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Tag: États-Unis
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Kshama Sawant : «Pourquoi je ne me représenterai pas au conseil de Seattle»
En 2013, Kshama Sawant est parvenue à être élue au conseil de ville de Seattle (organe qui regroupe 9 personnes élues par district au côté du maire pour gérer la ville, sans majorité ou opposition définie). C’était la première fois qu’une marxiste était élue dans une grande ville américaine depuis un siècle. Avec son parti, Socialist Alternative, elle a inlassablement utilisé cette position élue pour construire un rapport de force à la base et encourager des luttes autour de revendications comme celle d’un meilleur salaire minimum. En dépit de son isolement politique au sein du conseil, la pression des mouvements de lutte a permis d’arracher plusieurs victoires importantes. La classe dirigeante n’a cessé de mener bataille contre elle et contre Socialist Alternative, même Jeff Besos a fait un point d’honneur de la vaincre. Sans succès. Il y aura à nouveau une échéance électorale cette année, mais notre camarade Kshama n’y participera pas. Elle explique les raisons de cette décision ci-dessous.
Cet article a été initialement publié par The Stranger.
C’est maintenant la dixième année que j’ai l’honneur de servir en tant que représentante élue des travailleurs de Seattle.
Les travailleuses et travailleurs de Seattle, en s’organisant aux côtés de mon bureau socialiste au conseil de ville et de mon organisation, Socialist Alternative, ont remporté des victoires historiques, du salaire minimum de 15 dollars de l’heure à la « taxe Amazon » en passant par des droits historiques en faveur des locataires.
Ces victoires ont constitué un puissant exemple à l’impact national et même international.
Au cours de nos quatre victoires électorales et dans chaque combat, nous avons dû surmonter la puissance combinée des grandes entreprises, des médias capitalistes et de l’establishment politique. À chaque fois, les travailleuses et travailleurs ont refusé de reculer, et nous l’avons emporté, encore et encore.
C’est la leçon la plus importante de notre exemple de politique socialiste à Seattle. Lorsque les travailleuses et travailleurs ainsi que la jeunesse s’organisent et se battent, la victoire est possible. Aucun progrès social significatif ne peut être gagné sous le capitalisme sans affronter l’opposition vicieuse des riches et de leurs serviteurs politiques. Au lieu de reculer, nous devons construire l’unité de la classe travailleuse et riposter férocement et fièrement.
Une classe capitaliste rapace et parasitaire a amassé des fortunes incalculables grâce au travail de milliards de travailleuses et travailleurs. Mais leur système est en crise profonde, et il ne peut se maintenir en place. Il continue d’éviscérer le niveau de vie des gens ordinaires avec des niveaux d’inflation historiques, et plus de 800 millions de personnes se couchent chaque soir le ventre vide. La droite est à l’attaque contre le droit à l’avortement et contre les droits des personnes LGBTQIA+.
L’avenir de la civilisation humaine est sur le fil du rasoir avec la menace existentielle de la catastrophe climatique. Les travailleuses et travailleurs ainsi que la jeunesse ne peuvent pas se permettre le statu quo politique favorable aux grandes entreprises.
Lors de mon investiture en 2014, j’ai déclaré : « Laissez-moi être absolument clair : il n’y aura pas d’accords pourri dans les coulisses avec les grandes entreprises ou leurs serviteurs politiques. Je ne vendrai pas le peuple que je représente. »
Notre équipe socialiste au Conseil de ville s’y est tenu. Il est extrêmement regrettable qu’excessivement peu d’autres élus dans ce pays puissent en dire autant.
Depuis mon élection en 2013, plus de deux cents candidats se déclarant « socialistes démocratiques » ont été élus au niveau national. Mais malheureusement, à de rares exceptions près, l’écrasante majorité d’entre eux ont abandonné leurs promesses de campagne et n’ont pas réussi à tenir tête à l’establishment politique.
Pas plus tard que le mois dernier, nous avons assisté à la trahison historique et honteuse des cheminots par les membres du Congressional Progressive Caucus (aile « progressiste » du Parti démocrate, NdT), y compris sa présidente Pramila Jayapal et les membres de The Squad (la brigade, un groupe d’élus démocrates progressistes) autoproclamée « socialistes démocratiques » comme Alexandria Ocasio-Cortez (AOC).
La grève des cheminots a été brisée avec le concours de prétendus progressistes du Congrès, ce qui n’est pas seulement une atteinte aux cheminots, c’est une véritable trahison de l’ensemble de la classe ouvrière.
De telles trahisons ont des conséquences encore plus sinistres. Cela donne un espace à la droite, comme nous l’avons vu avec ces cinq sénateurs républicains qui ont hypocritement voté contre le projet de loi briseur de grève, afin de se prétendre du côté des cheminots.
Ces républicains – qui en réalité servent ouvertement les intérêts des riches – s’autorisés à prétendre que leur parti est le parti des travailleurs. Comment est-ce possible ? Uniquement parce que le parti démocrate se dirige de plus en plus vers la droite dans son soutien loyal à l’élite capitaliste.
Il est profondément regrettable que ce soit le Freedom Caucus de droite qui ait démontré comment utiliser l’effet de levier à la Chambre des représentants pour imposer des concessions à l’establishment, plutôt que The Squad. Avec l’échec continu de tout véritable leadership à gauche, la lutte pour la présidence de la Chambre des représentants a révélé à quel point le courant de droite peut rapidement et dangereusement combler le vide. Il s’agit d’un rappel effrayant de la manière dont Trump a remporté son élection en premier lieu.
Les travailleuses et travailleurs ainsi que la gauche ne peuvent pas rester sans rien faire et attendre à la merci de volonté d’élus soi-disant progressistes. Nous ne pouvons pas nous en remettre à AOC ou Pramila Jayapal, même si je comprends que beaucoup entretenaient des espoirs envers leur action.
AOC a récemment déclaré qu’elle ne pouvait pas se battre contre les dirigeants démocrates au nom des travailleuses et travailleurs car cela causerait un « préjudice relationnel » avec les dirigeants du parti. Qu’en est-il du très réel préjudice né de l’absence de combat pour nos intérêts de classe ?
Pendant ce temps, l’organisation qui devrait exiger des comptes à AOC et aux élus de The Squad, les Socialistes démocrates d’Amérique (DSA), semble ne pas vouloir le faire. Cela ne me fait pas plaisir de le dire, car je suis actuellement également membre des DSA. Mais l’attitude de la direction des DSA a essentiellement consisté en une couverture de l’égarement de The Squad.
Nous faisons face à un véritable vide de direction à gauche, localement et nationalement.
Nous avons besoin d’un nouveau parti pour et par la classe travailleuse, un parti qui rend les élus responsables, qui repose sur les mouvements sociaux, qui s’organise aux côtés des travailleuses et travailleurs dans les rues et sur les lieux de travail.
Les élections ne sont pas la seule, et encore moins la première, voie vers le changement politique, car le système politique est pourri de fond en comble dans un régime capitaliste. Aujourd’hui, alors que la crise mondiale s’aggrave, la pourriture s’étend de plus en plus profondément, et la menace d’une corruption accrue par l’extrême droite pèse sur nous tous. En Inde, le pays où je suis né, l’extrême droite est au pouvoir et se consolide rapidement. Aux États-Unis, les élections de mi-mandat n’ont été qu’un sursis temporaire, à moins que nous nous organisions.
Le capitalisme doit être renversé. Nous avons besoin d’un monde socialiste. Et cela n’est possible qu’en mobilisant plusieurs millions de travailleuses et travailleurs autour d’idées socialistes authentiques et en luttant sans relâche pour nos intérêts en tant que classe.
Mais la tâche de reconstruire la lutte des classes en Amérique ne mènera à rien si les jeunes et la base du mouvement ouvrier ne comprennent pas clairement le rôle du parti démocrate et la nécessité d’un nouveau parti qui nous serve nous, et non les riches.
Les travailleuses et travailleurs doivent reconnaître que nous devons nous battre indépendamment des deux partis des grandes entreprises et des dirigeants qui leur trouvent des excuses.
L’année dernière, des centaines de milliers de travailleuses et travailleurs se sont battus pour syndiquer leur lieu de travail ou ont fait grève pour obtenir un bon contrat, que ce soit chez Amazon, Starbucks ou l’Université de Californie. Nous avons vu la victoire historique des travailleuses et travailleurs d’Amazon à New York par le nouveau syndicat d’Amazon. L’année précédente, nous avons assisté à « Striketober » (une vague de grèves durant le mois d’octobre, NdT), qui a compris des batailles historiques comme la grève de John Deere, et ici à Seattle la grève des Pacific Northwest Carpenters dans la construction.
Il y a moins de trois ans, nous avons assisté au plus grand mouvement de protestation de rue de l’histoire des États-Unis : la lutte de Black Lives Matter à la suite du meurtre de George Floyd par la police.
Les travailleuses et travailleurs veulent riposter, mais nous devons être mieux organisés. Nous avons besoin d’un mouvement à l’échelle nationale : une campagne indépendante de la base qui s’organise sur les lieux de travail et dans les rues.
Ce sont les syndicats progressistes qui devraient utiliser leurs ressources pour lancer un tel mouvement, comme l’ont fait les syndicats au Royaume-Uni avec la campagne « Enough Is Enough ». Mais cela ne s’est pas produit. Malheureusement, la plupart des dirigeants syndicaux de ce pays sont étroitement liés à l’establishment démocrate, ils ont peur de dénoncer les Démocrates, de présenter des candidats indépendants et de mettre en place de puissantes actions de grève basées sur des revendications audacieuses. Ils ont peur de faire des vagues.
C’est pourquoi, avec Socialist Alternative et d’autres, j’annonce le lancement d’un tel mouvement national, Workers Strike Back, au lieu de me présenter à nouveau aux élections dans le district 3 de Seattle. Nous ne nous faisons pas d’illusions sur le fait qu’un mouvement de masse puisse être construit du jour au lendemain, mais il est urgent de poser les premiers pas.
Les travailleuses et travailleurs ont fait de cette ville un puissant exemple au travers de divers mouvements de lutte. Il est temps de s’appuyer sur cet exemple au niveau national pour élargir et renforcer la lutte des classes.
Workers Strike Back sera lancé début mars dans plusieurs villes du pays : de Seattle à New York, de Chicago à Minneapolis, d’Oakland à Houston et au-delà.
Ici, à Seattle, nous organiserons un rassemblement de lancement le 4 mars. Rejoignez-nous. Les principales revendications de Workers Strike Back sont les suivantes :
- Les travailleurs ont besoin d’une véritable augmentation de salaire
- De bons emplois syndiqués pour toutes et tous
- Luttons contre le racisme, le sexisme et toutes les oppressions
- Un logement de qualité à prix abordable et des soins de santé gratuits pour toutes et tous
- Plus de trahison : il nous faut notre propre parti
Vous pouvez lire notre programme complet sur notre site web, et toutes celles et ceux qui sont d’accord doivent signer la pétition et la partager largement.
Parallèlement à Workers Strike Back, nous lancerons une émission vidéo pour faire connaître la politique et la stratégie socialistes aux travailleurs au niveau national et international. Cette émission vidéo, que je vais aider à animer, s’appellera On Strike, et elle commencera à être diffusée cet été.
De plus en plus, les médias qui se disent indépendants et de gauche ont détourné le regard ou ont activement couvert les politiciens qui trahissent les travailleuses et travailleurs. Cela a un prix réel, car cela crée de la confusion et de la démoralisation, trahissant effectivement les travailleurs une seconde fois.
Une dernière chose : même si je suis sûr que les entreprises de Seattle seront très heureuses d’apprendre que je ne me représente pas, elles ne devraient pas se précipiter pour mélanger leurs martinis, car nous n’en avons pas fini.
Mon bureau au conseil de ville continuera à se battre sans relâche pour les travailleuses et travailleurs jusqu’à la fin de mon mandat. Nous soumettrons le contrôle des loyers au vote et, aux côtés de notre nouvelle organisation, Workers Strike Back, nous construirons notre mouvement pour les droits des locataires et des travailleuses et travailleurs. Et lorsque ce mandat sera terminé, nous continuerons à perturber la paix politique à Seattle, ainsi qu’au niveau national, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur de l’hôtel de ville.
J’invite les jeunes, les travailleurs et les membres de syndicats à rejoindre Workers Strike Back !
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USA. Les cheminots trahis par Joe Biden et la « Squad »
Quand Alexandra Ocasio Cortez et d’autres membres de la « Squad » (groupe de six membres démocrates de la Chambre des représentants des États-Unis, initialement composé de quatre femmes élues lors des élections de 2018 : Alexandria Ocasio-Cortez (AOC), Ilhan Omar, Ayanna Pressley et Rashida Tlaib) ont été élues, la plupart l’ont été en s’identifiant elles-mêmes comme des « Socialistes démocratiques ». Elles s’étaient présentées en défendant des revendication orientées vers la classe travailleuse incluant les soins de santé pour tou.te.s et un salaire minimum fédéral de 15 dollars de l’heure. Elles avaient juré qu’elles rendraient leurs comptes à la classe des travailleurs et aux personnes opprimées.
Par Kshama Sawant, Socialist Alternative (ASI-USA)
Au cours de la première année qui a suivi l’investiture de Joe Biden, alors que les démocrates disposaient du contrôle des trois branches du gouvernement, les membres de la Squad (rejointes par Jamaal Bowman et Cori Bush) ont renié les deux premiers engagements, tout d’abord en refusant d’imposer un vote concernant la couverture médicale universelle (Medicare for All) et ensuite en rejetant toute forme de combat en faveur du salaire minimum de 15 dollars.
Aujourd’hui, la troisième de leurs promesses s’est totalement évaporée, avec la décision des membres de la « Squad » (à une exception près) de franchir le piquet de grève et de voter avec une majorité de démocrates mais aussi de républicains pour casser la grève des travailleuses et travailleurs du rail en leur retirant le droit d’interrompre légalement le travail (en cas de maladie). Ce faisant elles ont ouvertement pris le parti des rois de la mine et du rail face aux cheminot.e.s qui subissent des conditions de travail intolérables depuis des décennies. Il s’agit d’une profonde trahison envers des travailleuses et travailleurs.
Des années de négociations entre 12 syndicats représentant 115.000 travailleurs du rail et une poignée d’entreprises qui contrôle 90% du trafic de fret (ainsi que des lignes qui servent aux trains de voyageurs) ont ainsi été brutalement interrompues sous la houlette d’un président Démocrate qui se décrit comme étant « pro-travailleurs » et de la « gauche » de son Parti.
La « Squad » et le « Congressional Progressive Caucus » (Caucus progressiste du Congrès, caucus du Congrès affilié au Parti démocrate fondé en 1991 et représentant sa faction la plus « progressiste »), dont sa représentante Pramila Jayapal, ont tenté de se démarquer à gauche en votant pour un deuxième projet de loi incluant la revendication-clé des cheminot.e.s, à savoir un congé maladie payé, à côté de la motion de base qui visait à étouffer la grève.
Ce tour de passe-passe ne doit tromper personne : il était en effet de notoriété publique que le projet de loi sur les congés de maladie serait tué dans l’œuf au Sénat dès le lendemain (ce fut effectivement le cas) et que tout ce qu’il resterait serait une grève brisée.
Des conditions calamiteuses pour les cheminot.e.s
Les travailleuses et travailleurs de quatre syndicats qui représentent ensemble la majorité de la main-d’œuvre avaient rejeté le contrat proposé. Mais les votes de 80 sénateurs et 290 représentants des États-Unis ont suffi à imposer l’accord voulu par les magnats du rail. Ce résultat était celui sur lequel les patrons coptaient depuis le début, sachant qu’ils tiennent tant le parti républicain que le parti démocrate dans le creux de leur main.
L’immense pression à laquelle les cheminot.e.s sont soumis.es après des années de réductions de personnel est largement documentée. Cependant, le président Biden, avec une hypocrisie consommée, a prétendu agir au nom des millions de travailleurs et travailleuses qui auraient pu être lésés si la grève avait suivi son cours.
Malgré le fait que les rayons des magasins soient déjà remplis pour Noël, les démocrates ont sous-entendu que la nécessité que les autres travailleuses et travailleurs puissent « profiter de leurs vacances » l’emportait sur le besoin des cheminot.e.s d’avoir un quelconque contrôle sur leurs vies, leur vie de famille ou leur santé. Mais cette logique est tout à fait perverse. Une victoire pour le personnel du rail en aurait été une pour l’ensemble des travailleurs et travailleuses des USA, de plus en plus victimes du surmenage, de plus en plus forcé.e.s à vivre pour travailler plutôt qu’à travailler pour vivre.
Après le vote, un cheminot et dirigeant syndical à la retraite a écrit ceci : « Il ne s’agit pas seulement d’argent. C’est une question de qualité de vie. La presse vous fait croire qu’une augmentation de 25% sur 5 ans, c’est beaucoup. Ce n’est pas le cas, pas quand l’inflation est de 8 à 10% par an. Ça ne permet même pas le statut quo. Mais le plus gros problème est la qualité de vie. Le transport de fret fonctionne 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 et 365 jours par an. Presque tous les employés des trains travaillent sur appel, avec un délais de 2 heures ou moins pour se rendre au travail, sans compter le temps de déplacement. Avec les coupes de personnel massives de la dernière période, tout le monde doit vivre à côté de son téléphone. Il n’est pas rare que les employés de certains chemins de fer travaillent 3 semaines ou plus sans autre temps de repos que les périodes de repos prescrites par le gouvernement fédéral entre les quarts de travail (dont la plupart sont des périodes de sommeil). De nombreux employés ont fait l’objet de sanctions disciplinaires, c’est-à-dire de suspensions sans salaire. Dans certains cas, on leur a même refusé la possibilité d’assister à des funérailles familiales sous la menace d’une suspension et/ou d’un licenciement. C’est pourquoi les employés se battent cette fois-ci. Trop, c’est trop. »
C’est dans ce contexte qu’a été négocié l’accord de principe de Biden, dont la seule amélioration consistait en un seul jour de congé, lui-même miné par des conditions absurdes : il ne peut avoir lieu que le mardi, le mercredi ou le jeudi et doit être programmé 30 jours à l’avance.
Malgré les appels lancés par certains membres de la gauche en faveur d’une grève sauvage illégale, l’incapacité absolue des dirigeant.e.s syndicaux à mobiliser ou à préparer une action de grève rend cette option extrêmement difficile pour leurs membres, malgré la vive colère de milliers de travailleuses et travailleurs face à cette attaque brutale contre leurs droits. Les dirigeant.e.s syndicaux ont préféré s’en remettre à leur stratégie bien éprouvée et dont l’expérience montre qu’elle mène à un cul de sac : supplier les politiciens du parti démocrate de prendre leur défense.
Il n’est bien sûr pas exclu que les cheminot.e.s entreprennent une action indépendante face à cette trahison, auquel cas Socialist Alternative sera là pour les soutenir à chaque étape. Pour mener à bien une riposte à l’ampleur nécessaire, il faut que des structures d’organisation indépendantes et démocratiques soient immédiatement mises en place, que des comités de grève soient élus dans les différentes sections locales et qu’une caisse de grève soit constituée rapidement.
La capitulation de la « Squad » et les DSA
Lorsqu’il est devenu évident que le Congrès serait invité à intervenir pour empêcher la grève, Bernie Sanders a cherché des moyens procéduraux d’atténuer le choc de cette défaite pour les travailleuses et travailleurs. Sa solution a été d’inclure un amendement donnant aux travailleurs sept jours de congés maladie payés, soit un peu moins de la moitié de la revendication initiale du personnel. À sa décharge, Bernie a été très clair dès le début : sans cet ajout, il ne voterait pas pour imposer l’accord de principe, et lorsque son amendement a échoué, il a voté “non”.
Il est tout à fait honteux que l’on ne puisse pas en dire autant d’Alexandra Ocasio Cortez et de la majorité de la « Squad » à la Chambre, qui ont voté pour écraser la grève, sauf un. Alexandra Ocasio Cortez a justifié son vote en affirmant qu’elle se battait « bec et ongles » pour les jours de congé de maladie supplémentaires. Jamaal Bowman a affirmé qu’il « se battait toujours en solidarité avec les travailleurs ». Mais ce que le « Congressional “Progressive” Caucus » a fait, c’est une escroquerie. Ils se sont entendus avec Pelosi pour séparer le vote en deux, promettant leurs quelque 100 voix sur cet accord de principe en échange d’un vote séparé sur l’amendement relatif au congé de maladie, dont ils savaient pertinemment qu’il serait écrasé au Sénat. Il n’a fallu qu’une seule journée pour confirmer la brutale réalité : la majorité de la « Squad », en collaboration avec les dirigeants du « Congressional Progressive Caucus », a trahi les travailleurs et travailleuses du rail tout en leur faisant miroiter des jours de congé de maladie payés.
Le 30 novembre, le Comité National des DSA (Socialistes démocratiques d’Amérique, dont est membre AOC) a publié une déclaration de soutien au personnel du rail qui comportait cette phrase : « Tout membre du Congrès qui vote oui à l’accord de principe se range du côté des milliardaires et impose aux travailleuses et travailleurs du rail un contrat qui ne répond pas à leur demande pressante de jours de congé maladie payés. » Que dire alors de leurs propres membres et de leurs élu.e.s au Congrès qui ont voté ainsi ? Ce que cette déclaration implique, et ce que les actions de la « Squad » prouvent définitivement, c’est que ces élu.e.s font partie de l’État capitaliste et se considèrent comme tels, comme membres de l’État qui agit pour les milliardaires et contre les intérêts de la majorité, la classe ouvrière.
On ne peut pas être un.e socialiste et un.e briseur.euse de grève. Les DSA doivent arrêter de prétendre que la « Squad » est socialiste et leur exclusion de l’organisation devrait suivre. A défaut, la trahison de la « Squad » envers la classe ouvrière deviendra la trahison des DSA eux-mêmes.
Le danger inhérent à cette capitulation, au-delà des dommages évidents à la qualité de vie des cheminot.e.s, est qu’elle poussera les travailleurs et travailleuses dans les bras de la droite qui pourra se poser en alternative politique de la classe ouvrière face aux démocrates. Le fait que plus de sénateurs républicains ont voté contre l’imposition de l’accord de principe que de démocrates le démontre de manière étourdissante.
La tâche de construire une alternative de gauche et de la classe ouvrière à la politique “progressiste” du Parti Démocrate à la solde des grandes entreprises n’a jamais été aussi urgente qu’aujourd’hui.
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USA. Seattle devient la première ville sanctuaire pour le droit à l’avortement

Comment les travailleurs.ses et les marxistes ont-ils remporté cette victoire ?
Sous l’impulsion du bureau de la conseillère municipale socialiste Kshama Sawant, nous avons réussi à faire de Seattle la première ville sanctuaire en matière d’avortement aux États-Unis depuis que la Cour suprême a annulé le jugement Roe v. Wade !
Bia Lacombe est une organisatrice de la collectivité pour la conseillère municipale Kshama Sawant.
Le mois dernier, des milliers de militant.e.s locaux et de jeunes de Seattle ont remporté une victoire historique dans la lutte pour le droit à l’avortement. Sous l’impulsion du bureau de la conseillère marxiste Kshama Sawant, nous avons réussi à faire de Seattle la première ville sanctuaire en matière d’avortement aux États-Unis depuis que la Cour suprême a annulé le jugement Roe v. Wade.
Il sera désormais interdit à la police de Seattle d’arrêter des personnes faisant l’objet d’un mandat d’arrêt non exécuté en rapport avec des lois anti-avortement en vigueur dans le pays, et il lui sera également interdit de contribuer aux enquêtes sur ces affaires. Les personnes faisant l’objet de mandats liés à l’avortement pourront vivre à Seattle sans être extradées vers l’État qui tente de les poursuivre.
« Les lois violant l’autonomie corporelle et criminalisant les soins de santé reproductive sont fondamentalement injustes, et notre mouvement ne permettra pas à Seattle d’être complice », a écrit Sawant dans un communiqué de presse célébrant ainsi ce retour en arrière contre la décision de justice honteuse de la cour suprême. « Laissez toute personne menacée par des lois anti-avortement draconiennes venir à Seattle sans craindre d’être poursuivie ! ».
L’ensemble de la classe ouvrière a subi une grave défaite avec l’annulation de Roe. Des milliers de femmes et de personnes LGBTQ, ainsi que des professionnels de l’avortement et d’autres travailleurs de la santé, pourraient être contraints de fuir leur État d’origine.
En gagnant cette législation, les travailleurs, les jeunes et les socialistes de Seattle ont démontré ce que signifie être solidaire avec la classe ouvrière au-delà des frontières des villes et des États.
Mais plus important encore, une telle législation pourrait avoir de profondes répercussions si elle se répandait largement : si la moitié des États américains adoptent une législation similaire refusant d’extrader les personnes ayant enfreint les lois anti-avortement dans l’autre moitié des États, les lois anti-avortement deviendront partout plus difficiles à appliquer.
Byron Sigcho-Lopez, conseiller municipal de Chicago, et Robin Wonsley, membre du conseil municipal de Minneapolis, camarades de Sawant au sein des Socialistes démocrates d’Amérique, prévoient de faire pression en faveur d’une législation de sanctuaire pour l’avortement dans leurs villes. Notre bureau a également travaillé en étroite collaboration avec le superviseur Heidi M. Wegleitner du comté de Dane, dans le Wisconsin, qui s’est montré solidaire de notre combat en écrivant au conseil municipal de Seattle pour soutenir fermement notre législation.
Comment les travailleurs.ses de Seattle et Socialist Alternative ont gagné
Le large soutien et l’enthousiasme suscités par notre loi sur le droit à l’avortement à Seattle était aussi écrasant que ce à quoi on pouvait s’attendre au vu des nombreux sondages nationaux qui indiquent un large soutien au droit à l’avortement. Plus de 5 500 personnes ont signé notre pétition de soutien à la législation. Le jour du vote du conseil municipal, 60 personnes ont témoigné en public pour demander aux démocrates du conseil de voter « oui » sans diluer le projet de loi.
Une grande partie des signatures de la pétition en faveur d’un sanctuaire pour l’avortement a été recueillie par les membres de Socialist Alternative lors des événements de la Pride à Seattle à la fin du mois de juin, où nous avons parlé à des milliers de personnes LGBTQ de la classe ouvrière de la nécessité d’un mouvement de masse unifié pour vaincre les attaques de la droite contre l’avortement, qui sont fondamentalement liées aussi aux attaques vicieuses contre les jeunes trans et les personnes homosexuelles que nous observons dans tout le pays.
Les membres de Socialist Alternative ont continué à tenir des stands presque quotidiennement tout au long du mois de juillet, afin de parler au plus grand nombre possible de travailleurs et de les faire participer à la lutte.
Sur la version en ligne de notre pétition, 850 personnes ont laissé des commentaires avec des histoires personnelles et des mots de solidarité, dont des centaines de membres de syndicats.
À Washington, nous n’avons vu aucun leadership de la part des démocrates ou de leurs ONG affiliées comme Planned Parenthood et NARAL Pro-Choice. À Washington, nous n’avons vu aucun leadership de la part des démocrates ou de leurs ONG affiliées comme Planned Parenthood et NARAL Pro-Choice. Même les membres de la « Squad » ont refusé d’engager un véritable combat basé sur la mobilisation des millions de travailleurs qui les soutiennent – encore une capitulation devant le leadership démocrate auquel ils avaient promis de s’opposer.
Les républicains et la droite ont passé 50 ans à s’organiser et à construire pour cet assaut total contre les femmes et les personnes queer. Pendant ce temps, le parti démocrate a passé 50 ans à promettre de nous protéger en codifiant le droit à l’avortement, puis à refuser complètement de se battre malgré chaque occasion. Tragiquement, ceci peut maintenant être ajouté à la longue liste croissante des promesses non tenues des Démocrates – de Medicare for All, d’un salaire minimum fédéral de 15$/h, d’un Green New Deal, et de bien d’autres choses encore.
Au moment même où ils exprimaient leur indignation face à la décision de la Cour suprême, les membres démocrates du conseil municipal de Seattle tentaient de saper notre législation dans les coulisses, mais refusaient de révéler publiquement leurs intentions. Ils ont tenté d’affaiblir considérablement la clause qui oblige désormais la police de Seattle à ne pas arrêter les personnes faisant l’objet d’un mandat d’arrêt lié à un avortement hors de l’État. La seule raison pour laquelle les démocrates ont fait marche arrière a été le feu des projecteurs braqué sur eux par les centaines de travailleurs qui se sont exprimés et par le bureau de Sawant, prouvant une fois de plus l’efficacité de la mobilisation de la classe ouvrière.
La seule voie à suivre
Il appartient maintenant aux mouvements sociaux dirigés par des travailleurs de défendre le droit fondamental à l’avortement, et de reconnaître la leçon la plus importante de cette défaite : nous avons besoin d’un nouveau parti pour les travailleurs qui ne soit pas lié aux entreprises et aux milliardaires. Nous avons besoin d’un parti organisé démocratiquement et dont les représentants élus, comme Kshama Sawant, ne prendront que le salaire moyen du travailleur et seront responsables devant les travailleurs et les opprimés.
Même si nous obligeons les démocrates à se ranger à nos côtés, nous ne pouvons pas nous permettre de tirer des conclusions erronées. Les démocrates du Conseil ne sont pas soudainement devenus d’authentiques progressistes lorsqu’ils ont voté en faveur de notre projet de loi sur le sanctuaire de l’avortement. Lors de cette réunion, les démocrates ont secrètement présenté un vote visant à mettre fin à la prime de risque de pandémie de 4 $/heure versée par Seattle aux employés des épiceries.
Taxer Amazon pour financer les avortements gratuits
Notre pétition pour un sanctuaire de l’avortement comprend également une demande extrêmement populaire visant à augmenter la taxe Amazon de notre mouvement pour financer des avortements gratuits pour tous les résidents et visiteurs de Seattle. Nous présenterons cette loi cet automne, dans le cadre de nos revendications pour le budget populaire de 2023.
Un travailleur de la santé qui a signé la pétition a souligné l’urgence et l’importance de cette prochaine étape de la lutte, en écrivant : « Notre pays est confronté à une crise et nous devons agir maintenant. Si nous n’augmentons pas les fonds et les ressources consacrés aux avortements, nous ne serons pas prêts lorsque les patients fuyant l’Idaho et d’autres États rouges afflueront. Les cliniques d’avortement de l’Est de Washington sont déjà à pleine capacité, et les choses ne vont faire qu’empirer. Nous devons nous préparer à faire face à cette crise immédiatement en augmentant la taxe Amazon. »
Le combat ne fait que commencer. Rejoignez-nous !
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Les marxistes et la guerre froide entre les États-Unis et la Chine
Plutôt que d’appuyer sur le bouton pause de la guerre froide impérialiste entre les États-Unis et la Chine, l’invasion de l’Ukraine par la Russie a accéléré le processus.Vincent Kolo, chinaworker.info
“L’invasion russe de l’Ukraine a mis fin à la mondialisation que nous avons connue au cours des trois dernières décennies”, déclare Larry Fink, président de Blackrock, le plus grand spéculateur financier du monde. De très nombreux capitalistes, comme Fink, sont en train de rattraper les nouvelles réalités de la situation mondiale. Jusqu’au début de cette année, ils parlaient encore au futur d’une guerre froide entre les deux superpuissances, la Chine et les États-Unis.
Mais en fait, les grandes lignes du conflit actuel entre les États-Unis et la Chine ont commencé il y a dix ans avec le “tournant vers l’Asie” du président Obama. Dans le même temps, en 2012, Xi Jinping est arrivé au pouvoir et a adopté une politique étrangère plus agressive et nationaliste. C’était le revers de la médaille d’une répression considérablement accrue et d’un contrôle plus strict à l’intérieur du pays. Xi a abandonné la doctrine diplomatique pragmatique des gouvernements chinois précédents, résumée par la phrase de Deng Xiaoping, “hide and bide” (cachez vos capacités et attendez votre heure). L’approche de Xi se distingue par sa vantardise et l’exagération des capacités de la Chine. Les résultats décevants de la Chine dans la production de vaccins contre le COVID-19, malgré les centaines de milliards de dollars investis dans son secteur biopharmaceutique ces dernières années, en sont un exemple.
Le conflit avec l’impérialisme américain s’est intensifié en 2018 sous la présidence de Trump, populiste de droite, avec le lancement de la plus grande guerre commerciale depuis les années 1930. Lorsque Trump a perdu contre Biden en 2020, nous avons expliqué que la guerre froide se poursuivrait et s’intensifierait sous la nouvelle administration. En effet, le conflit est enraciné dans des processus objectifs, la crise historique du capitalisme mondial, et ne dépend pas en fin de compte du parti capitaliste qui est au pouvoir.
Dans la résolution du congrès 2020 d’Alternative Socialiste Internationale (ASI) concernant les perspectives mondiales, nous avons déclaré que “le conflit entre les États-Unis et la Chine est désormais l’axe principal autour duquel tourne la situation mondiale”. Comme cette résolution l’a précisé : “Le capitalisme mondial sort de l’ère de la mondialisation néolibérale, la tendance dominante depuis près de quatre décennies, et entre dans l’ère de la “géo-économie” dans laquelle le conflit d’intérêts entre les grandes puissances impérialistes est le facteur dominant.”
L’État et le marché
Ce texte a été écrit avant la pandémie et avant la guerre en Ukraine, qui ont toutes deux renforcé ces processus. Aujourd’hui, la tendance est au militarisme et à une lutte de pouvoir géopolitique encore plus âpre, les tendances économiques ayant tendance à suivre plutôt qu’à diriger les développements. Les États nationaux – les outils de coercition du capitalisme – plutôt que les “forces du marché” sont de plus en plus aux commandes. L’expansion militaire et la démondialisation stratégique sont désormais les principales tendances. Il ne s’agit pas seulement de l’augmentation des budgets d’armement, même si cette évolution est dramatique et alarmante, le Japon et l’Allemagne en étant les exemples les plus marquants.
La Chine possède désormais la plus grande marine du monde, avec 355 navires contre 297 pour les États-Unis, et a lancé en juin son troisième porte-avions, le Fujian, qui est aussi le plus avancé. Le plan de modernisation de Xi envisage une armée “à égalité avec les États-Unis” d’ici 2027, date du 100e anniversaire de l’Armée populaire de libération. De nombreux commentateurs préviennent qu’il pourrait s’agir du calendrier de Xi pour une invasion de Taïwan, qu’il est déterminé à placer sous le contrôle de Pékin. Cependant, la Chine n’a pas mené de guerre navale depuis 100 ans. Les experts militaires préviennent qu’une invasion de Taïwan serait encore plus compliquée que le débarquement de 1944 en Normandie.
Un climat politique frénétique est orchestré par les classes dirigeantes, en Europe mais aussi dans certaines régions d’Asie, avec en parallèle la préparation d’attaques massives contre la classe ouvrière pour financer des armées plus grandes et plus meurtrières. Partout, la solution des capitalistes et de leurs gouvernements est “plus d’armes !”. Le nationalisme, une certaine frénésie et la désorientation, sont très courants dans les premiers stades d’une guerre. Mais le vent va inévitablement tourner avec le soutien croissant pour une alternative anti-guerre, anticapitaliste et internationaliste.
Le récent sommet de l’OTAN en Espagne, la réunion du G7 en Allemagne et le sommet des dirigeants du Dialogue quadrilatéral (« Quad ») (Japon – Australie – Inde – États-Unis) au Japon ont tous été des exemples historiques d’un nouveau niveau de riposte coordonnée de l’Occident, non seulement contre la Russie mais aussi, et surtout, contre la Chine. Le nouveau niveau de rhétorique contre la Chine, qui est pour la première fois qualifiée de “défi systémique” dans le concept stratégique 2022 de l’OTAN, est la preuve que l’émoussement de la puissance chinoise est l’objectif primordial à long terme de l’impérialisme américain et, désormais, de l’OTAN. Cette orientation stratégique a été soulignée dans un récent discours du commandant de la marine britannique, l’amiral Sir Ben Key, qui a averti que “si l’on se concentre uniquement sur l’ours russe, on risque de manquer le tigre”. Le propos est clair, même s’il y a très peu de tigres en Chine (de toute évidence, il n’est pas nécessaire de connaître la zoologie pour diriger une marine).
L’invasion de l’Ukraine par la Russie était bien sûr le premier point à l’ordre du jour de ces réunions, à l’exception du sommet du Dialogue quadrilatéral, où l’implication de l’Indien Modi a nécessité un message différent de la part des autres membres de ce groupe, les États-Unis, le Japon et l’Australie. L’Inde refuse de se ranger du côté des opposants à la Russie, en partie parce qu’elle craint de pousser ainsi Poutine à se rapprocher encore plus de la Chine. Pendant des années, le régime chinois a fait pression sur la Russie pour qu’elle réduise ses ventes d’armes à l’Inde, avec laquelle Pékin entretient un différend frontalier de longue date. En accordant son soutien de facto à l’invasion de la Russie, Xi veut en partie utiliser cette invasion comme un levier contre l’Inde et permettre à la Chine de mettre la main sur la technologie militaire russe, y compris celle des armes nucléaires.
Armageddon
Les sanctions paralysantes imposées à la Russie, qui a effectivement été éjectée de l’économie mondiale, ont un double objectif : servir d’avertissement et de répétition générale en vue d’une future épreuve de force avec la Chine. Dans ce cas, l’impact mondial serait d’une toute autre ampleur. L’économie chinoise est dix fois plus importante que celle de la Russie et joue un rôle essentiel dans les chaînes d’approvisionnement, le commerce et les flux financiers mondiaux. “Appliquez à la Chine ce que nous avons vu en Russie, et vous obtenez un Armageddon pour l’économie chinoise et pour l’économie mondiale”, a déclaré un chef d’entreprise occidental au Financial Times.
Les deux parties veulent éviter ou retarder un tel scénario. Mais les deux parties se préparent également pour le jour où il se produira. Même Henry Kissinger, qui a négocié pour faire entrer la Chine de Mao dans le camp occidental pendant la première guerre froide contre la Russie stalinienne, convient que la Chine capitaliste d’aujourd’hui ne doit pas être autorisée à devenir un “hégémon”. Et ce, malgré les avertissements de Kissinger selon lesquels les hostilités entre les États-Unis et la Chine pourraient déclencher une “catastrophe mondiale comparable à la Première Guerre mondiale.”
Le contrecoup de la guerre en Ukraine a permis à l’impérialisme américain d’aligner un plus grand nombre de ses alliés autour de sa stratégie anti-Chine. Des divergences persistent, par exemple avec le gouvernement allemand, qui, aux yeux de l’administration Biden, traîne encore les pieds à l’égard de la Russie et de la Chine. Mais par rapport à la position des gouvernements respectifs avant l’invasion de février, l’écart s’est considérablement réduit.
La nouvelle situation a également apporté une manne financière à l’industrie américaine de l’armement. Lorsque le gouvernement allemand a décidé de doubler son budget militaire quelques jours seulement après l’invasion russe, le faisant passer de 47 milliards d’euros en 2021 à 100 milliards d’euros en 2022, son premier achat a été 35 avions de combat américains F-35 capables de transporter des armes nucléaires (coût estimé à 4 milliards d’euros). L’industrie américaine de l’énergie devrait également engranger d’énormes gains à mesure que l’Allemagne et l’Europe se détournent du pétrole et du gaz russes. Au cours des quatre premiers mois de l’année, les expéditions de gaz naturel liquéfié des États-Unis vers l’Europe ont triplé par rapport à la même période en 2021.
L’OTAN et ses amis
Au sommet de l’OTAN de Madrid, le Japon, la Corée du Sud, l’Australie et la Nouvelle-Zélande ont été invités pour la première fois à participer. Il ne s’agissait pas simplement d’envoyer un message à Pékin, mais aussi d’une étape vers une plus grande coordination militaire entre ces États indo-pacifiques et l’OTAN. Par conséquent, si Xi Jinping a peut-être calculé que son régime pourrait tirer des avantages de la confrontation de la Russie avec l’Occident, il risque en fin de compte de perdre encore plus que Poutine, car les enjeux pour l’économie chinoise sont bien plus importants.
Il s’agit du processus plus large de démondialisation et de formation de deux blocs antagonistes, la Chine risquant d’être évincée de secteurs clés du marché et de l’accès aux nouvelles technologies. Le milliardaire américain de la technologie Vinod Khosla prédit une “guerre techno-économique” entre les États-Unis et la Chine qui, selon lui, durera deux décennies. Les États-Unis ont déjà imposé des contrôles stricts sur des technologies d’importance stratégique telles que les équipements de télécommunications 5G et les semi-conducteurs, et leurs contrôles technologiques ne feront que s’étendre. Le Congrès est saisi de plusieurs projets de loi visant à renforcer le contrôle des investissements américains dans un large éventail de secteurs commerciaux chinois. D’autres mesures visent à financer la production américaine de semi-conducteurs, de métaux de terres rares, de technologies de batteries améliorées et d’autres secteurs où la Chine domine ou l’économie américaine est vulnérable aux perturbations de la chaîne d’approvisionnement.
L’assaut réglementaire de Trump contre le géant chinois des télécommunications Huawei a plongé l’entreprise dans une grave crise. Bloquée par les sanctions américaines pour accéder aux semi-conducteurs les plus récents, sa position même sur le marché intérieur chinois des smartphones est passée de la première à la sixième place depuis 2018, avec une baisse des ventes de 64 % l’année dernière. Pour ajouter à ses malheurs, Huawei a été contraint de réduire ses activités en Russie, l’un de ses rares marchés de croissance, pour éviter de tomber sous le coup des sanctions occidentales.
La “liste d’entités” américaine, ou liste noire des entreprises chinoises établie sous l’administration Trump, est devenue depuis un modèle pour la conduite de la guerre économique américaine à l’époque de la guerre froide. Sous Biden, la “liste des entités” a été étendue et les médias chinois affirment que 260 entreprises chinoises figurent désormais sur la liste. Plus de 100 entreprises russes ont été ajoutées en février.
Des réductions douanières ?
Une nouvelle escalade est à l’ordre du jour. “Si les États-Unis persuadent l’UE et le Japon de relancer le Comité de coordination pour le contrôle multilatéral des exportations (CoCom) afin d’étouffer les flux technologiques vers la Chine – une perspective rendue plus probable par la guerre en Ukraine – la Chine aura peu de chances de gagner la course technologique avec les États-Unis”, affirme Minxin Pei, un commentateur sino-américain.
Ce n’est pas contredit par les informations selon lesquelles Biden délibère sur la suppression éventuelle de certains droits de douane sur les produits chinois imposés par Trump en 2018. Si cela se produit, la réduction sera probablement “modeste”, peut-être en supprimant moins de 3 % des droits de douane, qui couvrent totalement plus de 300 milliards de dollars de biens chinois. L’objectif serait d’atténuer les pressions inflationnistes dans l’économie américaine à l’approche des élections de mi-mandat de novembre, bien que cela puisse n’avoir aucun effet sur l’inflation.
Des déclarations contradictoires suggèrent qu’il y a une lutte de pouvoir au sein du gouvernement de M. Biden entre les départements du Trésor et du Commerce, toute réduction des droits de douane risquant d’exposer le président à des attaques de la part des deux côtés du Congrès pour avoir été indulgent envers la Chine. Ce n’est pas seulement en Chine que le nationalisme maniaque constitue une contrainte pour la capacité du gouvernement à affiner sa politique. Janet Yellen, qui semble favorable à un certain “recalibrage” des tarifs douaniers, soutient que ceux-ci ne sont pas particulièrement efficaces comme arme contre la Chine et que des tarifs plus “stratégiques” sont nécessaires. Ce débat porte donc sur la manière d’infliger des souffrances à l’économie chinoise de manière plus intelligente, et rien d’autre.
Les relations UE-Chine
Pendant une grande partie de la dernière décennie, Pékin a entretenu l’espoir que l’Union européenne, sous la direction de facto de l’Allemagne, s’en tiendrait à une position de “neutralité stratégique” dans le conflit entre les États-Unis et la Chine. Cet espoir reposait sur la conviction que le capitalisme allemand ne ferait rien pour mettre en péril les plus de 100 milliards de dollars d’exportations allemandes vers la Chine chaque année. Mais les tentatives de Xi Jinping d’inoculer les relations UE-Chine de la guerre froide américano-chinoise ont commencé à s’autodétruire avant même la guerre en Ukraine.
Les tensions au sujet du Xinjiang ont torpillé l’accord global UE-Chine sur les investissements (ACI) en mars de l’année dernière. Si cet accord avait été ratifié, il aurait constitué un coup diplomatique important pour Pékin et une rebuffade pour Washington. Mais l’ACI est maintenant mort. Cette année, le gouvernement allemand exerce une pression financière et politique sur ses plus grandes entreprises, dont le constructeur automobile Volkswagen, en invoquant les violations des droits humains commises par la dictature chinoise dans le Xinjiang à majorité musulmane.
La question du Xinjiang est utilisée pour signaler une nouvelle approche plus dure de Berlin, à l’égard de la Chine mais aussi des capitalistes allemands, afin de leur forcer la main pour “diversifier” leurs investissements et leurs chaînes d’approvisionnement et mettre fin à une dépendance déséquilibrée vis-à-vis de la Chine. Il s’agit d’une tendance mondiale. Elle reflète les politiques des États-Unis et d’autres pays où les gouvernements dictent de plus en plus les décisions d’investissement aux entreprises privées pour des raisons de “sécurité nationale”. Elle imite certaines caractéristiques du modèle chinois.
Une telle approche “étatiste” était impensable à l’apogée de la mondialisation néolibérale. Mais aujourd’hui, chaque classe dirigeante doit protéger son pouvoir national afin de survivre à ce que Martin Wolf du Financial Times appelle la “nouvelle ère de désordre mondial”. C’est cela, plutôt que les inquiétudes liées à la répression et à la torture, qui se produisent à grande échelle au Xinjiang, qui oblige l’Allemagne et d’autres économies occidentales à freiner une plus grande interdépendance économique avec la Chine. Ce découplage de l’économie chinoise n’en est encore qu’à ses débuts, mais il s’accélère, comme certains des critiques internes de Xi avaient prévenu qu’il se produirait, rejetant la faute sur son alliance “sans limites” avec Poutine.
Le processus a en fait commencé il y a près de dix ans, sous l’effet d’autres facteurs, notamment une hausse des salaires chinois par rapport à ceux des autres économies asiatiques et même d’Europe de l’Est. Mais au cours du premier semestre de cette année, 11 000 entreprises étrangères ont été désenregistrées en Chine, contre une augmentation nette de 8 000 nouveaux enregistrements étrangers l’année dernière.
Everbright Securities estime qu’environ 7 % des commandes de meubles chinois ont été perdues au profit du Vietnam et d’autres pays entre septembre 2021 et mars 2022, 5 % pour les produits textiles et 2 % pour l’électronique. Ces tendances ont été masquées par le boom temporaire des exportations chinoises pendant la pandémie, mais comme celui-ci s’estompe, nous risquons d’assister à l’évidement de l’industrie manufacturière chinoise, à l’instar de ce qui s’est passé au Japon il y a trente ans.
Droits démocratiques
Le camp dirigé par les États-Unis présente sa position sur l’Ukraine comme une défense de la “démocratie” contre l’”autocratie”. La même hypocrisie s’applique au Xinjiang et à Taïwan. La propagande des impérialismes chinois et russe s’appuie sur un nationalisme agressif (“l’approche guerrière du loup” en Chine). Ils accusent l’Occident de chercher à affaiblir et à détruire la mère patrie, en utilisant la “démocratie” comme l’une de ses armes insidieuses. Tous les ennemis du régime – travailleurs, militants anti-guerre et pour la démocratie, personnes LGBT+ et féministes – sont qualifiés d’”agents étrangers”. Le projet nationaliste consiste à devenir une puissance forte et à reconquérir les “territoires volés”.
Les marxistes et ASI s’opposent à toutes les puissances ou blocs impérialistes et à leur propagande. Nous avertissons que le fait de soutenir l’un ou l’autre camp ou de croire qu’un impérialisme est moins dangereux que l’autre aurait des conséquences désastreuses pour la lutte des travailleurs contre le capitalisme.
L’impérialisme n’est jamais un allié dans la lutte pour la libération des peuples et nations opprimés, et pas du côté des droits démocratiques pour les masses. Les libertés politiques qui existent actuellement dans les démocraties capitalistes occidentales mais qui sont totalement absentes en Chine et de plus en plus en Russie, comme le droit de vote, le droit de s’organiser, la liberté d’expression et le droit de grève – ces droits ont toujours et partout été gagnés par la pression et la lutte des masses, et non par la bienveillance de la classe dirigeante.
L’attaque féroce de l’État américain contre le droit à l’avortement tourne en dérision la tentative de Washington de se placer sur le terrain de la “démocratie”. Ces dernières années, les pays capitalistes occidentaux ont lancé vague après vague des attaques contre les libertés civiles et les droits syndicaux. Dans les pays dotés d’une démocratie formelle ou bourgeoise, ce n’est pas l’État capitaliste qui est le dépositaire des droits démocratiques.
Léon Trotsky a expliqué que si la classe ouvrière n’est pas immédiatement capable de renverser le capitalisme, elle défend la démocratie bourgeoise contre la réaction fasciste ou autoritaire : “Les travailleurs défendent la démocratie bourgeoise, cependant, non pas par les méthodes de la démocratie bourgeoise … mais par leurs propres méthodes, c’est-à-dire par les méthodes de la lutte de classe révolutionnaire.” (Réponses aux questions sur la situation espagnole, 1937).
De “bons autocrates” ?
Les travailleurs ne peuvent jamais se tourner vers l’État capitaliste, les tribunaux, la police ou les armées capitalistes pour défendre nos droits démocratiques. Les droits démocratiques qui existent dans les États capitalistes occidentaux sont le résultat de la lutte et du rapport de forces des classes dans la société, plutôt que ce qui est écrit dans les lois ou les constitutions. Seule une lutte de masse liée à l’échelle internationale et dirigée par un mouvement ouvrier revitalisé qui se bat pour remplacer le capitalisme par un véritable socialisme peut garantir de véritables droits démocratiques. C’est la seule force qui peut mettre fin aux guerres et à l’oppression nationale. Les socialistes s’opposent à la répression d’État orwellienne des États capitalistes chinois et russes et se tiennent aux côtés de la classe ouvrière de ces pays, qui est la seule force capable de mener une véritable lutte contre la dictature.
Lorsque l’OTAN a besoin de la Turquie pour approuver les demandes d’adhésion de la Suède et de la Finlande, ses dirigeants “démocratiques” n’ont aucun scrupule à s’allier à l’autocrate impitoyable Erdogan, qui prépare de nouvelles guerres contre les Kurdes et s’attaque aux droits des syndicats, des femmes et des personnes LGBT+.
Les mêmes doubles standards à couper le souffle s’appliquent à la récente visite de Biden en Arabie saoudite pour serrer la main du dictateur Mohammed bin Salman. Il y a deux ans, lors de la campagne électorale, Biden s’était vanté de faire de l’Arabie saoudite un “paria”, mais aujourd’hui, il a besoin d’un accord sur l’approvisionnement en pétrole alors que l’embargo pétrolier russe comprime les marchés mondiaux. Il en va de même pour la mission de Blinken visant à charmer le dictateur thaïlandais, le général Prayut, en juillet. Washington est soucieux de ne pas voir le régime thaïlandais passer complètement du côté de la Chine.
Une analyse claire
Le conflit impérialiste entre les États-Unis et la Chine s’insère dans presque tous les mouvements et toutes les luttes qui se déroulent dans le monde. Nous en avons vu un élément au Myanmar l’année dernière, où d’un côté le coup d’État de l’armée était soutenu par Pékin et Moscou, tandis que de l’autre côté une partie de la jeunesse et des travailleurs qui ont monté une incroyable lutte de résistance et un mouvement de grève de masse ont malheureusement commencé à se tourner vers la pression occidentale et même l’intervention (de la soi-disant communauté internationale) pour les aider à vaincre la junte. Il s’agissait d’une cruelle illusion qui n’a fait que semer la confusion dans la lutte. La même chose s’est produite sous une forme différente à Hong Kong lors des manifestations démocratiques de masse de 2019, et à nouveau en Thaïlande l’année suivante.
Il y a des leçons politiques importantes à tirer de ces expériences dans l’environnement mondial modifié créé par la nouvelle guerre froide. Dans les exemples précités, une variante du “moindre mal” s’est installée et a désorienté une partie de ces mouvements, entraînant ou renforçant un repli de la lutte. Dans des pays comme l’Indonésie, les Philippines, la Malaisie, le Japon, Taïwan et la Corée du Sud, des sections du mouvement ouvrier et de la gauche peuvent également être désorientées et divisées par ces complications. Il s’agit bien entendu d’un avertissement pour le mouvement ouvrier naissant en Chine également.
La guerre froide, avec les deux blocs impérialistes qui exploitent et polarisent davantage des situations déjà volatiles pour accumuler les victoires géopolitiques, représente un grave danger pour les travailleurs et la jeunesse. C’est le cas même sans une autre guerre chaude reproduisant et peut-être éclipsant les horreurs de l’Ukraine. Une perspective, une analyse et un programme clairs qui rejettent le “moindre mal” et le nationalisme pour une position internationaliste et ouvrière d’opposition implacable à tous les gouvernements capitalistes et impérialistes, c’est la seule façon de s’assurer que les luttes importantes des opprimés ne sont pas déraillées par la réaction.
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USA. Agir MAINTENANT pour défendre le droit à l’avortement – Déclaration de Kshama Sawant

Le jour où la Cour suprême a annoncé qu’elle révoquait le jugement Roe v Wade, des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue dans tout le pays. Cette décision honteuse de la droite va à l’encontre du soutien à l’avortement légal de la majorité des travailleuses et travailleurs américains. Mais les manifestations ont également très clairement montré que des millions de personnes sont enragées par l’échec total des démocrates à riposter et par l’idée que tout ce que nous devons faire maintenant est de voter démocrate aux élections de novembre.Par Kshama Sawant, élue au Conseil de ville de Seattle, membre de Socialist Alternative (ASI-USA)
À New York, plus de 20.000 personnes ont défilé avec colère dans Manhattan, sous la conduite de Socialist Alternative et d’autres groupes et syndicats de gauche. L’énergie de la manifestation était si féroce que la marche a duré quatre heures.
À Fayetteville, dans l’Arkansas, des centaines de personnes ont manifesté dans le centre-ville pour réclamer une alternative féministe socialiste au féminisme libéral en faillite.
À Houston, où Socialist Alternative a lancé un appel à des manifestations de masse devant le palais de justice fédéral, cinq mille personnes ont participé à la manifestation. Dans une vidéo maintenant virale de la manifestation, on peut voir le démocrate Beto O’Rourke, qui s’est présenté en demandant un temps de parole, baisser la tête de honte alors que la foule autour de lui scandait “Voter démocrate ne suffit pas ! Démocrates nous voyons votre bluff !”
Dans chaque ville où Socialist Alternative a organisé des manifestations, nos membres rapportent que les foules étaient pleines de jeunes gens furieux non seulement de la barbarie évidente de la droite, mais aussi de l’incapacité et du refus des démocrates de défendre même les droits fondamentaux.
Des démocrates qui ne font rien
Il n’a pas échappé aux gens qu’immédiatement après la décision de la Cour suprême, le parti démocrate au pouvoir, plutôt que de se battre pour codifier l’arrêt Roe v Wade ou mettre en œuvre des ordres exécutifs visant à protéger le droit à l’avortement que la grande majorité de la société soutient, a préféré mettre en place un show de « God Bless America » sur les marches de la Cour suprême. Aussi comique que cela puisse paraître, c’est réellement ce qui s’est passé.
Quelques heures après la révocation de l’arrêt Roe, les e-mails de collecte de fonds des démocrates ont commencé à arriver comme une avalanche. « S’il vous plaît, je n’ai jamais eu autant besoin de votre soutien qu’aujourd’hui. Pouvez-vous contribuer à hauteur de 15 dollars pour que nous puissions gagner ces élections de mi-mandat en novembre et codifier enfin les droits reproductifs dans la loi ? » a écrit Nancy Pelosi. « Pouvez-vous vous précipiter pour faire un don, quel qu’en soit le montant, afin de stopper l’extrême-droite et d’élire un Congrès favorable aux droits en matière d’avortement cette année ? » a demandé le congressiste David Cicilline.
Ces plaidoyers insultants des démocrates pour obtenir de l’argent et des voix suscitent la colère générale des jeunes. Comme l’a exprimé une jeune femme « c’est comme si l’on nous demandait d’adhérer encore une fois à un système défaillant dans l’espoir qu’il se répare de lui-même ; ce ne sera pas le cas. »
Nous devons agir MAINTENANT
Les démocrates, avec leur contrôle de la Maison Blanche et leur majorité au Congrès, ont la possibilité de prendre des mesures significatives – s’ils en avaient la volonté politique – pour surmonter cette attaque de la droite.
À l’instant même, Biden pourrait
- Signer un décret autorisant l’ouverture de cliniques d’avortement sur les terres fédérales dans les plus de 20 États où l’avortement est interdit. Les cliniques seraient alors libres de fonctionner dans des bâtiments fédéraux ou des cliniques mobiles pourraient être installées sur tout terrain fédéral.
- Rendre la pilule abortive accessible dans tout le pays en utilisant les directives de la FDA (l’agence de la santé américaine) pour écarter toute restriction des États.
- Élargir l’accès aux services de télémédecine pour l’avortement et utiliser le contrôle fédéral du système postal pour garantir que les envois de pilules abortives ne soient pas restreints.
Au-delà de cela, Biden et les dirigeants démocrates de la Chambre et du Sénat peuvent se battre bec et ongles pour codifier l’arrêt Roe et adopter des lois sur la protection de la santé des femmes. Ils peuvent également abroger de toute urgence taxer les milliardaires afin d’augmenter massivement le financement des cliniques qui plient aujourd’hui sous une demande accrue.
En plus de ces mesures qui feraient une différence spectaculaire dans la capacité des gens à accéder aux avortements, nous avons également besoin d’une multitude de services sociaux pour garantir que les gens puissent se permettre d’avoir des enfants quand ils le souhaitent.
Cela signifie une transition immédiate vers l’assurance-maladie pour tous au niveau fédéral, afin de rendre gratuits tous les soins liés à la reproduction et à l’affirmation du genre. Cela implique de rétablir les allocations familiales de l’époque de la pandémie, de se battre pour des services de garde d’enfants universels et des écoles publiques entièrement financées, le tout financé par l’imposition des riches.
Plus d’excuses
La congressiste démocrate de gauche Alexandria Ocasio-Cortez (AOC) a raison de dire : « Le président et les leaders démocrates ne peuvent plus s’en tirer avec les tactiques familières des ‘comités’ et des ‘études’ pour éviter de s’attaquer de front à nos crises. » Elle a demandé à Biden de prendre des mesures exécutives immédiates pour protéger l’accès à l’avortement et je suis tout à fait d’accord avec elle. Mais comme nous l’avons appris par l’expérience d’AOC et des autres élues de The Squad (la brigade, surnom donné à diverses élues de gauche au Congrès), demander simplement aux démocrates capitaliste d’agir ne sera jamais suffisant. Les presque neuf années d’existence de Socialist Alternative à Seattle ont montré que nous devons construire un mouvement suffisamment puissant pour forcer les politiciens démocrates à agir, malgré leur opposition.
Comme Cori Bush l’a fait avec le moratoire sur les expulsions, AOC, Bernie et d’autres membres de The Squad devraient appeler à une installer une occupation devant la Maison Blanche pour exiger que Biden utilise une action exécutive visant à ouvrir des cliniques d’avortement sur les terres fédérales et élargir l’accès aux pilules abortives. Nous pouvons organiser des manifestations de soutien devant les bâtiments fédéraux dans les villes du pays.
Si les dirigeants démocrates refusent toujours d’agir, nous devrons intensifier la pression en organisant des manifestations et des actions directes dans les bureaux des dirigeants démocrates. Après la fuite du projet de jugement de la Cour suprême en mai dernier, Socialist Alternative a organisé des sit-in dans les bureaux des dirigeants démocrates Pelosi et Schumer. Des milliers de personnes ont suivi les retransmissions en direct, les encourageant avec enthousiasme. C’est le type d’action que nous devrons mener si nous voulons sérieusement forcer les démocrates à agir.
Lutter pour les villes sanctuaires
Pendant que nous intensifions nos demandes envers les démocrates pour qu’ils adoptent des mesures immédiates au niveau fédéral, il y a des combats cruciaux que nous pouvons mener au niveau de l’État et au niveau local pour garantir l’accès à l’avortement aux résidents et aux visiteurs étrangers.
À Seattle, j’ai déposé une loi faisant de Seattle une ville sanctuaire pour toute personne risquant une sanction légale dans son État d’origine pour avoir cherché ou fourni un avortement. Si elle est adoptée, cette loi empêchera la police de Seattle d’arrêter des personnes, qu’il s’agisse de patientes, de médecins ou d’autres prestataires de soins, pour des mandats non exécutés liés à des lois anti-avortement dans d’autres États. Nous présenterons également une loi sur le budget populaire pour rendre l’avortement gratuit à Seattle pour les personnes voyageant depuis des États ayant des lois anti-avortement ainsi que pour les résidents de Seattle, financée par l’augmentation de la taxe Amazon que nous avons gagnée en 2020.
Il faut se battre pour des législations similaires dans d’autres villes. Notre bureau au Conseil de la ville de Seattle est heureux de constituer une ressource de projets de loi et de débattre des meilleures stratégies pour construire une pression populaire.
Nous avons besoin d’un mouvement de masse indépendant du parti démocrate
Afin de répondre à l’assaut des attaques vicieuses de la droite, nous avons besoin d’un mouvement de masse indépendant qui puisse servir de base aux jeunes et aux travailleurs qui cherchent un moyen de riposter.
Comme l’écrivait Socialist Alternative le jour de la décision de la Cour suprême : « Avec une absence totale de leadership du parti démocrate ou des ONG libérales, stopper la droite dans son élan nécessitera un mouvement complètement indépendant de jeunes et de travailleurs. Ce mouvement doit avoir des objectifs politiques clairement définis, des structures démocratiques et une indépendance totale vis-à-vis des démocrates. »
Nous devons présenter des candidats socialistes et ouvriers indépendants comme une étape immédiate vers la construction d’un nouveau parti pour les travailleurs et les jeunes qui se battra sans ambiguïté pour nos intérêts.
Je demande à tous les autres élus socialistes, à tous les dirigeants syndicaux et à tous les dirigeants du mouvement social de se joindre à moi pour appeler à un mouvement de masse démocratique, à de nouvelles organisations de masse de lutte et à une rupture définitive avec le parti démocrate pourri qui a permis à la droite de mener cette guerre contre notre autonomie corporelle.
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Révocation du droit à l’avortement aux USA : pour un mouvement de masse contre la droite !

Solidarité internationale ! Participez ce dimanche à “PRIDE IS A PROTEST” à Gand !
- départ collectif de la Gare Centrale à Bruxelles : rdv à 13h pour une petite action et des prises de parole devant la gare avant de prendre le train de 13h56.
- départ collectif de Liège Guillemins : rdv à 12h30 pour prendre le train de 13h.
L’arrêt Roe vs Wade a été révoqué. Il s’agit d’une défaite historique pour le mouvement féministe, qui représente une victoire dans la campagne de la droite visant à saper l’autonomie corporelle des femmes et des personnes LGBTQIA+ à travers le pays.
Déclaration de Socialist Alternative (section d’ASI aux Etats-Unis)
Malgré le soutien massif en faveur de l’avortement légal, des dizaines de millions de personnes vivent aujourd’hui dans des États où obtenir un avortement signifie enfreindre la loi. Cette situation se répercutera essentiellement sur le dos des femmes pauvres qui, plus souvent encore, doivent parcourir des centaines de kilomètres et manquer plusieurs jours de salaire pour avoir un avortement. Bien que ce soit la droite qui ait mené une campagne déterminée durant des décennies pour révoquer l’arrêt Roe vs Wade, ce sont les démocrates et leurs ONG affiliées qui ont permis que cela se produise.
Il n’était pas nécessaire qu’il en soit ainsi. Avec le large soutien dont bénéficie le maintien de cet arrêt, les organisations de femmes dirigées par des libéraux auraient pu mener une véritable lutte de masse pour le protéger. La fuite du projet de la Cour suprême en mai dernier aurait pu servir de tremplin à une campagne de plusieurs mois de protestations, de meetings publics et d’actions directes. Au lieu de cela, ils ont activement démobilisé le mouvement et l’ont canalisé vers une campagne inutile vers les élections.
Des groupes tels qu’EMILY’s List, Planned Parenthood et NARAL Pro-Choice ont annoncé avoir dépensé 150 millions de dollars en faveur des démocrates pour les élections de mi-mandat de 2022. Heather Williams, directrice exécutive du comité de campagne législative démocrate, a déclaré à propos des électeurs démocrates : « La chute de Roe leur donne certainement une motivation et une urgence supplémentaires [pour voter]. » C’est une gifle insultante pour les centaines de milliers, voire les millions de personnes qui cherchaient à agir pour empêcher cette décision.
« Votez démocrate pour protéger le droit à l’avortement » ne signifie rien alors que ces mêmes démocrates refusent d’agir. Joe Biden est assis sur une pile de décrets qu’il pourrait signer dès maintenant pour étendre et garantir l’accès à l’avortement médicamenteux dans tout le pays. Au milieu d’un assaut barbare et choquant contre les enfants trans et non binaires à travers le pays, Hillary Clinton a déclaré que le « débat sur les transgenres » ne devrait pas être une priorité pour les démocrates. Cela s’ajoute à la longue liste de choses que les démocrates choisissent d’ignorer au lieu de se battre.
Il est évident que nous avons besoin de nouvelles organisations de masse, totalement indépendantes du parti démocrate, pour se battre sans réserve contre les assauts de la droite.
Dans de nombreux États, le recul de l’accès à l’avortement, l’attaque contre les droits des enfants transgenres et l’attaque de tout programme antiraciste dans les écoles sont devenus les moyens privilégiés des politiciens républicains pour remonter le moral de leur base. En l’absence totale de leadership de la part du parti démocrate ou des ONG libérales, stopper la droite dans son élan nécessitera un mouvement totalement indépendant de jeunes et de travailleurs.
Nous avons besoin d’un mouvement de masse doté de structures démocratiques qui puisse servir de quartier général à la lutte pour vaincre la droite et protéger (ou reconquérir) notre droit à l’autonomie corporelle. Ce mouvement doit avoir des objectifs politiques clairement définis, des structures démocratiques et une indépendance totale vis-à-vis des démocrates.
Les organisations socialistes, les syndicats et les groupes de justice sociale doivent unir leurs forces pour lancer une telle organisation. Les structures nécessaires à notre mouvement doivent être construites afin que les revendications, les tactiques et la stratégie soient décidées démocratiquement.
Malheureusement, la plus grande organisation socialiste des États-Unis, les Socialistes démocrates d’Amérique (DSA), s’est contentée de lancer un site web qui appelle à faire des dons aux fonds pour l’avortement et à les rejoindre. C’est une abdication de responsabilité au milieu de cette attaque historique.
Si une nouvelle organisation de masse devait voir le jour, ce que nous pensons être absolument nécessaire, Socialist Alternative la construirait avec enthousiasme et se battrait pour qu’elle ait un programme féministe socialiste.
Cela signifie un ensemble de revendications qui répondent aux besoins profonds des femmes et des personnes homosexuelles. Des revendications qui portent à la fois sur l’autonomie corporelle et qui donnent aux gens les moyens de fonder une famille s’ils le souhaitent. Cela inclut : un système d’assurance-maladie trans-inclusif pour tous avec avortement gratuit sur demande, des services de garde d’enfants universels, une éducation publique entièrement financée, des logements publics de haute qualité et abordables en permanence, la propriété publique et le contrôle démocratique sur les monopoles de couches et d’alimentation pour bébés, ainsi que de toutes les autres méga-corporations parasites.
Nous nous battrions pour qu’une telle organisation utilise des tactiques enracinées dans la lutte des classes, plutôt que de s’appuyer sur des actes individuels de résistance. Avec l’annulation de l’arrêt Roe vs Wade, les gens feront ce qu’il faut pour avoir accès à l’avortement, y compris en utilisant les réseaux clandestins, les fonds pour l’avortement et le crowdfunding des amis et de la famille. Mais le fait de se concentrer uniquement sur l’aide mutuelle plutôt que de construire une lutte de masse ne suffira pas à faire revenir l’avortement comme un droit légal dans ce pays. Seule la lutte de masse peut le faire. Cela signifie des manifestations et des protestations de masse, des arrêts de travail, des actions directes et des grèves. Nous pouvons nous inspirer des mouvements féministes historiques en Amérique latine et en Irlande.
Le féminisme libéral a prouvé sa faillite totale. Se battre pour nos droits et reconquérir ceux que nous avons perdus exige de se battre en faveur d’un féminisme socialiste. Nous avons besoin d’un nouveau parti pour les travailleurs, les femmes, les personnes LGBTQIA+ et toutes les personnes opprimées, qui se base sur les mouvements sociaux et se bat sans ambiguïté pour nos intérêts.
Ce n’est que sur la base d’une lutte sans faille des jeunes, des travailleurs et de tous ceux qui sont opprimés par ce système brutal que nous pourrons mettre un terme à l’escalade dangereuse de la droite.

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[EN ACTION] Solidarité avec les mobilisations pro-choix aux USA ! Notre corps, notre choix !

Ce samedi, à l’appel du PSL/LSP, de la Campagne ROSA (résistance contre l’Oppression, le Sexisme et l’Austérité) et de la Marche Mondiale des Femmes, un rassemblement de solidarité avec les luttes pour défendre le droit à l’avortement s’est tenu devant l’ambassade des Etats-Unis à Bruxelles, avec également participation de la Gauche Anticapitaliste. Le texte qui suit est la prise de parole d’Anja Deschoemacker, du PSL/LSP et de la Campagne ROSA.
Au début de ce mois, une fuite a révélé que la Cour suprême des États-Unis a l’intention d’annuler l’arrêt Roe vs Wade, l’arrêt de 1973 qui empêche les États d’interdire ou de restreindre le droit à l’avortement.Aux États-Unis, des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue ces dernières semaines – nous sommes ici pour nous joindre à leur protestation. Nous voulons que tout le monde entende notre cri de guerre : notre corps, notre choix !
La Cour Suprême peut prendre sa décision à tout moment entre maintenant et la mi-juillet. Lorsque cette position sera adoptée, de nombreux États suivront l’exemple du Texas, 13 États seront concernés par une interdiction totale et jusqu’à 25 ou 26 États verront le droit à l’avortement fortement restreint.
C’est une catastrophe, déclenchée par les partisans de Trump, mais contre laquelle les Démocrates ne se battent pas. La promesse de Biden de codifier Roe v Wade – une promesse démocrate vieille de 50 ans ! – était une promesse vide, comme beaucoup de ses promesses !
Cela montre à nouveau que nous ne pouvons compter que sur nos propres actions, notre propre mobilisation et la construction d’un mouvement par en bas jusqu’à la victoire !
C’est ainsi que le droit à l’avortement a été remporté en Irlande en 2018, en Corée du Sud en 2019, en Argentine en 2020, au Mexique en 2021, en Colombie en février de cette année. Il est hors de question que nous acceptions de revenir 50 ans en arrière dans l’histoire des États-Unis !
Si cela se produit, cela incitera les régimes réactionnaires du monde entier à suivre l’exemple des États-Unis. La Campagne ROSA et Alternative Socialiste Internationale (dont le PSL/LSP est la section belge) se battront aux États-Unis et ailleurs pour empêcher que cela ne se produise.
Aujourd’hui, c’est la Pride. L’arrêt Roe vs Wade aux Etats-Unis était basé sur le droit constitutionnel à la vie privée. Ce n’est pas seulement une décision qui garantit le droit à l’avortement, mais la base de toute une série de droits qui impliquent l’autonomie corporelle des individus, le droit de décider nous-mêmes de ce que nous faisons de notre corps. En tant que tel, il sert également de base à toute une série de droits en faveur des personnes LGBTQIA+ qui sont aujourd’hui menacés.
Nous sommes donc dans le même bateau. Ce n’est qu’en nous joignant les uns aux autres pour lutter contre toutes les discriminations et oppressions, pour les droits de tous à l’autonomie corporelle, pour les droits de tous à un niveau de vie décent afin de permettre un véritable choix sur nos vies et nos corps – ce n’est qu’en faisant cela que nous pourrons combattre ces réactionnaires.
la Campagne ROSA et le réseau ROSA International Socialist Feminists ainsi qu’Alternative Socialiste Internationale ne comptent pas sur les soi-disant progressistes de la classe des milliardaires. Tout comme les Démocrates aux Etats-Unis, les libéraux, les sociaux-démocrates et les verts belges sont heureux de défendre nos droits du bout des lèvres, mais ils ont rapidement abandonné la revendication d’un avortement légal jusqu’à 18 semaines en échange d’un poste au gouvernement. Cette histoire s’est répétée tant de fois que toute surprise à ce sujet est en fait un signe de naïveté.
Nous soutenons aux Etats-Unis – et ailleurs – le droit à l’autonomie corporelle des femmes et des personnes LGBTQIA+. Nous exigeons l’accès à tous les droits reproductifs et à l’assurance maladie pour tous afin que ce droit devienne une réalité pour tous et pas seulement pour ceux qui peuvent payer. Nous exigeons des services de garde d’enfants et d’éducation gratuits et de haute qualité, financés par le public, afin que le fait d’avoir des enfants ne nous appauvrisse pas.
Nous nous battrons pour tout cela et nous espérons que vous nous rejoindrez dans ce combat. Mais la situation aux Etats-Unis montre comment les lois et les droits progressistes qui ont été gagnés par les luttes de masse intenses du passé peuvent être inversés tant que le contrôle de l’Etat et de l’économie reste aux mains de la classe des super riches, la classe capitaliste.
La Campagne ROSA et Alternative Socialiste Internationale s’engagent donc dans une lutte à long terme, la lutte pour se débarrasser du système capitaliste qui repose de A à Z sur l’inégalité et s’est construit sur le colonialisme, l’esclavage et l’impérialisme, sur des normes de genre strictes en fonction de la recherche du profit, sur la division de la masse opprimée et exploitée de la population mondiale, les travailleurs et les pauvres.
Rejoignez-nous pour combattre cette nouvelle attaque contre les droits des femmes et des personnes LGBTQIA+. Et organisez-vous avec nous pour lutter pour un monde véritablement libre, dans lequel le sexisme, le racisme, la LGBTQIA+phobie ainsi que l’oppression nationale et religieuse seront devenus des fantômes du passé.

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L’invasion russe, produit de la nouvelle guerre froide, marque un tournant dans les relations géopolitiques

L’invasion russe de l’Ukraine s’inscrit dans le cadre du passage à une nouvelle ère. Plus encore que la pandémie, elle accélère de nombreux processus géopolitiques dont le facteur déterminant est la nouvelle guerre froide entre les États-Unis et la Chine.Par Fabian (Gand)
L’expansion croissante de l’OTAN vers l’Est depuis 1997 représente depuis longtemps une épine dans le pied du régime russe. En 2014, la tentative de stopper l’accord d’association entre l’Union européenne et l’Ukraine et d’obtenir une coopération plus étroite de l’Ukraine avec l’Union économique eurasienne a échoué. Le président ukrainien Ianoukovitch, favorable à Moscou, a ensuite été balayé par la révolte de l’Euromaïdan. Kiev s’est alors de plus en plus orienté vers l’UE et l’OTAN. Mais Poutine a maintenu la pression avec l’annexion de la Crimée et le soutien aux groupes séparatistes de Donetsk et de Lugansk. Pour comprendre l’évolution vers l’invasion brutale actuelle, nous devons toutefois examiner les tensions interimpérialistes croissantes dans une perspective plus large.
Les racines de la nouvelle guerre froide
Le capitalisme est sorti de la Seconde Guerre mondiale fortement discrédité par les dizaines de millions de morts et l’horreur du nazisme. L’affaiblissement des grandes puissances impérialistes européennes a posé les bases d’un monde bipolaire avec deux superpuissances : les États-Unis contre l’Union soviétique stalinienne. La crainte de bouleversements révolutionnaires – soutenus ou non par une invasion venue de l’Est – était omniprésente au sein de la bourgeoisie d’Europe occidentale. Face à la « menace rouge », les gouvernements britannique et français ont joué un rôle clé dans la création de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN). Son premier secrétaire général, le Britannique Hastings Ismay, n’a laissé aucun doute quant à l’objectif de cet instrument : « Garder les Américains à l’intérieur, les Russes à l’extérieur et les Allemands sous tutelle ». En réponse, l’Union soviétique a créé le Pacte de Varsovie avec les régimes staliniens d’Europe de l’Est.
Contrairement à la nouvelle guerre froide actuelle, il s’agissait d’un conflit entre des systèmes sociaux antagonistes. Malgré la nature non démocratique des régimes du bloc de l’Est, les bureaucraties staliniennes qui les dirigeaient dépendaient pour leurs privilèges et leur survie de l’existence d’une économie planifiée. Jusqu’à l’effondrement de l’Union soviétique en 1991, le conflit entre ces blocs restera le facteur dominant des relations internationales.
Les tensions entre les bureaucraties staliniennes de Russie et de Chine ont ouvert la voie à la coopération entre les États-Unis et cette dernière. Ce processus, initié par la visite du président américain Nixon à Mao en 1972, allait remodeler la politique mondiale. Les nouveaux liens économiques ont ouvert la voie à la transformation de la Chine en sa forme actuelle de capitalisme autoritaire, réglementé par l’État, sous un régime qui n’a de « communiste » que le nom. La relation entre les États-Unis et la Chine devenue « l’atelier du monde » grâce à sa main-d’œuvre bon marché a constitué le moteur de la période de mondialisation néolibérale, avec la création de « nouveaux marchés » suite à l’implosion de l’Union soviétique.
La grande récession de 2007-2009 a mis fin à la relation spéciale entre la Chine et les États-Unis. La Chine semblait moins touchée par la crise mondiale, tandis que l’impérialisme américain perdait de son influence et de sa force relative. Le programme stratégique chinois « Made in China 2025 », introduit sous Xi Jinping et visant à assurer le leadership et l’indépendance de la Chine dans les industries et les technologies clés, et l’initiative « Belt and Road » (les « nouvelles routes de la soie »), visant à développer des routes commerciales et d’investissement dominées par la Chine (regroupant plus de 100 pays sur tous les continents) ont provoqué un revirement majeur dans l’attitude des États-Unis. Cela a commencé avec Trump et certaines sections de la classe capitaliste. La raison était évidente : la Chine devenait de plus en plus un challenger dans le domaine économique et technologique. Elle finira par le faire aussi sur le plan militaire.
Les deux plus grandes économies du monde sont également les plus grands partenaires commerciaux l’un de l’autre. Pourtant, même avec Joe Biden, l’accent est resté sur le conflit géostratégique avec la Chine. L’accumulation d’antagonismes aujourd’hui est similaire à la dépendance mutuelle et à la concurrence qui existait entre la Grande-Bretagne et l’Allemagne avant la Première Guerre mondiale. Pour l’impérialisme américain, la menace qui pèse sur sa puissance mondiale est plus importante que les superprofits réalisés en Chine. La base de la nouvelle guerre froide est l’impasse du capitalisme et la crise de ces deux superpuissances. De prêcheurs de la mondialisation, ils sont devenus partisans du nationalisme pour tenter de sauver leur système et leur puissance.
Une fenêtre d’opportunité
L’impérialisme russe tente depuis des années de se frayer un chemin là où l’impérialisme occidental recule : en maintenant à flot le régime d’Assad en Syrie ou encore en envoyant des mercenaires au Mali et en République centrafricaine. Le Kremlin a également maintenu à flot le régime de Loukachenko au Belarus en 2021 et a contribué à écraser le soulèvement révolutionnaire au Kazakhstan au début de cette année.
Sur le front interne, le niveau de vie en Russie est désormais inférieur de 10 % à celui de 2008. Le régime a dû faire face à plusieurs mobilisations contre la corruption et en faveur de la démocratie. À cela s’est ajoutée l’incapacité du Kremlin à contrôler la pandémie. Un soulèvement réussi au Kazakhstan aurait rapidement inspiré des protestations en Russie et le régime a dû y intervenir.
Les stratèges du Kremlin y ont vu le moment d’inverser le processus d’érosion de la sphère d’influence de la Russie depuis les années 1990 et la chute du mur de Berlin. Certaines raisons ont donné à Poutine la confiance nécessaire pour agir maintenant. Il y a ainsi eu le retrait précipité des troupes américaines d’Afghanistan, quelques années seulement après que les États-Unis aient également dû reculer en Syrie et dans le contexte d’une concentration croissante des forces de l’impérialisme américain sur le conflit géostratégique avec la Chine. D’autre part, des forces centrifuges (dont le Brexit) ont prévalu au cours des dernières années dans l’Union européenne, qui a donné une impression de divisions internes. Enfin, plusieurs pays européens dépendent du gaz et du pétrole russes.
En cas d’échec des menaces, Poutine souhaitait imposer un changement de régime visant à forcer l’Ukraine à rester hors de l’OTAN pour que celle-ci limite ses activités dans les anciens pays du bloc de l’Est. L’OTAN s’est toutefois obstinée à vouloir utiliser la population ukrainienne comme bouclier.
Un mauvais pari
Outre la résistance farouche à l’invasion de l’Ukraine, Poutine a peut-être été choqué par l’unanimité avec laquelle « l’Occident » lui a imposé de lourdes sanctions et a envoyé des armes au gouvernement de Zelensky. Les sanctions sont sans précédent : refus de laisser les compagnies aériennes russes pénétrer l’espace aérien européen, confiscation de la moitié des réserves de dollars de la Russie, coupure des banques russes du système de paiement international SWIFT, interdiction des exportations vers la Russie de toutes sortes de marchandises, etc. Les bourses russes ont plongé et la valeur du rouble a chuté de 30 %. Ce ne sont toutefois pas les oligarques et Poutine qui vont en souffrir, mais le peuple russe. La bourgeoisie des pays de l’OTAN espère ainsi créer le terreau d’un soulèvement contre Poutine. Elle pourrait bien avoir l’effet inverse dans le sens où la réaction anti-occidentale de la population pourrait renforcer la position interne de Poutine.
Il y a également le risque que les sanctions déclenchent une profonde récession mondiale. C’est l’une des plus grandes craintes du régime chinois de Xi Jinping. Ce régime est confronté à de graves menaces économiques, telles que les bulles spéculatives dans le secteur de l’immobilier. La pression russe sur l’Ukraine semblait initialement convenir à Xi. C’était une distraction pratique pour garder l’OTAN occupée. Lors d’une visite de Poutine aux Jeux olympiques d’hiver en février, Xi a déclaré qu’il souhaitait un partenariat avec la Russie « sans tabou ».
L’escalade effective du conflit a contraint le régime chinois à prendre ses distances avec le Kremlin. La contradiction avec sa propre politique étrangère et la menace de déstabilisation économique sont trop grandes. Parallèlement, les sanctions ont de plus en plus isolé la Russie, la rendant plus dépendante du régime chinois.
Ayant en tête un changement de régime en Russie, les États-Unis veulent maintenant affaiblir au maximum l’armée russe en Ukraine, tout en poussant l’économie russe dans une crise profonde afin d’affaiblir l’allié potentiel de la Chine. Les conséquences pour le peuple ukrainien ne comptent pas dans ce calcul géopolitique. Outre le soutien militaire et financier, le Pentagone envoie également des informations sur les mouvements des troupes russes au gouvernement de Kiev. L’administration Biden met également à la disposition de Zelensky des équipes de relations publiques et de lobbyistes.
L’unité occidentale retrouvée contre l’ennemi commun reste cependant fragile. En dépit de la participation active des États membres de l’OTAN au soutien du gouvernement ukrainien, la prudence demeure. Une zone d’exclusion aérienne maintenue par l’OTAN au-dessus de l’Ukraine pourrait potentiellement provoquer une troisième guerre mondiale, qui plus est une guerre entre puissances nucléaires. Même la proposition polonaise de fournir des avions de chasse à l’Ukraine via les États-Unis s’est avérée être un pont trop loin.
Le sommet européen de Versailles a certes promis une aide militaire supplémentaire de 500 millions d’euros à l’Ukraine par le biais de la très cynique « facilité européenne de soutien à la paix », mais il n’a pas été unanime pour accélérer l’adhésion de l’Ukraine à l’UE ou pour interdire totalement le gaz et le pétrole russes.
Un militarisme nationaliste
Les gouvernements de plusieurs États membres de l’OTAN ont réussi à utiliser l’invasion comme un véritable choc pour augmenter sérieusement leurs budgets de défense (lire : de guerre). Le gouvernement allemand a décidé de porter ses investissements militaires annuels à 100 milliards d’euros. En Suède, le gouvernement veut financer l’augmentation des dépenses militaires en réduisant la sécurité sociale.
Le militarisme nationaliste devient un phénomène dominant dans la politique mondiale, parallèlement à la poursuite du découplage économique entre grands blocs économiques. La Russie, onzième économie mondiale, est en train de s’isoler presque complètement avec le retrait de multinationales comme Apple, Pizza Hut, BMW, etc. Le régime russe a été contraint de répondre par l’idée de nationalisations d’usines d’importance stratégique et veut interdire l’exportation d’équipements agricoles, électriques, médicaux et technologiques au moins jusqu’à la fin de l’année.
Le monde en est encore aux premiers stades d’une nouvelle guerre froide entre les deux grandes puissances impérialistes. Dans les années à venir, cette guerre entravera durablement l’économie, provoquera des crises politiques, formera et brisera des alliances, provoquera des conflits militaires et aura un impact sur la conscience de masse dans le monde entier. Partout, la politique gouvernementale sera de plus en plus déterminée par la nouvelle guerre froide. La lutte de classe internationale contre la guerre, associée à un programme social qui rompt avec les intérêts de profit des capitalistes, est la clé de la paix.
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Stoppons la guerre de Poutine !
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Solidarité avec la population ukrainienne !
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Pour le retrait des troupes russes !
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Soutenons les mobilisations anti-guerres en Russie !
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Construisons un mouvement de masse international contre la guerre et l’impérialisme !
[button link=”https://fr.socialisme.be/wp-content/uploads/sites/3/2022/03/2022-Tract-Ukraine-FR-3-mars-2.pdf” type=”big” color=”red”] => Tract en version PDF[/button]

« Non à la guerre en Ukraine ! Les troupes doivent rentrer chez elles. Construisons un mouvement anti-guerre sur les lieux de travail et dans les universités ! » C’est l’appel lancé par des activistes anti-guerre lors des protestations contre la guerre en Russie. Le syndicat libre des métallurgistes du Belarus a déclaré : « Nous nous opposons à cette confrontation entre régimes capitalistes, qui ne fait qu’entraîner la souffrance des travailleurs ordinaires. » L’Union indépendante des journalistes et des travailleurs des médias de Russie a déclaré : « Cette mesure incroyable ne peut que conduire à la mort de nombreuses personnes dans nos pays et à une destruction massive. Pour la majorité des gens, la guerre entraînera une hausse des prix, un effondrement économique et un appauvrissement dans l’isolement international. » Les autorités russes tentent de stopper les mobilisations anti-guerre par la répression. Nos actions et notre solidarité doivent les renforcer.
L’invasion de l’Ukraine est une catastrophe pour la population, qui souffre depuis des années d’une politique de précarisation des conditions de vie et de corruption. À présent s’y ajoutent la mort, la destruction et la nécessité de quitter son foyer et son pays. Les jeunes russes sont envoyés à la mort dans une guerre qu’ils n’ont pas demandé. Ni à l’Est ni à l’Ouest, on ne soutient l’escalade de la guerre et la menace de destruction. Alors pourquoi ce conflit ? Parce que l’élite dirigeante autour de Poutine a fait un calcul stratégique selon lequel il lui serait désormais possible de gagner du terrain par la guerre. Tout cela dans le contexte d’une nouvelle guerre froide entre la Chine et les Etats-Unis et d’un désordre international croissant. Les calculs géopolitiques des forces impérialistes signifient la mort et la misère pour nous, la classe travailleuse.
Le gouvernement belge s’est empressé de promettre des armes. Pour l’accueil des réfugiés, en revanche, il compte sur la solidarité de la population ordinaire. Cette solidarité ne fait jamais défaut ; il suffit de voir comment des travailleurs en Pologne se mobilisent clairement pour assister les réfugiés. Alors que la politique d’asile répressive aime à présenter les réfugiés comme des « profiteurs », la guerre en Ukraine démontre de toute évidence que personne ne fuit par plaisir. Le gouvernement belge doit immédiatement organiser l’accueil et l’assistance collective de tous les réfugiés.
Que pouvons-nous faire ? Espérer une solution diplomatique ? De la part des fauteurs de guerre qui dirigent le monde ? La guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens. C’est le fruit de la lutte pour l’influence et la suprématie politique et économique inhérente au capitalisme. La guerre ne sera pas non plus stoppée par une nouvelle escalade et la confrontation entre machines de guerre avec armes nucléaires. N’accordons aucune confiance dans l’impérialisme américain, l’UE ou l’OTAN, dont le rôle est ailleurs aussi dévastateur que celui de l’impérialisme russe aujourd’hui en Ukraine.
Non, nous ne pouvons pas compter sur les pyromanes qui allument des incendies partout à travers le monde. Nous devons construire nos propres mouvements de masse contre la guerre et contre le système qui la produit. Le maillon faible des calculs de Poutine, c’est la résistance des masses ukrainiennes et celle des masses en Russie. Les mobilisations en Russie peuvent faire tomber Poutine et son régime. Le peuple ukrainien doit pouvoir décider de son propre avenir, y compris le droit à l’autodétermination des minorités.
Est-il impossible de mettre fin à la guerre ? C’est la révolution russe de 1917 qui a rendu la Première Guerre mondiale intenable et la révolution allemande de 1918 qui lui a porté le coup de grâce. L’impérialisme américain a dû se retirer du Vietnam après des pertes militaires, mais surtout après le développement d’un mouvement anti-guerre de masse dans le pays. La mobilisation de masse est nécessaire, mais elle reste insuffisante. C’est ce que nous avons vu en 2003 lorsque des millions de manifestants ne sont pas parvenus à stopper la guerre en Irak. Mais l’entrée en action des masses combinée à l’arme de la grève et du blocage de l’économie, peut remettre en question non seulement la guerre, mais aussi l’ensemble du système capitaliste.
Vous souhaitez entrer en lutte contre la guerre ? Rejoignez-nous dans la construction des mobilisations anti-guerre ici et à l’échelle internationale. Le PSL/LSP est la section belge d’Alternative Socialiste Internationale (ASI) qui – dans plus de 30 pays et sur tous les continents – lutte pour une société socialiste sans guerre ni exploitation ni oppression.
- Stoppons la guerre en Ukraine ! Pour le retour immédiat de toutes les troupes russes dans leurs casernes en Russie ;
- Pour le droit des Ukrainiens à décider de leur propre avenir, y compris le droit à l’autodétermination des minorités ;
- Pour que les pays de l’UE prennent des mesures d’urgence afin de fournir des ressources, des logements et un soutien financier à la vague de réfugiés ;
- Aucune confiance envers « l’humanisme » des puissances impérialistes ni envers la diplomatie des fauteurs de guerre ;
- Construisons un mouvement de masse anti-guerre et anti-impérialiste unissant les travailleurs et les jeunes de tous les pays concernés ;
- Pour une alternative internationaliste des travailleurs aux conflits capitalistes conduisent à la guerre et à la destruction.

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La guerre en Ukraine en 6 questions et réponses anticapitalistes et socialistes

La guerre à un tournant crucial. Qu’en disent les marxistes ?
Editorial du journal Offensiv, de Rattvisepartiet Socialisterna (section suédoise d’ASI)
L’invasion de l’Ukraine par l’armée russe a déjà fait des centaines de morts et contraint des centaines de milliers de personnes à fuir. Le gouvernement suédois, avec le soutien de la droite, réagit en envoyant des armes et en s’enfonçant encore plus dans l’étreinte de l’OTAN.
Le week-end du 26-27 février a vu plusieurs tournants importants dans la guerre. De violents combats ont eu lieu et le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, a averti que 5 à 7 millions de personnes pourraient être contraintes de fuir. Poutine a menacé que la Russie dispose d’armes nucléaires. Les puissances occidentales ont en principe expulsé la Russie du monde financier. Le chancelier social-démocrate allemand, Olaf Scholz, a déclaré que les dépenses militaires du pays devaient être portées à deux pour cent du PIB, soit plus de 80 milliards d’euros.
L’UE donne au gouvernement ukrainien 450 millions d’euros pour acheter des armes. Un certain nombre d’autres gouvernements, dont la Suède, promettent des armes et des équipements militaires. Cela signifie que, pour la première fois depuis 1939, la Suède envoie des armes dans une guerre.
Des débatteurs sociaux-démocrates de gauche, comme Daniel Suhonen, évoquent l’idée que la Suède, comme la Finlande, pourrait rejoindre l’OTAN. Les changements se produisent en un clin d’œil, comme une gigantesque “doctrine de choc” – c’est-à-dire un événement majeur qui est utilisé pour faire passer un changement de politique drastique dans l’intérêt du capital. La gauche, le mouvement ouvrier et tous ceux qui sont contre la guerre ont besoin d’une discussion démocratique sur ces questions.
Qu’est-ce qui peut stopper les guerres ?
L’invasion russe n’a pas été aussi facile que Poutine l’avait espéré. L’opposition en Ukraine est massive, y compris les groupes de défense locaux. En Russie, les manifestations contre la guerre se sont multipliées, surtout parmi les jeunes. À Berlin, jusqu’à un demi-million de personnes se sont rassemblées contre la guerre.
La priorité pour le mouvement syndical et le mouvement anti-guerre au niveau international, ainsi que pour la gauche partout dans le monde, est d’apporter un soutien humanitaire au peuple ukrainien et un soutien maximal à la résistance en Russie. Le mécontentement à l’égard du régime de Poutine était largement répandu avant même la guerre. Historiquement, la guerre a été stoppée par des mouvements de masse, des révoltes et des révolutions, de la lutte syndicale de 1905 qui a stoppé la guerre avec la Norvège à la révolution russe de 1917 qui a conduit à la fin de la Première Guerre mondiale, en passant par la retraite des États-Unis du Vietnam où la résistance à la guerre aux États-Unis est devenue décisive.
Qu’est-ce qui a conduit à la guerre ?
Vladimir Poutine est un despote impitoyable, prêt à écraser toute opposition et à étendre sa sphère de pouvoir à l’Ukraine, au Belarus, à d’autres pays voisins et à des zones de guerre, comme en Syrie. Le régime de Poutine est le résultat de décennies pendant lesquelles le capital mondial s’est déchaîné librement. Le système stalinien s’est effondré et a été remplacé par des oligarques capitalistes. Pendant un temps, Poutine et l’Occident ont semblé coopérer. Pour les peuples de l’ancienne Union soviétique, cela s’est traduit par une réduction drastique du niveau de vie, notamment par une diminution de l’espérance de vie.
Dans le même temps, de nouvelles contradictions impérialistes se sont construites. Il s’agit d’une lutte mondiale pour le pouvoir – des batailles pour les zones stratégiques, les ressources et l’économie, ce que l’on appelle aujourd’hui la géopolitique. Le monde actuel est de plus en plus dominé, politiquement et militairement, par la nouvelle guerre froide entre l’impérialisme américain et l’impérialisme chinois. Poutine pensait que l’affaiblissement relatif de l’impérialisme américain après l’Irak, l’Afghanistan, la crise financière et la nouvelle guerre froide lui donnerait de l’espace, comme ce fut le cas en Syrie. Mais la guerre n’a pas évolué comme il le pensait et l’Occident a réagi plus durement. Sa campagne va donc s’intensifier.
La principale victime de la guerre est le peuple ukrainien, tandis que la responsabilité incombe au système capitaliste mondial qui a créé Poutine et le durcissement des contradictions impérialistes.
L’OTAN a-t-elle changé de nature ?
L’OTAN est l’alliance de guerre qui a bombardé la population de la capitale serbe Belgrade pendant plus de 70 jours en 1999, qui a également bombardé la Libye en 2011 et qui a mené la guerre en Afghanistan à partir de 2015. Ces efforts de guerre ont été cachés derrière des phrases sur la démocratie et la construction de la nation (même si le bombardement de Belgrade n’avait pas le soutien de l’ONU). Mais, tout comme en Irak, les bombardements n’ont pas réussi à ouvrir la voie aux droits démocratiques. Le résultat est le plus clair en Afghanistan, avec les talibans de retour au pouvoir et une population affamée. En Libye, les bombardements de l’OTAN, avec la participation de la Suède, ont abouti à l’écrasement de la révolte populaire.
L’OTAN est à l’origine de la course mondiale aux armements militaires, avec une augmentation drastique des dépenses militaires partout dans le monde. L’OTAN est dirigée par l’impérialisme américain et agit dans son intérêt. L’opposition à l’OTAN a été formulée au cours d’un long débat factuel au sein du mouvement syndical et de la société suédoise. Les socialistes combattent la guerre de Poutine et continuent en même temps à s’opposer à l’OTAN.
Les livraisons d’armes – suédoises ou d’autres États – garantiront-elles la paix et la liberté ?
Au cours des 12 derniers mois, les États-Unis ont envoyé des armes d’une valeur d’un milliard de dollars à l’Ukraine. Il y a maintenant des drones de la Turquie d’Erdoğan, des missiles d’Allemagne et des gilets pare-balles de l’armée suédoise. L’armée suédoise a déjà formé des soldats ukrainiens. Le Parlement finlandais et le Parlement danois ont décidé à l’unanimité d’envoyer des armes.
Le fait que les gouvernements envoient maintenant des armes à l’Ukraine ne se fait pas pour des raisons humanitaires. Nous en avons eu une démonstration éclatante en Afghanistan. Les opérations militaires ont été privilégiées pendant plus de 20 ans, avec des résultats dévastateurs.
Les armes envoyées aujourd’hui peuvent éventuellement ralentir l’attaque russe, mais rares sont ceux qui croient que cela peut décider de la guerre ; c’est plutôt une révolte contre la guerre chez soi en Russie, des protestations de masse au niveau international et un blocus mondial des travailleurs contre la machine de guerre de Poutine qui peuvent avoir le plus grand effet.
Il est peu probable que les puissances occidentales déploient des forces aériennes et des soldats, ce qui créerait une guerre majeure. Mais la pression s’accentuera pour une intensification des efforts.
Le fait que l’opinion publique soit massivement favorable à la fin des horreurs de la guerre signifie que les gouvernements peuvent, dans un premier temps, obtenir un soutien pour les livraisons d’armes à l’Ukraine. Ce soutien sera également utilisé pour investir encore davantage dans la Défense dans tous les pays et pour que la Finlande et la Suède rejoignent l’OTAN.
Les travailleurs et les pauvres ont-ils des intérêts communs avec les gouvernements, le capital et l’armée ?
L’État n’est pas neutre, il est en fin de compte un outil au service des intérêts de la classe dirigeante (les capitalistes). Les socialistes préviennent que des militaires et des policiers armés seront utilisés contre les luttes des travailleurs et les manifestations de masse dans leur propre pays.
La politique étrangère est la continuation de la politique intérieure. Malheureusement, plusieurs partis de gauche et de travailleurs au cours de l’histoire ont apporté leur soutien à la guerre et à l’intervention militaire, avec pour résultat qu’ils ont ainsi également légitimé la politique de droite et la dégradation sociale dans leur propre pays.
Le mouvement ouvrier a émergé dans la lutte contre le militarisme et la guerre. Le mouvement ouvrier suédois a réussi à stopper les plans de guerre contre la Norvège en 1905, en utilisant le slogan “A bas les armes”. Lorsque les dirigeants sociaux-démocrates ont promis la paix sociale (le soutien au gouvernement) pendant la Première Guerre mondiale, la gauche et le syndicat des jeunes ont répondu par une campagne contre la guerre.
Comment le peuple ukrainien doit-il se défendre ?
Le président Zelensky est un politicien populiste de droite qui ne représente pas les intérêts du peuple ukrainien. Son gouvernement a réduit les impôts pour les grandes entreprises alors que le niveau de vie de la plupart des travailleurs a continué à baisser. De nombreux Ukrainiens souhaitent une défense populaire, et des milliers de personnes se sont mobilisées, même avec des armes artisanales. Plusieurs vidéos montrent comment les gens ont appelé les soldats russes à ne pas tirer et ont fait rebrousser chemin à certains chars.
Dans la terrible épreuve à laquelle le peuple ukrainien est aujourd’hui confronté, malgré la nécessité, y a-t-il un moyen, par une lutte politique continue, de prendre les choses en main ? Les comités de défense qui sont maintenant nécessaires pour poursuivre la lutte afin de résister à ce qui apparaît comme une occupation russe exigent une organisation et une coordination démocratiques depuis la base. Une Ukraine dirigée par l’OTAN n’est pas une alternative démocratique ou équitable.
Pour un mouvement anti-guerre et anti-impérialiste contre la guerre
Pour les socialistes, même en temps de guerre, le point de départ est toujours ce qui profite aux travailleurs, aux pauvres et aux gens ordinaires. Les meilleures traditions du mouvement ouvrier sont de résister à la guerre et au militarisme, d’avoir une ligne indépendante – de ne pas s’allier avec la droite, le capital et l’État.
Indépendamment de l’évolution de la guerre au cours de la semaine prochaine, tout et tout le monde sera affecté pour longtemps : la conscience, les relations de pouvoir et l’économie. Pour tous ceux qui sont contre la guerre, il est important d’analyser et de se mobiliser contre la guerre et le système capitaliste mondial.