Tag: Etienne Schouppe

  • Swissport : Une grève qui fait tomber les masques

    Les travailleurs du bagagiste Swissport à l’aéroport de Zaventem ont eu besoin de 5 jours de grève. C’est la deuxième fois en quelques mois – après les sous-traitants de Ford-Genk – que les couches les plus exploitées de travailleurs imposent par eux-mêmes des limites à la vague de déréglementation, de libéralisation et d’externalisation. A Swissport aussi les travailleurs n’ont pas été satisfaits des concessions arrachées par les syndicats après 4 jours de grève. Et eux aussi ont finalement réussi à obtenir plus que ce qui était initialement considéré comme possible.

    Par Eric Byl

    Tous les jours, les bagagistes doivent trimballer l’équivalent de 30 à 40 tonnes, la plupart du temps accroupis voir littéralement à quatre pattes. Ils empilent les bagages dans des tunnels de 5 à 10 mètres de long et d’un mètre de large, et souvent d’un mètre à peine de hauteur. Cela entraîne des maux de dos, de l’arthrite et des douleurs musculaires. Mais la libéralisation pousse à une concurrence effrénée entre compagnies aériennes. Elles instaurent donc une pression sur les sous-traitants qui compensent en augmentant l’exploitation, la flexibilité et le manque de sécurité. C’est que les compagnies aériennes peuvent toujours revoir leurs contrats conclus avec leurs fournisseurs.

    Cela met aussi pression sur les marges bénéficiaires, c’est vrai. Mais Fligthcare, qui a été repris l’an dernier par Swissport, a réalisé en 2011 un rendement sur capitaux propres de 30%. Mais Swissport regarde jusqu’où il peut encore aller. Normalement, trois personnes se chargent de 1,5 tonnes, mais cela a été relevé jusqu’à deux. La grève avait été déclenchée parce que deux bagagistes inexpérimentés avaient dû charger 1,7 tonne en 40 minutes. Une pression identique s’exerce – au détriment de la sécurité – sur ceux qui planifient les charges et les équipes de nettoyage. De plus, Swissport veut imposer aux travailleurs 24 journées de travail par an où plusieurs heures de pause s’intercalent entre les heures de travail afin que les travailleurs ne soient payés que pour les heures de pointe.

    Comment dès lors s’étonner que les bagagistes aient stoppé le travail et décidé en assemblée du personnel avec les syndicats de partir en grève ? En peu de temps, l’aéroport était plongé dans le chaos, des dizaines de vols ont été annulés et des milliers de sacs se sont entassés. Disposer d’un nombre de travailleurs réduit au minimum absolu peut bien être rentable quand tout se passe bien, mais ce petit groupe de 1500 travailleurs de Swissport a pu très vite tout mettre à plat. Ils ont également pu compter sur la solidarité de ceux qui connaissent le mieux ce travail, leurs collègues de Swissport Cargo Swissport (qui est maintenant indépendant) ainsi que du concurrent Aviapartner. Dans les deux cas, les travailleurs ont refusé de reprendre le travail. A Aviapartner, les syndicats ont même distribué un tract pour se mettre clairement derrière les revendications des grévistes. Là aussi, la situation est explosive.

    Mais les patrons aussi ont constitué un front. Selon le CEO Marcel Buelens, la rentabilité de Swissport serait en péril avec la diminution du nombre de vols à Zaventem et la perte du contrat conclu avec Jetairfly. La presse dominante a averti les travailleurs de ne pas scier la branche sur laquelle ils sont assis. Brussels Airlines a menacé de revoir son contrat avec Swissport et a utilisé sa licence de manutention, normalement confiée à Swissport, pour tenter de briser la grève. Les médias ont abondamment montré des passagers déclarant qu’ils essaieraient d’éviter l’aéroport national à l’avenir en raison de la grève. Pas un mot par contre sur la grève des travailleurs de Lufthansa pour augmentations de salaire au même moment, ni des tensions sociales présentes dans d’autres aéroports. Ce sont les voyageurs à la recherche du voyage au moindre coût qui ont été culpabilisés, pas la soif de profit des actionnaires, afin d’expliquer les conditions de travail inhumaines.

    Les patrons ont bien entendu pu compter sur le soutien de la scène politique traditionnelle. Etienne Schouppe (CD&V) ne voulait pas s’en prendre aux conditions de travail désastreuses, mais bien à l’impact de la grève en proposant qu’un troisième gestionnaire s’implique à Zaventem. Plus de libéralisation donc. Monica De Coninck (S.p.a.) a voulu diviser les grévistes en accordant des concessions aux employés mais pas aux ouvriers. Melchior Wathelet (cdH) a menacé les grévistes de sanctions au nom du gouvernement fédéral. Le PS est resté silencieux.

    C’est une première. Jusqu’à présent, le gouvernement essayait de se défendre en se disant impuissant contre les abus d’astreintes juridiques de la part des patrons. Mais cette fois-ci, il s’est ouvertement rallié au camp patronal et a lui-même menacé d’utiliser ces armes. Les médias ont lancé une offensive pour le service minimum et la restriction du droit de grève. Personne n’a par contre jamais expliqué comment mener une grève sans embêter de client ou de voyageur. Finalement, le patron danois de Swissport International a dû se prononcer. Il a compris que la tension était à son comble et menaçait la position lucrative de Swissport à Zaventem. Le système de deux travailleurs par avion a été retiré et la quantité maximale de bagages par travailleur par vol a été limitée à 300. Les travailleurs ne devraient prester que 12 journées coupées par an et non 24, pour un maximum de 6 pour les plus de 45 ans tandis que les plus de 50 ans seraient épargnés. Le PDG a également présenté ses excuses pour les erreurs que la direction belge a commises. Après avoir persévéré cinq jours, le personnel a affronté la direction, les médias et le gouvernement jusqu’à une victoire retentissante.

  • Voyageurs pour la grève – Soutenons la grève des cheminots !

    Le 3 octobre, les trains ne rouleront pas. Tous les médias sont prompts à condamner cette grève, cette action qui nous prendrait nous, voyageurs, en otage. Il est vrai que nous sommes déjà bien malmenés avec tous ces retards et ces trains annulés, mais la grève des cheminots s’oppose très précisément aux causes de cette dégradation du service. Cette grève mérite notre soutien !

    Usagers et travailleurs du rail seront tous victimes du projet de restructuration de la SNCB !

    La raison précise de cette grève peut sembler quelque peu technique. Magnette & Co veulent que la structure actuelle de la SNCB, en trois parties, cède la place à une nouvelle structure en deux parties, avec encore une unité distincte assurant le secrétariat social du personnel des deux premières. Les syndicats, eux, exigent une structure unifiée, un chemin de fer intégré. En quoi est-ce que cela peut bien nous concerner ?

    En fait, cela nous concerne au premier chef. Il n’est pas ici seulement question de l’organisation du système ferroviaire, mais aussi de l’avenir du service lui-même. Le fait qu’il existe actuellement plusieurs sociétés – une pour l’infrastructure, une pour le trafic lui-même et un holding qui chapeaute le tout – fait du groupe une hydre à trois têtes avec trois administrateurs et de gigantesques frais de gestion. Un exemple : ces sept dernières années, 837,3 millions d’euros ont été consacrés à des consultations externes ! Près d’un milliard ! Les projets de prestige ont aussi pompé pas mal de ressources (pensez à la gare de Liège Guillemins).

    La coexistence de ces différentes sociétés complique considérablement la communication du personnel pour immédiatement régler un problème en contactant la bonne personne à temps. Régler des problèmes techniques concernant les trains, les retards,… nécessite de passer d’une société à l’autre. L’énervement consécutif à cette situation touche, très logiquement, tant les cheminots que les voyageurs.

    Et ce n’est pas fini. La restructuration de la SNCB en deux parties n’est pas un évènement anodin. Une seule société, la SNCB, recevrait la gestion de toutes les activités déficitaires ainsi que la montagne de dettes du groupe tandis qu’une autre serait l’entité gestionnaire du réseau et des infrastructures, Infrabel, et concentrerait entre ses mains toutes les activités lucratives, comme l’exploitation des gares. Infrabel serait également en mesure d’offrir ses services à des entreprises ferroviaires privées.

    Qu’est ce que cela peut bien signifier pour nous, voyageurs ? Le personnel craint à juste titre que la fusion de toutes les dettes et des activités non rentables conduise à la faillite de la SNCB. Cela ne signifierait pas la fin du transport par rail en Belgique, mais cela pourrait conduire au lancement d’une petite entreprise de chemin de fer (sur une base privée et non plus publique) avec un service réduit en fonction de sa rentabilité. Cela impliquerait une hausse des tarifs pour les voyageurs et de plus mauvaises conditions de travail pour le personnel. Un scénario tiré par les cheveux? Pas au regard de ce qui s’est passé avec la Sabena.

    Un chemin de fer privatisé ne reviendrait pas à moins mais à plus de dépenses pour la collectivité (ce que confirme l’expérience britannique). Cela signifierait de devoir payer plus pour un ticket (certains tarifs ont été décuplés en Grande-Bretagne) et, en termes de sécurité, le rail britannique n’est pas exactement ce que l’on appelle un exemple à suivre.

    Quelques remarques au sujet de cette fameuse dette. Ni le personnel, ni les voyageurs n’en sont responsables. Près de la moitié de l’actuelle montagne de dettes provient de la désastreuse aventure ABX d’Etienne Schouppe. Ce dernier a voulu lancer une société de transport de petits colis par route ou par rail et a utilisé cette société (ABX) pour opérer des acquisitions douteuses, accorder des cadeaux de luxe à la direction,… L’entreprise a fait faillite et sa dette s’est retrouvée sur le dos de la collectivité par l’intermédiaire de la SNCB. Aux passagers et au personnel d’en souffrir. Une autre partie de la dette provient de l’arrêt des subventions publiques pour le transport de marchandises. Selon les dirigeants politiques, ce n’est plus un service public. Veulent-ils vraiment que toutes les marchandises soient dorénavant transportées par voie routière ? Les embouteillages ne sont pas assez gros ?

    Alors que la direction de la SNCB et les responsables politiques envoient la SNCB en enfer avec leur gestion abominable, les médias dominants s’en prennent aux syndicats. Et quoi, ce sont peut-être les syndicats qui sont responsables du gouffre financier d’ABX, des frais colossaux de la gare des Guillemins à Liège ou encore des dépenses extravagantes qu’ont entraînés les trois administrateurs et le quasi milliard d’euros de dépenses en consultations externes ?

    Nous rejetons cette campagne odieuse qui pousse les voyageurs et les usagers les uns contre les autres : nous avons des intérêts identiques. Il nous faut un chemin de fer public intégré où le pouvoir de décision ne serait pas aux mains des topmanagers et de leurs consultants externes, mais aux mains du personnel et des voyageurs. C’est la meilleure manière d’assurer des services décents et abordables qui satisfait les voyageurs et le personnel. Ensemble, nous sommes plus forts!

    Quelques voyageurs favorables à la grève :

    • Anja Deschoemacker (tête de liste de Gauches Communes à Saint-Gilles)
    • Karim Brikci (tête de liste de Gauches Communes à Ixelles)
    • Stefanie Lagae (2e candidate du Front de Gauche à Charleroi)
    • Simon Hupkens (11e candidat sur la liste VEGA à Liège)
    • Nadège De Keyzer (8e candidate du Front de Gauche à La Louvière)
    • Bart Vandersteene (tête de liste de ROOD! À Gand)
    • Jarmo Van Regemorter (5e candidat de la liste ROOD! À Anvers)
    • Roos Balbaert (candidate de ROOD! à la province en Flandre Occidentale)
    • Christophe De Brabanter (tête de liste LSP-ROOD! à Keerbergen)
    • Jef Maes (tête de liste LSP à Termonde)
    • Bram De Martelaere (3e candidat sur la liste LEEF! à Zottegem)

    info@socialisme.be – www.socialisme.be – Parti Socialiste de Lutte

  • Le personnel administratif local et régional flamand exige un « poisson gras » pour le personnel…

    Le personnel administratif local et régional flamand exige un « poisson gras » pour le personnel…

    Le mécontentement parmi le personnel des administrations locales et régionales (LRB) est grand. Hier, ils étaient presque 13.000 à Anvers. Les syndicats ont parlé au podium de 10.000 manifestants, mais il est clair qu’il y en avait plus. Cette bonne participation illustre un mécontentement profond et que quelque chose doit absolument être fait pour notre pouvoir d’achat. Les grandes délégations vertes ont parlé de la nécessité de donner un “ poisson gras” au personnel.

    Un militant du MAS/LSP-Anvers

    Le personnel, entre autres communal et des CPAS, est fatigué d’entendre qu’aucun moyen n’existe pour leur pouvoir d’achat. Les critiques contre le gouvernement étaient dures et les militants ACV-CSC (une bonne majorité de la manifestation) ne sont pas entraînés dans la logique du CD&V et du Cartel Flamand. L’utilisation du terme du «poisson gras pour le personnel» est en fait une réponse à l’utilisation de cette expression sur le plan communautaire. Ces manifestants n’étaient pas touchés par le communautaire, mais par leurs salaires et leurs conditions de travail.

    Une des banderoles de l’ACV-CSC avait comme slogan: “If you pay us peanuts, we’ll work as monkeys ” (si vous nous payez des cacahouètes, nous travaillerons comme des singes). C’était une attaque frontale contre Etienne Schouppe, l’ancien patron de la SNCB et actuel secrétaire d’Etat pour le CD&V, qui avait déclaré au sujet des salaires scandaleux des topmanagers que, pour lui, ces patrons étaient bien rémunérés et que si l’on donne des cacahouète, on obtient des singes. Le personnel du LRB ne veut plus être considéré comme des singes.

    L’action du personnel du LRB a été une grande réussite et, avec une journée de grève et une manifestation de presque 13.000 personnes, cela constitue un signal vigoureux. Cela a clairement été dit par les pompiers anversois qui réclament plus de moyens et se sont dirigés vers l’hôtel de ville pour pousser leurs revendications.

    Ces derniers mois, différentes actions se sont déroulées pour plus de pouvoir d’achat par plus de salaire. Après les grèves spontanées du début de cette année, les fonctionnaires flamands ont, entres autres, suivis. Ces derniers ont obtenus une augmentation de salaire de minimum 2%.

    Les employés du ramassage des déchets à Gand ont aussi enregistré une victoire importante la semaine dernière. Après quelques semaines de grèves et de grèves du zèle, ils ont arraché une augmentation de salaire de 2,5%, leur 13e mois complet en deux ans et aussi une augmentation des compensations d’équipe, avec encore la promesse que si le personnel communal obtient une augmentation de 3,5%, ils obtiendront encore une augmentation de 1%.

    La conclusion est claire : gentiment, on peut toujours demander, mais militer est l’unique manière d’arracher quelque chose. Après la semaine d’action réussie pour le pouvoir d’achat du 9 au 12 juin, il est certain que la tendance est à passer à l’action. L’appel pour une journée d’action générale en septembre liée à une journée de grève a pu compter à Anvers sur un grand soutien et un bel enthousiasme. La campagne pour cette journée d’action est maintenant mise en marche et si cela se combine avec des moments de campagne publics vers la population large, alors cette journée d’action en septembre pourrait devenir historique. Historique en ce qui concerne la taille et la combativité.

    Mais pour un véritable résultat, nous devons toutefois aussi discuter sur une réponse politique pour le mouvement. Sur qui pouvons nous compter ? Les sociaux-chrétien du CDH et du CD&V ou les sociaux-démocrates du PS et du Spa ne défendent pas les intérêts des travailleurs. Aucun parti ne défend les revendications du personnel. Nous pensons qu’il est nécessaire que la FTGB et la CSC brisent leurs liens avec leurs partenaires privilégiés et lancent un parti basé sur le mouvement ouvrier. La combativité et la participation à la manifestation d’hier sont une victoire et cela peut être une source d’inspiration pour d’autres secteurs.



    Le MAS propose de considérer les revendications suivantes :

    • Plus de pouvoir d’achat par plus de salaire et des allocations liées au bien-être, pour que nous ne payons pas nous-mêmes nos augmentations comme avec des réductions de taxes : 1€ de plus par heure
    • Un index qui reflète réellement le coût de la vie, pas d’accords all-in
    • Abolition de la norme salariale, des accords interprofessionnels comme dans le passé, avec un seuil salarial et non un plafond (un minimum qui revient à tous, pour que les secteurs faibles puissent en bénéficier également)
    • Pour les collègues qui tombent hors de l’AIP: casser tout les accords salariaux de plus de 2 ans, tel que l’accord 2005-2010 dans le non-marchand
    • Une suppression de la TVA sur les produits de première nécessité
    • Un plan massif de construction de logements sociaux publics

    Pour financer cela :

    • Une forte répression de la grande fraude fiscale
    • Un impôt sur les grandes fortunes

    Ces dernières mois, nous avons pu constater à quel point il est désastreux de laisser des secteurs-clés tels que l’énergie et les banques à l’avidité du secteur privé. Quand des grandes banques se trouvent en difficulté, l’Etat peut alors soudainement intervenir. Pour nous, le contrôle de tels secteurs revient à la collectivité. Nous plaidons donc pour leur nationalisation sous le contrôle démocratique du mouvement ouvrier et de toute la collectivité.

  • Une chose est certaine : la crise politique continue

    Incertitude pour l’après 23 mars

    La guéguerre politique continue sans que son intensité diminue. Le compteur de la crise gouvernementale a beau être arrêté, il est bien difficile au premier coup d’œil de comprendre qui est dans l’opposition et qui est au gouvernement.

    Anja Deschoemacker

    Tout semble possible : un nouveau gouvernement (lui aussi temporaire !) comme la poursuite de l’actuel (avec une réorganisation des ministères) – ce qui ferait peu de différence dans les faits… Comme nous l’avions dit immédiatement après les élections, le seul gouvernement possible sera un gouvernement instable, quelle que soit sa composition.

    Au CD&V, on travaille assidûment à un changement de cap. C’est surtout la vieille garde qui est à l’œuvre, celle qui sait comment passer des compromis de façon relativement « digne » au nom du « pragmatisme ». Pour le nouveau président du CD&V, Etienne Schouppe, ce parti ne doit pas être à thème unique : tout miser sur le plan communautaire pourrait mettre plus encore en danger ses liens avec la CSC et le Mouvement Ouvrier Chrétien. Il est clair que la population en a marre du « tout communautaire » et que ceux qui seront considérés comme coupables du chaos devront en payer le prix, tant au CD&V qu’à la NV-A.

    Du côté libéral, le VLD, qui a connu la défaite du 10 juin, peut compter sur le MR, devenu à cette occasion le premier parti francophone. L’enjeu pour les libéraux est de maintenir et renforcer leur position de plus grande « famille » politique. Mais ils craignent cependant de se retrouver en minorité au gouvernement entre les « partis syndicaux ».

    Le PS veut retrouver rapidement sa place de premier parti francophone, ce qu’illustrent notamment ses attaques contre la déduction des intérêts notionnels (qu’il avait pourtant approuvée dans le précédent gouvernement !). Le PS essaie de reprendre le costume qui lui avait si bien réussi ces dernières vingt années : celui de parti d’opposition au sein du gouvernement. Il peut compter sur le soutien des dirigeants du CDH, enragés contre Reynders, et qui désirent plus que tout assurer leur position de partenaire indispensable du PS à tous les niveaux de pouvoir.

    Pour tous ces partis, seul compte l’horizon de juin 2009. Des élections regroupées, à la fois au niveau régional et fédéral, seraient l’occasion de remettre un peu d’ordre afin de préparer une confrontation directe avec le mouvement ouvrier qui est plus difficile avec des élections toutes proches.

    Il est probable qu’entetemps, l’une ou l’autre réforme d’Etat aura été élaborée. Cela ne sera pas un Big Bang, mais plutôt un compromis belge classique, justifiée au nom du soi-disant « intérêt général ». En fait, même si ces partis ont chacun leurs propres intérêts, ils sont tous liés les uns aux autres par leur propre « intérêt général » : celui de l’élite riche, de la classe dirigeante. L’idée sera de régionaliser le plus possible les coupes dans les budgets (sous couvert de « responsabiliser » les régions) afin d’affaiblir la lutte contre les futurs plans d’austérité.

    La population sera évidemment sollicitée pour « apporter sa pierre à l’édifice ». On demandera donc d’accepter des attaques contre les fonctionnaires, une nouvelle « modération salariale », la poursuite de la chasse aux chômeurs, des contributions individuelles plus importantes des malades pour les soins de santé,… Les partis traditionnels voudront bien sûr aller chercher cet argent chez « tout le monde »… à l’exception du patronat.

    Syndicalistes, militants de terrain, vrais socialistes, restons vigilants et ne nous laissons pas aveugler par la poudre aux yeux qui est bien la seule chose que les partis établis sont prêts à nous distribuer sans compter…

  • Une liste Dedecker en Wallonie ?

    Le retour du PS au gouvernement fait grincer des dents à la droite dure. Les nouvelles «affaires» en vue ne sont donc pas pour déplaire, par exemple, au populiste de droite Jean-Marie Dedecker. Fort de son succès en Flandre, il vient de décider de lancer son parti au sud du pays, puisque, selon lui, aucun parti ne se rapproche actuellement de ses idées socio-économiques, comme la réduction des taxes pour les entreprises de 34 à 19%, la limitation des allocations de chômage dans le temps,…

    Nicolas Croes

    Mais comment se faire remarquer au maximum et s’assurer un certain soutien populaire avec de telles propositions ? Quel arbre trouver pour cacher la forêt ? Dedecker a trouvé : parler le moins possible de son projet socio-économique et attaquer le plus possible les autres partis, surtout le PS. Et là, ce qu’il peut utiliser lui est servi sur un plateau…

    En Flandre, lors des élections du 10 juin, la LDD (Liste Dedecker) avait récolté 6,2% pour sa première participation électorale. Six mois après, un sondage montre qu’un cinquième des électeurs pourrait voter la prochaine fois pour la LDD. Et Dedecker peut compter sur un large soutien des médias pour l’aider à se présenter comme une alternative au Vlaams Belang auprès de ceux qui souhaitent émettre un vote anti-establishment.

    Mais ce n’est pas gagné pour lui. Le VB pourrait à court ou plu long terme récupérer les voix perdues car il dispose d’un appareil solide, bien plus capable d’instrumentaliser le mécontentement face à la politique antisociale. D’autre part, si Dedecker peut marquer des points dans ses critiques, il n’offre aucune solution. Ainsi, quand le parti chrétien flamand a tenté de se montrer plus « social » lors de son message de nouvelle année, Dedecker a rappelé qu’Etienne Schouppe, président par interim du CD&V, a quitté la direction de la SNCB en empochant 2 millions d’euros aux frais du contribuable. C’est vrai. Mais Dedecker exige en même temps la privatisation immédiate des chemins de fer, avec les conséquences désastreuses que cela impliquerait pour le service aux usagers et pour les travailleurs de la SNCB !

    Malgré tout, les partis populistes tels que la LDD peuvent encore réussir à canaliser le mécontentement populaire aussi longtemps tant qu’une alternative de gauche n’émergera pas de la lutte des classes et tant que ces partis se tiendront à l’écart du pouvoir et qu’ils ne devront donc pas appliquer la politique néolibérale qui est au cœur de leurs programmes. Mais on peut être sûr que leurs électeurs seront en fin de compte cruellement déçus car les aspirations à une politique plus sociale et équitable ne trouveront aucun écho chez des gens comme Dedecker.

  • Même les libéraux l’avouent : « Cette façon de rémunérer est irresponsable »

    Il paraît que nos salaires sont trop élevés. Mais ceux qui nous vendent ce message ne se gênent pas pour toucher des sommes exorbitantes dans leurs entreprises. En 2006, les topmanagers des entreprises les plus importantes de notre pays ont reçu une augmentation salariale de pas moins de 22 %.

    Karel Mortier

    Salaires exorbitants au sommet, austérité pour les salariés

    En tant que topmanager du Groupe Bruxelles Lambert (GBL), Albert Frère a touché 5,54 millions d’euros. Jean-Paul Votron de Fortis a palpé 4,47 millions et Carlos Brito d’InBev 3,94 millions. Chez ING, le topman hollandais a reçu 4 millions d’euros, contre 1 million il y a quatre ans. Et toutes ces sommes ne comprennent même pas les bonus et les paquets d’actions qu’ils détiennent.

    Belgacom a réalisé 6,1 milliards d’euros de profits. Le topmanager Didier Bellens a touché 1,85 millions d’euros en 2006, plus 480.000 euros de dividendes de ses actions. Il a en plus réalisé un joli coup : après avoir acheté 300.000 actions Belgacom pour une valeur de 6 millions d’euros en 2004, il en a revendu 180.000 pour ce même prix en 2006. Quant aux 120.000 actions qu’il a conservées, elles lui rapporteront un profit net de 4 millions d’euros.

    Pour le personnel de Belgacom, les choses sont différentes. Début 1990, il y avait encore 26.500 salariés. Il n’en restait plus que 15.000 début 2007. De ces effectifs réduits, la direction aimerait encore en supprimer 1.500 de plus. Comme la CSC Transcom l’a fait remarquer : « L’année dernière, le coût du personnel a baissé de 3,3 %. Au niveau de la direction, les salaires ont augmenté de 6,4 %. Il est grand temps de passer à une augmentation de salaire pour les travailleurs aussi. »

    Chez Bayer/Lanxess, les syndicats ont diffusé un tract dénonçant le clivage entre sommet et base. « Dans un article de De Tijd, M. Ulrich Koemm, membre du comité de direction de Lanxess, a déclaré que les conditions salariales en Belgique ne sont plus concurrentielles au niveau mondial. Malgré cela, ce sont ces messieurs qui s’offrent des salaires exorbitants et gagnent toujours plus d’année en année. Ainsi, le salaire de base de M. Heitman (Lanxess) a augmenté de 13 % en 2006 par rapport à 2005 (de 592.000 à 670.000 euros) et il y a eu une hausse des salaires du Conseil d’Administration de Bayer de plus de 15 % ( de 7.064.828 à 8.143.822 euros). »

    Si même les libéraux mettent en cause le clivage salarial…

    Plusieurs politiciens libéraux ont prévenu que le clivage toujours croissant entre les salaires commençait à poser problème. Karel de Gucht (ministre des Affaires étrangères VLD) s’est déclaré partisan d’une modération salariale pour les salariés, mais « ce plaidoyer en faveur de la modération est difficile à vendre politiquement si, à l’arrière-plan, le sommet touche des salaires royaux et alors que la part des profits des entreprises dans le revenu total de l’économie n’a jamais été si importante. Les dernières années, les salaires réels ont augmenté moins que la productivité. »

    Son ancien collègue-parlementaire et économiste libéral Paul De Grauwe a ajouté que : « Les managers reçoivent des rémunérations élevées parce que l’économie tourne bien et que les Bourses font de bonnes affaires, alors qu’ils n’y sont pour rien. Cette façon de rémunérer est inacceptable ».

    En soi, les politiciens traditionnels ne s’opposent pas aux rémunérations élevées pour les topmanagers. Comme l’a déclaré Etienne Schouppe (CD&V): « Il va de soi que l’on paie bien les topmanagers. Si tu donnes des cacahuètes, tu reçois des singes. » Voilà qui reflète bien leur avis sur la majorité des travailleurs… S’ils souhaitent diminuer un tantinet le clivage entre les salaires des topmanagers et ceux des couches intermédiaires (les cadres et les employés les mieux payés), ce n’est que pour éviter que l’ensemble des travailleurs réclament une augmentation générale des salaires.

    Lâchez nos ceintures !

    Leurs belles déclarations sont d’autant plus hypocrites que les partis traditionnels n’ont rien fait pour stopper l’augmentation du clivage salarial et en sont même co-responsables. Lors des discussions sur la norme salariale de l’Accord Interprofessionnel, ils criaient haut et fort qu’il fallait nous serrer plus fort la ceinture.

    Aujourd’hui ils découvrent brusquement que nos salaires ne suivent pas le rythme et même que « Les augmentations extrêmes pour quelques-uns sont basées sur la modération pour beaucoup. Cela n’est pas juste » selon les paroles du même Etienne Schouppe (qui semble oublier son propre passé en tant que topmanager de SNCB…). Mais qui imagine qu’après les élections, on entendra encore ces belles paroles ?

0
    0
    Your Cart
    Your cart is emptyReturn to Shop