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Tag: Arabie saoudite
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Action contre l’accès de l’Arabie saoudite à la commission femmes de l’ONU
Le PSL et la campagne ROSA étaient présents ce vendredi 5 mai à l’action de l’Observatoire Européen pour la Démocratie et la Paix (EODP) ; une action d’une vingtaine de personnes Place de la Monnaie à Bruxelles qui visait à dénoncer le vote récent du cabinet de Didier Reynders sur l’accès de l’Arabie saoudite à la commission femmes de l’ONU.Par Brune (Bruxelles)
Comme l’a rappelé Rachid de l’EODP, cette décision est hautement hypocrite de la part du gouvernement belge et surtout du MR, sachant les conditions de vie des femmes dans ce pays et les constantes leçons de morales sur les fameuses valeurs occidentales de respect des droits de la femme que nous servent nos dirigeants. Les représentants de la délégation belge à l’ONU et le Ministre des Affaires Étrangères se sont en effet prononcés en faveur de l’intégration de l’Arabie Saoudite à la Commission du Droit des Femmes de l’ONU, le 22 avril dernier mais, rappelons-le, en Arabie Saoudite, les femmes n’ont pas le droit de conduire ou même d’être accompagnées par une autre personne que le conjoint ou un parent proche dans une voiture ! Elles n’ont pas non plus le droit d’ouvrir un compte en banque ou de se trouver seules dans la même pièce qu’un homme.
L’Arabie saoudite est classée 141 sur 144 à l’index sur l’égalité des genres selon le Forum économique mondial de 2016, alors pourquoi Didier Reynders s’est-il aventuré dans un tel vote ? En vérité, tout cela a été réalisé dans le but d’échange de bons procédés avec l’Arabie saoudite pour faciliter l’élection de la Belgique au Conseil de sécurité de l’ONU.
Lors de l’action plusieurs intervenants ont pris la parole, dont Emily, coordinatrice de la campagne ROSA à Bruxelles, qui a rappelé l’importance de lutter pour les droits des femmes, que ce soit en Arabie Saoudite ou ailleurs ; elle a notamment rappelé les nombreuses attaques récentes de Trump sur l’avortement et les plannings familiaux aux Etats-Unis. Elle a aussi appelé à participer à la manifestation du 24 mai dans le cadre de la venue de celui-ci à Bruxelles. Dans cette manifestation, avec le bloc ROSA, les femmes auront l’occasion de rappeler qu’en Belgique et ailleurs il est primordial de reconstruire un féminisme combattif afin de faire poids face aux attaques des populistes de droite comme Trump, Le Pen, Wilders…Et ici en Belgique nous ne sommes pas non plus en reste, surtout lorsque l’on voit sur qui l’on doit compter pour défendre les droits des femmes (Reynders, Francken et co.) !
Rendez-vous le 24 mai gare du Nord à 17 h, départ en groupe avec les membres ROSA vers la manifestation.
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Vente d’armes à l’Arabie saoudite: choisir entre l’éthique et l’emploi?
La récente exécution de 47 prisonniers en Arabie saoudite a relancé la polémique concernant les ventes d’armes vers ce pays. Avec ces exécutions, le régime a notamment voulu lancer un message fort à la population dont il craint la colère suite aux coupes budgétaires dues à la chute des prix du pétrole. C’est aussi l’expression du mécontentement des dirigeants saoudiens sunnites face au rapprochement de ses alliés occidentaux avec l’Iran chiite, le rival de l’Arabie saoudite dans la région avec lequel elle est en conflit au Yémen, en Syrie et ailleurs.
Par Boris Malarme
Course à l’armement et marchés juteux
Interdiction de rassemblement, chasse aux opposants (particulièrement issus de la minorité chiite), torture, exécutions,… on peut difficilement comprendre que ce pays s’est retrouvé à la tête du groupe consultatif du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies ! La coupable complaisance des puissances occidentales s’explique bien entendu par les vastes réserves de pétrole saoudiennes, mais aussi par le rôle de puissance régionale alliée joué par l’Arabie saoudite dans la défense des intérêts des puissances occidentales au Moyen-Orient, comme l’a encore rappelé récemment Paul Magnette. Il est aussi question de très juteux contrats, la Belgique n’étant pas en reste. Environ 1.500 entreprises belges commercent avec l’Arabie saoudite, les secteurs pharmaceutique et chimique comptant pour un tiers des exportations belges vers ce pays.
L’instabilité, les guerres et les conflits sectaires au Moyen-Orient entrainent une course à l’armement qui assure les bonnes affaires des marchands de canons. C’est là-bas que la croissance des budgets de la défense est la plus forte : ils représentent aujourd’hui à près un tiers des dépenses publiques. En 2014, l’Arabie saoudite est d’ailleurs devenue le premier importateur d’armes au monde (des importations à hauteur de 6,4 milliards de dollars). Amnesty International a démontré que le stock d’armes de Daesh (l’Etat islamique) provient des exportations d’armes en provenance des Etats-Unis, de la Chine, de la Russie et de l’Europe dans la région. Des armes belges vendues au défunt régime de Kadhafi en Lybie sont passées aux mains d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) et d’autres vendues au Qatar aux mains de Daesh.
Le vice-président exécutif de la multinationale américaine Lockheed Martin, Bruce Tanner, a déclaré que sa compagnie envisageait des ‘‘bénéfices indirects’’ à la guerre en Syrie en tablant sur une croissance des ventes d’avions de chasse F-22 et F-35, une nécessité à ses yeux pour faire face aux avions russes déjà présents sur le terrain. Le gouvernement fédéral belge a d’ailleurs approuvé peu avant Noël le Plan stratégique de la Défense qui prévoit 9,2 milliards d’investissement d’ici à 2030, dont l’achat de 34 chasseurs-bombardiers et de deux frégates.
Sacrifier l’emploi à l’éthique ?
Tout le débat sur les licences d’exportations d’armes vers l’Arabie saoudite est présenté comme un choix à opérer entre l’éthique et l’économie, dont l’emploi. Pour Geert Bourgeois et le gouvernement de droite flamand, l’occasion était trop belle de jouer sur l’éthique puisque ces licences ne comptaient en 2014 que pour 600.000 euros en Flandre alors qu’il s’agissait la même année de près de 400 millions d’euros pour la Wallonie. Le Canada figure également en bonne place des partenaires privilégiés de la Belgique sur ce plan, un contrat de 3,2 milliards d’euros ayant été conclu entre l’entreprise belge CMI Defence et la canadienne General Dynamics pour une durée de 15 ans. CMI fournit des tourelles de tank au Canada qui à son tour les installe sur des chars complets vendus ensuite… à l’Arabie saoudite ! On est en droit de se demander si ces chars finiront un jour au Yémen.
PS, cdH et MR défendent ces exportations au nom des 10.000 emplois directs et indirects que compte le secteur en Wallonie. Les Métallurgistes Wallonie-Bruxelles de la FGTB s’opposent à l’idée d’un embargo wallon portée par Ecolo pour défendre les emplois à la FN-Herstal et dans le secteur. Le PTB, empêtré lui aussi dans la logique de l’économie de marché, défend l’embargo à condition qu’il s’agisse d’une mesure prise au niveau européen qui s’accompagne de subsides à l’emploi tels que ceux qui ont suivi l’embargo vers la Russie. Naïma Regueras, présidente de la CNAPD (Coordination nationale d’action pour la paix et la démocratie), clarifie quant à elle qu’aucune solution ne peut venir du gouvernement wallon et appelle les syndicats à travailler ensemble à envisager des pistes pour la reconversion des entreprises wallonnes d’armement.
La production de ces entreprises peut être convertie en une production socialement utile sur base du savoir-faire tout en défendant chaque emploi et en mettant fin au commerce d’arme. Cela nécessite, contrairement au souhait du gouvernement wallon de privatiser la FN-Herstal, que l’ensemble du secteur soit aux mains du public. Cela exige encore un plan de reconversion démocratiquement élaboré par le mouvement des travailleurs accompagné d’investissements publics massifs dans les secteurs qui répondent aux nécessités sociales. Contre le chaos du marché, il nous faut une alternative rationnellement et démocratiquement planifiée, ce qui automatiquement impose de construire une société socialiste démocratique.
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Moyen-Orient. Le vieux monde se meurt, le nouveau tarde à apparaitre
En Arabie saoudite et dans l’État turc, l’année 2016 a commencé sous le signe d’une sanglante répression qui n’a suscité qu’une très timide indignation dans les médias de masse et parmi les politiciens de l’establishment en Occident. La politique du ‘‘deux poids deux mesures’’ des puissances occidentales face à la barbarie est bien connue dès lors qu’il s’agit de régimes ‘‘amis’’.
Par Nicolas Croes, article tiré de l’édition de février de Lutte Socialiste
Répression de l’opposition
‘‘Deux poids, deux mesures’’, c’est également l’approche du président Erdogan face au ‘‘terrorisme’’. Sous cet adage, l’État turc a tout d’abord intensivement bombardé des positions détenues par des forces kurdes du nord de la Syrie qui résistent courageusement à Daesh (l’État Islamique), alors que ce dernier était curieusement relativement épargné. Par la suite, la population kurde de l’État turc s’est vu imposer un couvre-feu dans plusieurs localités du sud-est à majorité kurde. Elle subit des humiliations quotidiennes, les arrestations se comptent par milliers et les meurtres arbitraires commis par les forces de l’ordre contre des ‘‘terroristes’’ âgés de 7 à 77 ans sont nombreux. Il en a été légèrement plus question sur la scène internationale lorsqu’une vingtaine d’universitaires ayant signé une pétition réclamant l’arrêt des massacres de l’armée ont été arrêtés en janvier.
En Arabie saoudite, le régime a récemment procédé à l’exécution de 47 prisonniers pour fait de ‘‘terrorisme’’. Parmi eux se trouvaient divers djihadistes, mais aussi un responsable chiite, le cheikh Nimr al-Nimr Baqr, un adversaire politique de premier plan du régime sunnite saoudien. Il s’était notamment fait remarquer en 2011 dans le cadre des mobilisations de masse qui avaient déferlé sur toute la région du Moyen Orient et de l’Afrique du Nord et avaient, entre autres, mis fin aux régimes de Ben Ali en Tunisie et de Moubarak en Égypte. La clique dirigeante saoudienne, qui a exécuté 151 personnes l’année dernière, est bien connue pour sa chasse aux sorcières contre les dissidents, en particulier parmi la communauté de la minorité chiite.
Dans les deux pays, cette démonstration de force n’est pas sans lien avec des inquiétudes grandissantes au sujet de la dégradation de la situation économique et des explosions de colère qui peuvent survenir suite aux nouvelles mesures antisociales. L’Arabie saoudite dépend ainsi de la vente du pétrole pour 90% de ses revenus. L’effondrement du prix du pétrole a entrainé une imposante croissance du déficit budgétaire du pays. En réaction, le régime a réduit les dépenses publiques (notamment pour les produits de première nécessité) et augmenté les prix de l’essence, de l’électricité et de l’eau.
Tensions régionales
Ces éléments viennent se rajouter à un cocktail de déstabilisation déjà puissant dans la région : guerre en Syrie, chaos irakien, offensives de la Russie et des Occidentaux contre Daesh, crise au Yémen, tensions communautaires au Liban, déferlement de millions de réfugiés en Jordanie, au Liban et dans l’État turc, chute des prix du pétrole,…
Les dirigeants saoudiens sunnites éprouvent colère et panique face au rapprochement en cours entre les puissances occidentales et la dictature chiite iranienne. L’Iran est le principal rival politique régional de l’Arabie saoudite. Ainsi, depuis les dernières exécutions, l’ambassade d’Arabie saoudite dans la capitale iranienne a été incendiée. Le régime saoudien a ensuite été accusé d’avoir intentionnellement bombardé l’ambassade iranienne à Sanaa, la capitale du Yémen, où les deux pays se livrent une guerre par procuration. Au Yémen, l’Arabie saoudite a engagé une centaine d’avions qui bombardent les chiites du pays, contre une quinzaine d’avions à peine en Irak contre Daesh (pas plus que les Pays-Bas et le Danemark réunis). L’Iran et l’Arabie saoudite sont également engagés dans une confrontation indirecte au Bahreïn ou encore au Liban.
Quelle issue ?
Un incontrôlable monstre de Frankenstein a été créé dans la région, notamment en raison des multiples interventions impérialistes au cours des décennies, alors que l’autorité et la capacité d’action de ces puissances occidentales ont depuis fortement pâli. L’avenir est plus qu’incertain. Comment, par exemple, faire face à une extension du chaos vers l’État turc? Si les massacres contre les Kurdes débouchent sur une guerre civile, comment gérer l’afflux de réfugiés actuellement contenu dans le pays ?
Il y a 5 ans, à partir de la chute de la dictature tunisienne en janvier 2011, une vague de protestations de masse et le début d’un processus de révolution et de contre-révolution ont ébranlé toute la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. Même si ce sont les forces de la contre-révolution – qu’elles soient représentées par les régimes réactionnaires de la monarchie saoudienne ou d’Erdogan, par Daesh,… – qui tiennent actuellement le haut du pavé, l’issue de ce combat entre la barbarie et un monde nouveau n’est pas encore déterminée.
L’État turc a connu de puissantes protestations de masse et grèves ces dernières années, illustrées notamment par l’entrée au Parlement du parti progressiste pro-kurde HDP (le seuil électoral y est de 10%…). En Iran, la récession économique fait aussi poindre pour le régime le péril de nouvelles mobilisations de masse similaires à celles de 2009. Et en Tunisie, le mois de janvier a vu survenir de nouvelles mobilisations imposantes dans le pays suite à une révolte de la jeunesse à Kasserine. Et nous avons pu voir en 2011 à quel point les évènements révolutionnaires pouvaient faire appel les uns aux autres par-delà les frontières pour se renforcer.
‘‘Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaitre et dans ce clair-obscur surgissent les monstres’’ disait le révolutionnaire italien Gramsci dans entre-deux-guerres. Un nouvel embrasement de la région sur base des conflits entre classes sociales est inévitable, mais il faudra veiller à ne pas répéter les erreurs des précédents mouvements.
Les travailleurs et les pauvres de la région doivent s’organiser sur base de leurs propres forces, en toute indépendance de classe, et mener le combat non seulement contre l’impérialisme, mais aussi contre les cliques dirigeantes régionales jusqu’à la fin de ce système de misère, d’exploitation, de terrorisme et de guerre.
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Exécutions de masse en Arabie Saoudite, tensions régionales et troubles sociaux
La récente exécution de 47 prisonniers par le régime saoudien a largement été condamnée comme étant barbare. Ces meurtres ont également intensifié les tensions avec le principal rival politique régional de l’Etat pétrolier ; l’Iran. Le régime des mollahs avait mis en garde contre l’exécution du responsable chiite le cheikh Nimr al-Nimr Baqr, un adversaire politique de premier plan du régime sunnite saoudien.
Par Simon Carter, Socialist Party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et au Pays de Galles)
La clique dirigeante saoudienne, qui a exécuté 151 personnes l’année dernière (essentiellement pour des infractions non-violentes liées aux drogues), a déclaré que les exécutions concernaient des «terroristes». Mais le système judiciaire répressif du pays est bien connu pour sa chasse aux sorcières contre les dissidents, en particulier parmi la communauté de la minorité chiite. L’Iran, de son côté, est également un pays bien connu pour ses régulières exécutions d’opposants politiques depuis la révolution de 1979 (voir notre dossier sur ce sujet). Les deux puissances régionales étaient déjà en conflit de par leurs guerres par procuration en Syrie et au Yémen.
Depuis ces exécutions, l’ambassade d’Arabie saoudite à Téhéran, en Iran, a été incendiée, alors que Téhéran a accusé l’Arabie saoudite “d’intentionnellement” bombarder son ambassade à Sanaa, la capitale du Yémen. Ce développement des antagonismes a eu un effet polarisant sur les classes dirigeantes de la région.
En dépit du fait que les dirigeants féodaux d’Arabie saoudite ont à leur actif l’un des pires records de tous les pays du globe concernant les droits humains, les critiques se font entendre du bout des lèvres. Les condamnations sont très prudentes. Le Foreign Office britannique, suivant en cela l’attitude du premier ministre conservateur David Cameron, a simplement exprimé sa “préoccupation”. Le Ministre des Affaires étrangères Philip Hammond a laissé entendre qu’il y avait peu d’intérêt à condamner ses exécutions puisque cela ne suffirait pas à changer l’état d’esprit des dirigeants saoudiens.
Il y a un an à peine, David Cameron de même qu’une foule d’autres dirigeants occidentaux prétendument «démocratiques» s’étaient rendus en Arabie saoudite afin d’assister aux funérailles du monarque absolu le roi Abdallah et d’approuver l’arrivée au trône de son demi-frère le prince Salman.
La réticence des gouvernements occidentaux à critiquer la Maison des Saoud a beaucoup à voir avec les armes et les autres contrats lucratifs conclus avec le régime ainsi qu’avec les vastes réserves de pétrole de l’Arabie saoudite. Le régime est aussi une puissance régionale-clé qui est vitale pour la défense des intérêts géopolitiques des gouvernements occidentaux au Moyen-Orient.En octobre dernier, sur Channel 4 News, David Cameron avait refusé à plusieurs reprises de répondre aux questions concernant le pacte de sécurité secret conclu entre la Grande-Bretagne et l’Arabie Saoudite (qui a vu les deux pays être élus au Conseil des droits de l’homme des Nations unies).
Finalement Cameron a bien dû reconnaitre que le gouvernement britannique entretient « une relation avec l’Arabie saoudite » ce qui signifie « que nous recevons de leur part d’importantes informations aux niveaux des renseignements et de la sécurité. »
Cameron a également admis qu’il n’était pas personnellement intervenu dans le cas largement médiatisée du jeune opposant de 17 ans Ali Mohammed al-Nimr (le neveu du cheikh Nimr Baqr al-Nimr) arrêté durant les manifestations de 2011 et qui est menacé d’exécution.
L’Arabie Saoudite dépend de la vente du pétrole pour 90% de ses revenus. Mais l’effondrement des prix du pétrole a entraîné une croissance imposante du déficit budgétaire du pays, qui a atteint les 15% du PIB l’an dernier, crevant de 100 milliards de dollars sa réserve de changes de 650 milliards de dollars.
En retour, cela a suscité des réductions des dépenses publiques et des hausses des prix de l’essence, de l’électricité et de l’eau. Cette combinaison de réduction des subventions et d’augmentation des taxes ne va qu’approfondir le mécontentement de la population du royaume.
On retrouve sans aucun doute partiellement la peur du développement des tensions internes derrière les récentes exécutions de masse et la répression du régime contre le «terrorisme». Ces exécutions reflètent également la colère des dirigeants saoudiens contre les puissances occidentales et le rapprochement en cours avec l’Iran suite à l’accord conclu sur le nucléaire iranien, en négligeant le fait que c’est le soutien sans faille des puissances occidentales qui a gardé la Maison des Saoud au pouvoir.
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Égypte : la polarisation grandit – Aucune confiance dans les généraux !
L’évolution orageuse et sanglante de la situation en Égypte après le retrait et l’arrestation du président Morsi par l’armée marque une nouvelle étape dangereuse et difficile dans le déroulement de la révolution égyptienne. Malgré l’immense mobilisation, sans précédent, des masses contre Morsi, l’absence d’un mouvement socialiste des travailleurs indépendant a ouvert les portes aux dangers du sectarisme, à différentes variétés de contre-révolution et à la possible défaite finale de la révolution.
Robert Bechert, Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO)
Le retrait de Morsi est survenu dans un contexte de mobilisation rapide avec un mouvement de 17 millions de manifestants (20 % de la population égyptienne) dans une série de manifestations de masse. (voir notre article “Protestations massives pour la chute de Morsi”)
L’ampleur, la puissance et la rapidité de ce mouvement ont été époustouflantes. Cela reflète quelque chose que l’on voit souvent au cours des révolutions : après une période initiale d’euphorie et d’espoir, on voit souvent une nouvelle vague de mouvements de masse de la part de toutes les personnes déçues par les maigres résultats de la révolution.
Morsi a connu une chute très rapide de sa popularité, qui était de toute façon dès le départ fort limitée. Au premier tour des élections présidentielles, Morsi n’avait remporté que 5,7 millions de voix, soit 11 % des 51 millions d’électeurs égyptiens. Les 13,2 millions de voix obtenues par Morsi au deuxième tour provenaient surtout du désir d’empêcher son rival, Shafiq, ancien commandant de l’armée de l’air et ex-ministre de Moubarak, d’arriver au pouvoir.
Morsi et son gouvernement des Frères Musulmans ont été de plus en plus confrontés à une opposition de masse faisant irruption de toutes parts. L’échec apparent de la révolution, qui n’est jusqu’ici pas parvenue à apporter la moindre véritable amélioration sociale ou économique, en plus de la crise économique croissante, a suscité des grèves et des manifestations de plus en plus nombreuses. Pour beaucoup de gens, la tentative de “coup d’État constitutionnel” de Morsi en novembre 2012, par lequel il voulait s’octroyer plus de pouvoirs, a été le point tournant qui a provoqué la construction d’une opposition contre ce qui était perçu comme une tentative des Frères Musulmans de prendre le pouvoir. Au même moment, des membres de la vieille élite, y compris des chefs militaires qui contrôlent entre 8 et 30 % de l’économie nationale (Der Spiegel, 5 juin), se sont sentis menacés par la politique qui favorisait les hommes d’affaires proches des Frères musulmans. Ce n’est donc pas par hasard que les soutiens financiers des Frères Musulmans ont été parmi les premières cibles de l’armée.
Ce qui était considéré comme une tentative par les Frères musulmans de s’assurer une domination politique a en outre accru l’opposition de la part des éléments laïcs et chrétiens parmi la population, ainsi que de la part de leurs rivaux islamistes, comme le parti Al Nour (fondamentalistes sunnites), qui ont rejoint les manifestations fin juin. Tout ceci a jeté les bases de la rapide réponse qu’a reçu l’appel du mouvement Tamarod (“Rébellion”) récemment formé qui a fait signer une pétition de masse demandant la démission de Morsi.
Dans un certain sens, nous avons vu deux luttes bien distinctes contre Morsi. D’un côté, le mouvement populaire de masse ; de l’autre, les reliques du régime Moubarak, en particulier les chefs de l’armée qui ont leurs propres intérêts politiques et économiques, et qui tentent d’utiliser l’opposition de masse à leur propre avantage. Ainsi, The Economist (6 juillet) suggérait l’existence d’actions de sabotage de la part de sections anti-Morsi de la classe dirigeante, en écrivant que : ‘‘Personne n’a jusqu’à présent été capable d’expliquer l’effondrement soudain des stocks d’essence’’, juste avant la manifestation anti-Morsi de masse du 30 juin.
Potentiel révolutionnaire et menace contre-révolutionnaire
Ces deux éléments illustrent tous deux le potentiel et la menace autour de la révolution égyptienne.
La rapidité et l’ampleur du mouvement démontre l’immense énergie et potentiel de la révolution. Mais en l’absence du développement d’un mouvement des travailleurs indépendant capable de lutter pour une alternative socialiste, les chefs de l’armée, aidés par toute une série de politiciens pro-capitalistes, ont été capables de tirer profit de la situation. Il est clair que les généraux voulaient à la fois neutraliser et éliminer Morsi, mais en même temps, ils craignaient que la situation ne puisse, de leur point de vue, “échapper à tout contrôle”. On rapporte que des travailleurs ont commencé à partir en grève le 3 juillet, et que d’autres encore prévoyaient de lancer une série de grèves anti-Morsi à partir du 4 juillet. Cela aurait pu mener la classe ouvrière à prendre l’initiative via une action de grève générale de masse. Les généraux ont évidemment tout fait pour conserver l’initiative et empêcher que Morsi ne soit chassé par une insurrection populaire.
Les dirigeants militaires ont agi afin de défendre leurs propres intérêts personnels et ceux d’une partie de la classe dirigeante égyptienne. Au même moment, ils bénéficient du soutien tacite des grandes puissances impérialistes et de la classe dirigeante israélienne. Obama, Hague (ministre britannique des Affaires étrangères) et d’autres dirigeants impérialistes ont aussi émis de très faibles critiques envers le coup d’État des généraux. Étant donné leur rôle dans le passé, l’armée et les sécurocrates égyptiens ne peuvent que difficilement passer pour des “démocrates”. Mais cela n’inquiète pas forcément Obama & Co, qui sont toujours heureux de pouvoir compter sur tous les régimes autoritaires de la sous-région comme le Qatar, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, etc. de leur vendre des armes.
Ce coup d’État militaire (appelons un chat un chat) a permis aux Frères Musulmans de Morsi de se faire passer pour les défenseurs de la démocratie et d’affirmer que l’opposition était coordonnée par “des partisans de l’ancien régime” qui auraient payé des miliciens avec “l’argent de la corruption” pour attaquer les Frères Musulmans et “remettre l’ancien régime en place”. Il ne fait aucun doute que l’ancien régime Moubarak est impliqué dans le mouvement contre Morsi. Le Financial Times a raconté la manière dont les dirigeants de l’opposition “consultent régulièrement” les chefs militaires et dont “un establishment hostile” et des “éléments agissant dans l’ombre” ont été impliqués dans la campagne anti-Morsi (6 juillet).
Mais l’immense ampleur des manifestations et leur base de masse provient bel et bien de l’opposition populaire et de la déception du peuple envers le régime des Frères Musulmans.
En même temps, la taille et la détermination des contre-manifestations pro-Morsi ne provient pas purement d’une base religieuse. Il ne fait aucun doute que certaines sections de l’actuel mouvement pro-Morsi agissent parce qu’elles sont opposées à l’armée, surtout étant donné le souvenir du vieux régime Moubarak et de sa répression brutale de toute opposition, y compris de celle des Frères Musulmans.
Les conflits qui se développent en ce moment représentent un réel danger pour la révolution, surtout parce qu’ils semblent être une bataille entre les Frères Musulmans et autres dirigeants sectaires, conservateurs et réactionnaires, d’un côté, et les chefs de l’armée de l’autre côté.
Dans une telle situation, il est absolument essentiel de redoubler les efforts en vue de la construction d’un mouvement des travailleurs indépendant, pas seulement des syndicats, qui puisse offrir une véritable alternative et force d’attraction pour tous les travailleurs et les pauvres qui soutiennent Morsi à cause de leur opposition à l’armée et à l’ancienne élite. C’est la seule manière par laquelle le mouvement ouvrier peut tenter de limiter la capacité de nuisance des groupes religieux fondamentalistes réactionnaires qui se présentent comme les principaux adversaires du régime militaire.
L’importance de ce facteur se reflète dans le danger constant de la division sectaire qui s’approfondit entre les sunnites, les chrétiens et les chiites, et les couches laïques. Déjà, certains commentateurs attirent l’attention sur le fait que les Frères Musulmans pourraient se voir écartés par des groupes djihadistes fondamentalistes dans leur lutte contre l’armée laïque et pro-occidentale. En ce moment, le parti salafiste Al Nour tente de se distancer de l’armée et de se repositionner comme une force d’opposition.
L’Algérie constitue à ce titre un fameux avertissement. Bien que la situation aujourd’hui en Égypte soit assez différente, après que l’armée algérienne soit intervenue en janvier 1992 pour empêcher les élections et éviter la victoire du Front Islamique du Salut (FIS), cela a plongé le pays dans une guerre civile qui a duré huit ans et couté la vie à entre 44.000 et 200.000 personnes – ce qui freine encore aujourd’hui le développement des luttes de masse dans ce pays.
Les travailleurs ne doivent pas soutenir ce coup d’État
Les travailleurs ne doivent pas accorder le moindre soutien à ce coup d’État. Le mouvement de masse des travailleurs doit à tout prix conserver son indépendance par rapport à l’armée et par rapport à Morsi. L’implication des soi-disant forces d’opposition “libérales” ou “de gauche” comme le groupement Tamarod avec l’armée ne fera que se retourner contre elles. Ces forces seront perçues comme des collabos, surtout si l’armée décide d’étendre au futur mouvement ouvrier et aux grèves les méthodes qu’elle utilise en ce moment pour réprimer les Frères Musulmans. Le choix par l’armée d’El-Beblaoui comme premier ministre est un avertissement quant à ses projets. Il y a quelques jours à peine, El-Beblaoui disait dans une interview que le niveau de subsides gouvernementaux sur l’essence et la nourriture est ‘‘insoutenable, la situation est critique… L’annulation des subsides requiert des sacrifices de la part de la population.’’ Toute tentative par un gouvernement soutenu par l’armée de mettre en œuvre une telle politique suscitera une résistance ; la question est de savoir si celle-ci viendra du mouvement ouvrier ou des fondamentalistes.
Malheureusement, beaucoup de personnes parmi la gauche égyptienne soutiennent en ce moment l’armée en ne lui accordant que quelques critiques très modérées. On a beau appeler cela du “pragmatisme”, cela ne fait que désarmer politiquement la classe ouvrière. L’an dernier, certains groupes de gauche ont appelé à voter pour Morsi au deuxième tour, et maintenant, ils soutiennent l’armée qui l’a renversé. Bien qu’il est nécessaire pour les marxistes de comprendre, par sympathie, que des millions de gens s’apprêtaient à voter pour Morsi lors du deuxième tour, ce n’était pas une raison pour le soutenir comme l’ont fait certains petits groupes de gauche. À présent, on voit certains de ces mêmes groupes de gauche se retourner complètement, comme les “Socialistes révolutionnaires” (SR), section égyptienne de l’International Socialist Tendancy (IST, dont la section britannique est le SWP), qui, dans leur déclaration du 6 juillet, n’ont écrit absolument aucune critique du coup d’État militaire. En l’espace d’une année donc, l’IST est passée d’un soutien envers Morsi contre son rival, Shafiq, à un soutien aux anciens collègues de Shafiq qui viennent de dégager Morsi.
D’autres groupements tels que Tamarod (auquel sont affiliés les SR) ont souhaité que ce soit El Baradei – un politicien absolument et totalement pro-capitaliste – qui devienne premier ministre, et ont ‘‘condamné la marche arrière de la présidence’’ lorsque le parti salafiste Al Nour s’opposait à El Baradei (Ahram, 7 juillet). De la même manière les SR n’appellent pas de manière conséquente à une solution pour l’Égypte qui provienne de la classe des travailleurs et des pauvres. Les SR ne font même pas le lien entre son appel à la ‘‘reconstitution de comités révolutionnaires’’ et la question de qui devrait former le gouvernement, à part la vague notion selon laquelle ‘‘qui que ce soit qui sera premier ministre, il faut qu’il soit issu des rangs de la révolution de janvier (2011).’’
Les dirigeants ouvriers ne doivent rien avoir à faire avec le moindre gouvernement pro-capitaliste ou militaire. S’ils ne font pas tout pour se distancier de ce gouvernement, alors il est possible que les Frères Musulmans ou d’autres forces similaires tentent de s’emparer de la direction des futures luttes contre l’austérité et contre la répression.
Déjà, l’armée est en train de montrer la manière dont elle voudrait voir les choses se dérouler. D’abord, elle met en place des structures de pouvoir dominées par des éléments pro-capitalistes, puis, au départ, elle dit qu’elle autorisera la population à voter dans le futur mais uniquement après qu’un comité ait révisé la constitution, tandis que la Cour suprême rédige un projet de loi sur les élections législatives et prépare les élections législatives et présidentielles. Ensuite, confrontés à la résistance des Frères Musulmans et forcés de battre en retraite après le massacre du 8 juillet, les généraux se sont vus forcés de promettre des élections dans les quelques mois qui viennent – sans qu’il soit certain que celles-ci se produiront pour du bon.
Il a été rapporté que beaucoup de manifestants anti-Morsi se sont sentis “remplis de force” après le départ de Morsi. Mais bien que la chute de popularité rapide et les manifestations de masse contre Morsi aient été extrêmement importantes, ces évènements n’impliquent pas en soi que le peuple ait “pris le pouvoir”. Cette question est une question concrète d’organisation et de qui détient le pouvoir d’État. En ce moment en Égypte, ce sont les généraux, malgré les problèmes croissants auxquels ils sont confrontés, qui tentent de consolider leur propre pouvoir sur le dos du mouvement de masse.
Inéluctablement, dans cette économie en crise, le nouveau gouvernement subira rapidement la pression du FMI et autres qui le forceront à adopter des soi-disant “réformes” sous la forme d’abandon des subsides contre la vie chère et autres mesures d’austérité. Cela jettera la base pour une nouvelle lutte de classes au moment où l’armée et son gouvernement chercheront à passer à l’offensive, en utilisant peut-être des mesures de plus en plus autoritaires et brutales pour tenter d’imposer leur volonté.
Quelle que soit la manière dont on l’envisage, ce coup d’État militaire ne peut être qualifié de “progressiste” comme par exemple celui qui a déclenché la révolution portugaise de 1974. Mais alors que ce coup d’État avait jeté à bas une dictature vieille de plusieurs décennies, l’échec de la construction d’un mouvement des travailleurs indépendant capable de prendre le pouvoir pour soi a finalement causé, après un certain temps, le retour définitif au pouvoir de la classe dirigeante portugaise et du capitalisme.
C’est pourquoi il est tellement important que le mouvement populaire, dirigé par les travailleurs et les jeunes, s’organise pour lutter pour ses propres revendications et contre l’installation d’un régime militaire.
Les travailleurs doivent construire leur propre alternative
Deux ans et demi plus tôt, le jour où Moubarak a démissionné, le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) distribuait un tract au Caire dans lequel il était écrit ‘‘Aucune confiance dans les chefs de l’armée ! Pour un gouvernement des représentants des travailleurs, des paysans et des pauvres !’’ (voir cet article ici)
Ces revendications sont toujours d’actualité aujourd’hui. Dans ce tract, nous disions que :‘‘Les masses égyptiennes doivent faire valoir leur droit de décider de l’avenir du pays. Aucune confiance ne doit être accordée aux personnalités du régime ni à leurs maitres impérialistes pour diriger le pays et organiser des élections. Il doit y avoir immédiatement des élections libres, sous l’autorité de comités de masse des travailleurs et des pauvres, pour convoquer une assemblée constituante révolutionnaire afin de décider de l’avenir du pays.
Maintenant que des comités locaux et de véritables organisations indépendantes des travailleurs se sont créés, leur développement doit être accéléré, ils doivent s’élargir et être reliés entre eux. Un appel clair pour la formation de comités démocratiquement élus et gérés sur tous les lieux de travail, dans tous les quartiers et dans les rangs de l’armée recevrait une grande réponse.
Ces organes pourraient ainsi coordonner le renversement de l’ancien régime, maintenir l’ordre et la livraison de nourriture et, surtout, pourraient constituer la base d’un gouvernement des travailleurs et des pauvres capable de briser les restes de la dictature, de défendre les droits démocratiques et de construire une économie qui répondrait aux nécessités économiques et sociales des masses égyptiennes.’’
Depuis lors, nous avons vu un développement incroyable du mouvement ouvrier égyptien sous la forme de syndicats, de comités et en termes d’expérience de lutte. Tout cela fournit la base pour la création du type de mouvement de masse qui est nécessaire.
En février 2011, nous écrivions que la révolution égyptienne pourrait constituer ‘‘un grand exemple pour les travailleurs et les opprimés du monde entier, prouvant que des actions de masse déterminées peuvent vaincre des gouvernements et des dirigeants, quelle que soit la force qui semble être la leur.’’
Cette affirmation est tout aussi vraie aujourd’hui. La reprise du mouvement de masse en Égypte peut inspirer tous ceux qui ont connu des révolutions qui n’ont pas mené au moindre véritable changement, comme en Tunisie, ou qui ont causé une descente dans une guerre civile sectaire comme en Syrie, ou une répression accrue comme en Arabie saoudite, aux Émirats arabes unis, etc. Mais tandis que lors de ces derniers jours, l’Égypte a de nouveau démontré l’immense potentiel de l’action de masse, elle a également montré qu’il faut absolument construire un mouvement des travailleurs armé d’un programme socialiste clair et d’un plan d’action afin de résoudre la crise politique, sociale et économique de l’Égypte, sans quoi d’autres forces tenteront de détourner la révolution pour, au final, la vaincre.
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Egypte : Protestations massives pour la chute de Morsi
Non à l’intervention des généraux, pour un gouvernement des travailleurs!
Le premier anniversaire du règne du président égyptien Mohammed Morsi a été marqué par des manifestations dont l’ampleur a dépassé celles qui avaient conduit à la chute du dictateur Hosni Moubarak en janvier 2011. Selon des sources des ministères de la Défense et de l’Intérieur, entre 14 et 17 millions de personnes ont manifesté dans tout le pays ce dimanche 30 juin!
David Johnson, Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles)
22 millions de signatures ont été collectées pour une pétition (avec vérification ID) exigeant le départ de Morsi. Il s’agit de plus d’un quart de la population égyptienne, un nombre également supérieur aux 13,2 votes qu’il avait reçu au second tour des élections présidentielles qu’il avait remportées en 2012 ! De grandes foules de manifestants sont restées sur les places du Caire, d’Alexandrie et d’ailleurs toute la nuit durant tandis qu’une nouvelle journée de mobilisation a été convoquée pour le 3 juillet. Les locaux des Frères Musulmans ont aussi été attaqués et des manifestants ont été tués par des tirs à l’intérieur des bâtiments. Ces manifestations gigantesques représentent une nouvelle étape dans la révolution mais, tout comme nous avons pu le constater ces dernières années, l’absence d’un mouvement socialiste conséquent ouvre la voie à la récupération de cette situation par d’autres forces que celles défendant les intérêts des travailleurs et des pauvres.
Les raisons de la colère ressentie contre le régime du gouvernement Morsi dominé par les Frères Musulmans sont nombreuses. Les conducteurs doivent faire des files de jusqu’à 7 heures pour enfin avoir de l’essence, de nombreuses régions connaissent des coupures de courant de plus de dix heures et la valeur de la Livre égyptienne a chuté de 20%, ce qui a fait augmenter les prix bien plus vite que le taux d’inflation officiel qui est maintenant de 8,2% sur base annuelle. Le chômage reste très grand alors que la croissance économique s’est ralentie avec la baisse du tourisme et des investissements étrangers. Le taux d’occupation des Hôtels est de 15% seulement au Caire et est même sous les 5% à Louxor. Seules les installations autour de la Mer Rouge sont réellement en activité.
la politique de Moubarak se poursuit, mais la contestation ne fait que croître
Toute la politique du dictateur déchu a été endossée par le gouvernement Morsi. Des hommes d’affaire accusés de corruption sous le régime de Moubarak ont été relaxés. La Business Development Association, fondée par un dirigeant des Frères Musulmans, Hassan Malek, réunit de proéminents capitalistes afin d’influencer la politique du gouvernement de la même manière que l’avait fait en son temps le fils de Moubarak, Gamal. De nombreuses personnes craignent de voir apparaître un nouvel Etat clientéliste sous la poigne des Frères Musulmans et sont profondément en colère contre les salaires des membres des Frères Musulmans occupant des postes publics (gouverneurs,…) ou aux postes dirigeants de la Fédération syndicale égyptienne. Des journalistes ont été physiquement attaqués pour avoir couvert des manifestations de protestation et certains d’entre eux – connus pour leurs critiques à l’encontre des Frères Musulmans – ont perdu leur emploi dans les médias publics. Des comédiens ont aussi été arrêtés pour avoir ‘‘insulté le président’’. Même les chanteurs et musiciens de l’Opéra du Caire sont entrés en grève en solidarité avec leur directeur après qu’il ait été renvoyé par le Ministre de la Culture en mai.
Selon les données de L’International Development Centre (IDC), les protestations avaient atteint ces derniers temps un niveau continuellement élevé. Au cours de la dernière année du règne de Moubarak, la moyenne était de 176 actions de protestation par mois alors que la moyenne actuelle pour 2013 est de… 1.140 par mois ! Au total, il y a eu 9.427 actions de protestation Durant la première année du mandat présidentiel de Morsi. La moitié de ces actions étaient des protestations ouvrières, avec notamment 1013 grèves et 811 sit-in. Il y a eu 500 manifestations et 150 blocages routiers.
Ceux qui espéraient que la chute de Moubarak allait marquer l’ouverture d’une ère de droits démocratiques en ont été pour leurs frais. Le régime de Morsi a adopté des mesures très répressives. Les travailleurs ne reçoivent pas un traitement identique à celui des hommes d’affaires qui se sont enrichis sous Moubarak… Ainsi, le Ministre de l’Aviation a encore récemment renvoyé quinze travailleurs de l’aéroport du Caire après que ces derniers aient pris part à une grève. Cinq dockers de la société Alexandria Port Containers ont été condamnés à trois ans de prison pour avoir dirigé une grève en octobre 2011. Ils sont toutefois parvenus à faire annuler cette décision en appel. Le 26 juin, Morsi avait annoncé l’adoption de nouvelles mesures destinées à faire face à la ‘‘brutalité’’ et au ‘‘terrorisme’’, notamment contre les barrages routiers. Il s’agissait là d’une menace à peine voilée contre les travailleurs entrant en action pour défendre leur niveau de vie.
Les manifestations du 30 juin
Un nouveau groupe, Tamarod (Rebelle), a été lancé en avril derniers par d’anciens membres de Kefaya, le groupe qui avait organisé des manifestations pour les droits démocratiques sous Moubarak. L’objectif que s’était fixé le nouveau collectif était de parvenir à réunir 15 millions de signatures sur une pétition réclamant la démission de Morsi, un objectif dépassé. Cette pétition est principalement axée sur les questions brûlantes des droits démocratiques et de la situation sociale et économique. Le texte déclare notamment qu’il n’existe aucune justice pour les victimes des forces de sécurité décédées au cours du soulèvement anti-Moubarak, que les ‘‘pauvres n’ont pas de place dans la société’’, que l’économie s’est ‘‘effondrée’’ à tel point que le gouvernement est obligé d’aller ‘‘mendier’’ auprès du FMI et que le régime de Morsi est condamné pour avoir ‘‘suivi les traces des Etats-Unis’’. En quelques semaines, cette campagne de pétition a rassemblé 6.000 volontaires et plus de 100.000 fans sur Facebook. Beaucoup de mouvements politiques d’opposition ont soutenu cette campagne, dont le Mouvement de la Jeunesse du 6 Avril, le Parti de la Constitution libéral, le Parti de l’Alliance Populaire Socialiste et le Parti Egypte Forte, fondé par l’ancienne figure de proue des Frères Musulmans Abdel-Moneim Aboul-Fotouh, qui s’était opposé à Morsi à l’occasion des élections présidentielles.
Leur but est ‘‘d’éviter de reproduire les erreurs de la période écoulée et de poursuivre sur la voie de la révolution du 25 janvier’’, selon le co-fondateur de Tamarod, Mohamed Abdel Aziz. Les organisateurs avaient aussi déclaré avant le 30 juin qu’il ‘‘n’y aura pas de drapeaux ou de banderoles aux manifestations à l’exception de drapeaux égyptiens, de photos de martyrs, à commencer par les martyrs de la révolution du 25 janvier.’’
Il faut un parti de masse des travailleurs
Cette approche antiparti est à considérer comme une réflexion des déceptions éprouvées face aux dizaines de partis qui ont émergé après la chute de Moubarak. La plupart de ceux-ci se sont limités à plaider pour l’instauration d’une sorte de démocratie capitaliste tout en laissant les véritables maîtres de l’Égypte en place – les capitalistes et les généraux. L’enthousiasme des dirigeants de ces partis pour l’obtention de postes grassement rémunérés n’a pas inspiré de confiance aux travailleurs et aux pauvres.
D’autre part, certains à gauche (comme les Revolutionnary Socialists) ont semé la confusion en soutenant en juin 2012 la candidature de Morsi contre celle d’Ahmed Shafiq, qui représentant l’aile pro-Moubarak. L’élément le plus crucial dans la situation actuelle est le développement de l’action et de l’organisation indépendantes de la classe des travailleurs et des pauvres. Ces derniers ont besoin de disposer de leur propre parti de masse pour défendre leurs intérêts et leurs droits démocratiques.
Tamarod appelle Morsi à démissionner pour être remplacé par un Premier ministre indépendant pour une durée de six mois qui ‘‘dirigerait un gouvernement technocratique dont la mission principale serait de mettre sur pied un plan économique d’urgence afin de sauver l’économie égyptienne et de développer des politiques de justice sociale.’’ Mais ‘‘sauver l’économie (capitaliste) égyptienne’’ signifie très clairement de lancer plus d’attaques contre les travailleurs et les pauvres avec la suppression des subsides à l’alimentation et de nouvelles privatisations destinées à satisfaire le Fonds Monétaire International. Tout cela est à l’opposé des revendications qui avaient émergé en janvier 2011 et qui étaient basées sur le pain, la liberté et la justice sociale.
Ce dont les travailleurs et les pauvres ont besoin, c’est d’un salaire minimum décent, d’une semaine de travail plus courte (sans perte de salaire et avec embauches compensatoires), d’un logement abordable et de qualité, d’un enseignement gratuit et de qualité, d’un programme de construction d’hôpitaux et d’autres infrastructures, de transports en commun gratuits,… Tout cela créerait une masse d’emplois. Ces revendications socialistes combinées à un programme de défense des droits démocratiques pourraient obtenir un soutien massif pour autant qu’elles soient défendues par un parti des travailleurs construits avec et autour des syndicalistes combatifs.
Sans un tel programme, les dirigeants des Frères Musulmans pourront continuer à s’appuyer sur la couche conservatrice qui existe au sein des masses pauvres, surtout dans les campagnes. Tout comme Erdogan en Turquie a réussi à mobiliser un nombre important de partisans, de grandes manifestations ont eu lieu en soutien à Morsi, avec environ 100.000 personnes au Caire le 21 juin. Peu de rapports font par contre état de mobilisations en sa faveur le dimanche 30 juin. Seul un programme clairement socialiste défendant unilatéralement les intérêts des travailleurs et des pauvres tout en exposant au grand jour les intérêts capitalistes de certains dirigeants de premier plan des Frères Musulmans pourrait diviser la base de soutien du Président Morsi.
Un coup d’Etat militaire ?
Le général Abdul Fattah Al-Sisi, commandant en chef des forces armées et ministre de la Défense a déclaré le 23 juin que l’armée pourrait intervenir afin de prévenir le pays de sombrer dans le ‘‘sombre tunnel de la criminalité, de la trahison, des luttes sectaires et de l’effondrement des institutions d’Etat.”
Ce que les généraux et toute la classe dirigeante craignent le plus, c’est l’action de masse indépendante de la classe ouvrière et de la jeunesse, ce qui pourrait menacer leurs intérêts. En outre, des éléments liés à l’ancien régime de Moubarak cherchent à défendre leurs intérêts propres, de même que l’impérialisme américain. Les généraux ne semblent toutefois pas encore confiants de suivre la voie d’une répression militaire directe. Pour le moment, ils tentent encore de se présenter comme des ‘‘arbitres’’ qui veulent forger un gouvernement ‘‘d’unité nationale’’.
Certains dirigeants de Tamarod suggèrent qu’ils soutiendraient l’armée si elle voulait reprendre le pouvoir en main. Il s’agit d’une position très dangereuse, illustrée notamment par les propos tenus par Mahmoud Badr, un porte-parole de Tamarod, qui a salué la déclaration des chefs militaires en ce sens. De même, la foule réunie place Tahrir aurait applaudi en entendant ces nouvelles, en scandant ‘‘L’armée et le peuple sont main dans la main.’’
Il semble possible que, dans les coulisses, le gouvernement américain ait changé son fusil d’épaule et décidé de plutôt considérer l’armée comme le meilleur moyen de stabiliser le pays et son économie capitaliste. Dix ministres du gouvernement ont démissionné le 1er juillet, suggérant que Morsi pourrait rester plus longtemps. Ce dernier tente d’éloigner les critiques des Frères Musulmans et accuse ses ‘‘anciens collaborateurs’’ du régime déchu de Moubarak. Le 2 juillet, il a rejeté les conditions de l’armée.
A ce stade, la plupart des officiers supérieurs ne veulent pas prendre la responsabilité directe du gouvernement. Cependant, sans aucun doute, certains militaires et membres des forces de sécurité aspirent à reprendre le pouvoir qu’ils ont exercé pendant si longtemps sous le règne de Moubarak. Les forces armées contrôlent des pans entiers de l’économie, des officiers supérieurs ont réussi à faire fortune grâce à ce contrôle. Ils désirent disposer de la stabilité économique et politique tout autant que d’autres hommes d’affaires capitalistes afin de poursuivre à amasser de l’argent.
Il y a dix-huit mois encore, le gouvernement militaire tirait sur les manifestants au Caire. Tout gouvernement – islamique ou laïc, civil ou militaire – basé sur la défense du système capitaliste va s’en prendre aux intérêts de la majorité des Egyptiens.
La menace sectaire
L’absence d’un programme capable de répondre aux besoins quotidiens des masses de la part de Tamarod ou de tout autre parti majeur laisse un vide dangereux dans lequel le poison du sectarisme pourrait exploser.
Les chrétiens coptes se sont sentis menacés par le programme d’islamisation des Frères Musulmans et par les attaques contre des églises. Morsi et les Frères Musulmans se sont alignés sur l’Arabie saoudite réactionnaire et sur les cheikhs du Golfe et soutiennent l’opposition sunnite au régime d’Assad en Syrie. Mais il y a trois millions de musulmans chiites en Egypte. Des extrémistes religieux salafistes s’en sont pris aux chiites, un parlementaire déclarant qu’ils étaient ‘‘plus dangereux que des femmes nues’’ et constituaient une menace pour la sécurité nationale. Dans cette atmosphère sectaire, une foule de 3000 personnes a attaqué des maisons de chiites dans le village de Zawyat Abu Musulam le 23 juin. Quatre hommes avaient été traînés hors de leurs maisons pour être tués.
Pour un gouvernement des travailleurs et une démocratie socialiste
Les véritables socialistes et les syndicalistes peuvent construire des mouvements qui permettraient de surmonter les divisions sectaires avec un programme de solidarité de classe contre l’ennemi commun capitaliste, qu’il soit impérialiste ou égyptien.
Les luttes de masse initiées par le début de la révolution en 2011 sont toujours en cours. De nombreux syndicats indépendants ont surgi dans tout le pays. Morsi a lui-même attiré l’attention sur les 4.900 grèves enregistrées au cours de ces 12 derniers mois. Une grève générale peut réunir tous les opprimés de la société et jouir d’un grand soutien de la part de la classe moyenne. Mais une grève générale ne doit pas servir à renverser un dictateur pour qu’il soit remplacé par un autre, qu’il soit général, homme d’affaires ou politicien capitaliste.
Des comités de grève élus démocratiquement et des comités d’action de masse doivent être construits dans chaque grande entreprise et chaque collectivité locale pour discuter de l’élaboration d’un programme et d’un plan d’action orienté vers le renversement révolutionnaire du régime. Ils pourraient être reliés aux niveaux local et national, posant ainsi les bases d’un gouvernement de représentants des travailleurs et des pauvres.
Un appel lancé aux travailleurs de la région pour prendre des mesures similaires contre la pauvreté, le sectarisme et la répression pourrait bénéficier d’un très large écho et aider à construire un mouvement pour le socialisme dans tout le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.
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Environnement. Pénurie énergétique et changement climatique : Il faut une planification socialiste pour les énergies alternatives
Un spectre hante le monde – le spectre du changement climatique irréversible. Mais en même temps, le monde est saisi d’une soif désespérée d’énergie. Chaque année, nous générons et utilisons de plus en plus, produisons de nouveaux produits, tandis que les habitants des pays riches sont persuadés de jeter leurs vieux produits. Au Royaume-Uni, la consommation d’énergie est restée à peu près constante pendant les 30 dernières années, parce que presque tous nos biens de consommation sont importés. L’énergie qui est nécessaire à la fabrication de ces produits, par exemple, en Chine, est une des raisons pour lesquelles la demande en énergie s’est tellement accrue. Mais la demande en énergie n’est pas simplement un besoin de l’“Occident avide”.
Par Geoff Jones, Socialist Party of England and Wales (CIO-Angleterre et Pays de Galles)
Au fur et à mesure que les travailleurs des pays en voie de développement s’organise et obtiennent le droit à la parole, ils demandent eux aussi le droit de pouvoir posséder tous ces biens que nous tenons pour indispensables à la vie : des frigos, des lampes électriques, des radiateurs ou climatiseurs.
La construction de routes, de chemins de fer, de logements décents, tout cela demande de l’énergie, même si de nouvelles technologies permettent aujourd’hui de ralentir la croissance de cette demande – par exemple, l’utilisation de téléphones portables nous épargne la nécessité de mettre en place un réseau de câbles téléphoniques ; les ampoules LED consomment beaucoup moins que les ampoules incandescentes traditionnelles.
La concentration de dioxyde de carbone et autres gaz à “effet de serre” dans l’atmosphère terrestre augmente de plus en plus. Cette augmentation de leur concentration va mener à une hausse de la température mondiale, dont les conséquences pourraient être catastrophiques pour l’humanité. 87 % de notre énergie dans le monde est produite en brulant des carburants fossiles non-renouvelables – essentiellement le pétrole, le gaz et le charbon –, ce qui génère du dioxyde de carbone.
Au Royaume-Uni, la proportion est presque la même, bien que le gouvernement Con-Dem se soit engagé à ce que 15 % (à peine) de notre énergie provienne de sources d’énergie renouvelables d’ici 2020. Une telle politique qui finalement ne mène à aucun changement, ne peut que nous conduire à la catastrophe.
Les sources d’énergie aujourd’hui
Aujourd’hui, la plupart de notre énergie est produite par de grosses multinationales dont le seul but est une offre sur le court terme et de super profits.
Pour extraire le pétrole, ils passent des contrats avec les seigneurs féodaux du Moyen-Orient, et ils transforment des terres agricoles en déserts pollués. Ce n’est que lorsque la pollution causée par l’extraction du pétrole apparait plus proche de chez eux, comme on l’a vu avec la catastrophe du golfe du Mexique, que les multinationales pétrolières (essentiellement américaines) affichent un tant soit peu de repentir – mais ça ne dure jamais qu’un bref moment.
Cela fait une génération que l’offre mondiale de pétrole est dominée par les dictatures du golfe Persique. L’Arabie saoudite produit ainsi à elle seul le dixième des exportations de pétrole. Cherchant désespérément d’autres sources, les compagnies pétrolières bâtissent des plate-formes pétrolières en haute mer qui forent de plus en plus profond et dans des zones de plus en plus dangereuses.
L’ironie suprême est que le réchauffement climatique lui-même cause la fonte des glaces polaires, ce qui ouvre tout d’un coup l’accès aux immenses gisements de pétrole et de gaz de l’Arctique, ce qui ne peut avoir pour conséquence qu’une hausse encore plus catastrophique de la température mondiale.
L’exploitation à ciel ouvert des sables bitumineux du nord du Canada, qui est un procédé extrêmement polluant et inefficace, fournit malgré tout 20 % des importations de pétrole américaines. À présent, il y a un projet de démarrer une exploitation qui créera dans le nord du Canada un désert toxique de la taille de l’Arabie saoudite, qui amènera ensuite le pétrole sur la côte Pacifique à l’ouest afin qu’il puisse y être acheminé vers la Chine. Ce projet a déjà provoqué de nombreuses manifestations.
Certains “biocarburants” sont une source alternative d’énergie, mais leur culture implique la destruction d’immenses superficies de forêt tropicale en Amérique latine et la reconversion de terrains aux États-Unis et ailleurs uniquement pour la production de maïs, à fins de biocarburant. Toutes ces terres pourraient à la place être employées pour cultiver des vivriers.
Après le pétrole, le gaz naturel est la deuxième plus grande source d’énergie du Royaume-Uni ; dans le monde, ce combustible est troisième derrière le charbon et le pétrole. Dans les années ’80 et ’90, les Tories ont utilisé les champs de gaz de la mer du Nord pour restaurer leur économie capitaliste en faillite. À présent ces gisements sont presque épuisés. En 2011, les importations de gaz ont excédé la production nationale pour la première fois.
Dans le reste du monde, la production continue de s’accroitre, mais les réserves ne sont évidemment pas inépuisables. En outre, rien ne permet d’empêcher les exportateurs d’augmenter leurs prix sans prévenir (comme l’Opep, Organisation des pays exportateurs de pétrole, l’avait fait en 1973 en décidant subitement une hausse de +70 %), ou d’éviter de couper totalement leurs fournitures énergétiques, comme la Russie l’a fait subir à l’Ukraine en 2009 en coupant le “robinet à gaz”.
La nouvelle panacée serait à présent la “fracturation hydraulique” – un forage profond dans les couches de schiste géologiques pour en extraire du gaz. Au Royaume-Uni, les ministres Con-Dem ont sauté sur cette occasion pour permettre aux firmes privées de foncer sur ce nouveau créneau, même après qu’une première expérience ait déclenché des séismes mineurs et ait révélé un véritable risque de pollution des eaux souterraines.
Les Tories parlent de gaz “bon marché”, mais le gaz qui sera ainsi produit sera vendu sur le marché mondial ; donc son prix sera aligné sur le prix mondial. De toute manière, un récent rapport indique que le cout de l’extraction par fracturation hydraulique serait plus élevé que le prix mondial actuel du gaz.
Enfin, il y a le charbon. La Chine est le plus grand producteur de charbon mondial. Elle extrait trois fois plus de charbon que les États-Unis et six fois plus que l’Inde, qui sont les deux autres plus grands producteurs mondiaux. Depuis que les Tories ont détruit l’industrie charbonnière britannique dans les années ’80, le Royaume-Uni est contraint d’importer deux fois plus de charbon que ce qu’il en produit.
À l’échelle mondiale, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) prédit, sur base des tendances actuelles, que le charbon sera la plus grande source d’énergie mondiale d’ici 2020, et que si cette tendance continue, le climat mondial connaitrait une hausse de température de 6°C d’ici 2100.
L’énergie nucléaire, qui était généralement considérée il y a 50 ans comme une source d’énergie bon marché et non-polluante, a depuis longtemps perdu de son aura. Les réacteurs nucléaires, utilisant des systèmes conçus pour produire des armes nucléaires, laissent derrière eux des montagnes de déchets radioactifs hautement dangereux.
Au centre de traitement des déchets nucléaires de Sellafield, en Angleterre, le stock de déchets radioactifs est égal en volume à 27 piscines olympiques, et les autorités n’ont aucune idée de quoi faire avec ! (ce serait déjà bien s’ils savaient où se trouve l’ensemble des déchets). On pourrait construire des systèmes qui produisent moins de produits dangereux mais, à nouveau, les gouvernements et les entreprises privées ne sont pas désireux de financer les investissements sur le long terme que cela implique.
Pendant ce temps, la possibilité de systèmes efficaces et non-polluants tels que la fusion nucléaire (plutôt que la fission) semble n’avoir été qu’un mirage, qui s’éloigne au fur et à mesure qu’il parait plus proche.
La capture du carbone ?
Le charbon, le pétrole et le gaz requièrent des procédés de plus en plus chers, dangereux et polluants pour leur extraction, tout en continuant à relâcher de plus en plus de gaz à effet de serre. Les émissions mondiales de dioxyde de carbone sont passées de 20 gigatonnes par an en 1990 à près de 30 gigatonnes par an aujourd’hui. Neuf gigatonnes sont produits par les seules centrales électriques au charbon.
Le changement climatique ne peut plus être empêché, mais il pourrait être ralenti en capturant une partie du dioxyde de carbone émis et en le stockant quelque part. Mais cela voudrait dire un investissement considérable dans la recherche afin de développer des systèmes adéquats ; cela couterait de l’argent et nuirait aux bénéfices des compagnies énergétiques. Les gouvernements parlent de la nécessité de capturer et stocker le carbone, mais il faut beaucoup plus de recherches ; aussi, le nombre d’installations à capture du carbone actuellement opérationnelles est minuscule si on le compare à l’ampleur du problème.
Il y avait dans le monde en 2011 seize installations à grande échelle de capture du carbone, qui toutes ensemble ne capturaient qu’un millième du carbone généré à l’échelle mondiale. Il est prévu d’en construire plus (surtout en Chine), mais dans de nombreux cas, les investissements gouvernementaux se font longtemps attendre.
Au Royaume-Uni par exemple, l’installation de capture de carbone de Longannet, qui devait capturer environ 1,5 mégatonnes de carbone par an, n’a finalement jamais vu le jour, parce que les propriétaires espagnols de Scottish Power et le gouvernement Con-Dem ne sont pas parvenus à se mettre d’accord sur le financement du projet.
Bien que Ed Davey, secrétaire d’État à l’énergie Con-Dem, aime discourir à longueur de temps sur les “formidables opportunités” qui se présentent dans l’industrie de la capture de carbone, il n’y a en ce moment que très peu de recherches effectuées, et aucune installation de capture de carbone à grande échelle n’existe au Royaume-Uni.
Il existe une alternative
Il existe pourtant une alternative à l’accroissement indéfini de l’utilisation de carburants fossiles. En fait, en novembre 2009 déjà, dans un article paru dans la célèbre revue américaine Scientific American, on démontrait que simplement en utilisant la technologie dont nous disposons déjà à l’heure actuelle, il serait possible de satisfaire toute la demande mondiale en énergie, en utilisant des sources d’énergie renouvelables et non-polluantes. Quelles sont ces sources ? Essentiellement les énergies solaire, éolienne, et hydraulique.
L’énergie solaire, générée par des panneaux photovoltaïques, est déjà familière. On la voit un peu partout, sur les calculatrices de poche et sur les toits des maisons. La baisse de cout extrêmement rapide des matériaux nécessaires pour la fabrication des panneaux photovoltaïques rend aujourd’hui possible et compétitive la génération d’énergie solaire à une échelle industrielle.
En Californie par exemple, près de 2 gigawatts d’énergie solaire ont été installés. Cela est d’une part réalisé par des “fermes solaires”, champs de panneaux solaires à grande échelle, et d’autre part, par les nombreuses installations sur les toits des maisons et des entreprises, qui subviennent ainsi à leurs propres besoins.
Cette “génération d’énergie distribuée” a aussi le grand avantage de fortement diminuer le cout du transport de l’électricité. De tels plans ont été adoptés en Allemagne, et c’était également un des objectifs du dernier gouvernement britannique, qui voulait créer une “taxation adaptée” afin d’encourager les firmes solaires britanniques (mais ce plan est passé à la trappe sitôt les Con-Dem au pouvoir).
Bien sûr, la Californie est un cas particulier, vu qu’elle jouit d’un climat idéal, et de centaines d’hectares de désert ; mais l’idée des fermes solaires est reprise sur d’autres continents. Au Ghana par example, un projet d’installation solaire devrait fournir 155 mégawatts – 6 % de la demande énergétique ghanéenne.
Aussi, un immense projet appelé “Desertec”, vise à satisfaire 15 % de la demande énergétique européenne à partir de fermes solaires en Afrique du Nord, acheminée par des câbles sous la Méditerranée. Mais ce projet rencontre beaucoup de critiques. Au premier rang, les Africains qui se demandent pourquoi ils devraient envoyer toute cette électricité en Europe, quand eux-mêmes en ont tellement besoin. Mais il reste tout de même que ce projet démontre que la génération d’énergie solaire à grande échelle est possible.
L’énergie éolienne est devenue la source d’énergie renouvelable la plus diabolisée. Mis à part les mythes selon lesquels les champs éoliens en haute mer terroriseraient les dauphins et tueraient les oiseaux migrateurs, l’énergie éolienne est souvent décrite comme inefficace et chère. En réalité, tout cela est faux.
Une récente étude effectuée par un groupe de recherche très respecté, Cambridge Econometrics, a démontré qu’il est possible d’installer des turbines éoliennes en haute mer qui satisferaient à un quart de la demande énergétique britannique à un cout modique, à peine plus que le cout équivalent d’utilisation de gaz équivalent, tout en créant des dizaines de milliers d’emplois dans le secteur de la construction.
Il faut, il est vrai, des systèmes de stockage de l’énergie pour s’assurer de la fourniture au cas où il n’y a ni vent, ni soleil, mais cela peut être fait.
On entend aussi l’argument comme quoi le régime des vents n’est pas fiable. Moins que les oligarques russes et les sultans arabes ?
L’énergie hydraulique, qui utilise des turbines actionnées par l’eau stockée dans de grands réservoirs (lacs de barrage), est la plus ancienne forme d’énergie renouvelable.
Aux États-Unis dans les années ’30, l’Autorité de la vallée du Tennessee a été instituée en tant qu’agence fédérale hydraulique – suscitant une vive critique de la part des compagnies énergétiques – afin de fournir des emplois et une électricité à bon marché grâce à un réseau d’immenses barrages. En Chine, le barrage des Trois Gorges, qui traverse le fleuve Yangtzi, devrait fournir 22,5 gigawatt. Mais ce barrage a déplacé 1,3 millions d’habitants, et causé de graves dégâts écologiques.
D’un autre côté, l’énergie océanique et marémotrice est une immense ressource mais qui est complètement négligée, surtout si on parle d’une nation insulaire telle que le Royaume-Uni.
En Europe, il n’existe qu’une seule installation marémotrice à grande échelle, celle de l’estuaire de la Rance, en France, qui fonctionne depuis 1966, et génère 240 mW. Mais des projets grandioses tels que celui du barrage maritime de l’estuaire du Severn, censé produire 5 % des besoins énergétiques britanniques, ne sont sans doute pas la meilleure option. Une majorité de l’industrie de la construction pourrait se voir engagée dans ce projet pendant des années, et il pourrait avoir des conséquences environnementales imprévisibles. D’un autre côté, un réseau de générateurs marémoteurs tel que proposé par l’ONG Friends of the Earth, produirait tout autant d’énergie pour beaucoup moins de dégâts écologiques.
Enfin, le développement de générateurs utilisant l’énergie des vagues (ou houlomotrice) est complètement ignorée par le gouvernement et par les entreprises énergétiques.
En fait, dans l’ensemble, très peu d’intérêt est affiché par les gouvernements et les multinationales de l’énergie partout dans le monde pour le développement de systèmes non-polluants.
Bien que la recherche dans de nouvelles technologies encore inconnues puisse offrir des solutions encore plus efficaces dans le futur, et devrait d’ailleurs être financée comme il le faut, il est urgent de s’occuper de ce problème aujourd’hui et maintenant. Au Royaume-Uni, la dépendance obsessive de la part du New Labour et des Tories sur l’industrie privée nous mène droit au pire.
D’un côté, il faut absolument fermer les centrales électriques au charbon qui vomissent des tonnes de dioxyde de carbone dans l’air, d’autant plus étant donné leur âge, vu que que les firmes énergétiques refusent d’investir dans de nouveaux générateurs qui seraient un peu plus propres.
D’un autre côté, nous voyons que les gouvernements ont toujours échoué à maintenir le moindre engagement envers la production d’énergie non-polluante et les économies d’énergie. Ils espèrent pouvoir se baser sur des centrales au gaz, en important du gaze ou en utilisant des procédés polluants et potentiellement très dangereux tels que la fracturation hydraulique.
Quoi qu’il en soit, le prix des combustibles va inévitablement s’accroitre, ce qui veut dire que de plus en plus de gens seront poussés dans la misère de ce fait. Et le chef de l’office de régulation de l’industrie, Ofgen, nous a déjà prédit que dans quelques années, le Royaume-Uni connaitra sans doute des délestages, ce que nous n’avons jamais vu dans le pays depuis la grève des mineurs de 1974.
Que doivent faire les marxistes?
Tout d’abord, nous ne devons pas accorder la moindre confiance au système capitaliste pour nous sortir de la catastrophe qui arrive à grands pas.
Au Royaume-Uni, nous devons réclamer :
- La fin immédiate des essais de fracturation hydraulique.
- La renationalisation du secteur de la production et de la distribution d’énergie, afin de permettre la mise en place d’un plan de capture de carbone, et de nous sortir de l’utilisation de combustibles fossiles aussi rapidement que possible.
- Une reconversion à très grande échelle de l’industrie de la “défense” vers la production de générateurs éoliens et solaires, en nationalisant les grandes compagnies énergétiques quand cela est nécessaire, sans compensation sauf sur base de besoins prouvés.
- Un programme national d’expansion de la “génération énergétique distribuée” sur chaque nouveau bâtiment construit : à chaque logement et chaque entreprise ses panneaux solaires.
- Une expansion massive du système de transport public, en particulier des chemins de fer, afin de réduire la pollution par les véhicules qui circulent sur les routes.
- Un plan massif et public de recherche et de développement dans les systèmes de génération d’énergie marémotrice et houlomotrice.
Dans le monde :
- Les organisations des travailleurs, des peuples indigènes et des militants écologistes doivent s’opposer à tous les plans de développements désastreux tels que l’extraction des sables bitumineux et les plantations de cultures à “biocarburants”.
- Il faut soutenir la lutte des peuples des pays à basse altitude, en particulier d’Asie du Sud-Est et du Pacifique, qui seront contraints à la migration et à l’appauvrissement national à cause de la hausse du niveau de la mer et du changement climatique.
- Il faut se battre pour un plan énergétique international afin de satisfaire aux besoins de l’humanité en utilisant uniquement les énergies renouvelables.
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Arabie Saoudite : ‘‘À bas la dictature brutale des Saoud !’’
Le 13 mars dernier, sept jeunes hommes ont été exécutés en Arabie Saoudite par un peloton d’exécution. La Fédération générale des syndicats libres des travailleurs (GFFWTU) mène campagne pour les droits démocratiques et syndicaux en Arabie Saoudite. Un membre de cette organisation, Yahya Al-Faifi, est revenu sur ces exécutions dans le cadre d’une discussion avec la rédaction du ‘‘Socialist’’, l’hebdomadaire du Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles).
Yahya Al-Faifi, de la GFFWTU.
Ces sept hommes avaient été arrêtés en janvier 2006 et accusés d’organiser un groupe criminel commettant des vols à main armée et des cambriolages de bijouteries. Ils ont été condamnés à mort par un tribunal de la province d’Aseer en août 2009. Yahya explique comment, dans une société où d’immense richesses sont concentrées entre les mains de l’élite au sommet du pouvoir, les jeunes sont souvent obligés de se tourner vers le crime pour tenter de nourrir leurs familles ainsi qu’eux-mêmes : ‘‘Ces jeunes gens étaient du Sud, les provinces les plus démunies de l’ensemble du pays. C’est de là que le ”Printemps Saoudien” est le plus susceptible de partir !’’
Le sang de ces jeunes est utilisé pour effrayer les gens et les écarter de l’idée de contester l’autorité du régime en place. ‘‘Pensez-vous vraiment que le gouvernement saoudien a mené une enquête sur les origines et les facteurs qui ont motivé ces crimes, ou pensé à prendre des mesures afin de lutter contre le chômage des jeunes ? Non, c’est un État policier qui n’est occupé que par sa propre sécurité et rien d’autre.’’
Yahya a également exprimé des préoccupations au sujet de la corruption dans les procédures judiciaires. ‘‘Selon les ”garanties” internationales adoptées à travers le Conseil économique et social des Nations Unies, la peine capitale ne peut être prononcée que pour les ‘‘crimes les plus graves’’, comme l’assassinat, et seulement après une procédure judiciaire rigoureuse. Aucun de ces critères fondamentaux n’a même été respecté dans ce cas. En outre, les peines de mort ont été prononcées en grande partie à partir d’aveux initiaux extorqués sous la torture. Les allégations de torture doivent être examinées. Les accusés auraient seulement fait de brèves apparitions devant le tribunal, sans être autorisés à parler ou avoir des possibilités d’assurer leur défense. Ils ont affirmé qu’ils n’étaient pas présents du tout pendant les procédures d’appel, et n’avaient pas d’avocat pour les représenter.’’
Yahya ajoute que le ministère de l’Intérieur cite fréquemment des versets du Coran sortis de leur contexte, afin de tenter de procurer une justification religieuse pour ses crimes contre la population saoudienne. Ceux-ci sont en fait motivés politiquement par la nécessité de maintenir la primauté de la famille royale et de l’impérialisme, en particulier dans le contexte des mobilisations de masse qui ont secoué le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.
La GFFWTU appelle à :
- La fin de la peine capitale en Arabie saoudite.
- Assurer la formation et l’apprentissage, dans les industries du pétrole et dans l’ingénierie, de jeunes et de migrants, aujourd’hui dépourvus de tout avenir.
- En finir avec la domination de l’impérialisme occidental et de l’industrie de l’armement.
- La nationalisation de l’industrie pétrolière sous le contrôle démocratique des travailleurs, et l’utilisation des milliards de dollars aujourd’hui dépensés en armement à l’amélioration des conditions de vie des pauvres.
- En finir avec la corruption. Pour l’utilisation de la richesse pétrolière de l’Arabie Saoudite au profit de la majorité de la population, et non pas de la famille royale et de la petite clique qui l’entoure.
- A bas la dictature brutale des Saoud ! Pour la pleine reconnaissance des droits sociaux, syndicaux et démocratiques dans toute la péninsule arabique.
Quelques jours seulement après que les sept jeunes aient été exécutés, le prince Charles et Camilla ont visité l’Etat semi-féodal Saoudien pour faciliter et renforcer les liens commerciaux entre les entreprises du Royaume-Uni et le royaume saoudien, y compris au travers de la vente lucrative d’armes de guerre.
Selon Amnesty International :
L’Arabie Saoudite a un des taux les plus élevés d’exécution dans le monde. Au moins 24 personnes ont été exécutées en 2013, dont une travailleuse domestique Sri Lankaise, Rizana Nafeek, accusée d’avoir tué un bébé dont elle s’occupait alors qu’elle n’avait que 17 ans, faits qu’elle a affirmé avoir confessé sous la contrainte. Au moins 82 personnes ont été exécutées en 2011, et un nombre similaire en 2012, soit plus de trois fois le chiffre de – minimum – 27 en 2010. L’Arabie Saoudite applique la peine de mort pour les crimes tels que les infractions relatives aux drogues, ‘‘à l’apostasie et à la sorcellerie’’.
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Égypte : Protestations massives contre la tentative de prise de pouvoir de Morsi. Pour une révolution socialiste !
De grands mouvements de protestation ont eu lieu pour empêcher le président égyptien Morsi de s’attribuer de nouveaux pouvoirs et d’imposer une constitution islamique. Les manifestants ont notamment scandé ‘‘Le peuple veut la chute du régime’’. De grandes manifestations ont aussi eu lieu en faveur du président. La violence brutale a rappelé les méthodes de l’ancien président Moubarak, des casseurs pro-Morsi s’en prenant à des manifestants pacifiques avec l’appui des forces de l’ordre.
David Johnson, Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles)
L’ébauche de constitution a été hâtivement rédigée à l’Assemblée Constituante après une réunion de 15 heures. Morsi a appelé à la tenue d’un référendum le 15 décembre pour approuver cette nouvelle constitution. Sa hâte est une réaction face à l’opposition massive qu’a suscitée sa tentative de prise de pouvoir. Il a à présent renoncé à interdire toute opposition légale à son autorité, mais ce n’est que partie remise jusqu’à la promulgation de sa nouvelle constitution. Après une décision de l’assemblée des juges selon laquelle ces derniers ne superviseraient pas le référendum, le Haute Commission Electorale a déclaré que ce référendum se déroulerait en deux étapes, les 15 et 22 décembre.
L’ébauche de constitution contient de nombreux articles qui menacent toute future opposition. Elle déclare ‘‘qu’aucun individu ne pourra être insulté’’. L’ancien dictateur Moubarak avait utilisé de telles méthodes pour faire taire ses opposants. Les persécutions criminelles pour ‘‘avoir insulté le président’’ ont d’ailleurs augmenté depuis l’arrivée au pouvoir de Morsi. Des journalistes ont notamment été emprisonnés.
La nouvelle constitution autorise les citoyens à être jugés en cour martiale pour ‘‘crimes contre les forces armées’’. Les intérêts économiques de l’armée et ses pouvoirs restent d’actualité et hors de portée de tout contrôle démocratique, notamment concernant sa capacité d’établir son propre budget. Les travailleurs des entreprises appartenant à l’armée (qui contrôle directement une grande partie de l’économie égyptienne) pourraient être jugés en cour martiale pour faits de grève ou occupation d’entreprise. Cette loi était déjà en vigueur sous la dictature de Moubarak. Le 9 décembre, Morsi a donné à des officiers de l’armée le droit de procéder à des arrestations, limitant d’autant plus les droits acquis de haute lutte durant la révolte du 25 janvier 2011.
Les droits accordés aux femmes sont vagues et laissés à la libre interprétation. Mais des femmes et des jeunes filles ont déjà été attaquées en public et se sont vu couper les cheveux de force pour avoir refusé de porter le voile en public !
La police a acquis le droit de ‘‘conserver la morale publique’’, ce qui ouvre la voie à des restrictions des libertés civiles, dont le droit de rassemblement et la liberté d’expression, tout comme en Iran ou en Arabie Saoudite. Les 8 millions de chrétiens se sentent particulièrement menacés par de tels pouvoirs.
Des attaques contre les travailleurs et les pauvres
Cette constitution ouvre la voie à d’autres attaques contre les travailleurs et les pauvres. Le gouvernement a également négocié un prêt de 4,8 milliards de dollars avec le Fonds Monétaire International (FMI). En conséquence de l’accord et du budget d’austérité, les subsides sur le butane et l’électricité ont été réduits. Morsi a aussi annoncé des augmentations des taxes sur de nombreux services publics et divers biens de consommation. Quelques heures après cette annonce, il a toutefois décidé de reporter son plan pour avoir un ‘‘dialogue social’’. Une telle indécision suggère de grands clivages et divisions au sein même du gouvernement et du parti des Frères Musulmans. Les Frères Musulmans ont attaqué l’augmentation des taxes et exigé sa suspension. Ils craignent qu’une riposte de la population leur coûte la victoire lors du référendum. Signe d’un approfondissement de la crise politique, le ministre des finances, Mumtaz al-Said, a déclaré le 11 décembre que le prêt du FMI sera postposé à janvier 2013.
La premier ministre Hisham Qandeel a déclaré que le gouvernement se devait d’améliorer ‘‘l’environnement des affaires (…) faire de l’Égypte une destination idéale pour les investissements directs venant de l’étranger.’’ L’élite riche qui se trouve à la tête des Frères Musulmans vise à profiter de la privatisation de larges pans des industries publiques.
Tentative d’étranglement des syndicats indépendants
Le décret n°97 vise à étrangler les syndicats indépendants qui émergent. Un seul syndicat sera toléré dans une entreprise, ce qui empêche de nouveaux syndicats indépendants de défier la Fédération Syndicale Égyptienne (FSE).
Les membres exécutifs de la FSE de plus de 60 ans (la majorité) vont être remplacés par de nouveaux membres impsés par le ministre du travail (qui est membre des Frères Musulmans). Avant le 25 janvier 2011, 22 des 24 membres de la FSE étaient membres du Parti National Démocratique de Moubarak. Les Frères Musulmans comptent simplement remplacer les bras droits de Moubarak par les leurs.
De nombreux partis d’opposition ont constitué le Front du Salut National, emmené par l’ancien dirigeant de la Commission de l’Énergie Atomique des Nations Unies Mohamed El-Baradei, l’ancien candidat aux présidentielles Amr Moussa (également ex-ministre de Moubarak), et Hamdeen Sabbahi, un nassériste de droite.
Tout en protestant aux côtés du FSN et des autres opposants contre la tentative de prise de pouvoir de Morsi et contre sa constitution antidémocratique, les véritables socialistes doivent garder leur identité propre. Les programme et les précédentes actions d’El-Baradei, Moussa et des autres politiciens capitalistes ne peuvent ne sont en aucun cas une source d’inspiration pour ceux qui luttent contre les partis islamistes. Seule une opposition de classe est de nature à provoquer une rupture entre les masses et l’Islam politique.
Les véritables socialistes doivent clairement se différencier des libéraux et des nationalistes bourgeois. Morsi manipule les craintes des adeptes des Frères Musulmans en leur faisant croire que l’opposition complote son accession au pouvoir à l’aide des forces pro-Moubarak. La gauche doit répondre aux accusations du régime de Morsi, selon qui les groupes de jeunes révolutionnaires sont des reliques du régime de Moubarak et manifestent aux côtés de hautes figures militaire, judiciaires et de la sécurité, du personnel de Parti National Démocratique et des membres du monde des affaires devenus riches sous Moubarak.
Les travailleurs ont besoin de leur propre parti, basé sur des syndicats indépendants. Un programme socialiste de changement révolutionnaire de la société peut rassembler les travailleurs, les pauvres et les jeunes. Une constitution socialiste inclurait de véritables droits démocratiques pour tous, ainsi que la disparition de la pauvreté, de l’analphabétisme et du manque de logements, un enseignement et des soins de santé gratuits et de qualité, des pensions pour les personnes âgées et les handicapés, un salaire minimum décent,… Ce sont là des droits fondamentaux qui ne seront pas accordés par des politiciens capitalistes, qu’ils soient islamistes de droite ou membre d’antiques partis libéraux.