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Turquie : Rapport de Paul Murphy
La solidarité est vitale
Paul Murphy, le député européen du Socialist Party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Irlande), s’est récemment rendu à Istanbul afin de voir de ses propres yeux les manifestations qui s’y déroulent. Dans son journal de bord, il aborde la réponse brutale du Premier Ministre turc.
Paul Murphy, député européen, Socialist Party (CIO-Irlande)
‘‘La confiance en soi est comme un virus’’ expliquait Eser Sandiki, une jeune professeure d’école et militante socialiste qui occupait la place Taksim vendredi soir. Ses mots ne sont pas seulement vrais sur la place Taksim, mais également à travers toute la Turquie dans laquelle le gouvernement autoritaire d’Erdogan est confronté à un soulèvement. Dans plus de 70 villes, des manifestations et des occupations de masses ont eu lieu, réunissant plus d’un million de personnes.
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Pour en savoir plus
- Turquie : Un mouvement de masse défie le gouvernement Erdogan
- NON au gouvernement Erdogan et NON à l’AKP, le parti du capital !
Meeting sur les mobilisations de masse en Turquie
Ce vendredi 14 juin 2013, à 19h, notre camarade Tanja Niemeier (collaboratrice de l’eurodéputé Paul Murphy) livrera un rapport de son voyage en Turquie, au cœur des mobilisations qui ébranlent le régime de l’AKP. RDV ce vendredi à l’ULg, place du XX août, salle Wittert (trajet fléché).
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En de nombreux endroits, comme place Taksim, les places sont entourées de barricades érigées par les manifestants avec des matériaux de construction et des voitures de police brulées pour se protéger de la police. A l’intérieur de ces barricades, des conseils de volontaires organisent des distributions de nourriture et d’eau, des garderies d’enfants, la sécurité et les premiers soins.
Aujourd’hui [le 9 juin, ndlt], alors que la place Taksim était déjà bondée de monde une heure après l’heure prévue pour une grande manifestation, des gens ont continué d’affluer de toutes les rues, certains estimant une foule de 300.000 personnes.
La réponse du Premier Ministre Erdogan a été brutale, faite d’attaques policières féroces contre les manifestants. La police a recouru aux gaz lacrymogènes et a brûlé des tentes de participants à l’occupation. Des policiers en civil s’en sont d’autre part pris à des manifestants à coups de couteaux et de gourdins. Selon l’estimation la plus récente de l’Association médicale turque, plus de 4000 personnes ont été blessées, un nombre à certainement revoir à la hausse. Trois personnes sont décédées jusqu’ici.
La violence physique a été justifiée par toute cette rhétorique qui a qualifié les manifestants de ‘‘capulcu’’ (pillard, ou vandale, en turc). En réponse à cela, sur les pancartes autour de la place, on pouvait lire ‘‘Nous sommes tous capulcu’’. Une chaine de télévision, ‘‘Capulcu TV’’ a été lancée sur le net. Erdogan a également attaqué les réseaux sociaux, décrivant Twitter comme une ‘‘menace pour la société’’.
La raison est claire – alors que six journaux turcs avaient exactement le même titre jeudi matin et que la NTV diffusait un documentaire sur les manchots lors de l’assaut policier sur la place Taksim – plusieurs vidéos de brutalité policières se sont propagées à travers la toile.
Le coup de grâce
L’étincelle qui a provoqué cette révolte de masse fut l’arrivée de bulldozers dans le parc Gezi d’Istanbul, conformément à un plan qui prévoyait de remplacer l’un des rares espaces verts et publics du centre-ville par un centre commercial. Ce fut simplement ‘‘la goutte qui a fait déborder le vase’’, comme l’a expliqué Mucella Yapici, la Secrétaire de ‘‘Solidarité Taksim’’, l’une des dirigeantes de la Chambre des Architectes à Istanbul. Mucella a dénoncé ‘‘le pillage de la ville’’ de ces dernières années – la destruction d’espaces publics, l’expulsion de la population ouvrière de leurs quartiers et l’embourgeoisement de ces zones, ainsi que des projets de prestige comme la planification d’un troisième aéroport et d’un troisième pont massif.
Ce processus conduit à l’enrichissement d’un secteur de la construction très proche du parti au pouvoir, l’AKP. Cette réorganisation de la ville a également été considérée comme une attaque contre les bâtiments historiques représentant les traditions laïques de Turquie.
Un autre facteur est l’importance historique de la place Taksim pour le mouvement des travailleurs. Lors du 1er mai 1977, 34 travailleurs qui célébraient le 1er Mai furent tués par des tirs de polices sur la foule. Cette année, la permission pour les manifestations du 1er mai sur la place Taksim a été refusée. Ces éléments, combinés à la nature autoritaire du gouvernement d’Erdogan, notamment ses tentatives d’imposer des restrictions conservatrices sur la vente d’alcool et ses limitations de disponibilité de pilules contraceptives, ont installé le terreau pour une explosion sociale.
Manifestations anti-gouvernement
Les manifestants se sont réunis autours de 5 revendications :
- Non à la destruction du parc Gezi
- Le retrait des chefs de police et du Ministre de l’Intérieur impliqués dans la brutale répression policières
- Une interdiction de l’utilisation de gaz lacrymogènes
- Aucune restriction dans l’utilisation des espaces publiques pour les manifestants
- La libération de tous ceux qui ont été arrêtés durant ces manifestations.
Malgré ces revendications officielles, le slogan le plus populaire, qui résonne 24h sur 24 et qui surgit spontanément même au-delà de la place Taksim, est ‘‘Tayyip Istifa’’ (Tayyip [Erdogan] démissionne). Il est suivi par le chant qui entraine des milliers de personnes à sauter : ‘‘si tu ne sautes pas, tu supportes Erdogan’’. C’est maintenant un mouvement anti-gouvernement qui lutte pour des droits démocratiques et la liberté.
Le mouvement de protestation a entrainé des centaines de milliers de personnes qui n’avaient encore jamais été politiquement actives avant ces actions. Un sondage des manifestants de Taksim montre que 57% n’avaient jamais participé à une manifestation avant et que 70% ne soutenaient pas de parti politique en particulier. Avec ces gens précédemment inactifs, le mouvement a également réuni des alliés hors du commun. Des groupes de supporters de football de trois équipes d’Istanbul – Besiktas, Fenerbahce et Galatasaray – réputés pour leurs affrontements entre eux, ont rejoint les forces de l’opposition pour les aider à repousser la police.
Ils sont rejoints par des militants des partis et des syndicats de gauche qui ont une grande expérience de la nature répressive de l’État turc. Les militants féministes et LGBT sont des forces visibles et s’opposent notamment aux chants sexistes de certaines parties des manifestants.
Place Taksim, des drapeaux du dirigeant kurde Abdullah Öcalan flottent aux côtés des drapeaux nationalistes turcs. L’expérience de la répression policière et de la censure médiatique a ouvert les yeux à certains militants turcs à propos de l’oppression des kurdes.
Pour le moment, la police a renoncé à ses tentatives de reprendre la place Taksim [cet article date du 9 juin, ndt], mais les violences massives continuent à Ankara, partout en Turquie et dans les banlieues d’Istanbul. Samedi soir, en compagnie des journalistes du Rabble, Reuben et Gielty et des militants turcs, je me suis rendu dans un quartier ouvrier appelé Gazi dans lequel vit majoritairement des Kurdes et des Alévis. Là-bas, j’ai été témoin d’une énorme bataille de rue impliquant près de 10.000 personnes issues de la classe ouvrière contre la police. Les gaz lacrymogènes se mélangeaient avec la fumée des feux de joie pendant que les autopompes de la police nous tiraient dessus. Quelques jours avant, Turan Akbas, âgé de 19 ans, a reçu une bombe de gaz lacrymogène dans la tête.
Lui, ainsi que 9 autres personnes victimes de blessures similaires, est actuellement dans une situation critique à l’hôpital. Pour les résidents de Gazi et beaucoup d’autres, ce soulèvement est une réaction aux décennies de répression et de brutalité par la police et l’absence de droits démocratiques.
Et ensuite ?
Ce qu’il se passera par la suite est incertain. Erdogan a choisit une ligne agressive, malgré que d’autres voies de l’establishment adoptent des discours plus conciliateurs. Le meeting de samedi des dirigeants du parti au pouvoir, l’AKP, a exclu des élections anticipées et a décidé d’organiser des grands rassemblements de ses partisans samedi et dimanche prochain. La place Taksim est en pleine effervescence suite à des rumeurs selon lesquelles la police va tenter de reprendre la place lundi.
S’ils le font, ils devront faire face à une résistance extrêmement déterminée. Ayant senti leur puissance, la classe ouvrière turque et les jeunes ne sont pas près de renoncer à leur contrôle des espaces publiques sans se battre. Beaucoup étudient les leçons des révolutions égyptienne et tunisienne, cherchant à éviter les déboires rencontrés là-bas.
Le génie est sorti de la bouteille pour le gouvernement Erdogan – ce soulèvement a le potentiel de devenir un mouvement révolutionnaire capable de le renverser et de poser les possibilités d’un changement radical démocratique et socialiste. Les actions de solidarité sont aujourd’hui indispensables pour montrer que les manifestants ne sont pas les seuls et que le monde a les yeux tournés vers eux.
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Ouverture des Jeux Olympiques de Londres
Les Jeux Olympiques de Londres commencent avec la cérémonie d’ouverture de ce vendredi 27 juillet, dont l’audience attendue est estimée à 1 milliard de personnes à travers le monde. Il ne sera pas question que de sport, loin de là. L’évènement est également marqué par une commercialisation tout bonnement crasse ainsi que par une augmentation de la répression d’Etat.
Par Manny Thain, à partir d’un article de l’hebdomadaire Socialism Today (magazine du Socialist Party d’Angleterre et du Pays de Galles)
Tout a commence par un mensonge : les jeux devaient coûter £2,4 milliards de livres sterlings (un peu plus de 3 milliards d’euros). Ce chiffre n’a jamais été crédible. Il n’incluait par exemple pas la TVA (de 20%, soit 480.000 livres, 615.000 euros) ou les dépenses de sécurité (un milliard de livres, soit 1,3 milliard d’euros). En rajoutant cela, on parvenait à 3,9 milliards de livres (5 milliards d’euros). Le budget final a toutefois réussi à atteindre la somme astronomique de 9,3 milliards de livres (12 milliards d’euros).
Il s’agit d’une véritable arnaque, une escroquerie massive pour la classe ouvrière et la classe moyenne, sur les épaules desquelles reposera l’écrasante majorité de ce coût avec les taxes directes et indirectes. Le gouvernement (grâce aux contribuables) a directement pris en charge 6,2 milliards de livres (8 milliards d’euros), le reste étant pour la plus large part issu de la loterie (c’est-à-dire une taxe indirecte sur les plus pauvres). Malgré les différentes déclarations qui avaient assuré la participation du secteur privé aux divers projets de construction, seuls 2% (!) du budget des Jeux Olympiques sont en réalité issus de fonds privés.
Le Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques d’été de 2012 à Londres (Locog, London Organising Committee of the Olympic Games and Paralympic Games) – le comité chargé de l’organisation, de la planification, du financement et du déroulement des Jeux olympiques d’été de 2012 et des Jeux paralympiques d’été de 2012 – a levé 2,1 milliards de livres supplémentaires (2,7 milliards d’euros), dont deux tiers proviennent du sponsoring assuré par le monde des affaires et du Grand Capital. Le Locog a reçu une contribution du Comité Olympique International (CIO), le reste provient de la vente de tiquets et du merchandising, c’est-à-dire de nos poches, encore une fois. Le Locog a à sa tête Lord Sebastian Coe, ancien athlète de haut niveau, ancien député conservateur, ambassadeur pour la multinationale Nike et multimillionnaire.
Les Sponsors
Les principaux sponsors du Comité International Olympique ont chacun payé 60 millions de livres (77 millions d’euros) pour des contrats de 10 ans. Comme il en va de soi sous le système capitaliste, ils ont reçu en échange des pouvoirs proprement colossaux. Il est ainsi interdit à ceux qui ne sont pas sponsors officiels d’utiliser le mot ‘Olympique’, le symbole des 5 anneaux ou encore la devise des Jeux Olympiques. C’est assez ironique dans le cadre d’un évènement basé sur la compétition…
Afin de protéger les droits des compagnies de diffusion, les spectateurs ne sont pas autorisés de publier sur YouTube ou sur les médias sociaux des images des compétitions ou de l’intérieur du village olympique. Twitter bloquera tous les commentaries qui utilisent des termes comme ‘‘#London2012’’ et même les athlètes eux-mêmes n’ont pas le droit de publier des vidéos ou des commentaires audio de leurs propres performances ! Il faudra encore voir avec quelle rigueur seront appliqués ces lois, mais les indications reçues avant le commencement de ces Jeux donnent clairement l’impression que les autorités ne vont pas rigoler.
Le journal ‘‘The Guardian’’ a reporté que sur les 80.000 sièges disponibles pour la finale du 100m hommes, seuls 29.000 (36%) iront au public. Pour les finales du vélodrome, 2.500 places iront au public sur 6.000. Il est toutefois encore possible d’avoir un ticket en passant par les réseaux officieux des 54 pays qui seront représentés à ces jeux, source d’un gigantesque marché noir. Le Comité International Olympique a bien été forcé de dire qu’il y aurait des enquêtes à ce sujet. Cela illustre le caractère pourri de l’administration des Jeux, dirigée par une petite clique à son sommet, avec des méthodes de clique élitiste.
La ‘‘famille Olympique’’
Le traitement préférentiel des 70.000 membres de la ‘‘famille Olympique’’ – représentants officiels, athlètes, médias, etc. – ne s’arrête pas là.
C’est une chose d’assurer que les athlètes soient bien traités. Eux, au moins, ont vraiment un rôle à jouer dans ces Jeux. Mais c’en est une autre de dérouler le tapis rouge pour la horde des bureaucrates et dirigeants politiques, dont des représentants de régimes parmi les plus oppressifs au monde. Il y aura au moins une centaine de journées de grosses perturbations du trafic dans les rues de Londres, puisque de larges bandes sont exclusivement réservées à l’usage des Jeux.
On pourrait croire que l’organisation des Jeux aurait été une bonne base pour relancer l’activité sportive dans le pays, mais il n’en est rien. Le gouvernement avait pour objectif d’augmenter le nombre de personnes faisant régulièrement du sport de un million d’ici 2013, mais ce but a été abandonné. Le nombre de nageurs réguliers pour les années 2010-11 représente une chute de 435.000 par rapport à 2007-08 (les données sont similaires pour le tennis, le football et le rugby). Parmi les jeunes âgés de 16 à 19 ans, le nombre de sportifs a diminué de plus de 100.000 personnes sur ce même laps de temps (pour ne plus représenter que 825.900 jeunes à travers tout le Royaume-Uni).
La coalition au pouvoir (une alliance des conservateurs et des libéraux-démocrates) a repris le flambeau des mains du parti travailliste en ce qui concerne la destruction de la politique sportive dans les écoles. Depuis 2004, le budget pour les activités scolaires sportives a diminué de 216 millions de livres (277 millions d’euros) jusqu’à 35 millions (45 millions d’euros). Environ 3.400 entraîneurs ont été licenciés dans le pays, et les subventions de 1.300 terrains ont été supprimées.
Le gouvernement a également supprimé des facilités pour les personnes connaissant des limitations (handicap mental ou physique), contrairement aux promesses qui parlaient d’augmenter la facilité d’accès du sports pour ces couches spécifiques. Pour l’instant, 18% des adultes handicapés ont des activités physiques régulières de plus de 30 minutes par semaine, contre 38% de la population adulte globale.
Des jeux éthiques ?
Le ministère britannique du travail et des pensions a signé un contrat avec la société AtoS Healthcare, filiale d’AtoS Consulting, pour évaluer les capacités de travail de personnes handicapées bénéficiant d’allocations d’invalidité. Ces évaluations sont très controversées. Il est notamment reproché à cette entreprise d’avoir conclu à la capacité de travailler de malades en phase terminale ou de personnes lourdement handicapées. Des milliers de personnes se sont retrouvées sans moyen à cause de cette Enterprise qui est un sponsor majeur des Jeux Paralympiques. Ces Jeux de Londres étaient censés être les plus éthiques jamais organisés. Le journal ‘‘The Independent’’ (du 6 mai 2012) a toutefois rapporté d’autres faits qui entachent gravement ces Jeux.
Le journal cite notamment divers exemples de mauvais traitements dans des entreprises des Philippines et de Chine travaillant pour Adidas ou encore dans les usines de Next au sein de la zone de libre-échange du Sri Lanka. Aucune de ces entreprises n’autorise d’organisation syndicale. Dow Chemicals est un sponsor officiel des Jeux Olympiques de Londres (et a payé 63 millions de livres). Dow continue de refuser de reconnaître la moindre responsabilité dans la catastrophe de Bhopal (en Inde) en 1984. Cette catastrophe avait coûté la vie à 20.000 personnes et en avait blessé des centaines de milliers. Des procès intenté à la multinationale par des victimes sont toujours en cours aux USA et en Inde. Le Parc Olympique a également été l’objet de nombreuses protestations de la part de travailleurs du secteur de la construction, car les syndicats étaient dans les faits écartés du site.
Un des héritages de ces Jeux sera l’accroissement des pouvoirs de répression de l’Etat. L’opération de sécurité derrière ces Jeux a atteint une ampleur jamais vue depuis la fin de la seconde guerre mondiale dans le Royaume-Uni. Au côté des 13.500 soldats et des milliers d’officiers de police se trouvent également 48.000 agents de sécurité privés. La société G4S en a entraîné 23.700 pour un contrat de 284 millions de livres (365 millions d’euros). Les Jeux vont servir à accroître la privatisation des services de sécurité, ce qui aura des conséquences désastreuses pour les collectivités locales.
Le soutien public était considéré comme important pour accordé les divers contrats de construction. Une commission de l’organisation des jeux présidée (l’Olympic Bidding Committee, OBC), preside par Lord Coe, a donc demandé l’implication du Telco (The East London Communities Organisation, l’Organisation des communautés de l’est de Londres, devenue depuis ‘‘London Citizens’’). Regroupant environ 80 groupes locaux et groupes religieux, Telco avait un certain poids. L’association a dressé un accord éthique qui impliquait la construction de logements abordables pour la population, d’infrastructures éducatives et de santé, ainsi que la création d’emplois au salaire en vigueur à Londres. L’accord a été signé en 2004 par Lord Coe, Ken Livingstone (qui était maire de Londres à l’époque) et par le travailliste John Biggs, à la tête de l’agence de développement londonienne.
Mais, en 2006, une nouvelle structure a été crée : l’Olympic Delivery Authority (ODA), qui a pour charge de s’occuper de se qui adviendra après les Jeux Olympiques. L’ODA a refusé de rencontré le Telco et de reconnaître l’accord conclu sous le prétexte que l’ODA n’existait pas à sa signature !
La collectivité, trahie par l’organisation des Jeux, a par contre dû passer à la caisse pour renflouer les projets immobiliers liés aux Jeux suite au déclenchement de la crise économique. Alors que le gouvernement travailliste de l’époque préparait 50 milliards de livres (64 milliards d’euros) pour partiellement nationaliser les banques, 5,9 milliards de livres (7,6 milliards d’euros) d’argent public ont été injectés dans le projet olympique afin de le renflouer. Encore une fois, l’argent des contribuables a été utilisé pour aider des compagnies de construction parmi les plus riches au monde.
Ce Parc Olympique n’est même pas destine à être un parc public après la tenue des Jeux. Une société a été créée, l’Olympic Park Legacy Company (OPLC), qui gèrera ce parc et a déjà prévu de revendre différentes parties à plusieurs consortium, dont un dirigé par la famille royale du Qatar.
Encore une fois au bénéfice du privé
Cet OPLC devra être remplacé par la London Legacy Development Corporation (LLDC), dont les pouvoirs seront bien plus nombreux et étendus. Cela signifie qu’une bonne partie de l’est de Londres sera gérée par le privé, hors de tout contrôle des autorités locales. Il est officiellement question de créer 11.000 logements sur le terrain du Parc Olympique, dont 35% sont supposés être ‘abordables’. Comment cela se matérialisera-t-il ? Rien n’est moins clair. Le gouvernement a par ailleurs décidé en avril d’autoriser que le loyer de ces ‘logements sociaux’ pourraient atteindre 80% du loyer moyen sur le marché privé. Cette augmentation du loyer est énorme.
Dans cette région de l’est de Londres se trouve le quartier de Newham, où près de la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté. 70% des enfants y sont membres de familles à faibles revenus. 32.000 personnes sont sur la liste d’attente pour obtenir un logement social. Ces gens n’auront d’autre choix que de se tourner vers le secteur privé. Mais les nouveaux logements qui seront construits par les entreprises privées sur les terrains actuellement occupés par les Jeux seront hors de portées de tous ces gens.
Les Jeux Olympiques et Paralympiques devraient être l’occasion de célébrer la vitesse, la force, l’agilité et la vitesse d’esprit. Cela devrait être une gigantesque expérience collective réunissant des athlètes et des (télé)spectateurs de partout à travers le monde. Mais le système capitaliste ne réfléchit qu’en termes de profit à court terme. Pour les multinationales, ces Jeux ne sont qu’une immense opportunité d’amasser encore plus d’argent, avec la complicité de cet establishment politique pourri.
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En Bref…
Cette rubrique est destinée à mettre en avant différents faits, citations, vidéos ou petites nouvelles particulièrement frappantes.
Quatre délégués virés en cinq années…
Cette semaine, une action à été menée à Pauwels Sauzen, à Oelegem. Le personnel est spontanément parti en grève suite à une nouvelle provocation de la direction, qui a licencié un délégué syndical. Il s’agit du quatrième cas en cinq ans de temps. On ne peut pas dire que Pauwels Sauzen respecte le travail syndical… Le lendemain, quelques travailleurs ont encore été licenciés, peut-être pour avoir participé à l’action. Finalement, un accord a été conclu, selon lequel les travailleurs ne seront pas réintégrés, mais ces derniers recevront des compensations financières. 73% des travailleurs ont signé pour cet accord.
‘Jobs, hope and cash’
Lu sur Twitter: “10 years ago we had Steve Jobs, Bob Hope and Johnny Cash – Now we have no Jobs, no Hope and no Cash” (traduction: il y a dix ans, nous avions Steve Jobs, Bob Hope et Johnny Cash – Maintenant nous n’avons plus d’emploi, plus d’espoir, et plus d’argent). Au-delà de l’humour, et à contre-courant des déclarations élogieuses qui font suite au décès de Steve Jobs, nous voulons aussi rappeler que Apple est surtout connu en Chine pour y profiter des très basses conditions de travail et de salaire…
Shell a payé la dictature militaire au Nigéria pour intervenir contre des protestations
La multinationale pétrolière Shell a donné beaucoup d’argent dans les années 1990 à la dictature militaire en place au Nigéria pour réprimer des protestations. Au début des années ’90, la résistance s’est développée contre la manière dont Shell gérait ses affaires dans le pays. Il y a eu des milliers de morts. Un des portes-parole des militants, l’écrivain Ken Saro-Wiwa, avait été abattu en 1995. Maintenant, des documents prouvent que Shell a soutenu le régime militaire afin de l’aider à réprimer les protestations.
Occupy Wall Street. Le New York Times change de version à la vitesse de l’éclair
Les médias sont parfois très rapides pour condamner des manifestants pacifiques. Et si cela ne se fait pas assez vite, on peut toujours changer de version en espérant que personne ne se souvienne de la première. Des militants ont fait des captures d’écran du site du New York Times. Dans la première version, il est dit que les policiers ont procédé à des arrestations après avoir autorisé les manifestants à aller sur le pont de Brooklyn. Dans la seconde version, il n’est plus question du fait que les policiers sont revenus sur cette autorisation…
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En bref…
Cette rubrique est destinée à mettre en avant différents faits, citations ou petites nouvelles particulièrement frappantes.
Impossible de vivre avec 3000 euros par mois…
Jean Michel Javaux, coprésident d’ECOLO et bourgmestre d’Amay notamment, a été légèrement attaqué au sujet du cumul, thème particulièrement cher à son parti. Il s’est défendu en disant sur Twitter : "c pas un cumul…Vous pouvez ergoter mais bourgmestre d’une commune de -de 15000 habitants (et aucun autre mandat electif) oblige tous les échevins et exécutifs à avoir un boulot." Ce qu’il faut savoir, c’est que le salaire brut des bourgmestres a été revalorisé en 2011. Actuellement, il s’agit de 3.000 euros bruts par mois. Pour une ville comme Mons, il s’agit de 6.000 euros. ce qu’affirme donc en substance Mr Javaux, c’est donc qu’il n’est pas possible de vivre avec 3.000 euros par mois. Sur quelle planète vit-il? Très nombreux sont les travailleurs qui ne disposent pas de cela, et de fort loin d’ailleurs… Peut-être que nous pourrons à l’avenir voir ECOLO participer activement aux luttes pour de meilleurs salaires avec l’objectif de permettre à chacun d’avoir plus de 3.000 euros ?
De gauche, ECOLO?
Ce n’est pas la semaine de Javaux… WikiLeaks a publié un document qui est un rapport d’une discussion “confidentielle” entre le chef de file des ‘‘verts’’ et l’ambassadeur des Etats-Unis. Ce texte est limpide quant aux efforts effectués par l’homme fort d’ECOLO pour plaire à l’establishment, une rhétorique tout autre que celle qu’il utilise vers ses électeurs ou la base du parti… Morceaux choisis : Javaux aurait précisé que son parti n’est pas de gauche (Ecolo ‘‘bousculant les frontières entre les classes.’’) et aurait aussi déclaré que des militants sont issus de riches familles notamment liées à RTL ou Umicore (‘‘Il a un nombre étonnant de supporters clés parmi les riches familles industrielles belges, a-t-il expliqué.’’ou encore ‘‘Il explique que certains des militants Ecolo les plus importants viennent des familles riches qui contrôlent de grandes compagnies en Belgique, notamment RTL (une chaîne de télévision privée) et Umicore (un groupe chimique)’’). Javaux aurait aussi positivement parlé de l’implication de la Belgique dans les opérations militaires en Afghanistan (tout en admettant que ce sujet est sensible, surtout parmi les immigrés qui votent pour ECOLO) et aurait déclaré qu’il est important de travailler avec l’OTAN et l’ONU. Les centrales nucléaires pourraient aussi rester ouvertes plus longtemps. L’ambassadeur fait aussi remarquer que Javaux slalome entre les partis traditionnels et qu’il ‘‘ est bien possible que les verts créent la surprise en Wallonie en poussant des réformes qui ne sont pas nécessairement appréciées à gauche ou au centre.’’
Ce système est littéralement malade
165 millions de personnes en Europe sont atteintes de troubles psychiatriques ou neurologiques plus ou moins graves. C’est le constat auquel est arrivé le Collège européen de neuropsychopharmacologie après une étude réalisée sur 500 millions de personnes issues des 27 pays de l’Union Européenne. Un expert en santé mentale due l’Organisation Mondiale de la Santé a déclaré que ‘‘c’est bun indicateur du stress de notre société, pas forcément de troubles psychiatriques’’. L’Etat de la santé mentale dans notre pays est lui-aussi préoccupant. En 2009, 263 millions de doses journalières d’antidépresseurs ont été vendues. Cette année-là, on estime qu’un Belge sur dix a pris des antidépresseurs, soit 1,1 million de personnes. Environ 5% de la population du pays est aux prises avec une lourde dépression.
‘‘Le pire de la crise de l’euro est encore à venir’’
Wolfgang Munchau du journal Financial Times ne fait pas dans la dentelle. ‘‘Je m’attends de ce fait à ce que la récession frappe la zone euro de plein fouet, et sans défense. Lorsque cela arrivera, la crise de l’eurozone ne sera pas belle à voir.’’ Pourquoi ? Il explique que chaque pays de la zone euro oublie qu’il fait partie d’un ensemble, et que ses actions ont un impact sur cet ensemble. Il se comporte comme une petite économie ouverte. Or, les plans de sauvetage ont besoin de la croissance pour jouer à plein. Celui de la Grèce, qui était déjà problématique au moment de sa rédaction, est compromis par la récession du pays. La stratégie de recapitalisation des banques est en train de s’effondrer avec le ralentissement économique. Cet été, la croissance semble s’être figée dans les pays de l’eurozone. Cela fait deux mois que les prêts consentis au secteur privé sont en berne. Les prévisions pour l’activité manufacturière sont en recul. Il critique aussi sévèrement les plans d’austérité de la France, l’Espagne, l’Italie, la Grèce, le Portugal et l’Irlande, qui retentissent sur l’ensemble de la zone euro.
Les dirigeants britanniques du Parti travailliste veulent être bien clairs: ils n’aiment pas les grèves
Que faire en tant que dirigeant politique d’un parti d’opposition sensé être auprès des travailleurs lors d’une interview concernant une grève des fonctionnaires si quand on ne soutient pas du tout cette grève ? On répète la même chose à chaque question…
Entre amis
Fin juin 2011, Filip Dewinter, porte-parole du Vlaams Belang, a participé à une réunion de la Lega Nord à Pontida, près de Bergamo. Il y a notamment rencontré Francesco Speroni (à l’extrême droite de la photo). Un mois plus tard, ce même Speroni expliquait que Breivik n’avait fait que défendre la civilisation occidentale avec son massacre…
Rions un peu avec les riches (en anglais)
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Libye: le mouvement de masse se heurte à une féroce répression
En Libye, le mouvement insurrectionnel des masses, lequel balaye actuellement le Maghreb et le Moyen Orient, s’est heurté à une répression d’une férocité inégalée depuis le début du raz-de-marée révolutionnaire. Néanmoins, la survie du régime semble de plus en plus menacée, avec l’Est du pays aux mains de la rébellion et de nombreuses villes dans l’Ouest en proie à des combats entre les masses insurgées et les sbires du régime. Non seulement l’armée s’est-elle retirée d’une grande partie du pays mais de nombreuses unités on rejoint la rébellion.
Par Christian (Louvain)
Cette décomposition de l’appareil d’Etat s’est également manifestée sous forme de défections de diplomates et d’autres éléments proches du pouvoir dont même des ministres et le chef de protocole du dictateur. Alors que ces individus professent être horrifiés par une répression excessive, il est probable que bon nombre d’entre eux sont surtout intéressés pour sauver leur peau et peut-être même leur carrière. Après tout, la Tunisie comme l’Égypte ne sont-ils pas toujours largement dominés par des individus appartenant a la clique des tyrans déchus?
Dans la même veine, les dirigeants occidentaux, lesquels avaient redécouvert le régime de Kahdafi comme un partenaire respectable avec lequel faire d’excellentes affaires, se sont longtemps contentés de vagues déclarations dans l’esprit hypocrite qui leur est propre. Certains, comme Berlusconi, ont tout de même étés incapables de contenir leur désarrois devant le possible effondrement prochain d’une régime ami. L’Italie est après tout le pays impérialiste qui risque de perdre le plus à cause des développements actuels non seulement en ce qui concerne l’approvisionnement en pétrole et la perte d’investissements mais également en ce qui concerne une possible vague de refugiés politiques et économiques (jusqu’a 300.000 selon certaines estimations) qui risque de déferler sur ses côtes dans un avenir proche. De surcroit, on peut se permettre de supposer que Berlusconi, étant donné la délicatesse de sa propre situation, ait de réelles sympathies avec d’autres leaders autoritaires et kleptocratiques dont le pouvoir est menacé.
Malheureusement il ne faut pas uniquement chercher parmi les classes dominantes des pays impérialistes pour rencontrer des sympathies envers le régime libyen. En effet, c’est parmi la "gauche" en Amérique Latine que Kadhafi peut également compter sur un certain nombre de sympathisants. Pour cela, il faut chercher l’explication dans l’histoire de la décolonisation et dans la nature même de cette "gauche" latino américaine. Il faut se rappeler que durant la décolonisation et jusqu’a l’effondrement du stalinisme en Union Soviétique, de nombreux régimes bourgeois dans les pays néocoloniaux se disaient socialistes et nationalisèrent, du moins une partie de leur économie.
Cela fut notamment le cas sous Habib Bourguiba, le prédécesseur de Ben Ali. C’est ainsi que le RCD, l’ancien partis de Bourguiba comme de Ben Ali, aujourd’hui du moins officiellement dissous, faisait partie de la deuxième internationale, l’internationale qui regroupe les partis sociaux-démocrates comme le PS. Cela n’a bien évidement pas empêché le régime de mener une politique de réformes néolibérales ces dernières décennies (les partis sociaux-démocrates dans les pays plus démocratiques ont fait de même) ou à une petite clique autour du président de s’enrichir énormément.
Contrairement au régime tunisiens très proche des pays impérialistes, Kadhafi a longtemps joué le rôle du leader anti-impérialiste. Durant les années ’70, prônant un socialisme panarabe, il a nationalisé l’industrie pétrolière, principale source de richesse du pays. En effet, durant ses premières années aux pouvoir, il a essayé d’imiter la politique bonapartiste de Nasser en Egypte, son idole. Ce cachant derrière une rhétorique anti-impérialiste, le colonel a également cherché à assouvir sa soif de pouvoir et d’auto-affirmation à travers des actions terroristes et en se jetant dans des aventures militaires un peu partout en Afrique. Enfin, aux prises à l’isolement et à des sanctions économiques, le régime a cherché à se réconcilier avec les pays impérialistes. Mettant un terme à ses aventures encombrantes, la Libye a pu recevoir des investissements étrangers, quelque chose qui a permis à la bourgeoise internationale comme à l’élite proche au pouvoir libyen de se remplir les poches à volonté.
Les sympathies que portent les régimes de "gauche" en Amérique Latine pour le dictateur libyen ne sont pas surprenantes, mais risquent d’être utilisées pour discréditer les idées du socialisme. Alors que le régime libyen lançait des rais aériens et des mercenaires contre sa propre population, un fonctionnaire européen a pu prétendre que Kadhafi avait fuit au Venezuela. Bien que rapidement démentie, cette rumeur démontre comment les alliances politiques de Chavez peuvent être utilisées par l’impérialisme et par la propagande bourgeoise.
Bien que le gouvernement vénézuéliens ait condamné la violence en Libye, une déclaration fort ambigüe faite par Chavez sur Twitter "Viva la Libye et son indépendance! Kadhafi fait face à une guerre civile!!" laisse encore bien des doutes sur ses sympathies. Dans ses articles, le Comité pour une Iinternationale Ouvrière avait déjà critiqué les bonnes relations entretenues entre Chavez et des dictateurs comme Ahmadinejad et Kadhafi. Pour de vrais marxistes, la politique ne peut pas se résumer à "l’ennemi de mon ennemi est mon ami", il faut toujours tenir compte des préjugés qui existent encore contre le socialisme à cause des crimes du stalinisme.
Bien qu’il ne soit pas à nous de créer des illusions dans la démocratie bourgeoise, s’allier à des dictateurs qui prétendent être "anti-impérialistes" est une trahison des intérêts de la classe ouvrière. Il n’est pas surprenant non plus qu’Ortega, après sa trahison ignominieuse envers la révolution nicaraguayenne (et ayant reçu des aides économiques de la Libye) ait déclaré son intention de supporter Kadhafi jusqu’a la fin dans la "grande lutte" que celui-ci mène pour son pays. Fidel Castro a quant à lui conseillé dans son article de ne pas juger Kadhafi trop vite et a suggéré que les États-Unis pourraient envahir la Libye d’un moment à l’autre. Une telle déclaration fait preuve d’une sorte de pragmatisme étranger à un vrai socialiste révolutionnaire. Ceci n’est en rien surprenant si on se souvient du silence de Castro lors du massacre de Tlatelolco en 1968 et des autres mouvements de masses de cette même année, sans parler de la ligne stalinienne prise envers les événements de Prague cette même année.
Bien que la survie du régime de Kadhafi est aujourd’hui fortement mise en doute, la situation en Libye reste encore très incertaine et plus difficile à analyser que les développements dans les pays voisins comme la Tunisie ou l’Égypte, faute de journalistes sur place. Le rôle que la classe ouvrière y jouera est impossible à prévoir. Apparemment, l’activité économique est largement paralysée à Tripolis mais non pas par des grèves mais par le fait que la majorité des personnes qui y vivent craint de sortir de leur maison. Dans l’Est du pays, des comités ont apparemment fait leur apparition pour y gérer la situation, mais nul indication n’existe sur la composition de ceux-ci.
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Egypte : Le régime de Mubarak ébranlé par les plus fortes manifestations depuis 30 années
“La Tunisie est la solution”
Ces manifestations ont pris place le 25 janvier, le Jour de la Police, un jour férié national commémorant la lutte de la police d’Ismailia contre l’occupation britannique en 1952. Aujourd’hui, les forces de police de Mubarak sont directement à l’opposé d’un mouvement de libération! Elles sont utilisées pour réprimer violemment les travailleurs et les jeunes qui veulent manifester leur colère contre une élite corrompue et fabuleusement richissime.
David Johnson, Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles)
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Plus d’infos:
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- Message de solidarité de Joe Higgins, député européen du CIO
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Ceux qui ont appelé à manifesté ont directement été inspirés par le magnifique mouvement des masses tunisiennes. On retrouve parmi ces initiateurs le ‘Mouvement de jeunes du 6 avril’ et le groupe facebook ‘Nous sommes tous des Khaled Saeid’, du nom du jeune qui a été tué par la police à Alexandrie en 2010 après avoir dénoncé la corruption qui y règne.
On estime à 15.000 le nombre de personnes qui ont pris part aux mobilisations dans la capitale, Le Caire, avec des départs de différents endroits de la ville convergeant vers la place Tahrir. Des centaines de manifestants ont brisé les cordons de sécurité et ont été rejoints par des passants, y compris des familles avec leurs enfants. Sur les banderoles, on pouvait notamment lire en plusieurs endroits “La Tunisie est la solution”. D’autres appelaient à la chute du régime égyptien et à la démission du Premier Ministre. Des affiches montrant Hosni Mubarak et son fils détesté, Gamal, ont été arrachées avec colère.
Dans un premier temps, la police ne semblait pas trop savoir comment répondre à un tel nombre de protestataires, dépassant très largement les quelques centaines qui participent habituellement à ce genre de mobilisation. Par la suite, ils ont recouru à des cannons à eaux ainsi qu’à des gaz lacrymogènes contre les manifestants, ces derniers chargeant une autopompe et ouvrant la porte du conducteur pour le tirer hors du véhicule. La jeunesse s’est montrée particulièrement brave dans les confrontations avec la police, tenant leurs positions et repoussant la police et de nombreuses occasions.
Des rapports ont également fait état de luttes entre manifestants et forces de police du district du Caire de Mattariya. Quelques 15.000 manifestants ont occupé les rues de Kafr El-Sheikh, dans le nord du pays, 2.000 à al-Mahalla al-Kubra (où une grande grève s’était déroulée en 2006). Plus de manifestants étaient présents à Alexandrie, Dar El-Salam, Boulaq, Maadi, Ard El-Lewa et Imbaba. Au Sinai, la route vers l’aéroport de Al-Goura à Rafah, ainsi que la route de Al-Mahdiya, ont été bloquées avec des voitures et des pneus enflammés. A Suez, deux manifestants ont été tués par la police.
De précédentes protestations initiées par Facebook et des groupes de jeunes le 6 avril 2009 et 2010 avaient reçu des réponses mixtes. La police a habituellement réussi à protéger les centres-villes et à empêcher de grands rassemblements. Les protestations au Caire ne durent habituellement qu’une heure, mais elles se sont poursuivies tard dans la nuit ce 25 janvier, jusqu’à ce que la place soit finalement vidée par la police. Des sites comme Twitter et Bambuser ont été bloqués pour éviter tout partage d’information ou de vidéo.
Opposition
Quelques partis d’opposition ont soutenu l’appel à manifester – les nasséristes, Ayman Nour’s al-Ghad et al-Karama. D’autre, al-Wafd et al-Tagammu, les ex-partis ouvriers, ne l’ont pas fait. Le plus grand groupe d’opposition, les Frères Musulmans, sont apparus très confus sur cette question de soutenir ou non le mouvement. Ses dirigeants ont hésité jusqu’au jour même tandis que les jeunes membres créaient des pages Facebook en soutien des protestations. Un porte parole des Frères Musulmans a déclaré : “Les protestation de la place Tahrir sont spontanément apparues, (…) nous n’avons envoyé personne. Le gouvernement sait exactement qui représente ces manifestations. Nous espérons qu’il accèdera aux demandes du peuple."
L’Eglise Copte (chrétiens d’Egypte) a appelé ses membres à éviter les cortèges de manifestants, trois semaines seulement après que des centaines de chrétiens aient protesté après l’attentat à la bombe d’Alexandrie, et n’ont rencontré que la violence de la police. Un prêtre a déclaré: “La Sainte Bible nous recommande d’obéir à nos Rois et dirigeants; des appels à manifester sont destructifs et nous prions donc pour le salut de l’Egypte.”
Bien entendu, le gouvernement n’a aucune intention d’aller dans le sens des revendications de manifestants pour plus d’emplois, pour un salaire minimum et pour la fin de la corruption, de la répression et des torture de la police. Il pourra éventuellement faire des concessions dans le feu des protestations de masse, mais comme la Tunisie l’a démontré, chaque concession augmentera la confiance des travailleurs et des jeunes pour aller plus loin dans leurs revendications.
La détermination des travailleurs et des jeunes contre le régime marque une nouvelle étape en Egypte. Plus jamais le régime de Mubarak ne sera en état de maintenir sa poigne sur le pays par la peur comme il a pu le faire précédemment. Jusqu’ici, la classe ouvrière égyptienne a à peine fléchi un muscle, mais l’atmosphère dans le pays est déjà électrique.
La tâche la plus urgente actuellement est la formation par les travailleurs de leur propre parti, armé d’un programme socialiste visant à transformer la société. Nous appelons à l’instauration d’un salaire minimum d’au moins 1.200 Livres Egyptiennes (soit l’équivalent de 150 euros); à la garantie pour chacun d’avoir un emploi; au droit de faire grève et de s’organiser dans des syndicats démocratiques et indépendants; à un programme massif de construction de logements, à la garantie de l’accès à l’enseignements et aux soins de santé pour tous, à la fin de la brutalité policière et à des élections libres pour une assemblée constituante démocratique et pour un gouvernement des travailleurs et des travailleurs ruraux. Cela doit être lié à la nationalisation des grandes entreprises, des banques et des grands domaines pour satisfaire les besoins des travailleurs et des pauvres.
L’étincelle de la révolution tunisienne a donné naissance à une flamme qui maintenant s’étend au monde arabe. Les évènements d’Egypte participant à ce processus, et il en ira ainsi jusqu’à ce que tous ces régimes pourris de la région soient renversés et que les ressources de la région seront utilisées pour mettre un terme à la pauvreté et à la répression de ces masses qui ont déjà souffert si longtemps.
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Stop aux chanteurs homophobes ! Sexion d’Assaut : ‘‘On est homophobe à 100% !’’
Depuis quelques jours, de nombreuses associations dénoncent les propos homophobes tenus par le groupe de rap Sexion d’Assaut : ‘‘l’homosexualité est une erreur, une déviance, un péché intolérable’’. De quoi faire trembler leur maison de disques. Le groupe est actuellement le premier vendeur de disques en France avec pas moins de 350.000 albums vendus, des chiffres inconnus dans le rap français depuis dix ans… et des comptes en banque garnis en conséquence.
Après un été chargé en concerts déprogrammés, en prises de parole enflammées, c’est bien plus qu’un énième groupe de rap qui dérape. C’est dans une interview pour le magazine International Hip-Hop que le groupe Sexion d’Assaut répand sa morve : ‘‘On a beaucoup attaqué les homosexuels parce qu’on est homophobes à cent pour cent et qu’on l’assume!’’ Au fil de l’interview, le groupe enfonce le clou sur ce ‘‘phénomène de mode’’, ce ‘‘péché’’ qu’est l’homosexualité dont il faut se repentir par rapport à l’islam, la seule religion ‘‘dans le vrai’’. ‘‘On est très croyants et même dieu a envoyé un prophète chez les gays pour les rappeler à l’islam et leur pardonner leurs péchés.’’ Face à l’étonnement du journaliste, abasourdi par ce qu’il vient d’entendre, ils répondent ‘‘On ne peut donc pas se permettre de dire ouvertement que pour nous, le fait d’être homosexuel est une déviance qui n’est pas tolérable! On ne comprend absolument pas que le mariage gay et l’adoption pour les gays soient acceptés dans certains pays!’’
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A lire également:
- Un homme agressé à Bruxelles parce qu’il est homo : L’homophobie n’a pas pris de vacances !
- [DOSSIER] Lesbiennes, gays, bis, trans, hétéros – Défendons la liberté de choix de l’orientation sexuelle!
- Rubrique LGBT de ce site
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Aujourd’hui, le groupe est inquiet et divisé, moins sur le fond de la polémique, mais plutôt sur la manière d’assurer les futures rentrées sur leur comptes en banques. En effet, le groupe vient de lancer sa nouvelle tournée, plusieurs concerts sont déjà prévus en France et en Belgique. L’annulation d’un seul concert représenterait des pertes substantielles, à éviter à tout prix. Alors forcément, certains membres du groupe essaient de faire bonnes figures, s’enlisent dans des déclarations bancales et contradictoires sur Twitter : les propos auraient été ‘‘mal rapportés’’ par une journaliste qui ‘‘a la haine contre le groupe’’. Pourtant, leur maison de disques Sony confirme que ces propos nauséabonds ont bien été tenus : ‘‘On était atterrés en écoutant l’enregistrement.’’ Leur participation aux MTV Music Awards est par ailleurs remise en question. En ce qui concerne les mises en garde de la maison de disque, le groupe réplique : ‘‘Mais on nous a déjà fait beaucoup de réflexions et on nous a dit qu’il était mieux de ne plus trop en parler dans nos nouveaux disques parce que ça pouvait nous porter préjudice, que notre public pourrait se sentir concerné. Imagine, il y a même des gays qui viennent nous voir en concert!’’ Enfin, plus pour très longtemps… Néanmoins, le groupe traine depuis toujours une réputation d’homophobes. Alors simple flirt avec l’homophobie ou combat de toujours ?
Des appels au meurtre comme antécédents !
Le groupe a déjà tenu, dans ses précédents albums, de véritables appels au meurtre contre les gays. En attendant la localisation du «prophète chez des gays», on peut toujours relire les paroles de la chanson On t’a humilié ‘‘Je crois qu’il est grand temps que les pédés périssent, coupe leur le pénis, laisse les morts, retrouvés sur le périphérique. Lointaine est l’époque où les homos se maquaient en scred. Maintenant, se galochent en ville avec des sappes arc-en-ciel. Mais vas-y bouge, vas-y bouge. Toutes ces pratiques ne sont pas saines, nos corps ne seront qu’un tas de cendres, la mort ne sera qu’une passerelle’’, entend-on dans Cessez le feu. Et de continuer… ‘‘T’as froid dans le dos quand un travelo te dit “vas-y viens”. Car tu sais que l’homme ne naît pas gay mais qu’il le devient’’ dans le morceau A 30%. ‘‘Bien trop de gays qui s’aiment et en plus se marient’’ dans Vous aussi ou ‘‘Toujours anti-homos’’ dans Rescapé. Pour ne citer que celles-là… Des chansons qui tournent en boucle sur Youtube, sans doute écoutées frénétiquement par des jeunes encore en manque d’esprit critique.
Quand on voit l’indifférence qui règne autours ce genre de propos, il ne faut pas s’étonner de la montée de violence envers les homosexuels. C’est ainsi que la banlieue pauvre de Marseille a été le théâtre d’une agression particulièrement brutale le mois passé. David, un jeune étudiant, se balade avec un ami par une chaude soirée du mois d’août près du périphérique quand soudain, une bande de 10 jeunes bavant de rage se jette sauvagement sur eux : ‘‘sale pédé, on va t’arranger!’’ Les coups pleuvent. David perd connaissance. Il se réveille dans l’ambulance baignant dans son sang et souffre de multiples traumatismes, de quatre fractures au niveau du visage et plusieurs dents cassées. Après une opération maxillo-faciale, David conservera les deux mâchoires collées par des bridges métalliques. Il s’alimente aujourd’hui par une paille et devrait rester les deux mâchoires soudées pendant 4 à 8 semaines. Certain semblent avoir bien retenu la leçon de Sexion d’Assaut. Si nous voulons empêcher de tels actes homophobes, nous devons rester intransigeants face à ceux qui veulent diffuser la haine. Nous devons lutter pour empêcher toute prise de parole qui incite à la haine contre les homosexuels.
Pas de place pour les homophobes !
Rares sont les groupes de rap qui luttent contre l’homophobie et la misogynie comme Calavera, CelluleX, Piloophaz et Rapaces, beaucoup sont des noirs américains qui veulent faire vivre l’héritage du combat pour les droits civiques en luttant pour les gays. N’oublions que le bras droit de Martin Luther King était ouvertement homosexuel. Le problème aujourd’hui, c’est qu’il y a trop de tolérance vis-à-vis de l’homophobie dans le milieu du rap. Sexion d’Assaut n’est pas le premier groupe à faire davantage parler de lui pour ses propos haineux que pour sa musique. C’est ainsi que le chanteur Krys, qu’on entend plus aujourd’hui, affirmait : ‘‘Brûlez tous les bisexuels, les transsexuels, les homosexuels et les travestis, de cette mission là je m’investis. Coup de fusil sur les PD clic clac boum. Ils méritent tous de brûler’’. Il prétendait alors que l’homophobie n’est qu’une ‘‘opinion’’ liée à ses ‘‘convictions religieuses’’. C’est malheureux, mais ce n’est pas un cas isolé. Beenie Man, Capleton, Admiral T, Bounty Killer, Buju Banton, D. Pleen, Lieutenant, Sizzla et Straika,… tous ont déjà été dénoncés par plusieurs associations LGBT, et plusieurs de leurs concerts annulés.
« Out of the closets and into the streets »
De son côté, Sexion d’Assaut sera en concert à Bruxelles le 02 novembre à l’Ancienne Belgique à 20h, sans doute précédé par un comité d’accueil… En effet, plusieurs associations LGBT se mobilisent d’ores et déjà. Fortes de leur succès au festival Couleur Café cet été, les associations sont à présent montées à bloc. Elles avaient obtenu l’annulation pure et simple du concert de l’homophobe Bennie Man grâce à une mobilisation soutenue. Un groupe sur Facebook rassemble déjà des centaines de réactions : « Sexion D’Assaut, groupe homophobe: BOYCOTT ! ».
Au delà de la chanson, nous voulons lutter contre toutes les discriminations et en particulier contre l’homophobie dans les écoles et sur les lieux de travail. C’est pourquoi le PSL/LSP participe chaque année à la Gay Pride et milite toute l’année avec du matériel contre l’homophobie lors de différents festivals, manifs, meeting et autres. Tout ce qui nous divise, nous affaiblit!
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Révolution iranienne : vers où aller ?
La classe des travailleurs doit rejoindre la lutte pour y jouer un rôle décisif
Trente ans après la révolution de 1979, l’Iran a de nouveau explosé en convulsions révolutionnaires, avec des millions de personnes défilant dans les rues pour protester contre la manipulation certaine des élections présidentielles. Quelques heures seulement après la fermeture des bureaux de vote, le Président Mahmoud Ahmadinejad et ses cohortes au sein de la dictature théocratique ont annoncé leur victoire écrasante, avec 64% des voix pour un taux de participation de 85%.
Tony Saunois, CIO
Les manifestations de masse se poursuivent
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- Appel à la solidarité du PSL/LSP en français et néerlandais (PDF)
- Appel à la solidarité du PSL/LSP en anglais (PDF)
- Appel à la solidarité du PSL/LSP en persan (PDF)
- Protestations de masse en Iran
- Iran 1978-79: Une révolution volée à la classe ouvrière
- Rubrique "Asie" de socialisme.be
[/box]Cette seule annonce a suffi à faire surgir des centaines de milliers de personnes dans les rues – selon certaines sources, jusqu’à trois millions de personnes ont pris part à ce qui est la plus grande manifestation jamais vue à Téhéran. Les étudiants, la classe moyenne et des couches entières de la population de chômeurs, de pauvres et d’employés ont submergé les rues, exigeant qu’on leur «rende leurs votes» et qu’Ahmadinejad quitte le pouvoir. Quelle que soit la manière dont cette crise révolutionnaire se développe au cours des semaines à venir, il est clair que l’Iran ne sera jamais plus le même. Ce mouvement de masse pour le changement marque le début de la fin de la dictature en place.
Évidemment, aucune analyse précise du résultat des élections n’est possible, mais l’étude des données avancées par le régime – effectuée par l’Université de Saint Andrews en Écosse – donne des résultats incroyables. Dans certaines zones, le taux de participation aurait été de 100%. Ahmadinejad aurait apparemment mobilisé assez de soutien pour accroître son vote de +113% par rapport à 2005. Pour que les chiffres mis en avant par le régime s’avèrent correctes, Ahmadinejad aurait dû remporter les votes de tous ceux qui n’ont pas voté en 2005, de tous ceux qui avaient alors voté pour le candidat «centriste», Rafsanjani, et 44% des voix de ceux qui avaient voté pour Karubi, un candidat plus réformiste.
Une caractéristique frappante de ce mouvement et de la période précédant les élections a été l’apparition sur le terrain de la lutte de jeunes femmes – un événement sans précédent dans l’histoire iranienne récente. Ce facteur s’est reflété au cours de la campagne électorale: pour la première fois en Iran, la femme de Mir Hoseyn Moussavi, Zahra Rahnavard, a joué un rôle dirigeant et a attiré des foules massives, surtout composées de jeunes femmes, demandant «l’égalité».
La censure de la presse et la restriction du droit de se rassembler n’ont pas empêché la diffusion des nouvelles de ce mouvement. La jeunesse en particulier a utilisé Facebook et Twitter pour organiser les manifestations, promouvoir la cause et rendre publique la répression utilisée contre elles. L’Iran dispose du plus grand nombre au monde de «bloggeurs» par personne.
Les manifestations de masse qui ont inondé l’Iran à la suite de l’annonce des résultats électoraux marquent un tournant crucial. Défiant la «loi» et la répression brutale des forces de sécurité étatiques, elles illustrent le fait que les masses ont commencé à perdre leur crainte du régime et sont prêtes à le défier et à le provoquer. Ceci représente un changement décisif dans la psychologie des masses de tout mouvement dirigé contre une dictature. Confrontés au déploiement des forces paramilitaires brutales que sont les Basiji, les manifestants de Téhéran ont lancé le slogan «Tanks, fusils, Basiji: vous êtes maintenant impuissants!»
Jusqu’à présent, il ne fait aucun doute que ce sont les étudiants et la jeunesse qui se sont trouvés à l’avant plan de ce mouvement. Les couches éduquées et cultivées de la jeunesse bouillonnent de mécontentement face à la nature étouffante et répressive du régime théocratique qui leur a ôté la liberté de choisir leur habillement, leur musique, leurs relations personnelles et leur communication. Pour les jeunes gens dans les rues, une tenue trop moulante, des cheveux trop hérissés, ou un «mauvais goût» en matière de musique suscitait la colère des matraques des Basiji. Avec une population composée selon les estimations de 60 à 70% de moins de trente ans, de telles restrictions étaient impossibles à maintenir indéfiniment. Quelle que soit l’importance de ces facteurs, ce mouvement les surpasse, réclamant tous les droits démocratiques et illustrant une soif de changement à travers l’ensemble de la société iranienne. Ceci est reflété dans la participation et dans le soutien larges en faveur de ce mouvement et qui vivent parmi les couches plus âgées de la population.
Outre tout cela, se trouve toute la frustration et la déception accumulées par de larges couches de la population au cours des premières années de la Présidence d’Ahmadinejad. Ahmadinejad a été élu en 2005 et a conservé une base de soutien importante, en particulier parmi certaines couches dans les régions rurales et pauvres. Même au cours de ces élections, il semble y avoir une fracture entre les zones urbaines, plus larges, et les zones rurales. L’ampleur de cette division n’est pas encore complètement apparente. Par exemple, l’International Herald Tribune a publié un rapport provenant d’un petit village du nom de Bagh-e-Iman, près de la ville de Shiraz, au sud-ouest du pays. Selon ce rapport, la majorité des 850 villageois soutenaient Moussavi; pourtant c’est l’inverse qui a été déclaré lors du décompte des voix. Ceci, malgré le fait que les partisans d’Ahmadinejad y ont été hués au cours des assemblées électorales. Des convois entiers de voitures de villageois pleines à craquer se sont alors rendus à Shiraz pour y rejoindre les manifestations. Qui plus est, l’Iran dispose maintenant d’immenses centres urbains où vit aujourd’hui la majorité de la population, qui conserve des liens importants avec leur famille demeurée à la campagne. Selon des estimations récentes, près de 70% de la population habite en ville.
Un populiste réactionnaire
Le soutien d’Ahmadinejad parmi la population pauvre a été bâti sur base d’un populisme réactionnaire, dénonçant la corruption, la riche élite libérale et utilisant une politique nationaliste bruyante dirigée contre l’impérialisme occidental et en particulier américain.
Lors des élections de 2005, il a repris un des slogans de la révolution de 1979, «Une République des pauvres». Après la révolution, d’importantes sections de l’économie iranienne ont été remises entre les mains de l’État, mais plutôt qu’une République des pauvres, c’est une République des riches, de l’oligarchie corrompue des Mollahs qui est apparue. En 2005, Ahmadinejad a aussi fait la promesse de redistribuer la manne pétrolière de manière plus équitable, en faveur des pauvres, et a introduit des subsides pour certains biens de consommation. Après son élection, toute une série de projets d’infrastructure ont également été entrepris. Cette rhétorique contrastait avec celle de Rafsanjani, son opposant «réformiste», lequel a été battu en 2005 sur base de son caractère corrompu et de ses liens avec les riches oligarques.
Pourtant, la campagne populiste d’Ahmadinejad en faveur des pauvres n’a pas empêché son régime de brutalement attaquer les chauffeurs de bus de Téhéran et d’autres lorsqu’ils ont entrepris des actions de grève afin de défendre leurs intérêts.
Toutefois, avec une inflation galopante qui s’élève à 30%, la hausse du chômage, qui aujourd’hui touche environ 25% des moins de trente ans, et le récent abandon des subsides pour l’essence et certains produits alimentaires, la frustration et la colère se sont accrues au cours de la dernière période.
Ahmadinejad a aussi militarisé le gouvernement tant au niveau local que national, ce qui a mené à une répression accrue ainsi qu’à une hostilité croissante, surtout de la part de la jeunesse. Sur vingt-et-un postes ministériels, il en a octroyé quatorze à d’anciens officiers des Gardiens de la Révolution, comme lui. Le Basij a aussi reçu des droits d’extraction pétrolière, ce qui a mené à des allégations de corruption, alors qu’il était justement censé l’éradiquer.
Jusqu’ici, la force du mouvement, inédit en Iran depuis la révolution de 1979, a contraint le régime à effectuer toute une série de zigzags en guise de réponse, et a ouvert des fractures et des divisions en son sein. Au départ, le Conseil des Gardiens s’est contenté d’officialiser le pseudo-résultat des urnes, et a rejeté les demandes de recomptage. Il a ensuite fait marche arrière et a concédé un recomptage partiel de certaines urnes «contestées». Très récemment, il a accepté le fait qu’un peu plus de six cents urnes contestées soient recomptées. Toutefois, même si l’on obtenait par miracle la concession d’un recomptage complet, cela ne voudrait en réalité rien dire. Après tout, qui serait chargé de contrôler les contrôleurs? Selon Robert Fisk, un journaliste anglais, une bagarre a éclaté parmi les parlementaires réactionnaires sur la réponse à donner face à la phrase d’Ahmadinejad selon qui les manifestants ne sont rien de plus que «poussière et cendres».
Comme Trotsky l’a fait remarquer dans son œuvre monumentale qu’est «L’Histoire de la Révolution russe», l’arrivée des masses sur le terrain de la lutte avec l’ampleur que nous voyons en ce moment constitue une des caractéristiques d’une révolution. Dans ce sens, l’on peut dire que c’est une révolution qui se déroule en ce moment en Iran.
Khamenei
Quel type de révolution?
Toutefois, il y a différents types de révolution. Historiquement, il y a eu les révolutions bourgeoises des 17e et 18e siècles en Europe, qui ont balayé la société féodale. Il y a également eu la révolution socialiste comme celle qui s’est par exemple déroulée en Russie en 1917, et qui a eu pour conséquence le renversement du capitalisme et du féodalisme, et la mise en place d’une démocratie ouvrière. Celle-ci a été suivie par une contre-révolution politique, lorsque le régime bureaucratique de Staline a émergé et a ôté son pouvoir politique à la classe salariée.
Il peut également y avoir des troubles révolutionnaires qui ont pour conséquence un changement de pouvoir politique, mais qui conservent intactes les anciennes relations sociales et de propriété. En Iran pour l’instant, c’est une révolution politique qui est entrain de se produire, dans le cadre du capitalisme. Toutefois, une révolution est un processus, et au cours de ce développement peuvent émerger des questions et des revendications sociales qui l’amènent en conflit avec le système social du capitalisme. Les débats et les disputes qui se sont déroulés à la télé entre Moussavi et Ahmadinejad lors de la campagne électorale ont joué un rôle central dans l’essor de la population et surtout de la jeunesse, qui a été ensuite entraînée dans le mouvement de manière active, et est devenue une force motrice, qui conduit la lutte depuis que les soi-disant résultats des élections ont été annoncés.
La question cruciale maintenant en Iran est de savoir comment ce mouvement va se développer, et le type du nouveau régime qui va en ressortir. A ce stade des événements, on ne peut pas dire avec certitude comment la crise actuelle va se dérouler et se développer. La classe salariée va-t-elle surgir à l’avant-garde de la lutte pour la tirer en avant? Il est toutefois clair que c’est une nouvelle ère qui s’ouvre en Iran, et que les troubles et la révolution vont se développer tout au long d’une période prolongée, avec de nombreuses crises et de nombreux revirements de situation.
Lénine a défini quatre principales conditions pour le développement d’une révolution socialiste.
Premièrement, des fractures et des divisions doivent s’ouvrir au sein de la classe dirigeante et de ses représentants politiques. Deuxièmement, la classe moyenne doit se trouver dans un état d’hésitation, avec une couche importante parmi elle qui soutienne la révolution. Troisièmement, la classe salariée doit être organisée et doit afficher une évidente volonté de lutte – se plaçant à la tête du processus révolutionnaire. Quatrièmement, il faut un parti socialiste révolutionnaire de masse, avec une direction décidée, et un large soutien pour ses idées parmi d’importantes couches de la population – et en particulier, le soutien des couches actives des salariés.
Il ne fait aucun doute que les deux premières conditions sont présentes en Iran à l’heure actuelle. Cependant, il serait idiot et irresponsable de prétendre que, dans l’état actuel du mouvement en Iran, ces deux conditions y ont déjà muri. La troisième condition – la volonté de lutte de la part de la classe salariée – n’est pas clairement évidente à ce stade-ci. La classe ouvrière n’a pas encore clairement marqué ce mouvement, agissant en tant que force indépendante. La quatrième condition de Lénine – celle d’un parti de masse et d’une direction socialistes révolutionnaires – doit encore y être construite. Le degré de volonté de lutte par les travailleurs doit encore être mis à l’épreuve par des comités de lutte démocratiquement élus et des syndicats indépendants, qui sont encore inexistants.
L’absence d’une conscience de masse chez la classe salariée quant à son rôle indépendant, et l’absence d’une direction révolutionnaire, deviennent des obstacles objectifs à la révolution. Sans une estimation précise de ces facteurs, il est impossible d’estimer correctement les perspectives pour la révolution qui commence à se dérouler en Iran.
Fractures au sein du régime
Il ne fait aucun doute qu’une fracture majeure s’est ouverte au sein du régime au pouvoir en Iran. Elle s’est même étendue aux forces qui soutiennent Ahmadinjad, jusqu’à y provoquer des bagarres, concentrées autour de la réaction à adopter face au mouvement de masse qui semble les avoir prises par surprise. L’arrestation de membres de la famille de l’ancien Président Rafsanjani indique la profondeur de cette fracture ouverte au sein de l’élite dirigeante.
Le conflit entre Ahmadinejad et Moussavi représente également une division parmi les dirigeants. Tandis que les masses dans les rues se sont ralliées à Moussavi et placent de grands espoirs et illusions en lui, lui-même, ainsi que ses principaux partisans, a fait partie du régime théocratique. Moussavi, qui était Premier Ministre à l’époque de la crise des otages de 1979, a été responsable pour la répression contre les militants de gauche, et n’a rien fait pour s’opposer à la «fatwa» prononcée contre l’écrivain Salman Rushdie par le Guide Suprême de l’époque, l’Ayatollah Khomeini.
Lors de cette campagne électorale, il a promis la réforme du système existant, une plus grande libéralisation économique, la baisse du chômage et une «plus grande égalité» entre hommes et femmes, mais tout cela au sein du régime théocratique clérical actuel. En essence, son programme consiste en un plan de réformes d’en haut pour empêcher une révolution d’en bas, afin de maintenir l’ordre existant.
Pourtant, cette division importante et cruciale a ouvert la porte à travers laquelle les masses se sont déversées dans l’arène de la lutte. La détermination d’Ahmadinejad et de ses partisans à se maintenir au pouvoir coûte que coûte a encore plus élargi la fracture entre eux. Le fait que l’Ayatollah Khamenei, Guide Suprême de la nation, décide de conserver Ahmadinejad à son poste, et exige la fin des manifestations sous peine de voir la répression s’aggraver, menace de renforcer le conflit et de le porter un cran plus haut. Après avoir commencé par réclamer une réforme du système, le mouvement se trouve maintenant directement confronté à la figure de Khamenei, ce qui l’amène en collision avec l’ensemble de l’État théocratique.
Au début de la guerre civile espagnole, Trotsky a expliqué qu’en 1931, le général Berenguer avait agit en tant que portier, ouvrant la porte à travers laquelle les masses se sont engouffrées dans la lutte. On peut aujourd’hui dire la même chose de Moussavi, lequel, ayant ouvert la porte, tente maintenant de la refermer à nouveau. Malgré ses tentatives, la pression demeurera, et risquera de la faire voler en éclats.
Au moment où nous écrivons, il n’est pas encore très clair de savoir si les masses sont prêtes à aller encore plus loin, pour porter le mouvement vers une telle confrontation directe. Toutefois, les indications données par les personnes interviewées, de même que les rapports qui nous parviennent via Twitter et Facebook – et qui sont une caractéristique de ce mouvement – montrent que la déclaration de Khamenei a enragé une couche importante de la population. Les étudiants de l’Université de Téhéran ont déclaré une occupation permanente du campus après la déclaration du vendredi 19 juin. Ils ont appelé à une grève pour le mardi 22 juin. Cependant, confrontées à un déploiement massif des forces de sécurité, les manifestations du week-end des 20 et 21 juin ont semblé bien plus petites. Alors que les étudiants ont fait montre d’un grand héroïsme tout au long du mouvement, le niveau de la répression semble avoir intimidé d’autres couches de la population, qui préfèrent rester en-dehors du mouvement de protestation. Ceci n’aurait pas été le cas si la classe salariée avait marqué ce mouvement en tant que force indépendante et organisée.
Il est maintenant possible que, confronté à une répression féroce, le mouvement ralentisse et s’interrompe temporairement pour une certaine période. Ceci est d’autant plus probable que la classe salariée tarde à rejoindre la lutte de manière décisive. Si une telle situation devait se produire, nous pouvons être certains que ce mouvement fera à nouveau irruption dans un futur proche.
Toutefois, le mouvement de protestation qui s’est déroulé jusqu’ici s’est accru malgré les tentatives de démobilisation effectuées par Moussavi – qui a même appelé à l’annulation d’une manifestation de masse. Malgré cela, des centaines de milliers de gens sont descendus dans les rues, illustrant le fait que ce mouvement se développe d’en bas, malgré les tentatives de sa direction de l’empêcher. Moussavi est tout comme Ahmadinejad terrifié par le mouvement de masse – encore plus à l’idée qu’il puisse se transformer en un mouvement indépendant de la classe salariée.
La classe des travailleurs
La question cruciale qui se pose maintenant est de savoir si oui ou non la classe salariée est prête à rejoindre la lutte de manière décisive. Si un tel cas se produisait, alors le renversement du pouvoir d’Ahmadinejad serait clairement mis à l’ordre du jour. Bien que, selon certains rapports, les chômeurs et d’importantes couches de la population pauvre aient rejoint les manifestations à Téhéran nord (une zone plutôt habitée par des classes moyennes) et que les ouvriers du bâtiment aient acclamé la manifestation de l’opposition tandis qu’elle passait, nous n’avons encore reçu aucun rapport faisant état de travailleurs partant en grève ou formant leurs propres organes de lutte. Toutefois, certains indices montrent qu’un tel processus serait en train de se mettre en place.
Les chauffeurs de bus de Téhéran, qui jouissent d’une longue histoire de lutte contre le régime, ont publié une déclaration soutenant le mouvement et ceux qui combattent la répression du régime. Ils ont appelé à une journée de protestation pour le vendredi 26 juin. Il semblerait également que les ouvriers de l’usine automobile de Khowdrow ont imposé une grève de 30 minutes au début de chaque pause en guise de protestation contre la répression contre les manifestants.
En outre, les chauffeurs de bus, dont le chef Mansur Osanlu purge une peine de cinq ans de prison pour les grèves qu’il a organisées dans le passé, tout en soutenant les manifestations, ne soutiennent aucun des candidats à l’élection présidentielle, puisqu’aucun d’entre eux ne représente la classe des travailleurs. Selon d’autres rapports, des discussions quant à l’organisation d’une grève générale se déroulent en ce moment.
La révolution est un processus vivant qui se développe d’heure en heure et de jour en jour. De nombreux mouvements révolutionnaires ont commencé par l’entrée en lutte des étudiants universitaires et de couches de la classe moyenne, qui ont ensuite été rejoints par classe salariée, laquelle porte l’ensemble de la lutte à un niveau différent et supérieur. Cela a été le cas en France en 1968, et en Iran en 1979. La question, maintenant que la répression s’intensifie, est de savoir si le mouvement est prêt à se battre jusqu’au bout et à prendre les mesures nécessaires pour défier et renverser le régime.
Au cas où Ahmadinejad et son régime adoptent une politique encore plus répressive et brutale, causant de nombreux décès, cela pourrait mettre le feu aux poudres et lancer les travailleurs dans la lutte. Certaines sources mentionnent une douzaine de personnes tuées par les forces de sécurité le 20 juin. La déclaration de Khamenei et le déploiement de l’appareil d’État constituaient une stratégie hautement risquée. Si de plus gros combats avaient eu lieu, provoquant le décès de plusieurs centaines voire milliers de personnes, ceci aurait été le détonateur pour la classe salariée qui serait entrée en lutte de manière plus consciente et décisive.
Beaucoup d’étudiants proviennent de familles pauvres et bénéficient de bourses et d’aides afin d’accéder à l’université. Confrontées à l’explosion de la classe salariée alliée à la jeunesse, il n’est guère assuré que les forces répressives de la machine étatique demeureraient intactes.
Bien qu’il y ait eu des tirs et des attaques brutales sur les étudiants de l’Université de Téhéran, surtout de la part des Basiji, il y a aussi des témoignages de Basiji refusant d’attaquer les manifestants. La composition sociale des Basiji en fait une force extrêmement peu digne de confiance lorsqu’il s’agit de l’utiliser contre les manifestants. Le gouvernement prétend que ses effectifs s’élèvent à 12 millions de miliciens (sur une population totale de 70 millions d’Iraniens). Pour beaucoup d’analystes, il s’agit là d’une exagération, et les effectifs réels ne s’élèveraient qu’à la moitié de ce nombre. Le Basij est une organisation relativement facile à rejoindre, ne requiert finalement que peu d’entraînement, et n’exige pas un service à plein temps. Selon une source, son noyau dur ne s’élèverait qu’à environ 90.000 personnes. Le reste des miliciens proviennent de leurs familles, parmi lesquelles nombreuses sont les personnes qui ont participé aux manifestations d’opposition.
Au cas où le mouvement gagnerait encore plus de force, et surtout si la classe salariée devait rejoindre la lutte de manière organisée et déterminée, alors les différentes ailes de l’appareil étatique pourraient scissionner et se fragmenter. D’importantes couches de cet appareil passeraient du côté des manifestants. C’est là sans nul doute ce que craignent les gros bonnets au sein du régime.
Ce mouvement a mis à jour les divisions de classe et sociales massives qui existent dans la société iranienne. Si la crise devait se poursuivre et si la révolution ne prend pas les mesures décisives pour aller de l’avant et pour finalement obtenir que la classe salariée, soutenue par la classe moyenne, la jeunesse et les paysans pauvres, prenne en main la gestion de la société, alors de nouvelles divisions peuvent également commencer à apparaître.
Il y a une forte conscience nationale iranienne. Cependant, la population est composée de toute une série de groupes ethniques. On estime qu’elle est constituée de 52% de Perses, de 24% d’Azéris, de 8% de Gilakis et de Mazandaranis, et de 7% de Kurdes. Moussavi lui-même a parlé en Azéri lors de certains rassemblements (1). C’est là un nouveau point de fission qui pourrait s’ouvrir à un certain stade.
L’éruption du mouvement en Iran représente un point tournant dans la lutte des masses. Il n’est encore qu’à ses stades initiaux, mais va déjà plus loin que les événements de 1999 et se développe rapidement. Il reste à voir si cette crise révolutionnaire, qui comporte d’importants éléments d’une situation pré-révolutionnaire, est à comparer avec celle de Russie en 1905 ou en 1917. La révolution de 1905 a été vaincue car elle ne bénéficiait pas du soutien des paysans des zones rurales. Elle a été une anticipation de la révolution de 1917. La révolution de 1917 a été menée par la classe ouvrière, avec le soutien et l’implication actifs de la paysannerie. Cette différence entre 1905 et 1917 est peut-être également présente dans la crise qui se déroule en Iran aujourd’hui. En 1905, les masses, et en particulier la classe salariée de Saint-Pétersbourg, s’étaient mises en action. Au début, elles désiraient simplement plaider auprès du Tsar, menées par un prêtre du nom de Père Gapon. Aujourd’hui en Iran, les masses ont demandé des droits démocratiques et la réforme du système existant, et reprenaient de même des slogans religieux. Toutefois, dans la Russie de 1905, les travailleurs avaient formé leur propre organe de direction, le Soviet (conseil populaire), qui joua un rôle décisif, et qui refit surface lors des grandes révolutions de 1917. Ce genre de développement ne semble pas encore avoir pris place en Iran.
Toutefois, la révolution de 1905 fut vaincue, et une période de contre-révolution et de répression a suivi. Pourtant, 1905 fut un précurseur décisif pour la révolution de 1917, qui eut pour conséquence finale la prise du pouvoir par la classe salariée.
L’Iran de 2009 pourrait n’être qu’une anticipation d’un mouvement encore plus grand à venir. Si tel devait être le cas, quand bien même le régime actuel parviendrait à se maintenir pour une certaine période, la crise et les antagonismes sociaux demeureront et s’intensifieront, et mèneront certainement à de nouveaux troubles révolutionnaires. L’absence d’un véritable parti et d’une véritable direction socialistes révolutionnaires, couplée à la confusion politique qui existe assurément après trente ans de régime théocratique et à la retraite idéologique organisée internationalement quant à l’idée d’une alternative socialiste, signifie que la révolution en Iran va nécessiter un développement plus prolongé.
Une alternative socialiste
Le fait que Hugo Chavez, le Président “socialiste” du Venezuela, a, de manière scandaleuse, soutenu et défendu Ahmadinejad, ne peut qu’ajouter à la confusion. Ceux qui, parmi la gauche, ont de manière opportuniste décidé de garder le silence quant à la politique erronée de Chavez vis-à-vis d’Ahmadinejad et d’autres régimes et quant à d’autres enjeux n’ont pas aidé les masses iraniennes à suivre la bonne voie et à adopter l’idée d’une alternative socialiste authentique.
La tâche cruciale qui se pose maintenant en Iran, afin de vaincre Ahmadinejad et de mener le mouvement en avant, est d’assurer que des organisations réellement démocratiques soient formées afin de diriger la lutte. Des comités de grève, impliquant la classe moyenne, doivent être élus dans chaque entreprise, chaque université et chaque quartier. Plus que tout, ces comités doivent être prêts à appeler à la grève générale et à appeler la base de l’armée, des Gardiens de la Révolution, du Basij, et des autres organisations répressives de l’État, à rejoindre le mouvement, à renverser leurs officiers et à former leurs propres comités.
L’appel à un recomptage des voix par l’appareil étatique actuel ne résoudra pas la crise et ne peut pas remporter la confiance du peuple. Des comités de lutte élus pourraient poser la base pour l’organisation d’élections à une Assemblée constituante révolutionnaire afin de déterminer l’avenir du pays. Le comptage de toutes les voix pour une telle Assemblée doit être supervisé par des comités démocratiquement élus.
L’édification d’un gouvernement ouvrier et paysan, sur base d’un programme socialiste révolutionnaire, visant à rompre avec le capitalisme, est la seule voie qui puisse mener à la conquête de véritables droits démocratiques et à l’égalité pour l’ensemble du peuple iranien, exploité par le système actuel et par le capitalisme.
De telles revendications doivent inclure la liberté d’assemblée, le droit de former des partis politiques, de former des syndicats indépendants, de produire des journaux et des programmes télévisés sans censure étatique, de même que la libération de tous les prisonniers politiques et de tous ceux qui ont été arrêtés pour s’être dressés contre le régime.
La nouvelle ère qui s’ouvre en Iran ouvre la perspective de travailleurs et de jeunes tirant les conclusions nécessaires quant à quel programme et quelle organisation sont nécessaires pour assurer une victoire durable et mettre un terme à la dictature et à la pauvreté subies sous le régime actuel. Le rôle des socialistes révolutionnaires est d’aider ces jeunes et ces travailleurs à trouver cette voie.
(1) Musavi lui-même est natif de la province iranienne d’Azerbayjan oriental, principalement peuplée d’Azéris
(2)En juillet 1999, les étudiants de l’Université de Tehran ont organisé une manifestation contre la fermeture d’un journal, qui fut fortement réprimée par les autorités. Les émeutes qui s’ensuivirent durèrent une semaine et se propagèrent dans les autres grandes villes iraniennes.
Le Comité pour une Internationale Ouvrière, CIO
Cette analyse est issue du CIO.
Le capitalisme est un système mondial et il doit être combattu à la même échelle. C’est pourquoi le Parti Socialiste de Lutte fait partie d’une organisation marxiste internationale: le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO), un parti mondial actif sur tous les continents. Notre lutte en Belgique s’inscrit dans le cadre d’une lutte des travailleurs du monde entier pour un société socialiste car si la révolution socialiste éclate sur le plan national, elle se termine sur l’arène internationale. La démocratie ouvrière et la planification socialiste de la production ne peuvent se limiter à un seul pays. C’est d’ailleurs l’isolement de la Russie soviétique qui a conduit à sa dégénérescence à partir de 1924.
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