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  • [DOSSIER] Libye : L’impérialisme essaie de récupérer le mouvement révolutionnaire à son avantage. Comment la gauche réagit-elle?

    Pendant quelques mois, l’impérialisme a été paralysé par les évènements en Afrique du Nord et au Moyen Orient. En Egypte et en Tunisie, les dictateurs ont été chassés du pouvoir en peu de temps par un mouvement de masse. Tout a été tenté pour assurer que les changements de régime dans ces pays se limitent à de simples changements de marionnettes, sans fondamental changement social. Mais les révolutions se sont répandues, avec la conviction que les masses opprimées sont capables de se débarrasser des régimes dictatoriaux et pro-capitalistes.

    Par Michael B. (Gand)

    De semaine en semaine, une vague de protestations de masse sans précédent a progressé dans des pays aussi divers que le Yémen, le Bahreïn, le Maroc, la Libye et la Syrie. Les mouvements en Tunisie et en Egypte ont construit de profondes racines sociales parmi les opprimés, en balayant les divisions ethniques et religieuses. Grâce aux comités populaires dans les quartiers et aux comités ouvriers dans les usines, toutes les couches des masses de travailleurs et de pauvres ont été impliquées. Mais ces révolutions sont loin d’être terminées : les forces de la contre-révolution essaient maintenant de regagner le contrôle de ces pays.

    Alors qu’aujourd’hui beaucoup – mais pas tous – de Libyens célèbrent la disparition du régime de Kadhafi, les véritables socialistes doivent clarifier que, contrairement à la disparition de Moubarak en Egypte et de Ben Ali en Tunisie, la disparition de Kadhafi est, cette fois, également une victoire pour l’impérialisme.

    L’objectif des interventions impérialistes en Libye était de développer son contrôle dans la région, de créer un régime fiable aux pays occidentaux (même si les puissances impérialistes avaient par le passé conclu des marchés avantageux avec Kadhafi), et d’introduire un nouveau modèle dans la région, c’est-à-dire un changement de régime rendu possible grâce à l’aide des pays occidentaux, et au service de ces derniers bien entendu.

    Ces éléments doivent tous entrer en ligne de compte lorsque les marxistes essaient d’analyser les récents développements en Libye et en Syrie. Les vautours se rassemblent autour du cadavre de l’ancien régime ; les entreprises occidentales veulent conclure des transactions ultra-avantageuses avec le nouveau régime en échange des bons services rendus par l’Occident, qui a porté le nouveau régime au pouvoir.

    Mais cette critique de l’intervention impérialiste ne signifie toutefois pas que les marxistes peuvent défendre la situation qui prévalait jusque là, ou encore qu’ils peuvent entretenir des illusions envers le caractère de l’ancien régime de Kadhafi. C’est pourtant exactement ce qui a été fait par les organisateurs d’une manifestation à la Bourse de Bruxelles le vendredi 2 septembre dernier (1), des organisations liées au PTB (qui a défendu Kadhafi dans son hebdomadaire ‘‘Solidaire’’ (2)). Nous n’avons pas soutenu la plate-forme de cette action et nous voulons expliquer cette décision.

    L’ennemi de notre ennemi n’est pas notre allié par définition !

    L’action a eu lieu sous le slogan principal ‘‘Manifestation pour la paix en Libye et contre les bombardements de l’OTAN – Stop aux bombes "humanitaires" de l’OTAN’’. Évidemment, nous sommes pour la paix en Libye et opposés à l’intervention de l’OTAN, cette dernière ne pouvant en effet que conduire à une sorte de ‘‘recolonisation par l’Occident.’’ Mais de quelle paix parlons-nous ? Et de quelle façon devons nous concrètement traduire cela ?

    Notre problème avec l’appel pour cette manifestation se situe principalement au niveau de la question de l’alternative. Une série de faits divers sur la Libye énumérés dans la plateforme tentait d’éviter d’aborder le mécontentement, réel, qui existe parmi de larges couches de la population libyenne. Ainsi, par exemple, était totalement ignoré le mécontentement chez les pauvres, les travailleurs et les jeunes dans l’Est du pays, une région victime des tactiques de division de Kadhafi destinées à protéger son règne. Les ‘‘faits’’ présentés insinuaient un soutien à l’ancien régime de Kadhafi en disant que le dictateur avait offert la médicine gratuite, l’égalité entre hommes et femmes et qu’il avait permis d’atteindre un niveau de vie élevé.

    Il est vrai que Kadhafi a offert un certain niveau de vie à la population libyenne. Kadhafi est arrivé au pouvoir en 1969 après que l’ancienne monarchie ait été abattue. A cette époque, il soutenait le soi-disant ‘‘socialisme arabe’’, qui n’était en rien un socialisme démocratique mais bien une tentative de se positionner entre l’impérialisme et le stalinisme dans le contexte de la guerre froide. Il a nationalisé de nombreuses industries, y compris l’industrie pétrolière et le rendement du secteur n’allait pas vers les dirigeants d’une clique de multinationales occidentales, mais à l’Etat libyen lui-même. Cela a permis à Kadhafi de garantir dans une certaine mesure l’accès à des soins de santé et à l’éducation avec une sorte d’Etat-providence. Cela a donné au régime un certain soutien parmi la population.

    Mais le texte de l’appel semble supposer qu’il s’agit là d’une réussite qui mérite tous les hommages. Kadhafi – mi-monarque, mi-militaire – savait comment maintenir un soutien de la part de la population tout en préservant des liens avec les grandes puissances, parfois en se liant à l’Union soviétique, parfois à l’ouest. Occasionnellement, il s’était profilé comme un ‘‘communiste’’, mais il n’a jamais aboli les interdictions portant sur les syndicats et les organisations de travailleurs libres dans le pays. En 1971, Kadhafi a aussi renvoyé un grand nombre de communistes soudanais de Libye vers le Soudan, où ils sont tombés aux mains du dictateur Jafaar Nemeiry. Est-ce cette ‘‘liberté’’ que nous voulons voir revenir aux Libyens ?

    Après la chute de l’Union Soviétique, la Libye a tenté de se rapprocher de l’Occident. Cela a conduit à serrer vigoureusement la main de Sarkozy et d’Obama, par exemple. Ou encore à la conclusion d’un accord avec Berlusconi concernant le blocage des réfugiés africains qui tentaient de franchir la Méditerranée, mais aussi à laisser les multinationales pétrolières entrer dans le pays et encore à se lancer dans de nombreuses privatisations. La Libye est également devenue une célèbre investisseuse en Europe. Le fonds d’investissement libyen (FIL) gérerait pas moins de 70 milliards de dollars d’investissements. Kadhafi possède une partie de la plus grande banque italienne (UniCredit), de Juventus, de Fiat et 3% de la société qui possède le plus grand journal du monde, le Financial Times. Il possède également des actions dans des sociétés russes et turques, etc. Kadhafi était donc un ennemi de l’impérialisme dans les termes, mais dans les actes, il en allait autrement…

    Quand un politicien social-démocrate cumule les postes dans des Conseils d’administration d’entreprises et essaye de couvrir cela par une rhétorique ‘‘socialiste’’, il est dénoncé (à juste titre!) mais, quand il s’agit de Kadhafi, tout est soudainement vu comme de grands gestes contre l’impérialisme !

    Nous sommes évidemment d’accord pour dire que le soutien européen et américain aux rebelles est hypocrite. Les puissances impérialistes ont appris des révolutions en Afrique du Nord et au Moyen Orient, et elles voulaient cette fois être capable d’intervenir du premier rang. Mais cette hypocrisie provient aussi de leurs relations passées avec le régime de Kadhafi. Il n’était pas toujours fiable, mais quand même: Berlusconi – un vrai capitaliste – a même appelé à un cessez-le-feu. Ni l’impérialisme, ni Kadhafi ne défendent les intérêts de la population libyenne. Nous ne pouvons pas soutenir n’importe qui sous prétexte qu’il se positionne contre l’impérialisme occidental en mots (ou même en actes) alors qu’il mène simultanément une politique réactionnaire. Nous ne pouvons donc pas non plus soutenir un dictateur réactionnaire comme Ahmadinejad en Iran. Les ennemis de nos ennemis ne sont pas nécessairement nos amis ou nos alliés. Certes, le monde et les positions politiques seraient beaucoup plus faciles ainsi mais, hélas, ce n’est pas le cas !

    Il est également étrange de lire dans un texte de militants de gauche, affiliés à un parti qui s’appuie sur les idées du socialisme, que sous Kadhafi il existait une égalité entre hommes et femmes. En termes de sexisme, Kadhafi pourrait très bien s’entendre avec son ami italien Silvio Berlusconi… Il est important de voir les choses dans leur processus. Il y a eu une certaine émancipation sous Kadhafi en termes d’éducation, de droit de vote, d’abolition du mariage forcé des enfants, etc. mais ce n’était certainement pas plus que, disons, en Europe. Le taux de chômage était environ de 10% mais, pour les femmes, il était de 27% en 2006 (soit une augmentation de 6% depuis 2000).

    L’égalité ne peut pas être atteinte avec un régime dictatorial. Il faut lutter pour l’obtenir. Durant les révolutions en Afrique du Nord et du Moyen-Orient, nous avons pu voir le rôle actif joué par les femmes. Les révolutions doivent être renforcées pour leur assurer un progrès réel. L’intervention de l’Occident et le gouvernement de transition qu’il soutient ne va pas dans cette direction.

    Une perspective marxiste sur la révolte en Libye

    Comme expliqué dans l’introduction, nous n’imaginons pas que l’Occident représente une meilleure alternative pour les masses du pays. En outre, la plate-forme de la manifestation a raison de dire que la situation actuelle est souvent expliquée de manière très partiale. De nombreux facteurs ont déterminé l’impasse militaire en Libye.

    Aujourd’hui, la situation en Libye est particulièrement polarisée et compliquée. Tout d’abord, le mouvement de masse spontané contre le régime de Kadhafi a illustré que de larges couches de la population détestent ce régime. Ce mouvement n’est pas, contraire à ce qu’affirme la plateforme de la manifestation, le résultat des activités d’un groupe de rebelles terroristes et islamistes et il n’est pas basé sur d’anciens combattants de Kadhafi. Ce fut un mouvement de masse dans l’Est du pays (les images de l’occupation de Benghazi parlent d’elles-mêmes). Par ailleurs, le mouvement initial a énormément perdu de son potentiel radical.

    Le mouvement spontané a, faute d’une classe ouvrière organisée et d’une stratégie révolutionnaire claire, vite été dévié par des leaders des rebelles autoproclamés. Ces derniers sont des anciens amis de Kadhafi ou des soldats et des partisans de l’ancienne monarchie. Par conséquent, le mouvement a rapidement perdu son caractère de masse et a également perdu le soutien dont ils jouissaient à ses débuts.

    Contrairement à l’Egypte et à la Tunisie, il n’y avait pas eu d’expansion des comités et des assemblées populaires, et il n’y a pas eu d’appel à la grève générale. La vigueur que l’on a pu voir à l’œuvre en Tunisie et en Egypte a manqué en Libye. Cela est partiellement dû à une population très divisée, qui a également bénéficié de divers privilèges sous le régime de Kadhafi, et à une classe ouvrière faiblement organisée. Au lieu de la perspective d’une élévation des conditions de vie, ce que des comités de base auraient pu soulever, il était déjà clair avant même l’intervention de l’OTAN que les choses avaient tourné en un affrontement entre forces pro et anti Kadhafi. Les forces pro-Kadhafi voyaient dans le drapeau monarchiste utilisé par certains rebelles la contestation des gains sociaux obtenus par le peuple libyen durant les premiers temps de Kadhafi. De leur côté, les dirigeants rebelles autoproclamés comptaient sur l’intervention de l’OTAN pour l’emporter. En échange de l’aide matérielle et d’une reconnaissance diplomatique comme représentants légitimes du peuple libyen, l’impérialisme aurait vu sa position largement renforcée en Libye. Le conseil national de transition a obtenu son soutien en échange de concessions sur l’exploitation du pétrole (33% pour la France par exemple).

    ‘‘Soutien aux masses et à leurs révolutions ! Aucune confiance dans l’intervention impérialiste!’’

    La plateforme semble aboutir en conclusion à un soutien au nationalisme libyen, à la souveraineté du pays. Qu’est-ce que cela veut dire ? La souveraineté de chaque dictateur à faire ce qu’il veut avec son peuple ? La souveraineté de décider de la nature des liens à entretenir avec l’impérialisme ? Le peuple libyen devait-il subir le régime de Kadhafi parce qu’il y a d’autres bandits ? Nous ne pensons pas ainsi. Nous sommes pour l’autodétermination des peuples et des nations, mais cela n’a rien à voir avec un choix entre la domination occidentale et une domination intérieure. La souveraineté réelle d’un peuple ou d’une nation réside dans la classe des travailleurs et des jeunes, qui doivent se libérer des intérêts d’une élite capitaliste – qu’elle soit autochtone ou étrangère.

    Le retour à une sorte de "restauration" est une revendication réactionnaire. L’intervention de l’OTAN est contre-révolutionnaire. Ainsi, nous pouvons mettre en avant pour chaque révolte actuelle le slogan: ‘‘Soutien aux masses et à leur révolution ! Aucune confiance envers les interventions impérialistes et leurs gouvernements fantoches! Pour des comités de travailleurs et des comités populaires démocratiques en à la révolution et pour son développement!"

    Nous ne sommes pas opposés par principe à une résolution pacifique du conflit, mais une solution pacifique ne peut pas se limiter à un ‘‘retour à l’ordre’’ de Kadhafi. Si nous proposons seulement des solutions pacifistes, nous sapons la possibilité de la population à s’armer et de s’opposer à la domination de leur propre élite (Kadhafi ou le gouvernement de transition). Si le peuple libyen veut se débarrasser lui-même du joug de Kadhafi et du capital occidental, nous devons soutenir la révolution. Des comités de travailleurs, de jeunes, etc. peuvent constituer la base de la révolution avec des grèves générales et des manifestations.

    Comme on peut le voir, cela n’a rien d’un processus linéaire. Même en Tunisie et en Egypte, ces comités font l’expérience de difficultés pour former une opposition solide en défense de la révolution. Mais c’est la seule méthode capable d’assurer et de développer les acquis des masses. Nous sommes pour la renationalisation complète des secteurs clés en Libye mais, cette fois, sous le contrôle démocratique des travailleurs et non pas sous le contrôle d’une élite comme c’était le cas sous Kadhafi. Seuls des comités démocratiques de travailleurs peuvent assurer que les acquis sociaux soient maintenus et renforcés. Grâce à des grèves et des manifestations de masse, ils peuvent organiser la résistance contre la clique de Kadhafi et contre l’OTAN pour acquérir une véritable liberté et une véritable démocratie, libérée de la dictature des marchés.

    Les révolutions en Tunisie et en Egypte doivent se poursuivre, non seulement pour renvoyer les dictateurs, mais aussi pour renverser l’ensemble du système et le remplacer par une alternative socialiste démocratique. Cela serait une gigantesque source d’inspiration pour renouveler le mouvement des travailleurs et des pauvres en Libye.


    Notes

    (1) Intal et Comac-ULB. Voir aussi: http://www.intal.be/fr/manifestation-pour-la-paix-en-libye-et-contre-les-bombardements-de-lotan

    (2) “Libye : Au moins trente morts après une attaque des rebelles”, de façon plus explicite dans le paragraphe “Le Conseil national de transition fera-t-il mieux que le gouvernement Kadhafi?” sur http://www.ptb.be/nieuws/artikel/libye-au-moins-trente-morts-apres-une-attaque-des-rebelles.html

  • Les ‘salopes’ marcheront aussi sur Bruxelles

    25 septembre – 14h30 Bruxelles-Nord

    Le 25 septembre se déroule à Bruxelles la ‘‘Marche des Salopes’’. Ce rassemblement est né au Canada, suite à une séance de ‘‘prévention’’ où un policier a expliqué aux étudiantes ‘‘qu’elles ne devaient pas s’habiller en ‘salopes’ pour éviter d’être agressées’’. Suite à ces propos, le 3 avril, des milliers de femmes sont sorties dans les rues de Toronto. Le mouvement s’est propagé comme une traînée de poudre, en France, en Australie, en passant par la Corée, l’Inde,… Femmes et hommes se mobilisent dans 70 pays !

    Par Laure (Bruxelles), article tiré de l’édition de septembre de Lutte Socialiste

    Le mouvement vise à dénoncer et à lutter contre les agressions sexuelles tout en revendiquant le droit de s’habiller librement. ‘‘It’s a dress, not a yes’’ (C’est une robe, pas un oui), ‘‘Real men don’t rape’’ (Les vrais hommes ne violent pas), ‘‘Ne nous dites pas comment nous habiller. Dites aux hommes de ne pas violer’’,… voilà le genre de messages véhiculé lors des manifestations. En Belgique, 7 viols sont commis par jour, selon l’association ‘‘SOS viols’’. En France, on estime que sur 75.000 femmes violées, seules 10% portent plainte, et 1% de ces plaintes aboutissent à une condamnation ! Même topo en Angleterre, où 14 départements de la police britannique sur 52 ont récemment révélé que sur 19 806 personnes arrêtées pour viol, 12 842 avaient finalement été relâchées sans jugement.

    En parallèle au mouvement, il y eut la fameuse affaire DSK. Là encore, lumière a été faite sur la considération que la société capitaliste et ses dirigeants portent aux femmes et au viol. ‘‘Un troussage de domestique’’, ‘‘Certains viols sont plus graves que d’autres’’, Il n’y a quand même pas mort d’homme…’’ sont autant de propos nauséabonds sortis tout droit de la bouche de responsables politiques pour l’occasion.

    L’idée selon laquelle une fille qui s’habille sexy est provocante et augmente les risques de se faire violer de par sa tenue est totalement fausse. Tout d’abord, la majorité des viols ne se déroulent pas au coin de la rue, mais au sein de la famille. La plupart du temps, les victimes connaissent leur agresseur, les fringues qu’elles portent n’ont donc absolument aucun rapport. L’agresseur agit par besoin de domination, non par pulsion sexuelle engendrée par la vision soudaine d’une petite culotte. Le sexisme et les violences faites aux femmes sont encore omniprésents et banalisés dans la société. L’ultime paradoxe réside peut-être dans le fait que la société, les médias, les firmes cosmétiques, poussent d’un côté les jeunes femmes à s’habiller sexy (il y a des strings pour fillettes de 9 ans à H&M…) et que de l’autre, elle les culpabilise si elles se font violer en leur répliquant qu’elles étaient sans doute trop provocantes.

    Le sexisme a donc encore de longues années devant lui si on ne réagit pas. C’est pourquoi, avec le PSL, nous participerons à cette marche des ‘‘salopes’’, de même que nous continuerons, partout où nous sommes présents, sur les lieux de travail, dans les écoles, les unifs, les quartiers, etc., à lutter contre le sexisme et le système qui l’engendre.

  • La menace des marchés financiers et des agences de notation contre la Belgique est-elle réelle ?

    Fitch Ratings, Moody’s et Standard & Poor’s ; des noms autrefois inconnus du grand public mais aujourd’hui si redoutés que leur seule évocation en fait trembler plus d’un. Régulièrement, concernant notre pays, ces agences de notation précisent que les tensions communautaires pourraient avoir des conséquences très néfastes pour la note de crédit de la Belgique. Qu’en est-il ?

    Article tiré de l’édition de septembre de Lutte Socialiste

    A lire la presse économique, il semblerait que les fondamentaux économiques de la Belgique protègent relativement le pays. La dette nationale, par exemple, est passée de 137% du Produit Intérieur Brut en 1993 à un peu moins de 100% actuellement. Cela reste considérable aux yeux des observateurs du marché, mais nombre d’autres pays commencent à nous rejoindre. Dans les cas de l’Allemagne ou de la France, sur un laps de temps similaire, la dette nationale est passée d’environ 45% à 85%. La différence n’est donc plus aussi énorme.

    Ensuite, des résidants en Belgique possèdent des fortunes financières considérables. En 2010, il s’agissait de quelque 900 milliards d’euros, soit environ 250% de la dette nationale, dont 200 milliards d’euros (60% de la dette nationale) en comptes d’épargnes, des records historiques. Le message est clair : en moyenne, les ménages en Belgique peuvent encore faire face à un approfondissement de la crise économique et ne vont pas stopper net leur consommation directement. Les chiffres d’emploi sont aussi assez rassurant pour les marchés. La Belgique a même plus d’emplois aujourd’hui qu’avant la crise (au détail près qu’il y a eu une explosion du travail précaire et temporaire et d’emplois subsidiés…). Tous ces éléments font dire aux agences de notations que la situation économique et budgétaire de la Belgique, dans le contexte international actuel, est assez bonne, avec une épargne importante.

    Reste le risque politique. L’agence Fitch, la dernière à avoir livré un rapport sur la Belgique, estime que le fait que la Belgique ne s’est toujours pas dotée d’un gouvernement de plein exercice ne constitue encore qu’un problème à long terme. Pour Moody’s, ‘‘une pression potentielle à la baisse sur la note pourrait naître si l’impasse politique actuelle n’est pas résolue rapidement’’. Standard & Poor’s ne dit pas autre chose. Cette dernière agence a récemment dégradé la note des Etats-Unis, notamment pour des raisons politiques, au vu de l’impasse entre Démocrates et Républicains concernant le relèvement du plafond de la dette du pays.

  • En bref…

    Cette rubrique est destinée à mettre en avant différents faits, citations ou petites nouvelles particulièrement frappantes.


    Impossible de vivre avec 3000 euros par mois…

    Jean Michel Javaux, coprésident d’ECOLO et bourgmestre d’Amay notamment, a été légèrement attaqué au sujet du cumul, thème particulièrement cher à son parti. Il s’est défendu en disant sur Twitter : "c pas un cumul…Vous pouvez ergoter mais bourgmestre d’une commune de -de 15000 habitants (et aucun autre mandat electif) oblige tous les échevins et exécutifs à avoir un boulot." Ce qu’il faut savoir, c’est que le salaire brut des bourgmestres a été revalorisé en 2011. Actuellement, il s’agit de 3.000 euros bruts par mois. Pour une ville comme Mons, il s’agit de 6.000 euros. ce qu’affirme donc en substance Mr Javaux, c’est donc qu’il n’est pas possible de vivre avec 3.000 euros par mois. Sur quelle planète vit-il? Très nombreux sont les travailleurs qui ne disposent pas de cela, et de fort loin d’ailleurs… Peut-être que nous pourrons à l’avenir voir ECOLO participer activement aux luttes pour de meilleurs salaires avec l’objectif de permettre à chacun d’avoir plus de 3.000 euros ?


    De gauche, ECOLO?

    Ce n’est pas la semaine de Javaux… WikiLeaks a publié un document qui est un rapport d’une discussion “confidentielle” entre le chef de file des ‘‘verts’’ et l’ambassadeur des Etats-Unis. Ce texte est limpide quant aux efforts effectués par l’homme fort d’ECOLO pour plaire à l’establishment, une rhétorique tout autre que celle qu’il utilise vers ses électeurs ou la base du parti… Morceaux choisis : Javaux aurait précisé que son parti n’est pas de gauche (Ecolo ‘‘bousculant les frontières entre les classes.’’) et aurait aussi déclaré que des militants sont issus de riches familles notamment liées à RTL ou Umicore (‘‘Il a un nombre étonnant de supporters clés parmi les riches familles industrielles belges, a-t-il expliqué.’’ou encore ‘‘Il explique que certains des militants Ecolo les plus importants viennent des familles riches qui contrôlent de grandes compagnies en Belgique, notamment RTL (une chaîne de télévision privée) et Umicore (un groupe chimique)’’). Javaux aurait aussi positivement parlé de l’implication de la Belgique dans les opérations militaires en Afghanistan (tout en admettant que ce sujet est sensible, surtout parmi les immigrés qui votent pour ECOLO) et aurait déclaré qu’il est important de travailler avec l’OTAN et l’ONU. Les centrales nucléaires pourraient aussi rester ouvertes plus longtemps. L’ambassadeur fait aussi remarquer que Javaux slalome entre les partis traditionnels et qu’il ‘‘ est bien possible que les verts créent la surprise en Wallonie en poussant des réformes qui ne sont pas nécessairement appréciées à gauche ou au centre.’’


    Ce système est littéralement malade

    165 millions de personnes en Europe sont atteintes de troubles psychiatriques ou neurologiques plus ou moins graves. C’est le constat auquel est arrivé le Collège européen de neuropsychopharmacologie après une étude réalisée sur 500 millions de personnes issues des 27 pays de l’Union Européenne. Un expert en santé mentale due l’Organisation Mondiale de la Santé a déclaré que ‘‘c’est bun indicateur du stress de notre société, pas forcément de troubles psychiatriques’’. L’Etat de la santé mentale dans notre pays est lui-aussi préoccupant. En 2009, 263 millions de doses journalières d’antidépresseurs ont été vendues. Cette année-là, on estime qu’un Belge sur dix a pris des antidépresseurs, soit 1,1 million de personnes. Environ 5% de la population du pays est aux prises avec une lourde dépression.


    ‘‘Le pire de la crise de l’euro est encore à venir’’

    Wolfgang Munchau du journal Financial Times ne fait pas dans la dentelle. ‘‘Je m’attends de ce fait à ce que la récession frappe la zone euro de plein fouet, et sans défense. Lorsque cela arrivera, la crise de l’eurozone ne sera pas belle à voir.’’ Pourquoi ? Il explique que chaque pays de la zone euro oublie qu’il fait partie d’un ensemble, et que ses actions ont un impact sur cet ensemble. Il se comporte comme une petite économie ouverte. Or, les plans de sauvetage ont besoin de la croissance pour jouer à plein. Celui de la Grèce, qui était déjà problématique au moment de sa rédaction, est compromis par la récession du pays. La stratégie de recapitalisation des banques est en train de s’effondrer avec le ralentissement économique. Cet été, la croissance semble s’être figée dans les pays de l’eurozone. Cela fait deux mois que les prêts consentis au secteur privé sont en berne. Les prévisions pour l’activité manufacturière sont en recul. Il critique aussi sévèrement les plans d’austérité de la France, l’Espagne, l’Italie, la Grèce, le Portugal et l’Irlande, qui retentissent sur l’ensemble de la zone euro.


    Les dirigeants britanniques du Parti travailliste veulent être bien clairs: ils n’aiment pas les grèves

    Que faire en tant que dirigeant politique d’un parti d’opposition sensé être auprès des travailleurs lors d’une interview concernant une grève des fonctionnaires si quand on ne soutient pas du tout cette grève ? On répète la même chose à chaque question…


    Entre amis

    Fin juin 2011, Filip Dewinter, porte-parole du Vlaams Belang, a participé à une réunion de la Lega Nord à Pontida, près de Bergamo. Il y a notamment rencontré Francesco Speroni (à l’extrême droite de la photo). Un mois plus tard, ce même Speroni expliquait que Breivik n’avait fait que défendre la civilisation occidentale avec son massacre…


    Rions un peu avec les riches (en anglais)

  • En bref…

    Cette nouvelle rubrique paraîtra régulièrement le week-end, et est consacrée à mettre en avant différents fait ou petites nouvelles particulièrement frappantes.


    Un krach en septembre ou octobre?

    C’est l’interrogation que l’on a pu lire ce lundi sur le site Express.be, qui relayait les propos d’un cadre d’une banque londonienne tenu dans le Telegraph: ”Le problème provient d’un manque de liquidité, c’est ça qui provoque le problème avec les banques. On dirait que c’est la même chose qu’en 2008. (…) Je pense que nous nous dirigeons vers un krach en septembre ou octobre, qui surpassera tout ce que nous avons connu jusqu’alors.” Le Telegraph a rapporté les assurances pour les dettes de plusieurs grandes banques européennes sont plus élevées que durant la crise financière de 2008. Les couvertures de défaillance (CDS) sur les obligations de la Royal Bank of Scotland (RBS), de BNP Paribas, de la Deutsche Bank et d’Intesa Sanpaolo, entre autres, ont atteint des niveaux record la semaine dernière.

    Photo ci-contre: ”Si Marx était en vie, il dirait "je vous l’avais bien dit".


    Leurs remèdes ne fonctionnent pas

    C’est ce que l’on peut notamment lire en première page de l’édition de septembre de notre mensuel ”Lutte Socialiste”. La Commission grecque de contrôle du budget vient de confirmer cela cette semaine, en alertant que les nouvelles de l’économie grecque sont loin d’être rassurantes. "La dynamique de la dette grecque est désormais hors de contrôle" affirme-t-elle. Elle se base sur l’augmentation de la dette (le dernier chiffre est de 350 milliards d’euros) et sur les dernières données de récession pour le pays: – 4,5 % cette année, malgré les plans d’urgence de l’UE et les diverses attaques très brutales contre les travailleurs et leurs familles. Non, vraiment, les remèdes capitalistes pour sauver ce système malade ne fonctionnent pas.


    Test-Achats : la facture énergétique est trop élevée

    L’organisation de défense des consommateurs Test-Achats vient de confirmer ce que chacun sait déjà très bien: nous payons de trop pour notre énergie. L’Electricité et le gaz sont bien plus chers en Belgique que dans les pays voisins. Pour une facture annuelle de 900 euros avec Electrabel, on n’aurait payé que 500 euros en France. Test-Achats met particulièrement en avant le rôle des distributeurs d’énergie, qui représentent 30 à 40% de la facture finale pour l’énergie. L’organisation dit ”ne pas comprendre" pourquoi les prix ont tellement augmenté depuis la libéralisation du secteur, deux fois plus que l’index. Avez-vous pensé à la soif de profit du privé ? Test-Achats propose, entre autres à réduire la TVA sur l’énergie et d’instaurer un contrôle des prix. Avez-vous pensé à la nationalisation du secteur de l’énergie ?


    ”47% des Wallons avouent se serrer un peu la ceinture.’’

    C’est constat auquel a abouti le Crioc (Centre de Recherche et d’Information des Organisations de Consommateurs) qui a lancé fin août un nouvel indicateur pour aborder les difficultés des Belges qui ne tombent pas sous le seuil officiel de pauvreté. Ce chiffre n’est bien entendu pas une véritable nouvelle pour nombre d’entre nous, mais c’est une illustration concrète de ce à quoi nous devons nous attendre si nous ne résistons pas. A Bruxelles, il s’agit de 30%.


    Envoyez les chômeurs au café!

    ‘‘Que le gouvernement intervienne avec des chèques-repas, qu’il subsidie les gens pauvres pour les aider à payer leur consommation d’énergie, c’est une aberration totale. Il vaut mieux leur donner de l’argent pour qu’ils aillent au café et prendre un verre ensemble. Ça coûtera moins en chauffage aussi.’’ Roland Duchatelet – nouveau propriétaire du Standard de Liège, ancien sénateur du VLD, ancien fondateur du parti Vivant (droite de droite) – a ses propres solutions pour la pauvreté. Une belle arrogance de la part de la 18e fortune de Belgique. Il ‘‘pèse’’ 502 millions d’euros…


    Les services de la jeunesse en action dans le district de David Cameron

    Dans le comté d’Oxfordshire, qui est aussi la circonscription du Premier ministre conservateur David Cameron, une action a été menée fin août contre les plans d’austérité des conservateurs, qui ont notamment pour conséquence la disparition de deux tiers des fonds pour la jeunesse. 26 centres de jeunesse sont menacés de fermeture. Peu de temps après les émeutes, David Cameron avait donné une conférence de presse dans un centre de jeunesse à proximité de l’endroit où l’action s’est déroulée… car même ce centre n’a pas son avenir assuré! 80 emplois sont en jeu. l’action a été menée par une soixantaine de personnes rassemblée au piquet de grève, une grève soutenue par 93% du personnel.


    Le chômage, néfaste pour les enfants aussi

    On a aussi pu lire cette semaine sur Express.be que ”La crise économique peut, chez des enfants de chômeurs de longue durée, conduire au stress, à des difficultés comportementales et économiques (…) Les problèmes économiques liés au chômage ont un impact négatif sur l’environnement familial, et les enfants en sont les victimes ". C’est ce qui ressort de l’étude de Heather Hill, professeur à l’Université de Chicago et spécialiste des services sociaux. Elle a, entre autres choses, noté que le chômage des parents augmente de 40% les problèmes de comportement à l’école.

  • On retourne à l’école, mais on passe d’abord par la banque…

    Il est fréquent dans Lutte Socialiste et sur socialisme.be de pointer l’augmentation du coût de la vie et la difficulté croissante pour de nombreuses familles à faire face aux dépenses domestiques. En ce mois de rentrée scolaire, c’est le poste ‘‘école’’ du budget familial qui risque encore de faire s’arracher les cheveux aux parents.

    Par Simon (Liège)

    Une étude française révèle que le coût de la rentrée scolaire en France explose cette année avec une augmentation de 7% par rapport à l’année dernière. Le même type d’augmentation est à attendre chez nous puisque l’étude révèle que c’est l’augmentation des prix des matières premières qui serait à l’origine de cette flambée des prix. Dans le même temps, l’étude annuelle de la Ligue des familles sur ce sujet informe que le coût scolaire pour enfant atteignait de 1.000 à 8.000 euros pour l’année 2010-2011, tous niveaux confondus. Et de préciser les chiffres : 1.057 euros en maternelle (dont 168 euros en septembre), 2.152 en primaire (383 en septembre), 2.933 en secondaire (570 en septembre) et 7.928 en supérieur (1.819 en septembre). La maigre prime accordée en complément des allocations familiales est bien loin de couvrir ces frais. On est encore bien plus loin du principe légal de gratuité de l’enseignement obligatoire.

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    Cet article provient de l’édition de septembre du mensuel ‘Lutte Socialiste’, disponible dès demain après-midi. N’hésitez pas et prenez un abonnement pour recevoir tous les mois votre ration d’informations et d’analyses réellement socialistes directement à la maison!

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    Ce coût croissant de l’enseignement est un frein évident pour les familles dont les enfants voudraient suivre des études supérieures. Quel ménage moyen ne va pas s’interroger sur la possibilité d’engager pour encore trois à cinq ans des frais de scolarité s’élevant à quasi 8000 € par an ? Certes, les bourses existent, mais elles sont de plus en plus difficiles à obtenir… Ce coût a aussi une incidence sur le type d’enseignement que va pouvoir recevoir un enfant issu d’un milieu populaire, et ce dès les premiers pas dans le réseau scolaire. Nous dénonçons depuis longtemps, comme le font aussi notamment les syndicats de l’enseignement, la dualisation croissante de l’enseignement obligatoire, maternel, primaire et secondaire. De plus en plus, des écoles pourtant subsidiées avec l’argent de l’ensemble des travailleurs deviennent inaccessibles à la plupart des ménages en raison des dépenses demandées aux parents en termes de fournitures scolaires, de voyages d’étude ou autres activités. Aujourd’hui, il y a d’un côté les écoles réservées à une élite qui a les moyens de payer s’il s’avère qu’une remédiation scolaire est nécessaire, et de l’autre les écoles où les enfants des classes populaires sont régulièrement écartés car ne correspondant pas au milieu social des autres élèves.

    Les enfants issus des milieux modestes se retrouvent donc dans des écoles ghettos non en raison de leurs moindres capacités à apprendre, mais parce que ces écoles sont plus accessibles financièrement et socialement.

    Un véritable programme socialiste pour l’enseignement devrait rendre absolument gratuit, du maternel au supérieur, tout le parcours scolaire d’un jeune, en ce compris les fournitures, les voyages scolaires et les frais d’inscription. Ceci pourrait être rendu possible en refinançant l’enseignement grâce à une politique qui irait chercher l’argent où il se trouve massivement : dans la poche des grands patrons et actionnaires.

    Coûts scolaires pour :

    • La maternelle : 1.057 euros
    • Le primaire : 2.152 euros
    • Le secondaire : 2.993 euros
    • Le supérieur : 7.928 euros
  • Retour sur la crise de Suez de 1956

    Le 5 novembre 1956, les paras britanniques et français descendent sur Port Saïd, en Égypte, afin de prendre contrôle de l’accès au canal de Suez. Deux mois plutôt, devant une foule enthousiaste, le président égyptien Gamal Abdel Nasser avait déclaré : ‘‘nous défendrons notre liberté. J’annonce la nationalisation du canal de Suez.’’ Au vu des récents évènements révolutionnaires en Egypte, il est bien entendu utile de revenir sur la crise de Suez et sur le Nassérisme.

    Dossier de Dave Carr

    La Grande-Bretagne, la France et les Etats-Unis avaient refusé d’accorder à l’Égypte un emprunt pour la construction du barrage d’Assouan, un projet qui avait pour objectif de rendre l’eau disponible toute l’année, d’étendre les surfaces irriguées, d’améliorer la navigation sur le fleuve et de produire de l’électricité. Nasser a répliqué qu’il prendrait les 100 millions de dollars de revenus du canal de Suez afin de financer le projet.

    Cette nationalisation a, bien entendu, glacé le sang de l’impérialisme britannique et français. Nasser avait maintenant le contrôle d’un passage stratégique par où défilaient les stocks de pétrole arabe vers l’occident. De plus, il commençait à obtenir de plus en plus de soutien de la part des ouvriers et paysans pauvres dans toute la région. Ces mouvements menaçaient directement les régimes fantoches de différents du Moyen-Orient.

    Après 1945, les ouvriers et paysans du monde colonial étaient entrés dans un nouveau stade de leur lutte anti-impérialiste et pour la libération nationale et sociale. Les jours de la domination directe des vieilles puissances coloniales étaient désormais comptés.

    Le Premier ministre britannique Anthony Eden avait été encouragé par son gouvernement conservateur pour tenter de remettre le royaume britannique plus fortement en avant sur la scène internationale. Malgré le déclin économique et politique grandissant de l’impérialisme britannique consécutif à la seconde guerre mondiale, Eden pensait que la Grande-Bretagne pouvait jouer un rôle de premier plan dans le cours des grands évènements mondiaux. La classe dirigeante française pensait elle aussi qu’il était possible de redorer le blason de la gloire coloniale du pays. Mais l’approche brutale de l’impérialisme français au cours des guerres coloniales avait conduit à la défaite de la guerre d’Indochine et la guerre d’Algérie, déjà entamée, allait elle-aussi bientôt se solder par une cuisante défaite conduisant au retrait du pays.

    Réaction occidentale

    ‘‘Nous bâtirons ce barrage avec les crânes des 120.000 ouvriers égyptiens qui ont donné leur vie pour la construction du canal’’. Cette déclaration de Nasser avait constitué, pour les ouvriers et les chômeurs des bidonvilles du Caire et d’Alexandrie ainsi que pour la population de la région entière, une attraction énorme.

    La réaction de l’occident était prévisible. Tant au Parlement britannique qu’au Parlement français, Nasser a été comparé à Mussolini et Hitler. En Grande –Bretagne, les médias bourgeois et les parlementaires conservateurs n’avaient de cesse de parler de ‘‘Nasser-Hitler’’, tandis que les parlementaires travaillistes ou libéraux demandaient eux-aussi des mesures contre l’Égypte. Le Premier Ministre Eden ne le désirait que trop, et les avoirs du canal de Suez ont été immédiatement gelé dans les banques britanniques. Il s’agissait de presque deux tiers des revenus du canal.

    Le dirigeant du Parti Travailliste Hugh Gaitskell a soutenu le gouvernement conservateur auprès des Nations Unies, et a même déclaré qu’une intervention armée n’était pas à exclure contre Nasser. Le Premier Ministre français Guy Mollet promettait lui aussi une sévère riposte.

    Le gouvernement britannique a tout d’abord voulu montrer qu’il désirait résoudre la crise de façon diplomatique. Une conférence de 24 pays maritimes a été convoquée à Londres afin de discuter de la ‘‘menace contre la libre navigation internationale’’. Pendant ce temps, l’armée appelait les réservistes, et une grande force navale a commencé à se rassembler.

    En réponse, Nasser a lancé un appel pour une grève internationale de solidarité à l’occasion du début de la conférence. Le 16 août, des grèves massives ont donc eu lieu en Libye, en Égypte, en Syrie, en Jordanie et au Liban, ainsi que de plus petites actions de solidarité au Soudan, en Irak, en Tunisie et au Maroc. Partout, les ambassades britanniques et françaises étaient assaillies par des manifestants.

    La conspiration

    Le président américain Eisenhower, en pleine campagne électorale, a refusé de soutenir toute intervention militaire franco-britannique. L’impérialisme américain était en fait engagé dans un bras de fer avec les impérialismes français et britanniques pour gagner de l’influence dans le Moyen-Orient et en Afrique du Nord.

    Le prétexte servant à intervenir en Égypte a été une intervention israélienne armée dans le Sinaï, négociée au préalable avec les gouvernements français et britanniques. Les troupes britanniques et françaises sont ensuite venues s’interposer entre les troupes israéliennes et égyptiennes pour ‘‘protéger’’ le canal de Suez.

    Les représentants des gouvernements israéliens, français et britanniques s’étaient réunis secrètement le 24 octobre dans le voisinage de Paris, à Sèvres, et un pacte avait été conclu lors de cette réunion. Le Ministre des Affaires étrangères britannique, Anthony Nutting, a plus tard ouvertement expliqué que l’intervention britannique faisait partie d’une ‘‘conspiration commune avec les Français et les Israélien’’. Les Protocoles de Sèvres stipulaient que ‘‘L’État hébreu attaquera l’Égypte le 29 octobre 1956 dans la soirée et foncera vers le canal de Suez. Profitant de cette agression ‘surprise’, Londres et Paris lanceront le lendemain un ultimatum aux deux belligérants pour qu’ils se retirent de la zone du canal. Si l’Égypte ne se plie pas aux injonctions, les troupes franco-britanniques entreront en action le 31 octobre.’’

    Israël a utilisé le prétexte d’attaques transfrontalières de Palestiniens et du fait que le port d’Eilat avait été fermé par Egyptiens, et sont donc passé à l’offensive le 29 octobre. Le lendemain, comme convenu, les Français et les Britanniques lançaient un ultimatum commun pour imposé aux deux pays de se retirer à une quinzaine de kilomètres du canal.

    L’Égypte a bien entendu refusé cet ultimatum hypocrite. Les troupes britanniques et françaises sont donc intervenues. Les aéroports égyptiens ont été attaqués et, le 5 novembre, la zone de canal a été envahie. 1.000 Egyptiens, principalement des civils, sont décédés lors de l’invasion de Port Saïd.

    La défaite

    Le mouvement ouvrier s’est mobilisé contre cette intervention et, à Londres, une grande manifestation s’est tenue à Trafalgar Square. Lorsque les manifestants sont parvenus aux environs de Downing Street, où réside le Premier Ministre, des confrontations avec la police ont eu lieu.

    Au même moment, une révolte ouvrière éclatait en Hongrie, contre la dictature stalinienne, et cette révolte a été écrasée par les tanks soviétiques. Le même jour, l’Égypte était envahie.

    Les conséquences internationales ont été extrêmes. Les plupart des pays arabes ont rompu leurs relations diplomatiques avec la Grande-Bretagne et la France. Le pipeline britannique de Syrie a été saboté et l’Arabie Saoudite a bloqué les exportations pétrolières destinées à la Grande-Bretagne tandis que les USA exigeaient un retrait d’Égypte. L’Union Soviétique menaçait elle aussi de représailles.

    La faiblesse économique et politique de l’impérialisme britannique a été révélé au grand jour à la lumière de ces évènements. Le canal de Suez a été bloqué, des navires coulés. Très vite, l’essence a dû être rationnée en Grande Bretagne. De leur côté, les Etats-Unis ont refusé d’accorder un emprunt au pays, et ont empêché le gouvernement britannique d’en avoir un de la part du FMI. La Livre britannique a chuté, et ses réserves de monnaie étrangères ont rapidement été épuisées.

    Après six semaines, les troupes britanniques et françaises ont dû quitter l’Egypte, en pleine déroute, de même que les troupes israéliennes. Nasser est apparu comme le grand vainqueur qui avait humilié l’impérialisme. En Grande Bretagne, le Premier Ministre Eden a été brisé politiquement et moralement, et a dû démissionner.

    Après la crise de Suez, le processus révolutionnaire dans la région a connu un nouveau dynamisme.

    Qu’est ce que le nassérisme?

    Nasser est parvenu au pouvoir après un coup d’Etat militaire contre le monarque corrompu Farouk, renversé en 1952. Le Roi Farouk était une marionnette de l’occident, et plus particulièrement de l’impérialisme britannique.

    A ce moment, 6% de la population du pays détenait 65% des terres cultivables tandis que 72% de la population devait se contenter de seulement 13% de la terre. Il y avait des millions de paysans sans terre ou de chômeurs, obligés de vivre dans les bidonvilles du Caire et d’Alexandrie. Les occupations de terres et les grèves s sont développées, mais aucune formation politique des travailleurs n’était en mesure de conduire les ouvriers et les paysans dans la lutte pour le pouvoir. Le colonel Nasser a profité de ce vide politique.

    Ce dernier a opéré diverses réformes, tout en laissant le capitalisme intact. Il recourait à une rhétorique socialiste afin d’obtenir le soutien des ouvriers, mais n’a en même temps pas hésité à arrêter et à faire fusiller des dirigeants de grève. Il désirait recevoir l’appui des puissances occidentales, mais s’est finalement appuyé sur la bureaucratie soviétique en contrepoids contre l’impérialisme. Cet exercice d’équilibre dans son propre pays et face aux pouvoirs étrangers a assuré qu’il devienne un dictateur avec des caractéristiques de type bonapartiste.

  • Non à la dictature des marchés !

    Elle est où la démocratie ? Partout sur la planète, les politiciens décident du futur de milliards de personnes uniquement dans l’intérêt des banquiers et des patrons. En faisant porter le poids de leur crise sur les épaules de la population, ils poussent des millions de personnes vers un avenir sans espoir, fait de chômage de masse, de contrats pourris, de jobs mal payés, de services publics détruits, de misère, d’enseignement inaccessible, de baisse du pouvoir d’achat et de répression policière.

    Ce n’est pas la démocratie, c’est la dictature de la soif de profit. Alors que la majorité de la population doit se serrer la ceinture, les gros actionnaires et les patrons s’en mettent plein les fouilles. Et, en plus, ils ne payent presque pas d’impôt en Belgique grâce à différentes mesures comme la Déduction des intérêts notionnels ! Nous vivons dans un système créé pour les riches, par les riches, où l’on doit faire des sacrifices quand l’économie capitaliste se porte bien pour ‘‘sauvegarder la croissance’’, et en faire d’autres quand le système se casse la gueule. En bref, l’infime élite de super-riches repose au dessus d’une pyramide dont tout le poids repose sur les travailleurs et leurs familles.

    Les jeunes veulent des changements révolutionnaires

    Le mouvement ‘‘démocratie réelle’’ exprime une aspiration profonde pour une société dans laquelle les gens ont un vrai contrôle sur leurs vies, et ne sont plus à la merci d’une poignée d’ultra-riches, de banquiers voleurs et de politiciens corrompus. Nous avons tous été inspirés par les luttes révolutionnaires en Égypte et en Tunisie, qui ont remis l’idée de révolution à l’ordre du jour. Maintenant, la nouvelle vague d’espoir provoquée par le mouvement ‘‘démocratie réelle’’, qui a démarré en Espagne se répercute à des degrés divers en Grèce, au Portugal, en Italie, en France, en Belgique, en Angleterre, en Pologne,…

    Les assemblées sur les places à travers toute l’Espagne ont donné une image vivante des gens se rassemblant, discutant et prenant leurs propres décisions pour le futur. Les assemblées dans les usines, les lieux de travail, les quartiers, les écoles et les universités sont nécessaires pour poursuivre la lutte et construire un mouvement puissant et unifié des travailleurs, des jeunes et des pauvres, organisé démocratiquement par la base, avec une direction qui réponde de ses décisions devant cette base et soit révocable. Les Assemblées devraient être reliées localement, régionalement et nationalement. Ainsi, les délégués pourraient se réunir afin de renforcer le mouvement, mais toujours sous le contrôle des assemblées et sujets à révocation. Ces assemblées peuvent être la base d’une lutte pour un changement réel dans l’intérêt des travailleurs, de la jeunesse, des chômeurs et des retraités.

    Le capitalisme ne représente aucune alternative, il sera toujours la dictature des marchés. Il ne pourra pas donner naissance en son sein à une réelle démocratie. Il faut une alternative anticapitaliste. Nous sommes pour une alternative basée sur le contrôle démocratique des moyens des secteurs-clés de l’économie (finance, énergie, transport,…), c’est-à-dire leur expropriation pour qu’ils soient nationalisés sous le contrôle démocratique de la collectivité, des travailleurs et des jeunes. A partir de là, l’économie pourrait être orientée vers la satisfaction des besoins de la majorité grâce à une planification démocratique de la production.

    C’est ce pourquoi nous nous battons, et ce pourquoi nous vous invitons à nous rejoindre : pour une démocratie réelle, maintenant ! Pour une démocratie socialiste !

  • Algérie: De la lutte pour l’indépendance au développement du fondamentalisme

    Une région en révolte – ce qui a précédé… (1)

    Cette semaine, nous allons accorder une attention particulière à l’histoire du mouvement ouvrier en Afrique du Nord et au Moyen-Orient. Bien entendu, au vu des révoltes et des révolutions qui touchent cette région, jeter un coup d’œil au contexte sur base duquel prennent place ces développements est particulièrement important. Nous commençons cette série avec cet article, consacré à l’Algérie et basé sur dossier plus long rédigé par nos camarades de la section allemande du Comité pour une Internationale Ouvrière.

    C’est en 1830 qu’a commencé l’occupation française de l’Algérie, et la répression coloniale a de suite été particulièrement brutale pour les populations arabes et berbères. La résistance et la lutte pour l’indépendance se sont rapidement développées, avec notamment les massacres de Sétif, Guelma et Kherrata, où quelque 40.000 Algériens ont été tués par l’armée française en 1945 lors d’une révolte. En septembre 1947 est arrivée une loi visant à stopper le mouvement indépendantiste en accordant la citoyenneté française à tous les Algériens. Mais c’était bien trop tard pour enrayer la lutte pour l’indépendance.

    Lors de la période qui a suivi la seconde guerre mondiale, le niveau de vie de la population n’avait pas fondamentalement évolué. Le revenu moyen d’un Algérien européen était de sept fois supérieur à la moyenne de la population autochtone. Deux tiers du pays appartenaient alors à des sociétés françaises ou à de gros propriétaires terriens. En 1954, à la veille de la guerre d’Algérie, au moins un million de personnes étaient au chômage, et pas moins de deux millions de personnes connaissaient des emplois temporaires. Pas moins de 82% de la population autochtone était analphabète, alors que tous les Algériens européens savaient lire et écrire. La mortalité infantile connaissait l’un des taux les plus élevé au monde : 284 pour 1.000, soit quatre fois plus que parmi les Algériens européens.

    Le 1er novembre 1954 éclata une révolte. Une fois rendu clair le fait que les mouvements nationalistes traditionnels étaient dans l’impasse et que la voie parlementaire ne conduisait pas à l’indépendance, la voie était libre pour la lutte armée. Au début, les combattants de l’indépendance étaient à peine armés, alors qu’ils avaient engagé le combat contre une nation industrielle puissante disposant en outre d’une minorité européenne raciste au sein même du pays. L’élément déterminant grâce auquel l’indépendance a finalement pu être arrachée a été le soutien grandissant parmi la population et la résistance croissante de la classe ouvrière. Les jeunes français se sont aussi de plus en plus retournés contre la guerre d’Algérie.

    En 1962, l’indépendance a été obtenue sous la direction du mouvement de libération FLN, le Front de Libération National, après une guerre qui a coûté la vie à 1,5 million de personnes (soit 10% de la population totale). Environ un million de colons français (généralement des capitalistes, des ingénieurs, des techniciens, des fonctionnaires, etc.) ont quitté le pays, et c’est à peine si une bourgeoisie indigène existait pour reprendre en main l’économie capitaliste algérienne.

    Au sein du FLN, la direction du mouvement était dominée par des éléments petit-bourgeois radicaux qui avaient fait appel à la classe ouvrière ainsi qu’aux agriculteurs. Le FLN, sous la pression des masses, a adopté des positions socialistes. Si ces positions avaient été mises en pratique de façon conséquente, il aurait été possible de balayer la grande propriété terrienne et le capitalisme avec un mouvement de masse. Mais ce n’est pas la voie qu’a suivi la direction du FLN. Lors des accords d’Evian, en mars 1962, les sociétés et le gouvernement français ont ainsi obtenu la garantie que leurs intérêts économiques seraient défendus.

    Le FLN s’était développé de la guérilla en un parti qui, sous la pression issue d’en bas, a toutefois dû prendre des mesures contre les capitalistes. Durant l’été et l’automne 1962, de nombreuses propriétés étrangères ont été nationalisées. En mars 1963, les comités ouvriers qui avaient repris différentes entreprises des propriétaires européens qui les avaient abandonnées ont été légalisés. Environ la moitié des terres cultivables étaient en possession de l’Etat. En 1963, un système a été introduit sous le nom ‘‘d’autogestion’’, la base de se qui sera connu comme le ‘‘socialisme algérien’’. Les travailleurs pouvaient alors élire leur propre administration pour collaborer avec un directeur désigné par l’Etat.

    Toutes ces mesures ont été imposées par décret et n’étaient pas le résultat d’une large implication des ouvriers et paysans et du contrôle de ces derniers sur le processus. À cause de cela, les bases ont de suite été jetées pour la corruption et une mauvaise planification. De plus, l’indépendance était uniquement politique, l’Algérie restait économiquement dépendante des puissances impérialistes, et de la France en particulier.

    L’Etat qui a surgi de la guerre d’indépendance était un type de régime bourgeois-bonapartiste qui recourait à une rhétorique ‘‘socialiste’’ mais était dirigé par une élite petite-bourgeoise. Cela signifiait que les décisions n’étaient pas démocratiquement prises, il n’y avait pas d’implication active des travailleurs et des paysans dans le processus de prise de décision. C’est ce vide qui a permis l’arrivée d’un gouvernement autoritaire. En 1965, Ben Bella – qui essayait de pousser le FLN dans une direction anticapitaliste et socialiste – a été arrêté à l’occasion du coup d’Etat militaire de Houari Boumediene. Mais la misère économique et sociale s’est toutefois poursuivie sous ce régime, et ce dernier a été forcé de prendre des mesures contre le capitalisme. Le régime a ainsi renforcé les interventions d’Etat dans des secteurs qui auparavant étaient laissés au secteur privé. Une entreprise de construction publique a été mise en place et, en 1966, onze mines qui étaient encore en possession étrangère (avec des propriétaires absents) ont été expropriées et nationalisées. Toutes les activités d’assurance ont aussi été placées sous le contrôle de l’Etat et une Banque Nationale a été instaurée.

    En 1971, un conflit entre le gouvernement algérien et les grandes entreprises pétrolières françaises concernant le prix du pétrole a été réglé par la décision du gouvernement de prendre en main 51% de deux sociétés françaises et d’entièrement nationaliser les oléoducs de gaz et de pétrole. La même année, un programme de réforme agraire a été adopté, qualifié de ‘‘révolution agricole’’. Une forme d’élection de ‘‘conseils ouvriers’’ a également été instaurée dans le secteur public. La distribution de nourriture est elle aussi arrivée dans les mains de la collectivité.

    Lors d’une deuxième phase, en 1973, les propriétaires terriens qui ne faisaient rien avec leurs terres cultivables ont été obligés d’entreprendre des activités agricoles ou de donner leurs terres aux fermiers. Un programme a été mis en place afin d’instaurer des ‘‘villages socialistes’’ et les jeunes étaient encouragés d’aller travailler et étudier à la campagne durant leurs vacances. L’enseignement privé a été supprimé en 1976.

    Après la mort de Boumediene, en 1978, le comité central du FLN a pris le pouvoir. Les nationalisations opérées sous Boumediene avaient assuré un énorme développement économique, la mortalité infantile avait diminué de moitié, le nombre de médecins avait augmenté de 1279 à 29.506 et le degré d’alphabétisation avait augmenté, de 12% à 80% parmi les femmes par exemple.

    Mais, en Algérie également, on a pu constater que le développement du pays, en restant dépendant du capitalisme mondial, n’était pas possible. Le pays a été durement touché par la récession mondiale des années ‘80 et par l’effondrement des prix du pétrole. Le régime a réagi par des libéralisations et, ainsi, les fermes d’Etat ont été bradées au privé.

    Le déclin économique continuel a conduit à des protestations contre le régime, et le pays a ainsi connu des ‘‘émeutes de la faim’’ en 1988. La fin des interventions des autorités avait assuré qu’une majorité de la population souffre de la faim. Plus de 500 personnes, majoritairement des jeunes, ont perdu la vie lors de ces protestations. Cette révolte avait été précédée d’une grève des ouvriers de l’automobile, ces derniers exigeant des augmentations de salaire. Cette grève a été suivie par le personnel postier et, plus tard, d’autres pans de la classe des travailleurs ont eux aussi rejoint la protestation. Les revendications ont alors été élargies, jusqu’à s’en prendre directement au régime de parti unique.

    Le calme a été rétabli après 1988, mais a au prix fort. Tout d’abord, la répression a été cruelle, avec quelques bien maigres concessions. Les magasins ont reçu plus de nourriture, les salaires ont connu une augmentation et on a parlé de réformes politiques mais, au final, le mouvement n’a pas rencontré la victoire. C’est ce contexte qui a assuré que l’espace existe pour le développement du FIS (Front Islamique du Salut) qui, lors des élections locales de 1990, les premières élections ‘‘libres’’ du pays, a de suite remporté 54% des voix. Lors des élections parlementaires, le FIS a récolté 47% au premier tour, un an plus tard. Le FLN craignait de perdre le pouvoir et l’armée craignait l’arrivée d’un régime fondamentaliste. L’appareil d’Etat bourgeois est alors intervenu, et le FIS a été interdit, ce qui a conduit à une guerre civile qui a fait plus de 100.000 morts.

  • Ecole d’été du CIO – Europe: Développement de la crise économique, sociale et politique

    Cette crise est la plus sévère depuis des décennies et la nouvelle génération qui participe maintenant aux luttes arrive au moment des mobilisations de masse en Tunisie, en Égypte, en Espagne, en Grèce,… Cette nouvelle génération peut aujourd’hui écrire l’histoire. Aucun pays d’Europe n’est pas affecté par ces évènements.

    Résumé de l’introduction à la discussion de Peter Taaffe

    La période que nous connaissons est faite de changements abrupts. Dans tâches qui, avant, se concevaient sur quelques années se produisent maintenant en quelques semaines, voire en quelques jours.

    Aujourd’hui, la Grande-Bretagne n’est pas le pays le plus avancé sur le terrain de la lutte des classes, mais ce qui se produit avec Rupert Murdoch intéresse les masses, et la situation est certainement plus profonde qu’au moment du Watergate aux USA à la fin des années ’60. Ce scandale touche le plus grand géant des médias au monde, et éclabousse le monde politique, il met à nu la conspiration capitaliste qui uni les médias, les politiciens et les grands patrons. Cela a bien entendu toujours existé mais, là, ce fait est démontré au grand jour, aux yeux de tous les britanniques et ailleurs. Cela peut entraîner la chute de l’empire Murdoch, mais aussi celui du gouvernement Cameron. Murdoch n’a même pas de considération pour son propre système. Il a dit au Parlement britannique que son modèle est celui de Singapour, un pays où la répression envers le mouvement ouvrier est très grande, et le salaire d’un parlementaire de un million de livres par an. C’est une véritable provocation. Murdoch a aussi été impliqué dans la surveillance de nos camarades à l’époque de la lutte contre la Poll Tax en Grande Bretagne, ainsi que dans la campagne contre le militant de gauche radicale écossais Tommy Sheridan.

    Le point le plus important de cette discussion, c’est la crise économique. Les bourgeois craignent énormément la généralisation de la situation de la Grèce, de l’Espagne,… à tous les pays d’Europe. Ces évènements valident une fois de plus la théorie de la Révolution Permanente du révolutionnaire russe Léon Trotsky. Nous avons vu les événements passer très vite d’un pays à l’autre. Nous aborderons le Moyen Orient et l’Afrique du Nord dans une autre discussion, mais il est clair que cela a influencé et enthousiasmé les luttes à travers le globe. Et alors que certains affirmaient que la lutte de classe n’existait pas en Israël, nous assistons maintenant à des luttes et à des occupations de place en Israël également. (Depuis lors, quelque 150.000 employés municipaux israéliens ont été en grève, en solidarité avec la contestation contre l’explosion des prix des logements. Le pays vient de connaître les plus grosses mobilisations de son histoire, NDT).

    Il n’y a pas de voie de sortie aisée pour la crise des capitalistes, et des mouvements tel que celui des Indignés ne vont pas stopper maintenant. La politique de la bourgeoisie n’a jusqu’à présent pas marché du tout. Les injections de liquidités ont pu stabiliser la situation, sans créer les conditions pour un nouveau développement sain. Obama avait comparé cela au débat avec le new deal de Roosvelt, mais ses injections n’ont eu pour but que de sauver les institutions financières et bancaires, alors que le New Deal était composé d’un minimum d’investissements dans l’économie réelle (infrastructure,…). Là, les plans de sauvetage ont entraîné des plans de licenciements un peu partout, ce qui a amplifié les problèmes.

    Cette crise n’est pas cyclique, elle est systémique. C’est le système lui-même qui est en crise. Bien sûr, il n’y a pas de crise finale du capitalisme tant que la classe ouvrière ne prendra pas le pouvoir. Le capitalisme trouvera toujours un moyen de sortie sans cela, y compris vers un scénario ‘‘à la Mad Max’’, comme on peut le voir actuellement au Mexique avec la ‘‘guerre de la drogue’’.

    Ce qu’on voit aujourd’hui en Grèce avec la destruction des conditions de vie sans que la situation ne s’améliore doit servir de modèle pour la classe ouvrière des autres pays: le capitalisme n’a rien d’autre à nous offrir.

    Plusieurs données permettent de voir que nous sommes dans une situation pire que dans les années ’30. Certains économistes disent d’ailleurs que le modèle à prendre en compte aujourd’hui n’est pas la crise des années ’30, mais la grande dépression de la fin du XVIIIe siècle. Certains salaires ont été descendus jusqu’à 600 voir 500 euros par mois.

    Aujourd’hui, la Grèce illustre le mieux la crise et le potentiel pour la classe ouvrière. On dit qu’il y a une rémission depuis 2009 au niveau économique, le problème, c’est que personne ne l’a remarqué, et certainement pas la classe ouvrière ! Partout en Europe, cette dernière subit des attaques. La production industrielle a à peine augmenté de 0,4% en Grande Bretagne, de 0,2% en France, et elle décroit en Grèce ou en Espagne. L’Allemagne constitue une exception, elle a encore une bonne base industrielle, et en termes de machines et d’outils, la Chine est une bonne destination pour les exportations, mais la Chine peut s’enfoncer dans la crise. Il n’existe aucune source de stabilité. Le capitalisme mondial va très certainement expérimenter une nouvelle chute de l’économie. Après avoir un peu remonté, la chute sera dure, et c’est déjà ce qu’expérimentent plusieurs pays européens.

    La dette mondiale est de 2,6 fois le PIB mondial, soit deux fois plus qu’après la crise de 29. Au niveau de l’emploi, on est face à un chômage de masse de longue durée. Aux USA, le nombre de chômeurs actuels est bien plus important que dans les années ’30 (en pourcentage, officiellement 10%, plus probablement 20%). Dans certains pays, comme l’Espagne, le taux de chômage chez les jeunes atteint les 40%. Même en grande Bretagne, on estime qu’il y a 800.000 travailleurs qui n’ont pas travaillé depuis au moins un an. Dans les entreprises, c’est l’occasion d’une offensive pour les patrons. Une entreprise a ainsi licencié tous ses travailleurs, pour les réengager de suite avec de moins bonnes conditions de travail. Un hôpital où nous avons des camarades, en Angleterre, connaît des contrats ‘‘O heures’’, où c’est le patron qui décide du nombre d’heurs de travail.

    Les bourgeois n’ont qu’une réponse: augmenter l’austérité et planifier la pauvreté. Le phénomène de l’appauvrissement constant de la classe ouvrière de Marx se vérifie. Marx n’a jamais dit que c’était linéaire, il reconnaissait que c’était possible pour la classe ouvrière de voir ses conditions de vie s’améliorer avec une croissance économique, mais que la tendance générale était à l’appauvrissement.

    La tendance générale est à l’inflation, avec une tendance à la hausse des prix de l’alimentation et du pétrole, ce qui alimente la colère des masses. La situation de paquets de stimulants, de plans de relance, vont accélérer cela, et l’on risque de se retrouver dans une situation de stagflation, où la stagnation économique se conjugue à une grande inflation.

    La Grèce est actuellement le maillon le plus faible du capitalisme européen, mais c’est l’avant-garde du mouvement ouvrier en Europe. Il y a eu 11 grèves générales depuis le début de la crise, et la jeunesse s’implique massivement. Au Portugal, il y a eu une manifestation de plus de 200.000 personnes sous le slogan ‘‘ce pays n’est pas un pays pour les jeunes’’, ça aurait été mieux s’ils avaient parlé du système, bien sûr, mais c’est un pas en avant. Le mouvement des indignés est clairement inspiré par les révolutions en Afrique du Nord et au Moyen Orient. La Grèce connaît pas mal d’éléments d’une situation prérévolutionnaire. L’Espagne et le Portugal aussi, mais peut-être pas à ce point. Pour l’Irlande, qui est en dépression constante, cela est moins le cas. La conscience des masses n’est pas gravée dans les esprits, elle découle de la situation générale, et des sauts de conscience sont à prévoir.

    Dans ce contexte, les opportunités qui s’offrent aux révolutionnaires marxistes vont augmenter. Nos camarades, partout dans le monde, ont préservé un noyau, un parti international qui va pouvoir sérieusement démontrer ce dont il est capable dans la période à venir. L’Irlande est un exemple de ce que nous pouvons faire quand la situation s’ouvre, avec les initiatives que nous avons prises, notamment autour de l’ULA (United Left Alliance, liste de gauche que nous avons initiée, et qui a remporté cinq élus aux dernières élections, dont deux de nos camarades, NDT). Comparons cela au NPA en France, ou au Bloco au Portugal. Durant des années, nous avons été à contre courant, c’était difficile mais, maintenant, la situation s’ouvre. La Grande Bretagne n’est pas immunisée à ce processus. En février, 750.000 personnes ont défilé dans les rues de Londres, et la grève du secteur public en juin était la plus grande depuis 20 ans. Même en Chine, l’augmentation des révoltes de masse pose la question de la révolution, mais dans un sens général et pas encore directement, dans un contexte de répression gigantesque. En Grèce aussi, la répression est aussi énorme. La facture de gaz lacrymogènes doit au moins être aussi grande que la dette du pays!

    Trotsky décrivait les bourgeois comme des gens aveugles, s’avançant vers le précipice. On est dans cette situation aujourd’hui, la bourgeoisie ne sait pas quoi faire. Les partis traditionnels bourgeois sont en crise profonde, ce qui affecte aussi les dirigeants syndicaux. Aujourd’hui, du point de vue social, pas encore politique, les masses sont massivement à gauche des organisations de gauche. Quand les politiciens bourgeois parlent de la crise de l’idéologie, c’est la crise de leur idéologie, mais le problème est qu’il n’y a pas encore d’alternative. En Grèce, 80% des sondés d’une étude ont dit que la société va dans le mauvais sens, mais 47% disent qu’aucun parti ne les représente.

    Mais même dans le pays le plus calme d’Europe, la Norvège, l’extrême droite peut faire des choses, comme nous l’avons vu avec les attentats d’Oslo. Il en va de même pour Marine Le Pen, qui a même apporté son soutien à la jeune immigrée victime de l’agression de DSK. Elle a aussi attaqué les syndicats, qui ne défendent plus les travailleurs selon elle. Cela veut dire que l’extrême-droite doit avoir un fort contenu social pour être capable de capitaliser sur la situation, et c’est en soi une indication intéressante, qui illustre la nécessité de construire de nouveaux partis larges pour représenter la classe des travailleurs, tout en défendant fermement les idées du socialisme.

    Le rejet de la politique dans le mouvement des Indignés, c’est le rejet de la politique bourgeoise. Des groupes de gauche radicale se sont cachés pour intervenir dans le mouvement, et ont stoppé de se présenter comme des organisations politiques, une attitude opportuniste. Cette haine est profonde, mais aussi saine dans le sens où elle s’exprime contre les politiciens, y compris des anciens partis de gauche, et contre les dirigeants syndicaux. Il fallait construire là dessus. Nous sommes toujours ouvertement intervenus, sans connaître de rejet complet, mais bien des difficultés.

    Pour la suite, le mouvement ne peut pas exister sans appui réel de la classe ouvrière. Le mouvement de la classe ouvrière ne va pas se développer de manière linéaire. Il y aura des défaites, des retraits, et une organisation révolutionnaire est également testée à sa manière de gérer les reculs. Il peut y avoir des éléments de désespoir dans la jeunesse aujourd’hui, certainement dans une situation de chômage de masse. ‘‘Soit on se bat, soit on s’enfuit.’’ Une partie de la jeunesse en Espagne ou en Grèce essaye d’ailleurs d’émigrer, mais dans une période de crise généralisée et globale, l’émigration ne constitue pas une véritable alternative.

    Concernant le défaut de paiement de la Grèce, c’est une discussion que nous avons depuis un moment au CIO. La classe capitaliste européenne fonce contre la classe capitaliste grecque. Dans la crise de l’Argentine, le choc entre les masses et l’élite a été très rapide. Le président s’est enfui en hélicoptère, un peu comme la fuite de Saigon en ‘75. Des éléments similaires peuvent se produire. L’Argentine était un des principaux pays dirigeants de l’Amérique latine, maintenant, ce n’est plus rien. Cette crise de la dette grecque est une crise d’une monnaie qui a refusé une fiscalité unique. Certains disaient que l’euro allait conduire à une sorte d’Etats-Unis d’Europe. Il est clair que les Etats capitalistes ont besoin d’être organisés collectivement, la production actuelle s’organise au moins à l’échelle d’un continent. Mais seule la classe ouvrière est capable d’organiser l’Europe sur une base socialiste et démocratique. Les contradictions entrent les différentes bourgeoisies nationales sont trop fortes.

    Il reste encore la question de l’environnement, qui est une part importante de nos actions, comme nous l’avons vu en Allemagne avec le mouvement contre le nucléaire ou ‘‘Stuttgart 21’’. Cette question est destinée à devenir plus importante. Nous avons beaucoup de chiffres sur les conditions de production de voiture en Chine par exemple, en 2018, la Chine se retrouverait à produire autant que le reste du monde en 2000.

    En France, la situation est plus calme. Sarkozy peut être battu par Hollande ou Aubry, et on a suggéré un moment qu’il aurait pu être dépassé au premier tour par Marine Le Pen, c’est une expression du chaos politique, un phénomène qui ne touche pas que la France. En Belgique, il n’y a toujours pas de gouvernement réel, mais toujours le gouvernement en affaires courantes. La question nationale est à l’avant-plan de la scène politique, ce que l’on a également pu voir sous l’effet de la crise en Pays basque ou en Écosse. Même en Italie, les forces contestant l’unification italienne se développent. Nous ne sommes pas opposés à la séparation. Mais nous ne devons pas mettre ça en avant tant que ce ne soient les masses qui le fassent.

    Cette période est une période clé pour le CIO. La classe ouvrière entre en action, une nouvelle génération entre en action, c’est à nous de les aider à tirer les leçons des victoires et des défaites du passés, tout en étant réalistes sur les possibilités actuelles. Avec les 30 dernières années d’ossification et de destruction des organisations du mouvement ouvrier, il faudra des années pour reconstruire la conscience suffisante pour clairement engager l’assaut contre le capitalisme.

    Aujourd’hui, 3 multinationales contrôlent 90% du commerce international de grains et 500 milliardaires dominent la planète. La misère et la pauvreté ne peuvent être stoppées sans lutter contre ce système pourri. Il en va aussi de l’intérêt de notre environnement. La lutte pour le socialisme et une économie démocratiquement planifiée est une nécessité de la plus haute importance. Sans cela, le genre humain va au devant d’une grande catastrophe.

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