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Tag: Culture du viol
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Depp contre Heard – Pour le droit de prendre la parole !

Le procès intenté par l’acteur Johnny Depp contre son ex-épouse Amber Heard a fait couler beaucoup d’encre. On ne va pas refaire le procès ici. 12 faits de violence domestique ont été avérés par la justice en 2020 à Londres lors d’un précédent procès pour diffamation intenté par Depp contre le journal The Sun. Le verdict de juin, lui, ne se positionne pas tant sur cette question ; il dit surtout qu’Amber Heard n’a pas le droit d’en parler parce que cela porte préjudice à Depp… Il est stupéfiant de voir qu’un sujet si grave devienne une source de spectacle et à quel point le harcèlement de meute est banalisé. Parler c’est prendre le risque de se faire poursuivre en justice et se faire lyncher sur les réseaux sociaux. Quels que puissent être les torts des protagonistes, c’est inacceptable.Par Emily Burns
Justice spectacle, justice de classe
Dans la société capitaliste, tout devient marchandise, comme ce procès diffusé en direct, sans l’accord d’une des parties (Amber Heard). Ce procès ne s’est pas attardé sur les faits, mais sur la forme. La recherche de la vérité est devenue accessoire, à côté de la possibilité d’en faire un bon show de télé-réalité.
Il a généré une activité record sur les réseaux pour ce type de contenu. Sur tik-tok, les vidéos avec #JohnnyDeppIsInnoccent ont été vues 24 milliards de fois, 16 millions pour les # en faveur d’Amber Heard. Sur Twitter, ce sujet a été alimenté à 11 % par des bots (des faux comptes), soit 3 à 4 fois plus que la moyenne ; au même niveau que les élections ou les guerres. Un seul post d’un de ces bots a généré 20.000 partages en faveur de Depp. La justice spectacle est devenue une nouvelle manne d’argent pour les actionnaires derrière les réseaux sociaux ; leur but étant que l’on y passe le plus de temps possible pour augmenter leurs revenus publicitaires.
Idem avec Heard en pleurs sur Instagram ou les vidéos tik-tok avec ses sanglots en ont fait rire beaucoup, ça n’en reste pas moins du harcèlement de meute à un niveau inédit. Ne parlons même pas des commentaires… Inacceptable !
Victime imparfaite, victime jugée coupable
Bien qu’il s’agisse de 2 personnes extrêmement riches, comme souvent, elles n’agissent pas à armes égales. En plus de bénéficier d’une notoriété à toute épreuve, Depp a pu baser sa stratégie sur quelque chose auquel Heard, ni aucune femme, n’a accès : le sexisme ambiant dans la société. Combiné à une médiatisation extrême, ça s’est avéré particulièrement efficace. Au-delà du VictimBlaming, il s’agit de la stratégie DARVO (Deny, Attack, Reverse Victim & Offender : nier, attaquer, inverser victime et agresseur) employée pour changer l’opinion publique. Par exemple, Heard a été accusée sur les réseaux d’avoir attaqué Depp pour augmenter sa notoriété, or c’est Depp qui l’attaque pour diffamation.
De plus, Heard ne correspond pas à l’image de la victime que l’on se fait. De nombreux mythes entourent ce à quoi devrait ressembler une victime de violence et une personne autrice de celle-ci. La première doit être sympathique et s’exprimer sur ses malheurs en ne pleurant ni trop fort ni trop peu. Elle devrait aussi, en tout temps, avoir un comportement et une « moralité » irréprochable. Ainsi, 27 % des Européens considèrent les violences acceptables dans certaines circonstances…. Il serait dès lors normal de scruter, non pas les faits de violences supposés, mais bien qui est la victime, son comportement, dans les moindres recoins de son passé et de son intimité. De l’autre côté, l’auteur est imaginé avec une sale gueule et certainement pas comme un prince charmant.
Face à une victime imparfaite, un autre mythe voudrait que les violences commises et / ou la responsabilité de ces dernières soient partagées à parts égales. Cependant, les choses ne sont souvent pas aussi simples et les protagonistes n’agissent pas de manière égale.
Le droit de parler en question
Un procès pour diffamation s’attaque par définition à la personne qui se déclare victime. Depp VS Heard n’est pas d’un procès sur les violences domestiques, mais pour interdire d’en parler. Alors que le plus souvent on ne peut prouver les violences, un tel verdict pourrait empêcher les victimes de parler. Cinq ans après #MeToo, dénoncer le sexisme, c’est toujours s’y exposer… Malgré le déferlement de haine, si Heard a pu parler et tenter de se défendre, c’est grâce à ses moyens financiers. Une personne lambda victime de violence n’en aurait tout simplement pas eu la possibilité et risque d’hésiter avant de parler.
Sandra Muller qui avait lancé #BalanceTonPorc en 2017 en a aussi fait les frais. Elle a récemment gagné en cassation le droit de pouvoir dénoncer les violences sexistes dont elle a fait l’objet, après 5 ans de combat judiciaire. Lorsque les militantes de la Campagne ROSA ont qualifié les propos de Jeff Hoeyberghs de misogynes, elles ont également dû faire face à une plainte de ce dernier porté au parquet pour diffamation. Les 22 femmes qui accusent PPDA, l’ancien présentateur vedette de TF1, de viols et agressions sexuelles doivent également y faire face. Sans jugement qui établit une vérité judiciaire (et même avec, comme dans le cas de Depp VS Heard), on voudrait nous empêcher de parler. Face à PPDA, elles ne sont pas seules et ça fera une différence de taille. Certains essayent encore de qualifier cela d’hystérie collective; nous appelons ça la solidarité collective et elle fera une différence de taille !
Dénoncer le sexisme et les violences est crucial. Mais l’idée que cela seulement pourrait suffire est une erreur. Le procès Depp contre Heard a été l’occasion pour les réactionnaires de tous bords d’avancer et de propager leur haine de manière décomplexée. Il est impératif de s’organiser et de construire ensemble un programme social capable de faire face aux enjeux devant nous et de mettre enfin un terme aux violences sexistes.
Nous revendiquons :
• Pour des réseaux sociaux contrôlés et gérés par la collectivité. Ils sont de fabuleux outils de communication et d’information. Mais dans les mains du privé, ils construisent une vision caricaturale du monde qui se base sur et renforce les préjugés. Leur but au sein du capitalisme n’est pas la communication, l’information ou le divertissement, mais de générer des profits.
• Pour notre indépendance financière. La précarité double le risque de faire l’objet de violence sexuelle. Elle nous empêche de dénoncer et de nous extirper d’une situation violente.
• Pour un refinancement public massif de la justice et des soins de santé. L’immense majorité des magistrat.e.s (et policier.ère.s) ne sont pas formés aux particularités des violences sexistes. Il n’y a souvent pas de preuves et même lorsqu’il y en a, les analyses récoltées ne sont pas systématiquement réalisées faute de moyens. Ainsi, de nombreuses agressions par soumissions chimiques ne peuvent être prouvées faute d’avoir fait les analyses adéquates.
• Luttons pour une autre société, une société socialiste démocratique, qui permette à chaque personne de s’épanouir. -
L’oppression n’est pas un problème individuel, c’est l’ensemble du système qui est coupable !

Photo de solidarité du groupe de ROSA-Liège et contre la culture du viol L’actualité a été révoltante ces dernières semaines. À Liège, une féministe a été attaquée et blessée à coups de couteau. À Gand, une affaire de viol a donné lieu à des condamnations très légères sur fond de culpabilisation des victimes. En Angleterre, Sarah Everards, a été assassinée par un policier britannique et les manifestations fortement réprimées par la police. L’insécurité et à la culture du viol sont encore une fois d’actualité et provoque une vague d’indignation. La Campagne ROSA estime important de prendre le temps de discuter la stratégie à adopter dans la lutte contre le sexisme et la culture du viol.
Par Arne (Gand)
Des privilèges ou des droits à étendre à l’ensemble de la population ?
La lutte contre la culture du viol et les autres oppressions est plus largement dénoncée, c’est encourageant. Mais l’angle d’approche est souvent individuel. Certain.e.s activistes mettent en avant que nous ne pouvons lutter contre la violence sexiste qu’en éduquant les hommes. D’autres estiment que la seule cause d’un viol, c’est le violeur lui-même. D’autres encore, qu’il faut être suffisamment conscient des oppressions et discriminations. Et certains d’ajouter que certaines personnes ne peuvent de toute façon pas en être conscientes parce qu’elles ont le « privilège » d’être blanches, masculines, cisgenres ou hétérosexuelles.
Il est très important que la justice ne laisse pas sans réponses les agressions sexistes. Mais nous pensons important de questionner la société qui permet à une telle pandémie de violence sexiste de se poursuivre sans que de réels moyens soient déployés pour la combattre. Quelle est cette société qui produit tant de harceleurs et de violeurs ? Les hommes seraient-ils par nature de potentiels violeurs ? Selon nous, la culture du viol ne peut pas être réduite à une question de genre.
La culture du viol ce n’est pas une question d’ignorance masculine ou de quelques « pommes pourries ». La culture du viol et l’oppression sont liées aux énormes inégalités économiques croissantes et aux relations de pouvoir qui en découlent. Limiter la discussion au genre, c’est éviter la responsabilité de la politique et du système capitaliste lui-même.
D’où viennent la culture du viol et le sexisme ?
La culture du viol est activement entretenue. Les comportements machistes sont normalisés par la publicité, l’industrie pornographique. Trop souvent, nous y voyons de manière déguisée du harcèlement qui se termine par un viol. En achetant un certain parfum ou une certaine chemise, il serait possible à tout homme de séduire n’importe quelle femme. Ce type d’images entretient une incompréhension générale dans la société sur ce que signifie le consentement mutuel. Nous sommes constamment trompés à ce sujet. En outre, la sexualité est commercialisée et transformée en marchandise. Il suffit de penser à la publicité de la société “Rich Meet Beautiful” il y a quelques années : “Hé, les étudiantes, choisissez un meilleur style de vie : sortez avec un sugar daddy”. Les inégalités inhérente au système capitalistes, comme la position précaire des étudiantes, sont activement utilisées pour renforcer le sexisme.
Quelle stratégie la Campagne ROSA propose-t-elle ?
Le sexisme n’existe pas parce que des individus sexistes naissent chaque année, mais parce que la classe capitaliste l’utilise comme un outil pour nous diviser et augmenter ses propres profits. C’est un problème systémique. Combattre ce système signifie construire activement la solidarité entre tous les jeunes et les travailleurs. Nous devons réaliser qui sont nos alliés et qui sont nos ennemis communs. Nos motivations à construire une autre société seront sans doute parfois différentes, tout comme nos identités et nos sensibilités. Mais elles sont issues du même système, un système qui à besoins de nous diviser, des discriminations et qui se base sur notre exploitation.
Des couches de plus en plus larges de la population sont consciente du sexisme, comme des autres discriminations, et sont prêtes à se mobiliser. Ainsi, on voit fleurir de nouveaux slogans, banderoles, autocollants et autres. Après avoir identifié contre quoi nous nous battons, l’étape suivante consiste à savoir d’où vient l’oppression et pour quelle alternative nous voulons nous battre.
La Campagne ROSA défend un féminisme socialiste, c’est-à-dire que nous luttons pour une société fondamentalement différente, centrée sur les besoins de toutes et tous. Devenir « woke » (réveillé) et les différentes approches des politiques d’identité (tel que la théorie des privilèges) permettent de dénoncer un problème massif. Toutefois, elles laissent de côté les véritables responsables de l’oppression et ne visent pas à construire l’unité entre les jeunes et les travailleurs.euses. Il nous semble crucial de ne pas nous laisser diviser pour être capable de parvenir à de réelles victoires. Pour renforcer notre unité, le respect de chaque sensibilité est bien sûr une condition préalable. Ne nous trompons pas d’ennemi. Le système capitaliste a absolument besoin du sexisme pour perdurer, c’est aux capitalistes que le sexisme profite en premier lieu.
La Campagne ROSA tente d’impliquer le plus grand nombre possible de jeunes et de travailleurs.euses dans cette lutte. La meilleure façon d’y parvenir est de mettre en place un programme unificateur, qui profite à toutes et tous : des emplois et des conditions de travail décents, des logements abordables, des services publics plus nombreux et gratuits, des investissements publics dans les soins et l’enseignement, une réduction collective du temps de travail sans perte de salaire et avec des embauches compensatoire, un salaire minimum de 14 euros brute par heure et des allocations sociales au-dessus du seuil de pauvreté… Un aperçu plus complet est disponible sur CampagneROSA.be
Agir collectivement pour un tel programme permet de sensibiliser efficacement à toutes les formes d’oppression et permet de lutter pour de mettre fin au système dans lequel le sexisme et les autres formes d’oppression sont si fortement présentes.
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Continuons la lutte contre la culture du viol !

Manifestation du 8 mars à Bruxelles. En Belgique, 81% des victimes considèrent que la justice n’a pas joué son rôle face à une agression. Ce chiffre est colossal, d’autant plus qu’en matière de condamnation des agressions à l’encontre des femmes, la loi belge est relativement complète. En effet, depuis 2014, le harcèlement de rue est condamnable. Le viol quant à lui est un crime, en ce compris entre époux, et ce depuis 1989. Contrairement à de nombreux pays, le consentement en Belgique doit être explicite. La réalité nous tend cependant une image bien moins rose…
Par Nora (Liège)
Viols d’étudiantes de l’académie des beaux-arts : accusé acquitté
Un professeur âgé de 50 ans a été acquitté de faits de viol et d’attentat à la pudeur par le tribunal correctionnel de Liège, alors qu’il avait initialement été condamné par défaut. Aujourd’hui cet homme a été blanchi par la justice et ce malgré les preuves accablantes (photos, textos,…) ainsi que le témoignage de deux de ses victimes et d’une série de membres de l’Académie affirmant qu’il n’en était pas à son coup d’essai. Cet homme utilise depuis des années son statut de professeur au sein de l’Académie pour demander à certaines de ses étudiantes de réaliser des fantasmes prétextant le ‘‘lâcher prise’’ présent dans le milieu de l’art…
Le tribunal l’a malgré tout acquitté au bénéfice d’un doute relatif au consentement des victimes. Mais l’une des victimes explique que la justice semble confondre état de sidération et consentement. Malgré un contexte aussi révélateur que fait-on des lois mises en application afin de tenter de protéger les femmes victimes de violences ? Que fait-on de la loi relative au consentement qui affirme que celui-ci doit bel et bien être explicite ? Ces lois ne sont apparemment pas suffisantes.
Refusons la banalisation des violences envers les femmes !
Au-delà de l’académie, l’ampleur du phénomène indique clairement qu’il ne s’agit pas d’une multitude de cas isolés, mais d’un profond problème de société véhiculé par la culture du viol constamment imposée et instrumentalisée par le capitalisme. Les femmes sont considérées comme des citoyens de seconde zone. Au-delà de l’objectivation de leurs corps, elles se retrouvent bien souvent dans une position sociale inférieur – et à fortiori lorsqu’on est étudiantes (ou étudiants) avec des profs qui ont un impact important sur notre avenir professionnel – ce qui peut nous coincer dans une situation de violence. De même, les travailleuses, souvent plus précaires que leurs homologues masculins, peuvent difficilement quitter une situation de violence au travail sachant qu’il est difficile de trouver un nouvel emploi et que les conditions pour obtenir une allocation de chômage sont toujours plus restrictives. Le sexisme, comme le racisme, l’homophobie, la transphobie et toutes les autres formes de discrimination, nous divise dans les luttes pour une société qui pourrait répondre davantage aux besoins de l’ensemble de la population dans sa diversité.
Face à ce constat les luttes ont explosé ces dernières années et ce partout dans le monde. Ces mouvements changent profondément la façon dont les couches plus larges de la population considèrent le sexisme et les inégalités en général. Nous sommes forcés de constater que les lois sont certes nécessaires, mais elles sont loin d’être suffisantes pour un changement en profondeur de notre société. Lutter contre l’oppression spécifique des femmes passe par une lutte contre les bases matérielles de celle-ci : la précarité (bas salaires, manque de services publics…), le sexisme comme instrument pour faire du fric et nous diviser. Les revendications contre l’oppression des femmes rejoignent donc celles du mouvement des travailleurs et travailleuses dans son ensemble : lutter pour une société gérée collectivement et démocratiquement pour répondre au mieux aux besoins de toutes et tous.
- Luttons pour des investissements publics dans la prise en charge des victimes, pour un refinancement public du secteur social, pour des investissements publics dans la création de refuges pour les personnes qui en ont besoin, pour la formation des travailleurs de terrain.
- Luttons pour une réelle politique publique de prévention.
- Luttons pour l’indépendance économique des femmes, pour des emplois stables correctement rémunérés. Pour un salaire de minimum 14 €/h
- Luttons contre l’objectivation de la femme.
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État espagnol : Les violeurs de “La Meute” condamnés par la Cour suprême

“Ce n’est pas un abus, c’est un viol” et “Nous te croyons”. Mobilisation de la jeunesse contre la première décision de la justice, où les violeurs de la “meute” avaient été condamnés à des peines très légères. La contestation de masse a fait pression pour qu’un verdict différent soit rendu. Une victoire importante pour le mouvement féministe de masse
La Cour suprême espagnole a porté les condamnations dans l’affaire de la “Manada” (la meute) de Pampelune à 15 ans de prison pour les cinq coupables, ce qui représente une victoire importante pour le mouvement féministe de masse. La Cour a également clairement statué que la jeune femme de 18 ans avait été violée et qu’elle n’était donc pas seulement victime d’un abus sexuel, une accusation moindre.
Article de John Hird, membre du Comité pour une Internationale Ouvrière dans le Pays Basque.
Cette affaire scandaleuse s’est poursuivie pendant près de trois ans et a provoqué un mouvement de masse de femmes, et plus largement de la classe des travailleurs et de la jeunesse, dont les slogans “yo sí te creo” (je vous crois) et “no es abuso, es violación” (Ce n’est pas un abus, c’est un viol) se sont fait entendre à travers le monde.
L’affaire a mis en lumière non seulement les violences sexuelles subies par les femmes, mais aussi l’indifférence du système judiciaire rempli de juges réactionnaires aux vues sexistes et rétrogrades. Cela est particulièrement prononcé dans l’État espagnol, où la machine d’État est directement héritée du franquisme. Tous les juges qui ont participé à la décision d’accorder des peines moins lourdes aux violeurs de la Manada, ce qui les a maintenus hors de prison, devraient être révoqués et le mouvement ouvrier devrait exiger une révision complète de l’injuste système judiciaire espagnol. Il devrait être remplacé par un véritable système judiciaire géré par et dans l’intérêt de la classe des travailleurs et des opprimés, avec des juges élus et soumis au droit de révocation.
Une victoire pour le mouvement de masse
Il est clair que la “justice” espagnole n’a pas soudainement “vu la lumière” et corrigé une terrible injustice parce que le système “fonctionne”, comme le prétendent les politiciens. Non, l’establishment a vu les femmes et les travailleurs entrer en action dans un mouvement de masse, ce qu’ils redoutent. Ils ont réagi de la sorte pour éviter que des mobilisations encore plus importantes puissent voir le jour. Le mérite en revient à des groupes comme Libres y Combativas et le Sindicato de Estudiantes qui ont audacieusement appelé les jeunes à descendre dans la rue pour faire grève et manifester contre les verdicts initiaux, notamment lors de la grève générale massive des étudiants du 10 mai 2018.
C’est une grande victoire pour le mouvement de masse, mais de nombreux autres cas de violence contre les femmes existent dans l’État espagnol et les mobilisations et les campagnes doivent donc se poursuivre jusqu’à ce que le système judiciaire sexiste soit fondamentalement transformé de haut en bas. Il est également important de noter que cette victoire a été remportée malgré le rôle des dirigeants officiels du mouvement syndical, qui n’ont pris des mesures symboliques que lorsqu’ils y étaient contraints, en raison de pressions de la base devenues insupportables. Une gauche de masse et un mouvement syndical construit d’en bas avec une direction combative et révolutionnaire pourraient transformer totalement la situation et faire des victoires contre l’oppression, l’austérité et le capitalisme la dynamique dominante dans la lutte de classe.
Dans l’État espagnol, l’indignation face à la violence sexiste et à l’impunité dont jouissent les agresseurs de la part de la justice a occupé une place centrale dans l’émergence du mouvement de masse des femmes. Il faut reconnaître que la grande majorité de la violence envers les femmes se déroule à la maison, dans la famille. Des millions de personnes sont confrontées à ce cauchemard quotidien aggravé par les conséquences des mesures d’austérité.
Il existe d’importants parallèles avec d’autres pays, par exemple avec les manifestations #Ibelieveher (je la crois) en Irlande à la suite du procès très médiatisé du viol par des joueurs de rugby de Belfast, dans lequel le Socialist Party (CIO-Irlande) et ROSA, le mouvement socialiste féministe, ont joué un rôle clé.
Le mouvement dans l’État espagnol a été l’épicentre des mouvements des femmes à travers le monde, tant par son ampleur – des millions de femmes sont descendues dans la rue à plusieurs reprises – que par la manière dont l’action et la lutte de la classe ouvrière unie ont été mises en avant. Les deux magnifiques grèves générales féministes des 8 mars 2017 et 2018 en sont la preuve la plus significative : des millions de travailleuses et de travailleurs ont participé à des actions de grève et à des manifestations de masse. C’est d’une grande importance pour les féministes socialistes au niveau international, et cela montre la voie à suivre.
La réaction
Des politiciens réactionnaires critiquent ouvertement le nouveau verdict. Francisco Serrano, qui dirige le parti d’extrême droite VOX en Andalousie, a attaqué la décision de la Cour suprême en disant : “la relation la plus sûre entre un homme et une femme ne se fera que par la prostitution. Désormais, la différence entre avoir des rapports sexuels gratuits et les payer, c’est que le sexe gratuit pourrait vous coûter plus cher.” Plus tard, le porte-parole parlementaire de Vox dans la région de Murcie, Juan José Liarte Pedreño, a posté un message sur Facebook dans lequel il insultait la ministre de la Justice Dolores Delgado la traitant de “pute”.
La profonde polarisation politique de la société espagnole se reflète aujourd’hui clairement dans et à travers le mouvement de masse des femmes. En plus d’une rhétorique nationaliste espagnole enragée et anti-ouvrière, le parti d’extrême droite VOX défend un message fortement anti-féministe.
Le mouvement de masse qui a remporté cette victoire dans la rue ces dernières années doit rester vigilant et poursuivre la lutte contre la violence à l’égard des femmes, contre le système judiciaire injuste espagnol et contre tous les politiciens et juges réactionnaires. L’éradication du caractère réactionnaire des institutions étatiques espagnoles comme le pouvoir judiciaire ne peut être envisagée que sur base d’une rupture fondamentale avec le capitalisme et de la lutte pour le socialisme. Construire un parti socialiste révolutionnaire démocratique reposant sur la classe ouvrière et défendant le féminisme socialiste est une tâche cruciale qui nous attend.
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Irlande. #ThisIsNotConsent. Colère suite au blâme d’une victime dans un procès pour viol
La campagne ROSA en Irlande a appelé à un certain nombre d’actions suite à l’acquittement d’une homme pour le viol d’une jeune femme de 17 ans.
Article repris du Socialist Party (section irlandaise du Comité pour une Internationale Ouvrière), organisation à l’initiative de la campagne ROSA – Irlande« Est-ce que la preuve écarte la possibilité qu’elle ait été attirée par l’accusé et qu’elle ait été ouverte à rencontrer et à être avec quelqu’un ? Vous devez voir comment elle était habillée. Elle portait un string avec de la dentelle. »
Ces commentaires de l’avocate de la défense Elizabeth O’Connell dans un procès pour viol à Cork ont suscité l’indignation partout en Irlande et sur la scène internationale. L’avocate parlait d’une femme de 17 ans, et sans aucune objection de la part du juge. Ces remarques sont un exemple clair de l’utilisation de mythes sur le viol et du blâme des victimes en audience publique. Et ceci se produit alors que la majorité des viols et des agressions sexuelles ne sont déjà pas signalés et où seulement 10 % des signalements aboutissent à une condamnation.
Protestations dans toute l’Irlande
Sous le hashtag #ThisIsNotConsent, les femmes ont affiché des photos de leurs sous-vêtements. Des manifestations ont eu lieu dans différentes villes d’Irlande très rapidement. À Cork, 500 personnes ont marché jusqu’au palais de justice – où les commentaires ont été faits – beaucoup laissant des sous-vêtements sur les marches et les rampes de l’édifice. 500 personnes ont également manifesté dans le centre de Dublin, 250 à Belfast, 50 à Limerick et 40 à Galway. La plupart de ces protestations ont été lancées à l’initiative de ROSA – un mouvement socialiste féministe, initiative du Socialist Party.
Cette explosion de colère reflète le fait que, de plus en plus, les femmes et les jeunes ne sont plus prêts à accepter les reproches faits aux victimes et la misogynie omniprésente dans la société. En mars/avril de cette année, des milliers de personnes sont descendues dans la rue après l’acquittement de joueurs de rugby d’Ulster lors d’un procès pour viol à Belfast, où des tactiques similaires de blâme de la victime ont été utilisées. Un grand nombre de personnes ont participé activement à la campagne pour le referendum pour obtenir le droit à l’avortement en Irlande.
Il y a deux semaines, des employés de Google à Dublin ont quitté leur emploi pendant quelques heures dans le cadre d’une action mondiale contre le harcèlement sexuel. Ce dernier exemple montre le potentiel qu’ont les travailleurs de s’organiser sur leur lieu de travail pour lutter contre le sexisme, une question que le mouvement syndical doit prendre au sérieux.
Un string dans le Dáil (parlement irlandais)
Ruth Coppinger, élue parlementaire de Solidarity et membre du Socialist Party, a apporter cette discussion au sein du parlement lorsqu’elle a interrogé Leo Varadka, exigeant que le gouvernement prenne des mesures contre le blâme des victimes en montrant un string au sein de l’assemblée parlementaire. Il s’agit probablement d’une première dans l’histoire du Dáil. Et les caméras se sont rapidement éloignées de « l’objet offensant ». Cependant, comme Ruth l’a fait remarquer, si c’est incongru de montrer un string au parlement national, ce l’est encore plus pour des sous-vêtements utilisés devant un tribunal comme preuve contre une femme.
L’intervention audacieuse de Ruth a suscité une grande attention de la part des médias nationaux ainsi que les mobilisation qui ont suivi. Fait significatif, cela a également fait l’objet d’une couverture médiatique dans des pays aussi divers que la Nouvelle-Zélande, l’Australie, l’Inde, la Turquie, le Canada, les États-Unis (y compris le New York Times, Newsweek et CNN) et dans de nombreux pays d’Europe.
- Elle brandit un string devant le parlement pour en finir avec ce mythe sur le viol (article et vidéo sur le site huffingtonpost.fr)
Grève à l’occasion de la Journée internationale de la femme
Il existe un potentiel pour un nouveau mouvement autour de la question du blâme des victimes et de la violence sexiste. ROSA appelle à de grandes manifestations et à des grèves à l’occasion de la Journée Internationale de lutte pour les droits des femmes en 2019. Nous nous inspirons de l’exemple espagnol, où une « grève féministe » de 2018 a fait sortir des millions de personnes du travail et dans la rue.
Ce mouvement doit absolument revendiquer et lutter pour des changements tels que la formation obligatoire des juges et des jurys dans les cas de violence sexuelle et l’éducation au consentement dans les écoles. Toutefois, le cas de Cork n’est pas un exemple isolé. Le blâme des victimes et la misogynie sont endémiques dans le système judiciaire, dans l’État et dans la société en général dans un système capitaliste qui porte le sexisme et l’inégalité en son sein. Nous devons construire un mouvement de femmes, de jeunes, de personnes LGBTQI+ et de tous les groupes composant la classe des travailleurs autour d’un programme anticapitaliste et féministe socialiste – qui remet en cause ce système et toutes les injustices qu’il perpétue.
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Culture du viol : ‘‘Les femmes ne savent pas ce qu’elles veulent…’’ Bien au contraire !

Mobilisation contre la culture du viol dans l’Etat espagnol Cet été vibrera à nouveau au rythme de nombreux festivals. Des paroles de chansons qui banalisent le sexisme, voire même qui tentent de romantiser les agressions ; des hôtesses mal payées qui ont pour tâche ‘‘d’embellir’’ un stand, tout comme une œuvre d’art le ferait, sauf que les jobistes ne sont pas des objets ; des mains baladeuses qui devraient être ‘‘acceptables’’ dans un contexte festif, déjanté et alcoolisé, parce que ‘‘ce n’est pas méchant, et puis habillée comme ça…’’ ; des agressions sexuelles qui seraient quant à elles juste le résultat ‘‘des filles qui ne savent pas ce qu’elles veulent’’. La culture du viol prend de multiples formes.
Par Emily Burns, organisatrice de la campagne ROSA
“La victime aurait sa part de responsabilité”
Lorsqu’une femme est victime de viol, nombreux sont ceux qui passent au crible ce qu’elle portait. Selon une étude française, 4 sondés sur 5 considèrent que la victime a une part de responsabilité si elle a eu une attitude ‘‘provoquante’’.
Trop couverte, elle n’est pas une femme ‘‘moderne’’. Moins vêtue, elle cherche les problèmes… Si elle marche seule ou se fait raccompagner par la mauvaise personne, elle a manqué de prudence. Même s’il n’y a pas de transport public le soir et encore moins sécurisants. Sous influence d’alcool ou de drogue, elle a donné des signaux flous…
‘‘L’agresseur, il faut le comprendre…’’
Le sexe est souvent présenté comme un besoin vital au même titre que la respiration, ce qui impliquerait un droit absolu à celui-ci. Ce raisonnement peut mener à légitimer le viol, et davantage encore dans le cadre conjugal. Ainsi, en Belgique, la fédération des centres des plannings familiaux dénonce le fait que près d’un viol sur deux a lieu au sein d’un couple et qu’une femme sur quatre subit, à un moment ou à un autre, des violences sexuelles de la part de son partenaire.
Or, si nous avons en effet besoin de contacts humains, comme l’étayent de nombreuses études, une agression sexuelle ne répond pas avant tout à une pulsion. C’est un rapport de force, une domination totale sur l’autre. Comme l’explique l’ouvrage ‘‘le viol un crime presque ordinaire’’, ‘‘les viols en temps de guerre sont clairement identifiés comme des outils de domination et d’humiliation. Pourquoi, en temps de paix, seraient-ils réduits à un problème de pulsion sexuelle ? Les contextes sont différents, mais la dynamique de prise de pouvoir et la volonté de domination semblent être en jeu dans chaque agression.” (1)
La culture, miroir de notre société qui participe à la déformer
La culture dominante présente le corps des femmes comme un objet pour vendre tout et n’importe quoi. Des dessins animés où il faut sauver une princesse passive en détresse aux blockbusters et séries où l’héroïne ne sait pas ce qu’elle veut jusqu’à ce que le héros lui ‘‘apprenne la vie’’, en passant par des chansons dont les paroles sèment la confusion sur le consentement ; les expression de cette culture sont légions.
À peu près partout, on nous présente la femme (idéale?) comme une personne menue, fragile, avec une certaine dose de naïveté, qu’il faut sauver et qui trouve romantique qu’un homme dont elle a décliné les avances lui envoie encore et toujours des messages, des fleurs, lui téléphone malgré ses ‘‘non’’ répétés et l’attende devant chez elle. Dans la vraie vie, cela porte un nom : du harcèlement. Et cela n’a rien de flatteur ou de romantique, c’est juste flippant !
L’homme est, lui, valorisé pour sa force, il doit être musclé, sûr de lui et avec un côté bad boy (sinon c’est l’ami fidèle, l’éternel célibataire). La culture est imprégnée de cette idéologie selon laquelle l’homme doit exprimer sa ‘‘masculinité’’ au travers d’un rapport de force, avec des relations hommes-femmes nécessairement asymétriques, renforçant le sexisme et l’homophobie.
La culture du viol impacte le climat sociétal en se nourrissant des inégalités et en les renforçant en même temps. La culture est avant tout le reflet des rapports sociaux au sein de la société. Les inégalités n’ont jamais été aussi profondes : 1% de population détient plus de richesses que les 99% restant. Et, au sein des 99%, on essaye de nous diviser. Si les femmes gagnent en moyenne 20% de moins que les hommes et sont systématiquement surreprésentées parmi tous les groupes précaires dans la société, ce n’est pas parce que les hommes gagnent trop. C’est la conséquence de l’accaparement, par une minorité, d’une majorité des richesses.
La précarité augmente les risques d’agression : la probabilité est deux fois plus élevée pour une femme pauvre de se faire violer, trois fois plus pour une personne handicapée. Et la position de second plan des femmes dans la société a un impact immédiat sur la manière dont elles sont représentées dans la culture. Cette représentation négative – femme objet / faible / indécise / … – aggrave encore largement la perception négative que les femmes ont d’elles-mêmes, que les hommes ont d’elles, mais aussi l’appréciation des agressions sexuelles par les institutions.
La loi : nécessaire mais insuffisante
En matière de condamnation des agressions à l’encontre des femmes, la loi belge est relativement complète. Depuis 2014, le harcèlement de rue est condamnable. Le viol est un crime, en ce compris au sein d’un couple depuis 1989 (seulement!). Et, contrairement à de nombreux pays, le consentement doit être explicite et non l’inverse. Pourtant, cet été encore, sur les festivals – comme tout au long de l’année dans tous les contextes – les femmes seront victimes de harcèlements et agressions sexuelles : 1 festivalière sur 6 en a été victime au cours des 3 dernières années.
Le manque de moyen dans les services publics rend les choses encore plus difficiles pour la victime. C’était le cas pour cette jeune verviétoise que l’hôpital a refusé d’examiner à l’aide du SAS (set d’agression sexuelle) faute de personnel en suffisance. Elle a dû se rendre à 20 km de là. Il est vrai qu’à Liège, tout comme à Gand et à Bruxelles, des projets-pilotes de centres interdisciplinaires d’accueil pour les victimes ont été mis en place. Novateurs et appréciés, de tels projets ne doivent pas dédouaner le ministère de la Santé d’assurer partout un accueil optimal.
81% des victimes considèrent que la justice n’a pas joué son rôle face à une agression. Par manque de moyens et de recul, les tribunaux tombent dans le piège de la culture du viol. Régulièrement, c’est la victime qui est jugée, sa tenue est considérée comme une preuve de son consentement, il y a suspension du prononcé avec l’argument de ne pas entacher l’avenir d’un violeur, etc.
L’ampleur du phénomène indique clairement qu’il ne s’agit pas d’une multitude de cas isolés, mais d’un profond problème de société véhiculé par la culture du viol et se nourrissant des inégalités. Face à ce constat, les luttes ont explosé ces dernières années. Ces mouvements changent profondément la façon dont des couches plus larges de la population considèrent le sexisme. Les agressions sexistes ne représentent pas une somme de faits divers malheureux, mais un phénomène de société qu’il faut dénoncer et combattre. De plus en plus de gens s’en rendent compte. Des campagnes de sensibilisation se développent, mais cela ne suffit pas. Un investissement massif dans de telles campagnes peut avoir un impact. Mais ce qu’il faut, c’est une lutte collective dans laquelle nous lions la résistance au sexisme à son origine sociale : l’inégalité inhérente au capitalisme, dont la position de second plan des femmes.
En plus d’un combat déterminé spécifique pour remettre en cause le sexisme, l’objectification, la violence et les agressions sexuelles, il est vital que le mouvement plus large contre l’austérité mette aussi ces questions en avant et les relie afin d’assurer que les femmes puissent être au centre du combat, et aussi jouer un rôle dans l’éducation des hommes, qui n’ont eux-mêmes pas d’intérêt à ce que la situation actuelle perdure.
La lutte pour en finir avec ce monde de violence, d’oppression, de pauvreté et d’austérité doit mettre le socialisme à l’ordre du jour, c’est à dire la propriété publique et démocratique des principales richesses et ressources et la planification démocratique de l’économie en fonction des besoins de la population. Cette société basée sur la solidarité humaine et l’égalité pourrait poser les bases pour remettre en cause l’oppression des femmes que le viol incarne et y mettre fin.
1) https://www.bastamag.net/Le-viol-une-histoire-de-domination
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Etat espagnol : après la grève féministe historique du 8 mars, de nouvelles manifestations contre la culture du viol

Les mouvements de lutte de masse pour l’émancipation des femmes ont fait leur retour sur le devant de l’actualité, tout particulièrement dans l’Etat espagnol. Nous avons discuté avec Ana, de Libres y Combativas, l’organisation-sœur de la campagne ROSA.
Récemment, d’importants mouvements ont pris place à travers l’État espagnol suite au procès de “la meute”, au cours duquel un juge a requalifié un viol en abus parce que la victime, paralysée par la peur et menacée de mort, ne s’est pas débattue. Peux-tu nous en dire plus ?
Nous avons assisté à un mouvement fulgurant de travailleuses et de jeunes contre l’affaire scandaleuse de ‘‘la Meute’’, une décision judiciaire violente qui a prononcé la plus petite peine possible contre les auteurs d’un viol collectif, parmi lesquels un Guardia Civil (force de police espagnole à statut militaire, NdT.) et un militaire. Le plus grave, c’est que ce procès a dans les faits légalisé le viol en réduisant juridiquement ce crime à un simple ‘‘abus’’ qui excuse les auteurs de l’exercice de la violence sexuelle.
La réaction fut immédiate. Le jour du jugement, des mobilisations spontanées ont déferlé sur tout le pays. Ces manifestations ont fait entendre que la justice capitaliste ne peut être une garantie pour la défense des droits des femmes. La lutte de la rue est le seul instrument dont nous disposons pour condamner la violence machiste.
Avec Libres y Combativas (plateforme féministe d’Izquierda Revolucionaria et organisation-sœur de la campagne ROSA, NdT), nous avons contribué à ces mobilisations de masse en appelant à une grève étudiante le 10 mai. Cette dernière a paralysé l’enseignement et les rues ont été remplies de jeunes avec plus de 60 manifestations. Ce fut une très forte riposte contre une sentence qui visait à porter un coup au moral des millions de femmes qui avaient participé à la grève féministe du 8 mars.
L’État espagnol a connu des mouvements historiques contre l’oppression des femmes, et ils ne faiblissent pas. Comment l’expliques-tu ?
Cette recrudescence de la lutte féministe est étroitement liée aux effets de la crise et à la révolte sociale qui a secoué l’État espagnol ces dernières années. Ce sont les salariées, les chômeuses, les retraitées, les migrantes et les jeunes femmes qui souffrent le plus de l’austérité et qui subissent les plus grands revers dans tous les aspects de leur vie. Cette réalité révèle une fois de plus à quel point le système capitaliste joue un rôle fondamental dans l’oppression des femmes. D’un autre côté, cette situation a également éveillé des milliers de femmes à la lutte et à la politique.
Les luttes contre les expulsions de logements et contre l’extrême précarité dans les secteurs fortement féminisés (comme le nettoyage) de même qu’en défense des services publics ont placé les femmes au premier rang. Cette nouvelle impulsion du mouvement féministe provient de cette vague de mobilisations où les femmes les plus opprimées ont su démontrer que nous ne devons pas nous résigner au rôle qui nous a été assigné et que la seule manière de nous émanciper ne peut venir que de notre propre lutte et de nos propres organisations.
Quelle fut l’ampleur des mobilisations et quelles en étaient les revendications ?
L’année dernière, sous l’appel international de ‘‘Ni una menos’’ (‘‘Pas une de moins’’, un mouvement contre les féminicides, en provenance d’Argentine, NdT.), une grève d’une heure avait eu lieu ainsi que des mobilisations de masse le 8 mars. Cette année, le mouvement féministe a fait un pas en avant en appelant à une journée historique de grève générale. Les étudiants ont joué un rôle fondamental dans ce succès en vidant complètement les salles de classe à l’appel de Libres y Combativas qui a distribué des centaines de milliers de tracts et organisé des centaines d’assemblées dans les écoles et les facultés.
Les revendications de la grève ont donné une dimension massive à cette journée de lutte. Elles comprenaient le droit à un avortement libre, sans danger et gratuit ainsi que la dénonciation du rôle complice de la justice dans la culture du viol, de l’exploitation du corps des femmes, du poids des tâches domestiques et de la violence que constituent les coupes budgétaires.
Libres y Combativas met l’accent sur les aspects matériels, économiques et idéologiques sur lesquels repose notre oppression. Il faut mettre fin à la justice patriarcale ainsi qu’investir dans les moyens et les ressources pour protéger les victimes de violences et leurs enfants, mettre fin à toute forme d’exploitation de notre corps, lutter contre la culture qui fait un objet du corps des femmes et garantir des conditions de vie décentes, débarrassées de la précarité et du poids du travail domestique, qui permettent d’être totalement indépendantes. Nos chaînes sont très concrètes et le combat que le mouvement féministe impose dans les rues contre le système en mettant en cause ses gouvernements et ses institutions provoque un énorme bouleversement social.
Pour mener à terme la libération des femmes, nous défendons dans ce mouvement que le féminisme doit reposer sur une approche de classe, révolutionnaire et anticapitaliste.
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Etat espagnol : Nouvelles mobilisations féministes suite à la libération de “La Meute”

“Ce n’est pas un abus, c’est un viol – nous, nous te croyons!” – 10 mai 2018 Ce jeudi, des milliers de personnes sont à nouveau descendues dans les rues de l’Etat espagnol à la suite de la décision d’un tribunal de Pampelune en faveur de la mise en liberté provisoire de «La Meute». Derrière ce nom se trouvent cinq jeunes hommes qui ont abusé d’une femme de 18 ans sans être pour cela condamnés pour viol mais simplement pour “abus sexuel”. La décision des juges de ne pas retenir la qualification de viol alors que les agresseurs avaient filmé leurs actes avait provoqué une vague de manifestations féministes dans tout le pays, dans lesquelles nos camarades d’Izquierda Revolucionaria, de Libres y Combativas (organisation-soeur de la campagne ROSA en Belgique) et du Sindicato de Estudiantes (organisation-soeur des Etudiants de Gauche Actifs) ont joué un rôle de premier plan. Ils avaient notamment appelé à la tenue d’une grève générale étudiante le 10 mai à laquelle plus de 100.000 personnes ont participé.
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LE TRIBUNAL DE NAVARRE LAISSE LES VIOLEURS DE LA MEUTE EN LIBERTÉ. TOUTES ET TOUS DANS LES RUES !
Nous ne le permettrons pas ! A bas la justice patriarcale et fasciste !
Le tribunal provincial de Navarre a décidé de libérer les violeurs de la Meute. Avec Libres y Combativas, le Sindicato de Estudiantes et Izquierda Revolucionaria, nous voulons manifester notre indignation face à une justice qui affiche sans entrave son caractère fasciste et patriarcal et qui prétend donner une leçon aux millions de femmes qui ont exposé la lutte féministe dans les rues.
Déclaration d’Izquierda Revolucionaria (section du Comité pour une Internationale Ouvrière dans l’Etat espagnol)
Il ne fait aucun doute que beaucoup de gens lisent en ce moment-même, bouche bée, cette terrible nouvelle. C’est une véritable provocation. Après que des millions de femmes, de jeunes et de travailleurs aient organisé une grève féministe historique le 8 mars et après avoir paralysé les salles de classe dans tout l’État le 10 mai lors de la grève générale étudiante contre la peine de ‘‘la Meute’’ (en savoir plus), voici qu’ils veulent se moquer de nous et nous faire croire que quoi que nous fassions, nous ne pouvons rien changer.
Aussi bien la condamnation que la libération provisoire de ces sauvages représentent une agression contre toutes les femmes. Il s’agit de nous cibler toutes en envoyant un message très clair : les femmes peuvent être violées, agressées, maltraitées et harcelées. Vous pouvez nous torturer physiquement et psychologiquement, le filmer, le diffuser et rien ne se passera dans ce pays ! Les responsables de ces actes seront protégés par la loi, leurs crimes resteront impunis et les victimes subiront toute une série d’humiliations publiques et d’actes de mépris. C’est répugnant et on ne peut pas permettre que cela se produise.
Voilà la justice que nous offre ce système de classe, patriarcal et franquiste. D’un côté il met en prison les jeunes d’Altsasu (accusés ‘‘d’attaque terroriste’’ suite à une rixe avec deux Gardes civils, NDLR) alors que leur innocence a été plus que prouvée, il y envoie également des rappeurs pour réprimer leur musique, de même que des jeunes activistes comme Alfon (un jeune de 24 ans condamné à 4 ans de prison pour faits de manifestation, NDLR) et d’autres militants de gauche en raison de leur lutte contre les injustices du système. De l’autre côté, cette justice laisse par contre en liberté les violeurs de ‘‘la Meute’’, les corrompus et ceux qui commettent des agressions homophobes et fascistes. C’est tout simplement inacceptable.
Tant la décision de libérer les violeurs que la précédente condamnation scandaleuse ont été approuvées par une femme juge. Que peut-on conclure de ce fait ? Que la racine du problème, c’est l’ensemble du système judiciaire et du système capitaliste, et que le patriarcat est également soutenu par de nombreuses femmes qui partagent les privilèges des puissants et ne veulent en aucun cas renoncer à leurs avantages.
Le fait que des femmes occupent des postes judiciaires et ministériels ou dirigent des banques et des entreprises n’empêche ni l’exploitation, ni la discrimination salariale, pas plus que cela n’élimine le machisme et la violence sexiste. L’expérience montre une fois de plus que la lutte féministe, pour gagner, doit impérativement se mener avec un caractère de classe, révolutionnaire et anticapitaliste.
La marée féministe inondera à nouveau les rues pour réclamer justice et exprimer son soutien inconditionnel à la jeune victime de ces criminels sans scrupules. Avec Libres y Combativas, le Sindicato de Estudiantes et Izquierda revolucionaria, nous allons promouvoir cette lutte de toutes nos forces, tout en exigeant l’annulation immédiate de cette décision et la disqualification immédiate des juges impliqués dans la condamnation et la libération des violeurs. Et nous signalons aussi au nouveau gouvernement de Pedro Sánchez (PSOE) – qui a déclaré que ‘‘cette décision est prise dans le cadre de la régularité du système judiciaire (…) le gouvernement se conforme à celle-ci’’, qu’il a clairement fait valoir que son ‘‘féminisme’’ n’est rien de plus qu’une façade, une coquille vide, une formule hypocrite qui cache une politique qui se plie devant la justice patriarcale.
Nous avons envahi les rues, nous avons vidé les salles de classe et les lieux de travail, nous avons organisé des mobilisations de masse sans précédent et nous allons le refaire aussi souvent que nécessaire !
Toutes et tous aux manifestations et rassemblements à venir !
S’ils touchent à l’une d’entre nous, nous répondrons toutes !
Nous toutes, si, on te croit !
La voilà ta meute !En réponse à cette provocation, près de 50 rassemblements sont organisés ce vendredi 22 juin 2018 à travers l’Etat espagnol (Madrid, Catalogne, Andalousie, Communauté valencienne, Asturies, Aragon, Tenerife, Murcia, etc.).

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La grève générale étudiante contre la ‘‘justice’’ capitaliste sexiste espagnole fut un grand succès!

Madrid. Photo : Libres y Combativas Le Sindicato de Estudiantes (SE) et Libres y Combativas, la plate-forme féministe socialiste du SE et d’Izquierda Revolucionaria (section du Comité pour une Internationale Ouvrière dans l’État espagnol) avaient appelé à une grève générale étudiante. Les classes ont été vidées et plus de 100.000 personnes ont manifesté dans les rues !
Cette grève générale étudiante, qui s’est déroulée le 10 mai, entendait réagir face au jugement scandaleux qui a disculpé de viol cinq hommes se surnommant La Manada (la meute). Elle fut un grand succès. Plus d’un million d’élèves ne se sont pas rendus aux cours et plus de 100 000 d’entre eux ont assisté à plus de 60 manifestations organisées par le Sindicato de Estudiantes et Libres y Combativas. Le centre-ville de Madrid a été occupé par plus de 20.000 jeunes dans une atmosphère exceptionnellement combative. Il en va de même pour Barcelone où plus de 40.000 personnes ont rempli les rues de la capitale catalane. Au Pays Basque, des milliers de personnes ont défilé à Bilbao, Gasteiz, Donosti et Iruña, ainsi que dans toutes les provinces d’Andalousie, de Valence, de Galice, d’Aragon, d’Extremadura, etc. Des dizaines de milliers d’élèves ont crié haut et fort ‘‘c’était un viol’’, ‘‘Sœur, nous sommes ta meute’’, ‘‘Je te crois’’ et ‘‘A bas la justice sexiste’’ !
Ce fut une journée extraordinaire de lutte au cours de laquelle les étudiants ont exprimé leur soutien et leur solidarité avec la victime de “la meute” ainsi que leur rejet de toutes ces attaques sauvages au sein d’un système de ‘‘justice” qui protège leurs auteurs.
Libres y Combativas et le Sindicato de Estudiantes tiennent à remercier les dizaines d’organisations féministes qui ont participé à cette grève, de même que les travailleurs de Kellys et de Coca Cola, l’organisation de défense de la mémoire des victimes du franquisme et le mouvement de défense des pensions publiques, qui ont tous soutenu cette journée d’action et y ont participé.
Ce que nous avons démontré ce jour-là, c’est que les féministes qui défendent un programme de lutte et d’anticapitalisme élargissent leur influence. C’est un féminisme qui n’a pas peur d’appeler les choses par leur nom, qui n’hésite pas à dénoncer le système judiciaire qui protège les violeurs et qui combat les politiques réactionnaires du PP, de Ciudadanos et de toutes les personnes qui se prétendent féministes tout en soutenant ce système capitaliste qui nous opprime et nous tue.
Le jugement de “La Meute” fait partie intégrante de la misère imposée quotidiennement par le système capitaliste et ce gouvernement de droite corrompu à des millions de femmes, de jeunes et de travailleurs. Le 26 avril (lorsque la sentence a été prononcée) sera considéré comme un jour d’infamie, comme le jour où la “justice” espagnole a permis une attaque brutale contre l’un de nos droits les plus fondamentaux, celui de ne pas être violées, en absolvant ceux qui devaient être blâmés.
Ce qui est arrivé n’est pas un accident. Cela fait partie intégrante de ce voyage dans le temps qui rappelle l’époque du franquisme et qui voit le PP au pouvoir encourager tous les éléments les plus réactionnaires du système judiciaire à attaquer les opprimés, à commencer par les femmes. C’est la “justice” capitaliste. Les artistes, les syndicalistes, les tweeters et les féministes sont harcelés par des procès, des amendes et des peines d’emprisonnement tandis que tous les voleurs qui détiennent des cartes de membre du PP, les banquiers qui nous expulsent et les patrons qui nous exploitent continuent de régner sur la société. C’est ce qu’ils appellent la “démocratie”, mais nous savons que c’est loin d’être le cas.
Nous nous sommes habitués à cette “justice” sexiste soulignée par des cas précédents. Ils veulent nous envoyer un message clair : ceux qui se défendent sont persécutés tandis que les sexistes et les politiciens et patrons corrompus connaissent l’impunité.
Aujourd’hui, une fois de plus, nous avons marqué l’histoire avec la lutte pour la liberté. Mais nous ne pouvons pas baisser notre garde. Libres y Combativas et le Sindicato de Estudiantes appellent tous les jeunes à rester mobilisés contre toutes les oppressions. Nous vous invitons à nous rejoindre pour construire un mouvement féministe révolutionnaire et anticapitaliste.
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Espagne: grève générale étudiante contre la culture du viol le 10 mai!

Les manifestations de masse demandent justice pour les victimes de viol –
Déclaration du Sindicato de estudiantes (organisation-sœur des Etudiants de Gauche Actifs dans l’Etat espagnol)
L’affaire « La Manada » (La Meute) : une honte.
Le scandaleux verdict prononcé par le tribunal de Pampelune dans l’affaire du gang de violeurs de La Manada a choqué des millions de femmes, de jeunes et une majorité d’hommes, comme en témoignent les manifestations massives qui ont eu lieu partout dans le pays quelques heures seulement après la prononciation du verdict, le 26 avril dernier.Ce jugement illustre le double discours de la «justice» dans ce système réactionnaire et franquiste. D’un côté, des jeunes et des rappeurs sont emprisonnés pour avoir critiqué la monarchie et la corruption du PP au pouvoir sur les réseaux sociaux et dans les chansons; les livres sont retirés de la circulation et les magazines sont censurés. La police est déployée lors des matches de football pour confisquer les t-shirts jaunes parce qu’ils «incitent à la violence» (NDLT : la couleur jaune symbolise le mouvement d’indépendance en Catalogne). D’un autre côté, les politiciens corrompus sont libérés, les fascistes s’en sortent sans condamnation et la violence contre les femmes est traitée en toute impunité.
Le verdict à l’encontre des violeurs de La Manada correspond à ce deuxième cas: c’est une insulte et un manque de respect flagrants envers une jeune femme sauvagement attaquée par un groupe d’hommes. Le tribunal légalise ainsi de facto le viol et place toutes les femmes en situation de danger face aux prédateurs qui savent qu’ils seront protégés.
Nous ne pouvons pas permettre cela! Nous devons utiliser notre colère et notre indignation pour nous organiser et lutter !
Le Sindicato de Estudiantes, avec la plateforme féministe socialiste, Libres y Combativas (organisation-sœur de la Campagne ROSA – Résistance contre l’Oppression, le Sexisme et l’Austérité), appelle à une grande grève étudiante le 10 mai – à l’arrêt des cours dans les écoles et les universités – et appelle tous les jeunes à participer massivement aux manifestations du 12 mai.
Avec cette grande grève, nous entendons montrer notre rejet de ce système judiciaire sexiste, exiger le limogeage de tous les juges responsables, nous opposer à la corruption et à l’attaque contre les droits démocratiques en cours ainsi que démontrer notre entière et pleine solidarité avec la victime de cette horrible agression.
