Tag: Afrique du Sud

  • [video] Interview de Weizman (Afrique du Sud)

    A la réunion du Comité Exécutif Internationale du Comité pour une Internationale Ouvrière, nous avons fait une interview de Weizman, de notre organisation en Afrique du Sud Democratic Socialist Movement. Nous avons avec lui abordé la situation dans ce pays et entre autres la scission survenue dans l’ANC.

  • Problèmes rencontrés dans la construction de nouveaux partis des travailleurs

    Théorie

    Dans cet article, notre camarade Peter Taaffe analyse quelques leçons à tirer de l’histoire en ce qui concerne la formation d’organisations de masse pour les travailleurs. Il revient à ce titre plus particulièrement sur les expériences récentes accumulées en Italie et en Allemagne ainsi que lors des derniers développements qu’a connu la situation au Brésil.

    Article par Peter Taaffe, Secrétaire Général du Socialist Party, section du Comité pour une Internationale Ouvrière (CWI/CIO) en Angleterre et au Pays de Galles.

    Une question centrale pour le mouvement ouvrier à travers le monde – et peut-être d’ailleurs la plus cruciale à ce stade – est celle de l’absence dans la plupart des pays d’une voix politique indépendante sous forme parti(s) des travailleurs de masse.

    L’effondrement du mur de Berlin et des odieux régimes staliniens a également signifié la liquidation des économies planifiées. Il s’agissait d’un important tournant historique, avec des conséquences majeures pour la classe ouvrière et, plus particulièrement, pour sa conscience. Coïncidant avec le long boom économique des années ‘90 et la pression sans relâche du capitalisme néo-libéral, ce processus a décomposé les bases de la social-démocratie et des partis « communistes ». Les formations que Lénine et Trotsky caractérisaient encore comme des « partis ouvriers bourgeois » (ouvriers à leur base, bourgeois à leur direction) ont assisté à la disparition de leur base ouvrière pour devenir des formations purement bourgeoises. En conséquence, pour la première fois depuis des générations – plus de 100 années dans le cas de la Grande-Bretagne – la classe ouvrière est sans plate-forme politique de masse.

    Mais ce n’est pas la première fois dans l’histoire que des marxistes sont confrontés à une telle situation. Ni Marx ni Engels n’ont cru que le mouvement ouvrier gagnerait une conscience de classe indépendante ou une conscience socialiste uniquement par l’agitation, la propagande ou même leurs puissantes idées théoriques. L’expérience serait le plus grand professeur de la classe ouvrière, argumentait Marx, en combinaison avec les idées du socialisme scientifique (le marxisme). C’est pour cette raison que Marx, sans jamais diluer son propre trésor théorique, a tâché de lier ensemble dans l’action les forces dispersées de la classe ouvrière à travers, par exemple, l’établissement de la…

    …Première Internationale

    Les marxistes ont travaillé conjointement avec des syndicalistes anglais et même des anarchistes au sein de l’Internationale. Marx a toujours procédé à partir du niveau existant d’organisation et de conscience de la classe ouvrière, cherchant par sa propre intervention inestimable à l’élever à un plan supérieur. La Première Internationale a accompli cette tâche colossale mais, à la suite de la défaite de la Commune de Paris ainsi que des tentatives de sabotage et finalement la scission des anarchistes emmenés par Bakounine, la Première Internationale avait épuisé sa mission historique et a été dissoute. Cette expérience, cependant, a été essentielle en préparant le terrain pour la Deuxième Internationale, avec le développement des partis de masse, l’acceptation du socialisme, etc…

    Engels & le Labour Party

    Engels a adopté une approche similaire à celle de Marx dans la dernière partie du dix-neuvième siècle, en Grande-Bretagne par exemple, pendant la « longue hibernation » de la classe ouvrière. Il a patiemment propagé l’idée d’un « parti des travailleurs indépendant », en opposition au sectarisme des forces socialistes et même « marxistes » de ce temps. Il ne s’est par exemple pas basé sur la Social Democratic Federation (Fédération Social-Démocrate) qui avait formellement adhéré au « socialisme scientifique » et comprenait à un moment plus de 10.000 membres, mais qui avait aussi adopté une attitude ultimatiste et sectaire envers d’autres forces et en particulier envers l’idée de rassemblement pour créer un parti indépendant de la classe ouvrière. Aucun théoricien dans le mouvement ouvrier n’égalait à ce moment Engels, historiquement le second derrière Marx lui-même, mais il insistait sur le fait qu’étant donné le niveau de conscience et d’organisation politique de la classe ouvrière britannique à cette époque, un tel pas en avant vaudrait des douzaines de programmes. Il s’agissait d’une reconnaissance du fait – illustré plus tard par le développement du Labour Party (le parti travailliste) comme parti de masse – qu’une « pure » et immaculée organisation marxiste en Grande-Bretagne avec des racines dans les masses ne pourrait se développer sans que la masse de la classe ouvrière ne passe d’abord par l’expérience de son propre parti indépendant.

    Lénine a adopté la même attitude face au Labour Party qui était né depuis, même si ce dernier n’avait pas adopté une orientation socialiste à sa fondation. Il disait que même si le Labour Party « ne reconnaissait pas la lutte des classes, la lutte de classe reconnaîtrait certainement le Labour Party ». Son analyse a elle aussi été confirmée par le virage à gauche avec des traits révolutionnaires prononcés qu’a connu la Grande-Bretagne après la Révolution russe. Cela s’est notamment exprimé à l’intérieur du Labour Party par l’adoption de l’aspiration au socialisme à travers la célèbre « clause quatre », liquidée par « l’entriste bourgeois » Tony Blair en 1995.

    Depuis lors, le processus de dégénération politique du « New Labour » a été inéluctable et immuable. Et cela en dépit des minces espoirs de ceux qui comme Tony Benn habitent un avant-poste réformiste de gauche isolé au milieu de l’océan néo-libéral du New labour. Cette dégénération n’a pas seulement eu des conséquences idéologiques, mais a également affecté matériellement les luttes de la classe ouvrière. La bourgeoisie a pu utiliser avec succès l’effondrement du stalinisme pour mener une contre-révolution idéologique à travers le monde entier dont les plus grands effets se sont fait sentir aux sommets de la social-démocratie et de l’aile droite syndicale. Leur enthousiasme à embrasser l’économie de marché a renforcé la capacité de la bourgeoisie à vendre son programme néolibéral, accompagné par le leitmotiv de Thatcher, « There is no alternative / Il n’y a pas d’alternative ». À la différence des années ’80, où cette idée était rejetée, elle est maintenant renforcée par les dirigeants ex-sociaux-démocrates et par l’aile droite syndicale.

    La seule alternative

    Quand les « partis ouvriers bourgeois » étaient réformistes, la classe dirigeante était au moins forcée de regarder derrière son épaule. Ces partis étaient dans une certaine mesure un « contrôle », ne fut-ce que partiel, pour empêcher la bourgeoisie d’aller « trop loin ». Un regard sur l’Allemagne d’aujourd’hui renforce ce point. L’apparition du « Die Linke » d’Oskar Lafontaine, même avec toutes les insuffisances de ce parti, a néanmoins exercé un effet sur les sociaux-démocrates du SPD. Emmêlé dans une coalition bourgeoise avec les démocrates-chrétiens d’Angela Merkel, le SPD a connu une baisse dramatique de son soutien, électoralement ainsi qu’en terme d’adhésions. Parallèlement, Die Linke a bénéficié de la perte de soutien du SPD et se tient actuellement à environ 12% dans les sondages d’opinion. En retour, cette situation a contraint les sociaux-démocrates à s’opposer à certaines « réformes », telles que l’attaque brutale contre les chômeurs, alors qu’ils en avaient accepté le principe dans la précédente coalition et le précédent gouvernement de Schröder, lui-même du SPD.

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    ‘Pour la Grande-Bretagne’, c’est-à-dire pour les riches et les patrons, au détriment des pauvres et des travailleurs…

    En Grande-Bretagne, Gordon Brown utilise à sa sauce la vieille affirmation de Thatcher en déclarant aux directions syndicales « quelle est votre alternative au New Labour ? ». Les élections – avec les trois principaux partis qui dans les faits ne se distinguent pas – sont maintenant pratiquement une farce en Grande-Bretagne. Le système électoral britannique combiné à l’absence de réel choix signifie que les résultats des prochaines élections, comme Polly Toynbee (du quotidien The Guardian) l’a précisé, seront déterminés par les votes « marginaux ». Finalement, seuls les 20.000 électeurs « flottants » décideront du résultat.

    Ceci va de pair avec la domination d’une caste bureaucratique de droite ossifiée au sommet des syndicats, comme Prentis (secrétaire général du syndicat Unison, le plus grand syndicat professionnel de Grande Bretagne) et d’autres, qui agit en tant que véritable frein sur chaque action efficace, tel que l’a encore démontré le récent conflit postal. Mais le mécontentement colossal de la base montre que cette situation ne pourra continuer sans arriver à un conflit, dans les usines ou politiquement. Sans compétition sérieuse de la part de la gauche, y compris de la gauche syndicale, Gordon Brown continuera à traiter les syndicats et en particulier leur direction avec le plus grand mépris avec l’assurance que le New Labour est la seule alternative.

    La classe ouvrière française – actuellement engagée dans une lutte épique contre le gouvernement Sarkozy qui est décidé à casser ses droits et conditions de vie – fait face à un dilemme semblable. Durant les 15 dernières années, chaque fois que la bourgeoisie française a cherché à affronter la classe ouvrière de telle manière, cela s’est terminé par sa défaite partielle. Mais étant donné la perception négative qu’a la bourgeoisie française de sa position face à ses concurrents capitalistes européens et internationalement, les capitalistes français sont « cette fois » décidés à ne pas laisser passer de concessions à la classe ouvrière. Dans ce cadre, l’absence d’un pôle d’attraction de masse sous la forme d’un parti de masse est assurément un facteur qui affaiblit la lutte.

    Sarkozy a ainsi pu gagner les dernières élections avec une campagne menée contre son propre gouvernement, qui, selon lui, présidait une « société bloquée ». Cette stratégie n’a pu être payante que grâce à l’absence de challenger face à lui avec Ségolène Royal et son Parti Socialiste maintenant complètement bourgeois. Déjà en 1995, quand les travailleurs français avaient remporté une victoire contre la bourgeoisie et le « plan Juppé », l’absence d’une alternative politique pour les masses était palpable. Les capitalistes auraient alors pu être poussés dehors, mais faute d’un gouvernement et d’un parti politique de masse capable de l’avancer, toutes les conclusions nécessaires de cette lutte n’ont pas été tirées.

    Leçons du Brésil

    Cette situation n’existe pas au Brésil, en raison de la formation du parti du socialisme et de la liberté (P-SoL), créé en 2004 comme résultat de la révolte suscitée par le virage à droite du gouvernement de Lula après son élection en 2002. La formation de ce parti et son évolution par la suite est une donnée d’importance pour le Brésil lui-même, mais elle comprend également bien des leçons pour les travailleurs et le mouvement de la gauche internationalement. La création du P-SoL est le produit du dégoût ressenti par les travailleurs, en particulier dans le secteur public, à cause de la rapide trahison de Lula et de son gouvernement placé sous la direction du PT (Parti des Travailleurs) qui s’est exprimée dans l’acceptation des attaques contre les masses demandées par le capitalisme brésilien.

    Auparavant, des couches de la gauche brésilienne, et parmi elles même certaines qui avaient des antécédents trotskistes, avaient entretenus quelques espoirs que Lula aurait installé un gouvernement de « gauche » une fois arrivé au pouvoir. Pourtant, avant même les élections, Lula lui-même avait clairement capitulé face au « consensus de Washington » du néo-libéralisme (acceptation des principes de privatisation, de travail précaire et de soumission au capital étranger). Son évolution à droite avait été illustrée par les nombreux éloges qu’il avait reçu de la part des chauds partisans et prêcheurs du néo-libéralisme « social-démocrate ». Ainsi, alors que Blair et Mandelson (l’un des principaux architectes de la transformation du Labour Party en New Labour et proche collaborateur de Tony Blair) avaient précédemment fortement attaqué le PT et Lula, ce dernier n’a ensuite reçu que des félicitations de leur part. Pour reprendre ses propres paroles, Lula s’est avéré être « une paire de mains sûre » pour le capitalisme et l’impérialisme brésilien. L’attaque menée contre les fonctionnaires, cependant, a provoqué une opposition au sein du PT, exprimée avec force par un certain nombre de ses parlementaires, tels que Heloísa Helena, Baba et Luciano Genro. Avec un autre parlementaire, ils ont tous été sommairement expulsés par Lula à cause de leur opposition à son programme de « réforme des pensions ».

    Cette trahison avait un sens aigu, compte tenu du fait que Lula – à la différence de Blair – est à l’origine issu des profondeurs de la classe ouvrière brésilienne. Le P-SoL a quant à lui rassemblé des sections significatives de la gauche brésilienne militante et combative. À sa conférence de fondation en 2004, ce nouveau parti s’est clairement affirmé socialiste et à gauche, avec la plupart des participants provenant d’un passé trotskiste.

    Le trotskisme possède de fortes et profondes racines en Amérique Latine, particulièrement au Brésil et en Argentine. Cette tradition s’est principalement reflétée dans deux tendances, celle du Secrétariat Unifié de la Quatrième Internationale (USFI, United Secretariat of the Fourth International) d’Ernest Mandel et celle des organisations morénistes, menée par Nahuel Moreno. Le morénisme et son organisation internationale, Liga Internacional de los Trabajadores (LIT – la Ligue Internationale des Travailleurs) ont représenté une réaction face à Ernest Mandel et sa politique qui a combiné des éléments ultra-gauches à un moment donné (avec un soutien désastreux à des mouvements de guérilla urbaine) avec de l’opportunisme, élément qui a d’ailleurs plus tard mené l’USFI à connaître la rupture au Brésil. Certains de ses adhérents ou anciens adhérents ont participé au gouvernement de Lula comme ministres.

    On trouve dans la tradition moréniste d’excellents militants qui ont fait de grands sacrifices pour la cause des travailleurs, certains y ont même laissé leurs vies. Cela a particulièrement été le cas en Argentine et au Brésil. Dans le même temps, l’opposition de Moreno à l’opportunisme de Mandel s’est crûment exprimée. Moreno lui-même l’a illustré et a commis de sérieuses erreurs d’un caractère ultra-gauche, comme le démontre sa surestimation du MAS (nom du parti moréniste à cette époque) dans l’Argentine des années ‘80. Bien que le MAS se soit en Argentine développé pour devenir une force considérable, Moreno a surestimé sa capacité à « prendre le pouvoir ». Après sa mort, ses héritiers ont commis beaucoup d’erreurs, la plus importante concernant l’analyse de l’effondrement du stalinisme. Ils ont ainsi présenté cet évènement unilatéralement de manière « progressiste ». La bourgeoisie avait internationalement adopté une attitude similaire, résumée par le Wall Street Journal qui a déclaré dans un éditorial au nom du capitalisme « nous avons gagné ».

    En résultat de cette analyse, le courant moréniste a connu différentes ruptures qui ont donné lieu à la création de différents organismes et « Internationales » en concurrence féroce les unes contre les autres pour gagner le soutien d’une base de plus en plus réduite d’anciens militants morénistes. Une fois confrontée à l’opposition, plutôt que de débattre et de discuter des idées – comme c’est la tradition au sein du Comité pour une Internationale Ouvrière – la méthode de la direction est caractérisée par les expulsions arbitraires, à la façon du SWP britannique, ou encore tout simplement par des « invitations à partir ».

    Récents succès

    En dépit de tout cela, la plupart des initiateurs du P-SoL étaient issus du PT et d’un passé trotskiste. Lors des élections présidentielles de 2006, Heloísa Helena (qui provient de la tradition d’Ernest Mandel) a récolté presque sept millions de voix comme candidate du P-SoL et comme alternative de gauche au gouvernement de gauche « traditionnel » de Lula. Ce succès spectaculaire d’un parti très jeune – une plus grande réussite, par exemple, que celle obtenue par le PT à l’occasion de sa première participation aux élections nationales en 1982 – a été une justification complète des positions de ceux qui, à l’instar de Socialismo Revolucionário (SR, section brésilienne du Comité pour une Internationale Ouvrière) et des autres sections du CIO, ont de façon conséquente argumenté en faveur de la création d’un nouveau parti de masse. En conséquence, Socialismo Revolucionário a été l’un des pionniers du P-SoL – en prêtant ses ressources et ses bureaux au nouveau parti dans la première période de son histoire – et a également eu une présence à l’Exécutif National de ce parti. Le plus important a été que le P-SoL a entériné le droit de plate-forme et de tendance, ce qui lui a assuré d’être un parti extrêmement démocratique.

    Le P-SoL, cependant, comme Die Linke en Allemagne, n’a pas été créé dans une période d’intensification de la lutte des classes, particulièrement sous forme de conflit dans les usines, comme cela avait été par exemple le cas pour la création du PT dans les années ’80 ou pour le COSATU, la fédération syndicale d’Afrique du Sud, qui s’était déclarée socialiste et « révolutionnaire » dans sa première phase d’existence. Cette situation a eu des conséquences sur le P-SoL, qui était – et est resté – un petit parti de masse de la classe ouvrière. Les nouveaux partis de masse formés au lendemain de la Révolution russe étaient issus de scissions survenues dans les vielles organisations de la classe ouvrière (la social-démocratie) et avaient emporté la grande majorité des travailleurs actifs de ces vieux partis. Mais même alors, la social-démocratie, largement vidée de ses membres, a continué à recevoir le soutien des travailleurs inactifs. Parfois, c’est même la majorité des travailleurs qui sont restés accrochés à ces vieilles organisations suite à une inertie historique ainsi qu’à l’absence de compréhension de la nécessité de nouveaux partis révolutionnaires. Cela demandait, comme Lénine et Trotsky l’ont argumenté, que ces nouveaux Partis Communistes adoptent une tactique de « front unique » pour enrichir et influencer les actions des travailleurs toujours sous la bannière de la social-démocratie.

    Ces nouvelles formations, les Partis Communistes, s’étaient toutefois développées dans une période de révolution et étaient généralement assez grandes, avec une base active et des racines enfoncées au sein même de la classe ouvrière. Ce n’est pas le cas de Die Linke en Allemagne, qui est surtout en ce moment un phénomène électoral. Seuls quelques travailleurs et jeunes ont été disposés à rentrer dans ses rangs, et ce peu d’enthousiasme a été particulièrement visible à Berlin et en Allemagne de l’Est. Dans ces régions, Die Linke est regardé avec beaucoup de suspicion en raison des connections de ce parti avec le stalinisme et du fait que les coalitions gouvernementales à Berlin, en particulier, et ailleurs attaquent les conditions de vie de la classe ouvrière. Le P-SoL, à ses débuts, a connu une situation différente. S’il est vrai qu’un certain nombre d’organisations trotskistes étaient présentes, c’était aussi le cas d’une couche importante de travailleurs, d’ « indépendants », etc.

    Au même moment, le gouvernement de Lula a constamment plus repoussé sa base à mesure que s’est accentué son virage à droite. Renan Calheiros, membre du PT et ancien président du Sénat Brésilien, a été forcé de démissionner en raison d’un scandale de corruption. Il est, entre autres, accusé d’avoir assuré le salaire d’une ancienne journaliste avec qui il avait eu une liaison et une petite fille de 3 ans. Le Brésil est « habitué » à la corruption, qui est endémique dans les partis bourgeois. Mais la saga des méfaits de Renan a été le « scandale de trop ». La pression populaire a finalement forcé la main à Lula et Renan a été éjecté de ses fonctions.

    Le gouvernement Lula a été marqué par des accusations de corruption depuis mai 2005. Bien qu’ayant causé des dégâts sérieux au début, la corruption est tellement habituelle et « intégrée » dans la vie politique brésilienne que les brésiliens « ne s’attendaient à rien de mieux de la part de leurs politiciens ». Selon une estimation, environ 30% des membres du Congrès font l’objet de procédures judiciaires. En fait, beaucoup d’entre eux quittent leurs fonctions pour ainsi éviter les poursuites et les tribunaux ! La corruption est estimée par une étude à ce sujet à 0.5% du PIB (produit intérieur brut). Oui, il a eu un moment où le PT a été perçu comme un parti « différent », avec une vision socialiste d’une nouvelle société. Mais maintenant, tout comme les ex-sociaux-démocrates et les partis ex-« communistes » en Europe et ailleurs, le PT, après avoir accepté le capitalisme, a embrassé la « philosophie » qui y est associée.

    La bourgeoisie brésilienne s’est ralliée au gouvernement de Lula parce qu’il « fait son job » en défendant les profits du capitalisme. Le crédit et la demande domestique explosent alors que des millions de Brésiliens pauvres deviennent des « consommateurs pour la première fois » (selon le « Financial Times »). Ce qui arrive quand la base de l’économie américaine s’effondre et a des répercussions sur la Chine, un énorme marché pour les produits du Brésil, est un autre problème. Même un léger ralentissement du taux de croissance de l’économie brésilienne sera une catastrophe pour les millions de personnes, particulièrement des pauvres, qui ont placé leur confiance dans le gouvernement de Lula pour détruire le cauchemar que forme la vie quotidienne de millions de Brésiliens. L’agriculture, le secteur des services et même l’industrie ont ressenti la croissance économique du pays à la suite de la croissance économique mondiale. De plus, les dépenses dans la consommation ont augmenté, avec l’aide d’une certaine augmentation du salaire minimum et des avantages pour les plus pauvres ainsi que d’une injection de crédit dans l’économie (dont la taille a doublé depuis 2003 pour atteindre aujourd’hui environ 35% du PIB). Un ralentissement ou une récession économique mondiale aurait un effet dévastateur sur les millions de personnes dont les espoirs ont été suscités par la récente croissance économique et par la création d’emplois, bien que très mal payés.

    Le gouvernement clame que plus de 1.2 million d’emplois ont été créés dans les douze mois qui ont précédé juillet 2007. Cela a signifié que certaines des sections les plus faibles de la population et même des sections de la classe ouvrière ont bénéficié du gouvernement Lula. En conséquence, le soutien électoral fondamental du gouvernement ne s’est pas encore évaporé. La bourgeoisie tolère Lula comme la « meilleure option » tandis que les pauvres et la classe ouvrière n’ont pas encore dans leur grande majorité retiré leur soutien au gouvernement. Toutefois, la classe moyenne ressent plus intensément la crise de l’infrastructure, en particulier dans l’industrie aéronautique et s’oppose en majorité au gouvernement. La situation économique, sociale et politique est par conséquent fortement volatile.

    Pour aller plus loin de sa base limitée, bien qu’importante, de 6% de l’électorat, le P-SoL devrait se positionner de manière à attirer dans ses rangs les « réserves lourdes » de la classe ouvrière qui demeurent toujours derrière Lula et le PT à titre d’essai. Ils briseront ces amarres dès que le Brésil sera affecté par la vague économique et sociale orageuses qui arrive. Mais ce n’est pas dit que ces derniers passeront au P-SoL si ce parti n’adopte pas les politiques, la stratégie et la tactique nécessaire pour les attirer.

    Le piège électoral

    Le développement de Rifondazione Comunista (PRC) en Italie contient beaucoup de leçons et d’avertissements pour le P-SoL et le Brésil. La création du PRC a représenté un pas en avant gigantesque pour la classe ouvrière italienne mais, à ses début, il n’a entraîné avec lui que la plupart des couches les plus avancées et militantes. Le parti, en particulier sous la direction de Bertinotti, n’a pas sérieusement miné la base des Démocrates de Gauche (DS – la majeure partie de l’ancien parti communiste italien) même alors que ces derniers se déplaçaient vers la droite. Une des raisons qui explique ce phénomène est la position contradictoire du PRC, en particulier son enthousiasme électoraliste qui s’est fait aux dépens d’une dynamique de politique de lutte des classes. D’ailleurs, au lieu de poursuivre une politique d’intransigeance de classe face au capitalisme, la direction du PRC a glissé dans le marais de la collaboration de classes sous forme de coalition. Même avant qu’un « bloc national » ne se forme au niveau local et dans les villes, le PRC a partagé localement le pouvoir avec les partis bourgeois. Ceci a inévitablement conduit aux attaques contre les travailleurs et les syndicats à un niveau local et le PRC a été considéré comme responsable aux yeux des travailleurs.

    De cette étape à une coalition formelle avec les partis bourgeois autour de Prodi au niveau national, il n’y avait pas un grand pas à faire. Il ne s’agissait au début que d’un soutien « extérieur » du PRC au gouvernement « olivier » de 1996. Sans même l’effet des « avantages » des postes ministériels et des piéges qui y sont liés, le PRC s’est odieusement associé aux attaques de ce gouvernement contre la classe ouvrière et les syndicats. C’est cette politique qui a pavé la voie au retour de Berlusconi. Maintenant, Rifondazione Comunista a franchi une étape supplémentaire en rejoignant formellement la coalition de Prodi qui, comme Lula au Brésil, attaque les pensions, l’éducation et tous les acquis passés de la classe ouvrière italienne. Sous la direction de Bertinotti en tant que « président » de la chambre italienne des députés, le PRC va perdre sa peau de parti spécifiquement pour les travailleurs pour devenir une des composantes de la « chose rouge » (selon le terme utilisé par la presse pour parler de la nouvelle formation regroupant principalement le PRC, les verts et une scission des Démocrates de Gauche), qui est un masque servant à cacher la création d’un autre parti libéral et capitaliste.

    Ce processus n’est pas encore complètement arrivé à son terme au sein du PRC, mais c’est un avertissement d’ampleur au P-SoL et à tous les nouvelles organisations de la classe ouvrière. Sans politiques claires et indépendante des formations bourgeoisies (et sans coalition avec les forces bourgeoises), ces nouvelles formations, plutôt que d’être autant de chrysalides à partir desquelles peuvent émerger des pôles d’attraction pour les masses, pourraient être étouffées dès leur naissance. Le P-SoL n’a jusqu’ici pas atteint cette étape. Cependant, les énormes pressions de la société bourgeoise pour « se conformer » – c’est-à-dire élever le profil électoral aux dépens de l’intervention dans la lutte des classes, en particulier la lutte dans les usines et les mouvements sociaux en général – ont eu un certain effet sur la direction du P-SoL.

    Virage à droite

    Heloisa Helena adopte des positions moins radicales…
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    Cela s’est reflété lors des élections présidentielles, en particulier par la voix de la candidate Heloisa Helena, par la minimisation des politiques radicales dans le but d’aller au devant d’un maximum de voix. Elle s’est également prononcée contre l’avortement, mais s’est alors heurtée à la majorité des membres du P-SoL. Heloísa Helena a d’ailleurs rencontré l’opposition implacable de la majorité des délégués au récent Congrès du P-SoL. Mais un groupe constitué autour d’elle, en particulier certains membres du parlement comme Luciana Genro, qui vient de Rio Grande Del Sul, ont cherché à pousser le P-SoL vers une politique plus « pragmatique », ce qui constitue une orientation droitière. Cette position a été renforcée par de récents réfugiés issus du PT qui ont maintenant rejoints les rangs du P-SoL.

    Ensemble, ils ont avec succès décalé la direction du P-SoL vers une orientation plus à droite qui, en retour, a provoqué une opposition gauche, dans laquelle est impliquée Socialismo Revolucionário. Cette opposition a reçu juste en dessous d’un quart des voix au Congrès du P-SoL. Socialismo Revolucionário cherche à dépasser ce chiffre en forgeant un front unique des organisations les plus conséquentes de la gauche, à travers l’établissement d’un « bloc des quatre » dans le P-SoL. Ce bloc a impliqué Socialismo Revolucionário ainsi que d’autres groupes partout dans l’ensemble du Brésil, tous issus du trotskisme.

    Quelques parallèles historiques peuvent être faits avec ce développement. Après la victoire d’Hitler en 1933, sans que le Parti Communiste allemand n’ait entreprepris de résistance sérieuse, une crise profonde de confiance a traversé les « Internationales » existantes (la deuxième, social-démocrates, et la troisième, qui avait dégénéré des positions communistes vers le stalinisme). Trotsky a alors proclamé la nécessité de la création d’une nouvelle, la Quatrième Internationale. En conséquence arriva la formation d’un « bloc de quatre » partis, décrit par Trotsky comme étant « particulièrement important ». Ces quatre partis étaient l’Opposition de Gauche Internationale trotskiste, le Parti Ouvrier Socialiste allemand (SAP), et deux partis de gauche hollandais, le Parti Socialiste Révolutionnaire (RSP) et le Parti Socialiste Indépendant (OSP). Ensemble, ils ont signé une déclaration pour une « nouvelle internationale » suivant les principes de base de Marx et de Lénine.

    Ce « bloc des quatre » s’était donné des objectifs plus grandioses que l’actuel « bloc des quatre » dans le P-SoL, mais la logique est finalement identique : comment maximiser le potentiel pour la gauche dans le mouvement de la classe ouvrière. L’ancien bloc des années ‘30 n’a été jamais été consolidé en une nouvelle formation permanente en raison des contradictions politiques entre les dirigeants des partis non-trotskistes. Dans le cas du P-SoL, les organisations sont beaucoup plus proches politiquement, avec toutes les chances, si une clarté politique arrive à être obtenue, de forger une force politique cohérente au sein du P-SoL.

    Le P-SoL illustre, tout comme les expériences issues du PRC en Italie, que le succès continu et la croissance de l’influence ainsi que du nombre de membres d’un parti n’est pas automatiquement garantie si un nouveau parti se déplace vers la droite. Cependant, la gauche est plus claire et a plus de potentiel dans le P-SoL que dans le PRC italien. Il faut en voir la raison dans les organisations trotskistes qui, dès la fondation du PRC, ont poursuivi une politique fondamentalement fausse. La section italienne du Secrétariat Unifié de la Quatrième Internationale, sous la direction du défunt Livio Maitan, ne se différenciait pas de Bertinotti – elle a été durant longtemps membre de la même « fraction » et n’a par conséquent pas gagné de forces substantielles. D’autres organisations ont adopté une position ultra-gauche ou un rôle purement militant, un rôle de commentateur.

    Le « bloc des quatre » brésilien

    L’opposition de gauche organisée dans le P-SoL est beaucoup plus forte politiquement. Le front unique des organisations, le « bloc des quatre », inclut des camarades d’Alternativa Revolucionária Socialista (Alternative Socialiste Révolutionnaire – ARS), en particulier présent à Belem, dans le nord du Brésil. Une autre organisation présente à São Paulo est le CLS (Liberté Socialiste Collective), composé de travailleurs qui ont une tradition de lutte à São Paulo et à Minas Gerais, un Etat très important, où le CLS a une base importante dans les mouvements sociaux, en particulier le mouvement des paysans sans terre et parmi les imprimeurs. Deux autres organisations participent encore à ce bloc. Il est à espérer que ce « bloc des quatre » sera consolidé par une série de meetings et d’activités publiques qui pourraient alors attirer d’autres groupes dissidents du P-SoL.

    En même temps, un processus de regroupement des marxistes-trotskistes suit son cours. À son récent congrès, auquel ont participé des représentants des groupes qui travaillent dans le « bloc des quatre », Socialismo Revolucionário, avec ces camarades, s’est fixé la tâche de construire une force marxiste numériquement plus forte et bien plus influente. Étant donné qu’à ce stade, le P-SoL est relativement vide de nouvelles couches de la classe ouvrière, cette tâche ne pourra pas seulement se faire en concentrant principalement les activités à l’intérieur de ce parti. La bataille au niveau des usines est aussi cruciale, si pas plus, en ce moment. Mais le P-SoL n’a pas encore épuisé son potentiel. L’effondrement du « Lulaïsme » et du PT aura comme conséquence que des couches plus importantes placeront leurs espoirs dans le P-SoL. Une des raisons qui justifie l’appel pour un nouveau parti de masse des travailleurs est que cela offre l’opportunité à la classe ouvrière et à la gauche de rassembler des forces jusqu’ici dispersées.

    De tels nouveaux partis sont une arène pour la discussion, le débat et l’élaboration de politiques capables de garantir le succès de la classe ouvrière à l’avenir. L’existence d’une épine dorsale viable de marxiste-trotskistes dans un tel parti est essentielle à son succès. Sans cela, ces partis, y compris le P-SoL, peuvent stagner, voir même diminuer et disparaître, même si ils ont connu initialement des succès. Cela semble toutefois peu probable au Brésil, étant donné l’influence du marxisme dans le P-SoL.

    La tâche des marxistes au Brésil, qui sera ardemment suivie par les marxistes du monde entier, est d’intervenir dans les processus qui se déroulent dans le P-SoL pour l’éloigner du réformisme et des nuances de centrisme – c’est-à-dire une phraséologie révolutionnaire qui couvre des positions réformistes – en rassemblant les meilleures forces à la gauche du P-SoL. La première étape vers cet objectif est la création d’une organisation trotskiste puissante, avec de claires perspectives, tactiques, stratégie et organisation. Le capitalisme entre en crise, mais cela ne signifie pas que la gauche va automatiquement l’emporter. Pour que cela se réalise, il faut créer de nouveaux partis de masse des travailleurs. Les développements au sein du P-SoL seront vivement observés et étudiés par les marxistes du monde entier pour y apprendre les leçons utiles aux développements semblables ailleurs.


    Pour en savoir plus

  • Mouvements de masse en Birmanie et ailleurs : quelle solution pour les peuples opprimés?

    En Birmanie, après les mouvements du mois passé, le calme est revenu. La répression a – temporairement – fait taire la colère des masses. C’est la hausse subite des prix des carburants qui a été le déclencheur de la “révolution safran” : le moindre prétexte pourrait à tout moment faire redescendre les masses dans la rue. Dans d’autres pays aussi, de telles hausses de prix ont déclenché des émeutes spontanées : c’était le cas notamment en Iran cette année.

    Gilles

    Notre époque est celle d’une grande instabilité au niveau mondial, d’un ras-le-bol généralisé : nous devons donc nous attendre, de plus en plus, à ce que d’autres “petites choses”, auparavant insignifiantes, puissent représenter pour beaucoup de gens “la goutte qui fait déborder le vase”, et être dans un futur proche à l’origine de luttes plus âpres, en Occident également.

    D’autre part, cette année et la précédente ont vu se développer de nombreuses luttes “pour la démocratie” (Népal, Ukraine, Géorgie, Thaïlande, Mexique, etc.). Bien que la plupart de ces luttes aient été victorieuses jusqu’à un certain point, aucune n’est réellement parvenue à concrétiser tous les espoirs qui avaient été placés en elles.

    L’élection de Iouchtchenko, par exemple, a été l’une des plus grandes déceptions de l’histoire ukrainienne. La campagne pour la libération d’Aung San Suu Kyi fait penser à celle pour la libération de Mandela en son temps (encore que Mandela avait un profil nettement plus marqué à gauche). Pourtant, en Afrique du Sud, malgré la fin de l’apartheid, la situation des travailleurs ne s’est guère améliorée en vingt ans…

    De la même manière, outre les quelques libertés démocratiques et éventuelles avancées sociales qui accompagneraient certainement la venue au pouvoir d’Aung San Suu Kyi, nul ne doit s’attendre à ce que la situation de la Birmanie en ce qui concerne le chômage, la pauvreté, le pillage par les multinationales et la soif d’autonomie des minorités natio-nales ne change fondamentalement. Un argument flagrant dans ce sens est le soutien qui a été donné à la “révolution safran” par la plupart des Etats impérialistes et leurs institutions. Ce qu’espèrent ces organisations, c’est la mise en place d’un gouvernement plus « conciliant », avec lequel elles pourront accomplir leur business. Et leur empressement soudain à exiger la démission des militaires vient beaucoup plus de leur crainte de voir la population s’organiser et le mouvement se radicaliser, que de leur soif de liberté : “Donnons-leur vite leur “démocratie”, tant qu’ils ne demandent rien de plus !”

    La situation actuelle du capitalisme mondial est telle que, sans une mobilisation permanente de la population, Aung San Suu Kyi ne s’avérera être rien de plus qu’une marionnette au service des multinationales, capable de faire passer toutes sortes de « réformes » antisociales au nom de « la reconstruction du pays ».

    Une réelle émancipation du peuple birman ne peut être obtenue que par une réelle démocratie socialiste, sous la direction de la classe ouvrière. Ce n’est que sur base de la socialisation de l’économie, sous contrôle populaire, dans le cadre d’une confédération socialiste régionale, qu’une démocratie authentique pourra être obtenue en Birmanie.

  • AFRIQUE: OU LE SOCIALISME OU UNE BARBARIE SANS CESSE PLUS GRANDE

    L’Afrique est ravagée par un ouragan de pauvreté. C’est le seul continent devenu plus pauvre depuis 1980. Près de la moitié de la population vit avec moins d’un dollar par jour. La faim s’étend presque comme une maladie. Des millions d’africains sont mort faute de nourriture. Et l’avenir s’annonce plus triste encore. Le rapport de l’UNDP/UNICEF dit qu’en 2015 l’Afrique pourra nourrir moins de la moitié de sa population.

    Dagga Tolar et Peluola Adewale

    2015 est aussi l’année que les dirigeants du monde ont fixé comme date pour réduire la pauvreté et la faim de moitié entre autres « Objectifs du Millénaire pour le Développement » (OMD). Ces objectifs incluent également la réduction de la mortalité infantile de 75% et l’arrêt de l’extension de l’épidémie de SIDA/HIV. Cependant, la Banque Africaine de Développement a déclaré que l’Afrique est la région la moins prête à réaliser ces objectifs. Les Nations Unies ont exposés que si les indices de développement sociaux continuent sur leur voie, l’Afrique ne pourra rencontre les OMD qu’après 150 ans ! Plus de trois quarts des décès dû au SIDA se situent en Afrique sub-saharienne, et 65% des malades du SIDA vivent sur ce continent. Pour rendre les choses pires encore, l’histoire post-coloniale de l’Afrique est remplie des horreurs de la guerre qui ont pris la vie de millions de travailleurs.

    Les statistiques ci-dessus qui démontrent largement le sous-développement de l’Afrique sont horribles. Qu’est ce qui a bien pu se passer pour que la situation soit si épouvantable malgré des richesses stupéfiantes ? Les Socialistes disent que le capitalisme est coupable. Lénine le qualifiait d’horreur sans fin. Ce système basé sur les inégalités répand ses méfaits en Afrique plus encore que partout ailleurs. En terme de ressources naturelles, l’Afrique est peut-être le continent le plus riche au monde. Mais le capitalisme, à toutes ses étapes de développement, a extirpé du continent ses ressources, du commerce trans-Atlantique d’esclaves à travers le colonialisme à l’époque impérialiste. Les politiques néo-libérales d’aujourd’hui n’ont fait qu’empirer la situation des masses. Le continent est pillé de ses ressources pour financer son développement et pourvoir aux besoins basiques de la population. Les gouvernements comptent sur le capital étranger, pour la plupart sous forme de prêt avec des intérêts exorbitants qui sont autant de fardeaux étouffants.

    A présent, l’impérialisme mondial utilise la triade de la dette, de sa domination sur le commerce mondial et de la corruption des dirigeants africains comme armes pour forcer l’Afrique à se prosterner face au pillage impudent de ses richesses à travers les politiques néo-libérales.

    Les fardeaux de la dette et le néo-libéralisme

    En octobre 2005, l’Afrique avait remboursé 580 milliards de dollars à ses créditeurs (les nations et institutions impérialistes) pour une dette originale de 540 milliards de dollars, et il reste encore 330 milliards de dollars à payer. En luttant pour rembourser ces dettes, les gouvernements négligent l’éducation, la santé, l’approvisionnement en nourriture et autres besoins basiques des travailleurs. Les gouvernements ont pris le poison du Programme d’Ajustement Structurel (PAS) ou les politiques néo-libérales de privatisation, de commercialisation, de libéralisation du commerce, de coupes dans les dépenses publiques, etc., comme conditions pour récupérer les possibles restes de la souffrance due à une dette largement fictive et odieuse.

    Ce n’est donc pas accidentel si l’Afrique a le plus haut taux de malades du SIDA. Africa Action a dénoncé qu’en 2003 les pays africains ont dépensés plus de 25 milliards de dollars en remboursement de dettes, et ce même si 2,3 millions d’Africains ont perdu leur vie à cause du SIDA. Cette année, l’Organisation Mondiale de la Santé a déclaré que 4,1 millions d’Africains touchés par la maladie ont un besoin urgent de médicaments anti-rétroviraux, mais seulement 50.000 personnes peuvent en avoir.

    Le capitalisme et les politiques néo-libérales sont les causes majeures de faim en Afrique. Craig Timberg, du Washington Post a écrit que, bien plus que les désastres naturels comme la sécheresse ou le changement de climat, la famine que connaît le Niger est principalement due à la politique de libre marché débridée appliquée par le gouvernement nigérien. A la demande de la Banque Mondiale, le Niger a abolit le contrôle des prix avec pour conséquence que les prix de la plupart des denrées comestibles sont maintenant au-dessus des moyens d’une large part des travailleurs. Les taxes imposées sur la nourriture ont menés à deux actions de protestation massives pour le seul mois de mars 2005. Tout cela dans la lignée des demandes de la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International concernant les « Pays Pauvres Hautement Endettés », initiatives entraînant le néo-libéralisme. Ceci explique pourquoi les autres pays pauvres, comme le Burkina Faso, la Mauritanie, l’Ethiopie et le Mali sont dans la même angoisse face à la faim que le Niger et neufs autres pays africains, récemment assurés de l’annulation de leur dette extérieure après des années de soumission ininterrompues aux dictats du FMI et de la Banque Mondiale.

    Commerce inéquitable

    A travers le commerce inéquitable, l’Afrique a été pillée de ses énormes ressources. Entre 1980 et maintenant, la part du continent dans le commerce mondial a chuté de deux tiers, de 6% en 1980 à moins de 2%. Le prix de ses principales exportations ne cesse de plonger. Une étude a révélé qu’entre 1980 et 2001, les prix du café ont plongé de 85%, ceux du cacao de 67%, d’huile de palme de 60% et ceux du cuivre de 41%. Les autres exportations du continent à l’exception du pétrole, suivent la même tendance. Les pays impérialistes qui prêchent le dogme du libre commerce, libéré de tout subsides, etc. imposent des barrières artificielles aux produits africains et subsidient lourdement leurs riches fermiers. On estime que les pays développés dépensent 200 milliards de livres sterling par an pour subsidier leurs agriculteurs, soit 17 milliards de livres sterling en plus que le Produit Intérieur brut de l’entièreté des pays africains. La Banque Mondial déclare que si l’Amérique du Nord, le Japon et l’Europe laissaient tombés leurs barrières aux produits africains, les exportations africaines augmenteraient de 1,5 milliards de livres sterling par an.

    Mais pourquoi l’Afrique est-elle dans cette situation? Fondamentalement, la réponse est que l’économie mondiale est depuis longtemps dominée par les classes dirigeantes et compagnies des pays riches. Les 500 plus grandes compagnies internationales contrôlent 70% du marché mondial, alors que les 50 plus grosses banques et compagnies financières contrôlent 60% du capital global. Aujourd’hui, 300 multinationales et banques importantes effectuent 70% des investissements directs à l’étranger.

    Cette domination bloque le développement de rivaux indépendants de ces monopoles. Là où de nouvelles technologies et produits se développent, ils sont rapidement dominés par les pouvoirs impérialistes. Les exceptions à cette règle générale, comme la Corée du Nord ou la Malaisie, furent aidés par l’Ouest durant la guerre froide pour des raisons stratégiques. Dans le cas unique de la Chine, les bases économiques de son récent développement furent construites sur les avancées initiales dans l’infrastructure et l’éducation rendues possibles par une économie nationalisée et planifiée, malgré les effets de la direction anti-démocratique du stalinisme maoïste.

    Dirigeants corrompus

    La douleur de l’Afrique est combinée à la corruption caractéristique de ses dirigeants. Il est intéressant de voir que la corruption n’est en rien limitée à l’Afrique ou aux pays en voie de développement. La chute d’Enron, le géant américain de l’énergie, par exemple, démontre que la corruption est universelle sous le capitalisme. La plupart des ressources qui échappent au commerce inéquitable ou au remboursement de la dette sont volées par les dirigeant pro-occidentaux corrompus et placés dans des comptes privés en Europe et en Amérique du Nord. Ce vol montre aussi qu’ils n’ont aucune confiance envers le développement des pays africains sur une base capitaliste. Le capitalisme néo-libéral, philosophie régnante de gouvernance, a donné plus d’assises aux dirigeants africains pour le pillage, car ils n’ont plus à utiliser ses ressources pour les besoins basiques de la population. Les gains initiaux qui suivirent l’indépendance et avaient procurés des investissements relatifs de la part des gouvernements nationaux dans les services sociaux et entreprises publiques ont été érodés par les politiques néo-libérales de privatisation, de commercialisation et de coupes dans les dépenses publiques.

    La guerre et la question nationale

    Le néo-libéralisme pousse la masse de la population vers la pauvreté et la marginalisation et ne peut résoudre les questions nationales, héritage du colonialisme, qui sont dans la majorité des cas aux racines des guerres qui ravagent le continent. La plupart des pays africains sont des créations artificielles des maîtres coloniaux pour leurs intérêts stratégiques et économiques sans regards pour les différentes nations, histoires, traditions et langages qu’ils ont réunis.

    Il est clair que l’élite bourgeoise africaine est incapable de résoudre la question nationale. Les sections mécontentes de l’élite dirigeante capitalisent le désenchantement des masses laborieuses pour asseoir leurs gouvernements et exploitent les différentes ethnies pour les mobiliser dans des guerres, qui sont en fait dirigées pour servir leurs seuls intérêts. Hors de ces conflits, ils tirent des avantages excessifs pour prendre directement le pouvoir ou négocier pour être intégrer dans la classe dirigeante, au détriment des masses laborieuses utilisées comme chair à canon. Ces guerres ont laissés des millions de travailleurs sans vies, blessés pour le restant de leurs jours, ou encore sans logements. Les statistiques révèlent qu’il y a eu 4 millions de morts au Congo, 2 millions au Soudan, et 1 million au Rwanda, sans parler du Sierra Leone, du Liberia, de l’Ethiopie/Erythrée, de la Côte d’Ivoire, etc. où les guerres ont récemment coûtés des centaines de milliers de morts.

    Seule les masses laborieuses peuvent résoudrent les questions nationales en supportant les droits des nations et minorités, en incluant l’autodétermination des peuples, tout en luttant pour des mouvements unifiés contre les ennemis communs. Une caractéristique d’un réel mouvement des travailleurs est de voir des personnes issues de différentes nationalités marchant côte à côte contre les attaques capitalistes contre leurs conditions de vie. Cela montre le potentiel pour construire des mouvements unifiés capables de transformer la société.

    Le rôle des travailleurs

    La descente actuelle de l’Afrique vers la barbarie est une expression de la faillite de l’impérialisme et des élites capitalistes locales à développer l’économie africaine et les standards de vie de la population. Pour toute la période qui suivit l’indépendance de l’Afrique, tant les militaires que les sections civiles de la classe capitaliste ont dirigés le continent avec les mêmes effets contre-productifs et ruineux. En terme de développement économique général et de niveau de vie des travailleurs, l’Afrique aujourd’hui est encore plus loin derrière l’Europe et les pays capitalistes avancés que ce n’était le cas il y 4 ou 5 décennies.

    Cependant, une infime partie de la population africaine est aussi indécemment riche que les capitalistes des pays développés. C’est le résultat du vol des budgets gouvernementaux, et de la collaboration avec l’impérialisme pour piller le reste des africains et les ressources matérielles.

    Il ressort de l’histoire du capitalisme, et en particulier de l’histoire limitée du capitalisme en Afrique, que seule la classe ouvrière possède le potentiel de mettre fin à ce système qui signifie la misère pour les masses à côté d’une abondance indescriptible.

    Les progrès de la civilisation moderne restent pour une large part une application des connaissances technologiques pour convertir les ressources naturelles en produits fini consommables. Sous la logique capitaliste qui prévaut actuellement, la plupart de ces connaissances technologiques et des ressources mondiales sont passées sous la propriété privée d’une poignée de corporations ou de propriétaires capitalistes. Et c’est là que ce situe la contradiction majeure. Alors qu’au niveau international et même dans plusieurs secteurs de l’économie, continents ou pays, il existe une abondance de connaissance techniques et de ressources pour donner une vie décente à toute personne sur terre, la nature d’égoïsme et de profit du capitalisme fait que dans la majorité des cas, ces potentiels sont irréalisés.

    Pourtant, le côté positif du capitalisme est le développement et l’existence de la classe ouvrière. C’est la classe sociale qui a en main les clefs des opérations journalières du système sans lesquelles rien ne peut se passer et qui est également capable d’actions collectives.

    Pour pourvoir aux besoins de tous, et non d’une minorité, la classe ouvrière, supportée par d’autres couches de pauvres, doit mener une révolution sociale. Cela entraînera la propriété commune et un contrôle démocratique des commandes de l’économie et des ressources avec une planification et une organisation centralisée vers l’utilité, et non le profit.

    Il est extrêmement important de remarquer que l’histoire contemporaine de l’Afrique est en elle-même très riche en mouvements de masses et de luttes. Uniquement l’an dernier se sont déroulées des protestations de masse contre les politiques néo-libérales et capitalistes au Mali, au Liberia, au Burkina Faso, au Niger, en Afrique du Sud, au Nigeria etc.

    Des années ’90 au début des années 2000, c’est la classe ouvrière qui a mené les protestations/luttes/révoltes qui aidèrent à la défaite des gouvernements capitalistes impopulaires de Kerekou en République du Bénin, et de Kenneth Kaunda en Zambie. Le Mouvement pour des Changements Démocratiques au Zimbabwe dirigé par Morgan Tsvangirai s’est initialement développé à partir des syndicats et de la résistance de la classe ouvrière contre le gouvernement de Robert Mugabe. En Afrique du Sud, seul le COSATU a mené des grèves et des manifestations de masse contre la politique anti-pauvre et néo-libérale du gouvernement capitaliste de l’ANC.

    Au Nigeria, l’actuel pro-impérialiste et anti-pauvre gouvernement du président Olusegun Obasanjo a été ébranlé jusqu’aux racines en plusieurs occasions par une série de grèves et de protestation massives menées par le mouvement syndical.

    Malheureusement cependant, toutes ces luttes, nombreuses et collectives, ont montré la faiblesse qui doit être dépassée pour passer de la protestation et de la défensive vers le changement du système. Cela requiert la construction d’un mouvement avec un programme clair et une direction n’ayant pas peur d’affronter le capitalisme.

    Les socialistes disent que l’Afrique sortira seulement du cercle vicieux de déclin en rompant avec le capitalisme et en prenant les ressources économiques du continent des griffes de l’impérialisme et des capitalistes locaux. C’est seulement sur base d’une économie démocratiquement planifiée que les ressources seront utilisées dans les intérêts de la majorité de la population. Ce n’est pas l’ancien système où l’élite locale pille l’Etat et les entreprises nationalisées à leurs propres fins. Au contraire les socialistes luttent ils pour une nationalisation sous contrôle démocratique des travailleurs pour prévenir de la corruption et assurer que les ressources sont utilisées dans l’intérêts des masses laborieuses.

    L’Afrique n’est pas seule à avoir un avenir incertain sous le capitalisme. La santé de l’économie mondiale aujourd’hui est de plus en plus précaire. Internationalement, les travailleurs, y compris d’Europe et des USA, ne voient qu’un avenir fait d’attaques continuelles envers leur niveau de vie et leurs emplois. Dans cette situation si, même dans un pays africain, une cassure socialiste avec le capitalisme est effectuée, cela aura un écho gigantesque dans les autres pays africains et au-delà. C’est à travers cet impact international que l’isolement d’un pays en rupture avec le capitalisme pourra être dépassé. C’est sur cette base que les socialistes voient l’unité réelle des peuples d’Afrique.

    Mais pour faire cela, un programme et une politique clairement socialiste ainsi qu’une classe ouvrière disciplinée sont nécessaires. Sans cela, il y a le danger que les luttes ne mènent qu’à un simple changement du gang de voleurs au pouvoir. C’est ce qui s’est produit dans la Zambie de Chiluba, un gouvernement formé d’anciens activistes des syndicats, qui mène une politique néo-libérale. Bien sûr les travailleurs peuvent lutter aux côtés d’autres forces sociales dans certaines luttes, quand cela concerne des buts économiques, sociaux ou politiques. Cependant, à l’intérieur de ces mouvements, les socialistes défendront qu’un changement fondamental, la fin du capitalisme, est nécessaire pour rendre permanente n’importe quelle victoire obtenue lors de ces luttes partielles.

    En République du Bénin, les mouvements de masse de la classe ouvrière furent assez fort que pour mettre fin au gouvernement de Kerekou, mais par manque de leurs propres organisation et dirigeants, il n’y eu d’autre choix que d’investir Mr Soglo, un dissident de la classe dirigeante capitaliste, qui ne fit naturellement que continuer la politique antisociale au pouvoir.

    Tristement également, la tentative de créer un parti des travailleurs au Zimbabwe ne s’est soldée que par la fondation du parti pro-capitaliste MDC, ce qui a enlevé à la population une opportunité de combattre et de vaincre le parti capitaliste du dirigeant Mugabe. De façon similaire, c’est le manque d’alternative, de politique socialiste et de détermination pour chasser le gouvernement Obasanjo qui a permis que le très haï président du Nigeria soit capable de comploter pour s’assurer de revenir au pouvoir après la fin de sa législation, en mai 2007.

    Pour arrêter le déclin économique et les horreurs de la guerre qui ravagent l’Afrique, la création de mouvements politiques et d’organisations de luttes pan-africaines de la classe ouvrière jointes à la tâche ultime de l’abolition du capitalisme, la cause principale de l’inégalité sociale et des troubles. Cette tâche ne peut être transposée par les masses laborieuses africaines, les jeunes et les révolutionnaires.

    Rejoignez nous!

    “Tout spectateur est autant un lâche qu’un traître”– Amica Cabra. Si vous êtes mécontent des politiques anti-pauvres menées par les gouvernements africains pro-impérialistes et intéressés de lutter contre ces politiques, l’organisation à rejoindre est le Comité pour une Internationale Ouvrière. Le CIO (CWI en anglais) est une organisation socialiste internationale présente dans près de 40 pays et qui travaille à l’unité de la classe ouvrière et les peuples opprimés contre le capitalisme et pour lutter pour un monde socialistes. Le CIO a des sections au Nigeria et en Afrique du Sud.

    Pour plus de détails, écrivez au CIO/CWI, PO Box 3688, London, E11 1YE, Britain ou envoyez un e-mail à cwi@worldsoc.co.uk.

    Pour écrire au DSM au Nigeria, envoyez un e-mail à: dsmcentre@hotmail.com. Le site du DSM est: www.socialistnigeria.org et celui du CIO/CWI est: www.socialistworld.net

  • Racisme: Tout ce qui nous divise, nous affaiblit

    MALCOLM X affirmait: "Il ne peut y avoir de capitalisme sans racisme". Il voulait ainsi dire que le capitalisme utilise le racisme pour maintenir sa domination. Le racisme n’a pas été inventé par le Vlaams Blok; il existe depuis la naissance du colonialisme et du capitalisme. Pour le capitalisme, seuls comptent les profits accumulés par une infime minorité. La bourgeoisie se sert de tous les moyens d’oppression pour affermir sa position et de continuer à exploiter les travailleurs. Le racisme est un de ces outils d’oppression.

    Nikei De Pooter

    Avant la Seconde Guerre Mondiale les manuels scolaires expliquaient que les noirs d’Afrique étaient moins intelligents que les Européens. Les classes dominantes avaient alors besoin de thèses pour justifier leur domination militaire directe du continent africain. Les premiers camps de concentration n’ont pas été construits par Hitler en Allemagne, mais en Afrique du Sud par l’Angleterre coloniale.

    Aujourd’hui le discours de la bourgeoisie a changé. Ses parlementaires n’ont plus recours au langage ouvertement raciste, mais ils utiliseront le racisme de façon plus subtile pour diviser tous ceux qui tentent de résister à la politique antisociale.

    Le capitalisme est un système fondé sur l’exploitation. Tant sur l’exploitation des travailleurs d’Europe et d’Amérique du Nord que sur celle des travailleurs du monde néo-colonial. Dans les pays néo-coloniaux nombreux sont ceux qui fuient la misère, les dictatures et les guerres. En Europe occidentale, la peur envers les candidats réfugiés s’amplifie d’autant plus que les travailleurs ayant perdu leur emploi et les allocataires sociaux ont de plus en plus de peine à joindre les deux bouts. C’est en partie dû au chômage, mais aussi aux lois restreignant le droit d’asile qui contraignent les candidats réfugiés à vivre sans papiers et à devoir accepter, par exemple, de payer un loyer exorbitant pour une chambre insalubre.

    Etre sans papiers c’est aussi devoir accepter, pour survivre, un travail clandestin sous-payé, sans avoir la moindre possibilité de faire valoir ses droits face au patron. Une telle situa-tionexerce une pression sur l’ensemble des salaires. Les couches les plus vulnérables de la population belge, les moins qualifiés, les exclus considè-rent les réfugiés comme des concurrents. Les slogans démagogiques sur «Les Immigrés qui prennent le pain des Belges» incitent les victimes de la crise à se battre contre ceux et celles qui sont encore plus bas et vivent dans des conditions pires.

    Les entreprises qui licencient massivement ici font aussi des profits exorbitants Afrique ou en Asie. C’est pourquoi nous avançons la revendication: Il faut s’en prendre aux multinationales et non à leurs victimes !

    Le racisme est un des piliers de la tactique «diviser pour régner». La bourgeoisie fera de même pour opposer les travailleurs ayant un emploi à ceux qui ont perdu le leur ("Les chômeurs sont des profiteurs"). Pour opposer les employés aux ouvriers, les hétérosexuels aux homosexuels, les hommes aux femmes, les Wallons aux Flamands, etc.

    La bourgeoisie utilise un parti comme le Vlaams Blok pour répandredes préjugés racistes. La seule réponse possible à cette stratégie de division et de haine est de lutter tous ensemble pour améliorer les conditions de vie et de travail de chacun.

    On convaincra peu de monde avec des arguments moralisateurs. On ne convaincra la masse des travailleurs de la nuisance des préjugés racistes qu’à partir d’une lutte concrète avec des intérêts communs à tous travailleurs, quelle que soit leur origine. L’opposition fondamentale de notre société n’est pas celle entre Flamands, Wallons, Belges ou Immigrés, mais bien celle entre le monde du travail et le monde patronal.

    Le Vlaams Blok et d’autres organisations néo-fascistes en Europe se basent sur la résis-tance passive de la part de la population. Dans chaque lutte qui se développe, à chaque piquet de grève, la nécessité de l’unité des travailleurs devient concrète. Une fois que la résistance se transforme en action, l’impact des idées d’extrême-droite recule.

    On a constaté cela en France après une lutte de masse contre le plan Juppé en 1995: le Front national a perdu du terrain et a fini par éclater en deux (Le Pen d’un côté, Megret de l’autre). Le gouvernement de la Gauche plurielle (PS + PC + Verts) porté au pouvoir, après la déroute électorale de la droite, a cependant mené une politique de droite, privatisant trois fois plus que le gouvernement Juppé. Cette politique antisociale du gouvernement de Gauche plurielle a de nouveau renforcé l’extrême-droite. Tout cela a permis au FN de regrouper ses forces et de faire un score électoral supérieur à celui de Jospin aux élections présidentielles de 2002.

    On voit donc que pour combattre l’extrême-droite et le racisme, il ne suffit pas seu-lement de lutter contre la politique antisociale. Il faut aussi construire une alternative politique de gauche crédible qui soit capable de faire barrage à la politique néo-libérale et au capitalisme. Si la classe ouvrière ne réussit pas à prendre en mains la direction d’un tel mouvement, et si elle ne pose pas d’alternative conséquente de gauche, toutes sortes de réflexes nationalistes et racistes écloront inévitablement.

    Dernier exemple: en Irak où les divisions selon les ethnies et les religions font rage. Les Kurdes contre les Turkmènes, les Chiites contre les Sunnites et ainsi de suite. Cette division conduira à une régression future du pays et une détérioration des conditions de vie de la majorité de la population irakienne. Si aucune alternative socialiste ne se présente, une alternative capable de combattre la pauvreté et l’exploitation, les divisions feront des ravages dans la population qui se bousculera pour ramasser les miettes laissées par la bourgeoisie.

    Plus que jamais il faut construire un parti mondial, socialiste et combatif!

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