, 2,3% pour 2020) et d’accélérer le remboursement de la dette publique (100% du PIB)’’. En parallèle à cela, selon le Bureau du plan, le budget de la sécurité sociale aura un déficit de 7 milliards cette année. Où iront-ils chercher cet argent ? Pas dans la poches des milliardaires et du grand patronat.
La lutte paie… mais il faut lutter
L’automne a été marqué par la lutte tenace et combative des ‘‘blouses blanches’’, qui a su arracher un accord représentant 400 millions d’euros sur base annuelle en profitant d’un gouvernement affaibli et en affaires courantes. C’est un exemple à suivre qui, avec l’actuelle atmosphère de révolte globale, peut pousser à passer à l’action dans les autres services publics sous-financés et laissés à l’abandon.
Le secteur culturel flamand peut lui aussi jouer un rôle déclencheur. La culture est étranglée de longue date par l’austérité et le gouvernement Jambon entend réduire de 60% le budget des aides aux projets culturels, soit 6 millions d’économies. La résistance du secteur fut immédiate. Après de premières actions, une ‘‘Semaine de feu d’artifice’’ (‘‘Week van het vuurwerk’’ en néerlandais) a été lancée. Le 5 décembre, une manifestation organisée par le personnel de la VRT sur la place des Martyrs à Bruxelles, devrait servir de point de ralliement à tout le secteur. Il n’y a pas si longtemps, le secteur culturel francophone s’était mobilisé avec succès aux côtés du secteur non-marchand pour rejeter la réforme des points APE du gouvernement MR-CDH.Chez De Lijn, une grève de 10 jours contre l’austérité a été lancée depuis le Brabant flamand pour ensuite s’étendre au reste de la Flandre, avec jusque 80% des travailleurs en grève à certains endroits. L’impact de l’austérité s’approfondit dans de nombreux secteurs comme le rail (avec 3 milliards d’austérité en 5 ans), l’enseignement (14% de coupes en Flandre depuis 2008), la fonction publique, etc. A tous les niveaux, le besoin d’investissements publics, et donc de luttes pour les arracher, est de plus en plus criant.
La coupe est pleine, nous sommes nombreux à le dire. Transformons cette indignation en action concrète ! L’idéal serait de disposer d’un plan d’action coordonné qui défende un budget d’urgence sociale et climatique autour d’investissements publics massifs dans les services publics, le logement social et le climat, avec un salaire minimum à 14 euros de l’heure et une pension minimum de 1.500 euros par mois. Il faut en débattre dès maintenant sur les lieux de travail et dans les délégations syndicales. Cela permettrait de concrétiser la solidarité à apporter aux secteurs déjà en lutte, avec l’envoi de motions de solidarité et la présence de délégations de solidarité aux actions, mais aussi de se tenir prêts à partir au quart de tour dès que les menaces seront plus claires ailleurs.
Ces discussions peuvent aussi porter sur la manière de défendre de manière durable nos conquêtes sociales face à ce système en crise et prédateur, c’est-à-dire sur la nécessité de le renverser. Alors que partout à travers le monde éclate la colère contre les inégalités, la pauvreté des masses et la voracité des riches, préparons-nous à combattre avec audace pour une transformation socialiste démocratique de la société.
-
Préformation : PS et N-VA discutent, mais ne négocient pas

Le gouvernement Michel/De Wever a été sanctionné dans les urnes en raison de sa politique profondément antisociale. Cinq mois après les élections, et bientôt un an après la chute du gouvernement fédéral, un gouvernement fédéral n’est toujours pas constitué. Demotte (PS) et Bourgeois (N-VA) sont peut-être officiellement des ‘‘préformateurs’’ et non des informateurs, il n’y a cependant pas de véritables négociations entre PS et N-VA. ‘‘On n’a pas évolué vers une phase de négociation. (…). Avec les informateurs on a des réunions informelles, où les partis exposent chacun leurs idées, ni plus ni moins’’, a expliqué Paul Magnette, récemment élu président du PS.
Editorial de l’édition de novembre de Lutte Socialiste
Un certain nombre de journalistes et de politologues flamands appellent à la constitution d’une coalition violette-jaune (les libéraux rejoignant les sociaux-démocrates et la N-VA) car ‘‘la seule autre option avec une majorité fédérale (l’arc-en-ciel) n’a pas de majorité en Flandre’’. Sans succès jusqu’ici… Et chaque fois que l’on croit entrevoir une ouverture dans une remarque d’un membre du PS, la direction du parti ferme immanquablement la porte. La nécessité de disposer d’une majorité en Flandre n’impressionne pas beaucoup en Wallonie et à Bruxelles puisque la coalition suédoise ne représentait même pas un quart des voix francophones.
Certains seraient enclins à voir de ‘‘petits jeux politiques’’ derrière tout cela, mais, en réalité, un gouvernement violet-jaune pourrait être mortel pour les deux principales formations en son sein, tant pour le PS que pour la N-VA.
Bien entendu, le PS n’est – malheureusement – même pas à moitié aussi à gauche qu’il le prétend. Le parti applique fidèlement le programme de la bourgeoisie depuis la fin des années ‘80. Toutefois, rejoindre un gouvernement au caractère aussi ouvertement thatchérien que le précédent serait par contre un pont trop loin, surtout maintenant que le PS est concurrencé sur sa gauche.De plus, espérer qu’après avoir abandonné son confédéralisme, la N-VA fasse de même avec son discours et son programme de provocation socio-économique pour donner au PS le masque social dont il a besoin est tout aussi peu probable. C’est pourquoi, après la déclaration de Theo Francken fin septembre – ‘‘un gouvernement avec le PS n’est pas impossible’’ – nous avons également entendu un autre son de cloche chez le député anversois N-VA Peter De Roover : ‘‘si j’avais des actions violettes-jaunes, je les vendrais’’.
Pas d’argents ni d’instrument politique pour un ‘‘compromis à la belge’’
On lit encore des références au ‘‘compromis à la belge’’, essentiellement dans la presse flamande, mais celles-ci font fi de l’histoire et sont idéalistes. Le compromis à la belge qui trouvait toujours une solution pragmatique pour les différentes contradictions – entre travail et capital, Flamands et Wallons, catholiques et laïques – puise son existence dans une période et un contexte spécifiques, en particulier celui de l’après-guerre. Cette période est définitivement révolue.
L’énorme croissance économique de cette période-là fut un premier élément rendant possible ce ‘‘compromis à la belge’’. Le capitalisme pouvait alors combiner profits juteux et augmentation des conditions de vie pour les travailleurs. La classe ouvrière devait toujours lutter pour obliger les capitalistes à améliorer les salaires et la protection sociale, mais en plus de son organisation et de sa volonté d’action à la base, elle avait encore une autre carte en mains : l’existence du ‘‘péril rouge’’ derrière le mur de Berlin. Ces deux éléments sont aujourd’hui derrière nous depuis plusieurs décennies.
Tout d’abord, le compromis à la belge nécessitait, en réalité, d’énormes ressources dans tous les domaines : pour qu’une politique sociale puisse satisfaire la classe ouvrière, pour la coexistence de deux réseaux d’enseignement et de santé subventionnés par l’État, pour le partage du pouvoir au niveau national où chaque investissement en Flandre devait être compensé par un investissement en Wallonie et vice versa.
Ces moyens ne sont plus disponibles depuis un certain temps déjà. Pendant une période, le compromis a encore pu survivre en tant ‘‘qu’équilibre des pertes’’. De win-win, nous sommes passés à une situation de loose-loose, à une histoire faite de démantèlements équilibrés. Les négociations pour un Accord interprofessionnel (AIP) sont ainsi passées de négociations où les secteurs les plus forts tiraient les plus faibles vers le haut, à des négociations où les possibilités des secteurs les plus faibles devenaient la limite à ne pas dépasser pour les secteurs forts. Les réformes de l’État ne répartissent plus les moyens entre les unités régionales, mais bien les efforts d’austérité. Lors du démantèlement progressif de l’enseignement et des soins de santé, les différents réseaux ont été touchés en mesure égale.
Ensuite, la deuxième condition pour le développement du fameux compromis à la belge était l’existence de partis capables de l’incarner. En général, il s’agissait de tous les partis traditionnels, mais surtout de la démocratie chrétienne et de la social-démocratie, et tout particulièrement le CVP et le PS, les partis dominants dans leur zone linguistique respective, disposant par ailleurs de liens étroits avec les syndicats et les réseaux philosophiques. Aux dernières élections, le CD&V et le SP.a ont recueilli un peu plus de 25% des suffrages flamands. Le dernier sondage a encore fait chuter ce pourcentage en dessous des 20%. En Wallonie, la situation est légèrement moins critique : le PS et le CDH obtiennent encore ensemble 37% des voix, réduits à 31,5% dans le dernier sondage. Pour les quatre partis mentionnés ci-dessus, il s’agit des pires résultats obtenus depuis la Seconde Guerre mondiale. Même si on ajoute le troisième parti traditionnel – les libéraux – on n’obtient pas la moitié des voix ni en Flandre ni au niveau fédéral.
Quelles options pour un gouvernement fédéral ?
La violette-jaune ne peut pas être complètement exclue an cas de pression extérieure suffisante : avec une crise économique, des banques à sauver, des coûts sociaux qui augmentent rapidement,… Mais si le gouvernement suédois se querellait sans cesse, un tel gouvernement violet-jaune verrait vite ses différentes composantes en venir aux mains.
Un gouvernement arc-en-ciel pourrait plus facilement inventer une histoire à dormir debout pour faire avaler une poursuite de l’austérité, mais au prix du renforcement des partis nationalistes flamands. Dans ce cas, la bourgeoisie peut espérer que la N-VA se renforcerait à nouveau contre le Vlaams Belang à partir des bancs de l’opposition fédérale.
Si aucune de ces options ne s’avère possible, un gouvernement d’urgence avec un programme limité ne peut être exclu en cas d’urgence majeure. Ce qui est bel et bien exclu, c’est le retour à une politique stable de compromis !
-
Gouvernement fédéral : s’entendre sur l’austérité ne leur épargne pas le casse-tête

Il y a de grandes chances que l’année 2019 entre dans l’histoire comme une autre année où la Belgique n’avait pas de gouvernement fédéral en ordre de marche. Le très impopulaire gouvernement suédois est tombé fin 2018, après quoi l’équipe de Charles Michel a continué en affaires courantes sans la N-VA. Depuis lors, Charles Michel, Didier Reynders et Kris Peeters se sont enfuis à l’Europe. La formation d’un nouveau gouvernement fédéral n’est pas évidente dans ce contexte de discrédit des institutions politiques et avec en perspective une nouvelle récession économique. Les gouvernements régionaux seront eux-aussi soumis à des pressions croissantes.
Par Geert Cool
10 milliards à économiser
Même avec un regard optimiste sur les perspectives économiques, le déficit budgétaire s’élèvera à 7,12 milliards d’euros cette année et à 10,33 milliards l’année prochaine. Le Bureau fédéral du Plan a abaissé les prévisions de croissance pour cette année à 1,1% et prévoit que seulement 37.000 emplois seront créés en 2020, soit près de la moitié des années précédentes. Après des années d’austérité, il est donc question de persévérer. La politique du gouvernement Michel n’a pas abouti aux résultats escomptés. Comment s’étonner que la confiance envers la politique soit en berne ?
Les élections ont sévèrement frappé les partis du gouvernement Michel. La N-VA a tenté de camoufler sa politique antisociale derrière un discours anti-migrants, ce qui a pavé la voie au Vlaams Belang. Quatre mois après les élections, les autres partis traditionnels flamands sont tellement dans les cordes que la N-VA parvient à faire oublier que c’est elle qui a perdu le plus. Le premier sondage post-élection a été désastreux pour le parti, qui a chuté à 22,7% et a dû céder la place au Vlaams Belang.
Si l’extrême droite parvient à marquer des points, c’est essentiellement en raison de l’absence d’une alternative suffisamment crédible. Les partis traditionnels sont aux commandes. Heureusement, il y a eu la percée du PTB, parti désormais représenté dans tous les parlements du pays. Le PTB peut utiliser cette percée pour organiser et renforcer les luttes dans la rue et sur les lieux de travail. Il faut éviter de revivre la situation de cet été, où la N-VA et le VB ont eu le monopole du débat public du côté flamand au point que le quotidien De Standaard a parlé du ‘‘silence de la gauche’’ et de ‘‘l’été de la droite’’.
A quelle austérité s’attendre ?
Avant les élections, le PSL a proposé de construire un rapport de force pour rompre avec le carcan budgétaire qui nous étrangle. Le meilleur moyen d’y parvenir est de mener des campagnes sérieuses autour de revendications offensives (les 14 euros de salaire minimum horaire, les 1.500 euros par mois de pension minimum, les 30 heures de travail par semaine sans perte de salaire et avec un embauche compensatoire, un programme massif d’investissements publics dans les infrastructures et les services publics,…).
Et les accords wallon et bruxellois alors ? A en croire le PS, ils comprennent des propositions progressistes, quand bien même sont-elles prudentes et pas toujours clairement budgétées, comme la gratuité des transports en commun pour les plus de 65 ans et les moins de 25 ans à la STIB et progressivement au TEC, les 70.000 repas scolaires gratuits et les 12.000 nouveaux logements sociaux. Il est question d’investir dans la mobilité et le logement abordable. Si ces mesures sont efficaces, elles seront les bienvenues. Mais c’est encore insuffisant pour inverser l’impact de l’austérité et mettre fin à la pauvreté, à la pénurie de logements et à d’autres problèmes sociaux. A Bruxelles, les revendications du personnel des pouvoirs locaux et régionaux n’ont pas été satisfaites (voir par ailleurs en page 5) en dépit des promesses électorales. Au niveau de la Région wallonne et de la Communauté Wallonie-Bruxelles, Thierry Bodson (FGTB wallonne) fait valoir que les accords de coalition ne reflètent pas la voix des électeurs.
Comment financer tout cela ? Certainement pas en allant chercher l’argent là où il est. Les libéraux ne veulent rien entendre. Les grands projets d’infrastructure devraient être exclus du budget pour bénéficier d’une marge supplémentaire en augmentant la dette. Entre 2014 et 2018, la dette des différentes régions est passée de 50 milliards d’euros à 60,4 milliards d’euros. L’Europe sera invitée à accepter la situation. Si elle refuse, l’argument est tout trouvé pour ne rien faire : la faute à l’Europe ! Pour certaines mesures symboliques, le financement pourrait être supporté par d’autres usagers, en augmentant les tarifs des transports en commun pour permettre la gratuité à certaines couches par exemple. De nombreuses ambiguïtés existent pour permettre d’éviter la mise en œuvre de mesures sociales très timides, mais tout de même très attendues. Parallèlement, les politiques d’austérité dans d’autres domaines ne manqueront pas d’être appliquées.
Flandre : à droite toute ?
Du côté flamand, la N-VA donne le ton. Il n’y aura pas de mesure sociale. Dans l’édition de septembre de Lutte Socialiste, nous avions écrit que la protection sociale allait être progressivement supprimée pour les migrants, mais que les choses n’en resteraient pas là. L’encre de notre journal était à peine sèche qu’était reprise la vielle proposition d’un service communautaire pour les chômeurs. Du travail forcé au lieu du travail salarié, en clair. Ce que nous connaissons déjà du projet du gouvernement flamand donne une idée claire de la direction adoptée : accès plus difficile à la protection sociale et absence totale d’investissement dans la sécurité sociale et les services publics. La pression des bons sondages pour le VB pousse les propositions de la N-VA encore plus à droite, même si le VB a obtenu cette position en se présentant hypocritement comme un adversaire de la politique antisociale.
On peut se demander dans quelle mesure le CD&V, très affaibli, vendra la chose aux affiliés de la CSC. Les chrétiens-démocrates ont été sanctionnés pour leur politique antisociale, contre laquelle la base de la CSC a massivement manifesté. Une fois les élections passées, l’état-major du CD&V s’en est pris aux dirigeants de la CSC qui avaient (pourtant très prudemment) critiqué le parti. Il devient extrêmement compliqué aux dirigeants de la CSC d’expliquer pourquoi encore entretenir des liens avec le CD&V. Dans les sondages, le CD&V n’en finit pas de sombrer et semble suivre la voie du CDH.
Qui va appliquer l’austérité, et avec qui ?
Les informateurs Reynders (MR) et Vande Lanotte (SP.a) attendent que les gouvernements régionaux constituent un gouvernement fédéral. Jusqu’à présent, ils n’ont éliminé de l’équation que la gauche radicale et l’extrême droite. Le CDH a décidé de lui-même d’opter pour l’opposition, tandis qu’Ecolo refuse de négocier avec la N-VA et que Groen ne veut pas rejoindre un gouvernement sans Ecolo. Il reste donc quatre partis flamands et deux partis francophones, avec un parti flamand de plus qui pourrait abandonner. Ce n’est cependant pas en jouant à la chaise musicale en retirant une chaise à l’occasion que l’on parviendra à une équipe stable de survivants.
La possibilité d’un gouvernement sans la N-VA demeure, mais elle est difficile à concrétiser car il n’y aurait pas de majorité du côté flamand. Un gouvernement avec la N-VA et le PS est difficile à vendre pour ces deux partis qui cachent systématiquement leurs propres échecs derrière leur hostilité l’un envers l’autre. La formation des gouvernements régionaux présentent des nuances, mais il est évident que tous ces partis acceptent la logique d’austérité : à la population de se serrer la ceinture pour donner un ‘‘répit’’ supplémentaire aux entreprises. Les plus grandes différences ne concernent que l’enthousiasme et le cadre dans lequel s’inscrit cette acceptation des limites du néolibéralisme. Le discrédit du monde politique accroît l’instabilité et rend le casse-tête encore plus difficile pour le gouvernement fédéral.
Le mouvement ouvrier doit imprimer sa marque sur les événements
Pour la classe dominante, la chose est évidente : qu’importe la composition du gouvernement, la majorité de la population devra trinquer. Résistons ! Après les élections, le mouvement ouvrier a à peine fait entendre sa voix dans le débat, très certainement du côté flamand où les syndicats et la gauche n’ont pas du tout été mentionnés. En conséquence, le débat public portait presque exclusivement sur l’identité flamande, le rejet des migrants et l’extrême droite.
Nous ne pouvons pas blâmer uniquement les médias traditionnels : le mouvement ouvrier a la possibilité de prendre ses propres initiatives par des campagnes et des actions. Il suffit de voir comment, à l’automne 2014, les revendications sociales ont été au centre du débat grâce au plan d’action des syndicats allant crescendo. Il existe un potentiel de campagnes autour d’un salaire minimum plus élevé (Fight for €14), d’augmentations salariales (comme le personnel local bruxellois), de ressources plus importantes (comme dans le secteur des soins) ou d’une pension minimum (comme la pétition lancée par le PTB). Ces campagnes doivent être menées avec la participation la plus large possible dans la rue et sur les lieux de travail afin de convaincre nos collègues, notre famille et nos proches.
Des campagnes combatives et bien constructives peuvent rendre les conversations sur le terrain moins dominées par le racisme et elles peuvent montrer clairement que le VB prétend être social, mais qu’il utilise seulement ce masque pour répandre davantage de divisions. Nous devrons nous battre pour faire respecter nos revendications. Dans le contexte d’une nouvelle récession, nous ne recevrons certainement rien en cadeau. Le PSL joue un rôle actif dans les mouvements de lutte, en défendant la nécessité d’un changement de société : une alternative socialiste contre les inégalités et les problèmes sociaux et écologiques inhérents au capitalisme.