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  • France. Grève du 5 décembre, une date qui peut tout changer

    Selon un sondage IFOP, 64% des Français estiment que la grève générale de ce jeudi 5 décembre est justifiée. La réforme des retraites du président Macron passe mal. La liste des secteurs appelant à la grève n’a cessé de s’allonger de jour en jour (SNCF, RATP, contrôleur aérien, transport routier et urbain (personnes et frets), EDF, étudiants, justice, éducation nationale, enseignement supérieur, pôle emploi, la poste, fonction publique territoriale, soignants, police, presse, édition,…). Cette situation à 3 mois des élections municipales pourrait avoir de lourdes conséquences dans un paysage politique où les partis traditionnels sont en ruine.

    Par Simon (Mons)

    Voilà déjà un an qu’a surgi le mouvement des Gilets jaunes. Un mouvement à la durée inédite qui a illustré toute l’ampleur de la colère qui vit jusqu’aux tréfonds de la société. Un mouvement qui a aussi représenté les premiers pas de la renaissance d’une conscience de classe à large échelle. Le mouvement de contestation contre la réforme des retraites en est le prolongement direct.

    Comme l’explique le député de a France Insoumise Adrien Quatennens, la situation en France est celle d’une « colère sociale qui dépasse la question des retraites ». La société craque de partout et les autorités ne font plus grand-chose pour combler les failles. Cette semaine encore, un reportage du Monde a mis en lumière l’explosion du nombre de mères sans domicile fixe alors que nous sommes encore sous le choc de l’immolation par le feu d’un étudiant qui venait de perdre sa bourse d’étude en novembre dernier. De tels gestes désespérés en disent long sur la France de Macron, la France des riches, la France de l’injustice.

    Mais de nombreux secteurs sont entrés en lutte ces derniers mois et ont tenté de riposter. On pense bien entendu aux blouses blanches. Mais cette journée internationale de lutte contre la violence envers les femmes a connu une participation impressionnante en France ce 23 novembre, et elles seront une nouvelle fois directement les plus touchées par le caractère austéritaire de cette réforme des retraites.

    Que contient exactement la réforme des retraites ?

    Pour l’heure, il s’agit d’allonger la durée de cotisation pour ouvrir son droit à un départ à la retraite, tout en diminuant le montant total perçu par les travailleurs en établissant un système de pension par point. Le gouvernement fait valoir la suppression des régimes spéciaux en jouant la carte d’une politique « pseudo-égalitariste » qui remettraient tout le monde sur le même pied d’égalité. Le tout en montrant du doigt les enseignants, cheminots,… qui bénéficient de régimes spéciaux que le monde du patronat qualifie de « privilèges ». Mais quand celui-ci parle d’égalité, il entend bien sûr une égalité à la baisse, au niveau de la catégorie de travailleurs dont le régime des retraites est le moins coûteux…

    Une politique véritablement égalitariste serait plutôt d’élargir à toutes et tous ces avancées sociales. Cela signifie d’aller rechercher l’argent là où il est, comme dans la poche des actionnaires du CAC 40 ! En 2018, le CAC 40 a réalisé pas moins de 100 milliards d’euros de profits.

    La productivité au travail a grandement augmenté ces dernières décennies : nous produisons plus, avec moins de travailleurs. Il est faux de dire que les retraites sont impayables : il n’y a jamais eu autant de richesses qu’aujourd’hui. Nous devons nous organiser contre ce hold-up du fruit de notre travail ! Au final, la lutte de masse qui verra le jour demain ne concerne pas que les retraites, elle a le potentiel de remettre en question l’aberration d’une société où les leviers de l’économie sont laissés aux mains d’une infime minorité de rapaces. Il faut revendiquer la nationalisation des sec-teurs-clés de l’économie (banques et finances, énergie, métallurgie, communication,…) et leur gestion et contrôle démocratique par les travailleurs et la collectivité. C’est la seule manière de pouvoir nous-mêmes collectivement planifier ce qui est socialement et écologiquement nécessaire pour l’ensemble de la classe des travailleurs.

    Construire l’unité contre le camp d’en face

    L’appel à la grève de ce 5 décembre donne l’opportunité de regrouper la colère présente dans toute la société en une lutte généralisée. Une majorité des organisations syndicales appelle à la mobilisation contre la réforme des retraites tandis que certains syndicats, à la RATP ou encore à la SNCF, ont fait de cette journée le point de départ d’une grève reconductible.

    Si le mouvement ouvrier utilise son outil de travail comme outil de combat, il est capable de jouer un rôle primordial pour un changement réel de système. La journée du 5 décembre doit être considérée comme un pas vers l’organisation d’une véritable grève générale qui bloquerait la totalité de l’économie du pays. Une telle démonstration de force permettrait non seulement de frapper les capitalistes là où cela leur fait le plus mal, au portefeuille, mais clarifierait aussi que ce sont les travailleurs qui produisent les richesses et que sans eux, plus rien ne tourne.

    Sur base de cette confiance, et de l’enthousiasme que créée l’actuel contexte international de lutte de masse, il sera possible de diriger le mouvement vers le capitalisme lui-même, de le renverser, et de poser les bases d’une économie centrée sur le bien de tous, une économie socialiste démocratique, où les secteurs-clés de l’économie seraient démocratiquement contrôlés et gérés par les travailleurs et leurs familles.

  • 20.000 personnes à Paris pour la marche pour le climat

    Ce samedi 21 septembre, 20.000 personnes ont participé à la marche pour le climat à Paris, dans le cadre d’une “grève de la terre ” internationale qui a mobilisé plus de 4 millions de personnes dans le monde. Le même jour, les Gilets Jaunes avaient également organisé leur 45ème journée d’action.

    Par Tim (Gand)

    Les “Gilets Jaunes” ont été empêchés de se rassembler le matin en raison d’une importante présence policière qui a occupé les principaux points de rencontre de leurs manifestations. Environ 7.500 policiers étaient mobilisés dans la capitale française. Tous ceux qui étaient ne fut-ce que légèrement soupçonnés de faire partie des mobilisations des Gilets Jaunes ont été arrêtés ou dispersés par l’utilisation de grandes quantités de gaz lacrymogènes.

    Dans l’après-midi, les manifestants pour le climat se sont réunis dans le centre-ville, où ils ont été rejoints par certaines des couches les plus conscientes du mouvement des Gilet Jaunes. Plusieurs milliers de personnes étaient présentes pour souligner le lier entre leurs protestations contre les prix élevés et les bas salaires, d’une part, et la nécessité d’une action urgente pour sauver la planète, d’autre part. Les slogans appelaient à faire payer les riches et les multinationales pour la crise climatique et à changer le système. Ces slogans étaient corrects et constituent un bon point de départ pour débattre du type de société dont nous avons besoin pour sauver la planète et garantir des conditions de vie décentes à chacun.

    Le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) était présent avec du matériel soulignant que l’écrasante majorité de la pollution est causée par un petit groupe de multinationales. Nous avons souligné que les ressources et la technologie existent pour assurer une reconversion économique efficace et immédiate afin de sauver la planète. Le système capitaliste assure que cette richesse et ces technologies soient contrôlées par une infime élite de capitalistes fortunés, ce qui rend impossible leur mobilisation pour l’effort climatique.

    Sous le pression du mouvement pour le climat, divers gouvernements à travers le monde ont déclaré l’urgence climatique, sans toutefois prendre de mesures efficaces pour sauver le climat. Les seules mesures qui sont prises visent à faire payer la crise à la classe ouvrière, par exemple par de nouvelles taxes.

    La classe ouvrière a le pouvoir de changer la société. Le mouvement ouvrier organisé a le pouvoir de paralyser l’ensemble de la société s’il se mobilise efficacement. Ce pouvoir s’est avéré capable de forcer les classes dirigeantes à faire de profondes concessions à la classe ouvrière, et c’est le seul moyen efficace de forcer les capitalistes et leurs politiciens à prendre des mesures climatiques efficaces dans l’intérêt de la majorité de la population. La manière la plus efficace d’y parvenir est de remplacer le système capitaliste actuel, qui repose sur la cupidité et les profits de quelques-uns, par une société socialiste basée sur les besoins réels de la population et de l’environnement.

    Par conséquent, il est crucial que le mouvement pour le climat se lie à la classe ouvrière organisée et au mouvement syndical. Il était problématique que les dirigeants des syndicats français aient refusé de mobiliser pour cette manifestation. Des militants syndicaux étaient présents à titre individuel, sans aucune mobilisation organisée. C’était également vrai concernant les principaux partis de gauche en France : ni la France Insoumise ni le NPA (Nouveau Parti Anticapitaliste) n’avaient de délégations dans la manifestation, et nous étions l’une des rares organisations révolutionnaires de gauche à intervenir avec du matériel politique.

    Cette absence de partis politiques et de syndicats a également eu un effet sur la conscience dans la manifestation. Nous avons pu constater une grande ouverture à nos idées, mais il existait une très forte atmosphère antiparti et antisyndicale parmi de nombreux participants.

    Malgré cela, notre intervention a été couronnée de succès : nous sommes intervenus avec une équipe internationale enthousiaste composée de camarades belges, allemands, suédois, anglais, irlandais et français, et nous avons vendu les 100 exemplaires de notre journal français spécialement produit pour cette occasion de même que 12 exemplaires de la version française de notre journal belge, Lutte Socialiste. Avec cette intervention, nous avons réanimé la tradition du CIO d’organiser des mobilisations internationales afin d’intervenir dans des événements importants ou d’aider à construire des sections plus petites de notre Internationale.

    Le CIO est ouvert à tous ceux qui veulent lutter avec nous pour une société socialiste ainsi que contre la dictature barbare du capital et ses guerres et catastrophes écologiques. Rejoignez-nous !

    Voici ci-dessous le texte d’un des tracts qui accompagnait nos journaux et qui abordait plus spécifiquement la thématique des Gilets Jaunes.

    STOP À LA POLITIQUE POUR LES RICHES Organisons la colère et orientons?là vers tout le système !

    10 mois après le début du mouvement, à quelques mesurettes près, rien n’a changé concernant nos conditions de vie. Elargissons la lutte à tous ceux qui souffrent de la politique pro?riches menée par les élites économiques et politiques !

    CONSTRUISONS L’UNITÉ FACE AU CAMP D’EN FACE

    Le mouvement ouvrier doit s’engager dans la lutte

    Si le mouvement ouvrier utilise son outil de travail comme outil de combat, il est capable de jouer un rôle primordial pour un changement réel de système. Il pourrait aider à l’organisation d’une véritable grève générale qui bloquerait toute l’économie et ferait extrêmement mal aux grands capitalistes et à leurs relais politiques. Il permettrait aussi de davantage structurer le mouvement et de s’organiser contre la répression.

    Malheureusement, plusieurs directions syndicales ont refusé de soutenir le mouvement. Mais ce n’est pas le cas partout. En France, le mouvement est le plus fort justement là où il y a une convergence. Comme à Toulouse où le blocage a été massif à plusieurs reprises, aussi grâce au renfort des syndicats de routiers.

    Les organisations du mouvement ouvrier doivent entrer en action, avec et aux côtés des Gilets Jaunes. Elles doivent rejoindre la lutte avec respect, sans donner de leçons, en tenant compte du fait que la direction syndicale a miné son autorité auprès d’une grande partie de la classe ouvrière.

    Structurer la lutte et l’orienter contre le système permettraient de s’opposer plus efficacement aux tentatives de division de la protestation. Cela permettrait de contrer les provocations policières qui ont pour but de criminaliser notre mouvement, et aussi les frustrations de gens bloqués, voire même de certains d’entre nous qui, sans perspective pour aller vers une victoire, peuvent se laisser entrainer par les provocateurs policiers. Depuis le début du mouvement, de nombreuses références ont été faites à Mai 68. Au plus fort de ce mois de révolution, c’était la combinaison de la jeunesse en lutte et de la grève générale de 10 millions de travailleurs qui avaient failli faire tomber le système. Un tel type de lutte pourrait arracher nos revendications.

    Faisons le lien avec le milieu syndical, pour organiser une grève générale qui puisse bloquer l’économie de l’intérieur La lutte pourrait s’organiser, sur base d’assemblées locales qu’il faudrait développer localement et nationalement. Elargissons nos grandes journées de lutte, d’action, et de blocages avec une grève générale unissant travailleurs du public et du privé avec les jeunes et les retraités contre la politique de Macron.

    Exigeons :

    • La baisse immédiate et le blocage des prix de l’essence et de l’énergie ;
    • L’augmentation des salaires et des allocations sociales et leur indexation sur les prix, y compris du carburant ;
    • Mettre les besoins au centre de la politique : transports publics gratuits et non polluants, services publics (notamment de proximité : crèches, écoles, maternités, bureaux de poste, logements publics sociaux, …),
    • La remise en place de l’impôt sur la fortune, la lutte contre l’évasion fiscale par les ultra?riches et les multinationales, y compris par la réquisition sous contrôle démocratique, la fin des taxes indirectes (TVA, etc.) remplacées par une imposition forte des riches et des grandes entreprises ;
    • Un grand service public environnemental pour créer des centaines de milliers d’emplois nécessaires à la transition énergétique et écologique (agriculture écologique, alimentation en circuits courts, énergies renouvelables, …)
    • Un tel programme nécessite des mesures réellement socialistes telles que la nationalisation et l’unification de tous le secteur financier dans un service national d’investissement et de financement sous contrôle démocratique de la collectivité ; la nationalisation des secteurs?clés de l’économie afin que les grandes entreprises ne puissent continuer à saboter la transition écologique et que la planification démocratique et écologique, basée sur les besoins y compris écologiques, devienne possible.

     

  • Retour sur l’échec du gouvernement de gauche PS-PCF sous la présidence de François Mitterrand

    France, 1981-1984 : de l’espoir au ‘‘tournant de la rigueur’’

    10 mai 1981. A Paris, 200.000 personnes se rassemblent à la Bastille et crient leur joie. Des scènes de liesse éclatent dans toutes les villes du pays. François Mitterrand vient de remporter le 2e tour du scrutin présidentiel avec 52% des voix. Pour la première fois de l’histoire de la Ve République (instaurée en 1958), c’est un président de gauche qui est élu. Exprimant l’effroi patronal, le quotidien de droite Le Figaro écrivait au lendemain des élections : “Le collectivisme d’inspiration marxiste est désormais à nos portes”. Et pourtant…

    Par Boris (Bruxelles)

    La conquête du pouvoir

    François Mitterrand avait été ministre à 11 reprises sous la IVe république (1946-58), il n’avait rien d’un révolutionnaire, mais avait bien remarqué à quel point les événements de Mai 68 avaient profondément radicalisé les travailleurs. Lorsqu’il prend la tête du tout nouveau Parti Socialiste (PS) en 1971, il l’engage sur la voie d’une alliance électorale avec le Parti Communiste Français (PCF) qui, en freinant les grèves de ’68, avait démontré qu’il savait rester dans les limites du système.

    En 1972, l’Union de la Gauche est constituée autour d’un programme commun réunissant le PS, le PCF et le Mouvement des radicaux de gauche (MRG) et reposant sur des réformes sociales et la nationalisation de neufs grands groupes industriels ainsi que du crédit. Chez les patrons et les riches, on craint le pire, d’autant plus qu’éclate peu après la crise économique de 1973-74. Les fermetures d’usine et les licenciements massifs s’enchaînent, un nouveau phénomène fait son apparition : le chômage de masse. Entre 1974 et 1981, le nombre de chômeurs triple et atteint le million et demi.

    Le programme commun n’est hélas pas utilisé pour aider à construire une relation de force pour la lutte. Le PS, le PCF et les directions syndicales détournent au contraire celle-ci pour tout miser sur une victoire électorale de la gauche. Ainsi, en 1978-79, lorsqu’éclate une révolte ouvrière de quatre mois en Lorraine et au Nord-Pas-de-Calais contre le licenciement de 21.000 sidérurgistes, Mitterrand promet simplement, une fois élu, de rouvrir les bassins sidérurgiques fermés. Les sidérurgistes payeront chèrement la désorganisation de la lutte.

    Aux élections de 1976 et 1977, le PCF est devancé par le PS. Désireux de regagner sa position de première force de gauche, le parti quitte l’Union de la Gauche et justifie son départ en raison du nombre insuffisant de nationalisations prévues. Dans les rangs du mouvement ouvrier, où l’on aspire à un changement de politique, la politique de zigzags du PCF est mal perçue alors que le PS est considéré comme le parti unitaire à gauche.

    1981-1982. Une politique de relance keynésienne et le sabotage des capitalistes

    Le programme électoral de Mitterrand en 1981 ressemble au programme électoral du PTB en 2019. On y trouve un programme de relance économique grâce aux investissements publics (création de 150.000 emplois dans les services publics, politique de grands travaux publics, construction de logement sociaux,…), à l’augmentation du pouvoir d’achat, à l’instauration de la semaine des 35 heures pour combattre le chômage et à la redistribution des richesses via l’introduction d’un impôt sur les fortunes des plus riches. Le PS de l’époque va même plus loin en défendant la nationalisation de neuf grands groupes industriels, du crédit et des assurances. Il n’est cependant pas question d’une transformation socialiste de la société.

    Finalement, c’est la victoire au second tour de l’élection présidentielle et un gouvernement comprenant 4 ministres du PCF initie une batterie de réformes : embauche de 55.000 fonctionnaires ; augmentation du salaire minimum de 10%, des allocations familiales et logement de 25%, de l’allocation pour les personnes handicapées de 20% ; abolition de la peine de mort; abrogation de la loi ‘‘anti-casseurs’’ ; régularisation de 130.000 sans-papiers par le travail ; création de l’impôt sur les grandes fortunes ; augmentation de 40% à 500% des budgets pour le logement, la culture, l’emploi et la recherche ; blocage des prix ; nationalisation des 36 premières banques de dépôt ainsi que de Paribas, de Suez et de 5 grands groupes industriels (CGE, PUK, Rhône-Poulenc, Saint-Gobain, Thomson) ; introduction de la semaine des 39 heures, de la 5e semaine de congés payés, de la pension à 60 ans et d’une nouvelle législation du travail ; encadrement et plafonnement des loyers ; abrogation du délit d’homosexualité.

    Le gouvernement lance une politique de relance keynésienne – par la consommation et les investissements – mais l’exceptionnelle période de croissance économique prolongée d’après-guerre était terminée. Depuis la moitié des années ’70, le capitalisme était en crise. Les États-Unis étaient entrés en récession et le ralentissement économique de l’Allemagne, avait un profond impact sur l’économie française. Le pays était en pleine stagflation : une récession économique combinée à une inflation galopante.

    Le gouvernement va alors tout faire pour convaincre le patronat du bienfondé de sa politique de relance afin de restructurer le capitalisme français et de renforcer sa position concurrentielle. Mais les capitalistes veulent écraser les espoirs des travailleurs et organisent donc le sabotage de la politique du gouvernement.

    Puisqu’avec la crise, les capitalistes perdent confiance en leur propre système économique, ils préfèrent placer leur argent dans les investissements spéculatifs qui explosent à l’époque. L’État doit donc les remplacer dans les entreprises nationalisées. Le gouvernement ayant voulu respecter le cadre légal plutôt que s’appuyer sur l’action du mouvement ouvrier, la droite et les patrons saisissent le conseil constitutionnel, font valoir le droit de propriété privée et arrachent 39 milliards de francs de l’État en compensation pour l’ensemble des nationalisations. Certains patrons se frottent les mains : avec la crise, ce sont aussi des pertes qui ont été nationalisées à grands frais.

    Les banques nationalisées sont vite confrontées aux limites d’un fonctionnement qui respecte les lois du marché privé. La politique de crédit bon marché échoue à relancer les investissements privés tandis que le Franc est attaqué par les marchés. La Banque de France tente de maintenir ce dernier à flot en utilisant les réserves de devises, qui s’effondrent. Entre 1981 et 1983, le franc est dévalué 3 fois. L’inflation mine l’efficacité des mesures en faveur du pouvoir d’achat. Le déficit sur la balance commerciale (les importations dépassent les exportations) se creuse fortement. La Banque de France bloque la mise à disposition de plus de liquidités et force le gouvernement à emprunter sur le marché privé. Tout cela s’accompagne d’une fuite de capitaux d’ampleur inédite : les grandes fortunes fuient l’impôt.

    De nombreux riches franchissent la frontière suisse avec des valises ou des sacs poubelles remplis d’argent et de l’or planqué dans les roues de secours. Les capitaux étrangers quittent également le navire. Le contrôle de taux de change sera instauré ainsi qu’un renforcement des contrôles à la frontière, mais les transferts de fonds vers le Suisse se poursuivront.

    Le ‘‘tournant de la rigueur’’

    Très vite, le gouvernement PS-PCF recule. Un blocage salarial de 4 mois prend place en juin 1982, suivi de la suppression de l’indexation automatique des salaires. Le PCF dénonce, mais ses ministres ne remettent pas en cause leur soutien au gouvernement. Le patronat applaudit : la gauche vient de réussir sans la moindre résistance ce que la droite n’avait jamais pu qu’espérer.

    Le 21 mars 1983, c’est le ‘‘tournant de la rigueur’’, c’est-à-dire l’abandon des politiques économiques keynésiennes pour embrasser le monétarisme néolibéral. PS et PCF décident que la France reste dans le Système monétaire européen (SME). Pour résorber les déficits, le ‘‘plan Delors’’ d’austérité est mis en place.

    En mars 1984, les ministres du PCF participent à une dernière attaque d’envergure : la suppression de 21.000 emplois dans la sidérurgie d’Etat, soit le même nombre que la droite en 1978-1979. 150.000 travailleurs manifestent en Lorraine, mais la marche vers Paris organisée par les directions syndicales prend des allures d’enterrement. L’échec du gouvernement PS-PCF qui devait combattre le chômage et sauver la sidérurgie est total. Aux élections de juin 1984, le Front National obtient 11% et réalise sa première percée au niveau national. Le PS chute à 21% et le PCF à 11%. Le PCF quitte le gouvernement, mais jamais plus il ne regagnera ses bastions ouvriers perdus.

    L’échec du réformisme, pas du socialisme

    Cet échec se déroule au moment où Thatcher au Royaume-Uni et Reagan aux États-Unis affrontent la classe ouvrière pour durablement modifier les relations de force en faveur du capital. La voie est ouverte pour quatre décennies de politiques néolibérales dramatiques. A partir du ‘‘tournant de la rigueur’’ de mars 1983, la participation du PS au pouvoir en France, mais aussi en Belgique et ailleurs en Europe, se limitera à l’application de la politique néolibérale. Mais cet échec, ce n’est pas celui du socialisme, il s’agit de celui du réformisme.

    En 1986, Henri Emmanuelli (secrétaire d’État du gouvernement de 1981 à 1984) a résumé son avis sur le virage de mars 1983 en ces termes : ‘‘Les socialistes ont longtemps rêvé d’une troisième voie entre le socialisme et le capitalisme. À l’évidence, elle n’est plus possible. La solution, c’est de choisir clairement l’un des deux systèmes et d’en corriger les excès. Nous avons choisi l’économie de marché.’’ Il aura manqué en France un parti révolutionnaire implanté dans le mouvement des travailleurs qui ne se limite pas à un programme de réformes mais qui lie celui-ci à la perspective du renversement du capitalisme et du remplacement de l’économie de marché par une économie démocratiquement planifiée.

  • J’veux du soleil : Ruffin porte la voix des Gilets Jaunes

    Si vous n’êtes jamais allés sur un rond-point occupé par les Gilets Jaunes ; si vous avez des à priori sur le mouvement et sa composition ; si vous croyez les propos de leurs détracteurs les identifiant comme racistes, homophobes, casseurs, fous furieux ; si vous vous demandez pourquoi et comment il se fait que le mouvement, bien qu’essoufflé, perdure encore aujourd’hui : allez voir ce film.

    Par Laure, Gauche Révolutionnaire (CIO-France)

    Le mouvement GJ en image

    De villes en ronds-points, le député du groupe parlementaire de la France Insoumise François Ruffin et son cameraman sillonnent la France à la rencontre de ceux qui, depuis le 17 novembre, se sont relayés pour tenir ces ronds-points transformés en ‘‘villages de Gaulois réfractaires’’, ‘‘mini ZAD’’ (Zone à défendre),… Qu’importe leur dénomination, ces endroits ont été transformés avant tout en lieux de rencontre et d’organisation, de vie et d’échange, de résistance et de reconnaissance, entre frères de galère, sœurs de misère, exploités et petits exploitants dont le dénominateur commun est celui du ras-le-bol, du refus de cette survie imposée. De gens qui refusent, parfois pour la première fois, d’être les oubliés d’un système où la minorité se gave goulûment sur le dos des autres qui en bavent.

    Portraits des invisibles qui subissent

    Il ne faut pas s’attendre à un film qui permettrait de comprendre l’organisation de ces lieux de résistance, de la mise en place des Assemblées générales à l’organisation logistique ou stratégique des blocages. Il n’aborde pas non plus la gigantesque répression policière et judiciaire. Le film nous propose un recueil de portraits de GJ asphyxiés par la vie, sortant de la honte pour relever la tête et dire que ça suffit. Il nous présente une diversité de portraits émouvants d’une couche auparavant silencieuse de travailleurs précaires, chômeurs, retraités, mères célibataires et petits indépendants en galère qui se relayaient sur les carrefours occupés.

    Les naufragés du capitalisme

    Ces portraits donnent à voir à quel point la société piétine, exploite, presse jusqu’à la moelle, puis laisse pourrir tous ceux qui la composent et pourtant créent les richesses. Personne n’est épargné sauf la classe dominante. Elle laisse sur le banc la plupart d’entre nous, nous met en compétition, nous tue à petit feu.

    Le film ne montre qu’une partie du tableau. Il faut y rajouter l’abandon des services publics, les postiers et cheminots qui luttent depuis de nombreux mois contre la privatisation des services; les profs et les lycéens en lutte contre les lois qui dégradent l’éducation. Le pays est traversé de luttes sociales et une certaine convergence a eu lieu autour du mouvement des Gilets Jaunes.

    La solidarité pour tenir

    Comme on l’entrevoit dans le film, la solidarité engendrée par les occupations quotidiennes et nocturnes des ronds-points est frappante : dons, démonstrations de solidarité, discussions,… Une puissante force collective et une volonté (et nécessité) de s’organiser ensemble se dégageaient des lieux d’occupation.

    Lever la tête collectivement est une prise de conscience qui restera gravée dans les mémoires. Certains ont décidé de ne plus se laisser faire à l’usine non plus. C’est le cas notamment des ouvriers des entrepôts de Décathlon qui, grâce au mouvement, ont senti qu’il était temps que la peur change de camp et ont bloqué leur lieu de travail pour la première fois depuis 30 ans, afin d’exiger de meilleures conditions de travail et de salaire.

    Réappropriation des richesses : une nécessité

    Le film laisse ouvertes les pistes qui pourraient être tirées de ce mouvement d’envergure, notamment quant à la manière de poursuivre la lutte. La seule conclusion possible d’un tel mouvement, c’est la nécessité de l’appropriation des moyens de production et de décision par la collectivité. C’est la seule manière de faire vaciller ce système moribond qui nous plonge dans la violence sociale, puis policière et judiciaire dès qu’on le remet en cause. Le mouvement des Gilets Jaunes a montré de quoi nous sommes capables en termes d’organisation et de solidarité.

  • Notre patrimoine et nos infrastructures méritent plus d’investissements publics !

    Photo de GodefroyParis — de WikimediaCommons, CC BY-SA 4.0, Link

    L’austérité qui a frappé les travailleurs et leurs familles toutes ces dernières années n’a épargné ni les services publics, ni les infrastructures. Au prix d’une augmentation du nombre d’incidents. En Belgique, le souvenir de l’effondrement des tunnels bruxellois est encore vif. On se souvient aussi que la pluie a percé le plafond de certains musées. A l’étranger, il y a eu l’effondrement du viaduc du Polcevera à Gênes, l’incendie du Musée national du Brésil à Rio de Janeiro et, maintenant, celui de la Cathédrale Notre-Dame de Paris.

    C’est connu, la politique d’austérité a été synonyme de transfert de richesses des pauvres vers les riches, mais aussi de la collectivité vers les riches. C’est à peine s’il y a encore eu des investissements dans les services publics et l’infrastructure, en ce compris le patrimoine. Les experts affirment que chaque “pays civilisé” consacre 3% de son PIB aux investissements publics. Cela fait 30 ans que la Belgique n’atteint pas cela. Pourquoi n’y a-t-il plus d’investissement aujourd’hui ?, questionne De Tijd dans un édito du 16 août 2018. ‘‘Parce que les autres dépenses devraient être supprimées. Les politiciens, cependant, préfèrent dépenser de l’argent en cadeaux pour plaire aux électeurs et aux groupes d’intérêt. Les investissements dans les infrastructures de base en souffrent.’’ Bref : tout doit céder la place aux cadeaux fiscaux à une petite minorité d’ultra-riches.

    Les spécialistes du patrimoine se plaignent partout du manque de moyens. C’était déjà le triste constat qui avait été tiré du désastre de l’incendie du Musée national du Brésil. Mais le problème ne se limite pas au monde néocolonial ou aux pays émergents. En Europe occidentale également se font sentir les conséquences d’années d’économies. Ce n’est que lorsqu’il est trop tard, comme dans le cas de l’incendie de Notre Dame, que l’on s’en aperçoit soudainement. Et alors arrivent les milliardaires qui désirent «donner » des millions d’euros. C’est à peine s’ils acceptent encore de payer des impôts, ce qui a un sévère impact sur les fonds dédiés au patrimoine notamment. Et n’oublions pas que leurs donations sont soumises à l’exonération fiscale ! La générosité des donateurs est en réalité en partie payée par les caisses publiques : les entreprises qui investissent dans la culture peuvent fiscalement déduire 60% de ces dépenses (66% de réduction d’impôt sur le revenu pour les particuliers). Selon cette logique, l’impôt cède la place à la charité. Nous voilà donc remontés au XIXe siècle ou, dans le cas de l’art, au Moyen Âge, lorsque l’art était une prérogative privée des plus riches.

    En Belgique, Theo Francken a encore fait parler de lui sur tweeter : « Après la destruction par l’État islamique des plus anciens monastères et sanctuaires du christianisme en Syrie, nous risquons de perdre le monument le plus beau et le plus impressionnant d’Europe. Quelle journée noire ! » L’objectif de l’ancien secrétaire d’Etat à l’asile et à la migration était bien entendu de s’en prendre une fois de plus aux musulmans. Francken avait été moins loquace au sujet de l’attentat de Christchurch…

    Le gouvernement auquel a participé Francken, que la N-VA entend d’ailleurs remettre sur les rails après les élections, n’a pas ménagé ses efforts pour que le taux d’investissements publics n’atteigne pas les 3% du PIB. Son parti veut réaliser d’autres économies, tout comme en 2014, en faisant valoir que le déficit budgétaire doit être comblé.

    Il est remarquable que les politiciens de droite parlent souvent de “nos valeurs culturelles”, mais qu’ils ne se montrent pas prêts à investir massivement dans les infrastructures et le patrimoine. Leur rhétorique ne sert qu’à diviser et à jouer sur le racisme. La culture, ils s’en moquent. La seule force qui exige sérieusement la fin de cette politique d’austérité, c’est le mouvement des travailleurs.

    Certains peuvent se demander s’il ne vaudrait pas mieux investir dans le logement plutôt que dans une vieille cathédrale. Il est vrai que le parallèle s’impose avec la catastrophe survenue dans le bloc londonien des tours Grenfell en 2017. A l’époque, les milliardaires n’ont pas fait la queue pour construire de nouveaux logements. Lorsque les projets de construction et les investissements dépendent de la charité, ce n’est pas la communauté qui fixe les priorités et, en outre, la réponse aux catastrophes n’arrive qu’après coup, les moyens manquent pour la prévention. Des investissements publics considérables sont nécessaires dans le logement et les infrastructures, dont le patrimoine. En tant que service public, le patrimoine doit être sous le contrôle de la collectivité afin d’être accessible à de larges couches de la population.

  • France. Gilets Jaunes : entretien au cœur du mouvement


    “Faire le lien avec le milieu syndical, pour organiser une grève générale qui puisse bloquer l’économie de l’intérieur”

    Plusieurs mois après le début du mouvement, la colère est insatiable contre Macron et son monde. Un mouvement puissant et déterminé, même s’il connait bien sûr des hauts et des bas. Déclenché autour de la hausse des taxes sur le carburant, le mouvement s’est rapidement transformé en révolte générale contre le coût de la vie, les salaires, retraites et allocations trop faibles, les privilèges des plus riches et des élus, la manipulation de l’information par les médias établis, la violence policière et l’arrogance des élites et les manquements démocratiques. Nous avons pu discuter de ce mouvement inédit, de sa nature et de ses perspectives avec Rachel (1), Gilet Jaune organisatrice de différents blocages et manifs à Montélimar (Drôme, Sud-Est) et membre de la Gauche Révolutionnaire, organisation-sœur du PSL en France.

    “Le mouvement étonne absolument tout le monde, y compris les Gilets Jaunes, par sa durée, par la détermination des gens et la capacité à mobiliser” explique Rachel. Des mois après, et malgré les nombreuses tentatives de discréditation et de déviation, le mouvement jouit toujours d’une très grande sympathie, même si surtout encore passive.

    Depuis le début du mouvement, le gouvernement a dû reculer, peu, mais quand même : sur certaines taxes sur le pétrole et un léger bonus pour le salaire minimum. “Macron est vraiment en mauvaise posture. Il est sur un vrai champ de mine. Où qu’il aille, ça peut réexploser. Et donc il y a une certaine paralysie du programme économique que le gouvernement voulait mettre en place. Et ça, quelque part, c’est déjà une victoire.”

    La fameuse ‘lettre aux français’ de Macron, lançant le ‘Grand débat national’, est l’un de ces essais de déviation. “C’est un tentative de division. D’abord sur la question d’aller ou pas dans ce débat demandé par Macron, et deuxièmement en avançant des questions comme la procréation médicale assistée (PMA), le mariage pour tous et l’immigration. Il veut diviser un mouvement dangereux et fort.” Comment va réagir le mouvement aux appels à ‘débattre’ du président des riches ? “Des discussions que j’ai eu à notre QG, il n’y a absolument personne qui veux entrer là-dedans. Aucun gilet jaune actif avec qui j’ai pu discuter ne perçoit ce soi-disant grand débat comme quelque chose pouvant apporter une solution à nos revendications.”

    L’extrême droite et les tentatives de division

    Macron relance la discussion sur l’immigration et la laïcité. Des thèmes qui, depuis que le mouvement s’est intensifié et massifié, sont clairement plus en arrière dans les discussions et revendications parmi les Gilets Jaunes. En général, d’ailleurs, les idées racistes comme les organisations d’extrême droite sont peu présentes dans le mouvement. “Elles font beaucoup de bruit dans les médias et sur les réseaux sociaux, mais elles n’organisent pas grand-chose sur place. Beaucoup d’électeurs d’extrême droite sont par contre présents, mais n’osent pas non plus avancer ouvertement leurs idées.”

    Le mouvement fait aussi face à de nombreuses accusations d’antisémitisme. C’est, comme toujours, une tentative de diviser le mouvement et, plus largement, le soutien parmi la population. Tour à tour accusé d’être ‘anti-climat’, puis ‘complotiste’ après l’attentat de Strasbourg, le mouvement est attaqué par la classe dominante. Mise en grosse difficulté, celle-ci essaie toujours de dévier l’attention et de ‘diviser pour régner’, ou, dans ce cas : ‘diviser pour éviter un mouvement de masse de tous ceux qui ont intérêt à faire tomber Macron et son monde’.

    Dans un mouvement peu structuré, chaque personne émet une analyse ou une idée sans que celles-ci soient pour autant portées par l’ensemble du mouvement. Il est d’ailleurs particulièrement remarquable que les idées nauséabondes soient très souvent directement répondues par d’autres Gilets Jaunes, souvent plus nombreux. Mais les choses remarquables qui sont positives pour le mouvement sont très rarement relayées par les médias dominants ; elles sont peu utiles aux intérêts des puissants.

    “Dans le Gard, plus au sud, certains QG sont composés quasi que d’électeurs d’extrême-droite. Il y en a qui disent ne plus vouloir voter dans ce sens, parce qu’ils se sont impliqués dans le mouvement, avec notamment des gitans, et se sont rendus compte qu’on est tous ensemble dans la lutte.” La trahison des partis traditionnels, du PS surtout, a poussé beaucoup de travailleurs à la recherche d’une alternative politique ou même simplement d’un vote-sanction. L’absence d’une alternative correcte et claire de la part de la gauche a laissé l’espace pendant longtemps à des forces populistes de droite pour se construire, comme le Rassemblement National (ex-FN) de Marine Le Pen. Beaucoup de gens voient encore chez elle, de manière erronée, un vote plus cohérent qu’à nouveau voter pour Macron ou son camp. Il faut y apporter une alternative de gauche à ce vote anti-système.

    La France Insoumise

    “La France Insoumise de Jean-Luc Mélenchon est la formation à gauche qui a la position la plus juste depuis le départ par rapport au mouvement.” De nombreuses revendications des Gilets Jaunes étaient en effet présentes dans le programme ‘L’Avenir en commun’ pour les élections de 2017. C’est d’ailleurs la FI, bien plus que le RN, qui représente un réel danger pour Macron et les élites. “Il y a clairement une manipulation médiatique pour essayer de minimiser le lien et la représentativité que pourrait avoir la France insoumise. Surtout là avec les européennes qui arrivent, la FI est une vraie menace pour Macron.”

    Mais la classe des travailleurs se remémore les nombreuses trahisons des représentants politique de gauche. C’est pourquoi le mouvement rejette en général les étiquettes politiques, même si “beaucoup d’Insoumis sont actifs parmi les Gilets Jaunes”. La question cruciale du relais politique devra pourtant se poser. Pas seulement pour les urnes, mais surtout pour organiser la colère et l’orienter vers un réel changement. La France Insoumise, très active depuis le début de la législature pour stimuler la contestation contre la politique de Macron, a clairement les armes en termes de programme pour jouer ce rôle. Mais elle devra tout de même revoir une partie de son fonctionnement interne peu démocratique, et se battre pour une réelle rupture avec le système capitaliste et l’instauration d’une alternative sociétale.

    Revendications et structuration

    Pour son débat, Macron dit n’avoir aucun tabou, mais refuse de revenir sur les mesures déjà prises… “Il dit tout de suite qu’il ne veut pas lâcher sur les questions économiques et sociales.”

    La plateforme de 42 revendications sortie il y a quelques semaines comporte pourtant énormément de demandes socio-économiques. “A côté du RIC (2) et de la démission de Macron bien sûr, certaines revendications sortent du lot, comme l’augmentation du SMIC (3), la réinstauration de l’ISF (4), la suppression du CICE (5) qui signifie 40 milliards de cadeaux fiscaux aux plus grandes entreprises, et l’abolition des privilèges des élus.” Mais c’est bien le RIC, moins coûteux et plus inoffensif, que les médias surexposent. “Demander une réelle démocratie, c’est important. Mais pour moi, si on ne prend pas le pouvoir économique, et si on n’a pas d’égalité, on n’aura jamais de démocratie. Le système nous oppresse économiquement. Il faut le renverser, pour pouvoir imposer la démocratie.”

    “Des obligations de référendum peuvent être un premier pas. Mais la mise en avant de cette revendication par les médias, c’est une tentative d’enfermer le débat dans un truc institutionnel.” Cette surexposition pousse la demande pour le RIC à être largement reprise au sein du mouvement. “C’est présenté comme la solution miracle par tout un tas de Gilets Jaunes. Avec l’idée que, si on se limite à ça, c’est davantage possible de l’obtenir et donc, après, d’avoir le pouvoir pour tout changer. Mais beaucoup d’autres, dont la quasi-totalité dans notre QG, pensent qu’on ne peut pas se contenter de revendications démocratiques. (…) On est dans un mouvement extrêmement flou, même en termes de revendications. Les gens ne savent pas exactement ce qu’ils veulent, si ce n’est vivre mieux. Mais concrètement, comment traduire ça, ça reste flou, même si ça dépend très fort d’un endroit à l’autre.”

    “La faible structuration du mouvement est perçue par la plupart des Gilets Jaunes comme une faiblesse, une fragilité. Mais en même temps, il y a une tendance à rejeter toute représentativité. Ceci dit, c’est très divers. Il y a des endroits où ils sont très structurés, avec des représentants.” Des points forts sont présents, comme la rédaction collective de tracts comprenant les revendications et les appels aux manifs et à rejoindre le mouvement, ainsi que la tenue régulière d’Assemblées Générales. “Sur Montélimar, on a fait quotidiennement des AG avant Noël. Depuis, on est passé à deux AG par semaine. Il y a cette idée lancée au niveau départemental de faire une AG avec deux mandatés pour chaque QG de Gilets Jaunes, dans tout le département. Ça a été voté à notre AG à une très large majorité. Mais il faudra bien sûr voir comment ça se met en place.”

    La violence, l’une des manipulations des médias établis

    La violence semble être omniprésente. De la part du mouvement, elle a beau être ultra-minoritaire, les médias établis en parlent comme étant une généralité. De la part des forces de l’ordre, elle a beau être ultra-majoritaire, les médias établis n’en parlent presque pas. “La violence elle vient d’abord des autorités et de leur politique, et c’est perçu comme ça à l’intérieur du mouvement. Ensuite, c’est la répression policière qui pousse à la violence qui émane du mouvement.” Cette violence policière que les Gilets Jaunes subissent est brutale et permanente : gaz lacrymogène, tirs de flashballs, arrestations arbitraires,… Elle a pour but tant de provoquer une réponse violente de la part des manifestants, afin de discréditer le mouvement dans la société, que de pousser d’éventuels actuels ou futurs Gilets Jaunes à rester chez eux et abandonner la lutte. “Beaucoup de gens extérieurs tombent dans le piège présenté par les médias. Il reste un très grand soutien, mais la manière dont les choses sont présentées refroidit quand même la possibilité d’avoir un large soutien actif parmi les couches qui ne sont pas mobilisées.”

    “Mais ici, localement, ça se passe bien. Ça dépend vraiment des villes, et c’est surtout dans les plus grandes. On a plutôt de bons contacts avec les forces de l’ordre, si ce n’est les CRS quand on faisait vraiment de grosses actions comme le blocage d’Amazon-logistique au sud de Montélimar (…) Mais par contre, ils ont vraiment beaucoup durci tout l’aspect judiciaire. On a énormément de Gilets Jaunes qui se prennent des amendes.”

    Si la violence émanant du mouvement à l’encontre des forces de l’ordre et de journalistes est compréhensible, étant donné la méfiance qui règne contre toutes les institutions, particulièrement celles qui sont vues comme déformant l’information, elle constitue tout de même un frein au rassemblement de couches encore plus larges dans la société. Comme le disait Jean-Luc Mélenchon le 16 janvier dernier au Journal de 20h sur France2 : “(…) la preuve a été faite que quand on est très nombreux, le nombre submerge y compris les violents. (…) La conduite d’un mouvement, ça nécessite que ça s’enracine, que ça s’élargisse. Dès qu’il y a de la violence, ça rabougrit, ça réduit.”

    Et pendant que les pro-Macron (grands patrons, médias dominants, …) condamnent l’attitude soi-disant trop complaisante de Mélenchon envers la violence du mouvement, l’ancien Ministre de l’Education Luc Ferry disait le 7 janvier sur Radio Classique, sans recevoir de critiques des médias et partis établis : “ce que je ne comprends pas, c’est que l’on ne donne pas les moyens aux policiers de mettre fin à ces violences”. “Quand on voit des types qui tabassent à coups de pied un malheureux policier… Qu’ils se servent de leurs armes une bonne fois, écoutez, ça suffit ! Ces espèces de nervis, ces espèces de salopards d’extrême droite, d’extrême gauche et des quartiers qui viennent taper du policier, ça suffit”,”. “On a, je crois, la quatrième armée du monde. Elle est capable de mettre un terme à ces saloperies, faut dire les choses comme elles sont”.

    Femmes Gilets Jaunes

    L’un des points fort du mouvement, c’est la présence en très grand nombre de femmes, y compris parmi les leaders de la lutte. “J’ai été frappée par la place qu’ont les femmes dans le mouvement, de manière générale, c’est impressionnant”, explique Rachel. “Il y a eu une forme d’appel, de vague nationale pour organiser des manifs, pour valoriser la manière avec laquelle les femmes s’investissent dans le mouvement. On en a fait une ici à Montélimar le premier dimanche de janvier. Elle a été organisée complètement à l’arrach’, en une journée de mobilisation, et on était 350, donc ça a quand même rameuté beaucoup de monde. Les femmes étaient à l’avant du cortège et les hommes se sont mis à l’arrière, avec les enfants.”

    De nombreuses manifestations de femmes Gilets Jaunes ont ainsi eu lieu, comme la ‘Marche des lionnes’ du 13 janvier à Nice. Les hommes y étaient également invités, “pour ne pas ajouter un élément de division”, comme l’expliquait une participante. Ce sont notamment les revendications ‘Stop à la violence contre les femmes’ et la revalorisation des retraites et du pouvoir d’achat des mères célibataires qui y étaient à l’avant-plan.

    Grève générale et mouvement ouvrier organisé

    Différents appels à l’organisation de grèves générales ont été lancés depuis début janvier. “Il ne s’agit pas de mots d’ordres clairs. Les appels sont par exemple ‘pas de magasin ouvert’, ‘pas de consommation pendant 3 jours’,… Avec l’idée que le gouvernement cède. (…) Les gens impliqués parmi les Gilets Jaunes sont plutôt des couches périphériques de la classe ouvrière. (…) La plupart des gens ont conscience qu’il faut bouger, bloquer l’économie, mais souvent sans comprendre réellement comment l’économie fonctionne.”

    De par sa place spécifique dans la production économique et ses méthodes de lutte, et notamment la grève et le blocage de la production, le mouvement ouvrier est primordial pour un changement réel de système. Il pourrait aider à l’organisation d’une véritable grève générale qui bloquerait réellement l’économie et ferait extrêmement mal aux grands capitalistes et à ses relais politiques. Il permettrait aussi de davantage structurer le mouvement et de s’organiser contre la répression. Malheureusement, “de la part des directions syndicales, si ce n’est dans certaines villes, il n’y a aucune tentative de rapprochement. Il y a par contre beaucoup de syndicalistes qui sont investis parmi les Gilets Jaunes, et pour qui c’est un réel déchirement de voir leur direction rester à l’écart voire critiquer avec arrogance. (…) A Toulouse le week-end dernier, le blocage était massif, aussi grâce au renfort des syndicats de routiers.”

    Tout comme de nombreuses organisations de gauche dans le passé, la plupart des directions syndicales n’a pas toujours pris les décisions et initiatives nécessaires en faveur des travailleurs et leurs familles. Cela explique la méfiance qui vit également envers les dirigeants du mouvement ouvrier organisé.

    “Aujourd’hui, quand j’avance la nécessité de faire le lien avec le milieu syndical, c’est beaucoup mieux pris qu’il y a quelques mois. Au sein du mouvement, il y a davantage d’ouverture envers les syndicats qu’au début. L’idée de s’adresser aux syndicats pour qu’ils fassent un appel à une grève générale est discutée de plus en plus entre les Gilets Jaunes. Le but est d’arriver à organiser une grève et de bloquer l’économie par l’intérieur, parce qu’ils se rendent compte que de l’extérieur c’est compliqué. Jouer au chat et à la souris avec les forces de l’ordre constamment, c’est pas fructueux.”

    Les organisations du mouvement ouvrier doivent entrer en action, avec et aux côtés des Gilets Jaunes. Elles doivent rejoindre la lutte avec respect, sans donner de leçons, en tenant compte du fait que la direction syndicale a miné son autorité auprès d’une grande partie de la classe ouvrière. ” Si des bastions de la classe ouvrière ou des fédérations syndicales entrent aussi dans la bataille, ça redonnera certainement un souffle au mouvement. Que nous soyons tous organisés au sein de comités de lutte serait le pire cauchemar du gouvernement. Et c’est le moment d’y aller car il est vachement fragilisé.”

    Changer le système économique

    La jeunesse aussi, a son rôle à jouer. Dans chaque grand mouvement de classe, elle a joué un rôle dynamique. “Les lycéens en lutte il y a quelques semaines. Si le mouvement est retombé depuis, on sait que ça peut réexploser à tout moment.”

    Depuis le début du mouvement, de nombreuses références sont faites à Mai 68. Au plus fort de ce mois de révolution, c’était la combinaison de la jeunesse en lutte et de la grève générale de 10 millions de travailleurs qui avaient failli faire tomber le système. C’est vers un tel type de lutte que le puissant mouvement des Gilets Jaunes doit s’orienter pour obtenir des victoires.

    “Les discussions sur les revendications, c’est une porte ouverte pour moi pour discuter socio-économique avec les autres Gilets Jaunes et la nécessité d’un changement de société.” Nous devons nous doter d’un programme de revendications portant des mesures socialistes, telles que la nationalisation des secteurs-clés de l’économie pour décider nous-mêmes de la production nécessaire pour satisfaire aux besoins de tous, et pour pouvoir disposer des moyens financiers pour mener des politiques ambitieuses pour chacun et pour la planète sur laquelle nous vivons. Et, ceci, avec la perspective d’établir un gouvernement des travailleurs et d’aller vers un changement de système ; une société socialiste démocratique est la seule issue pour satisfaire aux revendications légitimes du mouvement.

    “Si la majorité des gens veut juste gagner quelques revendications, je vais bien sûr me battre avec eux. Mais je pense qu’on a un potentiel pour prendre le pouvoir aujourd’hui. Il y a un potentiel révolutionnaire.”

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    (1) Interview réalisée mi-janvier. Sauf mention contraire, toutes les citations de cet article sont issues de l’entretien avec Rachel. Une version courte de cet article se situe en page 11 de notre mensuel Lutte Socialiste de février 2019.
    (2) RIC = Référendum d’Initiative Citoyenne
    (3) SMIC = Salaire minimum interprofessionnel de croissance
    (4) ISF = Impôt de solidarité sur la fortune
    (5) CICE = Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi

  • France. La révolte est en marche. Étendons la grève et la lutte partout! Macron dégage!

    «Macron dégage ! », « Macron démission », c’est la révolte de ceux qui en ont marre de subir le mépris et l’arrogance du président des riches. « Ceux qui ne sont rien », comme nous avait décrit Macron, sont non seulement en train de le défier, mais également de le faire plier. Nous sommes également devenus « tout ». Travailleurs peu payés, retraités ayant perdu des centaines d’euros depuis les mesures de Macron, intérimaires galérant de contrat en contrat, les gilets jaunes ont ouvert le chemin de la révolte : lycéens, étudiants, travailleurs, il faut que tout le monde entre dans la lutte et qu’on aille vers la grève générale.

    Par la Gauche Révolutionnaire (CIO-France)

    Macron nous a servi son blabla, mais il ne comprend rien. Il ne satisfait aucune des principales demandes des gilets jaunes (pas de suppression de l’ISF, pas de remise en cause des 40 milliards d’aides publiques aux grandes entreprises, le CICE), une hausse dérisoire du SMIC, et… des heures supplémentaires pour gagner plus. Comme si on ne travaillait pas assez durement ! Comme si, avec les heures qu’on fait déjà et qui sont sous payées, on n’enrichissait pas déjà suffisamment les grands patrons et les actionnaires. Macron est déjà fini. Il n’est que le président des riches, pas celui des millions de travailleurs, avec ou sans gilet jaune. Il est le représentant du capitalisme, des ultra riches, de tous ces parasites qui nous écrasent et nous exploitent pour accumuler des milliards inutiles qu’ils seront incapables de dépenser et qui manquent aux services publics, au logement, aux emplois. Il est incapable de comprendre ce que nous vivons, incapable de répondre aux demandes les plus simples pour cesser de survivre et recommencer à vivre : il faut qu’il dégage !

    Relever la tête

    Il y a longtemps que ce n’est plus seulement une question de surtaxe de l’essence (et d’ailleurs ce n’était de fait qu’un moyen de se rassembler) qui nourrit le mouvement des « gilets jaunes », c’est bien plus grave et plus profond. Il en va du niveau de vie et en fait de la Vie elle-même : celle qu’on ne veut plus, qui se termine au 10 de chaque mois parce qu’on ne peut plus rien se payer, pas même des repas décents. Les révenus ont baissé de 440 euros par an entre 2008 et 2016. Avec la baisse des APL, la hausse de la CSG, et toute une série d’autres mesures, c’est devenu intenable.

    Et quoi d’étonnant que ce soit parti de la voiture : essence en hausse, contrôle technique fait exprès pour rendre inutilisables les voitures des plus modestes, péages en hausse, amendes stationnement en hausse, radars par milliers… le travailleur, prisonnier de sa voiture pour aller travailler se fait racketter grâce à cette même voiture.

    Et alors que le mouvement commençait, on s’est entendu répondre que le gouvernement ne changerait rien, on a reçu les charges de CRS sur les rond-points, dès le premier jour du mouvement par endroit. Au mépris, le gouvernement ajoutait déjà la répression. Il n’avait rien compris, les gilets jaunes étaient en train d’exprimer ce que ressent la majorité de la population, et surtout l’écrasante majorité des travailleurs et des retraités.

    Nous sommes un fleuve qui déborde après la pluie de sales coups répétés ces dernières années contre notre niveau de vie et nos conditions de travail. Nous sommes nourris de milliers de frustrations et d’humiliations que nous impose le capitalisme. Notre indignation ne s’arrêtera pas avec deux ou trois mesures temporaires car maintenant, la plupart des gilets jaunes voient clairement ce qui se passe.

    La lutte nous a uni

    Ce qui n’étaient que des lettres et des chiffres sans signification ont pris tout un sens aujourd’hui : CICE = 40 milliards de cadeaux aux grandes entreprises qui font déjà des milliards de bénéfices, qui ferment des usines et suppriment des emplois, pour le seul bénéfice des actionnaires.
    Suppression de l’ISF = cadeaux aux riches, augmentation des taxes qui sont par nature plus lourdes pour les plus modestes. C’est aux plus gros de payer plus, disent désormais les gilets jaunes. On n’est pas contre les impôts, on veut voir cela en retour avec des services publics, des écoles,… Les gilets jaunes sont en train de parler du fonctionnement même de la société, de l’inégalité dans laquelle le capitalisme nous plonge, au seul bénéfice des ultra-riches. Et on comprend même que les institutions, le gouvernement, la police, sont là pour protéger cet ordre injuste et inégalitaire.

    En se regroupant sur les rond-points, en discutant, en menant des actions (et de plus en plus avec les syndicalistes), en ciblant de plus en plus les grandes compagnies commerciales, pétrolières, les gilets jaunes apportent un élément révolutionnaire, remettant en cause non seulement la forme injuste et antidémocratique de la société mais aussi, de plus en plus, en questionnant le fond : la mainmise sur l’économie de quelques multinationales qui se gavent de milliards sur notre dos.

    Le mouvement des gilets jaunes a enclenché un processus, une compréhension commune à des millions de personnes, non pas seulement de la souffrance, mais des causes de celle-ci. Les revendications sont devenues communes, de même que la volonté de vivre dans une société humaine, fraternelle et démocratique et non sous la dictature tant des capitalistes et de la finance que des technocrates déconnectés de la réalité.

    Le processus enclenché le 17 novembre va continuer de s’amplifier. Il a des éléments révolutionnaires, mais pas encore suffisamment si on veut réellement changer la société. Il nous faudra remettre en cause le caractère anti-démocratique de la société, le mépris de Macron et de ses amis, mais encore plus, remettre en cause le fonctionnement même de celle-ci, basée sur l’exploitation des travailleurs au seul bénéfice des capitalistes.

    • Hausse des salaires et des retraites, SMIC à 1800 €
    • Assez des taxes injustes, c’est les riches qu’il faut imposer
    • Abolition de la CSG, restauration de l’ISF, arrêt du CICE
    • Récupération des 80 milliards de l’évasion fiscale et des milliards de profits
    • Injection de ces milliards dans les services publics pour créer des emplois dans l’éducation, la santé, l’écologie…

  • France. Macron recule (un peu), faisons-le tomber, lui et sa politique

    Alors qu’au lendemain du 17 novembre Macron et son ministre Philippe passaient leur temps à dire « nous maintenons le cap », il aura quand même reculé. Certes pas beaucoup. Sur certaines taxes sur le pétrole et un bonus pour le SMIC, mais en gros financé par l’argent public, donc par nous-mêmes ! À aucun moment, ce ne sont les riches qui sont mis à contribution, alors que cette demande est au cœur du mouvement des gilets jaunes.

    Par Alex Rouillard, Gauche Révolutionnaire (section française du Comité pour une Internationale Ouvrière)

    Le mouvement, parti de travailleurs qui ont peu participé aux récentes luttes, est venu contester l’ensemble des injustices de cette société. Les bas salaires, les retraites trop faibles, les jeunes qui ne trouvent que de l’intérim et des contrats précaires… mais aussi le sentiment que tout est décidé par une poignée de larbins des riches, sans jamais écouter la population, et avec un seul critère : quelle rentabilité pour les plus riches, comment faire les poches des travailleurs et des retraités. Car la suppression de cotisations sociales (faussement appelées « charges »), la destruction de services publics et de milliers d’emplois dans ceux-ci, c’est autant de parties de notre salaire collectif qui nous sont volées.

    Pour les jeunes, la question de leur avenir et de leur éducation est exactement en phase avec le mouvement des gilets jaunes. Le refus de la sélection à l’Université qui prive des dizaines de milliers de jeunes d’études supérieures, de la réforme du bac qui va renforcer les inégalités entre les lycées, de la réforme du Bac Pro qui casse l’enseignement professionnel… c’est le refus d’une éducation que Macron veut réserver à une élite.

    Lutte des classes

    L’Egalité, journal de la Gauche Révolutionnaire.

    On peut comprendre qu’au début du mouvement, il ait pu exister une certaine méfiance de la part de syndicats et d’organisations de gauche. Mais il est sidérant d’avoir vu toute une gauche à la condescendance consternante vis-à-vis de travailleurs surexploités reprendre tous les gros titres des médias capitalistes pour en faire une campagne contre les gilets jaunes. Oui il y a eu des actes racistes, homophobes, dans quelques endroits parmi les milliers de barrages organisés. Oui l’extrême droite a essayé de s’accaparer le mouvement, voire pèse encore dans certains endroits, mais c’est logique quand un mouvement est aussi large. Et ce n’est pas en insultant les gens qu’on les fait progresser.

    Il n’est pas sérieux de la part des syndicats de ne pas avoir invité leurs militants à participer au mouvement ou à s’y intéresser. Fort heureusement, Mélenchon et la France insoumise ont soutenu le mouvement, et beaucoup de militants syndicaux sont venus, ont discuté, on pu voir que l’extrême droite est minoritaire. Quand des centaines de milliers de travailleurs relèvent la tête et se révoltent, on n’attend pas un carton d’invitation ou un tapis rouge, on y va sans forcément s’y dissoudre, mais on essaye de le faire progresser dans le bon sens. Tout en restant prudents, les militant-e-s de la Gauche révolutionnaire sont venu-e-s dès le premier jour sur les ronds-points et les actions, faisant partie de ce mouvement qui dénonce l’injustice sociale et fiscale.

    Besoin d’une grève générale

    C’est l’ensemble des revendications des jeunes, des travailleurs, des retraités, qui sont aujourd’hui popularisées par les gilets jaunes. Car ce qui domine, c’est l’accroissement des inégalités dans la société, la voracité des capitalistes qui ne cherchent qu’à faire du profit avec l’aide des lois et mesures du gouvernement. C’est cela qui domine tous les conflits sociaux en France et dans le monde, encore plus depuis le début de la crise en 2008. C’est l’offensive de la classe capitaliste contre les travailleurs qui pousse à la lutte, c’est donc contre les capitalistes que se tourne la lutte, avec Macron comme cible centrale.

    Les gilets jaunes eux-mêmes sont venus dans de nombreux endroits discuter avec les syndicats pour trouver des actions communes. Mais il faut plus, il faut que les syndicats appellent à la lutte et à la grève, il faut des appels clairs de la part de la CGT, Solidaires, etc. à une journée de grève totale et générale.

    Un gouvernement des travailleurs et de la majorité de la population

    En soulevant la question du référendum et du referendum d’initiative populaire, les gilets jaunes posent une véritable question de fond : la politique dans le pays ne peut pas être dans les mains de politiciens qui, comme ceux de la droite, d’En Marche, ou du PS, ne sont contrôlés que par les lobbies financiers et jamais par la population.

    Des obligations de référendum, cela serait un premier pas, mais on ne sera pas en démocratie tant que les gouvernements seront ceux des riches, ni tant qu’on sera obligés de travailler pour des capitalistes qui font leur profit en nous exploitant.

    Le mouvement manque encore de structures, d’assemblées générales de discussion. Il faut plus de comités de lutte, d’assemblées générales, qui discutent et décident, contrôlent les porte-paroles. C’est ainsi qu’on pourrait discuter à la fois de comment faire avancer la lutte mais aussi de quel gouvernement nous pourrions mettre en place, contrôlé par la base, par les travailleurs et la majorité de la population en lutte.

    Pour la révolution

    Macron et les capitalistes vont vouloir continuer, mais la révolte est en marche. Notre mouvement est venu rappeler que rien ne change sans lutte de masse, et qu’une révolution est nécessaire… et possible. Par millions, nous sommes en train de dire qu’on ne veut plus de cette société injuste et anti-démocratique qui ne fonctionne que pour les riches, les banquiers, les actionnaires…

    Il ne s’agit pas seulement d’avoir une plus grosse part du gâteau, mais que chacun ait le gâteau dont il a besoin. Et pour cela il faut que la pâtisserie, l’économie en fait, soit aux mains des travailleurs et de la population. Il ne suffira pas de taxer les grands groupes industriels et commerciaux, il faudra les mettre en propriété publique, les nationaliser, sous la gestion et le contrôle des travailleurs et de la population, pour ainsi planifier démocratiquement et écologiquement l’économie pour satisfaire les besoins de toutes et tous et non les profits d’une poignée.

    C’est en luttant pour un tel renversement du capitalisme et son remplacement par le socialisme qu’une révolution permettra de vraiment changer les choses, et construire une société réellement démocratique, fraternelle et tolérante, débarrassée des guerres, de la misère, du racisme, du sexisme…

    C’est pour cela que lutte la Gauche Révolutionnaire, en construisant un parti pour une révolution socialiste, tout en participant à tout ce qui fait avancer la lutte contre Macron et sa politique au service des ultra-riches. Rejoins-nous !

  • 10ème jour de lutte chez les gilets jaunes à Montélimar

    Malgré une météo catastrophique, la détermination des gilets jaunes sur Montélimar ne faiblit pas. Plusieurs milliers de personnes sont mobilisées, de jour comme de nuit, tournant au gré des disponibilités de chacun. Nos actions quotidiennes ont toutes l’objectif de dénoncer la politique injuste et destructrice de Macron, ne servant que les plus riches et nous condamnant à la précarité.

    Article de la Gauche Révolutionnaire

    Ce n’est pas l’extrême droite qui tient les rênes !

    Au début du mouvement, on a pu entendre que l’appel des gilets jaunes n’était qu’un truc d’extrême droite mais il s’agit bel et bien qu’un mouvement populaire large, qui rassemble les couches de la société les plus attaquées par Macron. La solidarité et l’implication de chacun sur notre campement sont extrêmement fortes, que ce soit des automobilistes qui klaxonnent, nous donnent des vivres, de l’argent… ou des gilets jaunes qui apportent aussi nourriture, bois, tentes, bâches ou autre matériel… C’est ainsi que notre rond-point de l’A7 Montélimar-Sud est un véritable QG !

    Notre objectif n’est évidemment pas de se cantonner à vivre sur ce rond-point mais bien d’avoir un lieu de rassemblement où nous pouvons discuter tous et toutes ensemble, déterminer nos revendications, nos actions et agir ensuite de manière coordonnée pour plus d’impact. Nous avons instauré des assemblées quotidiennes à 18h, où nous prenons toutes les décisions collectivement, ce qui ne laisse aucun espace à l’extrême droite.

    Il va falloir durcir le ton

    Nous avons levé les barrières de l’A7, bloqué le site d’Amazon et d’autres plate formes logistiques, bloqué Carrefour et l’ensemble de la zone commerciale… Toutes ces actions ont certainement entraîné un manque à gagner mais il semble évident aujourd’hui que cela ne suffit pas à faire reculer, voire tomber Macron comme la majorité des gilets jaunes le souhaite.

    La défiance vis-à-vis des médias et des politiciens est très forte et pour beaucoup, les syndicats sont mis dans le même panier. Ils sont perçus comme des traîtres et des appareils qui cherchent à profiter de l’ampleur de la « vague gilet jaune ». La proposition de l’union locale de la CGT de faire une manifestation commune le 1er décembre a été vivement critiquée à notre dernière AG, pour finalement aboutir à « ceux qui veulent y aller n’ont qu’à le faire mais ce n’est pas un rapprochement officiel ». Pourtant, tout le monde s’accorde sur le fait que bloquer l’économie est nécessaire et que la grève générale est le seul moyen d’y parvenir .

    Pour la suite du mouvement…

    Nous avons un tract qui sera prêt demain, avec des revendications qui vont clairement au-delà des taxes sur les carburants : augmentation des revenus, partage du travail, répartition des richesses…

    Il sera distribué massivement lors des filtrages pour continuer à rallier du monde au mouvement et clarifier tout ce que l’on peut entendre dans les médias sur ce que l’on demande.

    Le manque de structuration du mouvement à une échelle large nous affaiblit et les discussions commencent sur comment dépasser cela. Des propositions d’actions coordonnées à l’échelle du département ou de la région émergent aussi.

    La fatigue commence à se faire sentir et ce rythme ne pourra pas être tenu sur la longueur si la grève ne s’étend pas. C’est pourquoi, en tant que militant-e-s de la Gauche Révolutionnaire, nous tentons d’expliquer le rôle crucial des syndicalistes qui doivent mettre pression sur leur confédération pour qu’un réel appel à une grève totale soit fait rapidement.

  • France. Succès du 17 novembre, unissons les colères #MacronDégage

    Le 17 novembre, les actions de masse ont rassemblé des centaines de milliers de manifestants en colère sur 2500 blocages. Édouard Philippe peut très bien dire qu’il y avait 285 000 participants, on est bien loin de la réalité : 400 000, 500 000 voire même le double ? Pour beaucoup, majoritairement des travailleur-se-s aux faibles salaires, dans les services, le commerce, la santé, mais aussi des retraités, des artisans, quelques petits patrons aussi parfois. Même si c’est la hausse du prix des carburants (due à la hausse des taxes mais aussi à 60 % à la hausse des prix imposés par les multinationales pétrolières) qui a été le déclencheur, la colère est bien plus profonde.

    Par Alex Rouillard et Cécile Rimboud, Gauche révolutionnaire (CIO-France)

    Partout sur les blocages, les opérations escargot, péages gratuits… on parle de la dureté de la vie, de la difficulté des fins de mois, des impôts qui ne servent pas à financer ce qu’ils devraient (de vrais services publics), de l’injustice de la politique de Macron qui file tout aux riches. Ce mouvement, soutenu par 78 % des employés et ouvriers, a un potentiel gigantesque !

    C’est l’expression d’un ras le bol profond, contre tout ce qui ne va pas, contre la marche folle de cette société qui écrase les « petits » et qui ne fonctionne que pour les privilégiés.

    On l’a fait !

    La plus plupart des « gilets jaunes » n’avaient pas une grande expérience des luttes, de leur organisation. C’est la solidarité collective dans l’action et le combat commun qui nous a permis de faire autant de points de barrages. Et dans la plupart des endroits, sans se faire récupérer par les vautours de la droite et de l’extrême droite (Les Républicains, le FN/RN, etc.) qui n’étaient ni organisateurs ni réellement bienvenus. Certains comme Wauquiez ont pu aller tester leur popularité sur les barrages, sous les critiques, il est vite parti.

    Car la droite et le FN/RN sont pour la suppression des impôts sur les riches, pour le report de l’âge de départ à la retraite. La plupart des gilets jaunes se souviennent très bien qu’il y a quelques années, c’est Sarkozy et la droite qui nous en ont mis plein la figure et cassé les services publics.

    C’est pour ne pas se faire avoir que le réflexes des gilets jaunes a été de se dire « apolitique », pour ne pas avoir l’air de rouler pour un parti. En aucun cas cela ne voulait dire que les militants n’étaient pas les bienvenus.

    Faire avancer le mouvement

    Du fait de sa spontanéité, le mouvement a surtout été tourné vers l’action concrète, et a rarement donné lieu à de véritables assemblées générales pour discuter des revendications et des actions. Mais cela se développe désormais. Car il y a beaucoup de points qui rassemblent : blocage des prix, baisse des taxes, hausse des salaires et des retraites. Assez des cadeaux aux ultra-riches et grandes multinationales. Même s’il ne le formule pas ainsi, ce mouvement rejette le capitalisme et sa loi de l’exploitation pour le seul profit des grands groupes industriels et commerciaux. Et évidemment, il est tout entier contre Macron tant celui-ci symbolise cette politique pour les riches.

    Il y avait des consignes comme « pas de racisme » en préparation de nombreux blocages et dans l’immense majorité d’entre eux il n’y a pas pas eu de gros problèmes. Là où des actes racistes ou homophobes ont eu lieu, comme on peut le voir sur des vidéos, ils sont souvent le fait d’une seule personne ou d’un tout petit groupe. Dans la plupart des endroits, il a suffit de l’intervention de gilets jaunes défendant l’unité de toutes et tous dans la lutte pour que cela cesse. Le meilleur moyen pour continuer dans ce sens est que les militant-e-s aillent sur les piquets pour défendre cela. Nos seuls ennemis, ce sont les ultra-riches privilégiés et le gouvernement Macron.

    La responsabilité des syndicats et organisations anti-capitalistes

    On peut comprendre les hésitations, mais l’inaction est pire que tout dans ce genre de moments. Dans certaines villes et entreprises, le 17, des actions de grève ont eu lieu à l’appel de la CGT (à Reims, à Cléon (76) avec une grève à SPIE-Batignolles… Et surtout, depuis, il y a cet appel à la grève et à se joindre au mouvement par la CGT Chimie, FO transport, l’Union locale CGT du Havre, ou encore la venue sur le point de blocage de Montélimar-Sud des infirmières en grève le 20 novembre. Le soutien est en général bien pris, le mouvement n’est pas si anti-syndical que ça mais il tient farouchement à son indépendance, et c’est logique.

    Le 17 novembre a démontré une chose : chez les travailleurs, retraités, chômeurs, artisans… il y a une vraie envie d’agir. Un beau démenti pour tous ceux qui pouvaient penser que « les gens ne se battent plus » ou qu’ils sont « endormis » ! Oui, la colère est bel et bien là et cherche un moyen de prendre une forme collective, dans la lutte et le blocage de l’économie.

    Dans de nombreux endroits, les militants de la Gauche révolutionnaire ont participé aux barrages, pour à la fois aider cette couche nouvellement entrée dans la lutte mais aussi pour mener les discussions (et éventuellement combattre l’influence du FN. Cette dernière question s’est peu posée). Et il est clair que les syndicats auraient pu inviter une partie de leurs membres à se rendre sur les actions, sans obligatoirement avoir tout l’arsenal de banderoles et drapeaux, mais pour aider à faire avancer les travailleurs participant à la lutte.

    La proposition de manifestation nationale à Paris, le 24 novembre, peut représenter un tournant même si beaucoup ne veulent pas non plus lâcher les centaines de barrages qui sont devenus des rendez-vous de la lutte. Il s’agit de mettre en cause directement Macron et sa politique. D’autres propositions visent également les lieux de pouvoir (préfecture, etc.) ou les filiales des grandes multinationales. S’ils ne le disent pas avec les mêmes mots, la plupart des gilets jaunes veulent s’attaquer aux capitalistes et à leurs serviteurs du gouvernement Macron.

    Avançons ! Pour :

    • développer les assemblées de discussion et d’organisation de la lutte, et les revendications
    • pour une journée d’action massive partout le 24 novembre, en particulier la manifestation à Paris, sans oublier la grande marche contre les violences sexistes dans le cadre de la journée internationale contre les violences faites aux femmes
    • une grande journée de lutte, d’action, et de blocages avec une grande grève unissant travailleurs du public et du privé avec les jeunes et les retraités contre la politique de Macron.

    Qui sème la misère, récolte la colère ! Revendiquons !

    • la baisse immédiate et le blocage des prix de l’essence et de l’énergie
    • l’augmentation des salaires et des retraites et leur indexation sur les prix, y compris du carburant
    • la réquisition des bénéfices des multinationales pour financer les besoins : transports publics gratuits et non polluants, services publics notamment de proximité (crèches, écoles, maternités, bureau de poste…), logement
    • la remise en place de l’impôt sur la fortune, la lutte contre l’évasion fiscale par les ultra-riches et les multinationales, la fin des taxes indirectes (TVA, etc.) remplacées par une imposition forte des riches et des grandes entreprises
    • un grand service public environnemental financé en taxant les multinationales, pour créer des centaines de milliers d’emplois nécessaires à la transition énergétique et écologique (agriculture écologique, alimentation en circuits courts, énergies renouvelables etc.)

    Alors unissons nos révoltes, contre Macron et son monde de millionnaires où on n’a pas notre place, contre le capitalisme et ses injustices. Rejoignez la Gauche révolutionnaire pour lutter pour une société réellement démocratique, solidaire et fraternelle : le socialisme. Une société où les principaux secteurs de l’économie seront en propriété publique/nationalisés, permettant une planification démocratique et écologique, tenant compte des ressources naturelles et permettant de satisfaire les besoins.

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