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  • 10.000 manifestants à Tel Aviv contre les massacres de Gaza

    Après ce qui semble avoir été la semaine la plus meurtrière dans le conflit israélo-palestinien depuis 40 ans, les manifestations se sont succédées à travers le monde contre les actions barbares du régime israélien. Deux actions de protestation importantes ont été également organisées en Israël, malgré les tentatives anti-démocratiques du régime pour faire taire chaque résistance contre la guerre, dont des menaces des services secrets et des arrestations massives, surtout contre les Palestiniens israéliens. 300 d’entre eux sont toujours arrêtés.

    Mouvement de Lutte Socialiste (Tnu’at Maavak Sotzyalisti/Harakat Nidal Eshteraki, CIO-Israël)

    La police avait essayé d’empêcher la manifestation prévu le 3 janvier à Tel-Aviv en déclarant que le fait de lever le drapeau palestinien à Tel-Aviv était un trouble de l’ordre public. La Cour Suprême, bien qu’elle soutient les actions du régime y compris ce qui est défini par les lois internationales comme des crimes de guerre, a décidé que c’était un peu trop embarrassant et a autorisé la manifestation.

    Cette manifestation a été la plus grande manifestation commune d’Arabes et de Juifs depuis le début de la guerre, dans des circonstances très difficiles. La manifestation a été encerclée par un important contingent de forces de l’ordre renforcé par un détachement spécial des autorités carcérales. Presque 300 contre-manifestants d’extrême-droite (dont beaucoup de membres de Yisrael Beitenu – Israël notre maison – le parti de Lieberman) étaient aussi présents, et à chaque coin de rue du centre de Tel-Aviv il y avait des tensions et des animosités visibles. Certains ont jeté des objets contre les manifestants. Mais la manifestation a été très bruyante et a clairement fait entendre son message avec des drapeaux rouges, des tambours et presque 10.000 participants.

    Les slogans ont été criés en hébreu et en arabe. Le Mouvement de Lutte Socialiste (notre organisation-sœur israélienne) ont crié avec d’autres des slogans tels que : “ Juifs et Arabes refusent d’être ennemis”, “Juifs et Arabes se battent ensemble contre les racistes”, “A Gaza et à Sderot, les enfants veulent vivre”, “Barak, Ministre de la Défense, tu n’achètera pas la domination avec le sang”, “Pas de paix, pas de sécurité sous la loi du Capital”, “De l’argent pour l’enseignement et les emplois, pas pour la guerre et l’occupation”, “Tu veux la paix ? Alors nous devons lutter – contre les bombardements, contre la guerre, contre les tirs de qassam, contre le siège, contre l’occupation, contre le mur, contre les colonies, contre la séparation, contre le racisme, contre le système d’exploitation et de prestige, contre le système du capital et de la guerre.”

    Nous avons aussi crié des slogans comme “Tous les ministres du gouvernement sont des criminels de guerre”, “Barak, ministre de la Défense, combien d’enfants as-tu tué aujourd’hui ?”. Au cours de la manifestation, nous avons diffusé notre déclaration que nous avons aussi utilisé aux manifestations et activités publiques à Tel Aviv, Haifa et ailleurs. Hadash, un front du Parti Communiste, était aussi une force très dominante dans la manifestation.

    Les médias officiels ne se sont pas limités à mener campagne contre cette manifestation, ils ont ensuite essayé d’en réduire l’impact au maximum. Le journal Haaretz, connu sur le plan international comme un journal libéral, a publié un article sur son site avec comme titre : “Tel-Aviv : Des milliers de manifestants pour et contre l’opération”. L’’éditorial du même journal a commencé avec ces mots : “Le chef du gouvernement Ehud Olmert attend à juste titre que la population israélienne se regroupe derrière les opérations de l’IDF à Gaza” (IDF est l’armée israélienne).

    Le programme d’actualité de la télévision d’Etat du week-end, qui dure enviroon deux heures, n’a montré aucune image de la manifestation alors que d’innombrables politiciens et généraux ont été passés en revue au sujet de Gaza, pour finir avec un reportage sur l’industrie du chocolat en Israël ! Même les médias internationaux qui veulent couvrir les attaques ont très difficile. Il leur a été interdit d’aller dans la bande de Gaza. Deux journalistes d’Al-Jazeera ont été arrêtés parce qu’eux parce qu’ils étaient arrivés “trop prêts de la bande de Gaza”. Les journalistes israéliens reportent surtout ce que racontent les porte-paroles militaires. Mentionner les victimes palestiniennes n’arrive pratiquement jamais. Les médias israéliens ne mentionnent par exemple jamais la relation entre le nombre de victimes de 100 contre 1. Les médias se limitent souvent au message simple de Barak: “Le Hamas et les organisations de terreur ont environ 400 morts”. La machine de propagande et de falsification de l’élite dirigeante est tout simplement immense. Les rapports des des actions de protestation dans le reste du monde sont présentés de façon très négative, insinuant souvent que chaque critique internationale contre le régime israélien est de l’antisémitisme.

    Samedi, dans la ville Sakhnin, au Nord, des dizaines de milliers de personnes se sont rassemblées dans une des plus fortes manifestations israélo-palestinienne depuis des années. Dans certains médias israéliens, on a parlé de “quelques milliers”, alors qu’ils étaient peut-être 100.000 avec bon nombre de juifs israéliens. Certains médias ont bien relayé ce rassemblement, mais pour effrayer la population. Quelques dizaines de contre-manifestants d’extrême-droite, surtout du parti de Lieberman, ont défilé dans la ville. L’ambiance à la manifestation était très militante, mais aussi dominée par le mouvement islamique et le parti nationaliste palestinien Balad. Des slogans en arabe ont été criés, avec des appels à la solidarité avec la population de Gaza pour qu’ils résistent aux tanks et aux fusils. Certains slogans ont appelé le Hezbollah à agir et ont critiqué la Ligue Arabe pour leur collaboration traditionnelle, particulièrement avec les USA. Malheureusement, certains slogans appelaient implicitement à des actions de terreur contre la population juive.

    Le fait qui la manifestation de Sakhinin a été dominé par les forces de droite comme le mouvement islamique n’est pas un hasard. Hadash était très faible, une expression de l’énorme polarisation nationale et d’un certain affaiblissement de son soutien parmi la population israélo-palestinienne ces dernières années. Cela était déjà visible lors des élections municipales dans cette ville et dans la région. C’est la conséquence du rôle du Parti Communiste/Hadash. Le parti suit les événements et met l’accent sur l’obtention de réformes de la législation purement cosmétiques à la place de construire un mouvement. Même si certaines de ces petites réformes sont très correctes, cela ne peut être atteint que si Hadash construit une lutte massive. Il y a aussi des tristes exemples d’actions opportunistes comme des coopérations électorales avec le mouvement islamique dans certaines régions à la place à la place de construire une alternative. L’exemple le plus frappant est naturellement la coopération avec le parti d’extrême-droite de Lieberman dans la coalition du conseil communal de Haifa. Lors des élections dans cette ville, le PC a soutenu le maire du parti gouvernemental Kadima. L’argument était que cela était nécessaire pour éviter qu’un candidat de Lieberman n’obtienne le poste. C’est une explication du vide politique énorme et du fait que plusieurs actions anti-guerre peuvent maintenant être dominées par les organisations de droite.

    En 9 jours, plus de 500 Palestiniens ont été assassinés, dont 30 depuis le début de l’opération au sol. Des milliers de personnes sont blessées et des milliers de maisons ont été ravagées dans la petite bande de Gaza. Cela a aussi des conséquences pour les masses arabe et juive en Israël. À la fin de la manifestation de samedi dernier à Tel-Aviv, nous avons appris la terrible nouvelle du début de l’invasion du pays, point de départ pour une nouvelle semaine de massacres. Mais ce sera aussi une nouvelle semaine d’actions de protestation. La manifestation de Tel-Aviv a montré qu’un mouvement commun des Juifs et des Arabes contre la guerre est possible malgré la répression, et peut-être même encore plus.

    L’élite dirigeante israélienne fait usage de la peur de la classe ouvrière juive-israélienne. Cette guerre est définie d’un commun accord par l’establishment comme une “guerre sans choix”. C’est en fait une tentative désespérée de sortir de la crise politique profonde et d’effacer l’humiliation des interventions militaires de ces dernières années. Mais les travailleurs se rendront compte tôt ou tard qu’ils ont été consciemment trompés pour être traînés dans un conflit sanglant qui s’oppose à leurs intérêts. Un nombre de travailleurs et de jeunes grandissant cherchera autre chose. Le mouvement anti-guerre doit essayer d’atteindre cette couche, malgré toutes les difficultés. Sur base des idées de la solidarité et du socialisme, c’est toutefois possible, et c’est la seule voie pour aller de l’avant.

  • Stop à la guerre à Gaza

    Déclaration traduite de l’hébreu publiée le 30 décembre par le Mouvement Socialiste de Lutte (Tnu`at Maavak Sotzyalisti / Harakat Nidal Eshteraki – CIO – Israël), dans le contexte d’une vague réactionnaire très forte de militarisme et de nationalisme parmi les Juifs israéliens.

    Tnu`at Maavak Sotzyalist (CIO-Israël)

    Version PDF de cette déclaration

    Des centaines de morts, des milliers de blessés et toujours pas de réelle sécurité pour les Israéliens ou les Palestiniens.

    Les centaines de tués de ces derniers jours ne vont pas apporter la paix, mais plus de fureur et de morts. Tnu’at Maavak Sozialisti (Harakat Eshteraki Nidal) s’est toujours opposé aux tirs de roquettes Qassam ainsi qu’aux attentats contre les familles des travailleurs et des pauvres en Israël, dans les territoires palestiniens et dans le Moyen-Orient. L’offensive actuelle n’est nullement une action défensive et n’a pas pour objectif d’apporter la tranquillité aux résidents du sud d’Israël. Comme lors de la deuxième guerre du Liban, à laquelle nous nous sommes également opposés, nous ne parlons pas seulement d’une absence de solution, mais aussi d’une exacerbation des problèmes. Le gouvernement actuel est responsable de l’escalade actuelle et de ses conséquences. Cette offensive ne va pas apporter de solution et démontre une fois de plus que le principal danger pour la sécurité des habitants d’Israël et de la région provient de l’élite dirigeante israélienne.

    Avec plus de 365 Palestiniens tués, 1.600 blessés, et 4 Israéliens, juifs et arabes, tués, c’est la plus grande offensive aérienne de tous les temps dans les territoires palestiniens. Les dix premières heures de l’attaque ont vu des dizaines de milliers de tonnes d’explosifs s’abattre sur Gaza. Le gouvernement et l’armée savaient très bien que les tirs de projectiles – dont peu sont de véritables missiles – augmenteraient en réponse à l’attaque Ils avaient même estimé que le nombre de tirs atteindrait les 100 par jour durant l’opération. Comme c’était à prévoir, l’offensive sème la colère dans toute la région entière et exacerbe la polarisation nationale entre les Juifs et les Arabes.

    Le véritable but de l’offensive n’est pas de ramener le calme, tout comme ce n’était pas le but de l’opération "Hiver chaud" en février 2008 ou lors de la précédente guerre de Gaza (l’opération "Pluie d’été") menée parallèlement à la seconde guerre du Liban. Nous nous étions également opposés à ces attaques qui avaient fait 550 tués. Maintenant comme alors, la guerre n’est que la poursuite de la politique du gouvernement par des moyens militaires. Le but de l’attaque n’est pas de mettre fin aux tirs de projectiles, mais de déstabiliser le gouvernement Hamas de la bande de Gaza, tout en donnant l’impression que le gouvernement fait des efforts pour trouver une solution à ces tirs. Pour l’élite israélienne, les jeux de prestige vis-à-vis du Hamas sont plus importants que la sécurité des résidents du sud d’Israël, qu’ils utilisent comme otages. Tout cela s’effectue sous le couvert de la période électorale en Israël et de la période de transition entre les gouvernements aux USA. Il s’agit aussi d’effacer l’image de défaite qui colle au gouvernement depuis la deuxième guerre du Liban. En même temps, cela démontre la détermination de l’élite à engager une autre confrontation sanglante avec l’Iran et le Hezbollah.

    Une guerre avant les élections est une tactique classique employée par des gouvernements en faillite. Ce gouvernement a été impliqué dans des opérations militaires sanglantes et de grande ampleur. Il lance maintenant une autre opération militaire conçue pour sauver « Kadima » et « `Avodah » de leur effondrement dans les sondages en compromettant la sécurité des habitants de la bande de Gaza, de Sderot, d’Ashkelon, de Netivot, et des autres villes dans la région.

    Le millionnaire ministre de la Sécurité Barak a déjà annoncé qu’il arrêtait sa campagne électorale, ce qui n’est pas étonnant parce qu’il comprend parfaitement que la campagne militaire forge sa propre campagne électorale. Tous les partis de l’establishment profiteront à court terme du prestige de l’initiative militaire, exploitée également pour détourner l’attention de la crise économique mondiale. Aucun des partis de l’establishment, qui soutiennent tous le capitalisme, n’a de solution pour la sécurité d’emploi et les conditions de vie des travailleurs. Ils n’ont pas davantage de solution au conflit israélo-palestinien et aux problèmes qu’il entraine.

    L’opération militaire a reçu comme de coutume un nom cynique – « Plomb durci » qui provient d’une chanson de Hanukah – comme si des éléments de l’élite israélienne ne voyaient dans cette opération pas beaucoup plus qu’un jeu ou une aventure. Cette aventure militaire a déjà exigé un lourd tribut en vies humaines – dès les premières heures, le nombre de morts a dépassé celui des Israéliens tués par tous les projectiles lancés de la bande de Gaza jusqu’à maintenant.

    Malheureusement, cette aventure n’est pas finie, le gouvernement refuse tout cessez-le-feu et n’exclut pas d’ouvrir un autre front contre le Hezbollah au Liban. Des milliers de réservistes ont déjà été mobilisés par des décrets d’urgence. L’offensive va se heurter à des difficultés et ne fera qu’aggraver les problèmes dans le Moyen-Orient. Comme Barak l’a déclaré: "Ce ne sera pas facile, et ce ne sera pas court."

    Le gouvernement a saboté la « trêve »

    Le gouvernement israélien a refusé de renforcer la ‘trêve’ et de la transformer en cessez-le-feu véritable, ce qui aurait au moins amélioré la vie quotidienne des Israéliens et des Palestiniens, sans même parler de toute prise réelle d’une initiative pour en finir avec le conflit israélo-palestinien, ce que le gouvernement est incapable de faire. Bien au contraire, pendant les mois de ‘trêve’, le gouvernement a continué ses actions provocatrices – comme par exemple le 4 novembre, le jour des élections aux USA, où des bombardements aériens ont eu lieu. Comme Barak le dit maintenant, l’opération militaire a été prévue en détail pendant ces mêmes mois. En Cisjordanie et dans la bande de Gaza, les opérations militaires ont continué. Le gouvernement a refusé de procéder à un échange complet de prisonniers, ce qui aurait pu aussi rendre le soldat captif Shalit à sa famille.

    Au cours de la période de ‘Trêve’, le siège économique et militaire de la bande de Gaza a continué, avec la collaboration des grandes puissances, de l’Egypte, du Fatah et du reste des régimes de la Ligue Arabe. La plupart protestent maintenant hypocritement contre le massacre. Abbas (Abou-Mazen) et le régime dictatorial de Moubarak en Egypte ont même surpassé les autres quand ils ont donné un appui implicite à l’attaque d’une manière bien plus prononcée que certains des régimes arabes l’avaient fait au début de la deuxième guerre du Liban. La ministre des affaires étrangères, Livni, a été invitée lors d’une visite spéciale au Caire deux jours avant la guerre.

    Cette collaboration a exaspéré les masses arabes au Moyen-Orient. Elle a augmenté la haine des régimes corrompus de la Ligue Arabe qui, comme le régime corrompu d’Israël, n’agissent pas pour servir les travailleurs et les pauvres, mais pour les exploiter et de les réprimer. La colère qui éclate maintenant pourrait précipiter la fin du régime affaibli de Moubarak en Egypte et affaiblir encore plus Abbas qui apparait comme une marionnette du gouvernement israélien. La nouvelle situation fait des pourparlers d’Annapolis une farce encore plus grotesque. Ces négociations de paix avaient été suspendues à cause de la guerre et n’ont jamais été prises au sérieux, que ce soit en Israël, dans les territoires palestiniens ou dans le reste du monde.

    Depuis le retrait des colonies et de l’armée de la bande de Gaza en 2005, l’élite israélienne a continué dans la pratique à dominer le territoire comme si c’était une gigantesque prison. Après la victoire du Hamas aux élections pour le Conseil Législatif Palestinien, l’élite israélienne avait augmenté ses attaques contre les habitants avec le soutien des grandes puissances. Le Hamas avait remporté les élections en raison de la colère qui vit contre les chefs corrompus du Fatah et dans la perspective de l’échec des organisations palestiniennes, qui se sont par le passé qualifiées de socialistes.

    Le Hamas est, naturellement, loin d’être un mouvement socialiste et est également une barrière dans la lutte des masses palestiniennes pour la libération nationale car il ne propose pas de stratégie pour une solution sérieuse aux problèmes qui se posent aux masses palestiniennes. Il est incapable de construire un soutien parmi les travailleurs et les pauvres israéliens à qui il nuit. Néanmoins, le Hamas est renforcé en raison de la corruption et de la trahison du Fatah ainsi que des actions du gouvernement israélien. La majorité des Palestiniens, comme des Israéliens, en a assez des grandes partis politiques existant actuellement et il y a un grand besoin d’une alternative.

    Juste avant la guerre, le gouvernement avait cyniquement pris la crise humanitaire sous sa responsabilité et temporairement ouvert le passage des frontières à l’arrivée de nourriture et de médicaments. Les généraux et les politiciens de tous les partis de l’establishment israéliens justifient la politique de punition collective contre les habitants de la bande de Gaza comme une réponse aux tirs de roquettes contre les habitants israéliens des villes proches de la bande de Gaza. C’est une autojustification hypocrite. Le même gouvernement et les mêmes militaires jouent cyniquement avec les peurs, les soucis et la détresse des résidants du Negev occidental, ils ne proposent qu’une détérioration du problème et un approfondissement du conflit.

    Le prix du conflit est finalement payé par la masse des familles des travailleurs et des pauvres israéliens et palestiniens, et pas par l’élite de décideurs qui tirent profit la plupart du temps du conflit national. Les tirs de roquettes sont juste le symptôme d’une situation dont le responsable en chef est l’élite israélienne, même si les fonctionnaires du ministère des Affaires Etrangères et les journalistes travaillent vingt-quatre heures sur vingt-quatre pour brouiller ce fait. le nombre de victimes de chaque côté témoigne tous les ans du point auquel le conflit pour la terre est loin d’être symétrique.

    Durant des années, la politique gouvernementale avait imposé une occupation et une oppression systématique des masses palestiniennes par des moyens innombrables comprenant des démolitions, la famine et la tuerie. Au cours de ces derniers mois, le gouvernement a choisi de priver les habitants de la bande de Gaza de sorte que la grande majorité d’entre eux souffre de pauvreté extrême et manque de tout pour vivre, de nourriture comme de médicaments et d’électricité. Naturellement, cette situation entraîne l’opposition. Tant que il y aura une oppression nationale, le conflit national et le carnage continueront.

    Le conflit est en dernière instance un problème social

    Il y a des organismes palestiniens religieux de droite, tels que le Hamas, qui essayent de concurrencer Israël dans le massacre de civils, même si c’est à une échelle de beaucoup inférieure à ce dont est capable le gouvernement israélien, afin de donner l’impression qu’ils mènent une lutte contre ces attaques. En réalité, les tirs de roquette sont simplement une méthode de vengeance qui, à cause du désespoir et de la faim, obtient parfois un soutien parmi les Palestiniens. Les tirs de roquettes sont certainement incapables de casser la politique du siège (à la différence de l’évasion de masse de la frontière égyptienne) ou de nuire à l’oppression militaire. Cela nuit simplement à des civils autour des frontières de la bande de Gaza. C’est un cadeau politique fait à l’establishment capitaliste israélien qui emploie traditionnellement le conflit et la question de la sécurité afin d’augmenter son soutien. Le même soutien est chroniquement miné en raison de leurs attaques économiques continuelles sur les travailleurs et les pauvres en Israël ainsi qu’en raison des problèmes sociaux qui en résultent.

    C’est également la raison pour laquelle la propagande de l’establishment fait un effort en créant une séparation artificielle entre les problèmes sociaux et les problèmes de sécurité. Mais le conflit israélo-palestinien est également un problème social brûlant, et on ne doit pas se baser sur ces mêmes partis qui mènent ou soutiennent la guerre économique contre la majorité des Israéliens pour ne s’inquiéter des intérêts de la population que pour les questions de sécurité. Aucun des partis de l’establishment n’a de solution au conflit et aux problèmes qu’il crée.

    C’est également pourquoi les partis de l’establishment sont côte à côte en temps de guerre et ne proposent pas rien comme alternative. Les partis soi-disant en opposition participent à une coalition élargie, juste comme ils le font de façon plus cachée pour les sujets économiques. Ainsi, il était possible de voir Benjamin Netanyahu du Likoud et Haim Oron de Meretz parlant d’une même voix. La presse de l’establishment forme également un chœur pour féliciter l’attaque et souligne son rôle comme chien de garde de l’establishment capitaliste et de ses guerres.

    Meretz, qui se décrit en tant qu’élément du ‘Camp de la paix’, a réclamé une action à Gaza avant même la guerre, comme il avait à l’époque soutenu la deuxième guerre du Liban. Il a même reçu des notes préliminaires du gouvernement au sujet de l’attaque. Afin d’essayer de gagner des voix du Parti Travailliste, Meretz continue à remplir son rôle historique, en soutenant une politique gouvernementale destructive et nocive pour les Juifs et les Arabes.

    Une Alternative Socialiste

    La sécurité des Juifs israéliens ne pourra jamais être réalisée aux dépens de la sécurité des autres populations de la région. Les travailleurs et les pauvres, Juifs comme Palestiniens, partagent les mêmes intérêts et les mêmes aspirations à une réelle sécurité ainsi qu’à une paix durable. Afin d’arrêter les bombardements et toutes les méthodes d’oppression utilisées contre les masses palestiniennes, il faut un large mouvement social sur le terrain pour les combattre et pour mettre en avant une alternative à la guerre permanente et aux bains de sang interminables. Les organisations ouvrières, y compris Histadrut, doivent contribuer à la construction d’un tel mouvement, et cela dans l’intérêt général des travailleurs.

    Le manque d’un tel mouvement, un mouvement ouvrier solide, un grand mouvement socialiste composé des travailleurs juifs et arabes, en Israël comme dans les Territoires Palestiniens, fait en sorte que des tas de familles de travailleurs et de pauvres sont victimes d’événements sur lesquels elles n’ont pas le moindre contrôle. Actuellement, la classe ouvrière n’est pas réellement organisée. Si la population était organisée d’une telle manière, la majorité de l’opinion publique juive-israélienne ne serait pas désespérée au point d’accepter les prétendues propositions sécuritaires du gouvernement. Le fait que la majorité les soutient est dû au fait qu’elle n’a pas de réponses à la question : « Qu’est-il possible de faire dès maintenant afin d’améliorer la situation ? » Comme cela a été dit, le gouvernement aurait pu faire beaucoup d’autres choses, mais a finalement choisi l’attaque.

    S’il y avait un mouvement socialiste large et organisé, il aurait été possible de forcer le gouvernement à instaurer un réel cessez-le-feu, à faire cesser le siège et l’oppression de la population palestinienne, et à procéder à un échange complet de prisonniers. Un large mouvement socialiste devrait se mettre en place aussi bien dans les Territoires Palestiniens qu’en Israël, afin d’offrir une véritable alternative aux grands partis politiques existants et de mener une lutte pour cesser les bombardements ainsi que tous les actes d’agression contre les masses palestiniennes de la part du gouvernement israélien.

    En l’absence d’un mouvement socialiste large réunissant les Juifs et les Arabes en Israël et dans les Territoires Palestiniens, d’autres forces politiques qui n’ont rien d’autre à offrir qu’une intensification du conflit vont se renforcer, comme cela s’est déjà produit ces dernières années. Cependant, il y a des mesures urgentes qui peuvent et doivent être prises afin d’établir la base pour la construction d’un tel mouvement. Le mouvement anti-guerre doit être élargi autour de la revendication d’une solution alternative qui procurerait une paix et une sécurité réelles aussi bien aux Palestiniens qu’aux Israéliens. Les manifestations communes des Juifs et des Arabes contre la guerre doivent être renforcées, avec une opposition implacable à toute forme de répression des manifestations ou protestations contre la guerre, avec un soutien au droit à l’autodéfense des manifestants attaqués, et avec une opposition claire aux provocateurs et aux autres forces qui tentent de détourner la lutte contre les résidents eux-mêmes.

    Une autre mesure à prendre en vue de la construction d’un mouvement large est d’organiser une discussion sur l’offensive militaire israélienne et ses conséquences dans toutes les organisations ouvrières, les organisations étudiantes, les communautés de quartier et toutes les formations qui luttent pour un changement social et pour la défense des travailleurs et des pauvres – et cela inclut “City for all of us” à Tel Aviv et l’organisation “Power to the workers”. Il est important que dans ces réunions, une discussion soit tenue entre travailleurs et activistes juifs et arabes, dans le but d’arriver à une analyse commune de la situation actuelle, de trouver des solutions communes , d’organiser l’élargissement des protestations contre la guerre et, dans la mesure du possible, de diffuser une condamnation publique contre la guerre.

    Le groupe "Kol Akher" (L’Autre Voix), qui a été mis sur pied par des dizaines de résidents israéliens et palestiniens du Négev occidental et de la bande de Gaza, montre ce que les résidents peuvent faire, avant même qu’un mouvement social large ne soit établi et même dans le but de construire un tel mouvement. Ce groupe est maintenant en train de mener campagne pour un nouveau cessez-le-feu et contre la guerre, et des centaines de résidents du Sud de l’Israël ont déjà signé leur pétition. Le groupe organise des discussions directes entre Israéliens et Palestiniens, ce qui est particulièrement significatif vu le niveau d’incitation à la haine et à la division alimentées par les canaux d’information officiels.

    Le but des discussions directes est d’arriver à une compréhension des intérêts communs, et de trouver une solution saine. Le groupe des "Combattants pour la Paix" (qui regroupe d’anciens soldats et Palestiniens qui ont pris une part directe dans la lutte contre l’occupation), organise aussi des réunions et des dialogues similaires. Un mouvement socialiste large pourrait faire avancer la discussion à une échelle bien plus large, dans le cadre de comités de paix et de réconciliation, et pourrait ouvrir des discussions formelles sur les questions de sécurité et sur les « questions-clés » du conflit.

    Aussi bien en Israël que dans les Territoires Palestiniens, il y a un besoin urgent de larges partis socialistes pour la classe ouvrière et les pauvres qui pourraient diriger un tel mouvement, comme partie intégrante de la lutte pour renverser le capitalisme en Israël, dans les Territoires Palestiniens et au Moyen-Orient et pour établir un Israël socialiste côte-à-côte avec une Palestine socialiste indépendante, lesquels s’intègreraient dans une fédération démocratique et socialiste de la région.

    Les manifestations contre la guerre subissent une lourde répression

    Beaucoup de manifestations contre la guerre se sont déroulées dans beaucoup de villes en Israël, en Cisjordanie et dans le Moyen-Orient, certaines avec des participations massives. Dans la bande de Gaza, les manifestants sont parvenus à nouveau à ouvrir une brèche dans la frontière avec l’Egypte dans une tentative justifiée de briser le siège, mais ils ont rencontré le tir des gardes frontière égyptiens. Le Comité Suprême Arabe en Israël a déclaré une grève commerciale et une grève semblable a été déclarée en Cisjordanie. Des manifestations en Cisjordanie et à Jérusalem ont été férocement réprimées. Sous le couvert de la guerre, la police et les militaires augmentent leurs moyens de répression : au village Ni lin en Cisjordanie, par exemple, deux manifestants ont été tués par des tirs. A toutes les universités israéliennes, les manifestants ont été dispersés par la police anti-émeute.

    La répression des manifestations est accompagnée d’intensives incitations anti-arabe dans les médias de l’establishment, qui soutiennent la répression et décrivent les manifestations comme des troubles de l’ordre public. L’establishment entier est enrôlé afin de faire taire l’opposition et les protestations. L’extrême-droite relève la tête et avec elle les appels racistes pour attaquer les droits démocratiques des citoyens palestiniens en Israël.

    Dans le contexte de cette atmosphère super-militariste, une pression est également exercée sur les luttes des travailleurs. Le comité des travailleurs à l’Israeli Electric Corporation, par exemple, a suspendu la lutte des travailleurs contre les attaques qui suivent le début de la guerre.

    À Tel Aviv, le samedi soir, des centaines de militants juifs et arabes – comprenant des membres de Tnu’at Maavak Sotzyalisti – ont manifesté devant le ministère de la Sécurité. Nos camarades ont crié des slogans tels que le "Barak : ministre de la Sécurité, vous n’achèterez pas la loi avec du sang", " Juifs et Arabes refusent d’être ennemis", "On fait couler le sang pour le prestige des ministres", "Aucune paix, aucune sécurité, ne démantèlent la loi du Capital", "De l’argent pour l’enseignement et les emplois, pas pour la guerre et l’occupation", "Le gouvernement a créé un désastre à Gaza et à Ashkelon", "À Gaza et à Sderot, les enfants veulent vivre", "Plus de murs et d’abris – dialogues entre résidants", et d’autres encore.

    La conférence Socialisme 2008, organisée par nous un jour avant l’attaque, a été suivie par des dizaines de participants, y compris des résidants du Negev occidental tout comme des dirigeants de premier plan de travailleurs récemment en lutte. Lors de ce meeting, nous avons averti des dangers de la politique sécuritaire des partis gouvernementaux et de l’establishment et avons aussi averti qu’on ne peut pas faire confiance aux partis qui ne fournissent pas de sécurité économique pour fournir sécurité en cas de guerre et de terreur. Les lois du capital n’apporteront pas une vraie paix ou une vraie sécurité. Lors de ce meeting, l’organisation a exprimé sa solidarité avec les familles juives et arabes qui subissent cette situation, à Sderot, à Ashkelon, dans la bande de Gaza et les autres villes à proximité.

    Les journaux rapportent déjà la colère croissante des gens dans le Negev occidental concernant les conditions de vies très basses. De façon comparable à l’atmosphère qui a accompagné la deuxième guerre du Liban, la vague nationaliste diminuera, au fur et à mesure où les gens se rendront compte qu’ils sont trompés. Mais sans un large mouvement socialiste capable de proposer une alternative politique, il y a également des chances que les populistes de droite tels que Lieberman réussissent à exploiter la colère contre l’élite et sortent renforcés. C’est, naturellement, un vrai danger, et c’est une autre raison pour laquelle le besoin de construire un mouvement est un besoin critique.

    Le Mouvement Socialiste de Lutte appelle à:

    • Une fin immédiate aux bombardements ainsi qu’au reste des opérations militaires dans la bande de Gaza, et une pleine compensation financière du gouvernement israélien aux familles des victimes des deux côtés de la barrière
    • Un cessez le feu immédiat et complet qui comprend la fin du siège économique et financier des habitants de la Bande de Gaza et la fin des opérations militaires dans les Territoire Palestiniens, Stop aux tirs de roquette contre les habitants du Sud de l’Israël
    • Continuer les manifestations communes de Juifs et Arabes contre la guerre à Gaza, contre la séparation nationale, contre le conflit et contre l’extrême-droite
    • La fin de la répression policière et militaire du droit de manifester et à la fin des incitations anti-Arabes institutionnalisées, nationalistes et racistes
    • La fin des jeux sur la peur des gens en Israël par l’establishment capitaliste, à la fin de l’instrumentalisation de la vie des habitants à des fins électorales et à la fin du recours aux soldats comme chair à canon.
    • La fin des aventures militaires de l’élite dirigeante et de ses tentatives de cacher les problèmes politiques et sociaux de cette manière
    • Un échange de prisonniers complet qui inclut la libération du soldat Gilad Shalit
    • Un dialogue direct entre habitants israéliens et palestiniens, à un renforcement des liens entre travailleurs et organisations sociales des deux côtés de la division nationale
    • La construction de larges partis socialistes composés des travailleurs, tant en Israël que dans les Territoires Palestiniens, qui puissent mener la lutte pour résoudre les problèmes sociaux, ce qui comprend le conflit israélo-palestinien
    • Retirer l’armée des Territoires Palestiniens et à retirer toutes les mesures d’oppression et d’occupation imposées aux masses palestiniennes comme les checkpoints, le mur de séparation ou les colonies. Non au annexions de terres, des échanges de terres uniquement sur base d’accord complet et démocratique entre travailleurs et pauvres israéliens et palestiniens.
    • Une véritable sécurité et une véritable paix, à la fin du conflit israélo-palestinien et à la fin aux interventions et dictats militaires, politiques et économiques menés par les grandes puissances sur les masses du Moyen Orient et menés par le gouvernement israélien dans les Territoires Palestiniens et les Etats voisins.
    • Une lutte pour un Israël socialiste à côté d’une Palestine socialiste indépendante aux frontières déterminées démocratiquement par des discussions directes entre représentants des habitants et avec des garanties de pleine liberté de mouvement, à une lutte pour que Jérusalem soit la capitale commune des deux Etats socialistes, avec des règles autonomes des deux côtés de la ville.
    • Une lutte unifiée des masses du Moyen-Orient pour de bonnes conditions de vie, pour la paix et pour le socialisme, pour un Moyen-Orient démocratique et socialiste avec des droits garantis pour tous les groupes et minorités.
  • Israel-Liban-Palestine. Contre la guerre et l'exploitation

    A près plus d’un mois de guerre, l’intervention de Tsahal au Liban se solde par un fiasco pour l’impéralisme israélien et américain. Le Hezbollah n’est pas affaibli et sa capacité militaire est loin d’être détruite. Face à l’attitude passive des régimes arabes, il est perçu par les masses dans l’ensemble des pays arabes comme la résistance sur le terrain aux planx de l’Administration Bush ppour son " Nouveau Moyen-Orient ". 97% des Palestiniens soutiennent les actions du Hezbollah. L’enlèvement des deux soldats a été ressenti comme un geste de solidarité suite aux opérations militaires israéliennes en cours depuis le 28 juin à Gaza.

    Boris Malarme

    En Israël, la cote de popularité du triumvirat Olmert-Livni-Peretz, qui voulaient casser leur image de civils et prouver leurs capacités guerrières est au plus bas. Seuls 20% des Israéliens considèrent l’intervention au Liban comme une victoire pour Israël alors que le conflit devait illustrer sa puissance dans la région.

    L’impérialisme américain a soutenu sans relâche l’intervention israélienne et n’a cessé de livrer des munitions à Tsahal. La guerre au Liban contre le Hezbollah devait renforcer sa position dans son bras de fer avec le régime iranien. Après le vote de la résolution de l’ONU, l’Iran donne le ton en annonçant que si Israël et les Etats-Unis s’avisaient de l’agresser, il devaient craindre le jour ou des missiles de 2000 km de portée frapperaient le coeur de Tel-Aviv. L’issue du conflit est un nouvel échec pour l’Administration Bush après les bourbiers irakien et afghan.

    Avec plus de 1.800 de civils libanais tués, les attaques ont été visiblement plus efficaces contre la population que contre les combattants du Hezbollah. Les dommages économiques causés par les bombardements intensifs et l’embargo israélien sont énormes. Ce sont les travailleurs et la population pauvre au Sud-Liban qui paient le prix fort pour la guerre. Tandis que la reconstruction offrira de plantureux profits aux capitalistes, des dizaines de milliers de travailleurs se retrouvent sans emploi.

    L’aide promise par le Hezbollah ne résoudra pas les problèmes sociaux. Le Hezbollah est incapable de sortir le Moyen-Orient de la domination impérialiste. Les victimes de ses missiles ne sont pas les Olmert, Blair et Bush, mais les travailleurs juifs et arabes en Israël, ce qui pousse la population israélienne à soutenir la politique de guerre.

    L’attitude de la France qui exige d’avoir toute latitude d’utiliser la force illustre que l’envoi de troupes n’a pas pour objectif plus de sécurité mais bien sa volonté d’étendre son influence dans la région. Le renforcement de la FINUL créera de nouvelles tensions au Liban.

    Seul le mouvement ouvrier a le potentiel de sortir le Moyen-Orient de la pauvreté et d’empêcher de nouvelles guerres impérialiste d’y faire rage.

  • Une guerre lourde de conséquences. L’impérialisme mène à la guerre et la population en paie le prix

    Les armes se sont provisoirement tues après 33 jours de bombardements intensifs sur le Liban et de tirs nourris de roquettes sur le nord d’Israël. Tant Israël que le Hezbollah se sont empressés de crier victoire. Mais cette guerre va laisser des traces profondes dans les sociétés libanaise et israélienne et, au-delà, dans tout le Proche-Orient.

    Thierry Pierret

    Le bilan humain et matériel de cette guerre est désastreux pour le Liban. Les bombardements israéliens y ont tué plus de 1.800 personnes et en ont blessé des milliers d’autres, dont une écrasante majorité de non-combattants. Ils ont provoqué l’exode d’un million de personnes, soit un quart de la population.

    Les dégâts causés aux infrastructures libanaises sont évalués à plus de 2,5 milliards de dollars. De plus, il faut prendre en compte l’interruption durable d’activités commerciales et industrielles due au blocus naval, aérien et terrestre, ainsi que la perte de la saison touristique.

    Rivalités inter-impérialistes

    Dès le déclenchement des hostilités, le Conseil de Sécurité de l’ONU s’est divisé entre d’une part les Etats-Unis et la Grande-Bretagne qui voulaient laisser à Israël le plus de temps possible pour accomplir son œuvre destructrice – ce que la chef de la diplomatie américaine appelait cyniquement " les contractions du nouveau Moyen-Orient " – et les autres membres du Conseil emmenés par la France qui voulaient imposer un cessez-le-feu immédiat.

    Le massacre de Cana et la réprobation unanime qu’il a suscité ont finalement obligé les Etats-Unis et la Grande-Bretagne à assouplir leurs positions. La résolution 1701 est un texte de compromis qui impose un cessez-le-feu dès le 14 août sans exiger le retrait immédiat de l’armée israélienne et la levée du blocus naval et aérien.

    L’armée israélienne restera au Liban jusqu’à l’arrivée de 15.000 soldats libanais, qui ont commencé à se déployer le 17 août au sud-Liban, et de 15.000 membres de la FINUL. Mais la France qui était pressentie pour en être l’épine dorsale, semble faire marche arrière. Du coup, les autres pays reconsidèrent leur engagement….

    Le fiasco de Tsahal

    L’armée israélienne (Tsahal) a été incapable de repousser le Hezbollah au nord du fleuve Litani, encore moins de le briser. L’état-major israélien s’était vanté d’en finir avec le Hezbollah par la seule force de son aviation. Après trois semaines de bombardements intensifs qui ont à peine entamé le potentiel militaire du Hezbollah, ils ont dû improviser des opérations terrestres qui ont été extrêmement meurtrières pour Tsahal qui a perdu 101 soldats sur le sol libanais. Ils n’ont pas davantage récupéré les deux soldats enlevés le 12 juillet.

    Plus grave, Tsahal n’a pas été capable de protéger le territoire israélien. Le Hezbollah a tiré des roquettes sur le nord d’Israël jusqu’au dernier jour de la guerre, soit 4.000 au total, qui ont tué 53 civils et militaires et jeté sur les routes quelque 330.000 Israéliens, soit 4,5% de la population. Ces roquettes ont totalement détruit 4.000 bâtiments. 16.000 familles ont perdu leur logement. Mais, par-dessus tout, c’est le mythe de l’invincibilité de Tsahal qui a été brisé au Liban. Alors qu’Israël avait lancé son offensive pour restaurer le prestige de son armée au moment où elle est engagée dans une guerre d’agression ouverte depuis fin juin contre l’Autorité palestinienne, il a abouti au résultat inverse. La résistance palestinienne est galvanisée par l’échec de Tsahal au Liban.

    Le consensus national vole partout en éclats

    La population israélienne, après avoir fait bloc autour de ses dirigeants politiques et militaires, demande maintenant des comptes sur la façon dont la guerre a été menée. D’après un sondage, seuls 20% des Israéliens pensent qu’Israël a atteint ses objectifs. La façon dont la protection civile a été organisée est aussi contestée. Les pompiers qui ont lutté pied à pied contre les incendies provoqués par les roquettes tardent à être payés par des municipalités gangrenées par la corruption. Dans le nord d’Israël, les habitants pauvres des localités juives et les habitants des localités arabes ont été laissés à leur sort. Certaines municipalités ont obligé le personnel municipal à continuer de travailler sous les tirs de roquettes sous peine de licenciement.

    On a également appris que le chef d’état-major, Dan Halutz, déjà contesté pour ses choix tactiques, avait vendu pour 21.000$ d’actions le 12 juillet, juste après l’incursion du Hezbollah et juste avant la riposte israélienne. Il avait anticipé la chute de la Bourse de Tel-Aviv. Ainsi, au moment de lancer le pays dans une guerre périlleuse, le chef de l’armée ne pensait qu’à son portefeuille d’actions… Les Israéliens découvrent que les chefs de l’armée sont aussi corrompus que les politiciens. Olmert et Peretz sont en chute libre dans les sondages au profit de Benjamin Netanyahou, le dirigeant de la droite dure, qui a vu sa cote de popularité grimper à 58% au lendemain de la guerre.

    Dans les pays arabes, la population a pris fait et cause pour le Liban. Les régimes arabes ont été conspués pour la mollesse de leur réaction face à l’agression israélienne. Les gouvernements arabes ont eu toutes les peines du monde à contenir la colère de leur population. La peur est en train de changer de camp. La population ose de plus en plus défier les régimes autoritaires. En Irak, des centaines de milliers de chiites ont défié les troupes d’occupation américaines en manifestant leur solidarité avec le Hezbollah.

    Au Liban, l’unité nationale autour du Hezbollah ne tardera pas non plus à voler en éclats. Les critiques de sa stratégie, qui étaient inaudibles pendant la guerre, vont désormais se faire entendre. De plus, la pression pour désarmer le Hezbollah en application de la Résolution 1559 va s’accentuer avec le déploiement de l’armée libanaise et de la FINUL dans le sud. Le Hezbollah va sans doute essayer de négocier l’intégration de sa milice au sein de l’armée libanaise. C’est non seulement inacceptable pour Israël, mais cela renforcerait le poids des chiites au sein de l’armée. D’où la résurgence prévisible des tensions internes et externes.

    On peut déjà prévoir que l’énorme chantier de la reconstruction va aggraver les inégalités sociales comme ce fut le cas après la guerre civile (qui a déchiré le Liban entre 1975 et 1990). Une minorité d’entrepreneurs et de promoteurs arabes et libanais vont s’enrichir en un temps record grâce au marché de la reconstruction qui mobilisera d’énormes quantités de capitaux. Mais si les infrastructures vitales seront vite reconstruites, les quartiers populaires resteront livrés à leur sort. Certes, le Hezbollah a promis de reconstruire, mais il ne se souciera sans doute que de la communauté chiite, ce qui attisera aussi les tensions intercommunautaires.

    Pour une opposition socialiste à la guerre et à l’exploitation

    Nous ne joindrons pas notre voix à celles qui s’élèvent de partout pour imputer au Hezbollah la responsabilité de la guerre. Si son action du 12 juillet en a été la cause immédiate, sa cause profonde réside dans la lutte de la bourgeoisie israélienne pour sauvegarder son rôle dirigeant qui est de plus en plus contesté par les travailleurs et les jeunes israéliens. Les Libanais, les Israéliens et les Palestiniens tués dans ce conflit en sont les victimes collatérales.

    Pour autant, nous n’accordons pas un soutien aveugle au Hezbollah. Il est incapable de surmonter durablement les divisions communautaires, car il s’enracine dans une seule communauté. Son projet social se base sur le clientélisme et ne remet pas en cause les fondements de l’exploitation capitaliste. La République islamique d’Iran, qui est son modèle, est un échec total tant sur le plan de la justice sociale que des droits démocratiques. De plus, il a une attitude sectaire envers la population juive israélienne dont il nie le droit à l’autodétermination. Par cette attitude et ses bombardements aveugles sur le nord d’Israël, il pousse les travailleurs et les jeunes israéliens à faire bloc avec leur classe dirigeante malgré la haine croissante qu’elle leur inspire.

    Voilà pourquoi nous avons défendu le mot d’ordre, dès le début du conflit, de la mise sur pied de comités d’autodéfense par delà les divisions communautaires. Ces comités élus et révocables n’auraient pas seulement pris en charge la défense armée de la population, mais auraient aussi discuté de la façon dont le pays est géré. Ils auraient, par exemple, exigé que la reconstruction se fasse sous le contrôle de la population et soit payée par ceux qui se sont enrichis lors de la reconstruction d’après la guerre civile. Pour cela, il faudrait nationaliser les secteurs-clés de l’économie sous le contrôle démocratique des travailleurs et de leurs familles afin de veiller à ce que l’utilisation des richesses se fasse au service de la population. Seule une confédération socialiste du Proche-Orient, incluant le Liban, Israël, la Palestine et d’autres pays sur une base volontaire, permettra d’en finir avec la guerre, la misère et l’oppression.

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