Tag: Energie

  • Stop Tihange !

    Le 15 mars, une manifestation antinucléaire aura lieu à Tihange à l’appel de ‘‘Nucléaire, STOP!’’ et de ‘‘Aktionsbündnis gegen Atomenergie Aachen’’ (Aix-La-Chapelle). Quelques jours après le quatrième anniversaire de la catastrophe de Fukushima, ce sera là l’occasion pour les citoyens et les militants antinucléaires de rappeler les dangers qu’induit la production d’énergie nucléaire et de réclamer la mise en place d’une alternative énergétique.

    Par Clément (Liège)

    Des réacteurs obsolètes, source de danger.

    manif-huy-tihange-2015-web-e1422643819237Les sept réacteurs nucléaires belges ne datent pas d’hier. Mis en service entre 1975 et 1985, ils étaient initialement conçus pour avoir une durée de vie de 30 ans (1) selon des normes antérieures à l’accident de Three Miles Island (1979). En pratique, ces limites techniques d’utilisation pour raisons de sécurité sont très relatives aux yeux du patronat et de ses relais politiques. Ainsi, en 2003, la loi sur la sortie progressive de l’énergie nucléaire augmentait la durée d’utilisation des centrales de 10 ans. Puis, en 2012, le gouvernement Di Rupo portait celle du réacteur de Tihange 1 à 50 ans.

    Aujourd’hui, le gouvernement Michel propose de prolonger l’exploitation des réacteurs de Doel 1 et 2 jusqu’en 2025 (2)  (mise en service : 1975). Par ailleurs, la découverte en 2012 de microfissures dans les cuves des réacteurs de Doel 3 et Tihange 2 n’a donné lieu qu’à un arrêt temporaire de ces derniers, dont Electrabel souhaitait la réouverture dans le courant de l’année 2015.

    Basse empreinte écologique ou fort profit économique?

    L’argument selon lequel l’énergie nucléaire serait écologiquement neutre est un des poncifs du discours des entreprises du secteur de l’énergie, tandis que les autorités politiques ne cessent de souligner son faible cout et sa fiabilité. En réalité, ces deux arguments sont caducs.

    D’une part l’impact environnemental de l’exploitation de l’uranium est bel et bien réel : conséquences sanitaires (rejet radioactif dans les zones d’exploitation d’uranium), problème de l’élimination de déchets à la toxicité extrêmement longue et élevée, impact carbone du transport de l’uranium et de la construction des centrales, pollution des eaux dans les zones d’extraction,…

    D’autre part, la libéralisation de 2005 a permis à Electrabel d’accaparer un monopole de fait qui lui permet d’imposer des prix élevés sur un produit à faible cout de production. De ce fait, l’entreprise ne mise que sur le nucléaire (57% de la production en 2013) sans pratiquement investir dans les énergies renouvelables (7% en 2013) (3). Dès lors, cette dépendance est utilisée pour brandir le spectre de la pénurie lorsque le nucléaire est contesté.

    La production d’énergie doit profiter à tous !

    La mise en pâture de la production de l’énergie à de voraces multinationales ne peut amener que pénuries, hausse des prix, dangers écologiques et sanitaires. Cela ne profite certainement pas à l’ensemble de la population. Pour lutter contre la hausse des prix, la désorganisation de la production et aller de l’avant vers une production énergétique qui respecte l’environnement, le PSL défend la nationalisation et la création d’un secteur public de l’énergie démocratiquement contrôle et planifié par la collectivité.

    Dimanche 15 mars 2015 à 14 h à Huy, Avenue DELCHAMBRE

    1.    GREENPEACE. 25 ans après Tchernobyl, 1 mois après Fukushima http://www.etopia.be/sortiedunucleaire/IMG/pdf/dossier_presse_fr.pdf
    2.    Accord de gouvernement. Disponible à l’adresse : http://studioweb.lesoir.be/turnpages/accord/?&&&_ga=1.78898836.1203940237.1424390682#p=12
    3. https://www.febeg.be/fr/statistiques-electricite

  • Energie : de la libéralisation au black-out…

    PAKISTAN-ENERGY-ELECTRICITY
    Un black-out au Pakistan. Bientôt chez nous aussi ?

    Le secteur énergétique belge traverse un nouvel épisode de chaos. Cet hiver, seuls 3 des 7 réacteurs nucléaires du pays seront en état de fonctionnement, ce qui signifie une diminution de plus d’un tiers de la production d’électricité et un risque de ‘‘black-out’’. Autrement dit, une rupture d’approvisionnement en électricité du réseau.

    Par Baptiste (Nivelles)

    La raison ? Selon Electrabel et la secrétaire d’État à l’énergie Catherine Fonck (CDH), tout ne tient qu’à un imprévisible sabotage du réacteur Doel 4 durant le mois d’août, mettant ce réacteur hors service pour plusieurs mois. Pourtant, si l’on veut être complet, il faut ajouter à ce sabotage l’arrêt temporaire de Tihange 1 pour un entretien décennal et l’arrêt temporaire de Tihange 2 et Doel 3 pour cause de… fissures dans les parois des réacteurs. Pour ces 2 derniers, l’arrêt pourrait être définitif si l’on en croit les récents tests effectués par le centre de recherche nucléaire de Mol, qui démontrent une fragilisation importante des parois des réacteurs par des milliers de microfissures.

    Bref, cet ensemble tient plus de la déliquescence annoncée d’outils en fin de vie que d’un soi-disant ‘‘imprévu’’. Car pour ne rien oublier, les réacteurs de Doel 1 et 2, qui sont les plus vieux d’Europe, sont censés fermer en 2015 après 40 ans d’existence.

    Libéralisation = pénuries + hausse des prix + profits

    La réalité, c’est que la libéralisation de 2005 a offert le secteur énergétique au privé pour y asseoir ses profits au détriment des intérêts de la collectivité. Electrabel, principal producteur et fournisseur sur le marché belge abuse de sa position dominante pour imposer des prix élevés et assurer la pérennité de ses centrales nucléaires. Et malgré le vote sur la loi de sortie du nucléaire de 2003, les profits engrangés par Electrabel – sur lesquels la firme ne paye quasi pas d’impôts – n’ont pas servi à investir dans le développement des énergies renouvelables. Seul le nucléaire, meilleur garant des profits faciles, est envisagé, et peu importent les risques pour la population. C’est là la conséquence inévitable de la privatisation d’un secteur.

    Dans une telle situation de crise, un gouvernement qui défendrait un minimum les intérêts de la population aurait exigé que les profits réalisés par Electrabel ces dernières années soient utilisés pour être investis dans le développement d’alternatives. A la place, le gouvernement de droite en formation envisage de … prolonger la durée de vie de 10 ans des réacteurs de Doel 1 et 2, comme l’avait déjà suggéré le gouvernement de Di Rupo en 2012. Cette logique ne sert que les intérêts des multinationales qui se gavent de profits sans avoir à rendre de comptes à la société du danger que cela entraîne. Pour nous, cela ne génère que des pénuries, une hausse des prix et le chaos.

    Pour un secteur public de l’énergie !

    Pour éviter une rupture d’approvisionnement chaotique cet hiver aux heures de grande consommation, plusieurs possibilités ont été avancées. Il y a le recours aux groupes électrogènes, à des réserves stratégiques, aux prières météorologiques pour un hiver doux, à la ‘‘sensibilisation’’ des consommateurs,… et surtout à un plan de délestage qui n’est finalement rien d’autre qu’un black-out organisé. Certains pays comme l’Inde ou le Pakistan y ont d’ailleurs régulièrement recours. Le plan de délestage fourni par Elio devait identifier les zones à délester en priorité. Bien entendu, ce plan n’a pas tardé à soulever de nombreuses réactions, comme celle qui considère que les ménages Wallons et Bruxellois seraient plus pénalisés que les Flamands, etc.

    Ne nous faisons pas avoir par une bataille de répartition égale des pénuries, battons-nous contre les pénuries ! Le risque de black-out n’est pas un imprévu, c’est la conséquence de la libéralisation et de la privatisation du secteur de l’énergie ! Le PSL défend la nationalisation complète du secteur de l’énergie, comprenant la production, la distribution ainsi que le développement de nouvelles technologies. Un tel secteur public, sous contrôle démocratique des travailleurs et usagers, permettrait d’organiser le secteur de sorte à répondre aux besoins de manière respectueuse de l’environnement.

  • La crise en Ukraine : Une opportunité pour le lobby du gaz de schiste

    ‘‘Never waste a good crisis’’ disait Winston Churchill (ne jamais perdre l’opportunité d’une crise), une devise parfaitement comprise par les conservateurs et le monde patronal, notamment autour de la crise ukrainienne et des tensions grandissantes entre les États-Unis et l’Union européenne d’une part et la Russie de l’autre.

    Par Paul Murphy, député européen du Socialist Party (CIO-Irlande) et Tanja Niemeier

    La ‘‘sécurité énergétique’’ s’est fait une place de choix dans le débat public suite aux menaces de sanctions à l’encontre de la Russie et des potentielles représailles. Puisque Poutine et les autorités russes utilisent les ressources naturelles du pays et le géant énergétique Gazprom (premier exploitant et premier exportateur de gaz au monde) comme des ‘‘armes politiques’’, les autorités occidentales désirent accroitre leur indépendance énergétique vis-à-vis de la Russie, particulièrement dans le cas du gaz.

    En 2012, Gazprom représentait à elle seule 34% des importations de gaz naturel en Union européenne. L’an dernier, l’entreprise russe a livré un record de 162 milliards de mètres cubes de gaz en Union européenne et en Turquie, dont 86 milliards de mètres cubes ayant transité via l’Ukraine. Voilà qui illustre directement pourquoi l’UE a tant d’intérêts en Ukraine et à quel point les intérêts économiques occupent une place prépondérante dans ce conflit.

    Au cours d’une réunion avec Angela Merkel, le Premier ministre conservateur polonais Donald Tusk a d’ailleurs déclaré : ‘‘La question de l’Ukraine est celle de l’avenir de l’UE, de la sécurité de l’UE et d’une correction de la politique énergétique de l’UE. Nous ne pourrons pas à l’avenir répondre à de potentielles nouvelles mesures agressives de la part de Russie si tant de pays européens restent dépendants du gaz russe.’’

    La Pologne est l’un des plus fervents partisans du gaz de schiste. Actuellement, Gazprom est responsable de 60% du pays, mais certaines études estiment que la Pologne constitue le plus grand réservoir de gaz de schiste d’Europe. Pour stimuler le secteur et attirer les investissements étrangers, le gouvernement polonais a déjà annoncé que les entreprises d’extraction de gaz de schiste bénéficient de six ans d’exonération fiscale. Même le Premier ministre britannique David Cameron a déclaré qu’il fallait accepter l’exploitation du gaz de schiste, alors que la Grande-Bretagne est pourtant beaucoup moins dépendante du gaz russe.

    Les collectivités locales, les militants écologistes et les défenseurs des idées du socialisme sont résolument opposés à l’exploitation du gaz de schiste et à la méthode de la fracturation hydraulique. Les risques que cela représente pour la santé et l’environnement sont énormes et les preuves ne manquent pas. Cette méthode affecte l’eau potable, l’air, les sols et le climat, elle peut même favoriser les tremblements de terre et maintient par ailleurs la dépendance aux combustibles fossiles pour de nouvelles décennies. Et en plus du développement de ces techniques catastrophiques socialement et écologiquement, il est également question d’importer du gaz de schiste américain.

    Les conservateurs, les réactionnaires et les négationnistes du changement climatique au Parlement européen ne cachent pas leurs positions. Par exemple, le parti Pologne Unie (qui fait partie du groupe autour de l’UKIP britannique) a défendu une résolution affirmant que ‘‘Le gaz de schiste occupe une partie importante du marché nord-américain et a fait baisser les prix. Cela peut être reproduit en Europe pour garantir l’approvisionnement énergétique et améliorer la compétitivité économique.’’
    L’Union Européenne et les Etats-Unis sont en train de négocier un accord visant à créer la plus grande zone de libre-échange au monde, le Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP). Si cet accord devait être finalisé, il ouvrirait grand la porte à la fracturation hydraulique, ce que Barack Obama a ouvertement expliqué à Bruxelles en marge des discussions UE-USA portant sur les relations commerciales et la situation en Ukraine.

    Dans le cadre du capitalisme, la seule manière d’aborder une crise est la fuite en avant. Parvenir à de réelles solutions pacifiques au sujet de l’énergie nécessite de rompre avec la logique de profit et de cupidité de l’actuel système de production. Des investissements publics massifs doivent être réalisés dans les énergies renouvelables et dans la recherche scientifique et le secteur énergétique doit être nationalisé et placé sous contrôle et gestion de la collectivité. Sans cela, les intérêts des actionnaires primeront toujours sur ceux de la collectivité, au risque de courir droit à la catastrophe.

  • A propos de la réduction de la TVA, de l’énergie verte et de la nationalisation

    Analyse par Tim (Bruxelles)

    Fin novembre 2013, le gouvernement fédéral décidait de réduire la TVA sur l’électricité de 21% à 6% du 1 avril 2014 jusqu’à fin 2015. C’est surtout le vice-premier ministre Johan Vande Lanotte (SP.a) qui a fait pression pour obtenir cette réduction, même s’il n’était pas l’inventeur du concept : le PTB considérait effectivement cette idée comme un point crucial de sa politique énergétique depuis des années déjà. Mais pour le gouvernement cette réduction permettait surtout de permettre de reporter de 6 mois un franchissement de l’indice-pivot et donc de l’indexation des salaires et allocations de juin 2014 à décembre 2014 : un bon moyen d’économiser sur les salaires des fonctionnaires et surtout – plus important – de faire un nouveau cadeau aux entreprises.

    Quels effets sur un ménage ?

    En 2012, un ménage a en moyenne consommé pour environ 3.500 kilowatts-heure d’électricité en Belgique, selon Eandis, ce qui lui revenait à 837€ (1), dont 145€ de TVA (sur une base de 21%). Pour un ménage, la réduction de la TVA à 6% signifie donc en moyenne un gain de 104€ par an, à tarifs et consommation inchangés. Ce même ménage belge, selon les données de l’Enquête sur les Budgets des Ménages réalisée par la SPF-Economie, avait reçu 33.936€ de revenus nets en 2012 (2). Une indexation de ce montant revient donc à 678,72€ de plus par an. Un report d’indexation de 6 mois implique donc une perte de 339,36€, plus que trois fois l’économie issue de la réduction de la TVA sur l’énergie !

    De plus, le groupe d’experts réuni par la Banque Nationale afin d’étudier l’impact de cette mesure pour le gouvernement a également calculé l’impact de la mesure sur l’index pour les 3 années suivantes: 3 mois de retard en 2015 et 2 mois en 2017 et 2018! (3) Concrètement, à tarifs et consommation identiques, la TVA à 6% implique une perte de revenus 169,68€ en 2015 et de 113,12€ par an par la suite !

    Pour le gouvernement, cette mesure est temporaire et sera réévaluée fin 2015, et éventuellement alors retirée. Reste que cela aura assuré un retard considérable des indexations qui ne pourra plus être rattrapé par la suite. Au final, bien loin de gagner plus de pouvoir d’achat, la plupart des ménages se retrouveront perdants.

    Concernant les finances publiques, la mesure est évidemment également loin d’être indolore, car cela équivaut à une réduction des revenus publics. Le gouvernement avait misé sur deux facteurs pour équilibrer la perte : l’économie réalisée sur les salaires des fonctionnaires d’un côté, une augmentation des revenus des impôts grâce à la création d’emplois consécutive à la réduction des coûts de travail de l’autre. Mais le Groupe d’Experts de la Banque Nationale a dû tempérer ces attentes. Alors que le gouvernement espérait voir la création de 15.000 nouveaux emplois, les experts tablent au mieux sur 7.930. Et encore, les remarques à faire sont nombreuses quant à l’impact supposé de la réduction des coûts salariaux sur le nombre d’emplois. Cette logique est plus que douteuse au vu de l’échec de la politique de réductions des charges patronales appliquée ces dernières années concernant la création d’emplois. Mais quand bien même cette assertion serait vraie, la Banque Nationale a calculé que la réduction de la TVA n’aurait qu’un effet positif net de 52 millions € pour l’année 2014 (essentiellement sur base de l’économie réalisée sur les salaires des fonctionnaires). En 2015 par contre, l’impact serait largement négatif : une perte de 526 millions € et ensuite de 350 millions € environ tous les ans en 2016, 2017 et 2018 ! (4)

    Qui sort vainqueur de toute cette histoire ? En premier lieu, les entreprises. Le secteur privé ayant une masse salariale évaluée à 135 milliards €, le gain théorique obtenu par le report de l’indexation des salaires pourrait s’élever à 1,35 milliard €. Mais comme l’indexation des salaires du secteur privé dépend fortement des accords sectoriels des divers secteurs de l’économie, il est difficile d’estimer quel sera le gain réel. Le gouvernement a parlé d’environ 500 millions € (5). C’est un bien joli cadeau offert par le gouvernement au patronat.

    La TVA est une taxe asociale

    Cette ‘‘Taxe sur la Valeur Ajoutée’’ est la forme ultime de taxation asociale, qui touche le consommateur final d’un produit dans son sens général. Les entreprises peuvent récupérer la TVA qu’ils payent, ce coût ne doit pas être retiré de leurs profits. Et contrairement au précompte professionnel sur les salaires, la TVA ne varie pas selon la hauteur des revenus. Chacun est frappé au même taux, ce qui pèse bien plus lourdement sur les petits revenus. Le principe de base de la solidarité ‘‘les épaules les plus fortes supportent les charges les plus lourdes’’ est donc totalement balayé de la table.

    C’est pour cette raison que le PSL est par principe pour l’abolition de la TVA. La TVA constitue toutefois actuellement un des plus gros revenus pour les autorités : 26,6% des recettes fiscales. En 2013, pas moins de 26,7 milliards € étaient issus de la TVA, seul le précompte professionnel (l’impôt sur les salaires) dépasse ce montant et représente 40,8% des revenus fiscaux. En comparaison avec cela, les entreprises ont contribué pour 12,2 milliards € aux caisses de l’Etat en 2013, seulement 12,1% ! (6)

    Abolir la TVA implique d’instaurer une alternative. En Belgique, le travail contribue déjà très fortement aux finances du gouvernement, voyons plutôt comment mobiliser les énormes richesses dont dispose l’élite au sommet de la société. Dans le cas contraire, l’abolition ou la réduction de la TVA signifie de sabrer dans les budgets des services publics et de la sécurité sociale (7).

    Tout comme l’imposition des grandes fortunes ou des superprofits des grandes entreprises, la discussion sur l’abolition de la TVA se heurte directement aux limites du capitalisme. Aussi longtemps que les moyens de production et la plus grande partie des richesses produites sur la planète resteront aux mains d’une infime minorité, cette dernière utilisera tout son pouvoir et son influence pour bloquer chaque tentative de changer la situation. Une vaste réforme fiscale conduira immédiatement à discuter de la nationalisation du secteur financier, du contrôle des transactions financières et du processus de décision quant à ce qu’il convient de faire avec les richesses de la société.

    Tarifs de l’énergie et contrôle des prix

    Mais doit-on pour s’en prendre aux tarifs de l’électricité réduire la partie du tarif dévolue aux caisses de la collectivité ? Que faire des profits gigantesques et des coûts élevés exigés par les producteurs et distributeurs d’électricité ? Comment faire face au chantage d’entreprises comme Electrabel dans le cadre des prix de l’énergie et du nucléaire ?

    Une chose est certaine : les tarifs restent bien trop élevés malgré toutes les mesures décidées par le gouvernement et de plus en plus de familles n’arrivent plus à payer leurs factures d’électricité pour subvenir à leurs besoins de base. En 2012, plus de 80.000 ménages ont été éjectés de leur fournisseur d’électricité à cause d’un retard de paiement, ils payent maintenant leurs factures directement au distributeur, à des taux plus élevés. 106.000 autres ménages ont conclu un plan d’étalement de leurs factures. (8) En Flandre, 44.000 ménages sont vus placer un compteur à budget à leur domicile. En Wallonie, il s’agit même de 112.000 ménages (9)! A Bruxelles, le système n’existe pas, et un fournisseur d’électricité a moins de possibilités de se séparer de ses clients, mais cela ne signifie pas que les factures ne représentent pas un problème majeur. En moyenne, un ménage belge dépense 5,77% de son budget pour l’énergie, mais parmi les 25% les plus pauvres, le taux est de plus de 10% (10).

    Pour les actionnaires des entreprises du secteur énergétique, par contre, la fête est permanente. Après des années de profits record (1,2 milliard € en 2011, 48% de plus qu’en 2010 (11)), Electrabel a étonné amis et ennemis en annonçant une perte de 105,7 millions € pour l’année comptable 2012, la première perte annuelle dans l’existence de l’entreprise (12). Dans l’enchevêtrement complexe de filiales, de décomptes internes et de transferts de moyens entre structures, impossible de savoir quelles étaient exactement les données pour la Belgique, mais Electrabel a néanmoins fait comprendre que cette perte était essentiellement causée par de moindres revenus en France, en Allemagne, en Angleterre et au Pays-Bas tandis que les revenus étaient en hausse en Belgique.

    Electrabel a dénoncé des mesures prises par les autorités l’année dernière, comme la taxe nucléaire de 480 millions € que l’entreprise a dû payer pour la prolongation des centrales nucléaires et la réduction des prix d’énergie décidée par le gouvernement en 2012. Electrabel ne parle par contre pas du fait que la rente nucléaire est déductible de ses impôts et que l’entreprise n’a payé en 2012, grâce à une comptabilité fiscale créative, que 12,5 millions € d’impôts : un taux d’imposition de… 1,05%. Souvenons-nous que le taux officiel pour les entreprises est de 33,99%.

    Electrabel est restée silencieuse sur d’autres sujets lors du dépôt de ses comptes annuels. Mi-février 2014, il est apparu que l’entreprise avait transféré toute une série de moyens vers sa société-mère, GDF-Suez, de manière tout à fait clandestine. Electrabel a acheté son gaz chez son holding au prix fort, ce qui permettait à l’entreprise d’inscrire une perte virtuelle dans ses comptes et donc de ne pas payer d’impôt en Belgique (13). Les communes belges, actionnaires historiques, se sont également fait avoir : suite au manque de bénéfices, elles n’ont pas reçu de dividende. L’entreprise pratique donc systématiquement l’évasion fiscale (voire même la fraude fiscale), facture trop cher son énergie et trompe ses actionnaires publics.

    Comment éviter tout cela tant que l’entreprise reste aux mains d’actionnaires privés – souvent étrangers – qui ne regardent que les dividendes qu’ils reçoivent fin d’année ? Le gouvernement prétend livrer une guerre héroïque à Electrabel et à son holding français GDF-Suez. Il refuse toutefois de remettre en cause la propriété privée du secteur et se montre régulièrement incapable de réagir face aux abus. La construction frauduleuse créée par Electrabel en 2012 était ainsi déjà connue du gouvernement en septembre 2013. Les ministres compétents – Wathelet et Vande Lanotte – n’avaient aucune idée de la manière de s’attaquer à l’entreprise et ont décidé de se taire.(14) Visiblement, ‘‘s’en prendre à Electrabel’’ n’est une priorité que si cela paie électoralement…

    Energie verte et sortie du nucléaire

    Les grands producteurs d’énergie ne sont pas du tout pressés de réaliser les investissements nécessaires dans l’énergie renouvelable ou de collaborer à la sortie du nucléaire. Pour les capitalistes, les investissements ne sont intéressants que dans la mesure où ils rapportent un rendement à court terme. L’énergie renouvelable ou la sortie du nucléaire ne représentent aucun intérêt pour les multinationales actives dans le secteur énergétique belge.

    Elles utiliseront chaque moyen à leur disposition pour éviter d’être forcées à changer de politique. Suite à la catastrophe de Fukushima, le nucléaire a été remis en question partout à travers le monde. En Belgique, par contre, le ‘‘Forum Nucléaire’’ a lancé une campagne médiatique massive sous le nom ‘‘le nucléaire émet-il du CO2 ?’’ Ce Forum a été créé à l’instigation d’entreprises et d’organisations ayant un intérêt direct dans le nucléaire, comme Electrabel, Agoria, Luminus, Synatom et Tractebel (15) et ses campagnes visent à convaincre la population que le nucléaire est sûr, propre et bon marché. Les informations diffusées sont soit à moitié vraies, soit totalement douteuses (16). Ce n’est qu’un instrument de propagande pour les producteurs d’électricité. ‘‘Si nous n’avons pas honte de le penser, nous ne devrions pas avoir honte de le dire’’, aurait rétorqué Cicéron.

    Parfois, ce n’est même pas encore assez. En 2012, Electrabel a décidé de fermer deux centrales (Ruien, Flandre Orientale, et Les Awirs, Liège) au moment où le manque de capacité de production d’électricité en Belgique était au centre de l’attention publique. Cette décision était d’autant plus remarquable qu’Electrabel avait publié un rapport quelques semaines auparavant pour avertir de possibles coupures à partir de 2014 à cause de la politique de taxation et de sortie du nucléaire du gouvernement. Electrabel pratique ici la tactique de la ‘‘prophétie auto-réalisatrice’’ : d’abord réduire la capacité de production pour ensuite défendre que la production ne peut être garantie dans le pays sans postposer la sortie du nucléaire.

    Les nouvelles entreprises qui s’orientent spécifiquement sur l’énergie verte n’échappent pas non plus aux limites de l’économie de marché. Ces entreprises ont besoin de vastes capitaux pour démarrer, et elles ne peuvent être rentables qu’à long terme. Les nouvelles technologies durables réclament beaucoup d’investissements, mais les investisseurs ne vont pas se précipiter sans garantie d’une forte rentabilité. L’entreprise d’énergie verte ostendaise Electrawinds, faute d’investisseurs privés, s’est ainsi tournée vers le soutien du secteur public, ce qui a rapporté 137,5 millions € (17). A côté de cela, des particuliers ont été séduits par de fausses promesses et plus de 4.000 ménages ont investi leur épargne à travers la coopérative ‘‘Groenkracht’’ à hauteur totale de 18 millions € (18). Test-Achats avait également motivé les particuliers à investir (19). L’entreprise semblait avoir le soutien d’une longue liste d’entreprises publiques et le ministre Johan Vande Lanotte (SP.a) était même président de l’entreprise.

    Mais l’entreprise n’est pas parvenue à atteindre ces belles perspectives. Fin 2013, elle est arrivée dans le rouge et, très vite, il est apparu que les grands investisseurs avaient en fait participé à une spéculation douteuse, tant avec Electrawinds qu’avec la ‘‘coopérative’’ Groenkracht. Tous ont cherché en premier lieu à remplir leur portefeuille et à garantir leur rentabilité. L’entreprise est aujourd’hui petit à petit démantelée, et les parties les plus rentables sont rachetées par des investisseurs opportunistes.

    Même dans un secteur si important, le capitalisme continue à se heurter à ses propres contradictions : de nouvelles technologies restent inappliquées puisqu’elles ne cadrent pas dans la stratégie de la recherche de profits à court terme. Un secteur énergétique privé est incapable de fermer les centrales nucléaires vieillissantes et d’opérer un changement massif vers des sources d’énergie alternatives.

    Quelle alternative ?

    Le PSL défend la complète (re)nationalisation du secteur de l’énergie : production, distribution, recherche et développement compris. En pratiquant cette nationalisation, il ne saurait être question d’indemnités pour les grands capitalistes qui possèdent ce secteur en grande partie, ce ne pourrait être le cas que pour de petits épargnants, sur base de besoins prouvés.

    Un secteur énergétique intégralement public aurait non seulement à gérer la production et la distribution de l’énergie, mais également à coordonner les investissements et la recherche scientifique vers de nouvelles technologies vertes. De l’énergie gratuite ou à très bon marché pourrait être garantie aux consommateurs tandis que les profits de l’entreprise seraient investis dans la recherche et le développement de l’énergie verte. Un plan pour la sortie du nucléaire pourrait être prévu au plus court terme possible, la production étant assurée par des investissements massifs dans les nouvelles technologies renouvelables.

    Ce scénario est irréaliste dans le cadre d’une économie capitaliste. Mais pour donner un autre élément : à travers les taxes, impôts et redevances, toute une série de moyens du secteur sont orientés vers les différents niveaux de compétences dans notre pays. Ce sont surtout les communes qui ont besoin de ces revenus pour garantir leurs services publics. Une nationalisation solutionnerait pas mal de chose de ce côté également.

    Cette discussion sur la nationalisation du secteur énergétique n’est en fait que le point de départ d’une discussion bien plus profonde sur le type de société que nous voulons. Le magazine Forbes a récemment publié son classement annuel des milliardaires : en 2013, 268 individus ont rejoint ce club distingué qui comprend maintenant 1.645 membres. Ces gens-là possèdent ensemble plus de 6.400 milliards $, soit plus que le PIB d’un pays comme le Japon (20). Il y a quelque temps déjà, Oxfam avait publié un rapport dénonçant la situation : 85 individus sur cette planète possèdent plus que la moitié de l’Humanité la plus pauvre (3,5 milliards de personnes). Le 1% des plus riches sur cette terre possède 110.000 milliards $, environ la moitié de toutes les richesses existantes. D’autre part, ce rapport a prouvé noir sur blanc que les riches sont devenus encore plus riches durant la crise et les pauvres encore plus pauvres (21).

    La mobilisation de ces richesses dans l’énergie renouvelable, dans l’enseignement, les soins de santé, les transports publics, la sécurité sociale, les sciences et les technologies pourrait provoquer une avancée sociale et technologique monumentale pour toute l’Humanité. Balançons dans les poubelles de l’Histoire ce système qui empêche cette avancée. Le capitalisme doit être renversé et remplacé par une société socialiste démocratique.

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    Notes

    [1] Données Eandis sur la facture moyenne des ménages belges en 2012: http://www.eandis.be/eandis/klant/k_4285.htm
    [2] ‘‘Enquête sur le budgets des ménages 2012’’ SPF Economie, PME, Classes Moyennes et Energiehttp://economie.fgov.be/nl/modules/publications/statistiques/arbeidsmarkt_levensomstandigheden/huishoudbudgetonderzoek_2012.jsp
    [3] Banque Nationale: ‘‘Note au Conseil de Ministres – Analyses des deux propositions de réformes : diminution de la TVA sur l’électricité et réduction de charges salariales dans des zones spécifiques’’, par le Groupe d’Experts ‘‘Compétitivité et Emploi’’ (GECE) – novembre 2013::
    http://www.nbb.be/doc/ts/publications/other/Report_GECE_November_2013.pdf, p. 10
    [4] Idem, p. 17
    [5] Voir l’interview du ministre Alexander De Croo http://www.deredactie.be/cm/vrtnieuws/politiek/1.1770487 (en néerlandais) De Croo prétend avoir trouvé ses chiffres dans la note du Groupe d’Experts de la Banque Nationale que nous avons déjà cité, mais nous n’y avons trouvé aucune référence à l’économie pour le secteur privé.
    [6] Il s’agit de tous les revenus du gouvernement Fédéral et des Régions. Données du ‘‘Memento Fiscal 2013’’, SPF Finances, http://finances.belgium.be/fr/binaries/MementoFiscal2013_FR_tcm307-216815.pdf
    [7] Les revenus de la TVA sont distribués par le gouvernement fédéral entre l’Union Européenne, l’Etat fédéral, les communautés et la sécurité sociale via une clé de répartition, ‘‘l’affectation’’.
    [8] http://www.dewereldmorgen.be/artikels/2013/12/04/btw-verlaging-op-energie-de-beste-sociale-maatregel
    [9] http://www.lavenir.net/article/detail.aspx?articleid=DMF20131009_00372406
    [10] Voir “La Précarité Energétique en Belgique”, rapport 2011 par l’ULB et l’UA: http://dev.ulb.ac.be/ceese/CEESE/documents/Energiearmoede_La_Precarite_Energetique_en_Belgique_rapport_final.pdf
    [11] http://www.sudinfo.be/445099/article/actualite/economie/2012-06-29/hausse-de-48-du-benefice-d%E2%80%99electrabel
    [12] http://www.lalibre.be/economie/actualite/perte-historique-pour-electrabel-en-2012-51b8fd31e4b0de6db9caa3bb
    [13] http://www.lesoir.be/470862/article/une/2014-02-17/belges-sont-ils-vraiment-dindons-farce
    [14] http://www.lalibre.be/economie/actualite/soupcons-d-evasion-fiscale-chez-gdf-suez-la-lettrede-vande-lanotte-a-crombez-53031f3335704ec4c3a65a84
    [15] http://forumnucleaire.be/fr/members
    [16] Sur la fausse affirmation du Forum Nucléaire vis-à-vis des émissions de CO2 du nucléaire (en néerlandais): http://www.deredactie.be/cm/vrtnieuws/buitenland/Klimaat/1.624882
    [17] Investissements par la Région Flamande (GIMV en PMV), Gouvernement Fédéral (FPIM) et la société
    prive-publique d’investissement DG infra+.
    [18] http://www.demorgen.be/dm/nl/12196/Autosalon-
    Brussel/article/detail/1751949/2013/12/04/Gezinnen-vrezen-lot-Electrawinds.dhtml
    [19] http://www.test-aanko op.be/invest/wat-met-groenkracht-s644670.htm
    [20] http://www.forbes.com/billionaires/
    [21] http://www.oxfam.org/sites/www.oxfam.org/files/bp-working-for-few-political-capture-economic-inequality-200114-summ-en.pdf

  • Réduction de la TVA sur l’électricité : au-delà des apparences

    Lors du dernier conclave budgétaire, le ministre Johan Vande Lanotte a eu une idée : une baisse de la TVA sur l’électricité, passant de 21% à 6%. Un cadeau de Noël anticipé pour les nombreuses familles qui croulent sous les factures d’énergie trop élevées, mais aussi un cadeau empoisonné, avec un retour de manivelle pernicieux.

    Par Tim (Bruxelles)

    On ne peut pas féliciter le ministre Vande Lanotte de faire preuve de créativité : l’idée d’une réduction de la TVA sur l’électricité n’est pas née du cerveau de l’Empereur d’Ostende, mais provient du PTB, qui considérait cette mesure comme étant de nature à lutter contre les tarifs trop élevés de l’énergie. La logique est différente chez Vande Lanotte et le gouvernement : eux considèrent la mesure plutôt comme un moyen de postposer l’indexation automatique des salaires : cette réduction de la TVA permet de reculer de 4 mois le prochain saut d’index. ‘‘Les profanes voient les apparences, les connaisseurs voient les astuces’’, disait l’écrivain chinois Jian Zilong. Et effectivement, si la réduction de la TVA doit rapporter entre 50€ et 100€ par an en moyenne à un ménage, cette même réduction causera une perte d’environ 500€ à cause du saut d’index retardé… Après que le gouvernement ait déjà chipoté plusieurs fois à l’index, il espère avec cette réduction de la TVA postposer un saut d’index jusqu’après les élections.

    En soi, au PSL, nous ne sommes pas opposés à une réduction de la TVA, encore moins sur l’énergie. La TVA est une taxe asociale, parce qu’elle touche plus durement les salaires les plus modestes en comparaison des salaires plus élevés. Le problème, c’est que le gouvernement ne prévoit pas de combler les baisses de recettes engendrées par cette réduction avec d’autres taxations plus correctes. Les 600 millions d’euros que le gouvernement perdra en TVA devront alors être trouvés ailleurs, avec de nouveaux assainissements dans les services sociaux et les services publics.

    Un réel contrôle des prix n’est possible qu’avec un contrôle de la production, et ceci vaut certainement pour l’énergie. La multinationale GDF-Suez Electrabel abuse de sa position dominante sur le marché pour demander un prix bien trop élevé, et a recours au chantage dans des dossiers comme l’abandon du nucléaire ou l’énergie ‘‘verte’’. Qui pourrait du reste garantir que la baisse de la TVA ne sera pas ‘‘compensée’’ par de nouvelles augmentations de prix de la part des producteurs ou distributeurs d’énergie ?

    C’est pourquoi le PSL défend depuis longtemps la nationalisation de tout le secteur de l’énergie, de la production à la distribution. Un tel secteur public pourrait organiser l’abandon du nucléaire sans conséquences négatives sur la production d’énergie, serait capable de réorienter les profits vers des investissements en énergies renouvelables, et réussirait également à réduire les prix jusqu’à un niveau abordable pour la majorité de la population.

  • Fukushima : Quelle gestion des conséquences du désastre nucléaire?

    Suite au dernier incident à la centrale nucléaire de Fukushima, Shinzo Abe, le premier ministre japonais, a écourté sa visite au sommet mondial du G20 à Saint-Pétersbourg pour se dépêcher d’aller à Rio De Janeiro, où se réunissaient les délégués devant décider de l’emplacement des Jeux Olympiques de 2020. Comme prévu, ils ont voté pour la candidature de Tokyo après qu’on leur ait assuré que les problèmes seraient résolus d’ici là et qu’il n’y aurait aucun danger de radiation ou de nourriture contaminée. Il y a cependant bien peu de chance que ce soit le cas étant donné les résultats obtenus par la compagnie privée, Tepco, depuis la catastrophe de février 2011.

    Pete Dickinson, Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles)

    A la fin du mois d’août de cette année, Tepco a annoncé que 305 tonnes d’eau radioactive s’étaient échappées d’un réservoir de stockage sur le site endommagé. Cet évènement a alors été classé en niveau 3, ‘‘incident sérieux’’, par les autorités de contrôle nucléaire japonaises, le niveau 7 étant le plus élevé, comme à Tchernobyl en 1986 ainsi qu’au début de l’incident de Fukushima. Pourtant, en novembre 2011, neuf mois après la fusion des trois réacteurs causée par le tremblement de terre et le Tsunami, Tepco avait alors déclaré que la centrale était étanche et que toute radiation avait été contenue. Suite à cette dernière fuite radioactive, la Corée du Sud a interdit toute pêche aux alentours de Fukushima, accusant les autorités japonaises de ne pas donner les informations appropriées sur la centrale.

    Tous les jours, 400 tonnes d’eau s’écoulent des montagnes dominants Fukushima et aboutissent aux réacteurs nucléaires endommagés. Cela a été fait délibérément afin de refroidir le cœur des réacteurs encore actifs. Ce procédé rendant l’eau radioactive, Tepco a alors décidé d’ôter l’isotope le plus toxique, le Caesium 137 et de stocker l’eau traitée, toujours radioactive, dans de grands réservoirs.

    Pour le moment, il y a 1.060 réservoirs contenant chacun 1.000 tonnes d’eau. Le problème est alors apparu lorsque l’on a découvert près des réservoirs un écoulement avec un haut degré de radiation, probablement dû à une fuite d’un de ceux-ci. Tepco y a en effet trouvé des trous dus à la corrosion, probablement causés par le haut taux de sel resté après que des millions de tonnes d’eau de mer aient été utilisés pour refroidir la centrale juste après le désastre initial.

    Les opérateurs ne savent toujours pas exactement ce qui s’est produit sur le site. Le combustible fondu est collecté un peu comme de la cire de bougie au fond des réacteurs mais il s’échappe maintenant de fissures de la tuyauterie et des machineries. Il est possible que cela ait aussi entièrement pénétré le récipient de confinement et ait également pénétré dans le sol, mais il n’y a aucune information à ce propos. Le plan à long terme est d’essayer de parvenir à retirer le matériau nucléaire des réacteurs endommagés pour éliminer la source même des radiations. De façon très ironique, cette opération très difficile est programmée pour l’été 2020, précisément au moment où les athlètes devraient arriver pour les Jeux Olympiques.

    Les experts avertissent : il pourrait être impossible d’extraire les matériaux toxiques

    Les experts mettent en garde qu’il est loin d’être certain qu’il soit possible d’enlever les matériaux toxiques. Le professeur Per Peterson, président du département d’ingénierie nucléaire à l’Université de Californie, à Berkeley, a expliqué que c’est probablement le récipient principal qui se corrode après avoir été exposé à l’eau salée et que la priorité devrait être de se débarrasser du sel pour stopper toute corrosion future. Si cela n’était pas fait ‘‘cela deviendrait un réel défi et il serait même impossible de retirer le combustible endommagé’’ a-t-il déclaré. Peterson a ajouté que, si le combustible ne peut être retiré, Tepco ‘‘devrait gérer ces centrales sur place pour des milliers d’années’’. Il n’existe actuellement aucun projet de la part de Tepco qui suive les conseils du Professeur Peterson. Il n’est guère étonnant de voir que les opérateurs nucléaires en Grande-Bretagne, comme EDF, essayent de s’assurer que le gouvernement prenne sur lui tous les risques potentiels avant de construire une nouvelle génération de centrales nucléaires.

    De son côté, malgré l’évidence claire que rien n’est sous contrôle à Fukushima, le gouvernement japonais a l’intention de rouvrir les centrales nucléaires fermées après février 2011.

    L’argument de dernier recours des défenseurs nucléaires est que, malgré la catastrophe de Fukushima, les radiations émises ne présentent aucun danger significatif. Les tentatives de sensibiliser l’opinion publique sur ce sérieux problème ont donné lieu à de grotesques conflits entre le gouvernement japonais et Tepco, mais les problèmes sont très sérieux. Au moment-même où se déroulait la course aux votes concernant l’emplacement des futurs Jeux Olympiques, Tepco a rendu public des données selon lesquelles les émissions radioactives seraient de 2.200 millisieverts par heure, un scénario très dangereux si une victime était exposée plus de quelques heures (La Commission internationale de protection radiologique conseille de ne pas recevoir une dose annuelle de plus d’1 millisievert, NDLR). Le président des autorités de sureté nucléaire japonaises a ensuite critiqué la compagnie disant qu’elle ne faisait qu’alarmer les gens, en prétendant qu’utiliser les unités de millisieverts par heure revenait à dire qu’elle ‘‘ décrivait le poids de quelque chose en utilisant des centimètres.’’

    Si cette déclaration est avérée, un tel niveau d’ignorance scientifique de la part d’une institution gérant des centrales est scandaleux. Les 2.200 millisieverts par heure sont une donnée correcte. Utiliser cette manière pour décrire les émissions de radiation permet d’obtenir une évaluation directe des risques sanitaires, alors que l’unité de référence utilisée par l’autorité de réglementation nucléaire, le becquerel, qui mesure le taux de radioactivité dans les eaux, ne peut elle pas être directement liée à des risques.

    La controverse concerne aussi le type de radiation communiqué. Tepco met en avant que la majorité des radiations sont de type beta, et que ces radiations sont bien différentes des dangereux rayons gamma. Cela ne signifie pas que les radiations beta sont pour autant sans danger. Il est vrai que cette radiation beta ne peut pénétrer dans le sol que de deux mètres et peut être stoppée avec de simples boucliers, mais les travailleurs présents sur le site et se trouvant à proximité des fuites seraient quand même en danger s’ils ne portaient pas d’équipement de protection en cas d’accident ou en ronde de surveillance.

    Au cours du dernier incident, la concentration de rayon gamma dans l’eau, le plus dangereux pour le public, était peu élevé. Des doutes significatifs existent toutefois au sujet des risques face à de bas taux de radiation. Par exemple, les estimations des données pour le désastre de Tchernobyl varient énormément à cause du manque de preuves claires concernant les victimes et du degré exact de radiation auquel elles ont été exposées.

    Aucune alternative à l’énergie nucléaire ?

    L’environnementaliste et chroniqueur du Guardian George Monbiot utilise une basse estimation des données afin de justifier sa position selon laquelle il n’y aurait aucune alternative à l’énergie nucléaire étant donné qu’elle ne produit pas de gaz à effet de serre causant le réchauffement global de la planète, ce serait donc un moindre mal dans la bataille contre le changement climatique.

    Et pourtant, il y a une alternative à l’énergie nucléaire et aux énergies fossiles : les énergies renouvelables – éolienne et solaire. Si les énergies renouvelables sont combinées à un large programme destiné à améliorer leur efficacité, tous nos besoins d’énergie pourraient-être rencontrés sans ‘‘que la lumière ne s’éteigne’’, en liaison avec une économie libérée du gaspillage énergétique et autres issu du chaos de la production capitaliste, ce qui nécessite une économie démocratiquement planifiée où les secteurs-clés de l’économie (notamment l’énergie) seraient nationalisés et démocratiquement gérés et contrôlés par les travailleurs et les usagers.

    Le désastre à Fukushima a été empiré en conséquence directe du rôle néfaste joué par l’entreprise privée Tepco. Pour cette firme capitaliste, rien ne peut venir entraver la course au profit, tout comme c’est d’ailleurs également le cas pour le gouvernement, aux ordres de pareilles compagnies. La gestion des dégâts issus de désastres nucléaires devrait être gérée par les travailleurs des centrales nucléaires, les collectivités touchées et l’ensemble de la société, démocratiquement représentée par un gouvernement des travailleurs et des pauvres.

  • Soudan : colère contre l’abolition de subsides pour le gaz

    Solidarité avec les travailleurs en lutte, les jeunes et les femmes !

    Les travailleurs, la jeunesse et les femmes opprimées sont sortis dans les rues du Soudan après que le régime tant haï d’el-Béchir (Front National Islamique) ait doublé les prix du fuel et du gaz de cuisine par l’abolition des subsides accordés auparavant. Les manifestants ont scandé des slogans comme ‘‘Le peuple veut la chute du régime !’’ et ‘‘Liberté, liberté !’’

    Par Halema, Socialist Party (CIO-Angleterre & Pays de Galles)

    La fin des subsides a aussi entraîné l’augmentation des prix de la nourriture. Les manifestants ont subi une répression violente des forces de l’Etat. La police a réagi en utilisant des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc. Jusqu’à présent, le régime a fait 60 victimes, et on ne compte plus les blessés. Dans les régions de Wad Nubawy, d’al-Thawra, et de al-Kalaklat, au sud de Karthoum, les manifestations ont été violemment réprimées par la police.

    Les manifestants ont été traqués par des voitures de polices pour ne pas qu’ils bloquent la rue principale d’al-Thawra. Des témoins disent avoir vu la police utiliser des balles réelles et des gaz lacrymogènes à Wad Nubawy et à al-Kalakat. Ils ont ajouté que des arrestations massives de jeunes ont eu lieu dans les quartiers sans que leurs parents en soient informés. Pendant 48 heures, Internet a été désactivé dans le pays.

    La situation des masses était déjà critique. Le taux de chômage atteint les 20%. Plus de 2 millions d’habitants vivent dans la pauvreté et on estime que 300.000 personnes n’ont aucun accès à l’eau potable et à la nourriture.

    Un régime répressif

    Le Front National Islamique de Béchir est un régime répressif de l’aile droite de l’Islam politique. A son accession au pouvoir en 1989, sa première initiative a été de décréter le Public Order Act (loi sur l’ordre public), créé pour opprimer les femmes. L’article 152 du Criminal Act autorise la lapidation des femmes. Cela accorde un pouvoir disproportionné à l’exécuteur, qui devient à la fois juge, juré et bourreau.

    Le 27 septembre, les syndicats des médecins et des avocats au Soudan ont appelé à une grève générale après la prière du vendredi.

    Les syndicats, les organisations d’agriculteurs et les étudiants doivent armer leur lutte contre les hausses des prix et exiger que les ressources et l’économie du pays soient placées dans les mains de la collectivité, et réclamer un gouvernement où seraient présents les travailleurs et les pauvres.

    Il est urgent de construire un mouvement de masse de la classe ouvrière qui réunisse tous les opprimés de la société.

    Un programme socialiste sera aussi essentiel pour la classe ouvrière et les masses oppressées pour commencer à résoudre les problèmes du Soudan que sont le sous-développement, les ravages de la guerre, l’endettement et la pauvreté (le revenu moyen est de 1$ par jour). Un tel programme proposerait des solutions durables aux divers conflits ethniques et religieux du pays.

    Pour le retour des subsides au gaz et aux prix d’avant leur annulation, pour la construction d’un mouvement de masse des travailleurs et des pauvres !

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