Your cart is currently empty!
Tag: Zambie
-
Capitalisme et culture du viol
En décembre 2012, l’horrible viol collectif d’une étudiante de 23 ans à Delhi, en Inde, suivi de sa mort, a placé le fléau du viol sur le devant de la scène. Ce cas particulier ne sort malheureusement pas du tout de l’ordinaire par sa nature ou sa gravité. Ce qui l’a rendu exceptionnel, c’est la réponse explosive du mouvement ‘‘rage against rape’’, qui a fait descendre dans la rue une foule de femmes aussi bien que d’hommes opposés aux viols et à la violence sexuelle extrêmement fréquents, commis surtout contre les femmes et les enfants.
Par Emma Quinn & Laura Fitzgerald, Socialist Party (CIO-Irlande)
‘‘Rage against rape’’ en Inde – malgré la nature problématique des appels à la peine de mort et à la castration pour les auteurs de viols (en plus de ne pas répondre aux causes sous-jacentes du viol, cela donnerait encore plus de pouvoir à un Etat indien qui réprime et va continuer à réprimer les luttes des travailleurs et mouvements sociaux) -, le développement du phénomène ‘‘Slutwalk’’ ces dernières années, fer de lance de la montée de la remise en cause de la ‘‘culture du viol’’, sont autant de développements véritablement positifs.
[box type=”shadow” align=”alignright” width=”100″]
Socialisme 2013
Commission le samedi 13/04 : Les causes de la violence envers les femmes et comment la combattre
Commission le dimanche 14/04 : Le débat pro-choix sur le droit à l’avortement. Avec des militantes pour les droits des femmes, notamment Aisha Paulis (commission femmes du PSL)
Plus d’infos et programme complet
[/box]
La ‘‘culture du viol’’ peut être décrite par le fait de réagir aux viols et à la violence sexuelle en culpabilisant les victimes et les survivantes en se demandant comment elles s’habillent, quel est leur passé sexuel, leur consommation de drogue ou d’alcool, etc. de façon à la fois subtile et ouverte. C’est ainsi que réagissent la police et la justice, à des degrés variables en fonction des divers pays du monde. Il s’agit d’une vulgarisation du viol. Au cours de cette dernière période, ce phénomène s’est développé dans un contexte où, de plus en plus, les femmes et leurs corps se voient rabaissés au rang d’objet dans la culture dominante.
Le viol est une question de pouvoir
Le viol n’est pas une question de désir sexuel, mais plutôt l’expression ultime du pouvoir, du contrôle et de la suprématie sur un autre être humain. La majorité des victimes et des survivantes sont des femmes et la grande majorité des auteurs de viols sont des hommes. Les hommes victimes d’un viol sont particulièrement stigmatisés, en partie parce que c’est considéré comme une expérience émasculatrice. L’exemple de femmes soldates participant à l’humiliation sexuelle de prisonniers hommes dans la prison d’Abu Ghraib, en Irak, montre comment le viol et l’abus sexuel sont fondamentalement une expression du pouvoir : les forces impérialistes ont utilisé les abus sexuels dans le but très conscient de dégrader et de démoraliser.
Les milliers d’années d’oppression de la femme ont signifié des milliers d’années de soumission, et notamment de viol. Les viols fréquents sur les esclaves par les possesseurs d’esclaves dans le Sud des Etats-Unis avant la Guerre Civile sont un exemple parmi beaucoup d’autres du viol en tant qu’expression de cette soumission imbriquée dans l’oppression économique également subie.
Le début de la société humaine divisée en classes sociales – il y a environ 10.000 ans – a constitué un moment crucial dans l’instauration des structures et de l’idéologie qui oppressent les femmes. L’idéologie de la famille nucléaire et patriarcale en particulier, qui a atteint son apogée dans la Rome Antique lorsque les pères avaient droit de vie et de mort sur leur femme et leurs enfants, est une idéologie façonnée et utilisée par le système économique actuel du capitalisme. Malgré les grandes luttes et les changements survenus depuis lors, la promotion de cette idéologie a contribué à pérennisé l’oppression des femmes.
Ce n’est nullement une coïncidence si la plupart des viols et des abus sexuels sont perpétrés par une connaissance de la victime, souvent même un membre de la famille, un partenaire ou un ex-partenaire. Sous le capitalisme, l’idéologie de la famille patriarcale (soutenue depuis les débuts de ce système) a permis que les femmes soient des sources d’heures de travail non rémunéré – comme elles le sont encore aujourd’hui de bien des façons et dans bien des cas – en effectuant le travail domestique, en s’occupant des enfants et des membres âgés de leur famille ou des malades.
Cette idéologie était en contradiction avec la nécessité d’intégrer la force de travail féminine dans le système de profit, mais elle a aidé à justifier les plus bas salaires des travailleuses, une réalité toujours d’application aujourd’hui dans les pays capitalistes développés. En Irlande, selon un récent rapport de l’OCDE, les femmes gagnent en moyenne 14% de moins que les hommes, et ce fossé s’élargit à 31% pour les femmes qui ont des enfants (en Belgique, l’écart moyen est de 24%, NDT).
L’Ère de l’austérité et son impact sur les femmes
Ces dernières décennies, l’entrée massive des femmes dans la force de travail – tout en augmentant souvent l’exploitation que les femmes subissent à la fois en tant que travailleuses et en tant que femmes – a eu un impact progressiste. En s’engageant dans la force de travail, les femmes ont pris confiance en elles et, en réalité, les idées réactionnaires concernant la famille patriarcale et le rôle subalterne des femmes ont été profondément ébranlées. Par exemple, la grande majorité de la population européenne, hommes et femmes, n’acceptent plus l’idée selon laquelle les femmes ne devraient pas être égales aux hommes.
L’ère de l’austérité actuelle signifie concrètement une énorme destruction de nos emplois, de nos services publics et de nos conditions de vie. Les femmes sont plus particulièrement affectées par les attaques contre le secteur public parce qu’elles représentent la majorité des travailleurs de ce secteur (en particulier dans la main d’œuvre peu payée du secteur public) et en raison de la nature progressiste des services publics qui peuvent socialiser ce qui auparavant étaient des problèmes privés pour les femmes (comme de prendre soin des malades et des personnes âgés).
Des services sont en train d’être complètement érodés, comme l’aide à domicile (un service qui a en fait commencé sur base volontaire et non payée – notons l’impact de l’idéologie patriarcale qui montre les femmes comme des ‘‘soignantes naturelles’’ -, et pour lequel on s’est battu pour qu’il devienne financé et développé par l’État). Les femmes, en particulier, vont porter le fardeau de cette érosion, avec comme résultat probable le retour réactionnaire aux rôles traditionnels de genre. L’élite au pouvoir a besoin de trouver des moyens pour justifier ce retour en arrière. La publicité et les autres moyens de propagande (particulièrement aux USA) ont été massivement utilisés pour mettre l’accent sur la ‘‘place naturelle des femmes au foyer’’ en tant qu’épouses, soignantes et domestiques non payées, de même que leur subordination aux hommes juste après la seconde guerre mondiale, alors que les femmes étaient massivement entrées dans les usines pendant la guerre.
Cette propagande nous paraît aujourd’hui grossièrement sexiste et dépassée. Cependant, d’autres formes de propagande sexiste ont été de plus en plus développées, dans les médias en particulier. L’offensive s’est même intensifiée cette dernière décennie : rabaissement de la femme au rang d’objet, marchandisation du corps féminin et ‘‘pornification’’ de la culture.
L’impact du ‘‘nouveau sexisme’’
Le ‘‘nouveau sexisme’’, appuyé en grande partie par l’industrie cosmétique (très rentable), joue actuellement un rôle dans le renforcement des vieilles idées selon lesquelles la valeur d’une femme se mesure à son apparence et à son look, en dénigrant sa valeur en tant qu’être humain égale aux hommes. Cette attaque idéologique offre aux politiciens l’espace pour mener une politique sexiste et réactionnaire. Ainsi, lors des émeutes de Londres en 2010, certains politiciens ont tenté d’expliquer le phénomène par l’éclatement de la famille traditionnelle en reportant la faute sur les parents célibataires, afin de ne pas parler des causes sociales derrière cette explosion de colère (taux de chômage élevé, aliénation et pauvreté massive parmi la jeunesse).
En Espagne et au Royaume Uni, des partis politiques au pouvoir souhaitent aujourd’hui revenir sur le droit à l’avortement : une véritable indication de l’instrumentalisation des femmes en tant que boucs émissaires de même qu’un cas concret de casse des droits des femmes et de leur liberté de choisir. Aux USA, le degré auquel le parti de droite Tea Party a influencé le discours et la politique représente à la fois une attaque idéologique et une menace physique contre les droits des femmes. Les restrictions à l’accès à l’avortement y ont tellement augmenté que certains États n’ont plus qu’une seule clinique pratiquant l’avortement ouverte ! Paul Ryan, le candidat républicain malchanceux à la vice-présidence américaine aux élections de 2012, a précédemment soutenu une loi qui tentait de permettre aux violeurs de poursuivre en justice les victimes qu’ils auraient mises enceinte pour les empêcher d’avorter ! Voilà le contexte dans lequel la ‘‘culture du viol’’ existe. C’est aussi le contexte dans lequel cette culture doit être remise en cause.
Les violences sexuelles comme arme de guerre et de domination
Le viol en tant qu’expression de la suprématie et de la domination est illustré par les abus commis par de nombreux prêtres en position de pouvoir, des cas systématiquement couverts par la hiérarchie de l’Eglise Catholique. On peut également parler du cas du célèbre présentateur de la BBC Jimmy Saville (un proche de Margareth Thatcher qui a été protégé par la véritable institution qu’est la BBC) qui a abusé d’enfants et de jeunes vulnérables et marginalisés en toute impunité, des décennies durant.
La violence sexuelle est utilisée comme arme de guerre afin d’intimider et de dégrader l’ennemi ; en Syrie, c’est en fait la première raison pour laquelle il y a eu un exode massif de femmes et d’enfants dans des camps de réfugiés de Jordanie et du Liban. L’attaque de femmes et de filles par des hommes armés, parfois à plusieurs, est une caractéristique significative et problématique de la guerre civile syrienne. C’est globalement le cas des zones de guerre ; on estime à 200.000 le nombre de victimes de violences sexuelles en République Démocratique du Congo dans le cadre de conflits armés. Le viol y est décrit comme une arme ‘‘moins chère que les balles et les bombes.’’
L’Afrique du Sud connait des statistiques parmi les plus alarmantes, le taux de viols d’enfants et de bébés y est le plus élevé au monde. 37% de la population masculine admet avoir commis un viol et plus de 500.000 attaques sexuelles ont lieu chaque année. Le problème est notamment enraciné dans la croyance très répandue qu’une relation sexuelle avec une vierge guérit du sida. Ce pays comprend le plus grand nombre de séropositifs : 11% des habitants sont affectés. La Zambie, le Zimbabwe et le Nigeria sont aussi infestés par les attaques sexuelles à cause de ce mythe dangereux.
Attaques contre les femmes sur la place Tahrir
L’un des exemples les plus frappants de ce que représente le viol et d’où il provient se trouve peut-être dans le contexte de révolution et de contre-révolution qui se déroule en Égypte actuellement, au cœur symbolique de la révolution, place Tahrir.
L’héroïque révolution qui a renversé le dictateur Moubarak en 2011 n’était en fait qu’une demi-révolution : le dictateur corrompu a été renversé par une lutte de masse et une grève générale, mais les bases-mêmes du capitalisme et de l’impérialisme n’ont pas été abattues pour céder la place à un gouvernement représentant les travailleurs et les pauvres visant à placer les richesses sous propriété publique et démocratique. Sans une telle démocratie, les portes ont été ouvertes pour que l’armée et l’Islam politique reviennent à l’avant. Cependant, les femmes, les travailleurs et les pauvres qui se sont battus héroïquement pendant la révolution ne sont pas simplement rentrés chez eux. Les femmes ont été présentes durant tout le soulèvement révolutionnaire de ces dernières années en Égypte, et elles sont encore présentes dans le mouvement aujourd’hui.
La participation des femmes à la lutte, dans les soulèvements révolutionnaires et dans la quête de changement de la société, n’est pas seulement essentielle, elle est aussi une indication positive de la lutte en elle-même. Les réactionnaires en Égypte comprennent fort bien cela et visent spécifiquement les femmes pour tenter de toucher le mouvement dans son ensemble.
Le viol est un des outils de ces réactionnaires. Des rapports montrent que la Confrérie Islamique a organisé et payé des groupes d’hommes pour attaquer brutalement et agresser sexuellement les femmes militantes sur la place Tahrir. Les femmes s’arment déjà elles-mêmes pour réaffirmer qu’on ne les forcera pas à rentrer à la maison, et des groupes de manifestants – hommes et femmes – organisent la défense pour résister à ces attaques.
Viol et violence sexuelle en Irlande
En Irlande en 2011, plus de 2000 survivantes à la violence sexuelle se sont rendues au RCC (cellule de crise sur le viol, NDT). Des milliers d’autres cas ne sont pas rapportés et on estime que jusqu’à une irlandaise sur sept souffre de graves abus sexuels, physiques ou émotionnels. En Irlande, la question du viol et des abus sexuels est complexe. Historiquement, le pays a été dominé par le contrôle de l’Église et par ses idées tordues sur la moralité. La vision du sexe est empreinte de peur et de honte, surtout en ce qui concerne les femmes. Le sexe était uniquement considéré comme un outil de procréation et une fille considérée comme ‘‘légère’’ était ‘‘une femme déchue’’. Malgré un rejet de ces idées réactionnaires par la plupart des gens d’aujourd’hui, la ‘‘culpabilité catholique’’ et la poussée du sexisme ‘‘moderne’’ (les femmes rabaissées au rang d’objet et la commercialisation du sexe) ont contribué à développer une culture de culpabilisation des victimes d’abus.
Un sondage récent a montré que 41% des gens pensent qu’une femme est partiellement ou totalement responsable si elle se fait violer en ayant bu de l’alcool, 37% pensent qu’elle porte une part de responsabilité si elle a excessivement flirté avec un homme et 26% pensent qu’elle est responsable si elle portait des vêtements qui révèlent son corps.
Le sensationnalisme suscitant la peur qui est cyniquement appuyé par les tabloïds possédés par des milliardaires a aidé à perpétrer le mythe que le viol est quelque chose qui n’est commis que par des hommes louches dans des ruelles sombres. En réalité, une femme sur cinq est abusée par son partenaire actuel ou son ex, 39% par un ami ou une connaissance. Le lieu le plus courant des viols est la maison de la victime.
Selon les estimations, seuls 7% de tous les viols en Irlande sont condamnées. La DPP (Director of Public Prosecution) ne poursuit qu’un tiers des cas reportés, ce qui signifie que 70 cas sur 100 sont déjà perdus à ce stade. ‘‘Le manque de preuves’’ est la première raison pour laquelle la majorité des dénonciations ne va pas plus loin. Il y a significativement plus de chances d’aboutir à une condamnation si l’attaque se produit dans un espace public par un inconnu de la victime, par rapport aux agressions bien plus courantes où l’auteur est connu d’elle. Depuis l’introduction en 1990 de la pénalisation du viol conjugal, il n’y a eu qu’une seule condamnation, ce qui est choquant lorsqu’on considère que 18% des agressions sexuelles sur les femmes sont commises par des hommes qui ont ou ont eu une relation intime avec elles par le passé.
Une étude par le Rape Crisis Network Ireland a monté que jusqu’à 40% des victimes de viols retirent leur plainte en raison de la faible réaction de la police. Les cas sont souvent abordés de façon insensible et des incidents comme le scandale de la ‘‘rape tape’’ de Rossport n’est pas pour rassurer les victimes lorsqu’elles rapportent la violence sexuelle. Dans cette vidéo, des policiers menaçaient deux manifestantes arrêtées de les violer si elles n’obéissaient pas à leurs instructions. Une autre tendance alarmante dans le système judiciaire irlandais est l’augmentation du nombre de procès où des hommes riches donnent une compensation financière à leur victime au lieu d’être condamnés à la prison.
Le viol en Inde
Le viol collectif et le meurtre d’une étudiante en médecine de 23 ans à Delhi ont amené la question de la violence sexuelle dans les médias de masse, obligeant les gens à se rendre compte de l’impact de la ‘‘culture du viol’’ en Inde et à travers le monde. La façon sournoise dont ce cas a été géré par la police a mis en lumière l’attitude dédaigneuse envers le viol en Inde.
Il s’agit du crime le plus répandu dans le pays : au moins 24 000 incidents sont rapportés chaque année et on estime que seuls 50% des viols sont rapportés. Cette culture est un arrière goût amer du système féodal dominé par les hommes en Inde. Il existe un énorme mépris des femmes dans tout le large et varié spectre politique et religieux du pays. En contradiction directe avec le système discriminatoire, il n’est pas exceptionnel qu’un homme d’une caste inférieure agresse une femme de la classe supérieure dans la rue. La propriété des femmes par les hommes dépasse le statut social même ici, ce qui indique à quel point l’oppression des femmes est enracinée.
Les femmes des classes inférieures Dalit ou intouchables qui sont les plus vulnérables. La société indienne leur offre peu de protection ou de justice et la majorité du temps, les attaques contre ces femmes ne sont pas remarquées et restent impunies. L’idéologie de la domination masculine dans une période de changement social rapide et abrupt, avec les femmes et les castes inférieures qui entrent dans la force de travail en raison des investissements capitalistes en Inde, est le contexte dans lequel le viol est si endémique et répandu dans le pays.
Remettre en cause la ‘‘culture du viol’’
‘‘Mon violeur ne sait pas qu’il est un violeur. Vous lui avez appris que ce n’est pas de sa faute. J’avais trop bu, j’ai flirté, et mes vêtements étaient trop courts. Je l’ai cherché. Il m’a laissée dans l’escalier d’un parking. Mon (ex) petit copain m’a craché à la figure. Il m’a traitée de pute, il n’a traitée de salope. Je l’avais mérité. Mes amies me jetaient des sales regards. Elles m’ont dit que j’étais un déchet, sans réaliser que ça aurait pu être elles. Cette culture, votre culture, leur a dit, m’a dit, que c’était de ma faute. Et j’ai souffert. Mais mon violeur ne sait pas que c’est violeur. Je n’ai pas honte. Je reste debout.’’
Comme l’indique cette citation d’une participante à la slutwlak de Washington DC en 2011, une culture qui ramène les femmes au rang d’objet, qui promeut une vision bancale de la sexualité des femmes, qui culpabilise les victimes et non les agresseurs, qui encourage les femmes à ne pas sortir seules la nuit, à prendre des cours de self-défense, à s’habiller d’une certaine façon pour éviter le harcèlement et attaques sexuel mais n’apprend pas aux hommes et aux jeunes pourquoi ‘‘non, c’est non’’ – fait absolument partie du problème auquel on doit s’attaquer.
La prolifération de l’industrie pornographique – généralement destinée aux hommes et centrée sur une vision des femmes, de leur sexualité et du sexe en général très étroite, dirigée par les hommes et souvent misogyne, qui lie de plus en plus le sexe et la violence – alimente cette culture. C’est aussi le contexte de la gueule de bois de la promotion idéologique des rôles traditionnels de chaque genre qui dénigre aussi les femmes et appuie la subordination des femmes aux hommes. Plus encore, c’est le contexte de la promotion de l’idée, propre au capitalisme, de la responsabilité individuelle et de l’individualisme, qui isole les femmes à leur détriment, et des normes sociales et culturelles arriérées, qui donne naissance à la ‘‘culture du viol’’. Les phénomènes Slutwalk et Rage Against Rape sont en opposition à cette culture, et sont en soi une politisation des questions du viol et de l’oppression. Cela joue un rôle dans l’éducation des masses à cette question.
Les femmes et la lutte pour le socialisme
Comme nous l’avons vu, l’ère de l’austérité est une énorme menace contre les conditions de vies et les droits de chacun. Les travailleuses, aux côtés de leurs collègues masculins, sont à l’avant-garde de la lutte contre les coupes budgétaires et les suppressions d’emplois. En Irlande, nous avons surtout vu les travailleuses des entreprises Thomas Cook et La Senza occuper leur lieu de travail lorsqu’elles étaient menacées de licenciement. Les attaques contre le secteur public dans toute l’Europe requièrent une lutte énorme et un mouvement d’opposition massif. Les femmes peuvent jouer un rôle central dans un tel mouvement.
En plus d’un combat déterminé spécifique pour remettre en cause le sexisme, l’objectification, la violence et les agressions sexuelles, il est vital qu’un mouvement contre l’austérité mette aussi ces questions en avant et les relie afin d’assurer que les femmes puissent être au centre du mouvement, et aussi jouer un rôle dans l’éducation des hommes, qui eux-mêmes n’ont pas intérêt à ce que la situation actuelle perdure.
Depuis le début de la ‘‘Grande Récession’’ de la crise capitaliste, il y a eu une baisse de 29% du nombre de filles qui finissaient leurs études primaires (le taux est de 22% pour les garçons). Dans le pays le plus riches au monde, les USA, 17 millions de femmes vivaient dans la pauvreté en 2011 (de même que 12,6 millions d’hommes). Ces inégalités sont abjectes, de même que l’énorme pauvreté et la destruction des conditions de vie que le système du profit fait subir à la majorité des femmes, des hommes, des enfants et des jeunes dans le monde.
La lutte pour en finir avec ce monde de violence, d’oppression, de pauvreté et d’austérité doit mettre le socialisme à l’ordre du jour, c’est à dire la propriété publique démocratique des principales richesses et ressources, et la planification démocratique de l’économie en fonction des besoins de la population.
Une lutte massive pour réaliser ce changement en Irlande, en Europe et partout dans le monde, et une société basée sur la solidarité humaine et l’égalité, pourraient poser les bases pour remettre en cause et mettre fin à l’oppression des femmes que le viol incarne.
-
Sahel : Non à la guerre au Mali ! L'intervention impérialiste va approfondir la crise et l'instabilité
La crise des otages de quatre jours qui a eu lieu dans le complexe gazier d’In Amenas dans le Sud-Est de l’Algérie ainsi que son issue sanglante a constitué un véritable choc au niveau international. Ce raid et la riposte de l’armée algérienne ont tué au moins un travailleur algérien, 37 otages et 29 preneurs d’otages. Ces derniers étaient membres de la brigade Al Multhameen, la ”Brigade des Masqués”, qui a annoncé de nouvelles attaques contre des intérêts étrangers à moins que ne cesse l’offensive militaire étrangère au Mali. Dans la foulée, le Premier ministre britannique, David Cameron, a averti que la lutte contre le terrorisme en Afrique du Nord pourrait continuer "des décennies".
Cédric Gérome, Comité pour une Internationale Ouvrière
Nombreux sont ceux qui sont légitimement repoussés par les actions des groupes djihadistes réactionnaires tels que celui qui a effectué cette opération en Algérie. Cela s’est ajouté aux nombreux rapports faisant état des horribles méthodes qui prévalent sous le joug imposé par les combattants islamistes dans le Nord du Mali (exécutions sommaires, torture, amputations, lapidations, interdiction de la musique, destruction de lieux saints,…). Cette barbarie constitue la principale réserve de munitions idéologiques aux défenseurs de l’intervention militaire de l’armée française dans cette région, qui semble actuellement avoir un important taux de soutien dans l’opinion publique. Les derniers sondages indiquent que le soutien pour "l’Opération Serval" au sein de la population française est actuellement de plus de 60%. Néanmoins, les récents développements en Algérie indiquent que cette offensive militaire terrestre, contrairement aux arguments officiels, est susceptible de générer davantage de crise et de violence dans la région.
Pour le moment, la plupart des rapports des médias indiquent que les Maliens, dans leur grande majorité et en particulier dans le Sud, accueillent favorablement l’intervention française. Avec la propagande qui accompagne inévitablement ces épisodes de guerre, à ce stade, beaucoup de maliens pourraient véritablement penser et espérer que l’intervention du gouvernement français pourrait les protéger contre certains des groupes armés qui terrorisent la population du Nord.
L’état d’esprit de la population dans les différentes régions du pays est toutefois difficile à estimer de façon indépendante, surtout dans le Nord, puisque tant le ”gouvernement de transition” malien (qui est essentiellement la façade politique d’un régime militaire) que les militaires français interdisent l’accès aux zones de combat aux journalistes. Dans ces zones, les soldats ont reçu l’ordre de ne pas laisser passer les journalistes, certains ont même vu leur matériel être saisi par les autorités.
Le fait que tant d’efforts soient effectués afin d’éviter toute libre information est en soi une raison suffisante pour faire naître de sérieux soupçons quant au véritable agenda des dirigeants maliens et de l’impérialisme français. Cela pourrait-il être lié d’une façon ou d’une autre avec l’accumulation de rapports qui parlent d’atrocités commises par l’armée malienne ? Quelques jours seulement après le début des opérations militaires, la Fédération internationale des droits de l’homme, Human Rights Watch et Amnesty International dénonçaient déjà des cas d’exécutions sommaires du fait de l’armée malienne et des milices pro-gouvernementales.
Représailles ethniques et violations des droits de l’homme par l’armée malienne
Lors de la reprise de villes précédemment perdues par l’armée malienne, soutenue par les forces françaises et de la CEDEAO (la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest), les punitions collectives contre la population locale et les règlements de comptes sanglant avec les minorités touareg et arabe, en particulier, on connu une escalade.
Dans les villes de Sévaré et de Niono, au centre du Mali, les preuves de massacres, de ”chasse à l’homme”, de cadavres jetés dans les puits par l’armée, de soldats empêchant les témoins de quitter la ville et d’autres graves violations se sont amassées depuis quelques jours. Deux jeunes habitants interrogés par un journaliste français ont expliqué que "Etre arabe, touareg ou habillé de façon traditionnelle pour quelqu’un qui n’est pas de Sévaré suffit à vous faire disparaître. Le port de la barbe est un suicide."
Le Modèle malien
Ces exemples dévoilent le côté sombre d’une guerre engagée sous la bannière des ”droits de l’Homme” et de la ”démocratie”. Tout cela porte un sérieux coup à la version d’une guerre du ”bien contre le mal” telle que décrite par les politiciens capitalistes occidentaux. Un rapport d’Amnesty International a par exemple mis en lumière, avant même que l’offensive militaire n’ait commencé, que le recours à des enfants-soldats n’est pas la pratique exclusive des combattants djihadistes. Des officiers maliens et des milices pro-gouvernementales font de même.
La réalité est que l’exemple malien de ”démocratie” et de ”stabilité” tant vanté n’a jamais existé. Le régime d’Amadou Toumani Touré ("ATT") était corrompu, clientéliste et autoritaire. Beaucoup de ses propres hauts fonctionnaires ont directement été impliqués dans le trafic de stupéfiants et ont trempé dans des trafics et des enlèvements de toutes sortes, avec l’aide de certains de ces gangsters du Nord et du Sahara actuellement désignés comme étant des ”terroristes” et contre qui se mène la guerre actuelle.
La vérité qui dérange, c’est que les activités d’AQMI (Al Quaïda dans la Maghreb Islamique) et d’autres groupes armés a été tolérée des années durant par le régime de Bamako. Ces groupes ont été un élément essentiel dans les circuits criminels qui ont contribué à l’enrichissement personnel et à la corruption de hauts fonctionnaires du gouvernement et de l’armée (d’après le Bureau de lutte contre la drogue des Nations Unies, 60% de la cocaïne présente en Europe aurait transité par le Mali). Ces groupes avaient également l’avantage de pouvoir être utilisés comme un contrepoids à l’influence et aux exigences des Touaregs.
Dans l’armée, les généraux siègent dans des bureaux richement décorées tandis que les soldats ont parfois envoyés au champ de bataille sans matériel appropriés, sans bottes par exemple. Le ressentiment et la colère des soldats du rang contre la corruption de la hiérarchie et contre le refus du régime d’ATT de mener une lutte sérieuse contre les groupes armés du Nord ont constitué un élément clé dans le processus qui a conduit au coup d’Etat militaire de mars 2012 réalisé par des officiers subalternes. Ce coup d’État, ironiquement, a été dirigé par un capitaine de formation américaine, Amadou Sanogo, et a entraîné la disparition du ”régime démocratique” d’ATT.
Les puissances occidentales, dans un premier temps, ont craint que la nouvelle junte au pouvoir n’échappe à leur contrôle et l’ont donc rejeté. Ils ont même décidé, après le coup d’Etat, de suspendre l’aide au Mali, entraînant toute la société dans une pauvreté plus grande encore. Ils ont ensuite changé d’attitude en se rendant compte que Sanogo, qui avait tout d’abord adopté une rhétorique anti-élite et populiste afin de s’attirer du soutien, était hésitant et s’est finalement montré prêt à collaborer avec l’impérialisme.
Le Nord du Mali: un désastre social et humanitaire en cours
Les effets dévastateurs provoqués par les politiques néolibérales du régime d’ATT, soutenu par l’Occident, ont permis au capital français de dominer des pans importants de l’économie malienne, ont ruiné la vie de beaucoup de gens et ont considérablement augmenté le chômage de masse, la pauvreté, la précarité.
Le Mali est aujourd’hui l’un des pays les plus pauvres au monde, se classant 175e sur 187 pays en 2011 selon la grille de l’Indice de développement humain du Programme des Nations Unies. Ce pays a un taux de mortalité infantile et maternelle, de maladies et de malnutrition plus élevé que dans la plupart des pays d’Afrique sub-saharienne, et un taux d’analphabétisme de 75%.
La marginalisation sociale de longue date du Nord du pays ainsi que le manque d’investissements et d’infrastructures dans cette région ont créé un océan de misère extrême et un niveau très élevé de ressentiment et de désespoir.
En outre, tous les experts affirment que la sécheresse va s’approfondir dans le Sahel et que les pluies se tarissent en raison du réchauffement climatique. Il s’agit d’un désastre environnemental de grande ampleur pour tous les peuples de la région, car ils dépendent presque entièrement de l’élevage et de fermes.
La forte baisse de l’activité économique touristique suite à l’augmentation du niveau de violence a été un facteur aggravant, avec un impact désastreux sur certaines régions et villes complètement dépendantes du tourisme pour leur survie (comme Tombouctou).
Ce cocktail a créé une catastrophe sociale monumentale qui fut le terreau fertile du développement d’un territoire quasiment sans droit, fait d’une interaction complexe de mafias de trafiquants de drogue et de milices armées, aux côtés de combattants de type Al-Qaïda, de kidnappeurs et de bandits de toutes sortes.
Une guerre pour la domination et le profit
Une série de turbulences politiques ont été connues depuis l’épisode du coup d’État de Sanogo, qui a reflété la crise politique organique du pays et est l’acte de naissance de l’actuel gouvernement intérimaire. Formellement, la légitimité démocratique de ceux qui détiennent le pouvoir à Bamako est réduite à zéro. Cela n’empêche pourtant pas le gouvernement français d’exploiter le fait que ce régime militaire a ”demandé” à la France d’intervenir. Il ne s’agit que de la propagande destinée à alimenter l’idée que l’intervention militaire a été décidée suite à la demande d’aide du ”peuple malien” !
Mais combien de temps sommes-nous censés croire que cette guerre n’a rien à voir avec le fait que le Mali possède de l’or, de l’uranium, du bauxite, du fer, du manganèse, de l’étain et du cuivre ? Ou avec le fait que ce pays est voisin du Niger, la source de plus d’un tiers de l’uranium utilisé dans les centrales nucléaires françaises ?
La dure réalité est que cette escalade militaire dans le Sahel, sous la bannière de la ”guerre contre le terrorisme”, ne vise à rien d’autre qu’à servir les intérêts impérialistes de la France : garantir la poursuite du pillage des immenses ressources de la région aux avantages de ses multinationales et de ses institutions financières.
Les entreprises françaises ne sont pas les seules à avoir un appétit croissant pour cette région du monde. Les investissements directs chinois au Mali ont été multipliés par 300 de 1995 à 2008. Le Mali occupe effectivement avec la Zambie, l’Afrique du Sud et l’Egypte le sommet de la liste des pays africains où la Chine réalise ses plus gros investissements.
Un rapport conjoint de l’office allemand des Affaires étrangères et du ministère de la défense montre qu’un budget de plus de trois millions d’euros a été alloué aux activités allemandes au Mali depuis le début de l’année 2009. Une dépense supplémentaire de 3,3 millions d’euros est prévue pour les années 2013 à 2016. De toute évidence, cette guerre s’inscrit dans un contexte plus large de compétition entre les différents puissances afin d’étendre leur influence régionale et de garantir leur accès à des ressources et des marchés importants.
Vers un ”Sahelistan” ?
Politiciens et commentateurs capitalistes ont prévenu du danger de l’instauration d’un ”Sahelistan”, un paradis pour les groupes terroristes de la région du Sahel.
Bien entendu, aucun militant marxiste ou progressiste ne peut éprouver de la sympathie pour les djihadiste d’Al-Qaïda et d’autres groupes de ce type, dont l’idéologie et les méthodes constituent un danger mortel pour le mouvement ouvrier et les masses pauvres en général. Un lieu où les couples d’adolescents risquent la mort par lapidation s’ils se tiennent la main en public est une perspective répulsive pour l’écrasante majorité des travailleurs et des jeunes.
Ces groupes prétendent appliquer la volonté de Dieu, mais ne sont pas exempts de contradictions. Ainsi, ces groupes ont des pratiques telles que l’amputation ou le fouettement de gens qui fument des cigarettes tout en étant eux-mêmes impliqués dans la contrebande de cigarettes et de drogue. Pour certains de ces groupes, l’idéologie religieuse n’est qu’une préoccupation de second ordre, et parfois tout simplement une couverture pour leurs activités mafieuses.
Ces groupes réactionnaires ne sont que des champignons naissant sur un organe pourri qui est incapable de fournir à la majorité de la population, et surtout aux jeunes, un moyen d’aller de l’avant et d’avoir une vie décente. La peur, le manque de moyens de survie, l’absence de ressources financières, le besoin de protection, ou tout simplement l’absence d’alternative intéressante pour lutter contre la corruption des élites locales et les envahisseurs étrangers sont autant de motivations pour rejoindre ces groupes. En l’absence d’un mouvement fort et indépendant de la classe ouvrière uni aux pauvres des villes et des campagnes qui se mobilise pour offrir une perspective et un programme de changement social et politique, ces groupes armés peuvent continuer à exister et à se développer.
Tout cela ne rend pas l’intervention militaire plus justifiable, de même que cela n’enlève en rien la responsabilité des puissances impérialistes bellicistes et de leurs marionnettes au pouvoir à Bamako face à cette situation.
Les premiers rapports des frappes aériennes françaises contre les villes de Gao et de Konna, la semaine dernière, faisaient état d’entre 60 et 100 personnes tuées dans ces deux villes, y compris les enfants déchiquetés par les bombes. Les responsables militaires français ont eux-mêmes averti que des dizaines de morts parmi les civils sont presque ”inévitables”, puisque les rebelles vivent parmi la population et utilisent une tactique de guérilla pour se cacher.
L’intervention militaire: une solution miracle?
Tout cela jette de sérieux doutes sur l’objectif d’une brève campagne militaire de "quelques semaines". Encore une fois, c’est une chose d’envahir un pays et d’engranger de premiers succès militaires, mais c’en est une autre de se retirer et de compter sur une armée faible, impopulaire, fragmentée et corrompue pour reprendre le contrôle d’un territoire immense sans s’en prendre à la moindre des causes de la situation sociale explosive qui prévaut. La comparaison avec le bourbier afghan vient légitimement à l’esprit: selon le dernier rapport du Pentagone sur les progrès des forces afghanes, une seule des 23 brigades de l’armée afghane est "capable de fonctionner sans aucune aide extérieure".
Peter Chilson, des Affaires étrangères américaines, a écrit : ”Le vaste désert du Nord du Mali est un endroit difficile à vivre, sans même parler de guerre. Pendant huit mois de l’année, la température y dépasse 120 degrés Fahrenheit en journée (48 degrés Celsius), dans un pays vaste et peu peuplé où il est facile de se cacher, surtout pour les forces djihadistes qui connaissent bien le terrain. Toute armée, qu’importe sa taille et son équipement, aura difficile à les chasser."
La France peut être incapable d’éviter un engagement à long terme avec ses propres forces militaires. Au fur et à mesure que le nombre de blessés civils augmentera et que l’occupation occidentale et ses abus réveilleront les amers souvenirs de la période coloniale, cette intervention pourra précisément fertiliser le sol pour les djihadistes et d’autres groupes réactionnaires et leur attirer de nouveaux candidats pour participer à la ”croisade contre le maître colonial".
A mesure que se poursuivra le conflit et que ses dramatiques conséquences seront exposées, l’atmosphère de relative acceptation cèdera place au doute, à la réticence et à l’hostilité. L’opposition va grandir et devenir plus audible. En France, les illusions envers la politique étrangère du gouvernement soi-disant ”socialiste”, qui serait fondamentalement différente de celle de Sarkozy, aura du mal à se maintenir. Toute l’idée défendue par François Hollande de la fin de la ”Françafrique” sera de plus en plus considérée pour ce qu’elle est : une plaisanterie cynique.
Par ailleurs, ce qui s’est passé dans le Sud de l’Algérie n’est peut-être que le premier exemple d’une longue série d’effets boomerangs. En conséquence de cette intervention, plusieurs choses peuvent revenir à la face de l’impérialisme. Le chaos se répand et les problèmes de la région vont s’accumuler.
Socialisme ou barbarie
Un mouvement organisé sur une base de classe qui lierait la lutte contre la réaction fondamentaliste à un programme économique audacieux visant à exproprier les grandes entreprises et les grandes propriétés foncières ainsi qu’à résoudre les problèmes sociaux et la corruption pourrait rapidement obtenir un large soutien parmi la population malienne.
Un tel mouvement pour l’égalité sociale devrait respecter les revendications et les droits de toutes les minorités ethniques et culturelles de la région afin de gagner en sympathie dans le pays comme sur la scène internationale.
La construction d’un tel mouvement de masse peut apparaître comme une solution lointaine pour beaucoup de gens. Mais il s’agit du seul moyen de sortir de ce cauchemar grandissant. Le système capitaliste a montré à maintes reprises, partout sur le continent africain et au-delà, que le seul avenir qu’il a à offrir est de plonger la majorité de la population dans un cycle de barbarie, de crise économique, de guerre et de misère.
- Non à l’intervention impérialiste dans le Nord du Mali ! Retrait des troupes étrangères du Mali – retrait des troupes françaises du Sénégal, de Côte-d’Ivoire, du Burkina Faso, du Tchad,…
- Non à l’Etat d’urgence, pour le rétablissement de toutes les libertés démocratiques au Mali !
- Pour la construction de comités de défense multiethniques démocratiquement organisés par la population malienne afin de chasser toutes les milices réactionnaires, mais aussi de résister à toute tentative d’occupation néocoloniale militaire du Nord !
- Pour l’autodétermination des Touaregs! Tous les peuples du Sahel et du Sahara, ainsi que tous les peuples au sein de chaque pays, doivent avoir l’égalité des droits, et doivent décider de leur propre avenir !
- Les richesses du Mali appartiennent au peuple malien ! Pour le contrôle et la gestion démocratique des grandes propriétés foncières, de l’Office du Niger, des mines et des secteurs stratégiques de l’économie malienne par les travailleurs et les pauvres, et non pas des gestionnaires corrompus ! Pour la nationalisation des secteurs-clés de l’économie sous contrôle démocratique !
- Pour le financement d’un plan de développement économique basé sur les besoins des masses maliennes et contrôlées par elles !
- A bas le régime de Bamako ! Pour un gouvernement des travailleurs et des paysans pauvres, afin de commencer la mise en œuvre de politiques socialistes pour développer le pays, sur base de la lutte commune des masse, organisées démocratiquement de la base.
-
L'Afrique peut-elle sauver le capitalisme ?
L’élite capitaliste cleptomane vit dans l’opulence, mais la croissance ne touche pas les masses laborieuses
”Je suis absolument convaincu du fait que l’Afrique représente la prochaine zone pionnière économique mondiale, et je ne suis pas le seul à partager cette conviction” affirmait en avril dernier Johnnie Carson, sous-secrétaire d’Etat américain pour l’Afrique. Il n’est pas le seul à exprimer son optimisme croissant au sujet de l’Afrique. Comme il l’a fait remarquer, les perspectives de croissance de la Banque mondiale pour l’Afrique pour les deux prochaines années se situent entre 5 et 6 %, un taux de croissance au-delà de celui de l’Amérique latine, de l’Asie centrale ou de l’Europe.
Peluola Adewale, Democratic Socialist Movement (CIO Nigeria)
Selon les prévisions du FMI pour les cinq années qui suivent 2011, sept pays africains (Éthiopie, Mozambique, Tanzanie, Congo-Kinshasa, Ghana, Zambie et Nigeria) se trouveront dans les top dix des pays à la croissance la plus rapide au monde. Une analyse du magazine The Economist révélait l’an dernier que six pays africains (Angola, Nigeria, Éthiopie, Tchad, Mozambique et Rwanda) se trouvaient dans le top dix des pays qui ont eu la croissance la plus rapide entre 2000 et 2010. De fait, l’Afrique a commencé à attirer des remarques positives de la part des commentateurs capitalistes, surtout depuis le début de la crise économique mondiale.
Cette crise, qui est la pire crise capitaliste depuis la Grande Dépression des années 1930, a enflammé l’Europe et les États-Unis, poussant apparemment les stratèges capitalistes à aller chercher le succès ailleurs – et ils en auraient trouvé en Afrique.
Les grands médias capitalistes ont arrêté leur campagne permanente de dénigrement du continent africain, et acclament à présent en grande pompe la moindre tendance “positive”. On peut voir un exemple clair de tout ceci dans les pages de The Economist où l’Afrique s’est métamorphosée, passant de “Continent sans espoir” en mai 2000 à “Continent rempli d’espoir” en décembre 2011.
Cependant, la plupart des superbes taux de croissance de ces pays reflètent une hausse de la valeur des exportations des matières premières, à la fois en termes de production et en termes de prix, qui est liée à la croissance de la demande mondiale, surtout de la part de la Chine. Par exemple, le prix du pétrole est passé de 20 $ du baril en 1999, à 147 $ en 2008. Ces statistiques, de manière générale, ne reflètent pas une croissance généralisée de l’économie du continent ni de son niveau de vie. De plus, tout ralentissement de l’économie, que ce soit en Occident ou en Chine, aura pour conséquence une baisse brutale de la demande pour les exportations africaines.
Une grande misère
Pour la plupart des travailleurs, qui n’ont vu qu’une aggravation de leurs conditions de vie d’année en année, les statistiques économiques impressionnantes qu’on voit apparaitre çà et là sont un grand mystère. En fait, la forte augmentation du prix de la nourriture et du carburant revient à une attaque constante contre le niveau de vie. L’Afrique est aujourd’hui un continent dévasté par une misère de masse, avec un accès très limité aux nécessités vitales de base.
Par exemple, en Éthiopie – pays qui se trouve justement sur la “liste d’or” –, 90 % de la population a été classée en tant que “pauvre multidimensionnelle” par un rapport du Programme des Nations-Unies pour le développement (Pnud) publié en 2010. La situation au Nigeria, qui est le plus grande producteur de pétrole africain, a également été très correctement décrite par le Pnud. Son représentant dans le pays, M. Daouda Touré, a remarqué que ”Depuis maintenant plus d’une décennie, le Nigeria a connu un taux de croissance élevé permanent, qui n’a pas eu la moindre répercussion sur le plan de l’emploi ni sur celui de la réduction de la pauvreté parmi ses citoyens.” Il ajoute : ”Les statistiques disponibles en ce moment suggèrent que le taux de pauvreté au Nigeria s’est en réalité aggravé entre 2004 et 2010” (The Nation, Lagos, 29 août 2012). Cela n’a que confirmé ce que le statisticien général du Nigeria, M. Yomi Kale, avait dit concernant le ”paradoxe (…) qui fait que malgré le fait que l’économie nigériane est en pleine croissance, la proportion de Nigérians vivant dans la pauvreté ne fait qu’augmenter d’année en année.” (The Guardian, Lagos, 14 février 2012).
L’Afrique du Sud, qui est la plus grande économie du continent, est aussi le deuxième pays le plus inégalitaire au monde. Cela, malgré la politique du “black economic empowerment” (promotion économique des noirs) menée par le gouvernement ANC dans l’Afrique du Sud post-apartheid.
En Angola, les deux tiers de la population vivent avec moins d’un euro (656 FCFA) par jour, et seuls 25 % des enfants fréquentent l’école primaire (The Guardian, Londres, 18 novembre 2011). L’Angola est pourtant le pays qui a eu le taux de croissance économique le plus élevé au monde, avant la Chine, dans les années 2000 à 2010. L’Angola représente à l’heure actuelle un paradis économique pour le capitalisme portugais, dont le pays natal se trouve en ce moment sous les feux de la crise de la zone euro. Ce pays nous offre ainsi un exemple classique de migration inversée entre l’Europe et l’Afrique. Non seulement l’Angola abrite aujourd’hui une communauté de 150 000 Portugais chassés par le chômage dans leur pays, mais il a également massivement investi ses pétrodollars au Portugal. La compagnie pétrolière d’État angolaise, la Sonangol, est le principal actionnaire d’une des plus grandes banques du Portugal, la Millenium BCP. En juin 2010, l’ensemble des investissements angolais dans des entreprises portugaises étaient estimés valoir plus de deux milliards d’euros, selon le Financial Times. Et pourtant, on ne trouve quasiment ni électricité ni eau potable dans tout le pays, même dans la capitale Luanda.
Tout cela est symptomatique de la situation en Afrique, où la croissance économique se reflète uniquement dans l’opulence de l’élite de voleurs capitalistes au pouvoir, et aucunement dans le développement de l’infrastructure ou dans l’amélioration du niveau de vie de la masse de la population.
Mais les stratèges capitalistes ne sont pas concernés par le sort des travailleurs. Tant qu’il y a des ressources naturelles à exploiter librement pour leurs super-profits, l’Afrique est pour eux tels un lit de roses.
Comme le rapportait The Guardian de Londres : ”Il y a parmi le monde des affaires de plus en plus de confiance dans le fait que l’Afrique est la destination d’investissements qui donne les plus grands profits au monde” (28 mars 2012). C’est ainsi que la banque d’investissements mondiales Goldman Sachs disait dans un rapport en mars 2012 que : ”L’Afrique est une destination à laquelle les investisseurs doivent réfléchir, pour une croissance sur le long terme (soit on y participe, soit on rate une bonne occasion).”
Cette course à la super-exploitation de l’Afrique explique pourquoi le continent, avec ses immenses ressources naturelles et ses immenses terres fertiles pour l’agriculture, est dominé par des multinationales et est dirigé sur base d’une politique capitaliste néolibérale qui bénéficie avant tout à l’Occident impérialiste.
L’absence d’infrastructures de base (ou, quand elle est présente, sa médiocrité) signifie que l’Afrique est toujours en très grande partie dépendante de ses exportations de matières premières, et que le continent dans son ensemble ne compte toujours que pour un ridicule 2 % de la production mondiale.
Les soi-disant “investisseurs” ne sont surtout intéressées que par les industries d’extraction qui, bien que créant de la croissance, ne créent que très peu d’emplois. Cet échec dans le développement de l’industrie de transformation explique pourquoi l’Afrique, en tant qu’exemple classique de croissance sans emploi, ne peut imiter le rôle de la Chine en tant que moteur du capitalisme mondial, malgré son immense population et son urbanisation croissante. Au contraire, c’est le capitalisme qui garantit le sous-développement du continent.
Une corruption rampante
Les souffrances de l’Afrique sont également dues à la corruption caractéristique de ses dirigeants. Il convient cependant bien de souligner le fait que la corruption est loin d’être propre de l’Afrique ou des pays en développement.
La plupart des ressources qui restent en Afrique, après les pertes dues au commerce inéquitable et au payement de la dette, sont volées par les dirigeants pro-impérialisme corrompus, puis envoyées vers des comptes en banques privés à l’étranger, en Europe ou en Amérique.
Le capitalisme néolibéral, qui entraine avec lui privatisations et dérégulations, a donné encore plus de marge aux dirigeants africains pour piller le trésor public, puisque ce ne sont plus eux qui sont censés utiliser ces ressources afin de fournir les infrastructures et les services de base.
Mais face à cette situation, les travailleurs, les jeunes et les pauvres du continent sont loin d’être passifs. L’Afrique a une longue histoire de luttes de masse contre le colonialisme et le racisme. Plus récemment, on a vu apparaitre des luttes contre les régimes pourris et corrompus et pour une vie meilleure, comme on l’a vu après les insurrections de masse, surtout en Afrique du Nord, qui ont chassé au moins trois dictateurs. En janvier 2012, nous avons assisté à la plus grande grève générale et au plus grand mouvement de masse de toute l’histoire du Nigeria, contre la hausse du prix de l’essence. Les mineurs sud-africains, dans leur lutte pour de meilleures conditions de travail et pour un meilleur salaire, ont quasi mis à genoux l’industrie minière. Le secteur des mines compte pour une très grande part de la richesse du pays ; il est aussi un symbole de l’immense inégalité entre travailleurs et patrons.
Cette lutte des mineurs, dans laquelle le DSM sud-africain joue un rôle dirigeant, a contribué à mettre au-devant de la lutte la revendication pour la nationalisation de l’industrie minière, ainsi que l’idée d’une alternative politique des travailleurs et des pauvres contre l’ANC.
Les mouvements de masse des travailleurs et de la jeunesse en Europe, et en particulier en Grèce et en Espagne, contre l’austérité et contre les attaques néolibérales sur l’emploi, sur les salaires, sur l’enseignement et sur la santé, vont continuer à élever la conscience des travailleurs en Afrique. Les nouvelles luttes qui vont se développer en Afrique auront pour effet qu’il n’y aura aucun refuge sûr pour le capitalisme dans un monde de crise, et seront une source d’inspiration afin d’intensifier la quête d’une alternative socialiste.
-
AFRIQUE: OU LE SOCIALISME OU UNE BARBARIE SANS CESSE PLUS GRANDE
L’Afrique est ravagée par un ouragan de pauvreté. C’est le seul continent devenu plus pauvre depuis 1980. Près de la moitié de la population vit avec moins d’un dollar par jour. La faim s’étend presque comme une maladie. Des millions d’africains sont mort faute de nourriture. Et l’avenir s’annonce plus triste encore. Le rapport de l’UNDP/UNICEF dit qu’en 2015 l’Afrique pourra nourrir moins de la moitié de sa population.
Dagga Tolar et Peluola Adewale
2015 est aussi l’année que les dirigeants du monde ont fixé comme date pour réduire la pauvreté et la faim de moitié entre autres « Objectifs du Millénaire pour le Développement » (OMD). Ces objectifs incluent également la réduction de la mortalité infantile de 75% et l’arrêt de l’extension de l’épidémie de SIDA/HIV. Cependant, la Banque Africaine de Développement a déclaré que l’Afrique est la région la moins prête à réaliser ces objectifs. Les Nations Unies ont exposés que si les indices de développement sociaux continuent sur leur voie, l’Afrique ne pourra rencontre les OMD qu’après 150 ans ! Plus de trois quarts des décès dû au SIDA se situent en Afrique sub-saharienne, et 65% des malades du SIDA vivent sur ce continent. Pour rendre les choses pires encore, l’histoire post-coloniale de l’Afrique est remplie des horreurs de la guerre qui ont pris la vie de millions de travailleurs.
Les statistiques ci-dessus qui démontrent largement le sous-développement de l’Afrique sont horribles. Qu’est ce qui a bien pu se passer pour que la situation soit si épouvantable malgré des richesses stupéfiantes ? Les Socialistes disent que le capitalisme est coupable. Lénine le qualifiait d’horreur sans fin. Ce système basé sur les inégalités répand ses méfaits en Afrique plus encore que partout ailleurs. En terme de ressources naturelles, l’Afrique est peut-être le continent le plus riche au monde. Mais le capitalisme, à toutes ses étapes de développement, a extirpé du continent ses ressources, du commerce trans-Atlantique d’esclaves à travers le colonialisme à l’époque impérialiste. Les politiques néo-libérales d’aujourd’hui n’ont fait qu’empirer la situation des masses. Le continent est pillé de ses ressources pour financer son développement et pourvoir aux besoins basiques de la population. Les gouvernements comptent sur le capital étranger, pour la plupart sous forme de prêt avec des intérêts exorbitants qui sont autant de fardeaux étouffants.
A présent, l’impérialisme mondial utilise la triade de la dette, de sa domination sur le commerce mondial et de la corruption des dirigeants africains comme armes pour forcer l’Afrique à se prosterner face au pillage impudent de ses richesses à travers les politiques néo-libérales.
Les fardeaux de la dette et le néo-libéralisme
En octobre 2005, l’Afrique avait remboursé 580 milliards de dollars à ses créditeurs (les nations et institutions impérialistes) pour une dette originale de 540 milliards de dollars, et il reste encore 330 milliards de dollars à payer. En luttant pour rembourser ces dettes, les gouvernements négligent l’éducation, la santé, l’approvisionnement en nourriture et autres besoins basiques des travailleurs. Les gouvernements ont pris le poison du Programme d’Ajustement Structurel (PAS) ou les politiques néo-libérales de privatisation, de commercialisation, de libéralisation du commerce, de coupes dans les dépenses publiques, etc., comme conditions pour récupérer les possibles restes de la souffrance due à une dette largement fictive et odieuse.
Ce n’est donc pas accidentel si l’Afrique a le plus haut taux de malades du SIDA. Africa Action a dénoncé qu’en 2003 les pays africains ont dépensés plus de 25 milliards de dollars en remboursement de dettes, et ce même si 2,3 millions d’Africains ont perdu leur vie à cause du SIDA. Cette année, l’Organisation Mondiale de la Santé a déclaré que 4,1 millions d’Africains touchés par la maladie ont un besoin urgent de médicaments anti-rétroviraux, mais seulement 50.000 personnes peuvent en avoir.
Le capitalisme et les politiques néo-libérales sont les causes majeures de faim en Afrique. Craig Timberg, du Washington Post a écrit que, bien plus que les désastres naturels comme la sécheresse ou le changement de climat, la famine que connaît le Niger est principalement due à la politique de libre marché débridée appliquée par le gouvernement nigérien. A la demande de la Banque Mondiale, le Niger a abolit le contrôle des prix avec pour conséquence que les prix de la plupart des denrées comestibles sont maintenant au-dessus des moyens d’une large part des travailleurs. Les taxes imposées sur la nourriture ont menés à deux actions de protestation massives pour le seul mois de mars 2005. Tout cela dans la lignée des demandes de la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International concernant les « Pays Pauvres Hautement Endettés », initiatives entraînant le néo-libéralisme. Ceci explique pourquoi les autres pays pauvres, comme le Burkina Faso, la Mauritanie, l’Ethiopie et le Mali sont dans la même angoisse face à la faim que le Niger et neufs autres pays africains, récemment assurés de l’annulation de leur dette extérieure après des années de soumission ininterrompues aux dictats du FMI et de la Banque Mondiale.
Commerce inéquitable
A travers le commerce inéquitable, l’Afrique a été pillée de ses énormes ressources. Entre 1980 et maintenant, la part du continent dans le commerce mondial a chuté de deux tiers, de 6% en 1980 à moins de 2%. Le prix de ses principales exportations ne cesse de plonger. Une étude a révélé qu’entre 1980 et 2001, les prix du café ont plongé de 85%, ceux du cacao de 67%, d’huile de palme de 60% et ceux du cuivre de 41%. Les autres exportations du continent à l’exception du pétrole, suivent la même tendance. Les pays impérialistes qui prêchent le dogme du libre commerce, libéré de tout subsides, etc. imposent des barrières artificielles aux produits africains et subsidient lourdement leurs riches fermiers. On estime que les pays développés dépensent 200 milliards de livres sterling par an pour subsidier leurs agriculteurs, soit 17 milliards de livres sterling en plus que le Produit Intérieur brut de l’entièreté des pays africains. La Banque Mondial déclare que si l’Amérique du Nord, le Japon et l’Europe laissaient tombés leurs barrières aux produits africains, les exportations africaines augmenteraient de 1,5 milliards de livres sterling par an.
Mais pourquoi l’Afrique est-elle dans cette situation? Fondamentalement, la réponse est que l’économie mondiale est depuis longtemps dominée par les classes dirigeantes et compagnies des pays riches. Les 500 plus grandes compagnies internationales contrôlent 70% du marché mondial, alors que les 50 plus grosses banques et compagnies financières contrôlent 60% du capital global. Aujourd’hui, 300 multinationales et banques importantes effectuent 70% des investissements directs à l’étranger.
Cette domination bloque le développement de rivaux indépendants de ces monopoles. Là où de nouvelles technologies et produits se développent, ils sont rapidement dominés par les pouvoirs impérialistes. Les exceptions à cette règle générale, comme la Corée du Nord ou la Malaisie, furent aidés par l’Ouest durant la guerre froide pour des raisons stratégiques. Dans le cas unique de la Chine, les bases économiques de son récent développement furent construites sur les avancées initiales dans l’infrastructure et l’éducation rendues possibles par une économie nationalisée et planifiée, malgré les effets de la direction anti-démocratique du stalinisme maoïste.
Dirigeants corrompus
La douleur de l’Afrique est combinée à la corruption caractéristique de ses dirigeants. Il est intéressant de voir que la corruption n’est en rien limitée à l’Afrique ou aux pays en voie de développement. La chute d’Enron, le géant américain de l’énergie, par exemple, démontre que la corruption est universelle sous le capitalisme. La plupart des ressources qui échappent au commerce inéquitable ou au remboursement de la dette sont volées par les dirigeant pro-occidentaux corrompus et placés dans des comptes privés en Europe et en Amérique du Nord. Ce vol montre aussi qu’ils n’ont aucune confiance envers le développement des pays africains sur une base capitaliste. Le capitalisme néo-libéral, philosophie régnante de gouvernance, a donné plus d’assises aux dirigeants africains pour le pillage, car ils n’ont plus à utiliser ses ressources pour les besoins basiques de la population. Les gains initiaux qui suivirent l’indépendance et avaient procurés des investissements relatifs de la part des gouvernements nationaux dans les services sociaux et entreprises publiques ont été érodés par les politiques néo-libérales de privatisation, de commercialisation et de coupes dans les dépenses publiques.
La guerre et la question nationale
Le néo-libéralisme pousse la masse de la population vers la pauvreté et la marginalisation et ne peut résoudre les questions nationales, héritage du colonialisme, qui sont dans la majorité des cas aux racines des guerres qui ravagent le continent. La plupart des pays africains sont des créations artificielles des maîtres coloniaux pour leurs intérêts stratégiques et économiques sans regards pour les différentes nations, histoires, traditions et langages qu’ils ont réunis.
Il est clair que l’élite bourgeoise africaine est incapable de résoudre la question nationale. Les sections mécontentes de l’élite dirigeante capitalisent le désenchantement des masses laborieuses pour asseoir leurs gouvernements et exploitent les différentes ethnies pour les mobiliser dans des guerres, qui sont en fait dirigées pour servir leurs seuls intérêts. Hors de ces conflits, ils tirent des avantages excessifs pour prendre directement le pouvoir ou négocier pour être intégrer dans la classe dirigeante, au détriment des masses laborieuses utilisées comme chair à canon. Ces guerres ont laissés des millions de travailleurs sans vies, blessés pour le restant de leurs jours, ou encore sans logements. Les statistiques révèlent qu’il y a eu 4 millions de morts au Congo, 2 millions au Soudan, et 1 million au Rwanda, sans parler du Sierra Leone, du Liberia, de l’Ethiopie/Erythrée, de la Côte d’Ivoire, etc. où les guerres ont récemment coûtés des centaines de milliers de morts.
Seule les masses laborieuses peuvent résoudrent les questions nationales en supportant les droits des nations et minorités, en incluant l’autodétermination des peuples, tout en luttant pour des mouvements unifiés contre les ennemis communs. Une caractéristique d’un réel mouvement des travailleurs est de voir des personnes issues de différentes nationalités marchant côte à côte contre les attaques capitalistes contre leurs conditions de vie. Cela montre le potentiel pour construire des mouvements unifiés capables de transformer la société.
Le rôle des travailleurs
La descente actuelle de l’Afrique vers la barbarie est une expression de la faillite de l’impérialisme et des élites capitalistes locales à développer l’économie africaine et les standards de vie de la population. Pour toute la période qui suivit l’indépendance de l’Afrique, tant les militaires que les sections civiles de la classe capitaliste ont dirigés le continent avec les mêmes effets contre-productifs et ruineux. En terme de développement économique général et de niveau de vie des travailleurs, l’Afrique aujourd’hui est encore plus loin derrière l’Europe et les pays capitalistes avancés que ce n’était le cas il y 4 ou 5 décennies.
Cependant, une infime partie de la population africaine est aussi indécemment riche que les capitalistes des pays développés. C’est le résultat du vol des budgets gouvernementaux, et de la collaboration avec l’impérialisme pour piller le reste des africains et les ressources matérielles.
Il ressort de l’histoire du capitalisme, et en particulier de l’histoire limitée du capitalisme en Afrique, que seule la classe ouvrière possède le potentiel de mettre fin à ce système qui signifie la misère pour les masses à côté d’une abondance indescriptible.
Les progrès de la civilisation moderne restent pour une large part une application des connaissances technologiques pour convertir les ressources naturelles en produits fini consommables. Sous la logique capitaliste qui prévaut actuellement, la plupart de ces connaissances technologiques et des ressources mondiales sont passées sous la propriété privée d’une poignée de corporations ou de propriétaires capitalistes. Et c’est là que ce situe la contradiction majeure. Alors qu’au niveau international et même dans plusieurs secteurs de l’économie, continents ou pays, il existe une abondance de connaissance techniques et de ressources pour donner une vie décente à toute personne sur terre, la nature d’égoïsme et de profit du capitalisme fait que dans la majorité des cas, ces potentiels sont irréalisés.
Pourtant, le côté positif du capitalisme est le développement et l’existence de la classe ouvrière. C’est la classe sociale qui a en main les clefs des opérations journalières du système sans lesquelles rien ne peut se passer et qui est également capable d’actions collectives.
Pour pourvoir aux besoins de tous, et non d’une minorité, la classe ouvrière, supportée par d’autres couches de pauvres, doit mener une révolution sociale. Cela entraînera la propriété commune et un contrôle démocratique des commandes de l’économie et des ressources avec une planification et une organisation centralisée vers l’utilité, et non le profit.
Il est extrêmement important de remarquer que l’histoire contemporaine de l’Afrique est en elle-même très riche en mouvements de masses et de luttes. Uniquement l’an dernier se sont déroulées des protestations de masse contre les politiques néo-libérales et capitalistes au Mali, au Liberia, au Burkina Faso, au Niger, en Afrique du Sud, au Nigeria etc.
Des années ’90 au début des années 2000, c’est la classe ouvrière qui a mené les protestations/luttes/révoltes qui aidèrent à la défaite des gouvernements capitalistes impopulaires de Kerekou en République du Bénin, et de Kenneth Kaunda en Zambie. Le Mouvement pour des Changements Démocratiques au Zimbabwe dirigé par Morgan Tsvangirai s’est initialement développé à partir des syndicats et de la résistance de la classe ouvrière contre le gouvernement de Robert Mugabe. En Afrique du Sud, seul le COSATU a mené des grèves et des manifestations de masse contre la politique anti-pauvre et néo-libérale du gouvernement capitaliste de l’ANC.
Au Nigeria, l’actuel pro-impérialiste et anti-pauvre gouvernement du président Olusegun Obasanjo a été ébranlé jusqu’aux racines en plusieurs occasions par une série de grèves et de protestation massives menées par le mouvement syndical.
Malheureusement cependant, toutes ces luttes, nombreuses et collectives, ont montré la faiblesse qui doit être dépassée pour passer de la protestation et de la défensive vers le changement du système. Cela requiert la construction d’un mouvement avec un programme clair et une direction n’ayant pas peur d’affronter le capitalisme.
Les socialistes disent que l’Afrique sortira seulement du cercle vicieux de déclin en rompant avec le capitalisme et en prenant les ressources économiques du continent des griffes de l’impérialisme et des capitalistes locaux. C’est seulement sur base d’une économie démocratiquement planifiée que les ressources seront utilisées dans les intérêts de la majorité de la population. Ce n’est pas l’ancien système où l’élite locale pille l’Etat et les entreprises nationalisées à leurs propres fins. Au contraire les socialistes luttent ils pour une nationalisation sous contrôle démocratique des travailleurs pour prévenir de la corruption et assurer que les ressources sont utilisées dans l’intérêts des masses laborieuses.
L’Afrique n’est pas seule à avoir un avenir incertain sous le capitalisme. La santé de l’économie mondiale aujourd’hui est de plus en plus précaire. Internationalement, les travailleurs, y compris d’Europe et des USA, ne voient qu’un avenir fait d’attaques continuelles envers leur niveau de vie et leurs emplois. Dans cette situation si, même dans un pays africain, une cassure socialiste avec le capitalisme est effectuée, cela aura un écho gigantesque dans les autres pays africains et au-delà. C’est à travers cet impact international que l’isolement d’un pays en rupture avec le capitalisme pourra être dépassé. C’est sur cette base que les socialistes voient l’unité réelle des peuples d’Afrique.
Mais pour faire cela, un programme et une politique clairement socialiste ainsi qu’une classe ouvrière disciplinée sont nécessaires. Sans cela, il y a le danger que les luttes ne mènent qu’à un simple changement du gang de voleurs au pouvoir. C’est ce qui s’est produit dans la Zambie de Chiluba, un gouvernement formé d’anciens activistes des syndicats, qui mène une politique néo-libérale. Bien sûr les travailleurs peuvent lutter aux côtés d’autres forces sociales dans certaines luttes, quand cela concerne des buts économiques, sociaux ou politiques. Cependant, à l’intérieur de ces mouvements, les socialistes défendront qu’un changement fondamental, la fin du capitalisme, est nécessaire pour rendre permanente n’importe quelle victoire obtenue lors de ces luttes partielles.
En République du Bénin, les mouvements de masse de la classe ouvrière furent assez fort que pour mettre fin au gouvernement de Kerekou, mais par manque de leurs propres organisation et dirigeants, il n’y eu d’autre choix que d’investir Mr Soglo, un dissident de la classe dirigeante capitaliste, qui ne fit naturellement que continuer la politique antisociale au pouvoir.
Tristement également, la tentative de créer un parti des travailleurs au Zimbabwe ne s’est soldée que par la fondation du parti pro-capitaliste MDC, ce qui a enlevé à la population une opportunité de combattre et de vaincre le parti capitaliste du dirigeant Mugabe. De façon similaire, c’est le manque d’alternative, de politique socialiste et de détermination pour chasser le gouvernement Obasanjo qui a permis que le très haï président du Nigeria soit capable de comploter pour s’assurer de revenir au pouvoir après la fin de sa législation, en mai 2007.
Pour arrêter le déclin économique et les horreurs de la guerre qui ravagent l’Afrique, la création de mouvements politiques et d’organisations de luttes pan-africaines de la classe ouvrière jointes à la tâche ultime de l’abolition du capitalisme, la cause principale de l’inégalité sociale et des troubles. Cette tâche ne peut être transposée par les masses laborieuses africaines, les jeunes et les révolutionnaires.
Rejoignez nous!
“Tout spectateur est autant un lâche qu’un traître”– Amica Cabra. Si vous êtes mécontent des politiques anti-pauvres menées par les gouvernements africains pro-impérialistes et intéressés de lutter contre ces politiques, l’organisation à rejoindre est le Comité pour une Internationale Ouvrière. Le CIO (CWI en anglais) est une organisation socialiste internationale présente dans près de 40 pays et qui travaille à l’unité de la classe ouvrière et les peuples opprimés contre le capitalisme et pour lutter pour un monde socialistes. Le CIO a des sections au Nigeria et en Afrique du Sud.
Pour plus de détails, écrivez au CIO/CWI, PO Box 3688, London, E11 1YE, Britain ou envoyez un e-mail à cwi@worldsoc.co.uk.
Pour écrire au DSM au Nigeria, envoyez un e-mail à: dsmcentre@hotmail.com. Le site du DSM est: www.socialistnigeria.org et celui du CIO/CWI est: www.socialistworld.net