Tag: Gaza

  • Monde et Europe: Une nouvelle période d’instabilité et de révolutions (1)

    Thèses du bureau européen du CIO

    Début avril, des dirigeants du CIO venus d’Europe, mais aussi du Pakistan et d’Israël, se sont rencontrés pour discuter des développements internationaux, et en Europe en particulier. Les thèses suivantes y ont été discutées et amendées après discussion.

    Il y a à peine trois mois que s’est tenu le Congrès Mondial du CIO, et depuis la situation mondiale a radicalement été modifiée par les révolutions au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Puis, il y a eu la double catastrophe naturelle du séisme et de l’immense tsunami au Japon. Ces événements ont servi à renforcer l’impression, créée par la crise économique persistante, d’un monde en chaos. Le danger de la fusion des réacteurs nucléaires – et des répercussions que cela pourrait avoir avec la possibilité de retombées radioactives à la Tchernobyl – a aussi eu pour effet de souligner l’irresponsabilité du capitalisme en ce qui concerne l’environnement. La construction de centrales nucléaires sur des lignes de faille sismiques reconnues, avec la fuite de particules radioactives et les dangers de tout un héritage de déchets nucléaires pour les générations futures, a horrifié le monde.

    La révolution au Moyen-Orient et en Afrique du Nord

    Le CIO avait bel et bien prédit les événements du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord. Dans le dernier document sur les relations mondiales adopté lors du 10ème Congrès du CIO en décembre 2010, nous avions correctement anticipé le fait que le Moyen-Orient était au bord d’une explosion sociale, mettant en avant la possibilité du renversement du régime Moubarak. Nous avions entre autres écrit ceci : ”Un autre “point chaud” pour l’impérialisme est le Moyen-Orient. Il n’y a aucun régime stable dans la région” (paragraphe 54). En particulier, nous avions prédit dans le même document que : ”Bien que le conflit entre les Arabes et les Israéliens est important, ce n’est pas le seul facteur qui doit être pris en considération lorsque nous établissons les perspectives pour cette région. Plus que jamais, la situation économique de ces pays les prépare à de grands mouvements sociaux et politiques. C’est particulièrement le cas pour l’Égypte … des revirements d’une ampleur sismique sont à l’ordre du jour dans ce pays. Le règne de Moubarak, long de 30 ans, approche de sa fin”. (paragraphes 62-63). Ce pronostic a été confirmé par les événements tumultueux qui se déroulent encore en ce moment, et par lesquels la révolution ou l’idée de révolution a bondi d’un pays à l’autre.

    En conséquence de ces mouvements, on a une fois de plus vu venir à l’avant-plan la théorie trotskiste de la Révolution permanente. Toutefois, les idées de Trotsky ne se prêtent pas à une interprétation superficielle et unilatérale de la manière dont le processus de Révolution permanente va se dérouler. Trotsky n’a jamais envisagé un processus linéaire et direct. Les révolutions russes n’ont pas triomphé sans de sérieuses tentatives de contre-révolution. En Tunisie et en Égypte, étant donné la non-préparation des masses et le manque d’organisations indépendantes, couplés au fait que l’appareil sécuritaire militaire du vieux régime n’a pas été complètement démantelé, la contre-révolution allait forcément poser une grave menace à la victoire encore non assurée des masses. L’impact de la révolution était à son tour conditionné au fait que les masses venaient d’émerger de la nuit noire de décennies de dictature, ce qui était également renforcé par le manque de véritables partis ouvriers révolutionnaires, avec des cadres capables de rapidement orienter les masses politiquement. Néanmoins, chaque effort de la contre-révolution n’a fait que provoquer une opposition tenace, et, à chaque fois qu’il semblait hésitant ou endormi, a ressuscité le mouvement de masse contre les restes des vieux régimes et, en Tunisie, a poussé la révolution plus en avant.

    En Égypte, l’occupation du quartier général de la police secrète – après des rumeurs selon lesquelles ses agents tentaient de détruire des fichiers détaillant la torture sous le régime Moubarak et le rôle que l’armée a joué dans celle-ci –, de même qu’un mouvement tout aussi tenace que celui de Tunisie, indiquent qu’une révolution ne peut pas être aussi facilement balayée. Mais l’intervention impérialiste en Libye (la soi-disant “zone d’exclusion aérienne”) fait partie d’une tentative d’intimider les masses révolutionnaires. Elle se fait passer pour un soutien à l’opposition libyenne alors qu’en réalité, elle est partie prenante d’une offensive générale de la réaction dans la région et à l’échelle internationale qui tente de stopper et de compliquer le processus révolutionnaire. Elle est aussi une tentative d’assurance de la part de l’impérialisme occidental afin d’assurer le maintien de son emprise sur les ressources pétrolières de la Libye. Après avoir courtisé Kadhafi, lui avoir fourni des armes, etc., la meilleure manière maintenant, selon les calculs de l’impérialisme, d’accomplir ses objectifs est d’abandonner son ancien “ami” pour s’assurer d’être “du bon côté de l’Histoire” – surtout de l’Histoire économique ! Comme l’ont montré les événements en Égypte, en Tunisie et, plus récemment, au Yémen, ils n’y parviendront pas.

    Le massacre brutal au Yémen n’a servi qu’à renforcer la résolution du mouvement de masse, menant à la plus grande manifestation encore jamais vue contre le régime, et au départ probable de Saleh. La défection du chef du personnel de l’armée, qui est passé au camp de la révolution, a été un moment crucial. Ceci indique que Saleh n’a pas assez de forces sur lesquelles se baser. Mais l’accueil qui a été fait au général par l’opposition yéménite montre la confusion de la conscience – c’est le moins que l’on puisse dire – parmi les rangs de la révolution. Son portrait a été enlevé de la gallerie des méchants contre-révolutionnaires, et replacé parmi les anges !

    L’intervention brutale de l’Arabie saoudite au Bahreïn pour y écraser la révolution est destinée à intimider les masses bahreïnies, de même que les travailleurs et paysans des pays qui ne se sont pas encore engouffrés dans la vague révolutionnaire, afin de les décourager de marcher dans les traces de l’Égypte et de la Tunisie. En interne, dans chaque pays, la contre-révolution attend son heure – forcée maintenant de plier sous le vent révolutionnaire – jusqu’à ce qu’elle puisse utiliser les déceptions engendrés par les résultats de la révolution afin de contre-attaquer. Le référendum sur les amendements constitutionnels des généraux venait seulement d’être terminé en Égypte, que l’armée a annoncé son intention de restreindre et de bannir les manifestations et les grèves. Néanmoins, la tendance dans la prochaine période sera à un approfondissement de la révolution mais, bien sûr, les perspectives varient d’un pays à l’autre.

    De plus, il ne faut pas exclure une nouvelle guerre au Moyen-Orient. Le déclenchement d’une telle guerre pourrait provenir de la recrudescence de violence entre Palestiniens et Israéliens, avec l’attentat qui a fait sauter un bus à Jérusalem et l’accroissement du conflit à et autour de Gaza. Si une telle guerre survenait, et en particulier si elle venait à se développer en un conflit majeur, elle pourrait impliquer les États arabes ; l’armée égyptienne, par exemple, qui n’est plus maintenant tenue en laisse par le régime servile pro-USA et pro-Israël de Moubarak. Dans la nouvelle situation, la pression de la part des masses arabes pour défendre les Palestiniens sera intense. Ceci sera encore plus le cas si des mouvements de masse comme celui du 15 mars en Cisjordanie continuent à se développer.

    Au moment où ce document était en préparation, la Libye se tenait dans l’œil du cyclone. Pour toutes les raisons que nous avons expliquées – dans les articles sur notre site – la situation en Libye est bien plus compliquée que les processus en Égypte et en Tunisie, étant donné le caractère particulier du régime Kadhafi. Il ne fait aucun doute que le régime Kadhafi est couvert de sang. L’insurrection de Benghazi a tout d’abord vaincu les troupes de Kadhafi – dirigées par ses fils – qui ont alors fui pour se mettre à l’abri à Tripoli. Des comités populaires ont commencé à prendre forme, mais ont malheureusement été dominés – et ceci a été renforcé depuis – par des forces bourgeoises et petites-bourgeoises, dont d’anciens ministres du régime Kadhafi. Notre revidencation qui demandait que ces comités soient fermement ancrés parmi les masses, avec une pleine démocratie ouvrière, et sur base d’un programme clair, aurait pu mener, si nécessaire, à la formation d’une armée révolutionnaire. Celle-ci aurait pu se développer de la même manière que les colonnes de Durutti après l’insurrection contre les fascistes à Barcelone au début de la Guerre civile espagnole en juillet 1936. La simple annonce d’une telle force aurait pu en soi avoir été l’étincelle qui aurait mené à une insurrection victorieuse contre Kadhafi à Tripoli.

    Le caractère tribal de la Libye – renforcé par des divisions régionales, en particulier entre l’Ouest et l’Est – a permis à Kadhafi d’obtenir une certaine marge de manœuvre. Le fait de brandir le drapeau royaliste – le roi Idris provenait de Benghazi et était à la tête de la “tribu” Senoussi qui regroupe un tiers des Libyens – a permis au régime de Kadhafi de dépeindre Benghazi comme étant la base des forces contre-révolutionnaires qui souhaitent renverser le cours de l’Histoire. Cette impression a été renforcée par la décision des dirigeants du mouvement de Benghazi de faire appel à l’assistance de l’impérialisme – avec leur “zone d’exclusion aérienne”. Ceci représentait une volte-face par rapport à la position précédente à Benghazi, qui s’opposait à l’intervention impérialiste en disant : ”Les Libyens peuvent le faire eux-mêmes”.

    Il est difficile de définir exactement de quelle manière la situation va se résoudre. Le soutien pour la zone d’exclusion aérienne va se désintégrer si les résultats ne mènent pas à un renversement rapide de Kadhafi. L’opinion publique aux États-Unis – où il y a une massive majorité de deux tiers en faveur d’un retrait d’Afghanistan – est opposée à toute campagne terrestre. Les forces US et françaises sont incapables d’entamer une offensive au sol efficace. Qui plus est, l’opinion publique, qui semblait initialement en faveur du bombardement de Kadhafi, pourrait se renverser en son contraire si le nombre de pertes venait à s’accroitre. Les États-Unis et le Royaume-Uni sont déjà débordés par le bourbier afghan. En outre, le soutien pour des mesures militaires au Royaume-Uni est extrêmement ténu, avec une crainte largement répandue – y compris parmi la bourgeoisie – que l’action soit limitée et se mue petit à petit en un engagement militaire prolongé.

    L’impérialisme – associé aux forces de Benghazi – espère qu’une pression militaire suffisante mènera à une répétition de ce qui s’est passé au Yémen, avec la défection des généraux de Kadhafi. D’un autre côté, un blocage sur le plan militaire pourrait survenir, et on assisterait à une partition de la Libye dans les faits. Ceci mènerait probablement à des campagnes militaires ou terroristes contre les principales puissances impérialistes qui se sont engagées contre le régime de Kadhafi. Il est fortement improbable que les forces des grands pays arabes – comme l’Égypte – puissent être utilisées pour renverser Kadhafi, étant donné la nature instable et suspicieuse de l’opinion publique dans le monde arabe en ce qui concerne les interventions extérieures dans la région. Même Amr Moussa – le chef de la Ligue arabe – qui a tout d’abord soutenu la zone d’exclusion aérienne, a été forcé de faire marche arrière lorsque, comme c’était inévitable, des civils ont été tués et blessés par les frappes aériennes britanniques, américaines et françaises. En fait, les grandes puissances impérialistes sont déjà divisées – malgré la résolution des Nations-Unies qui a sanctionné leur action – et ces divisions vont s’accroitre si cette guerre venait à se prolonger et à s’intensifier.

    L’Égypte est une arène cruciale où pourrait se décider la bataille épique entre les forces de la révolution et de la contre-révolution. Les chefs de l’armée, en collusion avec l’establishment politique, les Frères musulmans et les restes du NDP (le parti de Moubarak) ont organisé un référendum visant à supprimer certaines des lois répressives du régime Moubarak et à poser la base pour des élections dans les six mois. Les éléments les plus conscients de l’opposition à l’armée ont appelé à un boycott. Mais l’appel au boycott a eu un certain effet ; il n’y a eu que 41% de participation. Toutefois, l’opposition n’a pas eu assez de succès pour faire échouer le référendum ; 77% de ceux qui ont voté se sont déclarés en faveur des amendements. Notre revendication en faveur d’une véritable assemblée constituante révolutionnaire garde donc toute sa force. Ce qui est crucial par contre est la tâche urgente de construire les forces ouvrières indépendantes, en particulier les syndicats, et de poser la base pour un nouveau parti des travailleurs de masse. L’impérialisme – via les dirigeants syndicaux de droite en Europe et aux États-Unis – intervient comme il l’a fait lors de la révolution portugaise afin de dévoyer les nouveaux syndicats dans une direction pro-capitaliste. Au Portugal, ils ont utilisé les dirigeants syndicaux allemands, alliés au SPD, pour construire le Parti socialiste de Mario Soares et son syndicat affilié, l’UGT, pour contribuer à faire dérailler la révolution.

    En Tunisie, ce sont les mêmes tâches fondamentales qui se posent, mais bien entendu la situation n’est pas identique à celle de l’Égypte. La Tunisie a une certaine histoire d’opposition organisée clandestinement contre Ben Ali, rassemblée en particulier autour des syndicats. Il faut ajouter à cela une conscience culturelle et politique relativement élevée, ce qui veut dire que les masses sont bien conscientes que la révolution a été faite par leurs sacrifices, mais qu’elles n’en ont pas encore récolté les fruits. Néanmoins, ce mouvement de la base est parvenu à renverser toute une série de gouvernements. Nos camarades, en Égypte comme en Tunisie, ont accompli des efforts héroïques afin d’atteindre les forces les plus conscientes et de chercher à les attirer à la bannière du CIO. Ce travail doit continuer au cours de la prochaine période.

    Nous pouvons nous attendre à de nouveaux mouvements qui vont affecter quasiment chaque pays de la région. En plus de l’Égypte, de la Tunisie, de la Libye et du Bahreïn, les régimes de Syrie, des États du Golfe – malgré les pots-de-vin massifs octroyés par la monarchie saoudie –, d’Iraq et même d’Iran seront affectés. Il n’y a aucun retour possible ; il est impossible de réétablir les vieux régimes sur les mêmes bases qu’auparavant. Il y a une réelle soif d’idées, et une demande insistante pour des droits démocratiques partout, de même qu’une haine viscérale des régimes despotiques et dictatoriaux. Du côté de la classe ouvrière, il y a une tentative de créer des organisations indépendantes à la fois sur le plan syndical et politique. Pris tout ensemble, ceci revient à une situation favorable pour les idées du marxisme authentique et du trotskisme. Ce ne sera pas facile, étant donné les idéologies rivales du marxisme contre lesquelles nous nous voyons forcés de lutter. Mais pour la première fois, peut-être, depuis la faillite des partis communistes/staliniens à cause de leurs théories “en stades” erronnées, le terrain n’a jamais été aussi fertile pour la croissance des idées marxistes et trotskistes. De même, la situation économique et sociale générale – largement dominée par le scénario économique mondial et par son impact dans la région – signifie qu’il ne peut y avoir aucune réelle stabilité. Après tout, ç’a été la détérioration de la situation économique, manifestée par le chômage en progression constante et en particulier chez les jeunes, qui a été le facteur déclenchant des insurrections en Tunisie et en Égypte, et de tout ce qui a suivi. Ceci souligne l’importance cruciale d’avoir des perspectives économiques, comme le CIO l’a toujours mis en avant. Cependant, si la classe ouvrière ne devait pas parvenir à imposer sa marque sur la situation – via ses propres organisations indépendantes – ce serait alors l’islam politique de droite, largement marginalisé jusqu’ici, qui pourrait croitre à nouveau. Les conflits en Égypte entre coptes et musulmans (délibérément encouragés par l’armée) en sont un avertissement, tout comme les efforts délibérés de divisions entre chiites et sunnites au Bahreïn

    L’économie mondiale

    Le Moyen-Orient exerce également une énorme influence sur l’économie mondiale, en particulier à travers la matière première cruciale qu’est le pétrole. Et les remous colossaux dans la région ont exercé des pressions à la hausse sur le prix du pétrole, qui va maintenant probablement atteindre des records fumants étant donné les complications militaires en Libye, pays producteur de pétrole. En conséquence de cela, la “reprise” économique mondiale vacillante va sans doute être stoppée, si pas repartir en chute libre. L’envolée actuelle des prix du pétrole est la cinquième hausse de cette ampleur depuis 1973, et à chacune de ces hausses, le résultat a été une récession. Certains experts s’attendent à ce que le prix du pétrole brut atteigne les 160$/barril, d’autres s’attendent à plus encore. Un résultat inattendu de tout ceci est le bénéfice qu’en retirent les États producteurs de pétrole : ainsi, chaque hausse de 10$ du prix du barril gonfle le revenu de la Russie de 20 milliards de dollars supplémentaires ; l’Iran et le Venezuela, de même que les pays arabes, vont eux aussi en tirer parti. Certains ont été capables d’utiliser ceci – comme c’est le cas pour l’Arabie saoudite – pour racheter, ou du moins tenter de racheter, l’opposition interne croissante. Le chœur d’analystes capitalistes qui proclamaient que le capitalisme était en passe de complètement se remettre de la crise et parlaient déjà un peu plus tôt dans l’année de “sommets économiques ensoleillés” s’est complètement fourvoyé.

    Des prétentions similaires avaient été faites en 2005, comme quoi le boom continuerait à jamais. Il est vrai que l’index boursier au Royaume-Uni a passé la barre des 6040 points au tournant de l’année. Cependant, suivre cette logique revient à dire que le meilleur endroit où investir aujourd’hui serait la Mongolie ou le Sri Lanka ! Même cette prétention a été sapée par les inondations dévastatrices au Sri Lanka, où un million de gens ont été affectés et 20% de la production de riz détruite.

    Le tourniquet des marchés boursiers mondiaux – ce casino géant – n’ont que peu d’intérêt aujourd’hui pour mesurer la santé économique, ni les perspectives de croissance réelle dans le futur. Ce qui a plus d’intérêt, est l’aveu de l’analyste et historien “libéral” pro-capitaliste Simon Schama : ”Les vies de millions de gens dans notre Amérique hamburguerée ne passent que via les banques et les chèques alimentaires. Soixante-dix pourcent de la population a un ami proche ou un membre de la famille qui a perdu son travail. Nous vivons toujours dans l’Amérique en 3D : désolation, dévastation, destitution”. Et nous parlons ici du moteur du capitalisme mondial !

    La Chine

    La Chine et l’Asie, cependant, semblent toujours aller de l’avant, propulsées par l’immense plan de relance en Chine, dont l’ampleur et les effets avaient été prédits par le CIO. Le plan de relance chinois a permis de tirer de nombreux pays vers le haut, avec un certain effet en Europe. Dans le monde néocolonial, certains pays connaissent un boom des matières premières et, dans une certaine mesure, un marché accru pour leurs exportations. Toutefois, le revers de la croissance chinoise est l’accumulation de bulles à une échelle massive, qui pourrait bien mettre un terme brutal à la croissance chinoise, bien plus vite que ne se l’imaginent les économistes capitalistes. L’ampleur du secteur immobilier en surchauffe se reflète dans les effets dévastateurs sur les habitants des villes, en particulier dans des endroits tels que Pékin. L’inflation est toujours un enjeu extrêmement sensible pour l’État chinois, à cause du rôle historique qu’elle a joué dans la révolution chinoise qui a mené au renversement du Guomindang à la fin des années ’40 et qui a amené Mao au pouvoir. En janvier, l’inflation a atteint le record de 5,1%, ce qui a suscité un grand ”mécontentement par rapport aux hausses de prix qui ont atteint leur niveau le plus élevé depuis le début des statistiques en 1999”, selon un récent sondage de la Banque centrale.

    Ce que cela signifie pour les millions de Chinois qui espéraient en vain pouvoir gravir les échelons de la propriété est montré par les estimations qui indiquent ”combien de temps les citoyens devraient travailler pour pouvoir se payer un appartement de 100m² dans le centre de Pékin, qui vaut en ce moment environ 3 millions de renminbi (450 000$). En supposant qu’il n’y ait aucune catastrophe naturelle, un paysan travaillant un lopin de terre moyen ne pourrait s’offrir un appartement que s’il avait commencé à travailler sous la dynastie Tang (qui s’est terminée en l’an 907) ! Un ouvrier chinois qui aurait gagné un salaire mensuel de 1500 renminbi depuis les guerres de l’opium de la moitié du 19ème siècle et aurait travaillé tous les jours depuis et même les week-ends, disposerait alors maintenant de tout juste de quoi se payer son propre logement aujourd’hui.”

    Au même moment, la croissance économique colossale et incontrôlée de la Chine inflige chaque année pour plus de 1000 milliards de yuan (105 milliards d’euro) en dégâts environnementaux, selon les planificateurs du gouvernement. Le cout des déchets, des fuites, de la détérioration du sol et autres impacts a atteint les 1,3 milliards de yuan en 2008 (140 milliards d’euro). C’est l’équivalent de 3,9% du PIB du pays. La perte du sol et de l’eau ”pose de graves menaces à l’écologie, à la sécurité alimentaire et au contrôle des inondations”, a ainsi déclaré le vice-ministre chinois responsable des ressources en eaux. Les réservoirs sont incapables de satisfaire aux demandes d’une population croissante et de plus en plus développée. Pékin dépend déjà de nappes aquifères non-renouvelables pour pallier au déficit en eau de la ville qui s’accumule. Ce dernier pourrait mener à des contrôles dans la consommation de l’eau, surtout pour les gros utilisateurs tels que les usines. D’un point de vue économique, le développement pêlemêle de la Chine sur une base capitaliste n’est pas vivable, et ceci est encore plus évident dès lors que l’on parle d’environnement.

    La radicalisation aux États-Unis

    En ce qui concerne les États-Unis, ceux-ci laissent filer un déficit budgétaire béant (à tous les niveaux de gouvernement) qui promet un naufrage fiscal. À un moment l’an passé, la vente de bons du Trésor, nécessaire pour le financement continu du déficit, n’a obtenu qu’un faible résultat et a amené la menace d’une crise dans les finances du gouvernement. Toutefois, avec tous ces capitalistes qui possèdent des surplus massifs d’argent sans avoir un seul débouché où l’investir de manière productive – ce qui est en soi une expression de la crise organique du capitalisme – la vente de bons suivantes a, elle, été bien accueillie. L’administration Obama est confrontée à la perspective délicate de devoir chercher à réduire le déficit, ce qui aura un grave impact sur le niveau de vie. Si cette réduction se concentre sur l’armée – ce qu’espère la droite républicaine – cela aggravera énormément la situation sociale et mènera à une grande radicalisation.

    Les événements spectaculaires au Wisconsin mettent en valeur ce qu’il se passe lorsque la droite républicaine se lâche contre la classe ouvrière américaine, qui semblait endormie et passive. Enhardi par le succès du Tea Party lors des élections de mi-mandat pour le Congrès, le gouverneur républicain du Wisconsin a lancé une offensive déclarée sur les droits de négociations des syndicats et sur les conditions des travailleurs. C’est ce qui a provoqué un soulèvement de la classe ouvrière sans précédent aux États-Unis depuis des décennies. L’ironie étant qu’il y a beaucoup de travailleurs qui avaient voté pour les candidats du Tea Party et qui sont devenus eux-mêmes victimes de ces attaques, et ont donc rejoint le mouvement d’opposition. Les travailleurs ont soulevé l’exemple de la révolution égyptienne ! Ils ont eu recours à des arrêts de travail spontanés et ont appelé à la grève générale. Des travailleurs d’autres Etats, comme en Indiana et en Ohio, ont suivi le Wisconsin ; ils ont eux aussi subi les mêmes attaques de la part de gouverneurs républicains inflexibles.

    Tel un coup de tonnerre, le Wisconsin a réveillé le géant endormi de la classe ouvrière américaine, et a ouvert la voie à une opportunité très favorable pour notre section américaine. La question de savoir si cela va ou non mener à un revirement à gauche durable dépend, comme ailleurs, de la création d’un pôle d’attraction à gauche sous la forme d’un nouveau parti ou d’une nouvelle formation politique. La majorité des dirigeants syndicaux tente désespérément de diriger ce mouvement vers un soutien aux Démocrates, bien que parfois seulement en tant que “moindre mal”. C’est la même chose qui se passe en Europe avec nos dirigeants syndicaux qui ont peur et qui sont incapables de mener une lutte industrielle victorieuse contre les programmes d’austérité de la bourgeoisie. Ils cherchent à faire dévier le mouvement sur le plan électoral en renforçant le soutien à la social-démocratie. D’un autre côté, le fait d’attaquer l’énorme budget de la “défense” susciterait encore plus de critiques sur Obama et son administration de la part des Républicains de droite – menés par le Tea Party. Jusqu’à présent, il a fait face à cette offensive de droite par des pas en arrière et des concessions, par exemple sur la taxation des riches. Cette attitude pourrait encourager la droite à forcer Obama à faire encore plus de concessions. D’un autre côté, les attaques sur la classe ouvrière par les Républicains de droite amènent un soutien de “moindre mal” en faveur d’Obama pour les prochaines élections présidentielles en 2012. Il sera maintenant probablement réélu.

    L’Europe et l’économie mondiale

    En Europe, l’effondrement économique de l’Irlande menace de se propager au Portugal et même à l’Espagne, qui selon certains économistes capitalistes est la quatrième plus grande économie d’Europe et “est trop grosse pour être sauvée”. Même l’Italie et le Royaume-Uni ne sont pas totalement immunisés des effets de la crise bancaire européenne – parce que c’est bien d’une telle crise qu’il s’agit – qui a été déclenchée par les événements en Irlande. Le renflouement des banques irlandaises est un signe que c’est maintenant une question, comme l’a dit Samuel Johnson, de “tenir ensemble, ou tenir séparés”. Malgré tout, l’Irlande va sans doute faire défaut sur sa dette – ou la “reporter”, comme on dit dans le langage plus diplomatique des économistes capitalistes – en dépit de tous les efforts des États membres de l’UE et de leurs différents gouvernements nationaux pour renflouer le pays. Le Chancelier de l’Échiquier britannique Osborne a trouvé 7 milliards de livres sterling pour aider l’Irlande – en réalité, pour sauver les banques britanniques qui seraient affectées par un effondrement de l’économie irlandaise – en tant que “bon voisin”. Et pourtant, on ne peut pas dire de lui qu’il agit en “bon Samaritain” pour les pauvres et pour les travailleurs du Royaume-Uni, vu qu’il cherche à leur imposer le plus grand plan d’austérité depuis 80 ans.

    Surtout basée sur les développements de l’économie chinoise, la machinerie et les consructeurs automobiles allemands ont pu rapidement se remettre de la première vague de la crise. Utilisant sa force compétitive, le capitalisme allemand semble être le grand vainqueur de la crise. Mais cette reprise se développe sur une base faible et sera remise en question dans un futur pas si lointain. Malgré cette faiblesse sous-jacente, cela a donné au capitalisme allemand une marge économique qui lui a permis de contribuer à éviter un effondrement économique complet en Europe et aussi – bien que de manière réticente et hésitante – de faire quelques concessions pour sauver l’euro jusqu’ici. Cela n’était pas assez pour sauver l’économie européenne ou pour démarrer un nouveau boom ; cependant, cela aura un impact décisif si de futures éruptions économiques en Allemagne venaient à frapper les développements européens.

    Les destins entrelacés de toutes les économies d’Europe à travers la crise de la dette souveraine montre comment des développements cruciaux à l’échelle internationale façonnent les événements à l’échelle nationale, parfois de manière décisive. L’hypothèse sous-jacente du gouvernement ConDem au Royaume-Uni est que, malgré la brutalité des coupes, au final “Tout sera bien qui finira bien”. Les événements devraient selon eux aller dans leur sens, à cause de l’“inévitable” rebond de l’économie. Le cycle économique “normal” devrait se réaffirmer, disent-ils, une crise étant toujours suivie d’un boom, et ainsi le carrousel continue. Ces espoirs seront anéantis par la marche des événements. Car nous n’avons pas affare ici à un cycle similaire à celui des années 1950 à 75, ni à la phase de croissance plus faible des années ‘2000. Cette crise est totalement inhabituelle de par son caractère, sa profondeur et sa gravité, à la fois pour les dirigeants actuels et pour leurs “administrés”.

    Au mieux, l’économie mondiale va continuer à boitiller de l’avant ; elle ne va pas immédiatement reprendre son niveau d’avant la crise de 2008. Ceci signifie que sur le long terme, le chômage endémique tendra à se consolider, bien qu’avec des hauts et des bas. Des millions de travailleurs ne pourront jamais être réintégrés dans l’industrie. Là où ils trouveront un travail, ce travail sera précaire, temporaire, à l’image de ce que l’on appelle aux États-Unis un job “de survie”. Les travailleurs les prendront dans l’espoir vain de pouvoir de nouveau se hisser à la position qu’ils avaient dans le passé. Mais pendant toute la période prévisible devant nous, l’époque des emplois à plein temps, d’un niveau de vie croissant ou même stagnant est terminée pour la majorité de la population.

    La consommation joue un rôle crucial pour soutenir l’économie capitaliste moderne, en particulier dans les économies les plus avancées. Aux États-Unis pendant le 19ème siècle, près de 20% de l’économie provenait de la consommation. Aujourd’hui, aux États-Unis, celle-ci compte pour 70% du produit total. En Chine, d’un autre côté, la consommation vaut aujourd’hui 38% du PIB – ce qui est relativement beaucoup moins que les 50% sous le régime stalinien de Mao. Toutefois, les programmes d’austérité qui sont devenus la principale politique économique de la majorité des gouvernements bourgeois a pour effet de déprimer l’économie, précisément à cause du rôle crucial que jouent les consommateurs. Et ceci n’est pas compensé par la redirection de l’investissement – du surplus social – dans l’industrie productive, comme c’était la norme dans le passé. La politique dévastatrice de la financialisation du capitalisme mondial est enracinée dans le manque de débouchés profitables pour le capital, essentiellement à partir de la fin des années ’70. C’est quelque chose que le CIO a toujours mis en avant, encore et encore, dans son matériel écrit – une position presque unique parmi les marxistes.

    Les investissements colossaux de capitaux fictifs – via le système de crédits – ont jeté la base pour les bulles qui ont maintenant éclaté. Mais le capitalisme, pris dans son ensemble et à une échelle mondiale, n’a rien appris de cela, et n’applique maintenant aucune nouvelle politique ni dans le vieux continent européen ni aux États-Unis. En fait, nous avons vu une répétition de la même politique que celle des années ‘2000, qui ne fait en réalité que gonfler de nouvelles bulles, même alors que le système lutte déjà pour se libérer des immenses conséquences de sa politique précédente, du surplus de dette. Par conséquent, les investissements dans l’industrie – qui est la réelle force pour créer de la valeur – sont à la traine. En fait, les investissements ont en réalité chuté en termes réels dans l’industrie de transformation. Le Royaume-Uni, par exemple, est passé d’une des nations les plus industrialisées du monde au 19ème siècle, à la cinquième position aujourd’hui. Selon le ministre des finances brésilien, sa nation a dépassé le Royaume-Uni et est devenue la cinquième plus grande économie mondiale, surtout après la croissance de 7,5% en 2010, son plus haut taux depuis 1986.

    La reprise sur les marchés boursiers a été acclamée comme étant le précurseur de la croissance économique, ce qui est complètement faux. En fait, les “experts” en comportement des marchés boursiers sont historiquement du côté des “ours” – des pessimistes qui s’attendent à une Apocalypse financière. Une personne a récemment commenté dans le Guardian britannique que : ”Lorsque les marchés entrent une nouvelle phase de folie, moi je reste là à me gratter la tête d’étonnement. L’idée comme quoi nous sommes revenus à une reprise économique durable est aussi grotesque qu’elle l’était en 2005-07. Mais les investisseurs sont de retour sur la piste de danse, pirouettant droit vers la prochaine et inévitable implosion, au sujet de laquelle ils affirmeront une fois de plus par après qu’elle était imprévisible !”

    Le capitalisme moderne semble incapable d’absorber le “surplus de travail” – un euphémisme pour “chômage de masse” – créé par la suraccumulation reflétée par la crise, à moins de pouvoir obtenir un taux de croissance soutenu d’au moins 3%, et même ainsi, à un taux combiné. Pourtant, même les plus optimistes des économistes bourgeois ne se font aucune illusion sur le fait que le capitalisme – même dans les économies qui semblent être dans une position favorable, comme l’Allemagne par exemple – sera capable d’atteindre un tel taux de croissance dans le futur prévisible. Axel Weber, le président sortant et complètement discrédité de la Bundesbank, disait à Londres récemment que l’Allemagne ne reviendrait pas d’ici la fin de 2011 à un niveau d’avant la crise. ”Il ne s’agit pas d’une success story, mais bien de trois années perdues”. Il a ensuite ajouté pour la forme que : ”La tendance de croissance sur le long terme pour l’économie allemande est de 1%. Nous n’avons pas affaire à un moteur dynamique pour l’économie européenne”.

    Le chômage

    La production de l’économie mondiale est revenue au niveau de 1989 ! Le FMI estime qu’en 2008, l’économie mondiale a perdu la somme colossale de 50 trillions de dollars en actifs dévalués et en termes de perte de production, une somme équivalant à la production totale de biens et services du monde entier pendant une année. La crise a laissé un immense legs débilitant que le capitalisme aura du mal à surmonter, si jamais il y parvient entièrement. La politique quasi-keynésienne d’Obama – avec ses divers plans de relance – a complètement échoué à endiguer le chômage, qui se tient officiellement à 9% de la force de travail (mais est dans les faits sans doute à deux fois ce niveau), et est restée à ce niveau depuis les 20 derniers mois sans discontinuer. Quarante-sept états sur cinquante ont même perdu des emplois depuis les plans de relance d’Obama.

    Il y a dans le monde officiellement plus de 200 millions de gens au chômage, dont 78 millions ont moins de 24 ans. Et ceci est sans doute une énorme sous-évaluation, parce que ces chiffres ne tiennent pas compte du sous-emploi, des emplois partiels, etc. Selon l’Organisation internationale du travail, 1,5 milliards de gens sont en situation d’emploi précaire. En outre, la population mondiale va sans doute s’accroitre d’encore 2 milliards de personnes au cours des 40 prochaines années. En Europe, le chômage des jeunes se trouve en moyenne à 20,2% dans 17 pays de la zone euro, alors qu’il était à 14-15% il y a trois ans. Le chômage des jeunes est monté au niveau effarant de 35% en Grèce et même de 40% en Espagne !

    Étant donné qu’il n’y a que très peu de soutien étatique pour les chômeurs dans ces pays – qui sont alors forcés de compter sur le soutien de leurs famille et amis – il est étonnant que nous n’ayons pas encore aperçu d’expression réelle de l’encore plus grand mécontentement que ces chiffres garantissent. Il est vrai que nous avons vu de grandes et furieuses grèves générales, mais étant donné la condition de la classe ouvrière, surtout dans le sud de l’Europe, nous pouvons nous attendre au cours de la prochaine période à des mouvements de protestation ouvrière qui pourraient déborder les limites de la société “officielle”. Déjà en Grèce, nous voyons que les masses, par pur désespoir – très souvent convaincues qu’elles n’ont aucune chance de succès – se sont néanmoins jetées dans la bataille, comme avec les travailleurs des bus d’Athènes, qui insistaient pour continuer leur lutte contre l’avis de leur direction syndicale, malgré le fait que le décret contre lequel ils se battaient avait déjà été mis en application ; ou avec les 2500 travailleurs (temporaires) de la Ville d’Athènes, qui ont occupé la salle du Conseil communal pour empêcher le nouveau maire PASOK de les licencier afin d’engager de nouveaux travailleurs intérimaires avec encore moins de salaire et encore moins de droits. Ce genre d’actions risque de devenir contagieuse – et pas seulement en Grèce – pour d’autres travailleurs qui vont chercher à les imiter, de même que pour les étudiants qui vont une fois de plus entrer en conflit avec le gouvernement ou avec les autorités éducationnelles.

    Mais la conscience politique est toujours en retard, et parfois de manière chronique, par rapport à la situation économique objective. Le krach de Wall Street en 1929 a stupéfait la classe ouvrière américaine, et il a fallu au moins quelques années pour qu’elle puisse rallier ses forces et résister à l’offensive du capitalisme. Un mouvement offensif n’a réellement commencé, comme nous l’avons fait remarquer à maintes reprises, qu’au moment du début du boom à partir de 1934. Il est hautement improbable, surtout à un niveau global, qu’une telle croissance survienne, au moins dans les pays industriels avancés. Comme le Brésil l’a démontré, il est possible qu’un certain niveau de croissance se réalise dans certains pays et certaines régions, même au beau milieu d’une récession mondiale générale. Il y a une raison spécifique dans le cas du Brésil, comme dans d’autres pays ; cette croissance s’est effectuée portée par la croissance chinoise, la Chine cherchant à mettre la main sur des ressources naturelles afin de maintenir son industrie en état de marche.

  • [DOSSIER] Protestations massives au Moyen-Orient et en Afrique du Nord: Quelles perspectives pour la révolution en Egypte?

    A la suite des évènements révolutionnaires de Tunisie, les masses égyptiennes ont occupé les rues 18 jours durant. Après le départ de Ben Ali et de Moubarak, les régimes autoritaires de la région craignent pour leur survie. Pourtant, en Egypte, il ne s’agit encore que du début de la révolution.

    Dossier par Peter Taaffe

    Soulèvement révolutionnaire

    En 1936, Léon Trotsky déclarait à propos de la France : ‘‘Jamais la radio n’a été aussi précieuse que ces derniers jours.’’ S’il y a plus de moyens de communication globaux aujourd’hui, le sentiment est identique. Des millions de personnes ont pu suivre le déroulement des évènements et tout a été mis de côté, comme les matchs de l’équipe nationale égyptienne.

    Même dans un mouvement révolutionnaire spontané, la garantie du renversement du vieux régime est souvent liée à l’élément de direction de l’insurrection, direction préparée par les forces révolutionnaires au cours de la période précédente. Cet élément était absent de la révolution égyptienne, que divers commentateurs ont qualifiée de ‘‘révolution sans dirigeant’’ Mais la foule était immense (jusqu’à 6 millions de personnes) et très déterminée.

    Certains facteurs sont responsables de la décision des généraux de finalement laisser tomber Moubarak. L’un d’entre eux est l’occupation de la place Tahrir, qui a constitué un élément de double pouvoir où la rue a contesté le pouvoir d’Etat. Mais les généraux ont pris peur de la foule croissante, certainement au vu du fait que certains commençaient à prendre la direction du Palais présidentiel et d’autres centres du régime, comme les locaux de télévision. Le ministre américain de la Défense, Robert Gates, a appelé les généraux pour pousser au départ de Moubarak. Mais un autre élément décisif est l’implication de la classe ouvrière, avec des grèves et des occupations d’entreprises.

    Un Elément de surprise Ce soulèvement révolutionnaire et insurrectionnel a constitué une surprise pour les commentateurs bourgeois. Dans les documents de notre Congrès Mondial de décembre dernier, on pouvait notamment lire : ‘‘Tous les régimes despotiques et autoritaires de la région craignent à juste titre les mouvements d’opposition de masse qui pourraient se développer en Iran, en Égypte et ailleurs, et qui constitueraient une source d’inspiration pour leurs populations opprimées. Toutefois, à moins que la classe ouvrière ne prenne la direction de tels mouvements, avec un programme de classe indépendant, l’opposition de masse peut emprunter des canaux différents.’’

    Tous les ingrédients de la révolution étaient présents, avec la division au sein de la classe dirigeante, l’entrée en résistance de la classe moyenne, et les travailleurs et les pauvres qui expriment leur mécontentement face à la détérioration de leurs conditions de vie, à l’augmentation des prix et au chômage de masse. Cela avait déjà été démontré par la vague de grève qui avait récemment déferlé sur le pays.

    Il y a aussi une tradition de lutte contre le régime. Le jour où les protestations de masse ont commencé, le 25 janvier, est aussi le jour où les forces britanniques ont perpétré un immonde massacre de manifestants égyptiens, dont des policiers ironiquement. En 1952, il y a eu une révolution contre le Roi et des émeutes de la faim ont eu lieu contre Moubarak mais aussi contre son prédécesseur, Anwar El Sadat. Aujourd’hui, les évènements de Tunis ont été l’étincelle qui a mis le feu à la révolution égyptienne.

    Un coup d’Etat en douceur

    La joie était énorme à l’annonce du départ de Moubarak, mais la révolution n’est pas encore achevée, ce qui est compris par de nombreux combattants égyptiens. Les droits démocratiques ne sont toujours pas d’actualité et la loi martiale (en application depuis 30 ans) n’a toujours pas été abrogée. Comme l’a dit un manifestant : ‘‘Nous n’allons pas nous contenter d’une demi-révolution.’’

    En fait, il y a eu une sorte de coup d’Etat en douceur destiné à garantir les éléments centraux du régime: le capitalisme et la grande propriété terrienne. L’armée reflète la composition sociale de l’Egypte elle-même. Les conscrits en composent environ 40%. Ces derniers ont été radicalisés par la révolution, tout comme une partie du corps des officiers. Les généraux auront des difficultés à faire respecter la stricte discipline militaire.

    Tant la direction de l’armée que l’élite dirigeante espèrent de tout coeur que le rôle des masses est terminé. C’est encore loin d’être le cas. Des illusions existent parmi les masses concernant le rôle de l’armée comme caution de la révolution, idée renforcée par des figures comme Mohamed El Baradei qui a déclaré que l’armée devrait prendre le pouvoir afin d’empêcher toute ‘‘explosion’’ dans le pays. Cela résume la crainte des capitalistes libéraux face aux menaces qui pèsent contre les bases économiques et sociales de l’Egypte capitaliste.

    La menace de la contre-révolution

    Si la classe dirigeante et l’armée ont à faire le choix entre un statu quo et une véritable révolution, certainement une révolution socialiste, ils feront tout pour favoriser la première option. Le révolutionnaire irlandais Henry Joy McCracken avait dit : ‘‘Les riches trahissent toujours les pauvres’’. Cela vaut tout particulièrement pour les propriétaires terriens et les capitalistes pourris qui prédominent dans les pays néocoloniaux. Les responsables de l’ancien régime sont dans un premier temps obligés de s’adapter au nouveau pouvoir, mais uniquement pour ensuite voir comment restaurer leur influence. C’est ce qui s’est produit après la révolution de février 1917 en Russie avec le général réactionnaire Kornilov ou au Chili avec le général Pinochet, qui avait utilisé sa position dans l’armée sous le gouvernement radical d’Allende pour faire un coup d’Etat et noyer la révolution dans le sang. La révolution, à moins de parvenir à sa conclusion socialiste, provoque inévitablement des tentatives contre-révolutionnaires de la part du vieux régime.

    L’armée manoeuvre

    Il ne suffit pas de déposer Moubarak et sa clique, il faut mettre un terme au pouvoir socio-économique sur lequel se base le régime. La direction de l’armée est pieds et poings liée au capitalisme et aux propriétaires terriens. Le chef du conseil suprême de l’armée égyptienne, le maréchal Tantawi, est également l’un des plus gros industriels du pays. L’armée égyptienne ressemble sur ce point à l’élite militaire pakistanaise : elle contrôle une grande part de l’industrie et fait partie de l’élite capitaliste. L’élite de l’armée égyptienne n’est pas seulement liée à la classe dirigeante, elle a intégralement soutenu la politique impérialiste américaine au Moyen Orient. Ces dernières années, le régime égyptien a reçu environ 1,5 milliards de dollars chaque année, dont une bonne part est revenue à la direction de l’armée.

    De ce côté-là, aucun soutien ne peut être attendu pour la révolution. Une fois que la classe ouvrière aura décidé de s’impliquer sur le plan politique avec des mouvements et des grèves de masse qui mettront en avant des revendications autres que seulement sur les salaires et les conditions de travail, l’armée aura vite fait de choisir son camp. Mais d’autre part, il y a un soutien à la révolution à différents niveaux de l’armée. Les soldats doivent aussi s’organiser, même si la radicalisation n’y atteint pas les proportions que l’on a pu connaître dans l’armée portugaise durant la révolution de 1974.

    Parmi les soldats, le rôle de la direction de l’armée va de plus en plus être questionné, ce qui conduira à des conflits. Les forces révolutionnaires doivent y jouer un rôle et poser la question des liens entre la base de l’armée et les protestations de la rue. Cela peut se faire avec des revendications portant sur la constitution de comités de soldats avec les droits démocratiques pour parvenir à un changement dans l’armée et dans la société.

    Un gigantesque gouffre entre les classes

    Il est maintenant d’une importance cruciale de construire sur base des récentes luttes de la classe ouvrière et d’instaurer des comités de travailleurs et des pauvres dans les usines et les quartiers ainsi que de les relier aux niveaux local, régional et national.

    A la base même de la société, parmi les travailleurs les plus exploités et les pauvres, une révolution suscite naturellement la sympathie et le soutien. Le journaliste britannique Robert Fisk a relaté la façon dont les enfants sans abris (au nombre de 50.000 dans la capitale) ont été impliqués dans les évènements révolutionnaires. Le régime a essayé de les récupérer, mais nombreux sont ceux qui ont choisi le camp de la révolution.

    La révolution offre à la classe ouvrière l’opportunité de mettre en avant ses propres revendications au niveau politique ou social. Nombre de facteurs économiques sont à la base des mouvements en Tunisie, en Egypte et ailleurs. Les salaires très bas combinés à la hausse astronomique des prix (certainement pour les produits de base comme la nourriture) ont été parmi les éléments déterminants du déclenchement de la révolution. Cela a conduit la classe moyenne mais aussi les travailleurs et les pauvres à protester. Les statistiques officielles disent que sur une population de 80 à 85 millions d’habitants, 40% vit sous le seuil de pauvreté, 44% sont quasi illettrés et 54% travaillent dans le secteur ‘‘informel’’.

    Le gouffre entre riches et pauvres est abyssal, un gouffre qui s’approfondit à travers le monde sous le coup de la crise économique. Pour tenter de rester au pouvoir, Moubarak avait promis une augmentation salariale de 15% aux six millions de travailleurs des services publics, ce qui n’a toutefois pas suffi à stopper les protestations. Des revendications portant sur les salaires, une semaine de travail plus courte et d’autres revendications du mouvement ouvrier (notamment au sujet des soins de santé et de la sécurité) devront faire partie du programme combatif dont ont besoin les travailleurs pour la période à venir. Pour cela, les travailleurs doivent construire leurs propres organisations et syndicats.

    L’auto-organisation des travailleurs

    Les syndicats indépendants qui se développent maintenant doivent tourner le dos aux dirigeants syndicaux occidentaux qui voudront les limiter à l’intérieur du cadre du capitalisme.

    La lutte ne concerne pas seulement les droits démocratiques comme le droit de grève et le droit de constituer des syndicats. La classe ouvrière a besoin de ses propres organisations de lutte, dans les entreprises mais aussi dans la société de façon plus générale. La classe dirigeante essayera de former un ‘‘Parlement’’ pour défendre ses intérêts. Les masses doivent y opposer leur propre ‘‘Parlement’’ : des conseils de travailleurs et des paysans pauvres qui lutteraient pour une Assemblée Constituante démocratique.

    La nécessité d’une véritable confédération syndicale des travailleurs égyptiens est criante. Cette question est liée à la création d’une expression politique indépendante, flexible et démocratique de la classe ouvrière organisée, l’équivalent des comités de masse créés durant la révolution russe et que l’on a aussi pu voir durant des évènements similaires dans l’histoire. Quand, durant la première révolution russe de 1905, de tels comités ont été improvisés, c’était essentiellement des comités de grève. Aucun des représentants politiques des travailleurs n’imaginait que cela puisse être élargi jusqu’à devenir des organes de lutte de masse et, éventuellement, après la révolution d’Octobre 1917, des organes de pouvoir pour la classe ouvrière victorieuse. La revendication de construction de comités ouvriers de masse n’est pas applicable à toutes les situations, mais c’est tout à fait légitime dans une période révolutionnaire, comme c’est clairement le cas en Egypte.

    Une Assemblée Constituante Révolutionnaire

    Les grèves ne concernent déjà plus uniquement des caractéristiques économiques et industrielles mais aussi des aspects politiques.

    C’est assez symptomatique de la façon dont les travailleurs égyptiens voient la situation. Une révolution est un grand professeur pour les masses, qui apprennent plus et à plus grande vitesse qu’en temps normal. Les 18 jours de janvier et de février ont été une période d’éducation intense et ont forgé les travailleurs égyptiens dans un processus de révolution et de contre-révolution.

    Dans le but de soutenir cela, la classe ouvrière a besoin de tirer les conclusions nécessaire. Il est primordial d’entamer un processus de création de comités de masse. La classe ouvrière doit se battre pour exprimer de manière indépendante ses positions dans la société en gardant farouchement son indépendance de classe.

    La classe ouvrière doit se faire le meilleur avocat d’un programme et des droits démocratiques. C’est la seule façon pour elle de prendre la direction révolutionnaire des différentes sections de la société : les paysans, les pauvres des villes et des sections de la classe moyenne qui voient l’obtention de la démocratie comme la tâche la plus urgente dans la situation actuelle. Les slogans démocratiques comme de revendiquer une presse libre, avec la nationalisation des imprimeries pour faciliter l’expression de toutes les tendances de l’opinion, et le droit d’association libre sont cruciaux.

    Mais la revendication la plus importante d’une portée générale est celle d’un Parlement démocratique, d’une assemblée constituante. Il est clair que les classes possédantes, même si elles sont préparées à concéder certains droits démocratiques, ne sont pas en faveur d’une démocratie large, honnête et accessible à tous. On ne peut accorder aucune confiance aux généraux ou aux élites pour construire une véritable démocratie en Egypte.

    Face à cela, les travailleurs devraient appeler à la formation de conseils indépendants des travailleurs et des paysans pauvres. L’ensemble du programme démocratique devrait être appuyé par l’appel pour une assemblée constituante qui aurait un caractère révolutionnaire dans le contexte de la révolution actuelle. Des comités doivent assurer que les élections soient correctement organisées et que les votes ne soient pas achetés comme par le passé.

    Nous nous démarquons complètement des formations ‘pro-capitaliste’ qui ont aussi soulevé la question de l’assemblée constituante dans une forme abstraite. La classe ouvrière n’a aucun intérêt dans un régime où le président a le dernier mot. Ce régime était celui de Moubarak, celui de Sadate et celui de Gamal Abdel Nasser. Nous sommes contre une ‘chambre haute’ qui contrôle et repousse les demandes radicales de la classe ouvrière et des pauvres. Une élection démocratique pour une assemblée constituante révolutionnaire devrait être le mot d’ordre des masses égyptiennes.

    Une telle revendication agitée dans une campagne de masse par les forces révolutionnaires aurait un énorme effet dans la situation actuelle. Cela devrait aller de pair avec la création d’un parti de masse des travailleurs qui donnerait une voix aux sans-voix et aux oubliés.

    Répercussions internationales

    La révolution Egyptienne n’a pas été un évènement strictement intérieur, mais un phénomène étendu à tout le Moyen-Orient et à l’ensemble du monde. Les masses égyptiennes ont secoué les fondations du pouvoir impérialiste qui croyait qu’il pouvait tenir toutes les rênes dans ses mains. Une des affiches placardée après le départ de Moubarak disait : ‘‘2 partis, 20 à faire partir’’, premièrement la Tunisie et maintenant l’Egypte. Bien sûr, cela ne se reproduira pas à l’identique automatiquement pour chaque aspect et détail dans les pays de la région.

    Il n’y a aucun régime stable dans la région. Les régimes les plus réactionnaires du Golfe, les potentats semi-féodaux, tremblent actuellement devant le magnifique mouvement des travailleurs Egyptiens. Déjà en Jordanie, les échos de ces mouvements sont reflétés dans les manifestations de masses, tout comme en Lybie, en Algérie et au Maroc. Au Yémen, le président a promis de ne pas se représenter. Cependant, sa tentative de rester encore 2 ans est intenable. Il peut être déchu par un mouvement de masse dans la prochaine période.

    L’équilibre des forces a considérablement changé dans la région. Un des régimes le plus effrayé est sans doute celui qui apparait comme le plus fort, Israël. Jusqu’ici, la classe dirigeante israélienne était soutenue par le régime de Moubarak à travers son soutien honteux à l’embargo imposé aux masses pauvres palestiniennes à Gaza. Le canal de Suez est aussi un facteur stratégique vital.

    La classe ouvrière israélienne qui est récemment entrée en conflit avec son propre gouvernement sera aussi touchée par la révolution égyptienne. Une Egypte démocratique et socialiste lancerait une collaboration intime avec la classe ouvrière dans les deux pays conduisant à une réelle paix à travers une confédération socialiste des états du Moyen Orient. Des conséquences à moyen et long terme pourraient mettre en avant le scénario d’une autre guerre dans la région. Mais la plus importante guerre qui doit être diligemment menée est la guerre de classe. Nul doute qu’une nouvelle page de l’histoire est en train de s’écrire dans cette région du monde et particulièrement pour la classe ouvrière. Toutes les forces combattant pour un monde socialiste, le PSL et son internationale le Comité pour une Internationale Ouvrière saluent la classe ouvrière égyptienne et espèrent et attendent avec ferveur que ce nouveau chapitre soit favorable au mouvement de la classe ouvrière dans le monde.

  • Tunisie, Égypte,… Quelles perspectives et quel programme pour les masses?

    Lors de la discussion sur les perspectives internationales du Comité National du PSL-LSP qui s’est tenu ce weekend, un bonne part des interventions ont eu trait au processus actuellement à l’oeuvre dans le Moyen-Orient et au Maghreb. Le texte suivant reprend quelques uns des éléments qui ont été mis en avant, mais la discussion a été plus large et comprenait aussi des aspects historiques (Nasser, la crise du canal de Suez, le pan-arabisme,…) ou encore la situation au Yémen et en Algérie, thèmes sur lesquels nous reviendrons.

    [box type=”shadow” align=”alignright” width=”100″]
    A lire aussi

    [/box]

    Des mouvements qui ne tombent pas du ciel

    Dans le document du 10e Congrès Mondial du CIO consacré au Moyen Orient et à l’Afrique du Nord, il était dit ”tous les despotes et les régimes autoritaires de la région ont peur de mouvements de révolte de masse. Des mouvements en Iran ou en Egypte sont possibles, qui peuvent alors en inspirer d’autres. Si la classe ouvrière n’en prend pas la direction, ces mouvements peuvent prendre des directions très différentes.”

    Le mouvement en Tunisie a constitué une source d’inspiration pour toute la région: le Yémen, la Syrie, la Jordanie, l’Algérie,… Ces actions ne tombent pas du ciel, elles sont le résultat d’un cocktail explosif fait d’un chômage énorme, d’une très large pauvreté très large (en Égypte, 40% de la population vit avec moins de deux dollars par jour), d’une politique répressive de la part de régimes autoritaires, mais aussi des traditions de lutte dans la région.

    Dans cette région aussi, la crise capitaliste a suivi une politique néolibérale très dure. Entre 2004 et 2009, l’Égypte a attiré 42 milliards de dollars d’investissements extérieurs, investissements obtenus avec la promesse qu’il n’y aurait pas de taxes sur les profits. Une partie du secteur bancaire a été privatisée pour des entreprises d’autres pays et les principaux actionnaires des banques viennent d’Italie ou de Grèce. La Bourse égyptienne, entre 2004 et 2009, s’est développée en étant multipliée par douze.

    La crise s’est développée depuis 2009, avec la chute du prix du pétrole et une diminution des investissements, mais l’Égypte est une des places dans le monde où même avec cela, l’économie a continué à croître. Mais cette poursuite de la croissance économique, la population ne l’a pas plus ressentie qu’avant. Différents mouvements avaient déjà eu lieu ces dernières années et qui exprimaient cela.

    Entre 2004 et 2008, 194 grèves s’étaient développées chaque année en Egypte, surtout dans les centres textiles et à Suez. Entre 1992 et 2010, le gouvernement a mené sa politique de privatisation, et c’est dans cette période que ceux qui ont moins de deux dollars par jour sont passé de 20 à 44%. 66% de la population a moins de 25 ans, le poids de la jeunesse est extraordinaire et, parmi les chômeurs, 90% a moins de 25 ans. Cela illustre encore une fois que le mouvement ne tombe pas du ciel. Entre 2008 et 2010 il y a eu 1600 grèves chaque année, soit trois fois plus que durant la période précédente.

    Différentes multinationales sont présentes en Égypte, comme la multinationale française Lafarge (construction). L’Égypte représente pas moins de 10°% de ses profits. Mais on trouve aussi des entreprises Solvay, Unilever, la Société Générale, Heineken,… En Tunisie, quelques 2.500 multinationales sont présentes, dont plus d’un millier de françaises qui engagent 110.000 travailleurs. Les 146 entreprises belges emploient 20.000 travailleurs.

    Ce mouvement n’est pas uniquement basé sur des revendications démocratiques, c’est aussi une expression de la crise mondiale et du fait que toute une génération de jeunes n’a aucune perspective pour l’avenir. La crise capitaliste a brisé chaque espoir d’un meilleur avenir, cette illusion était présente et a été réduite à néant.

    On peut parler de mouvements révolutionnaires dans la région, avec une majorité de la population participant activement au mouvement dans l’intention de changer le statuquo en leur faveur et pour retirer la gestion de la société hors des mains de l’élite et des classes dirigeantes. Les manifestations sont massives et très populaires, avec beaucoup de travailleurs, des pauvres mais aussi des couches moyennes. Les appels initiaux ont été diffusés par des nouveaux médias, c’est une bonne manière de les utiliser. Mais il serait exagéré de dire que c’est une révolution Facebook. Ainsi, seulement 6% de la population égyptienne est sur Facebook.

    Dans les débats autour de ces évènements, il y a beaucoup de comparaisons avec les mouvements révolutionnaires du passé, comme les Révolutions colorées de la décennie précédente. Des explosions de colère ont ressemblé à cela, mais le mouvement actuel est bien plus profond. La conscience des masses est plus élevée et la conscience des classe est présente, c’est plus difficile à récupérer pour la bourgeoisie. On mentionne aussi la Révolution iranienne de 79, mais il est clair qu’il y a beaucoup de différences avec cela. On parle encore de la chute du stalinisme en 89-91. En fait, toutes les comparaisons ont leurs limites, et chaque révolution a ses propres éléments et sa propre dynamique.

    En Tunisie, le mouvement est rapidement parvenu à une première victoire. D’autres régimes tirent la conclusion que faire des concessions est dangereux, cela peut renforcer le mouvement. Chaque concession de Ben Ali a renforcé la confiance des masses, chaque concession a illustré le pouvoir du mouvement. La fuite de Ben Ali n’a ainsi pas stoppé le mouvement, ni la recomposition du gouvernement, ni la démission des ministres de l’UGTT. Les mobilisations continuent, avec toutefois un caractère différent.

    Différents secteurs connaissent des grèves. On essaye là aussi de stopper les protestations avec des concessions: les éboueurs ont reçu une augmentation de salaire de 60%. Des programmes sociaux ont été introduits par le gouvernement. Le régime tunisien a implosé, et cela a constitué un catalyseur pour le développement du mouvement en Égypte.

    L’Egypte

    L’Égypte diffère de la Tunisie au niveau économique (avec le canal de Suez) et politique. C’est aussi la population la plus grande de la région. L’Égypte est un des piliers les plus importants de l’impérialisme américain. Une de ces facettes est la relation avec Israël, un des alliés les plus farouches de Moubarak à l’heure actuelle. Le régime israélien a appelé Moubarak à utiliser la violence contre le mouvement. Le soucis de la classe dirigeante israélienne, c’est l’impact que cela aurait sur les masses palestiniennes. Il y a le problème du blocus de Gaza, auquel le régime de Moubarak collabore. Cette politique est très impopulaire en Égypte même, et ce qui se passerait avec un changement de régime n’est pas clair.

    Depuis mercredi, il est clair que le mouvement révolutionnaire en Égypte est compliqué. Jusque mardi, c’était plutôt joyeux. Mardi, il y avait plus d’un million de manifestants au Caire. La façon dont les choses s’étaient déroulées en Tunisie avait créé des illusions sur la facilité de renverser un régime. Mais depuis mercredi, le régime a utilisé les forces de la contre-révolution. La base sociale pour cela, c’est le sous-prolétariat du Caire, mais aussi les fonctionnaires du régime qui ont beaucoup à perdre. On peut faire la comparaison avec la manière dont le régime tsariste s’est opposé à la révolution de 1905 en Russie. Le mouvement sera-t-il assez fort pour aller contre le pouvoir? Les manifestations de vendredi ont confirmé que le mouvement est encore en train de croître et n’a pas perdu de ses forces, mais le potentiel n’est pas utilisé: pas de marche vers le palais présidentiel par exemple. C’était le ”jour du départ”, mais peu a été fait pour que Moubarak dégage vraiment.

    Pour arriver à une défaite fondamentale du régime, la classe ouvrière doit intervenir en tant que classe. Comme en Tunisie, il y a des liens très forts entre les directions syndicales et le régime. Tous les dirigeants sont membres du parti de Moubarak. Le régime exerce un contrôle sur la fédération syndicale. C’est vrai, mais dans les dernières luttes, des militants de base se sont opposés aux directions syndicales. Le syndicat des contrôleurs de taxes a même quitté la fédération syndicale pour rejoindre une nouvelle structure syndicale qui défend le salaire minimum, la sécurité sociale,… C’est difficile d’avoir énormément de précisions, mais ce nouveau syndicat est impliqué dans les comités de quartier.

    Le mouvement doit partir à l’offensive pour éviter que le régime et les Etats-Unis n’organisent une transition favorable aux capitalistes. Les revendications sociales doivent être centrales dans le mouvement afin d’également mobiliser les couches les plus passives.

    Les Frères Musulmans ont hésité avant de s’impliquer. Mais en même temps, des rapports disent que parmi ceux qui ont défendu la place du Caire, il y avait beaucoup de Frères Musulmans. Les cadres étaient contre tout soutien au mouvement, ce sont les jeunes qui ont fait pression, ce sont ces jeunes qui, mercredi dernier, participaient à la défense des manifestants contre la contre-révolution. Un scénario ”à l’iranienne” est peu probable, mais il est possible que les Frères remplissent le vide politique. Quelque soit le régime qui succèdera à Moubarak, il ne pourra toutefois pas collaborer avec Israël de la même manière. En Palestine, tant le Hamas que le Fatah sont contre le soutien au mouvement, ils voient les dangers pour leur propre position. Tout changement de régime en Égypte modifie en fait radicalement les choses au niveau du moyen-orient.

    Les Frères Musulmans peuvent jouer un rôle, mais ce n’est pas vraiment le cas aujourd’hui. La direction de Frères dit que leur modèle est plutôt celui de l’AKP d’Erdogan en Turquie et pas le modèle iranien. Ce n’est bien entendu que ce qu’ils disent, mais c’est aussi possible que cela soit une réflexion de ce qu’ils constatent: dans la rue, l’idée d’une société islamiste ne vit pas. Bien entendu, ils savent que s’ils rentrent dans le vide politique existant, ils vont se trouver dans une situation très compliquée, et c’est la raison pour la quelle eux aussi mettent en avant El Baradei pour qu’il négocie avec le régime.

    L’armée tente de gagner du temps pour, avec les USA, sauver l’élite et leur propre position dans la société égyptienne. Mercredi, pour beaucoup de manifestants, c’était clair que l’armée avait laissé l’espace pour ceux qui soutenaient le régime. Le chaos peut aider l’armée et cela peut renforcer parmi la population l’idée d’un appel à l’ordre. Mais l’armée n’est pas quelque chose d’homogène. Il y a eu des fraternisations entre soldats et manifestants en certains endroits. Pour les manifestants, il est crucial d’avoir une approche envers les simples soldats pour les détacher de la hiérarchie.

    Extension internationale

    Un des éléments important dans cette vague de révolte et de révolution, c’est la dispersion internationale. C’est un élément important, mais loin d’être neuf. A l’époque de Nasser, lors de la crise du canal de Suez en 1956, ce dernier avait mis en avant une grève générale dans toute la région, appel qui a joué un grand rôle dans la défaite de l’impérialisme. Mais le nationalisme arabe de Nasser a eu ses limites. Khadafi aujourd’hui est un des derniers représentants de cette époque du nationalisme arabe, qui a eu de grandes répercussions dans la région.

    Le développement de cette situation en Égypte a des incidences ailleurs. En Chine, ils essayent d’étouffer les évènements. Les médias ne parlent que de hooligans qui viennent tout casser au Caire. Le régime craint la propagation des protestations, et d’autres aussi, l’Iran par exemple. Khamenei, l’actuel Guide Suprême, a essayé de félicité le ”mouvement pour la libération musulmane” et, comme le Tea Party aux USA, le régime affirme que le mouvement ne vise qu’à instaurer un régime islamiste. De tels mouvements peuvent se développer dans d’autres régions, et un des éléments clé est le prix de l’alimentation. L’agence alimentaire américaine a publié un rapport sur l’insécurité alimentaire qui disait que les gens ont trois options: se révolter, migrer ou mourir. Il y a une grande possibilité qu’une grande révolte se développe sur ce thème.

    L’impérialisme ébranlé

    Personne n’a vu venir le mouvement en Tunisie. En un mois seulement, Ben Ali a tout perdu. L’énorme vitesse à laquelle le régime a été poussé dans la défensive, la vitesse à laquelle l’armée a été séparée de Ben Ali, la formation rapide des comités qui ont notamment jeté leurs patrons, tout cela est phénoménal. Entretemps, le régime cherche à voir comment canaliser la situation de double pouvoir qui existe. Le problème pour la bourgeoisie et l’impérialisme en Tunisie, c’est qu’ils n’ont pas quelqu’un comme El Baradei ou Amr Moussa, le président de la ligue arabe, qui est égyptien. Les USA continuent à miser sur le premier ministre, mais nous devons voir comment les relations de force vont se développer.

    Blair a parlé de Moubarak comme de quelqu’un de très courageux et une force œuvrant pour le bien et Obama, moins directement toutefois, est sur une position similaire. Pour donner une idée du rôle crucial de l’Égypte pour USA: depuis 1979, le pays reçoit 1,3 milliard de dollars de soutien militaire par an de la part des USA. C’est plus ou moins le même montant que ce que les USA donnent au Pakistan et à Israël. L’armée égyptienne est la 10e au niveau mondial, et elle joue un rôle crucial pour défendre les intérêts de l’impérialisme dans la région.

    L’impérialisme recherche des figures capables de restaurer la stabilité, mais c’est dans la rue que le résultat du mouvement va se jouer.

    Le double pouvoir et le rôle d’une direction révolutionnaire

    On peut conclure que le mouvement a jusqu’ici été très spontané et sans véritable organisation, mais on voit aussi un développement important de l’auto-organisation, comme avec la manière dont la sécurité a été organisée place Tahir, très impressionnante, de même que la façon dont des comités de quartier ont été instaurés en Tunisie ou en Égypte pour défendre les quartiers contre les pillages. Des comité sont lancés dans les entreprises aussi, et tout cela peut être la base pour développer un gouvernement des travailleurs et des petits paysans.

    Un processus révolutionnaire ne se développe pas de façon linéaire. En Tunisie, on assiste à un reflux du mouvement, malgré le développement d’une grève dans les métros à la suite de la victoire obtenue par les éboueurs par exemple. Cela contraste tout de même fortement avec la grève générale contre le régime et les protestations des semaines précédentes.

    Cette période était en fait déterminée par les premiers éléments d’une situation de double pouvoir où les comités de vigilance et les comités de quartier se développaient face au pouvoir du régime. Le danger du vol de la révolution tunisienne avec la complicité des institutions internationales est réel. La direction de l’UGTT soutient le gouvernement de Ghannouchi composé de patrons issus de l’étranger. Il faut réclamer un Congrès Extraordinaire de l’UGTT basé sur l’élection de représentants de la base afin de changer de direction syndicale.

    Mais il manque aussi une direction révolutionnaire. Le danger le plus grand est constitué par cette absence de direction qui laisse l’espace pour des figures bourgeoises. Il y a des mouvements comme dans les syndicats, qui sont importants et qui rendent très très difficile pour le régime de pouvoir revenir à la précédente situation, tant en Egypte qu’en Tunisie. Le résultat du mouvement sera décidé par l’organisation des masses: il faut renforcer les comités de base et les pousser à l’offensive contre le gouvernement.

    Le limogeage des PDG dans les entreprises en Tunisie et les barrages de travailleurs refusant que les anciens directeurs reviennent posent directement cette question: qui prend la direction des usines? Le gouvernement ? Les travailleurs ? D’autres capitalistes ? Nous devons considérer le développement de comités dans les entreprises, les écoles,… comme la base de la future société socialiste. Il ne suffit pas de s’opposer à la politique libérale, aborder la question du contrôle ouvrier est un point crucial dans le développement du mouvement aujourd’hui.

    Il ne suffit pas de réclamer la dissolution du RCD (le parti de ben Ali), la liberté d’expression et syndicale,… Saluer le développement des comités de base est très bien, mais il faut surtout amener la question de la prise du pouvoir par ces comités, les élargir et appeler à une Assemblée Constituante Révolutionnaire sur base de délégués démocratiquement élus dans les comités de base. Contre des mots d’ordre vagues de formation d’un gouvernement intérimaire qui jouisse de la confiance du peuple, il faut pousser la nécessité d’une démocratie des travailleurs basée sur les comités de base et les travailleurs.

    Concernant la police, réclamer une police basée sur la supériorité de la loi et les droits de l’homme est illusoire et totalement insuffisant à l’heure où l’on voit des bandes contre-révolutionnaires attaquer physiquement les locaux syndicaux, les militants,… La défense du mouvement doit être basée sur l’extension des comités, et cela vaut aussi pour la justice, etc. Ces comités doivent aussi être étendus à l’armée pour organiser les soldats qui ont fraternisé avec la révolution. Cela doit être la base pour fractionner l’appareil d’État. La direction de l’armée a lâché Ben Ali, mais ne veut pas que le mouvement aille plus loin.

    Enfin, concernant notre travail militant, nous devons accorder une grande attention aux sensibilités qui existent vis-à-vis de la question nationale. Il n’est pas question de crier à la révolution du ”monde arabe”, la question est beaucoup plus vaste. Les berbères, par exemple, ne sont pas arabes et sont opprimés au Maroc et ailleurs. On trouve également des berbères en Algérie, en Libye, en Tunisie et en Egypte. Ce terme de ”monde arabe” exclut aussi l’Iran, et l’on se rappelle encore des puissants mouvements de 2009.

    On ne peut jamais prédire comment les choses vont se développer, mais ces mouvements confirment la confiance que le Comité pour une Internationale Ouvrière et ses sections, comme le PSL-LSP en Belgique, a toujours eu envers les capacités des masses pour se battre en faveur de leurs conditions de vie. Une fois ces mouvements initiés, cela a conduit à une détermination très profonde. Ces mouvements ont même confirmé les méthodes traditionnelles de la classe ouvrière, même initiés de façon spontanée par les masses.

    Bien entendu, c’est aussi la confirmation gigantesque de la nécessité d’une organisation révolutionnaire capable de garantir que l’énergie d’un tel mouvement soit utilisée pour aller vers une une société orientée vers la satisfaction des intérêts des masses, c’est-à-dire une société où les secteurs clés de l’économie sont retirés de la soif de profit du privé pour être démocratiquement planifiés, une société socialiste.

  • Egypte : “Nous ne partirons pas tant qu’il ne partira pas!” – Témoignage de la place Tahrir au Caire

    A la suite des manifestations massives du 1er février au Caire et à Alexandrie, le Président Hosni Moubarak s’est dit prêt à partir en septembre. Mais les manifestants de la place Tahrir au Caire continuent toutefois leurs actions pour forcer Moubarak à quitter le pouvoir. Hier après-midi, des confrontations dramatiques ont eu lieu, quand des partisans du dictateur ont attaqué les protestataires, y compris avec des armes à feu, montés sur des chevaux et des chameaux. Les forces armées sont restées “neutres”, émettant un ordre de dispersion pour les deux camps. Voici ci-dessous une interview d’un correspondant du CIO présent au Caire.

    socialistworld.net

    [box type=”shadow” align=”alignright” width=”100″]
    A lire aussi

    Actions de solidarités

    [/box]

    Que se passe-t-il au Caire?

    “A la place Tahrir et dans les rues avoisinantes, il y a des milliers et des milliers de manifestants. Je n’ai jamais vu quelque chose de semblable. Les manifestations ont commencé très tôt le matin et nous sommes maintenant très tard le soir (le 1er février). Même s’il y a officiellement un couvre-feu, un très grand nombre de personnes reste sur la place. La foule est dense et il est très difficile de se déplacer. Tout le centre-ville est contrôlé par les manifestants et totalement dénué de la présence des forces de police. Il y a toujours de soldats aux alentours, mais ils ne sont pas très visibles. L’ordre est maintenu par des comités de défense dans lesquels sont presents des gens de diverses religions. Ils vérifient les documents des passants, s’assure que rien ne peut être utilisé comme provocation et distribuent des tracts comprenant des instructions sur la manière de se comporter sur la place. Le niveau d’auto-organisation et de discipline est impressionnant. Des centres médicaux et un centre de presse ont aussi été installés, de même que des cantines.

    “Un des volontaires m’a dit qu’il avait découvert la présence d’un policier en vérifiant les papiers d’identité (le travail de chacun est inscrit sur les documents d’identité égyptiens). Il l’a livré à l’armée. Il y a visiblement un accord pour procéder de la sorte, même s’il l’on ne sait pas se que fait l’armée des policiers. La police, les “gardiens de l’ordre”, sont interdits aux manifestations, même s’ils ont quitté l’uniforme, parce que les gens pensent qu’ils sont principalement là pour faire des provocations, ce qui pourrait se terminer de façon tragique dans les circonstances actuelles.

    “Le manifestation est constituée de groupes autour d’orateurs avec des mégaphones qui crient des slogans ou livrent des informations importantes. Des meetings se déroulent autour des stands de différents partis politiques. Parmi les manifestants, on trouve un grand nombre de jeunes très militants, préparés à aller jusqu’au bout. Beaucoup de femmes participent aussi aux protestations. Tout le monde crie qu’ils ne partiront pas avant que Moubarak s’en aille. Quelqu’un a crié à un moment, probablement un provocateur, que Moubarak avait démissionné, mais il a immédiatement été interrompu par les manifestants qui criaient “Ne croyez pas les rumeurs, que personne ne parte avant que le président ait officiellement démissionné.” Il faut aussi préciser que les slogans ne sont pas orientés que vers une personne, mais contre le régime en lui-même.

    “Internet ne fonctionne pas au Caire, et les messages sms ne passent pas, il y a une véritable soif d’informations. Pour l’instant, les téléphones portables fonctionnent. Les autorités ont interdit la diffusion de la chaîne Al-Jazeera. J’ai rencontré le dirigeant du bureau du Caire d’Al-Jazeera, qui vit dans une tente et y coordonne le travail de ses correspondants et des équipes-caméras.

    ‘‘Alors que je marchais parmi la foule, j’ai fait une rencontre assez surprenante. Quelqu’un, que je ne connaissais pas, m’a appelé de mon nom! Il m’a expliqué que je ne le connaissais pas mais qu’il était ami avec moi sur Facebook! Nous avions visiblement échangé quelques commentaires sur la situation en Egypte. De nombreuses personnes m’ont demandé se que je faisais au Caire et, quand je leur expliquais que je venais spécialement pour soutenir leur lutte, Ils étaient très agréablement surpris. Mais des touristes ont également pris part aux manifestations, j’ai pu entendre des slogans en italien, en espagnol et dans d’autres langues. J’ai aussi rencontré deux Anglais avait une pancarte déclarant, en arabe ; “Moubarak, il est temps de partir, nous avons besoin de prendre une douche!” Il n’y a visiblement plus d’eau dans des hôtels. Parfois, ce sont des Egyptiens eux-mêmes qui écrivent des pancartes et des tracts en anglais, pour que ceux qui regardent les reportages aux télévisions à l’étranger comprennent ce qui se passe. A cause du blocage de l’information, les gens ne savent pas grand chose des protestations à l’étranger en solidarité avec leurs luttes, mais quand de telles informations parviennent aux oreilles des manifestants, elles sont chaudement acclamées.”

    Quelles sont les revendications des manifestants? Quels sont leurs slogans?

    “Leurs revendications concernent clairement des thèmes sociaux et démocratiques: le président doit démissionner, il faut la liberté d’expression, une nouvelle constitution et de nouvelles élections à tous les niveaux. J’ai vu une femme avec une pancarte qui disait “L’armée doit nous défendre – oui. L’armée doit nous diriger – non”. Dans d’autres termes, même si les manifestants traitent chaudement l’armée, ils n’ont aucune envie de la voir prendre le pouvoir.

    “Parfois, on peut voir des slogans progressistes, même si les revendications sont un peu confuses, comme “rendez au peuple ce qui lui a été volé”, sans que la manière de réaliser cela soit claire. J’ai vu des slogans comme “Ramenez les salaries au niveau des prix” et “Pour un salaire minimum de 200 dollars”. Mais, en general, on ne voit pas de programme clair ni d’analyse précise. Un autre élément important est la revendication de l’abolition de loi d’urgence, qui est appliqué en Egypte depuis plus de 30 ans et est utilisée pour réprimer les mouvements de la population.

    “Partout, on peut sentir que l’atmosphère de révolte continue à croître, il y a une explosion de protestations reflétée de toutes sortes de façons: pancartes, slogans peints sur les murs ou sur le sol, sur les voitures, sur les bus, sur les visages, les vêtements,… On voit aussi de petites pièces de théâtres et toutes sortes de tracts sont distribués, par milliers, tout comme des appels, des déclarations, parfois sans aucune signature, parfois simplement issues d’individus.”

    Quelles forces sont-elles impliquées dans les protestations?

    “Toutes sortes de forces sont présentes : de gauche, de droite ou islamistes. Les groupes de gauche se limitent à des revendications démocratiques, elles reflètent simplement les revendications des masses. Elles appellent à la démission du président, Moubarak, à de nouvelles élections et à une nouvelle constitution, sans toutefois faire de l’agitation autour d’un programme socialiste.

    “Les islamistes des Frères Musulmans ne participant pas vraiment aux protestations. Quand tout cela est apparu, ils ne sont pas intervenus. Maintenant, sous la pression de leur base, ils ont été forces de descendre dans les rues. Mais ils ont une influence quasiment insignifiante sur les slogans, les revendications, et l’atmosphère présente lors des manifestations. Une fois, j’ai vu un groupe de jeunes criant des slogans démocratiques. Une personne a commencé à crier “Allah Akbar”, mais personne dans la foule n’a repris l’appel, il a juste été ignoré. Il a alors essayé de rentrer plus loin dans la foule en continuant à crier, jusqu’à ce que plusieurs personnes lui dissent de rester tranquille. “Allakh Akbar” n’est pas un slogan, cela n’appelle personne à faire quoi que ce soit, cela ne représente aucune revendication ni aucun programme. Mais quand arrive l’heure de la prière et que les prêtres appellent les croyants à prier, une part significative de la manifestation participe. Juste après, les manifestants reprennent les slogans démocratiques. Personne ne crie en faveur de la sharia. Il y a aussi beaucoup de femmes qui participent aux protestations.

    “J’ai parlé avec plusieurs coptes (des chrétiens d’Egypte), qui étaient très nombreux aux manifestations. C’est un symptôme important. A la nouvelle année, à Alexandrie, une attaque terroriste à la bombe contre une Eglise Chrétienne a mené à une situation très tendue dans la ville et ailleurs. Les coptes ont organisé des manifestations, ont demandé plus de sécurité, et ont même crié des slogans anti-Islam. Mais maintenant, cette situation a été transformée. Vous pouvez voir comment, en quelques jours, parfois en quelques heures, l’unité du mouvement pour les droits démocratiques et sociaux a unifié les chrétiens et les musulmans. L’unité dans la lutte relègue à l’arrière plan toutes les différences superficielles. J’ai vu des personnes porter un foulard avec un croissant de lune croisé avec une croix, le symbole de l’unité entre coptes et musulmans. Quand l’Eglise, par la voix du vieux patriarche, a publiquement supporté Moubarak, même quelques coptes ont regardé” cela comme une chose positive, en disant que maintenant les chrétiens seraient moins sous l’influence des de leurs représentants et de l’Eglise en tant que symbole d’autorité.

    “L’opposition a déjà formé une coalition de différents partis, de gauche, de droite et d’islmaistes. Ils soutiennent les revendications générales des masses, mais demandent aussi que Durant les 6 mois de transition, jusqu’au départ de Moubarak, un gouvernement de ‘salut national’ soit constitué. Durant cette période, ils promettent d’organiser des elections à tous les niveaux, et de faire un nouveau projet de constitution.

    “La gauche, en participant à cette coalition, aide dans les faits cette section de la bourgeoisie qui est actuellement maintenue à l’écart du pouvoir par le régime de Moubarak. Les slogans et revendications de cette coalition sont largement distribués et la masse des manifestants ne s’y oppose pas, même si les principales figures dirigeantes sont regardées avec scepticisme. C’est particulièrement le cas de l’ancien dirigeant de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique, Mohammed Al-Baradei, qui vient juste de rentrer en Egypte. Mais pour l’instant, personne ne met en avant un programme alternatif, même à gauche.

    “Dans le vide politique qui existe actuellement, qui commence déjà à être occupé par la droite, la gauche se doit d’être très active, de distribuer des tracts, de proposer leur alternative propre, et de construire une organisation – même s’il existe des problèmes pratiques pour mettre ses idées sous forme écrite puisque tous les magasins sont fermés.”

    Le Comité pour une Internationale Ouvrière appelle:

    • Pour des actions de masse de la part des travailleurs, y compris une grève générale, pour le renversement immédiat de Moubarak et de ce régime pourri et brutal.
    • Pour l’obtention des droits démocratique immédiatement, avec le droit de se rassembler, de faire grève et de s’organiser dans des syndicats indépendant et démocratiques.
    • Pour l’élection de comités démocratiques des masses en lutte, pour se défendre contre la répression d’Etat, dans les lieux de travail, les quartiers, les écoles et les universités, reliées entre eux aux niveau régional et national, pour élargir et organiser la résistance
    • Pour des comités de base des policiers et soldats, au côté des masses et purgés des officiers et de la hiérarchie
    • Non au sectarisme – Pour l’unité de tous les travailleurs au-delà des lignes religieuses
    • Aucune confiance envers un nouveau régime ‘d’unité national’ basé sur les intérêts de la classe dirigeante et de l’impérialisme
    • Pour l’élection immédiate et libre vers une assemblée constituante révolutionnaire – Pour un gouvernement de la majorité des travailleurs et des travailleurs ruraux
    • Pour un salaire minimum, la garantie d’avoir un travail, un programme massif de construction de logements et de développement de l’enseignement et des soins de santé
    • Pour la fin du blocage égyptien de Gaza – Pour l’auto-détermination de la Palestine et pour l’unité des travailleurs et des actions de masse pour renverser les dictateurs de la région
    • Pour la nationalisation des grandes compagnies égyptiennes, des banques et des secteurs principaux de l’économie et leur planification démocratique pour satisfaire les besoins des masses et non de l’élite
    • Pour une Egypte socialiste et une confédération socialiste de la région, sur une base volontaire et égalitaire

  • STOP à la terreur d’Etat israélienne

    L’acte de piraterie internationale de l’armée israélienne dans les eaux internationales contre les convois d’aide humanitaire en route vers Gaza est connu. Dans cette petite région, un million et demi de Palestiniens vivent enfermés dans une prison à ciel ouvert verrouillée par le régime israélien.

    Article tiré de l’édition d’été de Lutte Socialiste

    Protestations après une répression sanglante

    Le meurtre de neuf militants humanitaires par l’armée israélienne a entraîné de grandes manifestations, en Turquie et ailleurs dans le monde. Une fois de plus, le Conseil de Sécurité de l’ONU a suivi la ligne américaine et a refusé d’approuver une résolution condamnant les actes du gouvernement israélien. En lieu et place de cela, il n’y a eu qu’un appel à une ‘‘enquête impartiale’’ sur ces meurtres…

    Au Parlement Européen, l’eurodéputé marxiste Joe Higgins a déjà très clairement répondu à cela: “Ce qui s’est passé est parfaitement clair: il s’agissait d’un acte de piraterie dans les eaux internationales.’’ Joe a ainsi réagi dans une polémique qui l’a opposé à l’ambassadeur américain auprès de l’Union Européenne qui refusait de condamner l’armée israélienne. Les 700 participants à ce convoi humanitaire n’avaient pour seul objectif que d’aider la population gazaoui, une population assiégée depuis maintenant quatre ans. Le convoi humanitaire ne représentait aucune menace pour Israël et les militants n’étaient pas armés. Ils ne voulaient qu’apporter des matériaux de construction et de l’aide à la population, une nécessité flagrante puisque depuis la destruction de nombreuses maisons par l’armée israélienne en 2009, aucune reconstruction n’a pu être possible. Environ 15.000 maisons avaient alors été détruites, en plus des centaines de morts et des milliers de blessés. Le blocus de Gaza a poussé le taux de chômage au-delà des 50%. Selon la Banque Mondiale, 90% de l’eau disponible à Gaza n’est pas potable et 70% de la population dépend de la charité pour survivre. Ce nouveau bain de sang montre jusqu’où l’Etat israélien est capable d’aller afin d’assurer le maintien du blocus de Gaza.

    Les puissances capitalistes les plus importantes ont refusé de condamner cette nouvelle violence. Les puissances impérialistes et les élites locales corrompues sur lesquelles se basent les impérialistes au Moyen-Orient ne sont guidées que par leurs seuls intérêts : l’accès aux matières premières, les positions stratégiques et le prestige. Pour cela, les droits de la population doivent s’effacer, de façon extrêmement brutale dans le cas de la population palestinienne.

    Stop à l’oppression

    Les membres du Comité pour une Internationale Ouvrière ont participé aux actions de protestations partout où ils sont présents, y compris aux Etats-Unis, au Liban et même en Israël, où quelques centaines de manifestants ont protesté contres les actes violents de leur gouvernement, contre le siège de Gaza ainsi que contre l’occupation des territoires palestiniens en Cisjordanie.

    Tnua’t Maavak Sozialisti (Mouvement de Lutte Socialiste, notre organisation-sœur en Israël) a notamment affirmé dans sa déclaration :

    ‘‘Le gouvernement israélien refuse cyniquement de reconnaître la moindre responsabilité. Nous n’avons pas besoin d’une ‘commission d’enquête’ pour comprendre que les dirigeants de l’armée et du gouvernement sont responsables du meurtre de plusieurs activistes.

    ‘‘Plusieurs médias (israéliens) tentent de nous faire croire que les soldats ont été attaqués après que des ‘‘objets’’ aient été jetés des bateaux en leur direction. Les soldats de l’IDF n’avaient toutefois aucune raison d’être dans les environs. En réalité, l’armée a été utilisée pour réprimer le droit de protester.

    ‘‘Les ministres, les généraux et leurs amis parmi les journalistes essaient de dévier l’attention de la politique d’agression israélienne. Le gouvernement de Bibi-Barak-Lieberman mène une politique de destruction et d’oppression avec le siège et l’occupation de Gaza ainsi qu’en stimulant des sentiments racistes contre la population arabo-palestinienne en Israël. Ce gouvernement est belliqueux et l’oppression des Palestiniens nuit également aux intérêts des simples Israéliens.

    ‘‘Nous affirmons que la seule réponse à l’horrible catastrophe du conflit israélo-palestinien repose sur la construction d’un large mouvement social d’Israéliens et de Palestiniens qui unisse juifs et arabes dans des actions communes contre les instigateurs de la politique de diviser-pour-mieux-régner, contre l’occupation et le siège ainsi que contre chaque forme d’oppression et de discrimination. Un tel mouvement doit défendre un programme de droits nationaux et démocratiques, l’égalité de chacun et le renversement des élites capitalistes régionales corrompues.’’

    Construire un mouvement de masse

    Chaque pas en avant important dans l’histoire de la lutte palestinienne était le résultat d’une mobilisation active des masses palestiniennes, comme lors de la première Intifada mais aussi, plus récemment et à plus petite échelle, avec l’action de masse qui a temporairement brisé le blocus à la frontière de Rafah.

    Pour les masses palestiniennes, un mouvement des travailleurs et des pauvres à Gaza et en dehors est la seule façon d’aboutir à un réel changement. Un tel mouvement est non seulement la seule force capable de briser le blocus, mais cela aurait également un impact régional tout en constituant une base pour lutter ensemble pour la libération et contre le capitalisme et la barbarie.

    • Stop au blocus israélien de Gaza. Pour le retrait immédiat de l’armée israélienne des territoires palestiniens
    • Pour une lutte massive des Palestiniens sous leur propre contrôle démocratique et pour une véritable libération nationale
    • Pour des organisations ouvrières indépendantes en Palestine et en Israël
    • Aucune confiance envers les gouvernements capitalistes ou l’ONU
    • Pour la solidarité des travailleurs du Moyen-Orient et internationalement avec la lutte palestinienne
    • Pour une lutte pour le socialisme démocratique en Palestine, en Israël et dans le reste du Moyen-Orient, avec garantie des droits démocratiques de toutes les minorités nationales.
  • Construire le CIO : diffuser les idées socialistes à travers le monde

    La crise capitaliste conduit à un intérêt croissant pour les idées et les campagnes socialistes du CIO

    A la mi-juillet s’est déroulée, à Gand, l’école d’été du CIO. Cette semaine très réussie a réuni plus de 400 participants. La dernière session de discussion était consacrée à la construction du Comité pour une Internationale Ouvrière, dans cette période de crise mondiale économique et politique.

    Rapport de l’école d’été du CIO par Michael O’Brien, Socialist Party (CIO-Irlande)

    La session a débuté par un montage vidéo consacré aux récents mouvements de protestations qui ont pris place sur tous les continents, et auxquels le CIO a activement participé, et en a même initié certains. Niall Mulholland, du Secrétariat International du CIO, a introduit la discussion, en résumant les expériences de différentes sections au cours de l’année écoulée, en parlant de leurs percées mais également des défis auxquelles elles ont dû faire face.

    La plupart des sections du CIO ont connu une croissance de leurs effectifs pendant l’année passée. Malgré l’ampleur de la crise et l’absence d’une alternative claire pour les travailleurs, Niall a souligné qu’il serait une erreur de faire un lien automatique entre le déclenchement d’une récession et le fait que des jeunes et travailleurs y répondent en tirant immédiatement des conclusions socialistes. En général, la conscience politique tend à être en retard sur les évènements. La précédente période de domination idéologique néolibérale, les obstacles pratiques que constituent les directions syndicales de droite et l’absence d’une alternative politique de gauche à une échelle de masse ont été autant d’éléments qui ont constitué un frein pour le développement d’une réponse militante plus active de la part des travailleurs et des jeunes. Cela étant dit, les évènements poussent clairement une grande partie de la jeunesse et des travailleurs à entrer en opposition face au système, et il existe une couche qui se radicalise de plus en plus et qui est attentive aux idées du socialisme et du Comité pour une Internationale Ouvrière.

    Toutes les sections du CIO ont fait l’expérience d’une accélération du rythme de leur activité ces derniers mois, car les sujets sur lesquels se battre et faire campagne ne manquent pas. L’année dernière a aussi vu un renouveau de l’activité du CIO dans des endroits comme l’Espagne, le Portugal et Taïwan. ControCorrente, en Italie, a rejoint le CIO, le Mouvement pour le Parti Socialiste fait campagne pour construire le CIO au Québec,…

    Niall s’est particulièrement concentré sur le développement du CIO en dehors de l’Europe. Le CIO est actif dans des pays tels que la Malaisie ou encore la Bolivie. Au Brésil, la section du CIO a obtenu un grand succès lors de sa fusion avec un autre groupe de gauche pour former Liberté, Socialisme et Révolution. Des discussions et une collaboration avec d’autres groupes de gauche voient le jour dans des pays variés, y compris en Turquie.

    Les socialistes rencontrent des situations difficiles

    Niall a aussi fait état que, dans certaines parties du monde comme au Sri Lanka et au Nigéria, la période à laquelle les socialistes sont confrontés est actuellement très difficile à cause des guerres, de l’oppression nationale, d’une généralisation extrême de la pauvreté et d’un recul des luttes de masse. Les sections du CIO au Sri Lanka (le Parti Socialiste Unifié) et au Nigéria (le Mouvement Socialiste et Démocratique) ont accompli le miracle de maintenir leurs forces, construites à travers des années en développant leur politique et leur programme, ce qui les place dans une bonne position pour une croissance substantielle lorsque la situation leur sera plus favorable.

    Un des développements les plus frappants cette année a été celui rencontré par le CIO au Pakistan avec le Mouvement Socialiste du Pakistan, qui a récemment pu tenir une école de cadres rassemblant plus de 100 personnes. Etant donné la pauvreté énorme au Pakistan et le manque d’infrastructures, la construction d’une organisation socialiste dans ces conditions relève de l’exploit. Cette section a aussi vu la fédération syndicale qu’elle a lancée, la Fédération Progressiste des Travailleurs du Pakistan, augmenter son nombre de membres pour atteindre les 500.000 membres.

    Niall a aussi évoqué les différentes activités dans lesquelles les sections européennes du CIO ont été impliquées, ce qui a été développé plus en détail dans la discussion. Le rôle pratique qu’une organisation internationale comme le CIO peut jouer a été démontré par la semaine de solidarité et d’action initiée par Joe Higgins, notre député européen, et soutenue par le groupe de la Gauche Européenne du Parlement Européen en juin, contre les attaques d’austérité qui pleuvent sur la classe ouvrière grecque. En conséquence, les sections du CIO ainsi que d’autres partis de gauche ont organisé des protestations, des piquets de grève et des meetings dans toute l’Europe.

    Avec la croissance numérique du CIO se présente le défi de développer politiquement et organisationnellement des camarades expérimentés pour qu’ils participent et mènent des luttes dans leur quartier, leur lieu de travail ou d’étude.

    Dans la discussion qui a suivi, le camarade Brett des Etats-Unis a fait état d’une série d’interventions que Socialist Alternative (CIO-USA) a fait dans les luttes récentes, notamment avec une grève des infirmières à Philadelphie, avec le mouvement anti-guerre contre l’envoi de troupes en Afghanistan par Obama et avec le « Grassroots Education Movement », qui a été mis en place en réponse à la privatisation à venir de l’éducation.

    Christel, de ControCorrente (CIO-Italie) a parlé du travail avec les postiers en lutte contre la privatisation. Suite à l’initiative d’un jeune camarade dans la petite ville d’Abruzzo, une manifestation contre l’extrême droite de Forza Novo a eu lieu.

    Gary a parlé du travail du Socialist Party en Irlande du Nord, où les problèmes du sectarisme compliquent pas mal l’activité de nos camarades. Néanmoins, les effets des coupes sociales se font ressentir et notre parti a récemment été à l’initiative d’une manifestation réussie à Belfast, avec le soutien de nombre de syndicats. Ce genre de travail a créé les bases pour le développement de nouvelles sections du Socialist Party.

    Kyriakos, de Xekinima (CIO-Grèce), a décrit le travail des camarades dans l’alliance de gauche Syriza, ainsi que notre travail dans d’autres secteurs, et particulièrement parmi la jeunesse. Xekinima a traversé une période de croissance rapide dans les années récentes et développe ses efforts pour former plus de cadres.

    Greg, du Socialist Party (CIO-Angleterre & Pays de Galles), a montré des chiffres prouvant la croissance dans le nombre de nouvelles adhésions ces derniers mois, particulièrement remarquable parmi les syndicalistes. Une nouvelle dynamique a permis au parti de refonder des sections dans plusieurs villes. Le week end ‘‘Socialisme 2010’’ en novembre, les campagnes contre les coupes budgétaires dans les quartiers et les syndicats seront les principaux axes de travail du parti.

    Ioshe du Mouvement de Lutte Socialiste (CIO-Israël) a parlé de la participation des membres du CIO dans les mouvements de protestation contre l’attaque contre la flotille d’aide humanitaire à Gaza, ainsi que contre les colonies en Cisjordanie. Les camarades ont aussi gagné de nouveaux membres suite à leur participation aux campagnes pour les droits des LGBT en Israël.

    La lutte pour le socialisme en Inde, en France et en Belgique

    Vishwa, de la Nouvelle Alternative Socialiste (CIO-Inde) est intervenu sur le travail des camarades contre les activités des compagnies minières, qui se sont vues offrir par le gouvernement les ressources naturelles indiennes et qui tire du profit de l’exploitation effrénée des travailleurs et de l’environnement. Le livre du CIO, Le Marxisme dans le monde d’aujourd’hui, a été traduit dans une quatrième langue en Inde, afin d’apporter aux idées socialistes un profil encore plus grand dans le sous-continent.

    Alex de la Gauche Révolutionnaire (CIO-France), a décrit comment la section française a participé au Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA), où les camarades font campagne pour que celui-ci adopte un programme socialiste. Le CIO en France mène également des campagnes antiracistes et pour les droits des écoliers.

    Bart du Linkse Socialistiche Partij / Parti Socialiste de Lutte (CIO-Belgique) a décrit comment le CIO développe la formation socialiste de ses membres après une croissance significative du parti. Alors qu’il n’y a pas eu de lutte généralisée en Belgique depuis une certaine période, il y a eu quelques mouvements importants de la jeunesse et des luttes industrielles isolées auxquelles les membres du CIO ont apporté leur soutien.

    Pour clore l’école d’été 2010, Tony Saunois du Secrétariat International a souligné qu’il s’agissait de la plus grande école d’été depuis plus de 20 ans, ce qui est une autre indication des progrès que le CIO a fait pendant l’année passée. Avec cette croissance arrive aussi le défi de former des cadres – ce qui peut être fortement accéléré dans le contexte de la crise économique et l’augmentation du tempo de la lutte des classes, ce qui permettra à de nouveaux membres du CIO d’acquérir rapidement, à plus ou moins court terme, une expérience vitale.

    Tony a aussi souligné l’importance de l’appel de la Confédération Européenne des Syndicats pour des actions à l’échelle européenne le 29 septembre prochain contre les coupes sociales et les plans d’austérité. A cette date, une grève générale aura également lieu en Espagne. Le CIO en Europe participera aux grèves et aux manifestations qui se tiendront ce jour ci, là où ce sera possible.

    L’école d’été se conclut sur les notes de l’Internationale, chantée dans plus de douze langues, alors que les participants se préparent pour les luttes futures. A cette date, il y aura également une grève générale en Espagne. Le CIO, à travers l’Europe, va participer aux grèves, manifestations et diverses initiatives qui auront lieu ce jour-là, partout où cela nous sera possible.

    Cette école d’été du CIO a été clôturée par l’Internationale, chantée dans une douzaine de langues différentes, avec un grand enthousiasme de la part des participants, qui sont prêts pour les luttes à venir.

  • Relations commerciales Etats-Unis / Union Européenne : Echange entre l’ambassadeur américain et Joe Higgins

    Ce premier juin, dans la Commission du Parlement Européen consacrée au commerce international, l’eurodéputé Joe Higgins (CIO-Irlande) s’est adressé à l’ambassadeur américain auprès de l’Union Européenne. Il y a abordé la crise économique actuelle et le rôle de l’administration Obama. Voici la vidéo de cet échange, ainsi que la traduction de cette discussion en français.

    Joe Higgins :

    ‘‘Merci Président.

    ‘‘M. l’Ambassadeur, vous avez dit qu’un des plus graves problèmes sur base de laquelle nous, je veux dire la génération actuelle, serons jugés, est la manière dont nous nous occuperons de la crise économique et financière actuelle.

    ‘‘Cependant, comme vous le savez, ce désastre économique a été précipité par la spéculation et par la soif de profit téméraires de la part d’institutions financières américaines et internationales, qui ont été facilitées par la folie de la dérégulation et de la libéralisation mise en place coûte que coûte par les administrations américaine et européenne.

    ‘‘Et donc, que va faire l’administration Obama quant à cette situation, si l’on prend en compte que des hedge funds surpuissants sont toujours en train de mener le même type d’activités sur les marchés financiers et sur le plan international ?

    ‘‘Ou en train de spéculer, par exemple, contre le peuple grec et exigeant un prix énorme de la part de la classe ouvrière grecque qui est en train de payer pour les superprofits engrangés par la spéculation de ces mêmes personnes.

    ‘‘La plupart de ces requins sont basés sur la côte Est des Etats-Unis, les hedge funds, et plus à Londres.

    ‘‘Donc, que pense faire votre administration contre ce que j’appelle la dictature de ces hedge ffunds et de ces institutions financières ?

    ‘‘Deuxièmement, vous avez mentionné le fait que le libre-échange était considéré avec suspicion par la population laborieuse des Etats-Unis. Les accords de libre-échange.

    ‘‘Et l’instinct de la classe ouvrière américaine est ici correct, parce que les accords de libre-échange, selon moi, n’ont pas été faits dans leur intérêt, mais dans l’intérêt des grandes corporations internationales qui bénéficient du libre-échange, forçant par-là une spirale vers le bas des salaires et des conditions de travail pour la population laborieuse.

    ‘‘Ceci s’est très certainement vérifié aux Etats-Unis, comme ailleurs dans le monde.

    ‘‘Maintenant, puis-je vous demander, M. l’Ambassadeur – comme vous le savez, dans les années 60, 70, et 80, les administrations américaines ont soutenu pratiquement chacune des dictatures puantes qui ont émergé en Amérique latine et ailleurs, au nom de la facilitation du commerce, avec un immense profit pour les grandes entreprises américaines.

    ‘‘Pourtant, qu’est-ce qui a changé dans l’approche de l’administration Obama par rapport au commerce ?

    ‘‘Le commerce est-il toujours une activité « neutre », qui ne doit pas se mêler des Droits de l’Homme et autres ?

    ‘‘Ou bien, qu’est-ce qui a réellement changé avec la nouvelle administration ?

    ‘‘Et si quelque chose a réellement changé, pourquoi votre administration continue-t-elle toujours à accorder un soutien économique et un traitement énormément favorables à des Etats qui violent les Droits de l’Homme à la face du monde entier, tels qu’Israël, et que sera le résultat du désastre et du massacre de ces gens qui apportaient de l’aide humanitaire à Gaza ?

    ‘‘Et ceci va-t-il causer une quelconque modification de vos relations commerciales avec Israël, par exemple ?

    ‘‘De la même manière, avec le Honduras, comment justifiez-vous le maintien de relations ouvertes avec un gouvernement boiteux, provenant au départ d’un coup d’Etat ?

    ‘‘Et pour terminer, MM. le Président et l’Ambassadeur : vous vous êtes référés au désastre de la marée noire dans le Golfe du Mexique, qui constitue bien entendu une énorme source d’inquiétude pour le peuple américain, pour les travailleurs, pour les écologistes, pour tout le monde.

    ‘‘Quelles en sont les implications pour le forage pétrolier à grande profondeur, après ce désastre ?

    Réponse de William E. Kennard, Ambassadeur des Etats-Unis auprès de l’Union Européenne :

    ‘‘M. Higgins, vous avez soulevé un certain nombre de problèmes et posé un certain nombre de questions.

    ‘‘Une sur la régulation financière, et vous avez émis le commentaire que les Etats-Unis sont responsables de la crise financière.

    ‘‘Je pense que nous avons passé le stade où nous pouvons chercher à savoir sur qui mettre la responsabilité de qui a causé cette crise et de qui ne l’a pas causée.

    ‘‘Vous voyez, nous y sommes tous ensemble, et on doit résoudre cela tous ensemble.

    ‘‘Une anecdote familiale – mon père était un petit entrepreneur. Il avait un petit partenariat. Mon père est un Afro-Américain, et son partenaire était un Blanc. Et je me souviens d’une époque, où ils avaient du mal, ils avaient des difficultés avec leur entreprise et ils se demandaient comment ils pourraient rentrer dans leurs frais. Et mon père s’est tourné vers son partenaire et lui a dit « Tu sais, on n’est pas arrivé ici sur le même bateau, mais maintenant, on est tous les deux dans la même galère ».

    ‘‘Voilà où nous en sommes. Je pourrais dire que la crise de l’Eurozone est un produit de l’Europe, mais en quoi cela va-t-il nous aider ?

    ‘‘En quoi cela va-t-il nous aider à résoudre le problème ? La réalité, est que nous sommes tous emmêlés dans un réseau financier mondial et interconnecté, et que nous devons travailler à cela tous ensemble. Vous avez aussi dit que nous n’avons rien fait pour réformer la finance.

    ‘‘Je prends assez mal ceci. Nous sommes très près de faire passer au Congrès Américain une des plus importantes réformes de nos lois financières depuis la Grand Dépression. Nous en sommes très près.

    ‘‘Et il est très important que, tandis que nos lois passent à travers le Congrès Américain, il y ait une coordination étroite avec l’Union Européenne. Parce que, à nouveau, ceci est un système interconnecté.

    ‘‘M. Abory était à Washington et à New York récemment, pour justement parler de cet enjeu, et je suis conforté dans l’idée que nous pouvons agir ensemble – si pas en harmonie, au moins en coordination au fur et à mesure que notre réforme financière sera mise en place.

    ‘‘De même, je ne suis pas du tout d’accord avec votre thèse selon laquelle la politique de libre-échange ne prend pas en compte les enjeux sociaux et environnementaux.

    ‘‘Le Président Obama a mené campagne autour d’une plate-forme visant à s’assurer que les négociations commerciales soient sensibles aux enjeux sociaux et environnementaux.

    ‘‘Il a donné une directive à l’ensemble du gouvernement, et c’est quelque chose auquel nous pensons chaque jour au gouvernement des Etats-Unis.

    ‘‘Israël, je m’excuse, je n’en ai pas parlé. Hier, nous avons tous été témoins d’une tragédie en haute mer autour d’une tentative d’amener un convoi d’aide humanitaire à Gaza. Le Président a tout de suite émis une déclaration.

    ‘‘Je ne sais qu’en dire de plus, à part que, avant de tirer une quelconque conclusion, il nous faut bien nous renseigner sur ce qui s’est passé.

    ‘‘Je pense qu’à chaque fois que qu’une telle chose se produit, il est important de comprendre ce que sont les faits, ce qui s’est réellement produit, et ensuite d’agir en conséquence.

    Joe Higgins MEP:

    ‘‘Un acte de piraterie dans les eaux internationales, M. l’Ambassadeur, ce qui s’est produit est assez clair.

    Ambassadeur américain:

    ‘‘Eh bien, nous verrons. Tous les faits ne nous sont pas encore parvenus.

  • Des marxistes protestent aussi en Israël: Stop au blocus!

    Ci-dessous, nous publions une déclaration raccourcie éditée le 31/05/2010 sur le site internet de Tnua’t Maavak Sozialisti / Harakat Nidal Eshtaraki (CIO-Israël):) concernant le meurtre de militants de la flottille chargée d’aide humanitaire qui se dirigeait vers Gaza.

    Déclaration de Tnua’t Maavak Sozialisti / Harakat Nidal Eshtaraki (Mouvement de Lutte Socialiste, CIO-Israël)

    Voici une première réponse du Mouvement de Lutte Socialiste (CIO) suite au meurtre de plusieurs participants au convoi d’aide international à destination de la Bande de Gaza, la nuit dernière. Nous appelons chacun à participer aux manifestations et aux protestations organisées en réaction.

    [box type=”shadow” align=”alignright” width=”100″]
    A lire également:

    [/box]

    Ce lundi, près de 20 militants ont été tués et d’autres blessés au cours d’un assaut violent organisé par le gouvernement israélien de droite contre la flottille internationale qui apportait de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza. Comme lors d’autres protestations, les militants n’avaient en aucune façon mis en danger la sécurité de résidents israéliens. Cette fois-ci, des hélicoptères ont été envoyés en dehors des territoires officiels d’Israël, de même que des navires de guerre, des commandos et 200 militaires.

    Le gouvernement israélien a cyniquement décliné toute responsabilité. Mais nous n’avons besoin d’aucune commission d’enquête pour comprendre que la responsabilité de ces meurtres repose sur les épaules des ministres. Il existe un blackout médiatique en Israël, la presse raconte que les soldats ont été attaqués sur un bateaux avec divers ‘objets’. Mais ces soldats n’avaient rien à faire là-bas. En réalité, l’armée avait été envoyée réprimer le droit de protester.

    Les ministres, leurs généraux et leurs journalistes essayent de dévier l’attention de la politique d’agression, de destruction et d’oppression de Bibi – Barak – Lieberman, qui comprend le siège et l’occupation de Gaza ainsi que les incitations au racisme contre la population arabo-palestinienne en Israël. Le gouvernement israélien qui opprime les Palestiniens attaque aussi les intérêts à long terme des résidents d’Israël.

    [Le Mouvement de Lutte Socialiste en Israël proclame que] la seule façon de sortir de ce désastre et des autres horreurs du conflit israélo-palestinien est la construction d’un large mouvement social des Israéliens et des Palestiniens, qui unisse les juifs et les arabes, contre la politique de diviser-pour-mieux-régner, contre le siège et l’occupation, contre toutes les oppressions et les discriminations, [et qui plaide pour] le respect des droits démocratiques des minorités, pour que tous soient égaux, et pour le renversement des élites capitalistes corrompues de la région.

    Le Mouvement de Lutte Socialiste soutient l’extension de la lutte pour le socialisme et [va participer et appeler à participer] aux manifestations de protestations de Tel-Aviv, Jérusalem et Haïfa derrière les slogans et chants suivants :

    • Protester, ce n’est pas du terrorisme! Pour la fin du siège de Gaza !
    • La sécurité ne se construit pas sur les cadavres des manifestants !
    • La menace de la sécurité vient du gouvernement raciste!
    • Les actes de l’Etat israélien ne rendent pas nos vies plus sûres, c’est un désastre. Le gouvernement israélien ment.
    • Non au meurtre des manifestants !
    • Non à l’utilisation de soldats contre les civils !
    • Non au couvre-feu!
    • Les juifs refusent d’être les ennemis des Palestiniens !
    • Plus de moyens pour l’enseignement, pas pour le siege et l’occupation !
    • Pour la rehabilitation des services publics et des soins de santé, non à la guerre !
    • Pour la fin du siege, le démantellement des colonies, le renversement du Mur, la fin de la séparation et du racisme !
    • Pour la fin de l’occupation !
  • Liège: Protestations contre l’aggression israélienne

    Hier, des manifestations ont eu lieu partout à travers le monde en réaction face à l’attaque militaire brutale et sanglante d’un commando de l’armée israélienne contre un convoi d’aide humanitaire en direction de Gaza. A Liège aussi, une centaine de personnes se sont rassemblées place du Perron, devant l’Hotel de Ville. Après une courte prise de parole, une délégation est allée remettre un texte de protestation au conseil communal.

  • Bruxelles: Protestations contre l’aggression israélienne

    Hier, des manifestations ont eu lieu partout à travers le monde en réaction face à l’attaque militaire brutale et sanglante d’un commando de l’armée israélienne contre un convoi d’aide humanitaire en direction de Gaza. A Bruxelles aussi, ce sont plusieurs centaines de personnes qui se sont rassemblées devant le ministère des affaires étrangères pour ensuite partir en manifestation spontanée dans les rues de Bruxelles. Des militants du PSL-LSP y sont intervenus et ont vendu plusieurs journaux. Voici quelques photos :

    Eric

0
    0
    Your Cart
    Your cart is emptyReturn to Shop