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  • Birmanie : Le désastre du cyclone. Les richesses et les privilèges passent avant l’aide.

    Birmanie : Le désastre du cyclone.

    Les effets effroyables du cyclone qui a frappé le vaste delta du fleuve Irrawaddy ont choqué partout à travers le monde. Mais le régime militaire s’avère incapable d’aider les victimes. La dévastation ainsi que le nombre de décès et de blessés sont probablement plus grands que ceux qui ont été entraînés par le tsunami de 2004.

    Keith Dickinson, Socialist Party (section de notre internationale en Angleterre et Pays de galles).

    Jusqu’ici, il est possible que 100.000 personnes aient décédé et 1,5 million de personnes sont en danger. Les travailleurs et les paysans luttaient déjà avant simplement pour survivre sous les privations et la répression du régime militaire, maintenant, dans les secteurs frappés par le cyclone, des millions de personnes souffrent également du manque d’abri, de la famine et de la propagation de maladies.

    Dans ce pays grand producteur de riz, ce sont les principales régions productrices de riz qui ont été frappées. Dans les médias britanniques, il a été dit que certaines des installations gazières et pétrolières en mer d’Andaman pourraient également avoir été endommagées par le cyclone, ce qui pourrait grandement préoccuper les généraux au pouvoir.

    Ces généraux ont principalement été financés par l’exploitation des gisements de gaz naturel et d’autres ressources minérales. L’année dernière, la Thaïlande voisine a importé de Birmanie pour 2,7 milliards de dollars en gaz naturel, ce qui représente 45% de toutes les exportations birmanes. L’investissement thaï en Birmanie s’est élevé à 1,34 milliards de dollars et continue d’augmenter.

    Le militant des droits de l’homme Benedict Rogers a écrit avant l’arrivée du cyclone dans la revue Far East Economic Review que le premier ministre thaï a décrit les généraux, après avoir conclu une nouvelle affaire d’investissement avec eux en mars, comme de « bons bouddhistes » parce qu’ils « ont médité », en dépit de leur massacre de moines bouddhistes en septembre passé.

    En février, le dirigeant de la Karen National Union, le plus grand groupe ethnique armé birman, a été assassiné en Thaïlande sur les ordres du régime birman, probablement avec l’assentiment des autorités thaïes. En mars, la police thaïe a fait des raids contre 14 organisations Karen en exil en Thaïlande.

    Ainsi le gouvernement thaï a « améliorer ses relations » avec les généraux birmans. Les gouvernements occidentaux l’incite maintenant à convaincre les généraux – qui résistent énergiquement à toute intervention extérieure – de permettre à la charité des travailleurs occidentaux d’organiser l’aide et la distribution de vivres désespérément requise.

    Il est intéressant de noter que le ministre des affaires étrangères thaï a déclaré que les généraux birmans sont inquiets de l’aide occidentale après les invasions de l’Irak et de l’Afghanistan. En septembre passé, un des commentateurs du gouvernement birman a condamné les « puissances globales qui pratiquent l’hégémonisme ». La nouvelle prétendue « constitution » birmane, conçue pour préserver la dictature militaire, comprend des clauses qui interdisent le stationnement de troupes étrangères en Birmanie.

    Les gouvernements du monde condamnent le manque de démocratie du régime birman, mais ce ne sont pas les intérêts des birmans qui les préoccupent, mais bien les efforts des généraux birmans pour limiter l’influence et l’exploitation des puissances impérialistes afin de défendre leurs propres richesses et privilèges. Tandis que les différents gouvernements invitent leurs propres travailleurs – déjà frappés par la crise du crédit – à faire des dons pour organiser l’aide après le passage du cyclone, ils courtisent le régime birman.

    La Russie fournit de la formation nucléaire, de la technologie, de l’équipement et des armes à la Birmanie. L’Inde continue à investir et le Japon possède 19,3% du gisement de gaz naturel de Yetagun, entre autres projets importants, alors que Singapour est l’endroit préféré des généraux pour encaisser l’argent, l’investir, faire des achats, obtenir des soins médicaux, instruire leurs enfants et faire leurs accords sur les armes.

    Chine

    Le monde des entreprises de Grande-Bretagne, des USA et de France investissent eux aussi en Birmanie, mais c’est la Chine qui est le principal appui économique des généraux birmans, et le pays leur donne accès à l’Océan Indien.

    Avant le cyclone, le secrétaire général de la fédération birmane des syndicats a déclaré: « Quand le régime était sur ses genoux en 1998, les compagnies Chevron et Total l’ont remis sur pieds. C’est la même situation maintenant. Politiquement, le régime est dans un mauvais état. Mais c’est l’argent de Chevron et de Total qui leur permet de tenir. Ainsi, c’est la politique des multinationales qui soutient le régime. »

    Le peuple birman doit se débarrasser du régime répressif ; il a démontré à de nombreuses reprises, comme en 1988 et l’année dernière, sa capacité et volonté de lutter pour surmonter tous les obstacles afin d’améliorer son sort. Mais il ne peut compter que sur l’action et l’aide internationale des travailleurs et non sur « l’aide » des gouvernements capitalistes.

    Après les dévastations causées par le cyclone, alors qu’il est urgent d’obtenir l’approvisionnement en nécessités de base pour tous ceux qui en ont besoin, il est également nécessaire de reconnaître, comme un auditeur l’a fait remarqué à une radio, que: « la résistance et les ressources des Birmans à travailler en tant que collectivité pour s’entre aider». C’est évident après deux semaines, et cela le sera encore plus en changeant de régime.

    Les profits, pas les droits de l’homme.

    Le pipeline de pétrole et de gaz naturel de Yadana passe à travers la Birmanie du Golfe d’Andaman vers la Thaïlande. Ce pipeline, dont les associés sont Total et Chevron, a entraîné le travail forcé des masses ainsi que d’autres abus des droits de l’homme commis par l’armée sous l’œil bienveillant des multinationales. Durant les protestations pro-démocratiques de l’année dernière sous la conduite des moines bouddhistes et qui ont été brutalement réprimées par les généraux birmans, un porte-parole de PTTEP, un partenaire thaï de Total, a déclaré: « Les affaires continuent comme d’habitude. Je ne vois aucun impact dans un avenir proche » du malaise. « Quand nous avons un contrat avec un gouvernement, il n’importe pas vraiment de savoir quel gouvernement c’est. »


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  • Des études de plus en plus chères… Bientôt uniquement pour les plus riches ? Plus de moyens publics pour l’enseignement!

    Des études de plus en plus chères…

    Bientôt uniquement pour les plus riches?

    Selon une étude de la FEF (Fédération des Etudiants Francophones), un étudiant kotteur paie en moyenne de 10.000 à 12.000 euros par an pour ses études. Les autres s’en sortent avec « seulement » 6.000 à 7.000 euros par an. Alors, les études, accessibles pour tous?

    Jeroen Demuynck

    Non ? Rien d’étonnant… L’enseignement n’a pas été épargné par la gestion néolibérale des partis traditionnels et subit le choc des réductions d’investissements publics. La logique de profit domine toujours plus. En 1980, 7% du Produit Intérieur Brut étaient consacrés à l’enseignement, mais ce pourcentage n’est plus aujourd’hui que de 4,9%. Bénéficier de l’enseignement n’est plus considéré comme un droit, mais plutôt comme un « investissement » dans son propre avenir.

    C’est particulièrement perceptible au niveau des droits d’inscription. Une étude du gouvernement flamand de 1999 a établit que les étudiants universitaires payaient 355 euros d’inscription en moyenne, pour 389 euros en moyenne pour les étudiants des hautes écoles. Aujourd’hui, il est demandé 535 euros en moyenne en Flandre et, en Wallonie, le minerval est de 721 euros en moyenne (universités) ou de 530 euros (hautes écoles). Vous trouvez ça cher ? Attendez de voir l’avenir que nous réserve un enseignement à la sauce anglo-saxonne, aux coûts d’inscription de plusieurs milliers d’euros…

    A côté des droits d’inscription, pour de nombreux étudiants, un kot est tout simplement devenu impayable. Selon l’étude citée précédemment, un kot coûtait en Flandre de 1.859 à 1.945 euros par an il y a dix ans. Aujourd’hui, il s’agit de 3.120 euros en moyenne et de 3.150 euros en Wallonie. Et c’est encore plus cher à Bruxelles. Et on n’a pas encore parlé des livres, des transports, de la nourriture, de l’ordinateur et d’internet, des stages…

    De plus en plus d’étudiants sont obligés de « bricoler à côté » pour payer leurs études. Très souvent, ils se retrouvent dans des jobs ultra-flexibles et sous-payés, ce qui mine non seulement leurs chances de réussite, mais aussi les conditions de travail des autres travailleurs. La pression financière pour suivre des études a beaucoup de conséquences : une étude a établi en France que 40.000 étudiants, principalement des étudiantes, payent leurs études en ayant recours à un job dans l’industrie du sexe. Il n’y a pas de chiffres disponibles pour la Belgique mais une pareille évolution est vraisemblable ici aussi.

    La seule manière de concrétiser le droit d’accès à l’enseignement est de développer les services publics sociaux au lieu de les réduire. Pour résoudre le problème de la cherté des logements, la construction d’une grande quantité de homes pour étudiants qui soient bon marché et de qualité s’impose. Grâce à une plus grande offre de kots, les prix du marché privé diminueraient aussi. Au lieu de privatiser les restaurants universitaires et de les remettre à la logique de profits du privé, il faut les développer, au lieu d’augmenter les coûts d’inscription, il faut les supprimer, et il faut instaurer un salaire étudiant pour que chacun puisse réellement avoir accès aux études.

    Pour un enseignement solide et accessible, il faut plus de moyens publics. Les ramener à nouveau à 7% du PIB serait déjà un bon premier pas dans cette direction !


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  • Augmentation des prix et crise alimentaire: Ce n’est pas notre faute, ce n’est pas à nous de payer!

    Augmentation des prix et crise alimentaire:

    Ce n’est un secret pour personne, les prix augmentent. En Belgique, le prix de l’essence a ainsi augmenté de 12% en une année, celui du pain de 13%, celui des œufs de 25%, celui du mazout de 26% et celui des spaghettis de 25% ! Les dépenses d’un ménage moyen en Belgique se sont en fait élevées de 5,2% quand on compare le premier trimestre de 2008 au premier trimestre 2007. Et rien n’indique que ces chiffres sont appelés à baisser…

    Vous le savez, ni les salaires, ni les allocations n’ont suivi cette courbe. Enfin, ça dépend pour qui. Le patron de Delhaize peut par exemple sans problème s’accommoder de la hausse des prix pratiqués dans ses magasins : il a reçu en 2007 une augmentation salariale qu’aucun travailleur ne juge réaliste pour lui-même : +25% ! Cela lui fait tout de même un salaire de 2,6 millions d’euros… Et, alors que nous devons nous serrer la ceinture sans cesse plus fortement, il est loin d’être le seul dans ce cas : le patron d’Inbev (Jupiler, Stella,…) a ainsi palpé pour l’an dernier un salaire de 4,28 millions d’euros en 2007 (+8,9%).

    Partout à travers le monde

    Partout dans le monde, c’est la même chose, la même tendance, bien qu’il y ait évidemment des différences de proportions et d’impact. Internationalement, depuis la mi-2007, les prix alimentaires ont augmenté d’environ 40% et la Banque Mondiale estime que la cherté de la nourriture est devenue un combat quotidien, un combat de survie, pour environ 2 milliards de personnes. Des « émeutes de la faim » ont pour l’instant touché une quarantaine de pays. Mais à côté de cela, des multinationales agroalimentaires comme Nestlé s’en sortent très bien. L’an dernier, le chiffre d’affaires de cette entreprise était de 66,55 milliards d’euros (+9,2%) pour un bénéfice net de 6,59 milliards d’euros (+15,8%). L’année 2008 commence assez bien aussi puisque son chiffre d’affaires a encore augmenté de 9,8% durant le premier trimestre. Pour Danone, cela se passe encore mieux : + 11,4% de chiffre d’affaires durant le premier trimestre.

    C’est dans ce fossé entre riches et pauvres qu’il faut trouver l’explication de la hausse des prix de l’alimentation. Dans les médias, on entend beaucoup parler de la croissance de la demande en Inde ou en Chine, ou encore des prétendus « bio » carburants. Mais même si ces éléments jouent un rôle, ils n’ont pas émergé d’un coup, comme ça. Ils expliquent donc difficilement la récente et rapide flambée des prix. D’autant plus que, selon l’ONG 11.11.11, il y a actuellement sur terre de quoi nourrir au bas mot 12 milliards de personnes, soit près du double de population actuelle…

    Qui est responsable ?

    La crise économique mondiale issue des Etats-Unis (la fameuse crise des « subprimes », ou crédits à hauts risques) a provoqué un effondrement des possibilités de spéculation.

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    Les protestations augmentent à travers le monde, en Afrique (ci-dessus:"A bas les affameurs du peuple!"), en Europe (ci-dessous, en France) et ailleurs.
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    Les spéculateurs, pas bêtes, se sont donc reportés sur la nourriture et les matières premières. Parce que, ça a beau être la crise, on est tous bien obligés de manger… et donc d’acheter de quoi se nourrir. Et hop, les spéculateurs ont acheté les stocks de nourriture pour s’enrichir encore plus, et tant pis si, au passage, des centaines de millions de personnes ne sont plus capables d’acheter de quoi manger. Ainsi, pour la patronne de la société ADM (une multinationale spécialisée dans la vente et la transformation de grains): "la volatilité sur le marché des matières premières présente des opportunités sans précédents". Ce n’est pas du cynisme, c’est de l’économie. De l’économie de marché, plus précisément.

    Car ici, il ne s’agit pas d’un disfonctionnement du système. Le « libre marché » a conduit à la crise des crédits (on encourageait à consommer quitte à s’endetter jusqu’au cou et au delà) et pour continuer à amasser des profits gigantesques, les coupables spéculent maintenant avec la nourriture. Doit-on laisser ces salauds continuer ? Doit-on permettre que, de crise en crise, ce soient toujours aux victimes – les travailleurs, mais aussi la planète – de payer pour que les responsables continuent à mener leur vie indécente de parasite ?

    Nationalisation sous contrôle des travailleurs et des consommateurs

    Le contrôle de la production de nourriture et de l’approvisionnement doit immédiatement être retiré des mains des spéculateurs, des négociants internationaux et des grosses compagnies agroalimentaires.

    A côté de revendications pour être capables de faire face à la hausse des prix comme une hausse importante des salaires et des allocations, le mouvement ouvrier doit exiger que ces institutions soient nationalisées pour permettre la mise en place d’un plan de distribution de nourriture à des prix raisonnables pour tous. Ces entreprises nationalisées doivent être sous le contrôle des travailleurs et des consommateurs afin que la production soit enfin orientée vers la satisfaction des besoins de la majorité de la population et non vers la soif de profit d’une minorité de capitalistes.


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  • Roumanie : Grève et victoire à l’usine Dacia !

    Des milliers de travailleurs de l’usine Dacia Renault sont partis en grève pour une augmentation de 60% de leur salaire. Après 3 semaines de lutte, ils ont réussi à obtenir environ 40% d’augmentation. Dans le quotidien « Adevarul », un journaliste a annoncé la fin du mythe des travailleurs roumains bon marché.

    Le syndicat local a déclaré que plus de 80% des 13.000 travailleurs de l‘usine Dacia de Pitest (ville du sud de la Roumanie) avaient participé à la grève. La principale revendication des travailleurs, qui gagnaient environ 285 euro par mois, était une augmentation salariale de 60%. « Nous travaillons le même nombre d’heures qu’en France mais nous sommes payés des cacahuètes », rapporte un travailleur. Le syndicat a déclaré qu’il était temps « de se battre pour les salaires comme en France ».

    Renault, le fabricant automobile français, a créé l’usine Dacia en 1999 et y produit depuis lors la Logan, la voirure la moins chère de sa gamme. Évidemment, même si l’augmentation de 60% avait été obtenue, les travailleurs auraient toujours gagné moins que leurs homologues français (qui gagnent en moyenne 2.200 euros brut par mois). Néanmoins, la revendication « de se battre pour les salaires comme en France » est très importante car c’est une tentative de surmonter les divisions entre travailleurs de différents pays. L’un des principaux slogans aux piquets tenu par les grévistes était «Unitate» (unité).

    La direction de Renault a réagi de manière très agressive en essayant d’obtenir l’interdiction de la grève par voie légale. Dans une lettre ouverte au journal « Evenimentul Zilei », le directeur général de Dacia, François Fourmont, a même menacé les travailleurs en grève de fermer l’entreprise. Fourmont a déclaré à propos des revendications salariales que « ces revendications peuvent mettre en péril le futur de l’usine, il faut prendre en compte le fait que d’ici à 2010 des usines Renault au Maroc, en Inde et en Russie seront opérationnelles et capables de produire la Dacia ».

    La menace de délocaliser la production dans un pays avec des conditions salariales plus faibles est une menace que les travailleurs d’Europe de l’Ouest connaissent bien. Durant ces derniers mois, des grandes entreprises (Ford, Nokia,…) ont délocalisé une partie de leur production en Roumanie ou ont menacé de le faire. Aux travailleurs à travers l’Europe de reprendre l’exemple de Dacia…

  • Capitalisme en crise. En route vers un tsunami économique ?

    L’économie américaine connaît une crise profonde. 86% des Américains sont convaincus que leur pays est déjà maintenant en récession économique. En mars, 80.000 emplois ont été perdus, ce qui porte le total pour les premiers trois mois de l’année à 232.000. Et ce n’est que le début de la crise.

    Le Fonds Monétaire International décrit les problèmes financiers aux Etats-Unis comme “exceptionnellement sérieux”, ce qui fait craindre “la plus grande crise financière depuis la Grande Dépression” (une référence à la crise après 1929). L’économie américaine ne devrait progresser que de 0,5% en 2008 et de 0,6% en 2009. Ces perspectives sont donc basées sur le pronnostic d’une crise de longue durée. La récession aux Etats-Unis va avoir des conséquences internationales. Pour la zone Euro, le FMI prévoit une croissance limitée à 1,4% en 2008 et 1,2% en 2009. La Chine et l’Inde seraient elles aussi touchées.

    Les conséquences de la récession économique aux Etats-Unis ne sont pas minces. 2 millions de gens risquent de perdre leur maison. En un an, le nombre d’Américains dépendant de l’aide alimentaire est monté de 26 à 28 millions. En Europe aussi, les effets de la crise commencent à se faire sentir, même si celle-ci ne touche pas encore tous les pays et ne progresse pas partout au même rythme.

    La situation est tellement grave que les prophètes du libre marché ne croient apparemment plus dans leur propre système. Ainsi, le grand patron de la Deutsche Bank, Joseph Ackerman, a plaidé pour plus d’interventions de l’Etat. En Grande-Bretagne, le gouvernement travailliste a nationalisé la banque Northern Rock afin de lui éviter une banqueroute. Les dettes et les pertes sont ainsi refilées à la collectivité ; mais, dès qu’il y aura à nouveau des parties rentables, celles-ci seront revendues aussi vite que possible au privé. Lorsque les intérêts du patronat (envers le système financier) sont menacés, le gouvernement peut nationaliser. Mais quand la revendication de nationalisation est mise en avant afin de défendre des emplois menacés, ce n’est pas « faisable »… Ici aussi, c’est le règne du « deux poids, deux mesures ». Polarisation croissante

    Le tsunami économique touche surtout les travailleurs et leurs familles. Au cours de la période de croissance économique relative de ces dernières années, le fossé entre riches et pauvres a atteint des proportions jamais connues auparavant. Cela a provoqué récemment des mouvements de résistance importants entres autres en Grèce, au Portugal, en France et en Allemagne. Cette résistance à la politique néolibérale se traduit aussi dans plusieurs pays européens par « un virage marqué à gauche » (suivant l’expression utilisée en Allemagne) avec une forte progression dans les sondages pour des formations de gauche comme Die Linke (Allemagne) ou Syriza (Grèce).

    Dans toute l’Europe, la crise du capitalisme combinée avec des mouvements de lutte massifs vont faire évoluer la conscience des travailleurs. Celle-ci était, ces dernières années, encore fortement influencée par l’effondrement du stalinisme, la campagne idéologique pro-capitaliste menée par la bourgeoisie et par la croissance économique. La radicalisation à gauche risque de ne pas être la seule tendance de la période qui vient. Il existe un grand danger de division dans la classe ouvrière, particulièrement sur base du racisme et du nationalisme.

    En tant que section d’une organisation internationale – le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) – le MAS/LSP est impliqué dans la lutte quotidienne des travailleurs et leurs familles. Nous ferons tout dans la période orageuse qui vient et dans les mouvements de lutte qui vont se produire pour aider à développer le soutien à une alternative socialiste à la misère du capitalisme.


    Pour en savoir plus :

  • Socialisme 2008

    Une rencontre enthousiaste qui a confirmé la volonté de bâtir une alternative clairement socialiste !

    Le week-end « SOCIALISME 2008 » vient juste de se terminer et les nombreuses prises de parole et discussions qui s’y sont déroulées, tant sur l’actualité que sur des sujets historiques, résonnent encore à nos oreilles. Le succès de cette rencontre restera longtemps une grande source de motivation pour l’ensemble des participants…

    C’est très probablement Virginy Prégny, membre de notre organisation-soeur française, qui a le mieux résumé le fil rouge de ce week-end : « la meilleure manière de commémorer l’anniversaire de mai 68 est de faire vivre à nouveau la nécessité du socialisme au sein des mouvements de lutte actuels. »

    Environ 200 personnes ont participé à cet évènement. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’agenda de ces deux journées était bien rempli, bien serré, et il était parfois difficile pour les participants de suivre le tout. Mais les coulisses et les pauses ont aussi été l’occasion d’aborder les différents thèmes présentés, de demander de plus amples explications à l’un ou l’autre,… Tous ces thèmes seront aussi abordés à l’avenir dans nos sections et nous publierons bientôt sur ce site des rapports de discussions, d’interventions, d’introductions,… Cependant, nous voulons avec ce court rapport faire ressortir le fil rouge du week-end.

    Mettre à nouveau le socialisme à l’ordre du jour !

    Le week-end a commencé par les interventions de quatre orateurs, en commençant par Mirre Vercoutere – une écolière activement impliquée dans la section gantoise de « Résistance Internationale » – qui a appuyé l’importance de l’implication de la jeunesse dans les luttes. Els Deschoemacker, responsable nationale de l’organisation du MAS/LSP, a ensuite parlé de la crise de l’establishment politique dans ce pays, qui trouve ses sources dans la volonté de poursuivre et amplifier la politique néo-libérale. Virginy Prégny, membre de la Gauche Révolutionnaire, a suivi et a rebondi sur cette question de la politique néo-libérale pour parler de la résistance croissante que rencontre la politique arrogante de Sarkozy.

    Le dernier orateur de ce « tour de chauffe » a été Sascha Stanicic, venu à la place de notre camarade allemande Lucy Redler qui devait être présente à la conférence du nouveau groupe de jeunes de « Die Linke » et dans lequel notre organisation-soeur en Allemagne, le SAV, veut jouer un rôle actif. Sascha nous a expliqué jusqu’à quel point l’expression de « développement vers la gauche » est centrale aujourd’hui dans la politique allemande : les revendications de gauche reçoivent beaucoup de soutien et la toute nouvelle formation « Die Linke » fait une percée dans les sondages. Mais, très certainement dans le contexte de crise économique croissante actuel, un programme clairement socialiste est absolument primordial.

    5 commissions,

    5 exemples pour aborder l’actualité des méthodes et de l’analyse socialistes

    Après cette première session plénière a suivi une première fournée de discussions en commissions plus petites, avec une grande participation des personnes présentes. Incontestablement, c’est la discussion sur la Chine qui a eu le plus de succès parmi les différents thèmes proposés. Vincent Kolo, du site internet Chinaworker.info, y a abordé la situation actuelle en Chine (le Tibet, les Jeux Olympiques, les problèmes économiques et écologiques,…) mais plusieurs aspects de l’histoire de la Chine ont aussi été pris en considération.

    La discussion portant sur la lutte contre les restructurations lancées par les multinationales et surtout sur la construction d’une gauche syndicale forte a été également fort bien suivie. Deux délégués qui possèdent une expérience sérieuse (Levi Sollie de l’ABVV/FGTB-Bayer et Rudi Dom de l’ABVV/FGTB-Agfa) y ont pris la parole au milieu d’une salle qui comprenait tant d’anciens militants que de représentants de la jeune génération qui posent leurs premiers pour s’organiser syndicalement. Il y avait là des syndicalistes des transports en commun, de l’enseignement, du secteur privé,… De quoi obtenir un échange d’expérience plus qu’intéressant.

    Au groupe de travail sur mai ’68, un grand groupe de jeunes qui voulait tirer les leçons de ces évènements a pu discuter avec des militants actifs à cette époque ou dans les années ’70. Conclusion de cet échange : un mouvement révolutionnaire est encore possible aujourd’hui, mais pour conduire un tel mouvement vers le succès, il faut une force révolutionnaire conséquente armée d’un programme socialiste.

    Il y avait enfin des commissions particulièrement intéressantes au sujet du Moyen-Orient et de l’extrême-droite. Dans la discussion sur le Moyen-Orient, des militants originaires d’Iran (avec lesquels nous avons pris ensemble l’initiative de mener des actions aux ambassades américaines et iraniennes ainsi que d’organiser une manifestation le 8 mars dans le cadre de la Journée Internationale des Femmes) étaient présents. La discussion sur l’extrême-droite, quant à elle, a bien entendu abordé notre programme et notre méthode de lutter contre le fascisme. La discussion et les questions ont principalement porté sur la situation du côté francophone avec, entre autres, la question d’un petit groupuscule néo-fasciste qui organise un rassemblement le 1er mai à Charleroi.

    Question nationale en Belgique :

    Une réponse des travailleurs est nécessaire !

    Cette première journée de « SOCIALISME 2008 » a été clôturée par un débat sur la question nationale en Belgique. Le deuxième débat qui devait initialement prendre place au même moment (au sujet du pouvoir d’achat) a hélas dû être annulé en raison de l’impossibilité de plusieurs orateurs de prendre part à la discussion.

    Le débat contradictoire au sujet de la question nationale a été organisé avec Anja Deschoemacker, du MAS/LSP, Sven Naessen (le militant syndical de Total qui est à l’initiative de la pétition pour le maintien de la sécurité sociale fédérale), Tony Van de Calseyde de B-Plus et Johan Denys de « Meervoud » (un courant nationaliste flamand de gauche). Dans ce débat intéressant, les conceptions qui se sont affrontées étaient parfois fortement éloignées les unes des autres. Tant Anja Deschoemacker que Sven Naessen ont à chaque fois remis l’accent sur le social et la nécessité de la solidarité et de l’unité des travailleurs. Par contre, l’orateur de « Meervoud » a plus mis l’accent sur l’élément flamand tandis que l’orateur de B-Plus a plus abordé les questions institutionnelles et ne s’est pas étendu sur l’aspect social de cette question.

    Nouvelles formations de gauche en Europe

    Le dimanche, la deuxième journée a été entamée par trois orateurs qui se sont succédés en abordant l’état de la gauche aujourd’hui en Europe. Alex Rouillard, de la Gauche Révolutionnaire, s’est évidemment concentré sur la situation en France et sur l’attitude de notre organisation-sœur face à l’initiative de la LCR, qui a lancé un appel pour un nouveau parti anticapitaliste. Nous participons à cette discussion, mais nous pensons que cette initiative doit être réellement organisée et qu’elle doit se baser sur le développement réel des mouvements de lutte qui prennent place en France.

    Sascha Stanicic a parlé de l’Allemagne, de « Die Linke » et du potentiel énorme pour la gauche dans ce pays. Le SAV, notre organisation-soeur allemande, est aussi actif au sein de « Die linke », mais a des critiques à faire sur cette formation, certainement dans l’ex Allemagne de l’Est où « Die Linke » est en grande partie constitué de l’ancien PDS. Là, la formation participe à différentes coalitions régionales qui signifient une politique néo-libérale contre les travailleurs, avec des privatisations et des attaques contre les condition s de travail et de vie des travailleurs.

    Pour la situation et le potentiel de la gauche en Belgique, Eric Byl a pris la parole, en abordant entre autres les actions qui se mènent autour de la baisse du pouvoir d’achat ainsi que l’indignation ressentie face aux grands salaires. Le CAP (Comité pour une Autre Politique) a été une étape importante et utile dans l’implantation de l’idée qu’un nouveau parti des travailleurs est nécessaire, mais cette initiative a perdu son dynamisme au cours des derniers mois. Le MAS/LSP reste ouvert pour engager la discussion avec d’autres sur la question de la représentativité politique des travailleurs, mais pour cette prochaine période, nous allons plus mettre l’accent dans notre travail sur le renforcement d’une force clairement socialiste.

    2e fournée de commissions :

    Encore des discussions intenses

    Il n’était pas non plus facile de se décider le dimanche pour choisir une des 5 commissions proposées. Mais, sans réelle surprise, l’assemblée la plus nombreuse a été celle qui a assisté à la discussion sur l’expérience de Liverpool en 1983-87, quand une majorité socialiste était présente au conseil communal. Une des pages parmi les plus importantes de l’histoire récente des révolutionnaires socialistes. Il faut dire aussi que nous avions la chance de compter comme orateur Tony Mulhearn, à cette époque président de la section locale du Parti Travailliste et qui se trouvait donc de se fait au devant de cette lutte. Sa contribution a été d’importance pour comprendre concrètement ce que signifie une véritable politique socialiste.

    La commission sur l’insurrection de l’île de Cronstadt, en 1921, a attiré également pas mal de monde. Ce thème est peut-être moins évident à aborder 87 années après les faits, mais il est toujours intéressant d’examiner l’histoire pour pouvoir répondre aux arguments anti-bolcheviks qui n’ont pas manqué de fleurir à l’occasion du 90e anniversaire de la Révolution russe, l’an dernier. Le principal point de cette discussion a été la nécessité primordiale de toujours replacer un événement dans son contexte. L’oppression de la révolte qui s’est développée à Cronstadt en mars 1921 n’est certainement pas le moment le plus glorieux pour les blocheviks, mais il n’existait aucune autre alternative à moins d’ouvrir la porte à la contre-révolution des monarchistes et des puissances capitalistes. Comme l’a affirmé Trotsky, il s’agissait d’une « tragique nécessité ».

    Les autres commissions abordaient des thèmes plus directement actuels. La commission sur l’Amérique Latine a été particulièrement riche, mais il faut y voir aussi le résultat d’une période assez longue durant laquelle certains membres de notre parti ont accordé, et accordent toujours, une attention particulière à la situation de ce continent en révolte. Parmi eux, certains ont eu l’occasion de prendre part à des interventions en Amérique Latine ou à l’activité qu’y ont nos sections-sœurs. La discussion au sujet de l’environnement et de la politique énergétique s’est développée autour d’une introduction sérieusement étayée de Kristof Bruyland et sur la réponse socialiste à adopter sur cette question.

    Enfin, il y avait encore une discussion sur la religion et son rôle aujourd’hui, de nouveau en présence de militants iraniens sans que cela n’ait pour autant empêcher une discussion plus globale de prendre place.

    EN AVANT !

    Le week-end a été clôturé par un meeting qui a une nouvelle fois accentué la nécessité de remettre le socialisme à l’ordre du jour. Vincent Kolo a parlé du gouffre énorme qui existe entre riches et pauvres et qui n’épargne pas la Chine. La récession économique qui se développe aux USA et ses conséquences dans le monde vont constituer un point tournant. Les actions que nous avons pu voir dans cette dernière période contre, entre autres, la diminution de notre pouvoir d’achat et pour plus de salaire sont encore survenues dans un contexte de croissance économique qui n’a pas pu empêcher que le gouffre entre riches et pauvres atteignent des proportions inconnues jusque là. Dans le contexte d’une crise économique, ce fossé se creusera de façon encore plus brutale.

    Bart Vandersteene a aussi commencé son intervention en prenant base sur le fossé grandissant entre riches et pauvres. Les riches deviennent plus riches et les profits réalisés en Bourse ont été gigantesques. Mais, dès que les choses vont mal, c’est à la collectivité de payer. Nous avons pu le voir avec les sommes faramineuses injectées par les Banques Nationales dans l’économie. Pour répondre à la crise du capitalisme, seul un projet socialiste avec un programme et une stratégie clairs sera efficace.

    Tony Mulhearn est revenu ensuite, mais cette fois en session plénière, sur l’expérience de Liverpool en 83-87 et en a expliqué les leçons les plus importantes : ce mouvement de masse (qui a par exemple connu une grève de 24 heures à Liverpool avec la participation de 100.000 grévistes ou encore une manifestation de 50.000 personnes pour défendre le conseil communal) a été uniquement possible parce qu’une direction politique consciente était présente. Mais nous ne pouvons pas créer d’îlot de socialisme dans un océan capitaliste. A Liverpool, nous avons pu traduire le socialisme en termes de logement sociaux, d’emploi, de services sociaux, de centres de détente, d’écoles de quartier,… Cela a donné un avant-goût de ce qui peut être possible, mais pour pouvoir réaliser cela de manière permanente, il nous faut un puissant parti révolutionnaire.

    Aisha Paulis est ensuite intervenue comme dernière oratrice du week-end en appelant les participants à poursuivre ces discussions et à renforcer les révolutionnaires socialistes dans leur lutte pour une société socialiste.

    Nous remercions ici une nouvelle fois l’équipe de cuisine et tous ceux qui ont aidé à faire de ce week-end « SOCIALISME 2008 » une réunion particulièrement réussie, à l’enthousiasme énorme et véritablement palpable. Le dévouement des volontaires a permis une organisation pratique particulièrement professionnelle.

    Ce week-end a encore été l’occasion de récolter du soutien, et un appel financier a notamment récolté quelques 3.000 euros. Les stands de livres et brochures ont aussi tourné à plein régime, reflétant ainsi l’atmosphère politique de cette rencontre.

    La détermination et l’enthousiasme présents à ce week-end doivent maintenant se traduire les semaines prochaines en un fonctionnement optimal de chacune de nos sections, notamment dans la poursuite de notre campagne pour plus de pouvoir d’achat.

    En avant !

    Lien:

  • SOCIALISME 2008, photos

    Jonas Van Vossole et Laurent G

    Aperçu de la salle durant la partie consacrée aux formations de gauche en Europe

    Prise de parole d’Alex Rouillard, de la Gauche Révolutionnaire, notre organisation-sœur en France

    Sascha Stanicic, du SAV, notre organisation-sœur en Allemagne

    Eric Byl, secrétaire général du MAS/LSP

    L’une des commissions du samedi

    Discussions au bar…

    … ou à l’extérieur sous le soleil

    Bart Vandersteene, durant le meeting final

    Tony Mulhearn. En arrière plan, une partie du bilan impressionnant des "47" de Liverpool

    Clôture du week-end: l’Internationale est chantée

    L’un des stands de livres et brochures

    Aperçu de la salle pendant le meeting d’ouverture

    Ouverture du week-end, par Geert Cool

    Première intervention, par Mirre Vercoutere, une écolière de Gand

    Els Deschoemacker, responsable de l’organisation nationale du MAS/LSP

    Virginy Prégny, de la Gauche Révolutionnaire (France)

    Une des banderoles du MAS/LSP

  • Ni en Afghanistan, ni au Tchad ! Pas de participation belge à des guerres impérialistes !

    Ni en Afghanistan, ni au Tchad !

    Notre pays possédait à peine un gouvernement que les tambours de guerre se faisaient déjà entendre. Notre nouveau ministre de la Défense (sic) Pieter De Crem a annoncé vouloir maintenir les troupes belges en Afghanistan et en faire participer d’autres à l’opération française pour soutenir le dictateur du Tchad. En même temps, le nouveau ministre a supprimé les subsides pour que des classes scolaires aillent visiter les anciens camps de concentrations nazis…

    Emiel Nachtegael et Jean Peltier

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    5 ans de guerre en Irak. Pour quels résultats ?

    • 1.220.580 morts irakiens. A Bagdad, une famille sur deux a perdu un de ses membres.
    • 3.900 morts dans les armées américaine et britannique.
    • Pour 2008, le budget de la Défense des Etats-Unis est de 670 milliards de dollars, dont 190 pour l’Afghanistan et l’Irak.
    • A Bagdad, il n’y a en moyenne que 8 heures par jour d’électricité. Seul un tiers de la ville a accès à l’eau courante.

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    Le credo de Jules César, « Si tu veux la paix, prépare la guerre », semble écrit sur le front de De Crem. Mais tout comme pour le glorieux Jules, ces fières déclarations ne sont qu’un prétexte pour notre Pieter.

    Vous avez dit démocratie ?

    Les agressions militaires américano-britanniques sont le résultat de la volonté de la classe dirigeante US de restaurer son prestige militaire et politique (en Afghanistan) et de contrôler le pétrole (en Irak). Qu’est-ce que la Belgique vient faire là-dedans? Apporter la paix et la démocratie aux indigènes, comme au bon vieux temps des colonies ?

    La vraie raison de la présence belge en Afghanistan est que la machine de guerre américaine s’est embourbée dans une ligne de front trop élargie et qu’elle dispose de peu de réserves pour éteindre tous les feux en même temps. Bush a donc dû réorienter sa stratégie et faire appel à ses «alliés» pour soutenir l’armée américaine dans ses projets de « démocratisation ».

    En Afghanistan, l’intervention militaire a chassé du pouvoir les Talibans fondamentalistes (d’anciens alliés pourtant…). Mais le nouveau régime qui a émergé, comme en Irak, ne repose pas sur le soutien des masses de paysans, d’ouvriers et de pauvres, mais sur celui des chefs tribaux et des couches aisées. La population reste confrontée au chômage, à la corruption et à l’insécurité. Depuis le départ des Talibans, la culture du pavot est redevenue la plus grande source de revenu de ce pays, l’un des plus pauvres au monde. Dans la plupart des régions de l’Afghanistan et de l’Irak, le droit islamique est de nouveau d’application sous une forme extrêmement conservatrice avec des conséquences très dures pour la population, et particulièrement pour les femmes, sans que cela empêche Bush et De Crem de dormir.

    Après l’Afghanistan et l’Irak, de nouvelles interventions militaires occidentales se profilent en Afrique. Et si De Crem souhaite que la Belgique y fourre son nez sous le couvert d’une « mission de paix » guidée par la France pour soutenir le dictateur du Tchad Idriss Déby, c’est sans doute parce que ce nez a reniflé une bonne odeur de pétrole pas cher dans la région.

    Pas en notre nom !

    Les protestations contre la guerre ont été massives dans le monde entier, y compris aux USA. Certes, en Belgique, le gouvernement de l’époque ne soutenait pas le plan de guerre de Bush (ce qui n’a pas empêché les armes de transiter par le pays). Mais cette opposition officielle ne concernait que la guerre en Irak, essentiellement à cause du fait que l’impérialisme français, le grand frère de la bourgeoisie belge, n’avait pas les mêmes intérêts que l’impérialisme américain. Si certains partis, comme les Verts flamands et francophones, se profilent aujourd’hui comme des colombes de paix contre les F-16, il ne faut pas oublier que pendant leur participation au gouvernement, ils ont laissé donner le feu « vert » aux (très secrets) transits militaires américains par notre pays.

    Aujourd’hui la guerre en Irak est beaucoup plus impopulaire qu’en 2003. Le mouvement antiguerre peut contribuer à imposer le retrait des troupes mais il devra éviter de se mettre à la remorque de politiciens opportunistes comme Barak Obama. Le candidat à la présidence s’est opposé à l’intervention en Irak en 2003 mais dit aujourd’hui qu’il faut augmenter le budget militaire américain et laisser en Irak une partie des troupes pour y défendre les «intérêts américains».

    Aux USA comme en Belgique, face à la guerre que le capitalisme porte en lui comme la nuée porte l’orage (comme le disait si justement Jaurès), il ne suffit pas de manifester contre la guerre : il faut remettre en cause le capitalisme.

  • Venezuela. La révolution en danger

    La défaite d’Hugo Chávez lors du référendum de décembre marque un point tournant du processus révolutionnaire vénézuelien. Le fort taux d’abstention indique une frustration grandissante quant à la lenteur des changements. Dans le même temps, l’opposition de droite a été fortement encouragée par sa victoire. Tony Saunois analyse la situation présente.

    Tony Saunois

    Le 2 décembre 2007, Hugo Chávez, président du Venezuela, a malheureusement encaissé sa première défaite électorale depuis sa montée au pouvoir en 1998.

    Donner de plus grands pouvoirs au président, autorisant ainsi Chávez à se présenter pour plus de deux mandats, établir ‘le pouvoir populaire’, décrire le Venezuela comme un ‘Etat socialiste bolivarien’, réduire la semaine de travail de 44h à 36h, voilà quelques-uns des 69 amendements proposés pour changer la constitution datant de 1999. Ces amendements ont été rejetés par 50,7 % contre 49,2% des électeurs, et avec un fort taux d’abstention (44%).

    Le rejet de ces propositions pose d’importantes questions quant au futur de la révolution et aux dangers faces auxquels se trouvent maintenant la classe ouvrière et les masses. Cela illustre clairement la nécessité pour tous les socialistes, au Venezuela et internationalement, d’analyser la conjoncture actuelle de la lutte contre le capitalisme et les grands propriétaires, ainsi que les tâches que doivent assumer les militants dans le mouvement.

    La défaite du référendum représente un pas en arrière pour la classe ouvrière et a aidé à renforcer l’opposition de droite pro-capitaliste. Le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) et ses membres au Venezuela appelaient à voter OUI au référendum. Et cela en dépit des importantes limitations de ces propositions, comme celles qui tendaient à augmenter les pouvoirs centraux de la présidence, qui permettait ainsi à la droite de dépeindre le régime comme ‘dictatorial’. Mais malgré ces faiblesses, cela aurait été une erreur de donner comme consigne l’abstention ou le boycott, comme certains sur la gauche ont pu le faire, comme par exemple le dirigeant syndical Orlando Chirino. En effet, la victoire du non a eu comme effet de laisser ceux qui appelèrent au boycott plus isolés des activistes, rendant ainsi encore plus difficile de formuler des critiques des imperfections et manquements du gouvernement.

    C’est une sérieuse défaite, bien qu’elle ne soit pas décisive. Mais il est aujourd’hui urgent de tirer les leçons de cet épisode si l’on veut pouvoir éviter d’autres défaites -qui risquent de s’avérer plus sérieuses- et faire avancer le processus révolutionnaire.

    Comme nous l’avons commenté à l’époque, l’arrivée de Chávez au pouvoir représentait le commencement de changements importants dans la situation internationale. L’élection de Chávez a signifié un rejet décisif des politiques néolibérales qui ont dominé les années 90 suite à la chute des dictatures bureaucratiques et des économies planifiées dans l’ancienne Union Soviétique et l’Europe de l’Est. Son gouvernement n’était en effet pas prêt à capituler face aux exigences de l’impérialisme en appliquant des politiques néolibérales.

    Initialement, Chávez ne parlait pas de socialisme mais se limitait à l’idée d’une ‘révolution bolivarienne’. Son régime populiste et nationaliste en est venu rapidement à appliquer des réformes radicales qui sont entrés en conflit avec l’impérialisme US et l’oligarchie dirigeante qui dirigeait le Venezuela depuis des décennies. Ces derniers ont organisé une série de tentatives pour renverser son régime. Chacune de celles-ci – une tentative de coup en 2002, un lock-out patronal en 2002-03, un référendum en 2004 pour essayer de démettre Chávez – a échoué grâce au mouvement spontané des masses soutenant Chávez.

    Ces conflits opposants les masses et la classe dirigeante ont provoqué à chaque fois une radicalisation politique. Cela s’est reflété par exemple lorsque Chávez déclara que la ‘révolution’ n’était pas seulement ‘bolivarienne’ mais aussi ‘socialiste’. Il déclara aussi que le Venezuela s’était embarqué sur la route de la construction du ‘socialisme du 21ème siècle’. Après sa victoire électorale de décembre 2006, il est allé plus loin en annonçant son soutien au programme de transition et au concept de révolution permanente développés par Léon Trotsky.

    Compte tenu du contexte d’offensive idéologique dirigée par la classe dirigeante et de ses représentants au sein des anciens partis ouvriers de masse contre le socialisme, ces développements représentaient et représentent toujours des pas en avant importants. Ils ont été reçus de manière très enthousiaste par une nouvelle génération de travailleurs et de jeunes qui observaient le Venezuela et Cuba – plus récemment, la Bolivie, avec l’élection d’Evo Morales, et maintenant l’Equateur – comme des contrepoids radicaux de gauche face à Bush, Blair et le capitalisme néolibéral.

    Pendant que dans d’autres pays, l’application de politiques néo-libérales entraînait des plans d’austérité et des attaques sur les conditions de vie des travailleurs, le gouvernement de Chávez a introduit une série de réformes populaires, que nous soutenions, comme expliqué dans différents autres articles et dossiers (www.socialistworld.net). Elles ont été financées par le haut prix du pétrole sur le marché mondial et la croissance économique, qui a particulièrement été bénéfique pour la classe moyenne.

    Pauvreté et aliénation

    Quoiqu’il en soit, de nombreux problèmes sociaux persistent, avec un taux de pauvreté qui reste élevé. La frustration qui découle de l’incapacité à résoudre ces problèmes, couplée à la colère par rapport à l’augmentation de la corruption et aux méthodes bureaucratiques ont créé le terreau pour la défaite du référendum. Le taux de chômage est officiellement de presque 10%. L’insuffisance de nourriture, une inflation au dessus des 20 % et l’énorme crise du logement ne peuvent pas être résolus tant que le système capitaliste survit. Le manque de plus de 2,7 millions de maisons, avec environ 1,3 millions d’habitations ressemblant plus à des petites cabanes qu’à des véritables logements, illustre à quel point la situation reste désespérée pour des millions de personnes.

    La pauvreté et l’aliénation dans la société se reflètent par le haut taux de criminalité, et plus spécifiquement de meurtres, qui touche essentiellement les grandes villes. En 2000, le ‘taux de meurtres’ s’élevait à 33,2 pour 100.000 comparé à 1,1 au Japon ou encore 5,51 pour les Etats-Unis. Depuis, la situation s’est encore aggravée et aujourd’hui, la capitale Caracas est plus violente que Rio.

    En novembre 2007, onze meurtres par jour étaient signalés à Caracas. Environ 1000 personnes ont été kidnappées en 2006 pour ensuite exiger des rançons. La criminalité est aujourd’hui un grand sujet de controverse et le gouvernement est considéré comme avoir été incapable de le résoudre. Certains pourraient argumenter qu’il n’est pas correct de blâmer Chávez concernant ce haut taux de criminalité. Mais le crime existera toujours dans des sociétés qui sont touchées par la pauvreté et le malaise social. En dernière instance, cela ne peut se résoudre qu’en se débarrassant définitivement du capitalisme et des conditions sociales qu’il engendre.

    La question de la criminalité est une question cruciale, et il est important pour le mouvement ouvrier de la prendre en compte d’une manière pratique. La police, faisant parti de la machine d’Etat capitaliste, est criblée par la corruption. Les communautés locales doivent s’organiser pour se défendre des attaques criminelles violentes et des gangs. Une des plus grosses faiblesses du mouvement est l’absence d’un mouvement indépendant conscient et organisé de la classe ouvrière et des pauvres. Si un tel mouvement existait, la construction de conseils élus démocratiquement dans les communautés locales pourrait être liée à la formation de comités de défense. Ceux-ci pourraient alors prendre des mesures pour se débarrasser des gangs criminels et offrir une véritable alternative pour tous les jeunes désorientés qui sont attirés par ces bandes.

    En finir avec le capitalisme

    Les problèmes socio-économiques qui continuent à empoisonner le Venezuela proviennent de la continuation du capitalisme. Les discours de Chávez et la propagande pour un « socialisme du 21ème siècle » ne sont pas un programme qu’on peut appliquer.

    Le haut taux de pauvreté, la bureaucratisation et la corruption croissantes, au sein du gouvernement, des directions syndicales et même des organisations sociales et locales, ont exacerbé la colère, la frustration et la déception parmi de larges couches de travailleurs et de pauvres, et particulièrement dans les zones urbaines. Tout cela, ajouté à l’incapacité à faire avancer le processus révolutionnaire, a plongé la situation dans une certaine impasse. La déception est sans doute moins forte dans les zones rurales qui ont pu bénéficier d’un grand nombre de réformes, mais l’ambiance est largement retombée dans les villes.

    La cause plus profonde de tout cela provient de l’incapacité à rompre définitivement avec le capitalisme et à établir un gouvernement des ouvriers et des paysans, basé sur une économie socialiste planifiée démocratiquement. Un grand nombre de personnes ont dû se dire que ne pas voter ne représentait pas une menace contre-révolutionnaire immédiate. Cependant, si on ne sort pas de cette impasse, les forces contre-révolutionnaires vont croître et finalement se débarrasser du régime de Chávez.

    De nouveaux dangers menacent Chávez et son régime. Puisque les réformes ont largement été financées par un prix du pétrole sans cesse croissant, cette situation peut se retourner par les symptômes d’une crise mondiale. Cela pourrait provoquer une chute des revenus tirés du pétrole, et donc un recul dans les réformes.

    Entre ‘74 et ‘79, le régime nationaliste et populiste de centre-gauche de Carlos Andrés Perez avait introduit des réformes sociales significatives qui furent financées par la hausse du prix du pétrole. En ‘79, le baril de pétrole avait atteint les 80$. Peu après, ces réformes devinrent infinançables car une crise faisant chuter le prix du baril à 38$ frappa le Venezuela dans les années ‘80. Le taux de personnes vivant sous le seuil de pauvreté explosa de 17% en 1980 à 65% en 1996. C’est un avertissement clair à Chavéz et à la classe ouvrière sur ce qui risque d’arriver si le capitalisme n’est pas remplacé par une économie socialiste démocratiquement planifiée.

    Malheureusement, certains dans la gauche socialiste n’ont envisagé ce problème que pour le traiter de sectaire ou d’inutilement détaillé. Mais maintenant, confronté à ce brusque retour de manivelle du référendum, ils prennent conscience un peu tard des dangers et commencent à s’en faire l’écho. Cela s’illustre par le fait que la Tendance Marxiste Internationale (IMT), qui avait cherché à agir comme conseiller bénévole d’Hugo Chávez, a critiqué, suite à la défaite du référendum, une dangereuse « illusion, qui existe parmi la direction et les masses elles-mêmes, que la révolution serait une espèce de marche triomphale qui pourrait éviter tous les obstacles ». (Alan Woods, La révolution vénézuélienne à la croisée des chemins, 11 janvier)

    Cependant, le groupe vénézuélien de la IMT semble avoir été victime de ce danger précisément, sous-estimant les dangers auxquels doivent faire face les masses et la possibilité de contre-attaque de la part et d’engranger des succès de la part de la contre-révolution. Deux jours avant le référendum, un article publié sur le site de IMT prédisait : « Et nous ne doutons pas que la décision de la majorité sera en faveur du OUI… La victoire du OUI le deux décembre est le premier pas dans ce sens. »

    L’avertissement du référendum

    Les conséquences de l’incapacité à en finir avec le capitalisme commencent à éroder l’enthousiasme pour Chávez et son régime. Il faut souligner que 44% se sont abstenus lors du référendum et le nombre de personnes ayant voté « oui » est de trois millions inférieur au nombre d’électeurs de Chávez lors des élections présidentielles de décembre 2006. Le nombre de votant pour le oui était même inférieur d’un million au nombre d’adhérents revendiqué par le parti récemment lancé Partido Unificado Socialista de Venezuela (PSUV).

    De plus, le NON a triomphé dans les 9 états les plus peuplés des 23 et dans 13 des villes les plus grandes, y-compris Caracas. Le OUI a triomphé dans les 14 états les plus ruraux et les moins peuplés. Dans la capitale, des anciens bastions chavistes, comme Petare, Caricuao et Catia ont enregistré un vote substantiel pour le NON et un haut taux d’abstention. Mais surtout, la droite a pu engranger 300.000 votes de plus que lors de la dernière élection présidentielle.

    Les signaux d’alerte auraient pu être vus lors de la dernière campagne présidentielle en décembre 2006. En dépit du fait que Chávez ait gagné avec une claire majorité, la droite, l’opposition pro-capitaliste, a commencé à se fédérer autour de Manuel Rosales et en est ressortie renforcée. La campagne électorale a été marquée par de plus gros meetings de la droite et un niveau de participation plus faible de la part des supporters de Chavez. Les masses se rallieront derrière Chávez lorsque la menace d’une défaite apparaîtra comme un scénario sérieux.

    Le faible niveau d’activité et de participation dans la campagne électorale illustre une croissance du sentiment de colère et de frustration face à l’incapacité à pousser le processus révolutionnaire en avant. Malgré l’enthousiasme immense qui a résulté des réformes dans la santé, l’enseignement et dans l’approvisionnement de nourriture, la continuation du capitalisme a provoqué un taux de chômage élevé, des pénuries de nourriture, une inflation croissante, une crise massive du logement et une bureaucratisation et une corruption en hausse. En plus de ces problèmes sociaux, il faut souligner l’explosion du nombre de crimes, et spécialement de crimes violents, qui a commencé à mener à la frustration, et même à la désillusion parmi certaines parties des supporters de Chávez.

    Ces questions ont permis à l’opposition de droite de ramener des tranches entières de la classe moyenne sous sa bannière. La menace d’une victoire de la droite aux élections présidentielles avait provoqué un renforcement du soutien à Chávez. Mais cette fois cette menace directe n’a pas été vue par les masses dans le référendum pour changer la constitution. Bien qu’il reste une véritable marge de manœuvre à Chávez et qu’il gagnerait probablement les élections si elles devaient se tenir aujourd’hui, cette défaite est un sérieux avertissement des processus qui commencent à se mettre en place.

    Résurgence de la droite

    Les effets des problèmes socio-économiques ont été renforcés à cause de quelques erreurs commises par Chávez et dont l’opposition a su jouer, utilisant la peur des gens et plus spécifiquement de la classe moyenne. Ils ont accusé Chávez de bâtir une « dictature déguisée ». Le CIO a averti que la décision de refuser à RCTV sa licence (une station radio-télévisuelle de droite pro opposition) permettrait à l’opposition de se réunifier et de se réorganiser. Nous écrivions : Malheureusement, le refus de renouvellement de la licence de RCTV, à cause de son timing et de la manière dont il a été fait, est une erreur tactique du gouvernement de Chávez dont l’opposition pourra jouer ». (RCTV et la question des médias, 20 juillet 2007) Cette question est devenue un point central autour duquel l’opposition de droite a été capable de mobiliser et de redynamiser ses forces. De larges manifestations ont été lancées avec le soutien de couches d’étudiants de la classe moyenne autrefois inactives.

    Ces inquiétudes se trouvèrent renforcées par certains des amendements proposés à la constitution de 1999, qui servaient à renforcer le pouvoir de la présidence sans contrepoids démocratique et comprenaient de forts éléments bonapartistes. La limite du nombre de fois qu’un candidat pouvait être élu allait être effacée et le mandat présidentiel allait être prolongé de 6 à 7 ans – comme c’était le cas en France durant la cinquième république de Charles de Gaulle. Un état ouvrier démocratique ne peut être assimilé à un régime bonapartiste. Dans un véritable état ouvrier démocratique, al question de savoir formellement qui est président et pour combien de temps serait immatérielle. Cependant, le Venezuela n’est pas une démocratie ouvrière et cette question a été perçue par certaines couches de la société comme une attaque sur les droits démocratiques et a été utilisée comme une arme par l’opposition.

    Le président, et non le parlement, devait aussi obtenir le pouvoir de nommer tous les officiers de l’armée. Il devait aussi obtenir le pouvoir de désigner de nouvelles zones géographico-politiques, comme des municipalités fédérales, et de nommer les différentes autorités censées les administrer. Il n’existait pas de définition du niveau de pouvoir de ces nouvelles autorités et districts territoriaux. D’autres propositions telles que la suppression du « droit à l’information » dans le cadre d’une déclaration d’état d’urgence par le président. Les socialistes défendent le droit pour le gouvernement Chávez de prendre toutes les mesures nécessaires à l’empêchement de toute tentative de prise de pouvoir par la droite, à travers un autre coup d’état par exemple. Mais ce ne sont pas des questions constitutionnelles, en les traitant comme telles le gouvernement offre à la droite le bâton pour lui taper dessus. Alors que l’opposition dynamisait ses supporters de la classe moyenne, des pans des supporters traditionnels de Chávez se retrouvaient désorientés dans la campagne.

    Tout cela s’est retrouvé encore renforcé par une colère montante contre la bureaucratie et son approche « par le haut », par l’absence d’un véritable système démocratique ouvrier et d’une participation consciente et active des masses à la lutte. Les supporters de Chávez n’étaient pas prêts à aller de l’avant, ni à soutenir le NON, ils se sont pourtant tenus à l’écart des bureaux de vote. Selon des rapports de nos membres au Venezuela, beaucoup le regrettent aujourd’hui.

    Une des tâches auxquelles sont confrontés les masses et les marxistes dans n’importe quelle révolution est de parvenir à gagner le soutien des couches moyennes dans la société (étudiants, petits commerçants,…) qui sont aussi exploitées socialement et économiquement par le capitalisme. Le mouvement révolutionnaire socialiste a besoin de les convaincre de qui sont leurs véritables ennemis et qu’ils n’ont rien à craindre du socialisme. Au contraire, une société socialiste peut leur offrir une solution à leurs problèmes et développer leurs talents et leurs capacités. Malheureusement, l’attitude adoptée par Chávez a donné l’arme qu’il fallait à la droite pour les récupérer.

    Les marxistes ne considèrent pas vulgairement la classe moyenne et tous ceux qui ont voté NON comme une masse réactionnaire homogène. Cette approche erronée a été amplifiée par le IMT immédiatement après le référendum. Woods a simplement dénoncé « les petits commerçants, les étudiants « gosses pourris des riches », les employés gouvernementaux, pleins de ressentiment face aux avancées de la « plèbe », les pensionnés nostalgiques « des bons vieux jours » de la quatrième république… Ces éléments apparaissent comme une force formidable en termes électoraux, mais dans la lutte des classes, leur poids est pratiquement nul ». (La défaite du référendum – Qu’est-ce que cela signifie ? 3 décembre 2007)

    Ce revirement a revigoré l’opposition et montre clairement la menace croissante de la contre-révolution. D’un autre côté, on n’en est pas encore au point d’une défaite décisive pour le mouvement. La droite pourrait regretter cette tactique, car elle pourrait provoquer une réaction des masses et pousser le mouvement plus à gauche. Il reste encore du temps pour tirer les leçons nécessaires, ce qui permettra de renverser le capitalisme et de définitivement en fini avec lui.

    Mais il existe une nouvelle urgence, une course contre le temps : la contre-révolution essayera de capitaliser sur la situation d’impasse actuelle. Un brusque changement dans la situation économique et une chute du prix du pétrole pourrait accélérer ces développements et donner l’opportunité à la droite de se renforcer et de préparer le terrain pour une défaite plus décisive de Chávez et des masses.

    Il est urgent de tirer le bilan des luttes des travailleurs, des jeunes et des masses des différentes étapes traversées par la lutte depuis la venue au pouvoir de Chávez. A cela, il faudra ajouter les leçons cruciales de la classe ouvrière internationale pour aider les travailleurs et les jeunes à tirer les conclusions nécessaires pour s’assurer la défaite définitive de la contre-révolution et pour s’assurer que la transformation socialiste et démocratique de la société puisse continuer.

    Le pouvoir économique

    Tout en clamant son soutien pour la construction du ‘socialisme du 21ème siècle’, en pratique, Chávez a essayé de construire une économie et un Etat parallèles, côte-à-côte avec les monopoles et la machine d’Etat existants. Bien que Chávez ait augmenté l’intervention de l’Etat dans l’économie, il n’a nationalisé ni les grandes banques ni les monopoles, qui demeurent dans les mains du privé. Jusqu’à présent, il a limité les nationalisations à l’aciérie Venepal, ainsi qu’aux compagnies de télécommunication et d’électricité, CANTV et EDC.

    Malgré les attaques hystériques contre Chávez de la part de l’impérialisme américain, suite à la croissance économique dans le secteur privé, ce dernier compte à présent pour une plus grande part dans l’économie que ce n’était le cas avant l’arrivée au pouvoir de Chávez.

    Malgré les menaces verbales de Chávez de nationaliser les banques, il ne l’a pas fait. Basés sur une croissance du crédit qui a surtout bénéficiée aux classes moyennes, les résultats des banques vénézueliennes ont de quoi rendre jaloux l’ensemble du monde bancaire. Les profits réalisés dans le secteur bancaire ont crû de 33% en 2006. Les retours sur investissement ont dépassé de 33% la norme internationale.

    Les supermarchés d’Etat ‘Mercal’, tout en vendant de la nourriture bon marché pour les pauvres, sont dans une logique de compétition avec les grosses chaînes de magasins et de supermarchés d’alimentation. Même si sous certaines conditions –dans le cas d’une situation de double pouvoir par exemple- des éléments d’économie parallèle peuvent être utiles et permettre de réaliser quelques progrès, une telle situation ne peut jamais durer indéfiniment.

    Pour les marxistes, une situation de double pouvoir peut émerger lorsque la classe dominante n’a plus le contrôle de l’économie ou de l’Etat, du fait que son pouvoir est contesté par un mouvement révolutionnaire parmi la classe des travailleurs. Tout en concurrençant la classe dirigeante, devenue incapable de diriger la société, la classe ouvrière n’a cependant pas encore pris le pouvoir entre ses mains et imposé une défaite décisive aux capitalistes. Cette situation se conclut toujours soit par la prise du pouvoir par les travailleurs, soit par le rétablissement du contrôle de la classe dirigeante.

    Les capitalistes se battront jusqu’au bout afin d’empêcher le secteur étatique d’assumer un rôle de plus en plus important dans ce qu’ils considèrent comme leur chasse gardée, et ne tolèreront jamais de se voir retirer les leviers de leurs pouvoirs économique et politique. Si c’est nécessaire, ils recourront même à la dictature militaire brutale afin d’empêcher un tel mouvement de se développer. Pourtant, procéder à une incursion graduelle de l’Etat dans l’économie capitaliste est exactement ce que Chávez a essayé de faire. Parallèlement, il a laissé le pouvoir économique décisif dans les mains des capitalistes, qui l’ont utilisé par exemple pour imposer des pénuries de café, de riz, de haricots et d’autres aliments de base, comme riposte face aux prix des produits contrôlés par l’Etat.

    Ces pénuries ont joué un rôle important dans la campagne que l’opposition a mené en vue du référendum. Dans un sondage réalisé en novembre 2007, 75% des Vénézueliens pensaient que les pénuries de nourriture étaient volontairement suscitées par le patronat afin de saboter l’action du gouvernement. Cependant, dans un sondage entrepris dans la semaine précédant le référendum, une majorité accusait l’inefficacité et la corruption du gouvernement.

    Il est impossible d’assagir un tigre en retirant une à une chacune de ses griffes. De la même manière, il est impossible de retirer les capitalistes du contrôle de l’économie en grapillant graduellement un secteur après l’autre. Dans les faits, Chávez n’a même pas été jusque là. L’économie du Venezuela est hautement monopolisée. Cinq grosses familles oligarchiques – Cisnero, Mendoza, Caprile, Boulton et Phelps – ainsi que quelques grandes banques, contrôlent les secteurs décisifs de l’économie, à l’exception du pétrole. Aucun de ces conglomérats n’a été touché par Chávez.

    Le fait de ne pas avoir nationalisé ces monopoles laisse à la classe dominante le contrôle de l’économie. Résultat : durant le récent boom économique, qui avait notamment vu une augmentation des dépenses de l’Etat en faveur de différents programmes publics, des profits gigantesques ont été réalisés. Dans le même temps, les capitalistes ont eu tout le loisir d’organiser le sabotage économique afin de miner l’action du gouvernement.

    Les signes d’un ralentissement

    L’ensemble de ces facteurs se sont reflétés dans le référendum. Pourtant, au lieu de réaliser que cette défaite reflète la frustration, la déception et une certaine impasse dans la situation actuelle, ce sont au contraire les masses qui sont accusées d’un ‘manque de compréhension’. Dans son émission télévisuelle hebdomadaire, ‘Alo Presidente’ du 6 janvier, Chávez affirme reconnaître que la population, ainsi que l’appareil d’Etat, ne sont pas “preparés pour faire face à ce qu’impliquait la réforme constitutionnelle, à savoir un renforcement du socialisme”. Plus menaçant, il déclara qu’ils (les habitants de Caracas et d’autres villes) “…ont une dette envers moi. Je l’ai noté dans mon agenda. Nous allons voir s’ils me paieront cette dette ou pas”. (Spanish daily paper, ABC, 9 décembre 2007)

    Cette méthode d’analyses des reculs et des défaites fait écho à celle qu’utilisaient les dirigeants des partis communistes et socialistes réformistes lors de mouvements révolutionnaires historiques, tels que le Chili en 1970-73 ou la révolution espagnole dans les années ’30. Ces derniers justifiaient leur inaptitude à rompre de manière décisive avec le capitalisme en prétextant que les masses n’étaient ‘pas prêtes’ et que cela allait ‘provoquer’ la réaction.

    Ayant dans un premier temps accusé le manque de compréhension des masses pour la défaite, Chávez a finalement conclu qu’il n’avait pas d’autre choix que de ‘ralentir la marche des événements’: “L’avant-garde ne peut pas se séparer des masses. Sa place est avec les masses! Je veux rester avec vous, et pour cette raison, je dois ralentir le rythme.” (6 janvier)

    Les marxistes n’adoptent pas une approche sectaire vis-à-vis des masses, et ne peuvent ignorer le niveau de conscience et de compréhension politique existant. Cela aurait pour résultat d’avancer des slogans et des initiatives politiques qui ne seraient pas compris, et couperaient les révolutionnaires des larges masses. Les marxistes s’engagent activement dans le dialogue politique, dans l’échange des idées et des expériences, et mettent en avant des slogans et des revendications qui peuvent aider les masses à avancer dans leur lutte, et à tirer les bonnes conclusions sur le type de programme, de tâches et de méthodes nécessaires pour aboutir au socialisme.

    Mais utiliser cela comme un argument pour ‘ralentir la marche de la révolution’ est quelque chose de tout à fait différent. Ce ‘ralentissement’ inclut un remaniement ministériel en janvier. Il s’agit surtout de redistribuer les portefeuilles ministériels parmi les ministres actuels. Un élément significatif, cependant, est le fait que l’ex-vice-président, Jorge Rodriguez, a été délogé et remplacé par l’ancien ministre du logement, Ramón Carrizales. La nomination de Rodriguez il y a un an avait été annoncée à l’époque comme un tournant à gauche dans la ‘route vers le socialisme’.

    Il est probable que le ralentissement du rythme des réformes débute par un relâchement des contrôles sur les prix que le gouvernement avait précédemment introduits. En les desserrant, le gouvernement espère pacifier ses relations avec les producteurs et distributeurs du secteur de l’alimentation, qui avaient réagi en créant des pénuries dans la distribution. Il s’agissait de purs actes de sabotage, auxquels le gouvernement s’était montré incapable de réagir en nationalisant ces compagnies.

    Derrière ce ‘ralentissement’, Chávez tente d’établir un ‘consensus national’ et d’apaiser les capitalistes. Dans l’émission ‘Alo Presidente’, Chávez argumentait : “Nous devons procéder à des améliorations dans le cadre de nos alliances stratégiques. Nous ne pouvons pas nous laisser dérouter par des tendances extrémistes. Nous ne sommes pas des extrémistes et ne pouvons l’être. Non ! Nous devons rechercher des alliances avec les classes moyennes, y compris avec la bourgeoisie nationale. Nous ne pouvons cautionner des thèses qui ont échoué dans le monde entier, comme l’élimination de la propriété privée. Ce ne sont pas nos thèses.”

    En d’autres termes, ayant essuyé une défaite lors du référendum, Chávez en conclut qu’un accord doit être recherché avec la classe dominante. Les socialistes ne prônent pas l’élimination de toute la propriété privée, comme par exemple la nationalisation de tous les petits magasins ou la réquisition des maisons des particuliers. Néanmoins, il est nécessaire de nationaliser les monopoles et les banques qui dominent l’économie, et d’introduire une démocratie ouvrière dans le cas où une planification socialiste prend forme. Chávez a également annoncé l’amnistie pour certains personnages impliqués dans l’organisation du coup d’état de 2002, et ce afin “d’envoyer au pays un signal clair comme quoi nous pouvons vivre ensemble malgré nos différences”.

    Il n’y a pas de troisième voie

    Chávez revient en fait à la position qu’il défendait avant qu’il n’embrasse l’idée du socialisme, celle d’une ‘troisième voie’. Cette thèse s’appuie sur la vision erronée comme quoi il serait possible, en travaillant main dans la main avec l’aile ‘progressiste’ de la classe capitaliste, d’en finir avec la pauvreté et la corruption, et de développer une forme de ‘capitalisme plus humain’. Cette idée fait écho à la ‘théorie des deux stades’ avancée dans le passé par les staliniens et certains socialistes réformistes. Ces derniers prétendaient que, dans les pays semi-coloniaux, avant qu’il ne soit possible de renverser le capitalisme, il était nécessaire de développer l’industrie et l’économie en collaboration avec les capitalistes ‘progressistes’, postposant ainsi la question du socialisme aux calendes grecques.

    De telles idées ont mené à la défaite du mouvement ouvrier durant la guerre civile espagnole, ou encore au Chili en 1973, et n’ont jamais abouti à la moindre victoire. A l’époque contemporaine, la classe dominante des pays semi-coloniaux est liée à l’impérialisme et est incapable de développer la société. Cette tâche retombe sur les épaules du mouvement ouvrier, aidé des autres classes exploitées par le capitalisme, et fait partie intégrante de la transformation socialiste de la société.

    Ce n’est pas la première fois que Chávez tente d’apaiser les classes dominantes. Il s’agit en réalité d’une répétition de ce qu’il avait mis en avant suite à la défaite du coup d’état entrepris en 2002 par la réaction. Il demanda alors au peuple de rentrer chez lui, appelant à l’unité nationale et à la construction d’un ‘consensus national’.

    Même le IMT a été obligé de reconnaître le caractère erroné d’une telle politique : “‘Aidé’ par ses conseillers réformistes, le président a tiré certaines mauvaises conclusions du référendum”. (Woods, La révolution vénézuelienne à la croisée des chemins, 11 janvier) Mais il est évident que Chávez porte une part importante de responsabilité également.

    Woods déclare que “Chavez a bien compris le fait que la révolution a besoin de franchir ce saut qualitatif”. (Rencontre avec Hugo Chávez, Avril 2004) Encore une fois, dans La nationalisation de Venepal : qu’est-ce que cela signifie? Woods assure ses lecteurs que “Le président Hugo Chávez a révélé constamment un instinct révolutionnaire infaillible”. (21 janvier 2005) Pourtant, aucune de ces caractéristiques n’est perceptible dans les ‘mauvaises conclusions’ tirées par Chávez.

    Chávez, parlant lors du congrès d’ouverture du PSUV nouvellement formé, fut forcé de reconnaître que le gouvernement restait paralysé par ‘l’inefficacité, la bureaucratie et la corruption’. Il insista également sur la nécessité de résoudre les “problèmes persistants tels que le crime, les pénuries alimentaires et l’inflation.”. “Pourquoi le lait a-t-il disparu? Pourquoi est-ce que la sécurité reste un tel problème…Pourquoi n’avons-nous pas été capables de limiter la corruption (sans parler de l’éradiquer)?”

    Ces questions sont d’une importance cruciale. Malheureusement, la réponse de Chávez se limite à l’affirmation selon laquelle l’année 2008 sera l’année des ‘trois R’ : ‘révision, rectification et relance’. Pourtant les problèmes qu’il identifie ne se résoudront pas en ‘ralentissant la révolution’…

    La conscience de classe se développe

    Quelques jours plus tard, Chávez semblait repartir vers la gauche. Dans ‘Alo Presidente’ du 20 janvier, se référant aux pénuries alimentaires, il brandit la menace de la nationalisation de la terre et des banques. Ce n’est pas la première fois qu’il menace les banques ou d’autres secteurs de nationalisation, et rien ne nous certifie que ces menaces vont être mises à exécution. Ce n’est pas un hasard si ces menaces ont été faites pendant le congrès du PSUV; elles seront utilisées pour tenter de couper l’herbe sous le pied de certains activistes qui critiquent le tournant à droite de Chávez. En même temps, cela illustre que son régime peut toujours balancer vers la gauche et adopter des mesures de gauche plus radicales, y compris la nationalisation.

    La bureaucratie et la corruption sont des problèmes cruciaux auquel le mouvement fait face aujourd’hui au Vénézuela. Pourtant, sans un système de démocratie et de contrôle ouvriers, un véritable bataille contre ces problèmes est irréalisable. Cela reflète une des principales faiblesses du mouvement. Accomplir une révolution socialiste demande l’organisation consciente et indépendante du mouvement ouvrier, soutenu par la jeunesse, les couches pauvres des villes, les sections radicalisées de la classe moyenne et par tous ceux qui sont opprimés par le capitalisme. Du fait de sa conscience de classe collective, qui se développe et s’affermit grâce au rôle qu’elle joue dans la production, la classe ouvrière a besoin de jouer ce rôle dirigeant décisif.

    Jusqu’à présent, cela n’est pas reflété d’une manière pleinement consciente et organisée au Venezuela. Sans ce contrôle conscient et constant de la base, le développement de méthodes bureaucratiques monte inévitablement à la surface, et cela dans n’importe quel mouvement ouvrier ou révolutionnaire. Depuis le début, Chávez et les dirigeants du mouvement ont adopté une approche unilatérale, du sommet vers la base. Le régime s’est contenté du support des masses – et les a lancés dans la lutte lorsque la menace de la contre-révolution était clairement posée – mais les masses n’ont pas consciemment pris la direction du mouvement.

    La fondation du PSUV peut offrir une importante opportunité de construire un nouveau parti de masse pour la classe ouvrière; un tel parti, doté d’un programme révolutionnaire socialiste, peut devenir une arme importante afin de faire avancer le processus révolutionnaire. Au moment où nous écrivons ces lignes se tient le premier congrès du parti, auquel participent 1.600 délégués (et qui est prévu de durer jusqu’à deux mois!) Le PSUV revendique plus de cinq millions de personnes inscrites pour rejoindre le parti, bien qu’il ne soit pas clair si ce sont des gens désirant réellement construire un parti socialiste, ou plutôt des gens enregistrés par les organisateurs locaux à partir du registre des électeurs. Si le PSUV se veut être un instrument pour porter une révolution victorieuse, alors il aura besoin de membres actifs, et pleinement impliqués dans les débats et les prises de décision; un tel parti ne peut se limiter à une addition de tous les partis pro-Chávez déjà existants. Le droit de se constituer en tendances, et de permettre le débat démocratique seront des éléments essentiels pour faire de ce parti une arme efficace pour la classe ouvrière, et pas un instrument docile au service de la politique du gouvernement.

    Malheureusement, le PSUV a été formé du sommet, Chávez nommant un comité comprenant deux anciens généraux chargés de le mettre sur pied. En janvier, Jorge Rodriquez fut nommé responsable de la ‘coordination générale du PSUV’. Le CIO soutient le combat pour un PSUV pleinement démocratique avec un programme révolutionnaire socialiste.

    La démocratisation des syndicats et la construction de comités démocratiquement élus sur les lieux de travail, afin d’établir un système de contrôle ouvrier, font partie des tâches les plus urgentes. De tels comités doivent être également mis sur pied dans les quartiers ainsi que dans l’armée. Structurés et coordonnés au niveau local, régional et national, ces comités pourraient constituer la base d’un gouvernement ouvrier et paysan. A travers la nationalisation des cinq banques et conglomérats familiaux, un plan démocratique et socialiste de l’économie pourrait ainsi être mis sur pied.

    Cela ouvrirait la possibilité de forger des liens avec le mouvement des masses en Bolivie et, accompagné de la construction d’une démocratie ouvrière à Cuba, pourrait permettre le développement d’une fédération socialiste démocratique de ces différents pays. Cette perspective pourrait à son tour constituer un tremplin pour stimuler la révolution socialiste à travers l’ensemble du continent latino-américain. Une telle voie demeure la meilleure garantie afin d’assurer la défaite de la réaction qui, comme le récent référendum l’a illustré, peut reprendre du poil de la bête tant que le capitalisme ne sera pas renversé.

  • La démission de Castro ouvre un nouveau chapitre

    Quelles sont les perspectives pour la révolution ?

    La démission formelle de Fidel Castro du poste de Président de Cuba ouvre un nouveau chapitre dans l’histoire de Cuba et de sa révolution. Depuis le début de sa maladie en 2006 (un problème intestinal) d’intenses discussions ont été menées sur le rôle de Castro, lui-même lié au futur de Cuba. Sa démission indique qu’il ne se remettra probablement pas de sa maladie et que le gouvernement Cubain prépare la population cubaine à sa mort, peut être même bientôt.

    Peter Taaffe, Socialist Party ( CIO Angleterre et Pays de Galles)

    Quand cela arrivera, de nombreuses manifestations de masse, surtout en Amérique Latine, seront organisées. Malgré quelques erreurs et défauts de Fidel Castro, il est reconnu par les masses opprimées dans le monde comme une figure monumentale qui s’est battu avec ténacité contre leurs oppresseurs capitalistes et impérialistes.

    Cependant, les cercles capitalistes (de Bush aux exilés cubain à Miami qui salivent déjà à l’idée de profits plantureux après le « retour » de leur propriété) spéculent peu cette fois-ci, contrairement à 2006, sur l’écroulement imminent du régime de l’île. A l’époque, c’est Bush qui exprimait les prédictions de l’impérialisme américain : des émeutes dans les rues cubaines, un rapide « changement de régime » , non seulement du gouvernement cubain mais aussi de son système social – l’économie planifiée.

    Inversement, des millions d’ouvriers et les pauvres du monde entier espéraient le contraire ; que Cuba et les acquis sociaux de la révolution perdureraient même dans le cas d’un décès de Castro par sa maladie. Il est certain que sa présence considérable sera encore ressentie, mais sa démission traduit son incapacité à exercer le pouvoir comme il l’a fait précédemment et c’est probablement son frère Raul qui le reprendra.

    Depuis 1959 la révolution Cubaine est confrontée à un embargo sauvage imposé par l’impérialisme US, et on compte 600 tentatives d’assassinat à l’encontre de Fidel Castro. Cependant, Cuba a, au travers de son économie planifiée, a pu donner un aperçu des formidables possibilités de l’espèce humaine quand la mainmise des propriétaires terriens et des capitalistes est éliminée. Des figures héroïques comme Che Guevara et Fidel Castro exercent une profonde influence sur de nombreux jeunes et travailleurs dans le monde entier.

    La bonne réputation de Cuba sur sa gestion des problèmes sociaux tels que le logement, l’éducation, et particulièrement la santé a beaucoup progressée recemmnent. Le film incroyable de Michael Moore « Sicko » met bien en valeur le contraste entre le système de santé US, brutal et orienté vers une maximisation des profits et le système de santé gratuit cubain. Des citoyens américains ordinaires se retrouvant sans logement suite à des problèmes de santé (dont une personne ayant développé un cancer) ainsi qu’une travailleuse ayant participé aux secours lors du 11 septembre n’ont pu bénéficier de soins de santés à un prix abordable par le système de santé privé, honteux et orienté vers les entreprises que connaît les Etats-Unis. Ils ont cependant été secourus et soigné gratuitement quand Moore les a amenés à Cuba.

    En outre, huit étudiants américains ont été diplômés l’année passée après six années d’études gratuites. Un de ces diplômés déclara que « les soins de santés ne sont pas considérés comme un commerce à Cuba ». C’est exactement pour cela que par le passé les Etats-Unis et leurs Etats complice en Amérique latine ont tout fait pour essayer de détruire le modèle d’économie planifiée ayant émergé de la révolution cubaine. Et cela a provoqué une réaction massive de soutien à Cuba des populations d’Amérique latine, particulièrement dans la dernière décennie vu le néo-libéralisme sur le continent. Elles comparent les réalisations cubaines à la triste expansion record de la grande propriété terrienne et du capitalisme dans la région, tout comme en Afrique et en Asie.

    Les réalisations de la révolution

    Dans un livre révélateur récemment publié, (« Fidel Castro – ma vie ») pour lequel Castro a collobaré avec l’écrivain Ignacio Ramonet, il rapporte les impressionnantes réalisations de la révolution. Et commente : « Nous avons maintenant plus de 70000 médecins et 25000 jeunes étudiants en médecine… Nos voisins du nord [les USA] ne peuvent envoyer que des hélicoptères et non pas des médecins, ils n’en ont pas assez pour résoudre les problèmes du monde. L’Europe, cette « championne des droits de l’Homme » ne peut rien y faire non plus. Ils ne peuvent même pas envoyer 100 médecins en Afrique où plus de 30 millions de personnes sont infectées par le Sida… Je pense que nous aurons dans dix ans 100 000 médecins et que nous pourrions en avoir formé 100 000 de plus d’autres pays. Nous sommes les plus grands pourvoyeurs de médecins [dans le monde] et je pense que nous pouvons maintenant former dix fois plus de médecins que les Etats-Unis, ce pays qui nous a privé d’un bon nombre de nos médecins et qui a fait tout ce qui était possible pour priver Cuba de médecins. Ceci est notre réponse à cette politique. »

    Entre 1959 et aujourd’hui, l’espérance de vie à Cuba a augmenté de 19 ans. Suite à la contre révolution en Russie au début des années 90 elle est retombée pour les hommes à 56 ans ! Peut-il y avoir un plus grand contraste entre les objectifs de la révolution sociale et la barbarie de la contre-révolution capitaliste ? Et ceci a été mené à bien au moment fort d’une crise économique massive au début des années 90 suite au retrait de l’aide, particulièrement la fourniture de pétrole, d’abords par l’ancien président russe Boris Eltsine puis poursuivie par Vladimir Poutine, comme Castro l’explique dans son livre.

    Alors que les réalisations historiques (éducation gratuite et soins de santé performant) sont préservées à Cuba, un programme d’austérité brutal a cependant été infligé à la masse de la population. Le régime a été obligé de faire des concessions « au marché » et donc au capitalisme. A travers la « dollarisation », une économie parallèle s’est développée et a amené certains privilèges pour ceux travaillant dans le tourisme (payé en dollars) et les secteurs impliquant certains partenariats économiques internationaux.

    Malheureusement, ceux qui restent défenseurs de l’économie planifiée, comme les médecins, les enseignants, etc., sont toujours payé en peso cubain et souffrent énormément. Selon le célèbre auteur de gauche Richard Gott, même le monopole de l’Etat sur le commerce extérieur a été formellement aboli en 1992. Mais Cuba reste essentiellement une économie planifiée, avec des entreprises étrangères requerrant des autorisation du ministère du commerce pour effectuer leurs opérations. La décentralisation c’est opéré avec des centaines d’entreprises pouvant importer et exporter librement. Castro a cependant déclaré « que rien d’utile ne sera privatisé à Cuba et peut donc être maintenue comme une propriété de la nation des collectivité de travailleurs ».

    Il n’est pas exact actuellement de dire que la bureaucratie et les inégalités n’existent pas à Cuba. Fidel Castro l’a déclaré par le passé ainsi que dans son dernier livre. Il n’est pas la copie conforme de Staline comme l’on essayé de faire croire ses opposants capitalistes. Aucun culte de la personnalité financé par l’Etat n’existe à Cuba, et on ne voit aucun portait, statue ou image de Castro tant qu’il est vivant. De plus, alors qu’il admet ouvertement avoir commis des erreurs et zigzagué d’une politique à l’autre en causant significativement du tort lors des 49 dernières années, rien de tout cela n’est comparable aux crimes monstrueux du stalinisme : collectivisation forcées, grandes purges, etc.

    Politiques changeantes

    Ce livre révèle aussi un comportement parfois erratique de Fidel Castro. Il a par exemple proposé au dirigeant soviétique Nikita Khrouchtchev lors de la crise des missiles en 1962 une « première attaque » nucléaire soviétique contre les Etats-Unis. Khrouchtchev répondit à Castro : « Vous me proposez de mener une « première attaque » contre le territoire ennemi. Ceci ne sera pas une simple attaque mais le début d’une guerre thermonucléaire. » [p281]

    Castro s’en prend parfois à Staline : « Il a été responsable, de mon point de vue, pour l’invasion en 1941 de l’URSS par la puissante machine de guerre Hitlérienne, sans même que les forces soviétiques ai entendu un appel de mobilisation… Tout le monde connaît ses abus de pouvoir, la répression, et sa personnalité, le culte de la personnalité. ». Mais il affirme aussi que Staline « a l’immense mérite d’avoir industrialisé le pays, déplacé les industries militaires en Sibérie ; des facteurs décisifs dans la grande bataille mondiale contre la nazisme. ».

    Il affirme que Staline c’est « lui-même désarmé », mais en réalité a démantelé les défenses de l’union soviétique alors que les Nazis se préparaient à attaquer. Mais Staline n’était pas le concepteur originel du « plan quinquennal » ainsi que de son idée d’industrialisation. C’est Trotsky et l’opposition de gauche qui a formulé ces idées en premier. Staline les a empruntés et appliquées bureaucratiquement à grands frais inutiles pour l’Union Soviétique et sa population. Et Castro nie ostensiblement – à tort comme l’a indiqué Célia Hart – que Che Guevara a pu avoir des « sympathies trotskystes ». Castro affirme qu’il « ne l’a jamais entendu parler de Trotsky… Il était léniniste et, sur certains point reconnaissait des mérite en Staline ». Che Guevara, il est vrai, n’était pas un trotskiste conscient et convaincu. Mais lors de sa dernière période à Cuba il est devenu critique par rapport à la bureaucratie, et particulièrement dans les pays dis « socialistes » qu’il avait visité. De plus il avait un livre de Trotsky dans son sac de voyage quand il a été assassiné en Bolivie en 1967.

    Castro révèle dans ces commentaires, au mieux, une compréhension inégale du Stalinisme, d’un point de vue « sociologique » et politique. L’erreur des collectivisations forcées, les procès monstrueux, les purges, l’anéantissement des derniers restes de l’héroïque parti bolchevique n’étaient pas juste le résultat de la personnalité de Staline ou des « erreurs » mais bien les conséquences du caractère bureaucratique de la machine qu’il a mis en place. Staline dirigea une contre-révolution politique bureaucratique qui craignait le mouvement indépendant de la classe ouvrière et les idées de démocratie ouvrière, comme l’analysa brillamment Trotsky. Fidel Castro et Che Guevara se distancient de Trotsky et de sa critique du Stalinisme car le régime cubain est, en fin de compte, lui aussi dirigé par une élite bureaucratique détachée des masses populaires.

    Cuba et sa révolution est différente en de nombreux points avec la révolution russe, et Castro n’est pas Staline. Cependant, malgré son énorme popularité à ses débuts, ses faiblesses étaient traduites par le manque de contrôle et de gestion démocratique ainsi que par l’absence de conscience de classe claire parmi la classe ouvrière et les pauvres. Castro affirme lui-même qu’une « conscience socialiste » n’était pas présente au début. En outre, il n’y a tout au long du livre pas de perception claire du rôle de la classe ouvrière – comme expliqué par Marx- dans le rôle de moteur de la révolution socialiste, ni de son rôle de contrôle, avec les paysans pauvre, de l’Etat ouvrier né de la révolution.

    Il parle de 1968 mais reste silencieux sur le mouvement ouvrier en France cette année là, la plus grande grève générale de l’histoire. Il ignore aussi honteusement les massacres d’étudiants la même année au Mexique. A ce moment, à cause des liens diplomatiques avec le Mexique (le seul Etat d’Amérique latine a avoir reconnu Cuba à l’époque) Castro n’a pas dis un mot à propos des actions meurtrière du gouvernement mexicain.

    Quel est le caractère de l’Etat cubain ?

    La conséquence de tout cela est que l’Etat dominé par Fidel Castro et Che Guevara, tous deux énormément populaire pour avoir guidé et installé la révolution aux portes du monstre US, n’est pas contrôlé par des conseils ouvriers et paysans, comme c’était le cas en Russie en 1917. Ceci classe historiquement l’Etat cubain et le type de société qui émergea par la suite.

    Ceci se reflète dans la pensée de Castro à propos du caractère de l’Etat qu’il préside. Questionné par l’auteur Volker Skierka, Castro affirme directement : « Je ne pense pas qu’il faut avoir plus qu’un parti… Comment notre pays aurai t’il pu tenir debout en étant coupé en dix pièces ?… Je pense que l’exploitation de l’homme par l’homme doit cesser avant qu’on puisse avoir une réelle démocratie. »

    Cependant, sans réelle démocratie ouvrière, la transition vers le socialisme est impossible. La fin du monopole du parti unique, des élections libres et transparentes pour des conseils ouvriers avec le droit à tous de se présenter (incluant les trotskystes), un contrôle strict des revenus et le droit de révoquer les élus est le minimum d’exigences pour un Etat ouvrier démocratique. Sans réel contrôle et sans gestion de l’Etat et de la société, une machine bureaucratique va inévitablement se mettre en place et remettre en cause l’existence de l’économie planifiée. Ceci peut être une réalité dans une économie fort avancée et développée, pas comme Cuba qui n’a qu’un PIB représentant 0,3 % du PIB des Etats-Unis.

    Il est vrai qu’au début des années 90, faisant face à une situation économique en détérioration, un débat ouvert sur la constitution est apparu à Cuba, et des amendements constitutionnels (incluant une forme d’élections directes) furent proposé à l’assemblée nationale. Cette démarche était cependant toujours réalisée sur la base d’un candidat par siège au parlement. C’était une forme de « démocratie » permettant aux électeurs de choisir un candidat d’une liste, mais juste d’un seul parti. Aux récentes élections de janvier 2008, il y avait 614 candidats pour 614 sièges ! Parallèlement, les membres du comité central du parti communiste, le politburo et le conseil d’Etat, étaient soumis au veto, si nécessaires, de Fidel Castro.

    Dans « Ma vie », Fidel Castro semble contrer l’idée d’avoir un tel pouvoir quand il commente l’exécution du chef de l’armée Arnoldo Ochoa pour trafic de drogue présumé. Il affirme : « C’était une décision unanime du conseil d’Etat, qui avait 31 membres… Le conseil d’Etat est devenu un juge… La chose la plus importante est que vous avez à lutter pour vous assurer que chaque décision est prise par consensus entre tous les membres. » Le fait qu’une décision consensuelle a pu être prise au conseil d’Etat dans une situation aussi importante et hautement controversée en dis long sur cette institution et sur le pouvoir détenu par Castro.

    Dans l’introduction de son livre, même Ramonet déclare que Castro « prend toutes les décisions, petites et grandes. Malgré le fait qu’il consulte avec beaucoup de respect et de professionnalisme les autorités politiques concernées du parti et du gouvernement pendant le processus de décision, c’est Fidel qui a le dernier mot. ». Castro réfute cette accusation : « Beaucoup de monde me considère comme un voisin, me parle. ». En fin de compte, le pouvoir est détenu dans tout Etat par des dirigeants et des partis. Mais chaque direction et chaque parti devrait, spécialement dans un Etat ouvrier sain, être strictement contrôlé par les masses de la base.

    Dans un Etat ouvrier sain, tel qu’il existait en Russie entre 1917 et 1923, ce pouvoir était détenu par les soviets (assemblée) avec un contrôle strict des différences salariales, un droit de révocation des élus,etc. Ceci n’existe malheureusement pas encore à Cuba. C’est pourquoi le dilemme posé en Union Soviétique est également posé à Cuba, mais à une échelle plus réduite et sans l’héritage monstrueux du Stalinisme. Léon Trotsky a posé la question il y a 70 ans en parlant de l’Union Soviétique : « La bureaucratie va t’elle dévorer l’Etat ouvrier, ou la classe ouvrière va-t-elle nettoyer la bureaucratie ?… Les ouvriers ont moins peur, en jetant dehors la bureaucratie, d’ouvrir la voie de la restauration capitaliste. »

    Mécontentement grandissant

    Pour de grandes parties de la population cubaine, ceci résume probablement l’état d’esprit actuel. Le mécontentement s’étend, et particulièrement parmi la nouvelle génération. En effet 73% de la population est née après le triomphe de la révolution en 1959. L’aliénation de la nouvelle génération risque d’amener une « révolution sans héritiers ». Le remplacement de Fidel Castro par son frère Raul ne résoudra pas le problème sous-jacent. Il est associé à l’armée cubaine comme ministre de la défense.

    Au début des années 90, Raul était confronté à une forte austérité et eu l’idée d’utiliser l’armée dans quelques « expériences sur l’économie de marché ». Des officiers étaient envoyés étudier la gestion hôtelière en Espagne et la comptabilité en Europe. Raul a visité la Chine plusieurs fois afin d’étudier les politiques économiques de Pékin. Hans Modrow, le dernier premier ministre de la RDA, est actuellement en visite à Cuba pour partager des expériences sur la transition de son pays vers le capitalisme. Raul a aussi réduit la taille de l’armée et a poussé à une série d’innovations : des marchés de fermiers, le travail indépendant des plombiers, coiffeurs et autre entrepreneurs peu importants. C’est au travers de telles mesures que le capitalisme a déjà été réintroduit à Cuba, mais pas encore dans une position permettant la destruction des principaux aspects de l’économie planifiée.

    Il y a sans aucun doute des divisions au sein même de l’élite bureaucratique qui contrôle Cuba. Une partie voudrai « s’ouvrir » au capitalisme dans une forme « démocratique ». Leur difficulté est la loi Helms-Burton américaine. Même ces bureaucrates qui souhaiteraient le démantèlement de l’économie planifiée sont confronté à la perspective du retour à Cuba des réfugiés de Miami protégé par l’impérialisme US : « Pour mettre aux enchères les entreprises publiques, et vendre au plus offrant » (The wall street journal). Tout comme en Allemagne de l’est après la chute du mur, ces brutes demanderont vigoureusement le retour de « leur propriété », y compris des maisons occupées par des ouvriers et des paysans aujourd’hui. De plus, ils n’hésiteront pas à recourir à des bains de sang à l’encontre toute personne associée au régime de Castro.

    Plusieurs événements, et particulièrement les élections présidentielles américaines, pourraient avoir un effet profond sur Cuba. Barack Obama a déjà indiqué qu’il adopterai une ligne moins dure par rapport aux ennemis traditionnels des Etats-Unis : Cuba, Iran etc. B. Obama ou même Hillary Clinton – malgré ses récentes déclarations belliqueuses à l’encontre du régime cubain – pourrait agir pour démanteler partiellement ou totalement l’embargo. En Floride, la récession économique américaine apparaît avec des rangées entières de propriété vides. Même la nouvelle génération de réfugiées de Miami a atténué son opposition à la fin de l’embargo, pourtant longtemps implacable.

    Il y a déjà une pression considérable d’agriculteurs, du secteur touristique, sans parler de McDonald’s, afin de baisser les barrières pour prendre de bonnes parties bien profitable de Cuba. 100 membres du congrès américain demandent la levée de l’embargo. Et c’est bien cela qui est le plus grand danger pour les restes de l’économie de marché à Cuba. Des millions de touristes américains envahissant Cuba, même avec des dollars dévalués dans leurs poches, risque de donner un sérieux coup, peut-être mortel aux éléments restant de l’économie planifiée. Comme l’a expliqué Léon Trotsky, le réel danger pour un Etat ouvrier isolé n’est pas vraiment une invasion militaire mais « des biens bon marché dans les bagages de l’impérialisme ». Cette « invasion » de Cuba prendrai de nos jours vraisemblablement la forme du tourisme et des investissements capitalistes si le régime « s’ouvrait » dans le futur, sous Raul ou tout autre dirigeant. Mais ceci est une perspective peu probable, tant que Fidel sera en vie. Un réel danger de restauration capitaliste est cependant toujours existant.

    Le pétrole vénézuélien est vital pour Cuba. Mais que se passera t’il en cas d’explosion des cours du pétrole, ce qui est probable avec le début de la récession économique mondiale ? Le Venezuela sera profondément affecté, et par conséquent Cuba aussi.

    Il y a , et cela ne fait aucun doute, une autre frange de la direction et de la bureaucratie cubaine qui fera tout pour maintenir l’économie planifiée. Les marxistes, comme Trotsky l’a préconisé, devraient dans cette phase critique former un bloc avec cette frange de la direction et de la bureaucratie cubaine et chercher à mobiliser une résistance cubaine de masse contre toute menace de retour au capitalisme.

    Démocratie ouvrière

    Ceux qui, comme le membre du parlement britannique George Galloway, affirment que c’est l’embargo capitaliste sur Cuba qui est un important facteur de manque de démocratie sur l’île ont raison. Toutes les révolutions – même la guerre civile aux Etats-Unis – confrontées à une contre-révolution armée ont refusés de donner la liberté d’agir à ses opposants sous prétexte de « démocratie ». Mais nous ne soutenons pas à Cuba la liberté pour la contre-révolution de s’organiser afin de renverser la révolution. Vu les avantages de l’économie planifiée, et particulièrement si celle-ci s’organiserai dans le cadre d’une confédération socialiste démocratique rassemblant le Venezuela, la Bolivie et éventuellement l’Equateur, les contre révolutionnaire désirant revenir à la barbarie de la propriété terrienne et du capitalisme tel qu’il existe sur le continent Latino Américain auraient peu de marge de manœuvre.

    Cependant, si la question de l’interdiction de partis politiques de droite désirant un retour au capitalisme peut être un sujet un débat, ce ne devrai pas être le cas de la question de la démocratie ouvrière. Tout ceux qui soutiennent l’économie planifiée, y compris les trotskystes et autres, devraient pouvoir agir à Cuba. Ceci devrai faire partie du maintien et de l’extension de l’économie planifiée. Sans démocratie ouvrière, Cuba pourrait se retrouver des décennies en arrière et avec cela les espoirs de révolution socialiste en Amérique latine et dans le monde sérieusement mis à mal. Le maintien de cette révolution ne devraient pas être mis dans les mains d’un seul homme, aussi loyal et courageux soit t’il, ni dans les mains d’un groupe d’hommes et de femmes, mais dans les mains d’une classe ouvrière cubaine engagée et politiquement consciente, et liée aux masses d’Amérique latine et d’ailleurs.

    Ceci ne peut être accompli par le haut, comme l’ont montré les erreurs de Hugo Chavez au Venezuela. Les décisions doivent être prise tout de suite pour organiser une campagne de masse à Cuba afin de préparer le terrain à une vraie démocratie ouvrière. La crise mondiale du capitalisme globalisé et la révolte contre le néo-libéralisme en Amérique latine renforcent la perspective de défendre et de consolider les acquis de la révolution cubaine. Mais il ne faut pas perdre de temps dans lutte pour la démocratie ouvrière et le socialisme à Cuba, au Venezuela, en Bolivie et ailleurs.

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