Tag: Vande Lanotte

  • Nos villes ne sont pas à vendre !

    Le livre ‘‘L’Empereur d’Ostende’’ dévoile la manière dont l’actuel vice-premier ministre Johan Vande Lanotte (SP.a), par ailleurs également ministre de l’économie, a pris ses décisions politiques à Ostende. Cette ville est allée très loin dans la vente de son secteur public et le nombre de régies communales autonomes a littéralement explosé. La frontière entre ces entreprises communales et le secteur privé est extrêmement ténue, la plus grande différence résidant dans le financement public, qui reste souvent intacte concernant les pans de l’activité réalisés à perte.

    C’est dans cette optique qu’a été créée la Régie communale autonome du port d’Ostende (pour gérer le développement du port), la Régie communale autonome pour la Rénovation urbaine d’Ostende (afin de rénover le casino-Kursaal et de construire un complexe commercial avec appartements, le Nieuw Helmond) ou encore la régie communale autonome Vismijn (concernant le marché de la pêche). Sur base de ces entreprises, d’autres ont encore été créées sous forme de sociétés anonymes ou de société à responsabilité limitée. La structure des régies autonomes communales comprend 22 entités à Ostende.

    De cette manière, le pouvoir décisionnel a été transféré du conseil communal à un organisme composé de représentants des conseils d’entreprises des régies autonomes, à des technocrates non-élus. Cela a offert de grandes possibilités de profits aux partenaires privés tandis que le secteur public se contentait de payer la facture sans sérieuses vérifications de la gestion.

    La politique communale d’Ostende privilégiait les entreprises, notamment dans le secteur de la construction ou celui de l’énergie éolienne, au lieu de développer un bon secteur public. Seuls les services sociaux d’aide aux personnes âgées ont été choyés afin d’obtenir suffisamment de voix. La rénovation de la ville a résolument opté pour des appartements de luxe, mais la Régie communale autonome pour la Rénovation urbaine est entrée dans le rouge, et les autorités ont dû vendre des terrains intéressants, au grand plaisir de groupes d’agriculteurs privés.

    Le ministre Vande Lanotte a tout fait pour obtenir du soutien pour ‘‘ses’’ dossiers, comme sur la question des parcs éoliens offshore en mer du Nord, qu’il a géré à la fois en tant que directeur de plusieurs sociétés privées concernées et en tant que ministre de la mer du Nord. Les auteurs du livre affirment que “Il semble que la limite entre l’entrepreneuriat public et privé est devenue de plus en plus floue chez lui, jusqu’à devenir à certains moments totalement inexistante”.

    Ostende n’est pas un cas isolé, ce n’est qu’un exemple des conséquences du néolibéralisme sur nos villes. Cette approche favorise les projets de marketing et de prestige ainsi que les entrepreneurs en organisant le pillage des services publics, au détriment des couches les plus démunies de la population. Certaines catégories sociales tombent littéralement dans l’oubli. A Anvers, même l’enseignement est concerné par les régies communales autonomes. Nos villes sont véritablement vendues au privé.

  • VW-Forest. Une paix sociale sans accord est une illusion

    Trois semaines à peine après la fin d’une grève de 7 semaines, les travailleurs de VW ont de nouveau stoppé le travail. Motif? Pour certains: la prise en otage et la menace de la survie de l’entreprise par un petit noyau dur de militants-FGTB principalement francophones. Selon l’Alternative Socialiste : le fait que la grève s’est terminée sans solutions, tant pour ceux qui ont accepté la prime de départ, que pour ceux qui ont “l’obligation morale” (c’est formulé ainsi) de partir en prépension et pour la structure future de l’entreprise.

    Eric Byl

    Pas de garanties écrites

    Même le journal patronal flamand de Tijd, qu’on ne peut pas soupçonner d’être à gauche, a conclu ainsi son éditorial du 26 janvier: “Le personnel de Forest qui ne part pas avec une super-prime, veut des garanties quant à son avenir. Sur papier. Tant que celles-ci ne sont pas réalisées, il y aura du chahut aux portes de Forest.”

    La direction de Forest pensait pouvoir s’en sortir avec sa stratégie de pourrissement. Sept semaines de grève, dont 6 payées par VW, et la promesse de primes record auraient dû suffire pour que les travailleurs retournent au turbin sur les genoux.. Les délégations syndicales ont été habilement trompées. Tant la direction belge que Verhofstadt, Van Velthoven et Vande Lanotte se sont présentés comme des alliés “pragmatiques”. Ils ont, d’après leurs dires, tout fait pour limiter les dégâts et sauver l’entreprise. Même les organisations patronales ont soudainement trouvé des milliers de postes vacants. Une exception aux règles du Pacte de Générations n’a finalement pas été retenue, mais « avec tant de chômeurs, la possibilité de réemployer des plus de 50 ans est minimale » ont annoncé les délégations syndicales.

    Beaucoup de promesses, donc. Mais rien sur papier. Un employé a écrit sur le site néerlandophone des travailleurs de VW: “Comme employé, j’ai les réflexions suivantes. Cela fait 3 semaines que nous avons repris le travail. Nous n’avons toujours pas plus d’info qu’avant la reprise. Nous ne savons encore rien sur notre avenir. Notre direction n’a aucune réponse concrète à donner. Est-ce qu’il faut s’étonner alors de la frustration régnante? De plus en plus, je me demande si tout ce scénario n’est pas un jeu prémédité de la direction.”

    Aucun plan d’action

    La situation à VW est porteuse de leçons pour tous les syndicalistes.

    Au printemps 2006: l’hebdomadaire “Der Spiegel” annonce un plan de restructuration pour Forest, voire même sa fermeture. Pas de calicots, ni de tracts, ni de réunions d’informations. Au contraire, les délégations syndicales reconfirment leur confiance dans la direction. Du temps précieux pour construire un rapport de forces est perdu.

    Au conseil d’entreprise du 21 novembre, un débrayage spontanné a déjà lieu. La direction annonce la perte de 4.000 emplois. Suit une assemblée du personnel avec une participation massive, y compris des travailleurs des usines de sous-traitance. Les discours se font à partir du deuxième étage du parking sans possibilité de poser des questions ou de faire des remarques. Il n’y a pas de tract reprenant les points principaux du conseil d’entreprise, ni de mot d’ordre. L’option des primes de départ est tout de suite évoquée, pas un mot sur un plan d’action. Chaque orateur conclut avec une déclaration de solidarité avec les travailleurs en sous-traitance, mais leurs délégués et militants ne sont jamais invités aux réunions de militants à VW et ils se retrouvent, comme beaucoup d’autres, dépendants de la presse.

    Mis sous pression, les syndicats organisent une manifestation de solidarité le 2 décembre. Des bus sont alors organisés pour tracter les autres usines d’assemblage. Mais un vrai plan d’action en vue de transformer la large solidarité avec les travailleurs de VW en mobilisation concrète n’est pas construit. C’est au MAS, au PTB et au Comité de soutien de VW de distribuer des affiches de solidarité, là où les syndicats disposent d’un réseau énorme de délégués, de militants et de membres qui peuvent, sur un mot de leurs directions, distribuer partout dans le pays de telles affichettes. Une grève de solidarité dans toutes les grandes entreprises, même durant une seule heure, n’est à aucun moment prise en considération. Néanmoins, 25.000 personnes participent à la manif, mais elles sont renvoyées chez elles sans mot d’ordre.

    Les délégations syndicales rendent bien visite aux patrons et aux politiciens, mais les travailleurs, chez eux ou au piquet, en sont réduits à deviner ce qui se passe. Verhofstadt réussit à se profiler comme le sauveur de VW après avoir obtenu de vagues concessions de la direction sur le maintient de 3.000 postes et la possibilité de produire, à partir de 2009, des Audi A1 à Forest.

    Victoire à la Pyrrhus

    Ce n’est donc pas étonnant que beaucoup de travailleurs ont choisi de mettre de l’eau dans leur vin en acceptant les primes de départ. Après deux ans d’impôts, il n’en restera plus qu’un tiers, ce dont beaucoup ne s’étaient pas encore rendu compte. Les délégations ont laissé s’inscrire des travailleurs avant même d’avoir trouvé des solutions pour toutes les catégories, y compris les pré-pensionnables et ceux qui continueront à travailler à VW. De cette façon, ils ont de nouveau abondonné la construction d’un rapport de forces.

    Finalement, les délégations ont, sans garanties pour le futur, fait voter la fin de la grève par un référendum mal organisé, et même selon certains manipulé. Le résultat : 56% contre 44% pour l’arrêt de la grève. Cette “victoire d’en haut” la direction la paiera cher. Une paix sociale ne s’impose ni par la menace, ni par l’usure, mais par un accord porté par la base.

  • PS et SP.a. Il n’y a plus d’excuses

    Depuis le Pacte des générations, rien ne va plus entre le SP.a et la base de la FGTB en Flandre. De plus, toutes les tentatives du SP.a de se profiler plus à gauche tournent au fiasco. Du côté francophone, le fossé entre la base de la FGTB et le PS semble moins profond, mais l’idée de couper les liens y fait son chemin également.

    Eric Byl, membre du Bureau exécutif du MAS, ancien membre du Bureau national des Jongsocialisten et ancien secrétaire politique du SP à Grammont.

    PS: dissimuler le néolibéralisme derrière une rhétorique communautaire

    Les dirigeants du PS et du SP.a l’ont bien compris. Leur attitude dans la lutte contre le Pacte des Générations n’est pas près d’être oubliée. Le PS se traîne à 28% dans les sondages, loin en-dessous des 36% qu’il avait obtenus lors des élections de 2004. Depuis lors, le parti est aux prises avec d’innombrables scandales et son plan Marshall pour relancer la Wallonie est très néolibéral. Si une nouvelle formation de gauche ne voit pas le jour d’urgence pour capter les suffrages des déçus, la Wallonie connaîtra un nouveau dimanche noir.

    Le PS en est conscient. Il tente de redorer son blason auprès des jeunes par une proposition de dépénalisation de l’usage du cannabis pour les plus de 16 ans ; il tente la même opération auprès des travailleurs par une proposition de loi visant à instaurer un représentation syndicale dans les PME de plus de 20 travailleurs. Fort bien. Mais le PS ne fait rien pour créer un rapport de force pour faire aboutir ces propositions. Va-t-il en faire une question de gouvernement? Chiche !

    Une fois que ces effets d’annonce se seront dissipés, le PS va sans doute tenter de rééditer le tour de force de 1987 en profilant le PS comme le défenseur des francophones face à l’agressivité flamande. Il va se retrancher derrière la soif de nouvelles compétences des politiciens flamands pour cacher sa responsabilité dans la politique néolibérale de régression sociale.

    SP.a : le populisme ne paie pas

    Les dirigeants du SP.a n’en mènent pas large. Ils se sont profilés ces dernières années comme des bûcheurs de dossiers et comme les principaux auteurs de la politique néolibérale de régression sociale. Jadis le populisme de Stevaert pouvait encore faire illusion, avec sa politique de gratuité et ses sorties médiatiques. Stevaert, patron d’une chaîne de cafés, savait s’y prendre pour plaire aux travailleurs et à leurs familles.

    La seule sortie dont le nouveau président du SP.a et ancien vice-premier ministre a été capable – «qui tourne le dos au SP.a lorgne vers la droite» – était une injure à l’adresse de la base de la FGTB. Une tentative de sa collègue Freya Vanden Bossche de se profiler comme celle qui allait faire payer le secteur pétrolier s’est soldée par un fiasco. Cela lui a valu de faire la une de l’hebdomadaire Knack qui a titré « Qui a encore confiance en Freya ? »

    Le professeur Vande Lanotte n’est pas un patron de café. Sa sortie populiste – réduire de moitié les effectifs de l’armée – a eu l’effet inverse. Les pacifistes et les antimilitaristes se souviennent du plaidoyer du SP.a pour la Constitution européenne qui prévoit justement d’augmenter les dépenses militaires. En outre, Vande Lanotte a réussi à inquiéter 40.000 familles de militaires qui voient leur sécurité d’emploi menacée sans qu’une alternative ne leur soit proposée. La nouvelle déclaration de principes du SP.a ressemble à un livre de recettes néolibérales qui n’a rien à envier au Manifeste du Citoyen de Verhofstadt.

    Le SP.a a perdu sa base active

    Voilà 10 ans que les prédécesseurs du MAS ont cessé de travailler dans le SP afin de construire une organisation indépendante. Le SP tournait alors déjà le dos à une partie importante de sa base traditionnelle. Le travail de quartier, les fêtes du parti, les maisons du peuple et une riche vie associative ont été remplacés par des campagnes publicitaires et des bals de gala où les militants n’avaient plus leur place. Les travailleurs en action se heurtaient frontalement au SP. Les habitants des quartiers s’en détournaient à cause de sa politique de rénovation urbaine taillée sur mesure pour les bien nantis. Le SP n’était plus le parti des travailleurs et de leurs familles. Si les prédécesseurs du MAS avaient continué à travailler au sein du SP, nous aurions été réduits à l’impuissance comme ce qui reste de la gauche au sein du SP.a.

    Nombre de travailleurs ont quitté le PS et le SP. D’autres, surtout des syndicalistes, leur sont restés fidèles à contre-coeur par manque d’une alternative large et suffisamment implantée, avec l’espoir de contrer la droite. Le fait que même un secrétaire national de la FGTB comme Verboven soit maintenant obligé de remettre prudemment en question les liens avec le SP.a démontre que ce parti est en train de perdre ce qui lui reste de crédit. Au lieu de contrer la droite, le PS et le SP.a sont en effet devenus les instruments par excellence pour faire avaler la politique d’austérité néolibérale aux travailleurs. Celui qui pense pouvoir détourner le paquebot PS de sa route vient 20 ans trop tard.

  • Belgacom. Une santé prise sur celle des travailleurs.

    Secouée par une grève ce mardi 11 octobre, l’entreprise cultive depuis longtemps le mépris des travailleurs…

    La crise est là, bien là, et cause de tout les maux que doivent subir les travailleurs. C’est du moins se qu’assènent sans relâche patronat, médias et politiciens. On en appelle ainsi à la raison de la population, ou plutôt à sa résignation, afin de sauver une économie nationale malade de l’infâme concurrence des autres pays, et parmi eux tout particulièrement les pays « en voie de développement ». Ces mêmes chevaliers du système passent d’ailleurs allègrement sur le fait que si effectivement développement il y a dans le monde néo-colonial, c’est avant tout celui de la misère et de l’exploitation.

    Nicolas Croes

    Pourtant, cette crise dont on nous parle tant, cette crise qui « oblige » les laquais du capitalisme qui nous servent de gouvernant à aller toujours plus loin dans la chasse aux acquis des travailleurs, cette crise-prétexte, ne touche pas tout le monde. Elle est même assez sélective. Solvay, InBev, Mobistar, Belgacom et autres entreprises phares de la Belgique ont cumulés de juteux bénéfices. Fortis a ainsi augmenté son bénéfice de 53% entre 2003 et 2004… Pas de raison de s’en prendre aux travailleurs, donc. Pourtant, la réalité est aussi éloignée de ce raisonnement que ne l’est la démocratie de la société actuelle.

    Un cadeau aux actionnaires privés payé par l’argent de la collectivité

    Prenons l’exemple révélateur de Belgacom.

    Bien loin de connaître la situation déficitaire de France Télécom ou de KPN, les télécommunications hollandaises, Belgacom a réalisé en 2004 un bénéfice de 922 millions d’euros, augmentation de quelques 636% ( !) comparée à l’année précédente. Que peut faire une entreprise avec autant d’argent ? Augmenter le salaire des travailleurs ? Leur bien-être au travail ? Que nenni ! Il est bien plus utile de reverser 75% de cette somme, soit à peu près 700 millions d’euros, à la poignée de charognards que l’on appelle pudiquement des actionnaires. Ceux-ci n’ont pourtant pas dû attendre tout ce temps pour être récompensés de leurs « efforts » (qui ne consistent en définitive qu’à investir, en étant plus qu’assurés du zèle que la direction emploiera à les remercier).

    Fin 1995, Elio Di Rupo entreprit une « consolidation stratégique » de Belgacom, et offrit au privé la moitié du capital de l’entreprise. Mais l’Etat sut être encore plus généreux. Toujours prompt à vouloir appliquer les réformes européennes quand elles touchent les travailleurs, le gouvernement eut par contre plus d’un an de retard pour appliquer la réforme du marché des télécommunications, c’est à dire l’entrée en lice de concurrents face au monopole de Belgacom, qui put ainsi mieux se préparer. Quant à la privatisation de l’entreprise, afin d’avoir les mains libres pour l’effectuer, le gouvernement « arc en ciel » (socialistes, libéraux et écologistes) fit passer une loi lui permettant de l’organiser sans aucun contrôle parlementaire. Rien de mieux pour démontrer, si besoin était encore, qu’aucune illusion ne peut exister quant à l’utilité d’un parlement bourgeois pour défendre les intérêts de la population.

    De son côté, la direction de Belgacom, afin d’augmenter les bénéfices et donc les dividendes versées aux actionnaires, décida de réduire les coûts salariaux. Cependant, la plus grande partie du personnel était statutaire. Encore actuellement, après toute l’énergie déployée pour se débarrasser du plus grand nombre possible, 70% des employés sont toujours dans ce cas. Ces travailleurs ne pouvaient que s’attirer la hargne des dirigeants de Belgacom, car à leurs yeux, les défauts des statutaires ne sont pas des moindres. Non seulement leur salaire est plus élevé que celui des contractuels, mais de plus ne peuvent ils être licenciés que pour faute grave. Raison pour laquelle, par exemple, aucun statutaire ne fut engagé à Liège depuis 1980. Ceux qui restent ont donc en plus une prime d’ancienneté non négligeable. Que demander de plus pour les prendre en grippe quand on est actionnaire et uniquement motivé par la soif de profit ?

    Max Jadot, Managing Director Investment Banking à la Fortis Banque, à propos et à l’époque de l’entrée en Bourse de Belgacom :« Il y a toujours des cycles positifs et des cycles négatifs. La bourse n’a cessé de baisser depuis trois ans. Les cycles positifs vont revenir un jour. Mais je ne peux pas dire quand la tendance sera à nouveau fondamentalement positive pour les marchés ».Qui mieux qu’un expert pouvait nous expliquer aussi clairement à quel point le capitalisme est imprévisible et incontrôlable? On nous demande donc un acte de foi pendant que les travailleurs trinquent et servent de fusibles…

    D’autant plus que se profilait alors la tant attendue entrée en Bourse de Belgacom. Celle-ci fut effectuée en 2004, avec le soutien énergique du ministre Vande Lanotte. Rappelons que ce dernier se réclamait, et se réclame toujours encore, du socialisme, et est depuis devenu président des soi-disant « socialistes » flamands. Tout comme Elio Di Rupo du côté francophone. Cela prêterait à rire s’il n’y avaient eu autant de sacrifiés à l’engraissement de quelques méprisables. Des 25.000 travailleurs en 1996, appelés « collaborateurs » dans le jargon (comme si ces derniers avait un quelconque mot à dire), il n’en reste plus aujourd’hui que 16.300.

    Pour précipiter le départ des travailleurs, tout les moyens sont bons.

    Le cas d’une employée nous fut relaté. Celle-ci se distinguait par son opposition au nouveau rythme de travail imposé par le premier plan de départ « volontaire ». Un jour, alors que sa journée de travail venait de toucher à sa fin, elle croisa son responsable, qui la convoqua « pour lui poser quelques questions ». Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’elle se rendit compte que c’était un véritable tribunal qui l’attendait, composé de l’entièreté des petits chefs de son secteur. Ces derniers l’on littéralement assaillie de questions sur ses réflexions, celles qu’elle avait entendues de ses camarades… Elle sut partir de suite, plus rien ne l’obligeait à rester ses heures terminées. Mais le harcèlement dont elle était victime continua, elle connu par la suite une dépression et sombra dans les médicaments.

    Le bilan est lourd. En moins de dix ans, la privatisation aura fait perdre l’emploi de près de 10.000 personnes, mais aura par contre rapporté 4,25 milliards d’euros aux seuls actionnaires privés.

    Les plans PTS, BeST, ou comment maquiller un licenciement

    Cette douloureuse épreuve pour les travailleurs de belgacom commença en 1998 avec le plan BTS (People, Team & Skill). Selon celui-ci, tout qui pouvaient aligner 50 ans minimum et 20 ans d’ancienneté avait l’opportunité de partir en prépension. Mais ce plan de départ qui devait être volontaire fut appliqué à coup de pressions plus honteuses les unes que les autres (voir l’encadré, qui n’est qu’un exemple parmi tant d’autres). Certains secteurs virent leur prestation de nuit supprimée, ce qui signifia surtout une perte de prime sans compensation salariale.

    De telles pratiques ne pouvaient rester sans réactions, et en mars 1998, un mouvement de grève éclata. Mais les retouches concédées par Belgacom n’étaient que cosmétiques, et de nouvelles actions se déroulèrent à Liège dans le courant du mois de juin. Afin de sortir de leur isolement, les militants CGSP liégeois tentèrent alors de prendre contact avec les travailleurs des autres régionales pour les mobiliser également. Soudain, le président de la régionale CGSP de Liège et son vice-président furent exclus de la FGTB. En distribuant un tract à la base, chez les travailleurs, ils n’avaient pas respecté la « démocratie » interne, qui voulait que l’on s’adresse à la hiérarchie. En langage bureaucratique, un appel à la base est donc qualifié d’anti-démocratique… Et nul n’est à l’abri de représailles, aussi haut soit-il. On comprend toutefois mieux cette réaction de l’appareil syndical en sachant que le ministre en charge des télécommunications de l’époque n’était autre qu’Elio Di Rupo, appelé à devenir président du Parti « Socialiste » l’année suivante. Bel exemple de solidarité messieurs, mais dans le mauvais sens.

    4/10

    C’est le nombre de travailleurs qui connaissent des problèmes de santé liés directement (23%) ou indirectement (76%) au stress. Chiffre en deçà de la réalité de Belgacom, qui serait l’entreprise au plus haut taux d’utilisateurs de tranquillisants. Plusieurs travailleurs se sont déjà suicidés, dont l’un au sein même du siège de l’entreprise liégeoise.

    Quand au résultat de ce plan, le mieux est encore de laisser parler Belgacom : « Longuement négociée avec les trois organisations syndicales, dans un remarquable climat de sérénité sociale, l’opération a débouché sur un total succès puisque 98% des collaborateurs concernés (6.300 personnes)ont choisi d’accepter l’offre.(…) La reconnaissance des services rendus par les collaborateurs tout au long de leur carrière a été le souci permanent qui a guidé cet important projet » (souligné par nous). Tant de cynisme se passe de commentaires.

    Ce « succès » gonfla l’arrogance et la confiance de la direction, qui lança début 2001 le plan BeST (Belgacom e-business Strategic Transformation), qui avait pour but officiel de mieux préparer l’entreprise à se tourner vers le marché Internet. Face à la concurrence et à l’érosion de la téléphonie fixe, Belgacom se devait de trouver de nouveaux débouchés, de nouveaux domaines. Cela aboutit au lancement d’une télévision numérique ou encore à la tentative récente de reprise de Télindus (une société de gestion de réseaux internet et intranet).

    Ce plan ne se différenciait pas fondamentalement du précédent en terme de « départ volontaire », et à l’issue de celui-ci, 4.100 travailleurs manquaient à l’appel chez Belgacom. La direction déclara à l’époque, et nous ne pouvons qu’être d’accord avec ces paroles, que le plan BeST s’inscrivait pleinement dans la politique d’Etat social actif poursuivie par le gouvernement. Des POOL furent créés, sortes d’équipes volantes passant d’un endroit à l’autre, et composés à majorité de travailleurs statutaires dont l’ancien travail, loin d’être supprimé, était effectué par des contractuels. Les exécrables conditions de travail de ces POOL furent pour beaucoup dans le succès du plan de départ. Cet impératif de réorganisation du travail fut expliqué par le fait que « les travailleurs de belgacom sont en queue de peloton en matière d’efficacité » (Mémorandum Management de Belgacom, 2001). Ils l’avaient pourtant été assez que pour augmenter les bénéfices de l’entreprise de 11% l’année précédente, en 2000…

    La « réussite » des deux plans n’empêche pas de nouvelles attaques

    Un dizaine de milliers de « collaborateurs » en moins, donc, sans parler de l’incroyable pression subie par les travailleurs restant. Pourtant, au premier janvier 2004, après les plans BTS et BeST, Belgacom déclarait avoir encore dans ses rangs un excédent de 7 à 800 employés. L’entreprise, toujours majoritairement aux mains de l’Etat (la moitié des actions, plus une) déclara qu’elle souhaitait voir ce surplus recasé dans d’autres secteurs à la charge de l’Etat, revendication déjà ancienne de la direction.

    Un autre plan fut donc conçu, à l’origine de la grève du 11 octobre. Celui-ci vise 550 travailleurs, parmi lesquels 500 statutaires mis en « disponibilité structurelle » pour deux années, avec 75% de leur salaire. A ce propos, Michel Neufcoeur, (CSC Transcom) déclara : « C’est une formule récurrente. Quand le dossier des 500 premiers statutaires sera bouclé, Belgacom passera à d’autres. » Un bref coup d’œil sur le passé de l’entreprise ne peut que lui donner raison. Les 50 contractuels auront eux moins de « chance », il est tout simplement prévu de les licencier. Selon le TIJD, journal flamand essentiellement financier, belgacom voudrait même supprimer progressivement et par voies diverses 2000 emplois supplémentaires, soit quelques 12% des effectifs actuels. Il faut dire que les cours de la Bourse se dopent au licenciement, et la réduction des coûts salariaux est toujours bien accueillie par les actionnaires, qui voient leurs dividendes augmenter en conséquence.

    La CSC fut néanmoins le seul syndicat à claquer la porte des négociations. Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi la FGTB est muette à ce sujet quand on connaît la manière dont la haute bureaucratie FGTB régla le sort des responsables liégeois CGSP lors du premier plan. L’exemple fit date. Quant au syndicat libéral, ces deux mots ont du mal à vouloir dire quelque chose mis côte à côte.

    A l’appel de la CSC Transcom, les travailleurs partirent en grève, et organisèrent des piquets, également afin d’informer les travailleurs des autres syndicats pour qu’ils puissent faire pression sur leurs bureaucraties. Ce qui, pour ce que nous avons pu en voir à Liège, eut un certain succès. Thierry Bouckaert, porte-parole de belgacom eut pour réaction de déclarer que « la grève n’a pas eu un impact considérable ». Habitué à se faire porte voix de mesures d’austérité d’une si grande ampleur, il est compréhensible qu’il en faille beaucoup pour l’impressionner… et aucun changement n’est actuellement survenu.

    La solution, seul les travailleurs la détiennent !

    La vie des travailleurs ne vaut pas grand chose dans le cadre du capitalisme. Alors que les richesses produites sont l’œuvre de NOTRE labeur, dans le meilleurs des cas ne sommes nous considérés que comme des consommateurs, justes bons à faire fructifier les bénéfices d’une infime minorité de nantis.

    L’acceptation de cet état de fait a transformé les vieilles organisations ouvrières en gestionnaires, voir en médecin du système. C’est en fonction de ses besoins que les « solutions » sont ébauchées au sein de la social-démocratie et de la bureaucratie syndicale, et non en fonction des intérêts des travailleurs.

    Malgré tout, cette situation n’est pas destinée à être éternelle. L’Allemagne montre le potentiel qu’un nouveau parti des travailleurs se basant sur les couches combatives des syndicats peut obtenir. De création récente, le Parti de gauche (Linkspartei) a néanmoins obtenu 8,7% lors des dernières élections, malgré une omniprésence séculaire du SPD (collègues du PS en Allemagne). Si le programme de la formation n’est encore qu’anti-néolibéral et non clairement socialiste et anticapitaliste, c’est une opportunité pour les travailleurs de réinvestir le terrain politique. Les « professionnels » de ce domaine, les politiciens, démontrent tout les jours suffisamment à quel point se sont eux qui devraient être licenciés, et c’est au cours de mobilisations et d’interventions que la conscience des travailleurs augmentera, en sortant chacun de son isolement. Nos camarades allemands du SAV interviennent dans ce processus avec une orientation marxiste et révolutionnaire, et nous brûlons de faire de même ici en Belgique.

    Les méfaits du capitalisme se répandent comme la pire des maladies, et ses vecteurs sont nombreux. Aujourd’hui, Bernard Delvaux.

    En 2000, il se retrouva à la tête d’une division de Belgacom. 2.700 personnes ont ainsi pu profiter de ses riches idées, et reçurent des terminaux mobiles pour recevoir leurs ordres de travail de n’importe où. L’équivalent du trop tristement connu des postiers Georoutes. La productivité de la division augmenta légèrement, sans commune mesure avec le stress et le malaise au travail. Mais qu’importent à un tel personnage ce genre de considérations ?Belgacom le remercia à la hauteur de ses mérites, en lui confiant la gestion du projet de BeST, qui coûta 4.100 emplois. Il faut dire qu’il avait déjà participé au plan précédent, mais à un échelon moindre. Tout cela avant d’être chaleureusement accueilli au comité de direction de La Poste, début 2004. Depuis, la privatisation de La Poste a été annoncée. A l’époque, celui qui avait déniché la perle avait déclaré : « C’est une perte pour Belgacom, mais un gain pour La Poste ». Cela dépend évidemment de quel côté l’on se place, et celui-là n’est pas le nôtre…

  • Crise économique. Vers un nouveau Plan Global?

    L’économie belge ne va pas bien. Verhofstadt a tenté de le nier des mois durant dans les médias. Mais entre-temps, il travaillait bel et bien à un Plan Global qui soutiendra sans doute la comparaison avec le Plan Global de 1993. C’était alors le plan d’austérité le plus sévère depuis la Deuxième Guerre mondiale; il a mené à la plus grande grève générale de l’histoire de la Belgique.

    Bart Vandersteene

    Les pensions en danger

    Avant que le contrôle budgétaire de cette année ne soit clôturé et que la discussion sur le budget 2006 ne démarre, le gouvernement veut aller de l’avant dans le dossier des pensions. Seule 7% de la population croit que la pension légale suffira à leur garantir un revenu décent pour ses vieux jours. Sur ce plan, les patrons et le gouvernement ont déjà marqué pas mal de points. 20 années de propagande sur les pensions complémentaires et le maintien des pensions légales à un niveau très bas, ont répandu l’idée que les pouvoirs publics n’étaient pas en mesure de garantir une pension décente à tous.

    Le débat sur la réforme des pensions était annoncé depuis des mois. Et les premières propositions gouvernementales sortent peu à peu. Il en ressort que, non seulement nous devrons recourir à l’épargne privée pour compenser une pension trop basse, mais nous devrons en outre travailler plus longtemps pour y avoir droit. Aujourd’hui, après 35 ans, on peut prendre sa pension anticipée (avec cependant un poucentage de perte par année anticipée). Ils vont relever graduellement ce seuil à 40 ans. La possibilité de prendre sa pension de manière anticipée va ainsi devenir quasi impossible.

    L’économie stagne, on économise des milliards

    Malgré les déclarations ronflantes sur la prochaine relance économique, l’économie belge a stagné dans la première moitié de 2005. Et il y a pas vraiment matière à optimisme pour la deuxième moitié de l’année. Le secteur de la construction est le seul secteur de l’économie belge qui continue à croître. Mais cette croissance est entretenue par des taux d’intérêt historiquement bas. On peut obtenir un crédit hypothécaire à 3,5% avec un taux d’intérêt variable. Ça rend l’acquisition ou la construction d’un logement très attractive pour nous tous et davantage encore pour les spéculateurs. Conséquence: des hausses de prix énormes.

    Fin mai, le Bureau du Plan avertissait le Ministre du Budget Vande Lanotte que, à politique inchangée, on se dirigeait vers un déficit budgétaire de 0,5%, soit 1,5 milliard d’euros, en 2005. A ce moment-là, le Bureau du Plan prévoyait encore une croissance de 1,7%. Les chiffres du gouvernement, des banques, de la FEB et de l’OCDE sur la croissance économique ont servi d’instrument de propagande pendant des années pour nous faire croire que tout allait bien. Mais quelle est la base scientifique de tous ces chiffres? Au début de l’année, le gouvernement a calculé son budget sur base d’une prévision de croissance de 2,2%. En fait, on escomptait secrètement une croissance de plus de 2,5%. En avril, le gouvernement a fait un premier contrôle budgétaire et les prévisions de croissance ont été ramenées à 1,7%. Aujourd’hui, même les plus confiants ne semblent plus croire à une croissance supérieure à 1%.

    Il nous semble donc plus probable que le déficit s’élèvera à 2,5 milliards d’euros, soit 0,8% du budget. Ça signifie que le gouvernement va devoir mettre en oeuvre dès octobre un paquet de coupes budgétaires pour cette année-ci et un autre, bien plus lourd encore, de quelque 6 milliards d’euros pour l’année prochaine. Mais le gouvernement a multiplié les largesses envers le patronat. Entre 1993 et 2005, les patrons ont empoché annuellement des baisses de charges pour 3,75 milliards d’euros. Il suffirait de revenir sur ces largesses pour résoudre d’un coup pas mal de problèmes de la sécurité sociale. Ou, mieux encore, de s’en prendre à la fraude fiscale dont on s’accorde à dire qu’elle est d’au moins 15 milliards d’euros par an.

    La croissance économique ne dit pas tout

    Le patronat et le gouvernement accordent beaucoup d’attention aux chiffres bruts concernant la taille du gâteau économique. Et pour les travailleurs, les pensionnés, les chômeurs et les jeunes, il n’importe pas moins de savoir si le gâteau que nous produisons tous ensemble grandit ou non. En effet, plus grand est le gâteau, plus il y a de morceaux à distribuer. Mais la taille du gâteau ne dit rien sur son partage. Une plus grand gâteau ne signifie pas automatiquement davantage de prospérité pour tout le monde. La situation en Irlande en est une bonne illustration.

    L’Irlande produit le plus de richesse par tête d’habitant dans l’Union européenne. C’est dû à l’augmentation spectaculaire de la productivité que l’Irlande a connue ces 15 dernières années. Entre-temps, la part de la richesse produite qui va aux travailleurs a diminué de 25%. En 1991, les entreprises payaient encore 50% d’impôts sur leurs bénéfices, aujourd’hui ce n’est plus que 10 à 12,5%. Le prix moyen du loyer à Dublin a atteint les 1.300 euros par mois et le prix d’achat moyen d’une maison était de 303.000 euros l’année passée. Le taux de pauvreté des enfants y est de 15,7%, un chiffre très élevé pour un pays industrialisé. Il s’agit donc d’une forte croissance économique qui, loin de bénéficier à la majorité de la population, s’est au contraire faite à son détriment. Une croissance dans laquelle les travailleurs et leurs familles payent pour les profits de la bourgeoisie.

    Accroître la flexibilité? Est-il possible d’être encore plus flexible?

    Pour nous mettre en concurrence avec les travailleurs des pays voisins, le gouvernement veut nous rendre encore plus flexibles. Les travailleurs belges sont déjà parmi les plus flexibles du monde. Verhofstadt veut stimuler encore davantage le travail à pauses et le travail de nuit en prévoyant des primes supplémentaires pour les employeurs et en assouplissant la réglementation du travail intérimaire de façon à ce que les services publics puissent aussi y recourir. On prépare ainsi à la jeune génération un avenir fait de travail précaire et de revenus précaires. La pension à laquelle cette génération pourra encore prétendre après une telle "carrière" sera à l’avenant.

    La PS et le SP.a en maîtres d’œuvre de la régression sociale

    Il va sans dire que les partis sociaux-démocrates sont la force motrice de ce gouvernement . Ce sont les Vande Lanotte et les Vanden Bossche qui donnent le ton et qui jouent le rôle de maîtres d’oeuvre. Ils font valoir qu’ils ne peuvent pas faire autrement et qu’ils veillent à le faire d’une façon qui soit socialement acceptable. Quels mensonges ! Le PIB par tête d’habitant a augmenté de 37,5% ces dix dernières années. Si on décompte l’inflation (dévaluation de l’argent) qui était de 18,8% pour la même période, ça aurait dû signifier une hausse générale du niveau de vie de 18,7%. Mais tout le monde voit bien que ce sont surtout les grands actionnaires, les managers et les ménages à hauts revenus qui ont tiré les marrons du feu. Ces dix dernières années, les travailleurs, les pensionnés, les chômeurs et les jeunes ont vu les trains d’austérité se succéder l’un après l’autre.

    Malheureusement les directions syndicales prêtent leur concours au démantèlement de l’Etat-Providence d’après-guerre depuis fin des années ’80 qui a vu la social-démocratie revenir au gouvernement. Le risque est grand d’assister à une régression négociée en automne. Il faut que les militants syndicaux combatifs s’organisent dans leurs syndicats afin de pouvoir tenir en échec la direction actuelle et sa politique et de lutter pour un programme socialiste qui offre une réponse aux problèmes avec lesquels nous sommes confrontés.

    Cette direction a opté pour le "moindre mal": la régression socialement corrigée. Cela se traduit politiquement par un soutien au PS. Mais il devient chaque jour plus clair que cette politique ne pourra pas stopper la régression sociale. Le mouvement ouvrier a besoin de son propre parti. En Allemagne, des couches plus larges de travailleurs combatifs ont déjà tiré cette conclusion, ce qui a mené des groupes de militants issus de différents syndicats à lancer WASG (Alternative électorale pour la Justice sociale), une nouvelle formation à la gauche du SPD et des Verts. Les années qui viennent verront la question d’une telle formation se poser en Belgique également.

  • Bas les pattes de nos prépensions!

    Si le gouvernement ne tombe pas, il faut s’attendre à une déclaration gouvernementale de Verhofstadt avec comme point central une attaque contre les prépensions. La presse nous serine depuis des mois «qu’on ne pourra plus payer les pensions à l’avenir». En 2000 il y avait 16.8% de plus de 65 ans en Belgique. En 2050 on estime qu’il représenteront 26.5% de le population. A partir de 2001, le baby-boom d’après-guerre prendra sa pension.

    Peter Delsing

    La Commission d’Études sur le Vieillissement estime que d’ici 2030 le coût du vieillissement de la population atteindra 3.4% du Produit intérieur brut (PIB). Si le coût des soins de santé augmenteront de 4,5% l’an jusque 2030 (le rythme actuel) ils représenteront 6,7% du PIB.

    La Commission d’Études parlementaire ajoute qu’en tenant compte d’une croissance moyenne de la productivité de 1,75% l’an jusqu’une 2030 (donc une croissance de productivité moyenne de 1,75% par travailleur). Avec une telle augmentation de la productivité il faudrait une croissance économique moyenne de 2,5% pour que le taux d’emploi passe de 61,5% à 68,5% en 2030.

    Toute l’argumentation économique du gouvernement sur «le coût du vieillissement» repose sur du vent. Depuis les années 70 la croissance économique moyenne a baissé toutes les décennies sous l’effet de la surcapacité des forces productives. De 2001 à 2003 la croissance économique a été de 0,8% (1). Depuis 2002 nous sommes encore dans une période de prétendue «relance» économique. Croire que, dans le cadre du capitalisme, la croissance économique moyenne sera de 2,5% l’an jusque 2030 est un leurre.Il est plus vraisemblable que le capitalisme entrera assez rapidement dans un nouveau cycle de crise économique, avec la possibilité de conséquences semblables au crash de Wall Street de 1929. Qui d’ailleurs peut garantir que le capitalisme existera encore en Belgique en 2020?

    Les prévisions de la Commission d’Etudes et du gouvernement sous-estiment considérablement le «problème» du vieillissement, si on voit cela dans le cadre du capitalisme. Le ministre du Budget Vande Lanotte a une autre conception de la croissance budgétaire et du vieillissement. Il déclare «Cela marche! Ne vous en faites-pas!»(2).

    Le coût du «vieillissement» est-il tenable financièrement? Au cours des 24 dernières années la Sécurité sociale n’a été en déficit qu’à 7 reprises: en 1980, de 1991 à 1993, en 1995, 1996 et 2003 (3). Et ce, malgré le pillage organisé des caisses de sécurité – et qui se chiffre annuellement en milliards d’euros – par la baisse des charges sociales.

    Du début 2000 à la fin 2003, le surplus de la Sécurité sociale a été de 3 milliards d’euros (environ 1,3% du PIB). Où est passé l’argent? Et où est passé l’argent des cotisations pour les pensions versé dans les années 60 et 70? Pourquoi les gouvernement successifs ont-ils puisé dans les caisse de Sécurité sociale pour rembourser aux banques la dette publique au lieu de garantir le futur des générations à venir?

    C’est une question de choix politique. Aux cours des vingt dernières années les gouvernements bourgeois ont puisé dans les caisses de pension pour remplir les coffres des capitalistes. Les 2/3 des pensionnés touchent une pension mensuelle inférieure à 1.000 euros. 39% perçoivent moins 750 euros par mois! Frank Vandenbroucke (SP.a) reconnaît lui-même que 22% des plus de 65 ans vivaient dans la pauvreté en 1998 (4). Aujourd’hui les pensions «élevées» des hautes fonctionnaires sont en outre de plus en plus remises en question.

    Les travailleurs ne doivent pas se laisser diviser: les 10% les plus riches de la population disposent de la moitié du patrimoine dans notre pays. C’est là qu’il faut chercher les «profiteurs». Les gouvernements successifs ont rendu les riches plus riches et ont appauvri la majorité de la population.

    Les prépensions dans le collimateur

    Le gouvernement veut mettre un terme au système des prépensions. Il veut couper dans les dépenses pour les prépensions (aussi pour les patrons) et garder les cotisations de sécurité sociales au même niveau. Afin d’augmenter le taux d’activité le gouvernement veut faire payer les travailleurs en imposant plus de flexibilité et des cadences de travail plus intenses. Le gouvernement et les patrons veulent nous faire cotiser aux fonds de pensions privés (assurances groupes et pensions individuelles) afin de garantir nos futures pensions. Il veulent ainsi briser la solidarité structurelle.

    Au sommet européen de Barcelone de mars 2002, la directive a été lancée de placer les fonds de pensions en bourse. Que va-t-il se passer au prochain crash boursier? L’épargne individuelle pour la pension n’est un système valable que pour une petite minorité qui doit encore prendre garde à ne pas être touchée par le chômage croissant.

    La ministre fédéral de l’Emploi Freya Van den Bossche (SP.a) a lancé une série d’idées pour miner le système des prépensions. Elle veut le limiter pour les entreprises «qui n’investissent pas assez pour la formation». Les travailleurs âgés victimes de restructurations seront-ils privés de prépensions parce leur patron n’a pas été prévoyant? C’est une façon de raboter les salaires et les traitements de fin de carrière qui sont en général plus élevés. Van den Bossche souhaite une extension du chômage partiel et plus de réglementation des fins de carrière à temps partiel. En bref: le gouvernement veut plus de flexibilité et une baisse des salaires, ou encore un retour au chômage au moyen de restructurations.

    Les organisations syndicales doivent s’opposer à la politique antisociale du gouvernement. Nous devons faire le choix politique que la bourgeoisie n’ose pas faire: pour une redistribution de la richesse produite au service de toute la population. La lutte ne pourra aboutir que dans le cadre d’une société socialiste.


    (1) Rapport annuel de la Banque nationale, 2003.

    (2) De Morgen, 11/9/2004.

    (3) Rapport annuel de la Banque nationale, 1995 et 2003.

    (4) Le Vieillissement et la politique gouvernementale en Belgique, site internet de Vandenbroucke (2004).

  • La politique néo-libérale repose sur du sable

    Elections du 13 juin

    Les élections ont signifié en Flandre une victoire pour la droite et surtout pour l’extrême droite, mais cette dernière gagne également du terrain à Bruxelles et en Wallonie. Ce sont de tristes nouvelles pour tous les gens de gauche qui voient les choses en termes de solidarité, d’égalité et de bien commun. La radicalisation de la droite a triomphé – notre peuple d’abord, nos entreprises surtout, moi d’abord, le reste après. Normalement cela devrait être une excellente nouvelle pour le patronat. La victoire de la droite lui laisse pourtant un arrière-goût amer. Le pays devient comme ingouvernable alors que le patronat désire actuellement un fort plan d’austérité.

    La coalition violette a néanmoins fait un bon calcul. En 2003 tous les partis de la coalition actuelle avaient gagné les élections fédérales avec brio. Le « renouveau », l’attention pour l’emballage, la mise en avant de ce qui en terme moderne est appelé « la perception » avait porté ses fruits. Les bureaux de communication faisaient merveille. Entre-temps, les partenaires de la coalition violette avaient plus que mouillé les verts dans le bain de la participation gouvernementale; ils les avaient presque noyés. Agalev disparaissait du parlement fédéral, Ecolo perdait plus de la moitié de ses élus. La coalition violette estimait avoir fait du bon boulot. Apporter un message positif diminue la pression sur les aspects négatifs, c’est le mode d’emploi de la coalition violette. La politique des gouvernements Verhofstadt I et II peut se résumer à ces quelques points: une politique néo-libérale de privatisations, de poursuite de la flexibilité, de baisse d’impôts pour le patronat. Cette politique a été atténuée par les revenus de la vente des biens collectifs comme les bâtiments et les entreprises publiques. Le Ministre du budget Vande Lanotte a encore pu, année après année, équilibrer les budgets par le bradage ahurissant des biens collectifs. Verhofstadt mène, a un rythme plus modéré, essentiellement la même politique que Balkenende aux Pays-Bas, Raffarin en France et les sociaux-démocrates Blair et Schröder en Grande-Bretagne et en Allemagne

    La pression du patronat pour la poursuite d’une politique libérale encore plus dure a cependant eu des effets. Il s’est avéré qu’en dépit de toutes les affirmations les impôts ne diminuaient pas sous Verhofstadt; la fameuse amnistie fiscale n’a été qu’un coup d’épée dans l’eau, la communauté internationale a rappelé la Belgique à l’ordre pour sa politique de mesures uniques destinées à maintenir la croissance. L’augmentation du nombre de chômeurs de 35.000 unités, soit 7.1 %, depuis mai 2003 constitue un douloureux écho à la promesse de Verhofstadt de créer 200.000 emplois. Pour redresser la situation, la coalition avait organisé les supers-conseils des ministres (les conclaves). Il en a résulté de nombreux cadeaux fiscaux pour le patronat mais également plus de contrôle des chômeurs, le FOREm et l’ORBEm devenant de véritables machine à suspendre du fait qu’ils sont désormais associés à ces contrôles. En outre, Frank Vandenbroucke a permis le retour de la journée des 10 heures en accord avec le secteur de la construction. Cela peut nous donner un avant-goût de ce qui nous attend après le 13 juin.

    La « perception » peut créer un sentiment illusoire de satisfaction pendant un certain temps, mais on finit tôt ou tard par être rattrapé par la réalité. La politique traditionnelle fustige le négativisme (dénonciation que « rien ne va » dans la société), l’anti-politisme sur lequel le Vlaams Blok construit son fond de commerce. Le Blok ne pourrait pourtant pas se repaître de ce négativisme sans que ce sentiment ne trouve une base matérielle quelque part. Celle-ci n’est pas difficile à trouver : il suffit de constater l’augmentation du chômage et de la pauvreté, l’augmentation de la durée du travail, l’allongement des listes d’attentes pour des logements sociaux et des institutions de santé, la flexibilité croissante du marché du travail, l’état des bâtiments scolaires, les licenciements à La Poste et à la SNCB pour préparer l’ouverture à la concurrence, etc…

    Contrairement à ce que certains espèrent et/ou affirment, la population n’est pas bête. Elle sait que les mesures prises seront drastiques pour ses conditions de travail et pour son niveau de vie. Elle sait également que ni les patrons ni les politiciens ne feront les frais de cette politique. Dans une telle situation il n’y a pas 36.000 solutions. La lutte collective devrait offrir une issue, mais avec le sommet de la FGTB qui, en la personne de Mia de Vits, s’est littéralement conduit en vassal du pouvoir gouvernemental, il semblait ne pas y avoir de solutions. S’en remettre au SP.a/Spirit pour empêcher une nouvelle détérioration n’était pas plus réaliste: les ministres SP.a sont les meilleurs gestionnaires que le patronat puisse imaginer. En Wallonie et à Bruxelles, le PS l’a emporté malgré sa participation gouvernementale et bien qu’il ne fasse qu’un avec la politique néo-libérale. Comme le PS se présente comme le seul frein aux mesures brutales d’austérité dans le gouvernement, il a pu être le seul parti de la coalition à enregistrer une forte avancée.

    Groen!. C’est avec une copie de la campagne de Tobback « le SP est nécessaire » qu’il a pu se rétablir spectaculairement de sa défaite de 2003. Vera Dua et Cie sont assez réalistes pour ne pas rempiler au gouvernement. Ce n’est pas le cas d’ECOLO qui souhaite une pariticipation malgré leur défaite des législatives en 2003 et malgré qu’ils n’aient pas su rétablir leurs position autant qu’ils le voulaient (ils perdent 11 sièges au parlement wallon et 7 sièges au parlement bruxellois). Une fois que l’on a gôuté au pouvoir, il est difficile de s’en passer! Si ils participent effectivement au gouvernement régional, ils auront fort à faire pour défendre leur positions dans des formations où ils auront le moins bon rapport de force. Groen! se rend compte qu’il lui serait fatal de participer à un gouvernement qui sera de toute façon fortement instable. Imagine-t-on pour autant que Groen! va organiser la résistance contre le pillage néo-libéral ? Groen! est contraint de rester dans l’opposition. Son plus grand concurrent, le SP.a/Spirit, est en position difficile. Groen! espère ainsi se refaire une santé avant de tenter à nouveau une participation gouvernementale.

    En bref : la résistance collective semble en rade. Dans ces circonstances, beaucoup de gens se tournent – dans l’espoir de ne pas devenir une victime – vers de fortes figures qui tirent profit de l’offensive antisociale. Dewinter et le Vlaams Blok s’en sont fait une spécialité. Dehaene également, avec sa mine bourrue et son profil de bûcheur acharné. Si Le cartel CD&V-NV-A devient bel et bien la plus grande formation, il doit avoir le triomphe modeste. En 1999, le CVP récoltait seul 30 sièges, la Volksunie 12. Aujourd’hui le cartel doit se satisfaire de 35 sièges, dont 6 sièges pour le partenaire NV-A. Pour former une majorité, il faut 63 sièges. Seule une coalition CD&V-NV-A Vlaams Blok permettrait d’avoir une majorité avec deux formations. Le Blok devrait cependant faire beaucoup de concessions pour que le sommet du CD&V et surtout Yves Leterme, son président, se résolvent à rompre le cordon sanitaire. Vu que Groen! a fait le choix de l’opposition – à moins que, mis sous la pression, il ne retourne sa veste – il ne reste comme option qu’une tripartite classique.

    Di Rupo a toute latitude de choisir entre le MR et le CDH. En guise de clin d’oeil vers le MOC (Mouvement Ouvrier Chrétien), de toute manière moins lié avec le CDH qu’en Flandre, une coalition rouge-romaine serait peut-être la meilleure option pour lui. Quoi qu’il en soit, le cartel CD&V-NVA est dans une position difficile pour manœuvrer dans les négociations communautaires comme la régionalisation d’une partie de la sécurité sociale et la scission de l’arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde. Un PS puissant va se positionner comme leader de la Communauté française. Il va argumenter que le gouvernement flamand veut imposer à la Communauté française une politique d’austérité antisociale. Si le PS est déjà d’accord avec une nouvelle réforme de l’état, il en exigera le prix fort dans les négociations. Avec de l’autre côté de la table une tripartite qui a comme seule opposition le Vlaams Blok et la petite fraction Groen!, Di Rupo sait que le gouvernement flamand ne dispose pas d’une assise solide. De plus, le patronat n’a pas non plus intérêt à voir s’installer une crise communautaire de longue durée.

    Quel que soit le gouvernement qui émergera, les résultats électoraux n’offrent pas de base stable à la bourgeoisie pour prendre les mesures d’austérité qu’elle aurait souhaitées. Sa seule consolation est qu’il n’y a pas un seul parti dans le(s) parlement(s) qui soit prêt à défendre les intérêts des travailleurs et de leurs familles. Le contrôle de la base par les appareils syndicaux n’est pourtant pas total. Et cela se voit encore plus dans les faibles résultats de Mia De Vits pour le SP.a aux élections européennes. Si les travailleurs descendent massivement dans la rue, ils pourront contrarier temporairement l’offensive néo-libérale. Cependant, tant que nous n’aurons pas de nouveau un grand parti des travailleurs, l’offensive de la bourgeoisie repartira de plus belle

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