Tag: Vienne

  • “Nous voulons des emplois, des logements sociaux et des services publics de qualité’’

    Interview de Bart Vandersteene et Anja Deschoemacker

    Ces dernières années, les déficits dans le secteur du logement, de l’enseignement, des soins de santé, de la garde des enfants,… se sont fortement accrus. Les conseils communaux, de différentes manières, ne mènent plus qu’une politique néolibérale qui a plus d’attention pour le city-marketing que pour les besoins de la population. Nous avons discuté avec Bart Vandersteene, tête de liste pour Rood ! à Gand, et avec Anja Deschoemacker, tête de liste de l’alliance Gauches Communes à Saint-Gilles.

    Toute une série de villes voient fleurir des projets de prestige, avec des budgets qui auraient sans doute pu trouver une meilleure affectation. Mais nos centres-villes sont tout de même plus jolis maintenant, non ?

    Bart : L’objectif du city-marketing est en effet de donner l’impression d’une amélioration et, plus particulièrement, de rendre le centre-ville plus attractif. Le centre-ville n’est plus cette zone grise dans laquelle rien ne se passe, toute une série d’événements et d’attractions créent une certaine dynamique. Mais l’objectif n’est pas tellement de nous rendre la vie plus agréable, il est avant tout d’attirer des capitaux privés, entre autres concernant l’immobilier et le tourisme.

    Les loyers et les prix deviennent dès lors complètement inaccessibles pour les simples travailleurs, souvent forcés de déménager en banlieue ou dans une commune proche. Et là, il ne se passe rien. Les prix de l’immobilier dans les centres-villes, à la location ou à l’achat, conduisent à une plus grande dualité entre cette élite pour laquelle la ville est encore accessible et le reste de la population. Ces prix élevés instaurent une pression sur l’ensemble du marché. Sans disposer de grands moyens, il faut actuellement s’endetter très fortement pour pouvoir acheter.

    Les événements organisés sont orientés vers un public fortuné, avec des entrées fort chères ou des tarifs pas croyables pour manger ou boire quelque chose. L’argument que tout cela bénéficie au moins aux classes moyennes ne tient pas la route non plus. Combien de magasins, de restaurants et de cafés reste-t-il aujourd’hui dans la plupart des grandes villes sans faire partie d’un grand groupe ?

    Anja : Les projets de rénovation urbains sont nécessaires. Il suffit de se balader un peu dans la plupart des quartiers de Bruxelles pour se rendre compte que beaucoup de rues et de maisons ont besoin d’une remise à neuf. Mais les projets de prestige ne profitent pas à la population. Au contraire, la rénovation du centre-ville telle qu’elle est appliquée aujourd’hui sert plutôt à chasser des quartiers une partie de la population – sa couche la plus pauvre – afin de faire de la place pour les projets des promoteurs immobiliers. Vu qu’il n’y a plus d’espace pour construire de nouveaux bâtiments, on ne peut attirer une “meilleure population” qu’en forçant la “moins bonne population” à déménager.

    Les problèmes des communes bruxelloises sont bien connus : taux de chômage élevé, grande pauvreté, prix immobiliers exorbitants y compris pour des logements de piètre qualité. La croissance de la population met constamment sous pression le marché et les prix de l’immobilier. Ça fait vingt ans que les communes de la Région bruxelloise font passer d’autres priorités. Le résultat est absurde. D’un côté, on manque de logements à prix accessibles, de l’autre, il y a un énorme vide : 1,2 million de mètres carrés d’espaces de bureaux vides, soit près de 10 % de l’espace total. On compte aussi 12.000 appartements vides de plus de 100 m². Mais le manque de logements décents nous assure des loyers de 800 euros dans un proche avenir. Qu’attendent donc la Région et les communes pour s’attaquer à tous ces espaces vides ?

    Les campagnes pour les communales se limitent généralement à des débats portant sur les pavés qui manquent ou sur le manque de places de parking. Quelle différence peut-on faire au niveau communal ?

    Anja : Le niveau communal n’est pas différent des autres niveaux. Tout dépend des choix politiques, des priorités du budget et de l’endroit où on va chercher l’argent. Les communes ont de très larges compétences, qui incluent d’ailleurs la récolte d’impôts, les investissements publics (en Belgique, les communes sont responsables de 50 % des investissements publics), la création de services à la population,…

    Certains disent que la politique communale n’a rien à voir avec l’idéologie. C’est faux. Les compétences communales sont bien évidemment limitées par les décisions politiques des niveaux supérieurs, mais nous retrouvons à ces niveaux les mêmes partis qu’aux communes. Une commune pourrait très bien prendre la tête de la lutte contre la politique d’austérité, il serait possible de mobiliser la population sur une telle base. Nous n’avons rien à attendre des partis établis ; nous devons construire une opposition active à l’austérité dans les communes comme ailleurs. Là aussi, l’austérité va frapper de plus en plus dans les années à venir.

    Bart : Pour nous, les élections portent sur les besoins les plus urgents et les plus importants de la majorité de la population. L’emploi, le logement, les services publics tels que l’enseignement, l’accueil des enfants… Un conseil communal peut faire une différence à tous ces niveaux.

    Prenez par exemple notre revendication d’un emploi stable et décent pour tous. Une ville ou une commune peut commencer à créer des emplois par ellemême, dans les services publics déjà existants ou de nouveaux services nouvellement créés. Une commune peut mener campagne pour une “ville sans intérim”, en supprimant les contrats précaires des services communaux et en menant campagne contre les emplois temporaires dans le secteur privé. Ce n’est tout de même pas normal qu’à Gand, des grosses entreprises telles que Volvo emploient plus d’intérimaires que de travailleurs sous contrat ! Et on ne parle même pas encore des soustraitants… Les contrats temporaires et intérims ne représentent aucune valeur ajoutée pour la société, ils n’en ont que pour les employeurs qui peuvent ainsi liguer un groupe de travailleurs contre un autre et licencier plus facilement leur personnel.

    Une ville peut aussi jouer un rôle pionnier avec de nouveaux services publics. Les besoins sont nombreux : rien qu’à Gand, il manque 1000 places dans les crèches. Mais on pourrait aussi construire des cafétérias à prix modiques dans les quartiers, afin de pouvoir s’asseoir à une terrasse dans notre propre voisinage sans courir au centre-ville pour boire une bière ou un café à plus de 2 euros. Restos sociaux, centres de réparation de vélos,… les possibilités sont infinies.

    Tout cela est-il réaliste ? Peut-on dépenser plus alors qu’il y aura encore moins de moyens pour les communes dans les années à venir ?

    Bart : Nous partons des besoins, de ce qui est nécessaire à la majorité de la population, et non pas des exigences des élites qui deviennent de plus en plus marginales au sein de ce système. Ceux qui nous disent qu’il n’y a pas de moyens ou qu’une autre politique n’est pas possible “à cause de l’Europe”, sont ces mêmes politiciens qui siègent eux-mêmes à la tête de leur parti ou du gouvernement fédéral ou régional, mais qui n’ont par contre aucun problème à maintenir la déduction des intérêts notionnels. Se réfugier derrière la phrase ‘‘c’est un autre niveau de pouvoir qui est responsable’’ est ridicule. Les mêmes partis siègent à tous les niveaux et appliquent la même politique d’austérité.

    Anja : Il est toujours plus facile d’aller chercher l’argent parmi la majorité de la population avec toutes sortes de taxes communales et d’amendes que de faire contribuer l’élite. Un éboueur ne peut pas déménager dans un paradis fiscal. D’immenses profits sont réalisés dans notre pays, mais les patrons et les grands actionnaires ne vont pas nous livrer cette richesse sur un plateau. Nous devons collectivement prendre le contrôle des richesses existantes. Les secteurs-clés de l’économie (énergie, sidérurgie, finance,…) doivent passer aux mains du public.

    Quand, dans les années ′80, les camarades anglais du PSL sont parvenus au pouvoir à Liverpool, toute la ville a été transformée en un grand chantier. Une grande campagne médiatique a alors été lancée à contre ce conseil communal dominé par les marxistes. Mais un lecteur a alors écrit au journal local : ‘‘Je ne sais pas qui était Léon Trotsky, mais à en juger par le nombre de nouveaux logements qui sont en train d’être construits à Liverpool, il devait certainement être un fameux maçon.’’ Qu’en est il pour notre pays ?

    Bart: “C’est également nécessaire. Rien qu’à Gand, il y a 7.500 personnes sur la liste d’attente des logements sociaux. Cela correspond environ au nombre de logements sociaux promis par tous les partis ces 18 dernières années – partis qui sont parvenus, au cours de la même période, à construire en tout et pour tout 750 logements.

    Nous sommes pour une politique de construction et de rénovation urbaine axée sur les logements sociaux. Cela nécessite de reprendre le secteur du bâtiment entre nos propres mains, afin de rehausser la qualité des édifices, mais également d’assurer la qualité et la sécurité de l’emploi du secteur. Répondre à la demande de logements sociaux réduirait cette liste d’attente, certes, mais instaurerait également une grande pression à la baisse sur les prix de l’immobilier dans le privé.

    La tendance à laquelle nous assistons aujourd’hui est exactement inverse. Quant aux subsides au loyer pour ceux qui ne s’en sortent pas, cela revient à subsidier les loyers élevés qui, grâce à ces subsides, deviennent tout d’un coup accessibles pour les ménages à bas revenu. Un programme massif de construction de logements sociaux aurait l’effet inverse de faire baisser tous les prix. La ville de Vienne, en Autriche, est aujourd’hui le plus grand propriétaire de logements de toute l’Europe, suite à la mise sur pied d’une compagnie publique de construction par les socialistes au pouvoir dans les années ′20.

    Anja : À Liverpool, le conseil communal élu a tenu ses promesses. Ici, les campagnes se suivent avec les mêmes belles promesses, rarement suivies d’effets. L’accord de gouvernement de la Région bruxelloise prévoit de parvenir à 15 % de logements sociaux en ville d’ici 2020, contre 9 à 10 % à l’heure actuelle. Cela signifierait la construction de plus de 34.000 logements sociaux. À Saint-Gilles, avec ses 8,5 % de logements sociaux, il faudrait construire 1717 nouveaux logements d’ici 2020 ; à Ixelles ou Uccle, qui comptent 4 % de logements sociaux, il en faudrait 5000. Les communes sont en fin de mandat, et le conseil régional actuel n’a plus que deux ans jusqu’aux prochaines élections. Au rythme de construction actuel, ces 15 % resteront sur papier, alors que cela ne suffirait même pas. Cet objectif de 34.000 nouveaux logements (alors que la liste d’attente comprend 50.000 personnes) ne prend en compte ni les évolutions de ces huit prochaines années, ni toutes les familles qui ne se sont même pas inscrites sur liste d’attente, en sachant très bien que “ça ne sert à rien”.

    Vous envisagez donc les choses dans un contexte plus global. Mais que dire de tous ces petits problèmes tels que la propreté, les pavés manquants ou les rues défoncées ?

    Anja : Toutes ces rues mal entretenues dans des quartiers populaires dégueulasses ne sont jamais que le revers de la médaille des projets de prestige orientés uniquement vers le city-marketing, vers les attractions touristiques et toutes sortes de projets commerciaux (shopping-centers,…). À d’autres moments, le mauvais état de certains quartiers se voit tout à coup utilisé comme prétexte pour “rénover” ces mêmes quartiers, ce qui signifie bien souvent que les couches les plus pauvres devront céder la place à des ménages à plus hauts revenus. Le conseil communal de Liverpool des années ′80 avait construit des logements sociaux, mais a aussi amélioré les conditions de travail du personnel communal et en a engagé suffisamment que pour s’occuper de la propreté et de l’entretien de l’infrastructure publique.

    Bart : La propreté à Gand ne s’est pas améliorée depuis la privatisation d’Ivago à la fin des années ′90. Les sacs poubelles sont devenus de plus en plus chers et, pour être sûr que les gens n’abandonnent pas leurs déchets dans la rue, on a diminué le nombre de poubelles publiques. On nous a ainsi encouragés à ramener tous nos déchets à la maison, pour utiliser les sacs payants. L’entreprise de collecte de déchets Ivago tire chaque année un revenu de 3,5 millions d’euros rien que de la vente des sacs poubelles jaunes (sans compter tout le reste). Cet argent est en grande partie redistribué en dividendes pour la ville et pour des actionnaires privés, tels que le groupe Suez. Il est possible de revenir à une collecte de déchets gratuite, sans que cela ne coute quoi que ce soit à la collectivité ; seuls les actionnaires privés ont à y perdre. Mais les actionnaires ont-ils vraiment besoin de tirer profit des déchets qu’ils nous ont déjà vendus auparavant ?

    Une collecte gratuite des déchets, une poubelle à chaque coin de rue, un parc à containers dans chaque quartier: voilà comment lutter contre les ordures. Mais cela va à l’encontre de la politique communale libérale, où on ne se soucie que des profits des actionnaires privés tandis que la responsabilité pour les problèmes nés de cette politique est refourguée sur le dos des victimes de cette politique.

    Quelle est l’objectif de la participation électorale de Rood ! à Gand ?

    Bart : Rood ! a l’ambition de former une large force de gauche, nous voulons donc renforcer la gauche grâce à cette campagne. Cela aurait été plus facile si on avait obtenu une initiative unitaire également avec le PTB ; de véritables cartels de gauche pourraient nous donner plus d’élus. Une campagne enthousiaste avec laquelle nous pouvons positionner Rood ! en tant que véritable acteur peut renforcer la possibilité d’aller vers une campagne de gauche unie en 2014 (élections fédérales, régionales et européennes). Dans notre pays aussi, il y a une grande ouverture pour la gauche. Les frontières nationales ne me semblent pas être si étanches au point que nous ne pourrions pas connaitre la même situation qu’avec le SP aux Pays- Bas ou avec Mélenchon en France.

    À Gand, on nous dit qu’après les élections communales, il y aura la coalition la plus à gauche possible, avec le cartel SP.a-Groen. Leur politique ne sera néanmoins pas différente des précédentes. La crise économique va conduire à des plans d’austérité, la politique du city-marketing va continuer à fleurir, mais une couche de plus en plus grande de la population va remettre en question cet emballage certes fort joli, mais vide. Nous ne pouvons pas nous permettre de laisser la droite se présenter comme la seule opposition à cette politique ; il faut construire une forte opposition de gauche qui soit capable d’organiser la résistance. C’est le défi que Rood ! veut relever.

    Et quel est l’objectif de Gauches Communes à Saint-Gilles, Jette, Ixelles et Anderlecht ?

    Anja : Tout comme Rood ! en Flandre, les organisations et individus qui participent à l’alliance Gauches Communes ont surtout l’ambition de renforcer le camp de la gauche. La création d’une formation large, qui prenne réellement en compte les revendications du mouvement ouvrier et des mouvements sociaux, et qui soit prête à se lancer dans la lutte pour défendre ces intérêts, sera une étape absolument nécessaire afin de rompre l’impasse que représente le capitalisme en crise, de quitter le cercle vicieux qui signifie toujours plus de pauvreté, toujours plus de désespoir pour de plus en plus larges groupes de la société.

    Gauches Communes se présente dans quatre communes bruxelloises, dans l’idée de populariser une formation de gauche large, au fonctionnement démocratique, mais aussi de renforcer les forces de gauche existantes dans ces communes, afin de démarrer l’opposition à la politique d’austérité communale au cours de la période à venir. Une encore plus large collaboration aurait été encore mieux. Mais vu le manque d’enthousiasme et l’attitude attentiste de certains partenaires potentiels, nous n’avions pas la possibilité de patienter plus longtemps. Gauches Communes reste bien entendu ouvert à toute discussion en vue d’une encore plus large collaboration dans le cadre de campagnes contre la politique d’austérité ou d’autres formes de protestation.

  • En Bref…

    Chaque samedi, nous publions dans cette rubrique quelques faits marquants, des citations, des cartoons, de petites vidéos,…

    Reynders et la Tunisie

    Didier Reynders a quitté son poste de Ministre des Finances pour devenir Ministre des Affaires Etrangères. Que notre bon Didier avait une certaine vision de la fiscalité, personne n’en doutait, et il a su se montrer digne de la confiance que plaçaient en lui les milieux d’affaires. Il semble que sur le terrain des Affaires Etrangères, il bénéficie aussi d’une certaine expérience… en ayant porté le titre de consul honoraire de Tunisie de 2004 à 2011, en pleine dictature de Ben Ali ! Ce poste sert avant tout à « favoriser le développement de relations commerciales, économiques, culturelles et scientifiques entre l’Etat d’envoi et l’Etat de résidence » selon la convention de Vienne. Plusieurs politiciens ont dénoncé cette relation particulière avec un dictateur. Ceci dit, c’est avant tout une manière bien facile et hypocrite de s’attaquer au MR. Nous attendons des commentaires aussi acerbes de la part de Véronique De Keyser (PS) ou de George Dallemagne (CDH) concernant la mission économique belge envoyée en 2012 au Kazakhstan…


    Le racisme est une "réalité structurelle" en Belgique

    L’ENAR (European Network Against Racism) a publié cette semaine un rapport intitulé "le racisme et les discriminations qui y sont associées en Belgique" à l’occasion de la Journée internationale contre le racisme. Selon la coordination nationale belge de l’ENAR, les communautés noire et musulmane ainsi que les gens du voyage sont les communautés les plus vulnérables face au racisme dans notre pays. Ce rapport dénonce "le racisme lourd en raison de la couleur de la peau" que subissent les populations "noires" tout en regrettant "qu’aucun rapport officiel n’apporte de chiffre ou d’analyse spécifique sur cette forme de discrimination". Il s’agit "d’un mouvement inquiétant" initié par "une coalition de partis conservateurs." Les secteurs les plus touchés par des faits présumés de discrimination sont l’emploi, l’enseignement, le logement et les médias, selon l’ENAR.


    Londres annonce une baisse d’impôt pour les plus riches

    Ce 21 mars, le budget 2012-2013 a été présenté par le ministre des finances britannique. Le gouvernement de coalition conservateur-libéral-démocrate vient de réduire le taux supérieur d’imposition sur les revenus de 50 % à 45 % pour les personnes gagnant plus de 179.500 euros par an, avec l’objectif de revenir le plus vite possible à un taux unique de 40 %. Pendant ce temps, les chômeurs de longue durée sont obligés de travailler gratuitement pour pouvoir continuer à percevoir leurs allocations de chômage… Comment mieux illustrer la guerre de classe actuellement à l’œuvre en Europe et dans le monde ?


    «A tout moment la rue peut aussi dire NON !»

    Voici un film de combats réalisé par les métallos Wallonie-Bruxelles de la FGTB. Il s’agit de 11 minutes d’images et de paroles de métallos en colère, un vidéo-tract qui sonne comme un avertissement, sur un rock prêt à mordre du groupe français Eiffel. Cette vidéo rappelle les actions et les combats récents menés par les militants et leur détermination à ne pas plier. Accéder à cette vidéo sur le site metallos.be


    Le FMI fait quelques recommandations à la Belgique…

    L’encre du conclave budgétaire de mars n’est pas encore sèche que le FMI propose déjà de nouvelles attaques ! Comme nous l’avons déjà dit, nous sommes face à une avalanche d’austérité, et elle ne s’arrêtera pas sans résistance ! Pour le Fonds Monétaire International, l’âge de la pension doit être relevé et l’indexation des salaires doit être revue. Rien que ça… Le prochain cheval de bataille de la Belgique doit être de booster sa position de concurrence, souligne le FMI. Quand s’arrêtera donc cette spirale négative ? Le gouvernement, toujours selon le FMI, doit maintenant se focaliser sur une restriction des dépenses dans les pensions, les soins de santé et l’emploi dans le secteur public.


    ArcelorMittal : 138 % de bonus en plus

    Selon le rapport annuel 2011, les dirigeants de la multinationale ont reçu 17,2 millions de dollars de rémunérations variables liées aux performances à court terme, contre 7,2 millions en 2010 (soit 138% de plus). Le bonus personnel de Lakshmi Mittal a augmenté de 199 % à lui seul… Durant la même année, le groupe a fermé ou annoncé la fermeture de plusieurs sites, notamment à Liège, à Rodange & Schifflange au Luxembourg et à Florange en France. Comment justifier de lancer un secteur économique aussi important aux mains de tels rapaces ?

  • Hongrie : En route vers la faillite et la dictature?

    Les médias internationaux parlent beaucoup de la Hongrie, à la fois en raison de la politique de droite de son gouvernement et de la crise économique du pays, une nouvelle menace pour la stabilité de l’euro. Bien que le pays ne soit pas membre de l’eurozone, tout en étant membre de l’Union Européenne, l’euro a chuté suite aux rapports faisant état des problèmes économiques de la Hongrie.

    par Tilman M.Ruster, SLP (CIO-Autriche)

    Le danger pour la zone euro réside dans de gros investissements et des prêts élevés accordés par les banques européennes (notamment autrichiennes, allemandes et suisses), et qui embrouillent ces dernières dans la crise hongroise. Le problème, c’est que la plupart de ces prêts ont été effectués en devises étrangères. Au cours de cette crise, la monnaie hongroise a continuellement été dévaluée, ce qui rend le remboursement de ces prêts en euros ou en francs suisses presque impossible. Il ne s’agit pas uniquement de prêts octroyés à l’État ou aux entreprises, les ménages privés sont ainsi particulièrement touchés. Lorsque la monnaie hongroise était plus forte, de nombreuses banques ont accordé des prêts en euros ou en francs suisses, qui ne peuvent maintenant plus être remboursés. Beaucoup de ménages sont donc actuellement en situation d’insolvabilité. Depuis le 11 janvier, le gouvernement hongrois, le FMI et l’UE ont négocié un plan de sauvetage en prenant exemple sur le plan grec.

    Le gouvernement conservateur populiste de droite du Fidesz, dirigé par Victor Orbán, a tout tenté pour empêcher que cela ne se passe. Le remboursement d’un plan de sauvetage de 2008 a été terminé en 2010. Le gouvernement nouvellement élu d’Orbán a résisté à quelques-uns des diktats de l’UE et du FMI, notamment en introduisant une taxe limitée sur les banques et une ‘‘taxe de crise’’ qui a particulièrement touché les entreprises étrangères. Ces mesures fiscales ne font pas d’Orbán un homme de ‘‘gauche’’ pour autant. Il s’agissait plutôt d’une tentative visant à défendre les intérêts nationaux de la faible classe dirigeante hongroise tout en évitant d’immédiatement devoir faire face à la colère des électeurs du Fidesz. Le gouvernement du Fidesz a tenté de maintenir son soutien populaire, y compris chez certains travailleurs, en s’attaquant aux riches. Mais cela ne change en rien son caractère capitaliste. Ainsi, la taxe sur les banques a été suivie de cadeaux fiscaux pour les riches. L’alliance entre Orbán et les capitalistes n’est pas rompue, et de moins en mois de Hongrois soutiennent le Fidesz.

    Suite à cela, Orbán a tenté d’utiliser sa majorité des deux tiers au parlement afin de faire adopter de brutales mesures d’austérité, comme celles mise en vigueur en Grèce par la troïka UE, BCE et FMI, sur base nationaliste. Ces énormes attaques contre les droits des travailleurs, les retraites, les soins de santé, l’aide sociale, les chômeurs, etc. ont été encadrées par une massive propagande raciste. Par exemple, lorsque la protection de l’emploi a été effectivement abolie, le gouvernement s’est justifié en accusant le ‘‘Rom paresseux’’ de paralyser toute l’économie. En outre, la proposition récemment introduite de détenir les travailleurs sans emploi dans des camps de travail obligatoire avec un personnel de sécurité destiné à les surveiller a été présenté comme une ‘‘mesure de sécurité’’ envers les Roms, dont le taux de chômage avoisine les 50%.

    Il existe une opposition à ces mesures, mais qui ne dispose pas d’une voix politique claire. Le Fidesz a d’ailleurs lui-même une base électorale assez faible. Les 53% des voix obtenus aux élections de 2010 l’ont été sans grand enthousiasme de la part de la population, seuls 47% des Hongrois étant allés voter. L’opposition parlementaire se compose de l’ancien parti stalinien et désormais social-démocrate (le parti ‘‘socialiste’’ MSzP) et des vert libéraux (LMP), derrière le slogan ‘‘la politique peut être différente’’. Le MSzP est sérieusement discrédité pour avoir fait partie du gouvernement précédent, et ne s’est toujours pas relevé du scandale qui a éclaté quand, peu de temps après avoir remporté les élections de 2006, un enregistrement du Premier ministre du MSzP, Ferenc Gyurcsány, a été rendu public. Dans celui-ci, il déclarait au cours d’une réunion privée du parti ‘‘nous avons merdé…il est évident que nous avons menti tout au long des 18 derniers mois…’’ Depuis lors, ce parti ‘‘d’opposition’’ ne constitue plus une alternative crédible aux yeux des masses en colère.

    Le soutien des néo-fascistes

    A l’extrême droite, il y a le parti néo-fasciste Jobbik. Pendant la crise politique de 2006, ce parti a pu jouer un rôle important. Des dizaines de milliers de personnes ont défilé pour une ‘‘Hongrie nationale’’, des bagarres de rue éclatant ça et là avec la police. Ils ont même été jusqu’à utiliser un tank qu’ils avaient réquisitionné et ont occupé le centre de télévision nationale ! Les gauchistes, homosexuels, juifs et autres minorités ont dû se cacher ou fuir Budapest. Des voix se sont élevées pour dénoncer cette tentative de coup d’état du Jobbik.

    Malheureusement, beaucoup de Hongrois considèrent le Jobbik comme une force d’opposition crédible, même si son programme est identique en de nombreux points à celui du parti au pouvoir, le Fidesz. Le Jobbik se fait passer pour un parti ‘‘anticapitaliste’’, mais il accuse ‘‘les forces juives internationales’’ d’être responsables du capitalisme et de la crise du système. Actuellement, le Jobbik n’est pas un réel danger pour le gouvernement. Mais il représente par contre un danger très réel pour les opposants et les minorités du pays. Il terrorise ainsi ses ennemis grâce à sa ‘‘Garde hongroise’’, une troupe paramilitaire de voyous et de skinheads. Dans certaines régions, cette garde prétend même jouer le rôle de “police auxiliaire”. À la requête de l’aile droite des autorités locales, ils effectuent des patrouilles, de réelles tournées de terreur, en se prenant pour des ‘‘fonctionnaires’’ en mission. Les Roms, plus de 6% de la population, ont déjà été chassés de certains villages.

    Une opposition populaire croissante

    La plupart des syndicats n’ont pas montré beaucoup de résistance face aux attaques brutales du gouvernement. La plupart d’entre eux sont affiliés au MszP, la social-démocratie. Les syndicats du secteur public font toutefois exception sur cette question. Après les attaques contre les salaires et les emplois, des grèves se sont développées chez les pompiers et les policiers. On a aussi vu des grèves dans les transports en commun, chez le personnel des bus et les cheminots, en riposte à des attaques contre les retraites et les régimes de retraite anticipée. Le syndicat du Jobbik dans la police, qui organise au moins 10% des forces de police, se dit “prêt à passer à l’action”, mais n’a pas participé à la grève. Il a d’ailleurs volontairement été exclu de l’action par les autres syndicats.

    Le gouvernement a tenté d’empêcher l’organisation de tels événements en s’attaquant aux droits démocratiques gagnés par les luttes des générations précédentes et en tentant de virer les syndicats du secteur public.

    La nouvelle loi sur les médias a fait les gros titres de la presse en dehors de la Hongrie et a suscité des protestations internationales. Mais le gouvernement censurait déjà ses médias. Le 2 janvier, lors de la manifestation de masse contre la nouvelle constitution d’Orbán, la chaîne de télévision gérée par l’Etat a placé le journaliste couvrant l’évènement à un des seuls endroits de la ville où aucun manifestant ne pouvait être vu, une pratique qui est déjà devenue routinière. La nouvelle loi a permis la création d’une nouvelle commission visant à empêcher la publication de rapports critiques et d’imposer des amendes élevées aux médias d’opposition. Des passages de cette nouvelle loi ont cependant été récemment retirés par la Cour constitutionnelle. Cela illustre que, malgré tout, certains secteurs du pouvoir sont opposés aux mesures du Fidesz, qui conduisent tout droit à régime autoritaire et dictatorial.

    Toutefois, des mesures gouvernementales ont été prises contre ces juges constitutionnels ‘‘rebelles’’. Dans un premier temps, le gouvernement a créé les ‘‘lois cardinales’’ distinctes de la Constitution. Elles sont contraignantes, sans être soumises au contrôle de la Cour constitutionnelle dont les membres sont élus à vie par le parlement. Au lieu de cela, ces lois sont sous l’égide d’un nouveau conseil des gardiens appelés la ‘‘curie’’ dont les juges constitutionnels ne sont qu’une partie des membres.

    Le président de la Cour constitutionnelle, proche du MSzP, a été contraint de démissionner. Il est susceptible d’être remplacé par un membre du gouvernement loyal à Orbán.

    Une nouvelle constitution autoritaire et nationaliste

    Les implications de la nouvelle Constitution, entrée en vigueur le 1er janvier, vont beaucoup plus loin. Un conseil central de banquiers est désormais en mesure de dissoudre le parlement s’il accepte "des mesures qui mettent en danger le budget". Ce conseil est rempli de membres du Fidesz. D’autres instances publiques sont également tenues en laisse par le Fidesz et, dans certains cas, par des membres du Jobbik, et de manière agressive. Cela donne à Orbán la possibilité de garder le pouvoir, même en cas de défaite électorale, et d’installer des éléments de dictature au gouvernement. Qu’il en vienne à les utiliser dépend de nombreux facteurs, notamment du développement de la crise économique et de la résistance de la classe des travailleurs hongroise.

    Le gouvernement encourage et exploite le nationalisme hongrois. Le terme de ‘‘république’’ a été supprimé de la nouvelle constitution car le Fidesz veut utiliser le terme Hongrois comme une identité générale et ne faisant pas référence uniquement à l’Etat actuel. C’est très clair quand on remarque l’inclusion dans la nouvelle constitution de références à des “Hongrois de souche” vivant à l’extérieur des frontières imposées en 1919 par les vainqueurs de la première guerre mondiale. Récemment, le démocrate-chrétien vice-Premier ministre, Zsolt Semjén, a expliqué lors d’une réunion des “Hongrois de souche” à Vienne que donner la citoyenneté hongroise à tous les Hongrois de souche améliore à l’échelle internationale l’unité juridique de la nation et donc la survie des Hongrois. Il a déclare qu’une «impulsion forte» est nécessaire pour stopper l’assimilation des Hongrois de souche à l’étranger, ce qui implique l’octroi de la citoyenneté et du droit de vote en Hongrie.

    L’opposition sape le soutien au Fidesz

    Mais la résistance existe. En 2011, il y a eu une vague de manifestations et de grèves. Le 2 janvier, plus de 50.000 personnes ont envahi les rues pour protester contre la nouvelle constitution. Une des causes de cette participation massive est la colère qu’engendrent les privations provoquées par les réformes d’Orbán.

    Lors des précédentes manifestations, par exemple pour la liberté de presse, les questions sociales étaient toujours bien présentes en arrière-plan. Le mécontentement se voit dans les sondages, le soutien au Fidezs a chuté à 14% en janvier 2012 (qu’il faut comparer aux 53% obtenus lors des dernières élections). Seuls 40% des électeurs disent vouloir voter, encore moins qu’en 2010. Pourquoi aller voter ? Toutes les tâches parlementaires importantes ont été attribuées à des organismes non élus.

    Les partis établis ne représentent fondamentalement aucune alternative face aux mesures d’austérité d’Orban. Près de 60% des Hongrois disent qu’ils ne soutiennent actuellement aucun parti. Le MszP enregistre seulement 11% de voix, tandis que le LMP a à peine fait 4%. La Coalition démocratique, une scission du MSzP dirigée par l’ex-Premier ministre, M. Gyurcsány, a été jusqu’à présent incapable de combler cette lacune et enregistre près de 2%. Dans le même temps, le Jobbik bénéficie d’une stabilité dans les sondages, à 20%. Mais quand les néo-fascistes sont apparus à la manifestation du 2 janvier, ils ont été chassés par des gens qui criaient “les nazis dehors”!

    Le nouveau mouvement de protestation apporte avec lui de possibles nouvelles bases pour les partis de gauche. Au début, il s’agissait principalement d’étudiants et de quelques citoyens en colère qui sont descendus dans les rues. La classe ouvrière a participé à des manifestations depuis 2011 et a commencé à imprimer sa marque sur le mouvement. Les syndicats ont participé à la manifestation du 2 janvier. Cela illustre la pression des membres du syndicat sur leurs leaders, et c’est un bon signe!

    De nouveaux mouvements et partis

    Le rapport des militants du Comité pour une Internationale Ouvrière montrent que, parmi beaucoup d’autres structures, deux initiatives en particulier ont commencé à se détacher des mouvements vers la formation de partis politiques. Une formation est appelée Szolidaritas. Le nom fait référence au syndicat polonais Solidarnośc. Cela montre les origines syndicales du parti, mais reflète aussi le fait que le programme du parti reste sur une base capitaliste.

    La seconde formation est appelée 4K! (Mouvement de la Quatrième République) et a été lancé fin 2011. Il prévoit d’organiser son premier Congrès en mai. Jusqu’à présent, c’est un petit groupe hétérogène d’opposition existant essentiellement sur le net. Mais avec les grandes manifestations, il est devenu un pôle d’attraction de gauche pour beaucoup de gens en Hongrie. Son profil politique n’est pas encore clair, mais il traite seulement des questions de droits démocratiques.

    Le moment est venu de constituer un parti à gauche qui lutte pour les travailleurs, les chômeurs et les jeunes. Il pourrait faire en sorte que le mouvement de protestation actuel ne s’éteigne pas. Pour réussir un nouveau parti comme celui-là, le programme est important à deux égards. D’une part il y a un besoin de propositions concrètes sur la façon dont le mouvement pourrait se développer. Les grèves seraient un instrument pour frapper le gouvernement là où ça fait mal. Le gouvernement serait ainsi forcé de se comporter ouvertement en faveur des grandes entreprises. Impliquer des organisations roms dans un nouveau parti et dans les manifestations est également important. Surmonter la fracture raciste est la clé de la lutte contre le Fidesz et le Jobbik.

    Plus importantes encore sont les revendications qu’un tel nouveau parti aurait à mener dans le mouvement.

    La réduction des droits démocratiques et les attaques racistes contre les Roms sont des symptômes que des attaques radicales sur les salaires, l’État-providence et les conditions de vie des travailleurs ont déjà été menées. Il y a une nécessité pour un programme de lutte contre la crise, pas seulement contre Orbán. En bref, il y a un besoin évident d’un programme anticapitaliste!

    Beaucoup de gens en Hongrie ont déjà perdu toute illusion d’avenir au sein du capitalisme. Certains ont des souvenirs nostalgiques du «communisme du goulasch» qui a existé jusqu’en 1989, l’économie planifiée ayant au moins assuré la sécurité sociale, mais gouvernée par une élite autoritaire stalinienne ne permettait pas de réels droits démocratiques. Les jeunes, en particulier, ne veulent pas de ça, tout comme les personnes âgées ne désirent pas vraiment un retour en arrière. Beaucoup sont à la recherche d’autres alternatives au capitalisme. Un nouveau parti, armé de l’idée d’un véritable socialisme démocratique pourrait être très fructueuse.

    Avec un programme clair et des stratégies de grèves et des actions de masse permettront d’accroître la confiance des travailleurs et des syndicats. Préparé de cette manière la classe ouvrière pourrait s’employer à faire tomber le gouvernement, ayant une réelle alternative à offrir à la grande majorité des partis existants!

  • Kazakhstan : En défense des travailleurs du pétrole

    La bureaucratie syndicale et les groupes de ‘gauche’ attaquent la solidarité du CIO avec les grévistes

    Avec une brutalité incroyable, le régime de Nazarbayev, au Kazakhstan, a tenté de briser l’esprit de combativité des travailleurs du pétrole à Zhanaozen et Aktau, en utilisant la troupe, la police, des tirs à balles réelles, des arrestations de masse, l’imposition d’un couvre-feu et jusqu’à la torture. Le régime admet lui-même que 16 personnes ont été tuées et plusieurs autres blessées en décembre. En réalité, des dizaines de personnes ont été tuées, des centaines d’autres blessées, et beaucoup sont encore ceux qui sont toujours en garde à vue ou qui sont forcés de se cacher pour éviter la persécution de l’État.

    Rob Jones, CIO-Moscou

    La manifestation des travailleurs du pétrole du 16 décembre dernier à Zhanaozen était une action tout à fait non-violente. Les diverses vidéos, y compris celles de la police, montre les travailleurs du pétrole et leurs partisans sur une place centrale, sans la moindre arme, sans même agiter de bâtons. Elles montrent d’ailleurs au contraire que lorsque l’atmosphère a commencé à s’échauffer et que des insultes ont été lancées en direction de la police, des travailleurs plus expérimentés sont directement intervenus pour calmer la situation.

    Au cours de leur longue grève de 7 mois, ces grévistes avaient déjà pu démontrer en de nombreuses reprises quels étaient leur sang-froid et leur retenue. Les représentants qu’ils avaient élus ont été arrêtés et confrontés à une violence des plus brutales. Leur avocate, Natalia Sokolova, a été condamnée à 6 ans de prison. Des travailleurs ont vu leurs logements brûlés tandis qu’un gréviste et la fille d’un autre gréviste ont été lâchement assassinés. Des milliers de travailleurs du pétrole ont été licenciés. Mais malgré toutes ces provocations, ces héroïques travailleurs ont fait tout leur possible pour maintenir les protestations disciplinées et pacifiques.

    Mais leur patron, avec le soutien plein et entier du régime, a toujours refusé de commencer de véritables négociations avec les grévistes. À plusieurs reprises, l’Etat s’est montré préparé à aller vers une confrontation violente, mais cette approche a été refreinée, par crainte de provoquer un conflit plus large encore à travers le pays. Il ne fait aucun doute que la solidarité croissante envers les grévistes, y compris au niveau international, a joué un rôle important.

    La violence et les révolutions de palais – deux faces d’une même médaille

    Mais à l’approche du 16 décembre, soldats et policiers avaient été déployés à l’avance dans la région, avec armes et balles réelles. Mis à part à Astana, la capitale, tout ce qui avait été prévu dans le pays pour célébré le 20e anniversaire de l’indépendance du pays (le 16 décembre) avait été annulé.

    Il semble que l’attaque armée contre la manifestation des travailleurs du pétrole à Zhanaozen faisait partie d’un plan plus vaste organisé par une partie de l’élite dirigeante. Les violences qui ont dégénéré hors de tout contrôle suite à la fusillade perpétrée par la police ont été utilisées comme prétexte pour démettre plusieurs personnalités clés au sein du régime et des structures du pouvoir. Un des beaux-fils de Nazarbayev, Timur Kulibayev, a été démis de sa fonction de président de ‘KazMunaiGaz’ et du fonds national ‘Samruk-Kazyn’. De plus, des rumeurs font état du possible remplacement du chef de la KNB (la police secrète) par des personnes plus fidèles au groupe Massimov-Musin. Tout indique qu’une révolution de palais s’est produite dans les sphères dirigeantes.

    Attaques contre les grévistes

    Pourtant, les travailleurs du pétrole et leurs partisans ne cessent d’être accusés d’être responsables des tragiques évènements du 16 décembre. Ces accusations des porte-paroles du régime, qui prennent différentes formes, sont reprises telles quelles par les médias, la bureaucratie syndicale et même par certains de groupes de ‘‘gauche’’, qui agissent ainsi en apologistes du régime dictatorial de Nazarbayev.

    Le régime prétend que la ‘‘raison majeure de ces troubles de masse réside dans les actions d’un groupe de hooligans qui a profité du conflit de longue date entre les salariés licenciés et la direction de la société ‘Ozenmunaigaz’.’’ (Déclaration émise par l’Ambassade de la République du Kazakhstan en Autriche, 23 décembre 2011)

    L’ambassadeur kazakh aux Etats-Unis, Erlan Idrissov, a affirmé le 21 décembre 2011, que ‘‘la police a essayé de se comporter aussi responsablement que possible afin de protéger la vie des civils (…) A l’origine, sur la place [de Zhanaozen], seul le chef de la police avait une arme (…) Ce n’est que lorsque le vandalisme a commencé et que des menaces ont commencé à peser sur des vies innocentes – après l’incendie de la Akimat [les locaux des autorités locales] – que la police a dû recourir aux moyens nécessaires pour rétablir l’ordre.’’

    Selon une déclaration faite par le Daulbayev Askhat, le Procureur Général de la République du Kazakhstan, le 16 décembre, les perturbations ont été causées quand ‘‘un groupe de hooligans [sur la place] ont commencé à tabasser les civils et à fracasser les voitures garées près de la place." La déclaration se poursuit comme suit : ‘‘En raison des perturbations, le bureau du bourgmestre, un hôtel et le bâtiment de la société Ozenmunaigaz ont été brûlés.’’

    Ces déclarations, en réaction aux protestations qui se sont déroulées dans le monde entier, sont très manifestement destinées à tromper l’opinion internationale sur les sanglants événements qui se sont produits à Zhanaozen. Dans les premières déclarations du Procureur Général, le 16 décembre, il est affirmé que les bâtiments ont été brûlés "en conséquence des troubles’’, mais cette version a été changée deux jours plus tard pour donner l’impression que ces destructions avaient pris place avant l’intervention meurtrière de la police.

    Mais les différentes déclarations officielles du régime suffisent déjà à poser des questions très sérieuses :

    • Si ce qui s’est passé à Zhanaozen n’était qu’une émeute causée par des hooligans, pourquoi les ‘‘moyens habituels’’ de la police (balles en caoutchouc, canons à eau) n’ont-ils pas été utilisés ? Pourquoi directement recourir aux tirs à balles réelles ?
    • Si la police protégeait la population de la place de ces hooligans, pourquoi ont-ils tirés à balles réelles au sein même de la foule qu’elle était censée protéger ?
    • Si l’action de la police n’a constitué qu’une réponse à des émeutes, pourquoi l’ambassadeur du Kazakhstan aux Etats-Unis juge-t-il nécessaire de consacrer une partie importante de sa déclaration à s’en prendre aux grévistes du pétrole ?
    • Si cela n’était tout simplement qu’une émeute, pourquoi le gouvernement a-t-il interdit toute manifestation, réunion publique et grève et a été jusqu’à interdire l’utilisation de photocopieuses, de TV, de radios, de vidéos et de haut-parleurs ? C’est bien étrange, que les hooligans ont d’habitude fort peu tendance à éditer des tracts et à organiser des conférences de presse.

    Les vidéos et les témoins dissent démontrent clairement que l’attaque policière n’avait aucun fondement

    La vérité, c’est que le massacre de Zhanaozen n’était pas une conséquence d’une riposte légitime de la police face à du hooliganisme ou à des émeutes, il s’agissait bel et bien d’une attaque prédéterminées contre les grévistes du pétrole. C’était une nouvelle tentative de briser leur grève. Plusieurs vidéos démontrent que la place, juste avant l’attaque de la police, n’était occupée que par des manifestants pacifiques, sans armes, et que la police ainsi que les soldats, en marche vers la place, tiraient sur la foule de loin. Dans une vidéo particulièrement pénible à regarder – certaines scènes rappelant celles des journées de juillet 1917 à Petrograd (quand l’armée a tiré sur les manifestants et en a tué des centaines sur la perspective Nevsky) – on eut voir les manifestants fuir à travers la place alors qu’on leur tire dans le dos et que les blessés à terre sont brutalement frappés par les voyous aux ordres du régime.

    Ces films sont tellement révélateurs que même le Procureur général du Kazakhstan a été forcé de réagir. Le 27 décembre, il a annoncé qu’une enquête criminelle était lancée au sujet des "décès causés par la police à la suite d’un ordre de tirer pour tuer.’’ Nous n’avons bien entendu aucune confiance envers les possibilités que cette enquête soit honnêtement et sérieusement menée jusqu’à son terme, mais il est plus que révélateur que la responsabilité des agents de police dans ces meurtres soit reconnue d’une certaine manière. Ceci dit, tandis que ces policiers sont menacés de 5 à 10 ans de prison, l’avocate des grévistes du pétrole, Natalia Sokolova, dont le seul tort est d’avoir honnêtement défendu la cause des grévistes, a déjà été condamné à 6 ans de prison.

    Une autre confirmation qu’un ordre de tirer pour tuer a été lancé provient du ministre de l’Intérieur du Kazakhstan, rien de moins, K. Kazymov. Dans une interview réalisée le 16 décembre, il a admis qu’il avait donné l’ordre d’ouvrir le feu sur la foule. Il a essayé de justifier cet ordre en prétendant que les manifestants "étaient armés d’armes automatiques, et nous aussi". Il a confirmé que la police continuerait de tirer des citoyens kazakhs si cela était ‘‘nécessaire’’. Son interview a été publiée sur internet, accompagnée de vidéos montrant la foule courir dans tous les sens face à la police qui tire très visiblement dans le dos de manifestants désarmés et paniqués.

    Nazarbayev dénonce les ‘influences étrangères’ et les ‘criminels’

    A la lumière de tout cela, les déclarations du dictateur Noursoultan Nazarbayev selon lesquelles les troubles auraient été causés par des ‘‘groupes organisés de criminels en liaison avec des forces étrangères’’ sont particulièrement cyniques.

    Pour une bonne partie de la population du Kazakhstan, le plus grand groupe criminel organisé du pays est celui du clan Nazarbayev lui-même, protégé par un bataillon de soldats formé et équipé par les Etats-Unis. Les diverses photos font toujours apparaître des voitures blindées de confection américaines aux postes de contrôle d’Aktau et de Zhanaozen.

    Mais les déclarations de M. Nazarbayev ne sont destinées qu’à détourner l’attention du rôle de la police, du ministre de l’Intérieur, des troupes spéciales et de ceux qui, au sein du cercle présidentiel, ont planifié ce massacre. C’est pour cela qu’il blâme des personnages du régime tels que Mukhtar Ablazov, Rakhat Aliyev et Bulat Abilov.

    Ces oligarques, tous d’anciens membres de la clique dirigeante, vont sans aucun doute tenter d’exploiter l’opposition qui se développe face au régime actuel pour se construire un certain soutien public afin de défendre leurs propres politiques pro-capitalistes. Mais les divers clans sont tous résolument opposés à l’idée que les travailleurs du pétrole puissent avoir leurs propres syndicats indépendants et leur propre parti politique, pour les travailleurs et sous leur contrôle exclusif.

    Les grévistes du pétrole étaient pacifiques et disciplinés

    L’idée selon laquelle les grévistes du pétrole auraient pu être dirigés, contrôlés et manipulés par une quelconque force secrète de l’extérieur est une véritable insulte à leur détermination ainsi qu’à leur discipline. La décision d’organiser la manifestation pacifique du 16 décembre a été prise ouvertement et collectivement, lors d’un meeting de masse sur cette place. Cette décision a ensuite été publiquement annoncée et les travailleurs du pétrole ont eux-mêmes été prévenir les autorités qu’ils avaient l’intention d’organiser une telle manifestation en avertissant qu’il y avait des risques que des provocations soient organisées par des sections des forces spéciales.

    La manière très publique dont les choses ont été organisées a permis à la campagne ‘‘Campaign Kazakhstan’’ et aux sections du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) de planifier une série d’actions de solidarité et de protestation devant les ambassades du Kazakhstan et les sièges d’entreprises aux intérêts commerciaux liés au régime kazakh dans un certain nombre de pays ce jour-là (notamment en Belgique). Le caractère de solidarité a bien entendu largement cédé la place à celui de la protestation lorsque les nouvelles de ce bain de sang sont parvenues aux manifestants devant les ambassades.

    La semaine qui a suivi le massacre, diverses manifestations ont été organisées à travers l’Europe, y compris à Londres, Bruxelles, Vienne, Berlin, Moscou, Stockholm, Dublin, Athènes et ailleurs également, comme à New York, Hong Kong et Tel Aviv. Le député européen Paul Murphy (élu de la section du CIO en République irlandaise, le Socialist Party) a à la rupture de tous pourparlers entre l’Union Européenne et le gouvernement du Kazakhstan, et a aussi écrit une lettre de protestation signée par plus de 40 eurodéputés. Des communiqués de presse ont été émis dans un certain nombre de pays (lire notamment Massacre au Kazakhstan: Quand l’agence Belga se fait complice du régime) et de conférences de presse ont été organisées à Moscou et à Almaty. [Vous pouvez accéder à différents rapports des protestations sur le site socialistworld.net].

    Rompre le blocage de la presse

    La politique de l’Union Européenne, de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et des Etats-Unis est directement dictée par les intérêts de ces institutions pour l’exploitation du pétrole et du gaz kazakhs. Elles ont tout d’abord ignoré ou réagi de façon bien équivoque face aux nouvelles du massacre. Dans une certaine mesure, cela s’est reflété dans la politique éditoriale d’une grande partie des médias du monde entier. Les premières heures après le massacre, par exemple, des reporters internationaux basés à Moscou ont refusé de relayé les rapports du bain de sang sans ‘‘confirmation indépendante’’ tout en relayant par contre les déclarations officielles du régime. United Press International, par exemple, a qualifié les grévistes du pétrole de ‘‘voyous’’ à trois reprises dans un article de 150 mots seulement.

    La campagne menée par le CIO et Campaign Kazakhstan a aidé à vaincre les tentatives du régime de dissimuler l’ampleur du massacre. Finalement, le poids écrasant cumulé des témoignages, vidéos et rapports de journalistes ont eu raison de cette attitude complice, et les rapports dans les médias ont commencé à être plus équilibrés.

    ‘‘An injury to one is an injury to all’’ – Ce qui en touche un nous touche tous

    Tout aussi rapidement, des syndicalistes ont réagi face à la crise, mais de façon bien différente. A Anvers, par exemple, la délégation de TOTAL a relayé les rapports en direct du CIO sur le site de leur délégation, de sorte que les travailleurs pouvaient voir par eux-mêmes l’étendue de l’horreur des événements. Bien que le site du CIO au Kazakhstan a immédiatement été bloqué par le régime après la fusillade, le site russe du CIO a continuer à fonctionner, jusqu’à ce qu’arrivent des problèmes dus aux trop grand nombre de visiteurs sur le site, dont de nombreux journalistes de médias du monde entier.

    En Suède, Gruvtolvan, le syndicat de l’industrie minière de Kiruna, a condamné sans équivoque "la violence contre les travailleurs (…) suite à l’attaque de la police et des militaires contre une manifestation dans la ville de Zhanaozen." Ils ont appelé le mouvement syndical suédois à activement soutenir les travailleurs du pétrole du Kazakhstan sous la devise "Une victoire pour les travailleurs, où qu’ils soient, est une victoire pour tous les travailleurs, partout!" Cet appel a été accompagné d’une importante donation pour les grévistes.

    Si une véritable organisation syndicale nationale indépendante existait au Kazakhstan, il y aurait immédiatement eu après le 16 décembre convocation de meetings, d’actions de protestations et de grèves dans tout le pays en riposte au massacre de Zhanaozen.

    Une commission indépendante internationale doit enquêter

    Malheureusement, alors que des militants syndicaux ont réagi partout à travers le monde, certains membres de la bureaucratie syndicale internationale ont adopté l’approche de renvoyer chacun dos à dos. Ainsi, la Confédération syndicale internationale (CSI) a publié une déclaration le 16 décembre, signée Sharan Burrow, secrétaire général, qui déclare : "une situation extrême de tension et de désespoir a provoqué des troubles, la panique et le chaos. La violence doit immédiatement cesser, et toutes les parties doivent reconnaître que la seule façon de résoudre des conflits est le dialogue ouvert et la négociation. Le gouvernement doit immédiatement agir pour commencer ce processus."

    Cette déclaration ignore donc la responsabilité du régime dans ce massacre, une attitude partagée par de nombreuses autres organisations, telles que Human Rights Watch, qui a publié une déclaration le 22 décembre. Dans celle-ci sont détaillés plusieurs cas de graves tortures du fait des forces gouvernementales à Zhanaozen et, ensuite, l’organisation tire la conclusion incroyable que ‘‘les autorités du Kazakhstan doivent mener immédiatement une enquête.’’ Cela n’aboutirait qu’à une enquête ignorant totalement la responsabilité écrasante du ministère de l’Intérieur et qui, dans le meilleur des cas, trouverait quelques boucs émissaires afin de laissait un peu de colère s’échapper.

    Le CIO estime qu’il est nécessaire d’organiser une commission d’enquête internationale, totalement indépendante du gouvernement, des structures étatiques et des intérêts pétroliers et gaziers, afin de faire toute la lumière sur les causes réelles du massacre et sur les véritables responsables de ces horribles évènements.

    La “gauche” et les bureaucrates syndicaux poignardent les grévistes dans le dos

    Mais si la Confédération Syndicale Internationale n’a pas ouvertement condamné le régime de Nazarbayev, elle n’a au moins pas directement attaqué les travailleurs du pétrole. De la façon la plus incroyable qui soit, les 17 et 18 décembre, des déclarations sont apparues sur des sites internet de langue russe contrôlés par des syndicats et des groupes de gauche qui, tout en condamnant la violence, se sont lancés dans des attaques contre les grévistes du pétrole, contre leurs revendications et leurs tactiques, répétant d’ailleurs bien souvent l’argumentation des patrons et du gouvernement.

    Le Mouvement Socialiste Russe [section russe du Secrétariat Unifié de la Quatrième Internationale, à laquelle est reliée la LCR belge, n’ayant aucun rapport avec le Mouvement Socialiste du Kazakhstan] a contribué à détourner l’attention de la responsabilité du gouvernement Nazarbayev pour ce massacre en répétant grossièrement les mensonges du régime concernant l’implication de l’oligarque Mukhtar Ablyazov. Ce faisant, ils réduisent le rôle de l’autodiscipline et de la conscience politique des travailleurs du pétrole en les réduisant à l’état de simples pions joués par les oligarques kazakhs et en donnant du crédit aux déclarations du dictateur qui blâme les influences étrangères (Ablyazov vit à Londres) pour tous les problèmes rencontrés au Kazakhstan.

    Les attaques les plus importantes proviennent toutefois de l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation (UITA) et de la Confédération du travail de Russie. Même avant les événements du 16 décembre, d’anciens fonctionnaires de l’Union Internationale des travailleurs de l’alimentation à Genève et à Moscou ont travaillé à saper le soutien à la grève. Des pressions ont ainsi été exercées sur Alexei Etmanov, le syndicaliste indépendant le plus connu en Russie, ce qui l’a conduit à revenir sur sa promesse d’organiser des actions de solidarité avec les travailleurs du pétrole par l’intermédiaire du syndicat des travailleurs de l’automobile.

    Le prétexte donné ensuite à ce désistement était que les travailleurs du pétrole avaient été manipulés par des représentants de la ‘‘gauche révolutionnaire’’ – c’est-à-dire par le Comité pour une Internationale Ouvrière. Cela a d’ailleurs été confirmé dans une déclaration de l’UITA le 9 décembre 2011 qui disait: ‘‘Avec pourtant un énorme potentiel d’organisation, dans tout ce temps, les grévistes n’ont jamais mis en place leur propre organisation, tout comme avant ils ne disposent pas de leurs propres représentants et direction élus, avec le droit de représenter les travailleurs dans les négociations avec la direction de la société et les autorités. Cela signifiait que, dès le début, différents groupes politiques ont été en mesure d’utiliser l’énergie sociale et le potentiel du mouvement ouvrier de masse dans leurs propres intérêts. S’exprimant au nom des travailleurs et réécrivant constamment les revendications des travailleurs, ils ont apporté d’énormes préjudices au mouvement, ont fait sortir le conflit du champ de la lutte syndicale et ont réduit au minimum les chances de succès, privant ainsi les habitants de Zhanaozen de leur grève.’’

    Cette déclaration fait écho aux arguments des patrons et du gouvernement et est particulièrement honteuse étant donné que les travailleurs, dès le début, ont élu leurs représentants pour les négociations, ces représentants rencontrant ensuite une répression sévère. Nous avons déjà dit que Natalia Sokolova, l’avocate des grévistes, a été condamnée à 6 ans de prison, Akzhanat Aminov a reçu une peine de deux ans avec sursis, tandis qu’un troisième a vu sa maison brûler !

    Les grévistes du pétrole luttaient pour le droit d’instaurer leurs propres syndicats indépendants

    Il convient de rappeler que la grève de la faim des travailleurs du pétrole a commencé en mai dernier après que les membres du syndicat de Karazhanbasmunai, à Aktau, ont exigé le retour de documents syndicaux de leur ancien président après qu’il ait été démis de ses fonctions par le vote des membres du syndicat. L’ancien leader syndical avait collaboré avec la direction de l’entreprise pour éviter toute véritable négociation portant sur les salaires et les conditions de travail. Il avait été jusqu’à envoyer des gros-bras armés pour qu’ils battent ses adversaires. En Juin, l’UITA avait envoyé toute une série de questions bureaucratiques aux grévistes, dont les réponses ont nécessité 60 pages de documents. Le résultat final a été de déclarer que les travailleurs avaient eu tort de démettre leur ancien dirigeant syndical, comme ils ne pouvaient changer de président qu’une fois tous les 5 ans !

    L’affirmation selon laquelle le CIO a constamment "réécrit" les revendications des travailleurs est absolument ridicule, comme toutes les autres calomnies visant à salir les grévistes. Depuis le début de la grève, le CIO a publié sur ses sites toutes les déclarations produites par les grévistes. Le 1er Juin 2011, après que la police anti-émeute ait attaqué les grévistes de la faim de Zhanaozen, le comité de grève de Zhanaozen avait publié les revendications suivantes:

    • La démission de la direction de la société “KazMunaiGaz” à Aktau;
    • La restauration du statut autonome de la société “OzenMunaiGaz”;
    • L’augmentation de 60% des salaires des médecins et des enseignants de la ville pour compenser la dureté de leur travail dans des conditions écologiques difficiles;
    • Le retour sous statut public, c’est-à-dire la nationalization, des enterprises regroupées dans la société “OzenMunaiGaz” – en particulier TOO “Burylai”, TOO “KazGPZ”, TOO “Kruz”, TOO “Zhondei”.

    En Juillet, des incendies criminels ont eu lieu contre des maisons de militants grévistes, et Zhaksylyk Turbayev a été assassiné quand il est devenu clair qu’il serait élu à la présidence du nouveau syndicat. L’avocate Natalia Sokolova et le militant syndical Akzhanat Aminov ont été arrêtés et ont été confrontés à de graves accusations. Des milliers de grévistes ont été licenciés. Lors de leur rencontre avec le député européen Paul Murphy en juillet dernier, les travailleurs ont défini leurs revendications de la façon suivante:

    • La reconnaissance des droits des travailleurs, notamment leur droit d’élire leurs propres représentants, sans interférence de qui que ce soit ;
    • La libération immédiate de Natalia Sokolova et de Akzhanat Aminov;
    • Le réengagement de tous les travailleurs licenciés aux conditions qui prévalaient avant leur licenciement;
    • L’abandon de toutes les poursuites judiciaires contre les grévistes;
    • Le commencement de véritables négociations avec les représentants élus des travailleurs.

    Les bureaucrates syndicaux soutiennent les briseurs de grève et les éléments diviseurs dans le syndicat

    En réalité, l’UITA et ses ‘‘organisation fraternelle’’ en Russie (KTR) et au Kazakhstan (la ‘‘Confédération des syndicats libres du Kazakhstan’’, CFTUK) tentent depuis le début de faire dévier la grève. Au Kazakhstan, le CFTUK dirigé par Sergei Belkin a depuis longtemps cessé d’exister en tant qu’authentique organisation syndicale. En 2009, Belkin a signé un accord avec le gouvernement destiné à stopper toutes les grèves, les protestations et les manifestations de travailleurs afin de permettre au régime de "maintenir la stabilité’’. En novembre dernier, quand le gouvernement a annoncé qu’il était temps de mener des ‘‘négociations’’ à Zhanaozen, Belkin, totalement absent depuis le début du conflit, est soudain arrivé comme ‘‘expert indépendant’’ pour aider le gouvernement et ses tentatives de briser la grève. La tactique du régime était alors d’essayer par tous les moyens de diviser les grévistes en offrant à certains d’entre eux des emplois dans une nouvelle société, tout en encourageant Belkin pour qu’il mette en place un nouveau syndicat anti-grève dans le cadre de la Confédération syndicale CFTK. Les grévistes, cependant, ont rejeté ces tactiques, insistant pour que tous les travailleurs sans exceptions soient être réintégrés dans leur ancien emploi.

    Hypocritement, l’UITA et le KTR, après avoir soutenu les activités visant à briser la grève et le syndicat anti-grève de Belkin, ont donné des conseils aux travailleurs en leur disant qu’ils devraient : ‘‘décider de suivre le chemin de la construction de leur propre syndicat indépendant, qui peut décider d’une stratégie d’action et proposer leurs revendications à tous niveaux, en s’assurant qu’ils obtiennent, ainsi que leurs familles, les moyens nécessaires pour se défendre et pour mobiliser un soutien international.’’

    Il faut construire de véritables syndicats indépendants

    Depuis le début de la grève, le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) a entièrement pris ses responsabilités en soutenant, non seulement en paroles mais aussi en actes, l’appel diffusé à Zhanaozen et à Aktau sous la signature de milliers de travailleurs en novembre (soit avant les ‘‘conseils’’ de l’UITA. Dans cet appel, ils expliquent que : ‘‘notre combat démontre que vaincre l’injustice et l’arbitraire ne peut se faire qu’en unissant nos forces. Dans cette situation difficile et compliquée, le meilleur soutien et moyen d’action sera de créer une organisation syndicale indépendante et de développer des revendications capables d’unir, comme l’augmentation des salaires, l’amélioration des conditions de vie et de travail et la non-ingérence de l’employeur dans le travail du syndicat. En faisant ce travail d’unification des travailleurs, ce syndicat deviendra une solide fondation pour la création d’un syndicat national indépendant au Kazakhstan.’’

    Le CIO estime que si les syndicats tels que l’UITA et le KTR soutiennent véritablement les travailleurs du pétrole, ils devraient alors publiquement retirer tout leur soutien à la Confédération syndicale kazakh CFTK et donner un soutien pratique et moral à ceux qui tentent de construire un authentique syndicat indépendant dans ces circonstances extrêmement difficiles. Mais même si l’UITA et le KTR refusent d’agir de la sorte, le CIO va continuer à soutenir les grévistes et à les aider.

    Le 17 décembre, le Président du KTR, Boris Kravtchenko, a clairement tenté de blâmer le CIO pour les événements de Zhanaozen: ‘‘Nous croyons que la responsabilité de ces événement et du sang versé par les travailleurs du pétrole incombe entièrement aux dirigeants de la République du Kazakhstan. Cependant, cette responsabilité est partagée par les spéculateurs politiques, auto-désigné ‘‘comité’’ et ‘‘internationale’’, qui utilisent la protestation sociale pour leurs propres intérêts, pour réécrire les revendications des manifestants en transformant politiquement celles-ci et qui, par leurs actions provocatrices, poussent les autorités à utiliser des moyens violents.’’

    Ce que Boris Kravtchenko pense exactement du CIO n’est pas très clair. Nous avons soutenu la grève depuis sa création. Nous avons défendu que les employeurs éliminent tous les obstacles pour que des négociations sérieuses puissent commencer. Nous avons soutenu que ces négociations devraient être dirigées de façon transparente par des représentants élus des grévistes. Dès le début, nous avons été engagés dans la construction de la solidarité avec les grévistes et avons aidé à briser le blocus médiatique. Nous avons discuté avec les grévistes de leur intention d’organiser une manifestation pacifique le 16 décembre et avons convenu d’organiser une campagne internationale de solidarité autour de cet évènement.

    Les staliniens surpassent les bureaucrates syndicaux

    Une attaque encore plus vicieuse contre les travailleurs du pétrole a été lancée par le Parti communiste d’Ukraine, qui était resté silencieux sur cette question jusqu’au 4 janvier. Ce parti a finalement brisé son silence dans un article qui accuse Natalia Sokolova d’être un agent du département d’Etat américain et les travailleurs du pétrole d’être responsables de "la tentative des Etats-Unis pour déstabiliser la situation politico-économique." Ils ont continué en disant: ‘‘Les autorités du Kazakhstan ont agi durement, courageusement et de manière adéquate. Ils ont réagi fermement en instaurant l’Etat d’urgence et la police anti-émeute n’y a pas été de main morte contre les combattants bien armés qui se trouvaient derrière les travailleurs du pétrole. Ils ont montré leur courage quand le président, M. Nazarbayev, a visité la ville de Zhanaozen et a personnellement parlé aux habitants. Leur réponse a été adéquate, en agissant avec fermeté et en expliquant à ces messieurs de l’Union Européenne que ce qui se passe à Zhanaozen est une affaire interne au Kazakhstan."

    La “gauche” attaque les grévistes qui revendiquent la nationalisation

    Le 18 décembre, le site internet de gauche "RabKor" publiait un article d’Aleksei Simoyanov de l’Institut de la Mondialisation, à Moscou. Après presque sept mois de silence et à seulement 2 jours du massacre, l’auteur avait décidé de rejoindre le flot des attaques contre les travailleurs du pétrole : "Il est impossible de ne pas parler d’un certain nombre d’erreurs tactiques effectuées par les manifestants au cours de leur campagne. Aussi longtemps que les principaux slogans des manifestants étaient favorables à des meilleurs salaires, au respect des droits des travailleurs et luttaient contre la dégradation des conditions de travail, ils étaient dans une position forte. Dans les limites d’un conflit entre travailleurs et patron, les autorités avaient les mains liées, et toute pression de leur part aurait été purement illégitime. Le problème s’est compliqué quand, sous l’influence du CIO, les travailleurs ont également défendu des revendications politiques, y compris la nationalisation de la compagnie."

    Pourtant, comme cela peut être vérifié avec l’évolution des revendications des grévistes, les travailleurs du pétrole ont défendu la nationalisation de leur entreprise dès le début du litige. Ils n’ont pas eu besoin du CIO pour savoir que tant que ces entreprises restaient aux mains de capitaux privés liés au régime et aux multinationales étrangères, il n’était pas possible d’obtenir un salaire raisonnable. Le seul changement qui a été opéré avec cette revendication au cours de la grève, c’est de généraliser la revendication de la propriété publique à tout le secteur pétrolier, sous le contrôle des travailleurs. Les travailleurs du Kazakhstan ne sont d’ailleurs pas les seuls à tirer ces conclusions. En décembre, par exemple, des dizaines de milliers de syndicalistes ont défilé à Liège, en Belgique, pour exiger la nationalisation du site liégeois d’ArcelorMittal.

    Toutes les grèves sont politiques dans une certaine mesure

    Simoyanov ne fait avec son texte que démontrer sa profonde incompréhension de cette grève. La direction de l’entreprise a refusé de négocier non pas parce que les ouvriers ont soulevé la revendication de la nationalisation, mais parce qu’ils n’étaient pas prêts à mieux payer les travailleurs. La logique de son article est que les travailleurs devraient restreindre leurs luttes à des questions purement économiques et que s’ils vont plus loin, toute la pression contre eux devient ‘‘légitime’’. Suivant cette logique, les syndicats ne devraient pas exiger le limogeage des responsables antisyndicaux ou faire grève afin de faire tomber des régimes autoritaires. Suivant cette logique encore, les syndicalistes d’Europe, de Grèce, du Portugal, d’Italie et d’ailleurs qui sont en lutte par millions contre les politiques d’austérité de leurs gouvernements ne devraient pas exiger la chute de ces gouvernements ? Simoyanov pensent-il aussi que cette revendication est ‘‘illégitime’’ ?

    L’ironie est que ces critiques, en se précipitant contre les grévistes du pétrole, ont oublié de s’en prendre à la direction de l’entreprise, et finissent même au final à la droite du président Nazarbayev qui, à Aktau, a déclaré après le massacre que : ‘‘Le gouvernement, ainsi que le fonds Samruk Kazyna et la société KazMunaiGas, ont échoué à mettre en œuvre mes instructions sur la résolution rapide de ce conflit. Malheureusement, ils se sont montrés incapables de résoudre le problème."

    La caractéristique des critiques de ‘‘gauche’’ des grévistes est la manière dont ils ferment les yeux sur les bureaucrates syndicaux qui collaborent avec les régimes autoritaires ! Boris Kravtchenko est un membre du conseil consultatif du président russe Medvedev, Alexeï Etmanov est un candidat de la liste pro-Kremlin "Russie juste" et Sergei Belkin a signé une entente pour éliminer les grèves avec le régime de Nazarbayev. Ils sont en colère non pas parce que les travailleurs du pétrole ont adopté des revendications politiques – ils ne les critiqueraient pas s’ils rejoignaient le parti présidentiel. Les critiques n’arrivent que lorsque les travailleurs du pétrole déclarent qu’ils ne vont plus soutenir le parti présidentiel et lancent un appel au boycott total des élections législatives de janvier. Plutôt que de rester derrière l’un ou l’autre parti politique pro-régime et leurs conseillers dans les syndicats, les travailleurs du pétrole ont appelé à la création de leur propre, démocratique et indépendant parti des travailleurs, un instrument politique capable de représenter leurs intérêts sans devoir subir l’influence des oligarques.

    Le 16 décembre – début de la fin pour Nazarbayev

    Les événements du 16 décembre 2011 marquent un tournant dans le développement des luttes ouvrières à travers l’ancienne Union soviétique (la CEI, Communauté des Etats Indépendants). Après sept mois de lutte acharnée, les travailleurs du pétrole ont appris de nombreuses leçons. Ils ont démontré qu’ils étaient capables d’adopter une attitude pacifique et disciplinée et de rejeter les provocations destinées à les conduire à la violence. Ils sont allés plus loin que de simples exigences salariales face à un patron qui n’a aucune envie de payer plus, et ont défendu que l’entreprise devait être nationalisée, sous contrôle ouvrier, de sorte que les richesses du pays puissent être utilisées pour le peuple, plutôt que d’enrichir les oligarques et la famille présidentielle. Ils ont démontré qu’ils peuvent unir autour d’eux tous les pauvres et les exploités de la région en défendant de meilleurs salaires pour ceux qui travaillent qui travaillent dans le secteur public. Ils ont appris qu’il y a beaucoup de ‘‘dirigeants’’ et de ‘‘politiciens’’ qui inondent leurs oreilles de promesses d’amitié éternelle en échange de leurs votes, mais qui désertent aux premiers besoins. Ils ont vu que les seuls amis qu’ils ont vraiment, ce sont les travailleurs d’autres villes et d’autres pays, les seuls à avoir exprimé une véritable solidarité.

    Même après les horribles attentats de la police et de l’armée le 16 décembre 2011, et les nombreux morts, blessés et emprisonnés, les travailleurs du pétrole ont préservé leur dignité et leur discipline. Ils continuent à faire appel aux autres travailleurs pour qu’ils s’organisent en une seule fédération syndicale nationale et indépendante et pour construire un parti des travailleurs. Le Comité pour une Internationale Ouvrière et ses sections est fier de rester à leur côté, et de rester entièrement solidaire de leur combat.

  • Kazakhstan : Protestations internationales en solidarité avec les grévistes

    Hier, à l’occasion des commémorations consacrées aux 20 ans d’indépendance du Kazakhstan, différentes actions de protestations ont eu lieu à diverses ambassades à travers le monde. Au même moment, le régime réagissait des plus brutalement aux protestations des grévistes du pétrole à l’Ouest du pays. Au moins 70 personnes ont été assassinées par le régime, et plus de 500 personnes ont été blessées.

    Des actions de solidarité ont eu lieu dans plusieurs villes du monde, essentiellement en Europe : à Vienne, à Berlin, à Londres, à Dublin, à Stockholm, à Göteborg, à Boston (USA),… à l’initiative des différentes sections du Comité pour une Internationale Ouvrière. Nous avons publié hier le rapport et le reportage-photos de l’action tenue devant l’ambassade du Kazakhstan en Belgique ainsi que notre communiqué de presse.

    Protestations à Londres

    Des partisans des grévistes kazakhs, dont des membres de la section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et Pays de Galles, le Socialist Party, se sont rendus à l’ambassade du Kazakhstan à Londres. D’autres actions sont encore à venir pour renforcer le soutien international à la cause des travailleurs et des pauvres du Kazakhstan.

    Berlin

    Le SAV (section du CIO en Allemagne) ont tenu un piquet devant l’ambassade du Kazakhstan et ont remis une lettre de protestation, notamment signée par trois parlementaires de Die Linke (parti de gauche large dans lequel sont impliqués nos camarades). Deux autres lettres ont été remises, de la part du SAV en tant que tel et de notre conseillère communale à Rostock, Christine Lehnert. L’ambassadeur a reçu les lettres, mais a appelé la police… D’autres actions de protestation sont prévues dans le centre de Berlin.

    Autriche

    Deux actions de protestation ont eu lieu hier, devant le Consulat du Kazakhstan à Graz et au Consulat honoraire de Viennes.

    Pour en savoir plus


    Actions de solidarité

    Belgique : la dictature kazakhe également à l’œuvre à Bruxelles ?

    De pacifiques supporters qui voulaient soutenir les travailleurs du pétrole au Kazakhstan et dénoncer la répression à l’œuvre dans ce pays au régime dictatorial ont implacablement été arrêtés lors du match de ce vendredi 7 octobre entre les Diables Rouges et l’équipe du Kazakhstan. Le pouvoir dictatorial du Président Nazarbayev s’étend apparemment jusqu’à Bruxelles…


  • Insurrection de masse à Jañaözen !

    Aujourd’hui, plus de 3.000 personnes se sont rassemblées pour une manifestation pacifique sur la grand’place de la ville de Jañaözen, à l’Ouest du Kazakhstan. On supposait que les travailleurs du pétrole en grève et les simples citoyens qui les soutiennent allaient pouvoir exprimer leur protestation pacifique face aux autorités du Kazakhstan. Il n’en a rien été. Actuellement, il y a au moins eu 70 morts et 500 blessés suite à la répression sanglante du régime.

    Texte traduit du site de nos camarades de Socialist Resistance (CIO-Kazakhstan)

    Alors que l’action battait son plein, un fourgon de police a foncé à toute allure dans la foule. La patience des manifestants, déjà mise à l’épreuve, a alors volé en éclats. La population, furieuse, a retourné le fourgon, a brulé les autobus de la police et le sapin de Noël qui avait été installé sur la place afin de commémorer l’indépendance du pays.

    [box type=”shadow” align=”alignright” width=”100″]
    Pour en savoir plus


    Actions de solidarité

    Belgique : la dictature kazakhe également à l’œuvre à Bruxelles ?

    De pacifiques supporters qui voulaient soutenir les travailleurs du pétrole au Kazakhstan et dénoncer la répression à l’œuvre dans ce pays au régime dictatorial ont implacablement été arrêtés lors du match de ce vendredi 7 octobre entre les Diables Rouges et l’équipe du Kazakhstan. Le pouvoir dictatorial du Président Nazarbayev s’étend apparemment jusqu’à Bruxelles…


    [/box]

    À un moment donné, les policiers se sont enfuis. Mais à présent, des troupes se concentrent dans la ville (depuis la rédaction de cet article, on parle de la présence de tanks et d’au moins 1500 soldats dans la ville, NDLR). Les habitants déclarent que si la force devait être employée contre les grévistes, alors toute la ville sortira dans les rues (actuellement, des actions de protestation sont prévues dans tout le pays pour ce samedi, NDLR). Vers le lieu de l’action continuent d’arriver de nouvelles personnes.

    Ces événements se produisent alors même qu’aujourd’hui, dans plusieurs villes du monde (essentiellement en Europe : Vienne, Berlin, Bruxelles, Londres, Dublin, Stockholm, Göteborg, mais aussi à Boston aux États-Unis, et sans doute aussi ailleurs), sont organisées des actions de solidarité par les différentes sections du Comité pour une Internationale Ouvrière (dont le PSL est la section belge, NDLR). Ainsi, aux portes de diverses ambassades du Kazakhstan, des militants protesteront contre le traitement scandaleux des travailleurs du pétrole en grève depuis des mois.

    Une action sera également menée devant le bureau du Parti Travailliste à Londres, afin de dénoncer le rôle de conseiller qu’a accepté Tony Blair auprès du dictateur kazakh, Nursultan Nazarbayev. À Moscou, les autorités ne nous ont malheureusement pas autorisés à manifester avant la semaine prochaine. Le 15 décembre, au Parlement européen, notre député européen Paul Murphy (élu de la section du CIO en République irlandaise, le Socialist Party) est intervenu pour annoncer le lancement d’une grande campagne de solidarité avec les travailleurs du pétrole kazakhs, au moment même où le régime célèbre les 20 ans de l’indépendance du pays.

    Cela fait sept mois, jour et nuit, dans la neige hivernale comme sous la chaleur estivale, que les travailleurs du pétrole occupent la place Intimak dans le centre de Jañaözen. Ces simples citoyens demandent du pouvoir la considération et le respect des efforts des travailleurs, le respect des efforts de vos frères et sœurs, le respect des efforts de nos pères et mères.

    Cela fait sept mois, que personne de l’Ak-Orda (la ‘‘Maison Blanche’’ kazakhe) – ni président, ni ministre, pas même un seul député du Majilis (le Parlement) n’est venu négocier avec eux ! Ils ne veulent pas entendre ni voir ni résoudre les problèmes du peuple !

    Cela fait sept mois que les travailleurs du pétrole sont soutenus par le mouvement ouvrier et par les syndicats indépendants du monde entier ! Ils sont soutenus par de simples ouvriers, métallurgistes, mineurs, infirmiers, enseignants, de tout le Kazakhstan ! Les travailleurs sont soutenus par des députés du Parlement européen. La lutte de nos ouvriers est suivie par le monde entier ! La lutte des travailleurs se répand au monde entier !

    Les revendications des travailleurs sont légitimes et ont un caractère pacifique. Nous comprenons fort bien que de cette lutte dépend le destin de nos enfants et par conséquent le destin de tous les travailleurs du Kazakhstan ! Nous comprenons que de simples gens : des enseignants, des médecins et infirmiers, des ouvriers, des chauffeurs et de simples agents de police veulent vivre en tant qu’êtres humains et sont obligés de soutenir la lutte des travailleurs du pétrole. Nos enfants doivent avoir un enseignement supérieur, des jardins d’enfants, des soins de santé, tous gratuits et accessibles à tous. Tous doivent avoir accès à des logements à prix abordable ! Et pour cela, dans notre pays, il y a toutes ces richesses qui, selon la Constitution, appartiennent au peuple et non aux investisseurs-pillards et aux bureaucrates qui ne font que manger !

    Frères et sœurs ! Venez avec nous, pour que tous ensemble, nous nous attelions à la construction d’une vie meilleure dès aujourd’hui, et pas demain, comme on nous le promet sans arrêt à la télévision !

    Les travailleurs du pétrole en grève ont fait énormément de sacrifices, mais ils n’ont pu les faire et tenir jusqu’ici que grâce à l’aide de simples citoyens comme vous et nous, et non du gouvernement. Allons tous ensemble soutenir les travailleurs et leurs revendications :

    • Libération de Natalia Sokolovaïa, l’avocate des travailleurs ; reconnaissance par les autorités de la grève et du lock-out qui a suivi ; réintégration de tous les travailleurs licenciés, sans exception ; suppression de tous les chefs d’accusation contre les travailleurs et les militants du syndicat.
    • Amélioration des conditions de vie et de travail, hausse des salaires, des pensions et mise en application des coefficients sectoriels et de productivité pas seulement pour les travailleurs du pétrole, mais pour tous les travailleurs de la province de Mañstau, sans exception.
    • Enquête indépendante et révocation de tous les fonctionnaires et employeurs dont les actions ont amené à l’attisement du dissentiment social, au déchainement, aux humiliations, aux persécutions judiciaires, aux tabassages et aux meurtres bestiaux de travailleurs et de membres de leur famille par des nervis.
    • Nationalisation (restitution au peuple, en propriété étatique sous contrôle des travailleurs) des entreprises du secteur de l’extraction.
    • Formation de syndicats indépendants et création de notre propre parti politique, qui nous défende nous, et pas les millionnaires et les patrons !

    Le 16 décembre 1986, nos frères et sœurs qui étaient descendus sur les places et dans les rues d’Almaty ont obtenu l’indépendance pour nous tous. Mais les autorités ont volé sa liberté au peuple et se sont emparées de toutes nos richesses, se sont emparés de nos gisements, de nos usines et de notre production, se sont emparés du travail de nombreuses générations de nos pères et de nos grand-pères. Ça fait 20 ans que les autorités mentent en nous promettant une vie meilleure, mais ne font que continuer à nous voler et voler ! Et que ferons-nous lorsque s’épuiseront les gisements de pétrole et autres ? Est-ce pour cela que nos ancêtres ont versé leur sang afin de nous transmettre ces richesses ?

    Tous ensemble nous devons faire le choix :

    Avons-nous besoin d’un gouvernement si honteux, d’un gouvernement qui se moque du peuple ?

    Avons-nous besoin d’élections au Majilis alors qu’aucun député ne représente les travailleurs et le peuple ?

    Rejoignons les travailleurs du pétrole, arrêtons le travail, créons des syndicats, des comités de travailleurs et descendons sur la place Intimak !

    • Ensemble nous obtiendrons justice !
    • Ensemble nous deviendrons maitres de nos richesses et nous obtiendrons une vie meilleure pour nous et pour tous les habitants du Kazakhstan !
    • Ensemble nous rendrons au peuple sa liberté et à notre Patrie, son indépendance !
    • Ensemble nous obtiendrons le respect des efforts et un salaire décent pour notre travail !
    • Ensemble nous sommes une force invincible !

    Nous ne sommes pas des esclaves silencieux ! Assez enduré les humiliations et les supercheries !

  • 1er mai : fête des travailleurs ou lutte pour le socialisme ?

    Le premier mai, c’est la fête des travailleurs. Mais que peuvent donc bien aujourd’hui fêter les travailleurs ? La norme salariale de 0,3%? La cherté de la vie ? L’augmentation de la pauvreté et du nombre de travailleurs pauvres ? La destruction des services publics? Aujourd’hui plus que jamais, surtout à la lumière des brutales attaques antisociales qui tombent sur l’Europe et ailleurs, il faut renouer avec les traditions de lutte, et pas seulement de commémoration, de la fête du 1er mai.

    Par Nicolas Croes

    Aux sources du Premier mai Si l’origine du Premier Mai remonte aux Etats-Unis, la première journée d’arrêt total du travail pour revendiquer l’instauration des 8 heures de travail par jour est issue d’Australie. En 1856, une première journée y avait été organisée le 21 avril, et le succès de la mobilisation ouvrière fut tel que décision fut prise de l’organiser tous les ans. La révolutionnaire allemande Rosa Luxembourg commenta ainsi ces faits: ‘‘De fait, qu’est-ce qui pourrait donner aux travailleurs plus de courage et plus de confiance dans leurs propres forces qu’un blocage du travail massif qu’ils ont décidé eux-mêmes ? Qu’est-ce qui pourrait donner plus de courage aux esclaves éternels des usines et des ateliers que le rassemblement de leurs propres troupes ?’’ L’idée d’une fête des travailleurs, à la fois moment de lutte et rassemblement servant à illustrer la force potentielle du mouvement ouvrier, commença alors à faire son chemin. La date du Premier Mai fut choisie par les syndicats rassemblés dans l’American Federation of Labour (AFL) en 1886, là encore pour revendiquer la journée des huit heures, exigence qui allait devenir le socle sur lequel s’est construite la tradition du Premier Mai. D’ailleurs, avant le muguet, l’usage était de porter sur soi un triangle rouge symbolisant les trois ‘‘huit’’ – huit heures de travail, huit heures de loisir, huit heures de sommeil. Ce jour de mai 1886, quelque 340.000 ouvriers américains ont paralysé des milliers d’usines par leur action de grève. A certains endroits, la répression fut des plus féroces, et six grévistes laissèrent leur vie sous les coups de la police à Chicago, à la fabrique de faucheuses Mc Cormick.

    [box type=”shadow” align=”alignright” width=”100″]

    Préserver et défendre le Premier Mai

    L’évolution qu’a connu le 1er Mai à travers les années permet de retracer l’évolution du mouvement ouvrier luimême, y compris des coups qui lui ont été portés. Certains 1er Mai sont ainsi marqués d’une pierre noire. En Italie et en Allemagne, les fascistes, arrivés au pouvoir avec la bénédiction et le soutien de la grande bourgeoisie mais soucieux de garder la classe ouvrière sous leur contrôle, joueront habilement d’un anticapitalisme démagogique en organisant des manifestations grandioses et des parades obligatoires pour ce qu’ils rebaptisent ‘‘la journée nationale du travail’’.

    Aujourd’hui encore, le Front National français tente d’instrumentaliser la date du Premier Mai, et l’extrême-droite en Belgique tente aussi de le faire. Nous avons ainsi participé à une mobilisation en 2008 destinée à bloquer les néo-fascistes du groupuscule Nation qui voulaient faire un défilé de Premier mai à Charleroi.
    [/box]

    A l’exemple des travailleurs américains, les 400 délégués du congrès de fondation de la Deuxième Internationale (l’Internationale Socialiste, qui était encore fort loin de la caricature pro-capitaliste qu’elle est aujourd’hui devenue) décida en 1889 de mener campagne partout pour l’instauration des huit heures le 1er Mai, pas seulement en mots, mais avec grèves et manifestations. Cet appel a suscité un enthousiasme gigantesque qui a littéralement frappé d’effroi les différentes bourgeoisies nationales. A Vienne, à Paris et ailleurs, la bourgeoisie prépara ses régiments à intervenir, craignant un soulèvement imminent des travailleurs. En Belgique, des exercices de tirs spéciaux pour la garde civile ont été organisés ‘‘afin d’être prêts pour le 1er Mai’’ ! Face au succès incroyable de cette journée, la date est restée et, même lorsque la journée des huit heures a été obtenue de haute lutte dans toute une série de pays, la tradition est restée de manifester le Premier Mai en souvenir des luttes passées et le regard dirigé sur les luttes du moment ou à venir.

    Et aujourd’hui ?

    Le Premier Mai a toujours été très intimement lié à la classe ouvrière, et a reflété ses forces et ses faiblesses, ses périodes d’avancées comme celles de recul. Au fur-et-à-mesure, et particulièrement à la fin du vingtième siècle, les manifestations syndicales et les grèves du Premier Mai sont devenues des rassemblements souvent peu combatifs.

    Le Premier Mai est souvent l’occasion pour les sociaux-démocrates du PS, du SP.a et de leurs amis d’autres pays de se référer au socialisme, une fois par an, pour ensuite activement trahir cet idéal le reste de l’année. Pour nombre de bureaucrates syndicaux, c’est la journée où l’on glorifie de petites victoires, où mettre en évidence une attaque bloquée tout en évitant soigneusement d’expliquer pourquoi les autres sont passées. Mais, à travers le globe, la combativité et la volonté de lutte reviennent aujourd’hui, à des degrés divers il est vrai. Mais partout la colère cherche à s’organiser, partout de plus en plus de questions sont soulevées par les dégâts sociaux et environnementaux du capitalisme, partout se développe la recherche d’une alternative. Toutes les digues qui ont été érigées pour canaliser la colère des travailleurs, et notamment les directions syndicales, ne retiendront pas éternellement les flots du mécontentement ouvrier.

    Défendre le socialisme, 365 jours par an

    L’an dernier, dans les discours du premier mai, l’absence de toute réponse claire face à la crise était frappante. Comment défendre l’emploi, quelles revendications sont nécessaires et comment construire un rapport de force, toutes ces interrogations sont restées sans réponse. Les attaques contre les libéraux n’ont pas manqué, mais c’était surtout une manière pour les appareils syndicaux d’apporter un soutien au PS et au SP.a avant les élections anticipées. Pourtant, ces partis collaborent à la politique des différents gouvernements depuis des décennies ! En Irlande, au Portugal, en Espagne ou en Grèce, ce sont les partis sociaux-démocrates qui appliquent loyalement les diktats du Fonds Monétaire International (actuellement dirigé par un membre du PS français…) et frappent les populations de leurs plans d’austérité.

    Le meilleur programme anticrise à défendre aujourd’hui est un programme clairement socialiste, avec pour base les besoins et les nécessités de la majorité de la population. Créer de l’emploi, c’est possible, en répartissant le travail disponible par une réduction de la semaine de travail et la protection des prépensions. La nationalisation des secteurs- clé de l’économie – notamment du secteur financier ou celui de l’énergie – peut assurer que ce soient les spéculateurs qui se retrouvent au chômage et que ces secteurs-clé soient mis au service de la majorité de la population. Voilà des revendications capables de répondre aux crises du capitalisme et de construire une société enfin au service de la majorité de l’humanité. Emprunter cette voie, c’est emprunter le chemin de la lutte.

    Les patrons sont organisés au niveau international tandis que les travailleurs limitent pour l’instant leurs luttes aux frontières nationales, et sont mis en concurrence les uns avec les autres par les différentes bourgeoisies. Imaginons un instant l’impact qu’aurait une initiative européenne visant à réunir les résistances ! Un bon prochain pas à poser dans cette direction serait de propager l’idée d’une grève générale de 24h à l’échelle européenne, une bonne manière de renouer avec les principes de solidarité internationale du premier mai et de montrer de manière éclatante qui est le véritable créateur de richesses dans la société.


    Lors du 1er Mai 2010, les militants du PSL étaient présents dans 17 villes, dans tout le pays, d’Anvers à Charleroi et de Liège à Ostende. Plus de 700 exemplaires de notre mensuel avaient été vendus aux différents rassemblements, manifestations syndicales, etc. Cette année encore, vous pourrez trouver des rapports et photos des différentes activités organisées le Premier Mai et auxquelles participe le PSL sur notre site internet www.socialisme.be.

0
    0
    Your Cart
    Your cart is emptyReturn to Shop