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Tag: SP
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Pays-Bas : Le SP risque de balayer le succès des communales
Aux dernières élections municipales, en mars, les partis gouvernementaux ont été durement sanctionnés. Le Socialistische Partij, parti à la gauche des sociaux-démocrates, avait par contre bénéficié d’un soutien lui permettant de faire plus fortement entendre sa voix contre la politique d’austérité du gouvernement du VVD (droite officielle) et du PvdA (social-démocrate). Mais depuis lors, ce n’est pas ce message qui a été transmis.
Par Pieter Brans, Socialistisch Alternatief (Amsterdam)
A Utrecht et Amsterdam, les majorités communales ont impliqué le parti D66, officiellement ‘‘libéral de gauche’’ mais qui dans les faits sert de force d’appoint pour le VVD. Le SP a également rejoint la coalition au pouvoir dans ces villes. La question des autorités communales est d’autant plus importante que le gouvernement a décidé d’appliquer des coupes budgétaires dans les soins de santé par le biais des communes. Concrètement, ce sont ces dernières qui ont à charge d’effectuer les assainissements. Le SP aurait dû être extrêmement prudent pour entrer dans une coalition et exiger de sérieuses garanties pour assurer que les autorités locales s’opposent aux mesures d’austérité du gouvernement.
Une des choses qui rend encore plus affligeante cette entrée du SP au pouvoir au niveau local est l’abolition du système du bail emphytéotique jusque-là en vigueur à Amsterdam. Il s’agissait d’une revendication importante tant du VVD que de D66. Ce système, introduit en 1896 par les sociaux-démocrates, considérait que tout le territoire était propriété de la commune, chaque propriétaire payant un bail à la commune. Cette mesure visait à combattre la spéculation foncière et une partie de la hausse des valeurs immobilières revenait à la communauté. Le principe était tout à fait social et, juste au moment où cela aurait pu rendre de grands services, il a été aboli, avec l’aval du SP.
L’accord politique stipule que 187.000 logements sociaux seraient préservés à Amsterdam, soit autant que le nombre de ménages disposant d’un revenu sous les 34.000 euros par an. Mais cela signifie toutefois que le nombre de logements sociaux chuterait fortement, de 43.000, puisqu’il y en a environ 230.000 actuellement.Le SP a cependant assuré la création d’un fonds de 62 millions d’euros destiné à adoucir l’impact des mesures gouvernementales sur les soins de santé et l’emploi. En outre, 10 millions d’euros sont prévus pour l’aide sociale aux ménages, cette aide devant être maintenue jusqu’en 2016. 30 millions d’euros sont aussi alloués pour la lutte contre la pauvreté.
Reste que c’est bien peu au regard de l’abolition du bail emphytéotique, de la perte de 43.000 logements sociaux et de l’impact sur les communes des coupes budgétaires gouvernementales. Le SP a été instrumentalisé par le VVD et D66.
On a pu lire dans le quotidien “De Volkskrant” que le SP a lancé une offensive suite aux élections nationales de septembre 2012, où le parti avait reçu une claque importante de la part du PvdA. Malheureusement, cette offensive n’était pas dirigée contre la politique d’austérité, mais vers la participation au pouvoir, avec n’importe qui. ‘‘Avec qui pourrais-je gouverner ? Avec presque tout le monde !’’ déclarait ainsi le dirigeant du parti Emile Roemer il y a deux ans…
Pour les années à venir, le SP sera co-responsable de la gestion de communes comprenant au total 4 millions d’habitants. Comment le SP s’opposera-t-il à l’austérité ? L’économie néerlandaise est en mauvais état. Les données semblent meilleures, mais seule l’exportation augmente quelque peu. Les dépenses internes sont sous l’énorme pression d’un chômage croissant, de dettes gigantesques, de bas salaires et de la pauvreté en général. La crise persiste.
L’opposition syndicale n’est pas encore massive, mais des actions réussies ont eu lieu dans les secteurs à bas salaires, comme dans le nettoyage. Après des semaines, une augmentation salariale substantielle et le payement des deux premiers jours de maladie ont été obtenus ! La colère gronde également chez les éboueurs, qui n’ont reçu aucune augmentation salariale pendant des années. Des victoires syndicales ont encore été obtenues chez Tata steel (sidérurgie), Xerox (fabrication d’imprimantes) et Venray (construction) et à la Poste.
Maintenant que la résistance contre la crise aux Pays-Bas commence à se développer, c’est une faute tragique du SP de se laisser utiliser par les partis pro-capitalistes. L’opposition grandissant contre les bas salaires, la pauvreté et l’austérité a besoin d’un large parti des travailleurs combattif. La période à venir sera décisive pour savoir si le SP devient ce parti ou ne jouerai qu’un rôle limité dans ce processus.
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« Le SP ne suit pas ses propres principes »
Pays-Bas : des membres critiques du SP lancent un nouveau parti
Interview avec Rick Denkers, ex-président du SP à Emmen et membre de la direction provisoire du nouveau parti Solidara. La création de Solidara a été rendue publique à la mi-septembre après l’exclusion du député Düzgün Yildirim par la direction du parti.
Rick, d’où vient cette commotion dans le parti ?
Rick Denkers : Après les élections provinciales, il est apparu que le fonctionnement interne du SP était très déficient. Un parti qui récolte 16% des voix tout en continuant à fonctionner sur base de vieilles méthodes maoïstes se heurte évidemment à des problèmes. Ces dernières années, de nombreux socialistes ont adhéré au SP sans en partager le passé. Le manque d’espace pour le débat interne les heurte de plein fouet.
Le SP est vu comme une success story par une grande partie de la gauche en Europe. Ne connaît-il pas une euphorie consécutive aux victoires électorales qui permet à la direction d’empêcher toute discussion ?
RD : Non, ce n’est pas le cas. La base du parti est composée de militants, même si le SP compte beaucoup plus de membres sur papier. Aujourd’hui, ce sont justement les militants de base qui demandent un débat dans le parti. Et la seule réponse de la direction est la répression partout où ça se produit : exclusions, suspensions, campagnes de calomnies,… Il y a en ce moment des centaines de membres, dont pas mal de mandataires élus, qui sont en train de quitter le SP. Dans ce sens, le sommet du parti se coupe de plus en plus de sa propre base.
Cet été, un groupe de membres a mis sur pied le Comité pour la Démocratisation du SP et plusieurs d’entre eux ont déjà choisi d’être actifs dans la construction d’un nouveau parti, Solidara. Quelle est la suite ?
RD : Une partie du CDSP continue la lutte pour plus de démocratie dans le parti. Ils comptent sur le congrès que le parti tiendra en novembre pour engager la discussion. D’autres oeuvrent déjà à la création d’un nouveau parti parce que nous faisons le constat qu’un SP démocratique n’est plus possible à moins de faire table rase de toute la structure actuelle du parti avant de recommencer à construire. Nous avons opté pour un nouveau parti qui se base sur les vrais principes socialistes.
Le nouveau gouvernement Balkenende – qui réunit le parti chrétien CDA et les sociaux-démocrates du PvdA (qui ont remplacé les libéraux) – a révélé ses projets pour l’année prochaine. Comment le SP et Solidara y réagissent-ils ?
RD : En dépit de son énorme score électoral et des moyens dont il dispose, le SP n’est pas en mesure de formuler une réplique digne de ce nom au gouvernement. Le fait que Wilders (1) ait le champ libre pour faire son show et apparaître comme l’opposition à Balkenende en est le meilleur exemple. Solidara a déjà clairement et publiquement pris position contre Wilders, contre sa manière de détourner la démocratie pour semer la haine et le racisme. Avec Solidara, nous voulons aussi mettre en avant un programme clairement internationaliste en prenant exemple sur le socialiste allemand Karl Liebknecht qui disait que la classe ouvrière n’avait pas de patrie.
Düzgün a déclaré qu’il avait déjà enregistré 1.400 adhésions au nouveau parti. Quels sont les projets dans un proche avenir ?
RD : Il faut donner des pieds et des mains au parti. Nous sommes en train de metttre en place des sections locales, d’élaborer des statuts, de mener des discussions,… Nous voulons lancer un parti qui soit très clairement démocratique à la base et où ce sont les membres qui prennent les décisions. Nous fonctionnons aujourd’hui avec une direction provisoire qui prépare un congrès en janvier au cours duquel les membres pourront décider d’un premier programme, des statuts et des structures.
1. Geert Wilders est le dirigeant du PVV – un petit parti populiste de droite, anti-immigrés et anti-islam – et est comparable à Dedecker en Flandre
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Pays-Bas. Pour un SP démocratique et socialiste
Aux Pays-Bas existe depuis longtemps un petit parti à gauche du PvdA, le parti socialiste « officiel ». Ce parti, le SP, a connu ces dernières années une croissance importante : il a obtenu 16% aux dernières élections et s’est élargi jusqu’à compter aujourd’hui plus de 52.000 membres. Le SP montre ainsi qu’il y a un espace pour une initiative politique à la gauche de la social-démocratie et des verts. Mais ces progrès ne règlent pas tout. Car de nombreux problèmes se posent aussi dans le SP.
Bas de Ruiter
Début juin, le mécontentement dans le SP s’est exprimé publiquement suite à la manière dont la direction nationale s’est comportée lors de l’élection de Düzgün Yildirim au Sénat (dont les membres ne sont pas élus directement mais par les élus provinciaux). Yildirim a ainsi été élu sur base des votes de préférence exprimé par les 83 élus provinciaux du SP, au détriment d’une candidate soutenue par la direction. Les dirigeants du SP ont attaqué publiquement Yildirim dans les médias et ont voulu le forcer à démissionner.
Dans le SP existe une bonne tradition de laisser la base décider qui va représenter le parti. Mais la direction nationale restreint de plus en plus cette démocratie interne, ce qui limite la participation réelle des membres et leurs possibilités de faire entendre. Comme la direction bloquait toute possibilité de débat ouvert, Yildirim et ses partisans ont mis sur pied un Comité pour un SP Démocratique. Offensief, l’organisation soeur de MAS/LSP aux Pays-Bas, qui est aussi active dans le SP, collabore à cette initiative.
Il y a actuellement un fort mécontentement parmi les membres du SP, tant sur la question de la démocratie interne que sur l’orientation que doit suivre le parti. Dans de larges couches de la population, le SP est vu comme une nouvelle force conséquente de gauche. Mais cette image est néanmoins menacée par le cours actuel de la direction du parti qui s’oriente de plus en plus vers la transformation du SP en un parti de pouvoir social-démocrate mettant de côté son programme et sa base militante pour rechercher des postes et le pouvoir.
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“Le SP.a a abandonné ses idées socialistes et n’est plus un parti de travailleurs"
Interview de Jef Sleeckx, ex-parlementaire du SP.a
Le jeudi 13 mars, j’ai discuté avec Jef Sleeckx dans son bastion de Mol. Entre les nombreux projets, histoires et anecdotes, je lui ai posé les questions suivantes.
Propos recueillis par Bart Vandersteene
Qui est Jef Sleeckx?
> Jef Sleeckx a été membre du SP pendant plus de 40 ans. Il a été parlementaire pendant 21 ans et a siégé pendant 17 ans au bureau du parti.
> Jef a été vu pendant toutes ces années comme une figure de gauche proche des travailleurs.
> Jef a voté contre Steve Stevaert pour la présidence du parti: “Steve se préoccupe trop de techniques de vente et de shows télévisés et trop peu des vrais principes socialistes.”
> Yves Desmet (journaliste à De Morgen) : “Ce qu’un ouvrier ne veut surtout pas, c’est de voir cette idole de la vieille gauche qu’est Jef Sleeckx apparaître à la porte de son usine, car il sait alors qu’il est grand temps de trouver un autre travail”
Jef, tu as quitté le Parlement en 1999. Aujourd’hui, 7 ans plus tard, tu reviens sur la scène politique. Quels sont les raisons qui t’y ont poussé?
Il y a deux événements qui m’ont poussé à donner de la voix. D’une part, il y a eu la Constitution européenne qui a été rejetée en France et aux Pays-Bas. En soi, je trouve que l’UE a besoin d’une constitution pour faire collaborer 25 pays et 450 millions de gens. Mais cette Constitution ne porte pas là-dessus. Elle ne contient pas les règles du jeu, mais le jeu lui-même. La partie 3 de la Constitution dit que l’UE doit être néo-libérale. On ne laisse aucun espace pour le débat politique.
Une initiative avec Debunne et Vanoutrive
Georges Debunne m’a contacté l’année passée pour que je me joigne à lui et à Lode Vanoutrive afin de soumettre ensemble une pétition au Parlement flamand et de lancer ainsi le débat sur cette Constitution en Belgique.
Pour ce faire, nous avons dû récolter quelque 15.000 signatures dans des manifestations, des fêtes de quartier, aux portes des entreprises, et j’en oublie. En même temps, j’ai aussi étudié cette Constitution. Jamais je n’avais étudié avec un tel acharnement. Après la récolte des signatures, nous avons pu faire un exposé au Parlement flamand. Quelle ne fut pas ma stupéfaction lorsqu’il apparut que les parlementaires ignoraient presque tout de la Constitution. Cela transparaissait clairement dans les questions qu’ils me posaient. Ils n’en ont pas moins tous voté ensuite pour la Constitution…
Une deuxième affaire qui m’a énormément touché, c’est la lute contre le Pacte des Générations. A un certain moment, quelques délégués sont venus me trouver pour demander de mener une action et de diffuser un appel au fameux congrès du SP.a à Hasselt. J’ai été tout de suite d’accord et j’ai diffusé avec eux l’appel « nous vous tournons le dos ».
La collectivité paye, les patrons reçoivent des cadeaux
J’étais en total désaccord avec le Pacte des Générations. Le gouvernement et le SP.a faisaient tout pour effrayer les gens alors que ce n’était pas nécessaire. La Commission sur le Vieillissement a calculé qu’il faudrait de 3% à 4% du PNB en plus d’ici 2030 pour pouvoir payer les pensions. Cela équivaut à 9 ou 10 milliards d’euros (un peu plus d’après certains).
Si l’économie belge actuelle, qui vaut un bon 250 milliards d’euros, croît chaque année de 1,5% d’ici 2030, elle vaudra alors 112 milliards d’euros en plus. Utilisons-en 10% pour les pensions. Ce n’est quand même pas exagéré ?
Dans une interview à Knack, j’ai dit à ce moment qu’il fallait quelque chose de nouveau en dehors du SP.a, un nouveau parti des travailleurs. Je ne m’attendais pas à ce que mes paroles aient autant de conséquences à l’intérieur comme en dehors du SP.a.
Vande Lanotte a prétendu qu’il irait vers les entreprises avec ses militants. Nous ne les avons pas vus. Ils ont par contre organisé des réunions provinciales. J’y étais à Anvers où j’ai pris le micro et expliqué mon point de vue. J’ai demandé pourquoi on ne parle plus jamais d’un impôt sur la fortune, pourquoi on ne s’en prend pas plus énergiquement à la fraude, pourquoi les impôts ne rentrent pas mieux. Bref, j’y ai dit clairement que les moyens d’une politique existent, mais qu’il faut une autre politique.
Johan a encore essayé de monopoliser la parole, mais ça n’a pas marché. Il y a eu aussi une discussion sur ce que le Pacte des Générations reconnaîtrait comme métiers lourds. Après moi, quelqu’un dans la salle a pris le micro et a invité Johan à venir travailler 14 jours avec lui. Il saurait tout de suite ce qu’est un travail lourd. L’atmosphère dans la salle a tourné à travers la discussion et j’ai reçu beaucoup d’applaudissements et de marques de soutien. A la fin, j’ai dit que Vande Lanotte faisait prendre à la population des vessies pour des lanternes. C’est toujours la collectivité qui doit payer et les patrons qui reçoivent des cadeaux.
Si on menait une autre politique il n’y aurait aucun problème pour la population et, par exemple, pour le 1,5 million de Belges qui s’enfoncent aujourd’hui dans la pauvreté. Mais Stevaert a dit que le SP.a ne se préoccuperait plus en premier lieu des miséreux. Je me demande alors ce que doit faire un parti socialiste. Et aujourd’hui il n’y a pas que les allocataires sociaux qui ont du mal à s’en sortir. Vous pouvez toujours essayer d’entretenir une famille avec un salaire net de 1200 euros, surtout avec le coût actuel du logement.
Voilà pourquoi je dis qu’ils ont contribué à grossir les rangs du VB. Les mandataires socialistes ne sont plus physiquement présents dans les quartiers à problèmes. C’est comme s’ils avaient pris peur de leur public naturel. Mais pour pouvoir, par exemple, discuter du travail avec des chômeurs dans les quartiers à problèmes, on ne peut évidemment pas cumuler soi-même deux ou plusieurs boulots. Ce que fait Patrick Janssens est scandaleux : être parlementaire et bourgmestre d’une ville comme Anvers qui n’est pourtant pas si simple à gérer. Ce n’est tout de même pas sérieux. L’un des deux jobs devient forcément un job d’appoint, ce n’est pas possible autrement… Personne n’est capable de faire convenablement plusieurs jobs. Il en va de même avec le logement, vous pouvez toujours essayer de parler du travail au café avec un chômeur dans un quartier à problèmes si vous avez plusieurs jobs, ou avec un SDF si vous vivez dans une villa huppée, vous remarquerez tout de suite à quel point on vous prend au sérieux…
J’aurais pu devenir bourgmestre de Mol en 1994, mais je ne l’ai pas fait. J’ai laissé la base du SP.a décider quel mandat je devais assurer et le choix s’est porté sur mon mandat de parlementaire. Je ne voulais pas cumuler, c’est une question de principe. Si vous dites qu’il faut du travail pour tous, vous ne faites qu’un seul job. En tant que parlementaire, on a une fonction d’exemple. Les paroles ont été tellement vidées de leur sens que plus personne n’y croit, il faut agir tout simplement.
Comment vois-tu les développements des 10 dernières années au sein du SP.a?
J’ai été fortement frappé par le fait que le SP.a virait de plus en plus vers le centre, ce qui me tracassait au plus haut point. J’ai appelé pendant 17 ans au sein du bureau du parti à mener une autre politique. En tant que socialiste, on doit être droit dans ses bottes et adopter un profil clair. C’est ce qui a fait défaut et qui fait qu’aujourd’hui tant de gens votent pour le VB.
Le SP.a a abandonné ses idées socialistes et n’est plus un parti de travailleurs. Ils n’appellent plus jamais à lutter. Alors que c’est justement plus nécessaire que jamais. Nous ne pouvons pas oublier que la Sécurité sociale n’est pas tombée du ciel. C’est le résultat de la lutte. Et pour être honnête, surtout de la lutte des travailleurs wallons. D’où mon opposition résolue à ceux qui veulent scinder la Sécurité sociale. Les travailleurs flamands, bruxellois et wallons ont les mêmes intérêts. Nous oublions parfois que nous devons beaucoup aux Wallons.
Quelque chose qui m’est resté longtemps en travers de la gorge, c’est l’attitude du SP.a envers les réfugiés. Lorsque je siégeais encore au Parlement flamand, j’ai pris en main l’affaire de grévistes de la faim kurdes. Je suis même allé au Kurdistan et je sais qu’on ne peut pas renvoyer les réfugiés kurdes. Ces gens se retrouvent en prison, voire disparaissent tout simplement. J’ai clairement dit au bureau du parti que je voterais « selon ma conscience ». Grâce à la pression que j’ai pu mettre à l’époque, ces gens ont pu rester en Belgique. La grève de la faim avait lieu à Hasselt à l’époque où Stevaert était encore bourgmestre. Mais je ne l’y ai jamais vu et il n’est jamais intervenu en faveur de ces grévistes de la faim.
As-tu un message à transmettre le 1er mai aux militants du SP.a et de la FGTB ?
Aux militants du SP.a, je demanderais qu’ils insistent au sein du parti pour qu’il recommence à se préoccuper beaucoup plus des travailleurs. Je suis content que SP.a Rood existe, j’ai beaucoup de respect pour ces camarades, mais je n’y crois pas. Le sommet du parti ne va pas les prendre au sérieux, il va les faire lanterner. SP.a Rood peut jouer un rôle pour démontrer qu’il y a soi-disant une aile gauche, mais en même temps SP.a Rood n’a rien à dire et n’aura jamais rien à dire dans le parti.
Aux militants de la FGTB, je demande de porter haut le drapeau de la solidarité. Il y aura beaucoup de luttes qui nécessiteront l’unité des travailleurs flamands, wallons et bruxellois. Les politiciens veulent briser la solidarité en disant qu’il y a d’autres intérêts en jeu. Mais nous ne pouvons pas oublier que c’est grâce à la combativité wallonne que la Sécurité sociale a pris forme.
Aux uns et aux autres, je veux aussi dire qu’une alternative politique est nécessaire. Une alternative politique qui place les intérêts de la population laborieuse et des allocataires sociaux tout en haut de l’agenda.
Où que tu parles, tu mets l’accent sur la nécessité d’une meilleure protection des délégués syndicaux. Pourquoi ce point en particulier?
Parce que les délégués sont le moteur des syndicats. Ils sentent ce qui vit à la base. Hélas, les patrons font tout aujourd’hui pour mettre à la porte les bons délégués qui défendent leur base. Ils n’épargnent pas leur peine et sont même prêts à payer le prix fort, comme par exemple chez Stora à Zelzate, pour se débarrasser de délégués. Nous devons y apporter une réponse.
Les jeunes seront importants dans une nouvelle initiative, quel message adresses-tu à la jeunesse ?
Les jeunes doivent affiner leur conscience politique. Nombre d’entre eux sont en quête de valeurs qui proposent davantage que les valeurs purement matérielles. Parce que celles-ci ne garantissent pas le bonheur. C’est pourquoi la solidarité est importante, y compris entre les jeunes et les aînés.
J’ai été surpris dans un premier temps de lire que le VB fait maintenant de bons scores parmi les jeunes. L’avantage qu’a le VB, c’est qu’il n’y va pas par quatre chemins. Même si nous ne sommes pas du tout d’accord avec leur démagogie abjecte. Les partis traditionnels créent des attentes qu’ils ne concrétisent pas. D’où la perte de crédit de ces partis. Avec toutes les conséquences qui s’ensuivent ! Les gens doivent savoir clairement qui défend quoi sur qui ils peuvent vraiment compter.
L’initiative pour une autre politique diffusera un tract national le 1 mai. Quelle sera l’étape suivante ?
C’est un pas important que nous faisons en diffusant un tract commun dans tout le pays. Des gens d’horizons divers, des militants syndicaux, des militants politiques collaborent à une alternative politique.
Il y aura une réunion nationale en automne pour décider ce que nous ferons, quelles suites nous allons donner à notre appel à une alternative politique. Je ne peux pas encore anticiper cette étape, mais je la trouve importante. Si un nouveau parti voit le jour, ce sont les travailleurs qui en détermineront le programme. J’espère que nous seront prêts pour les élections législatives de 2007.
D’après toi, quel rôle les militants du MAS/LSP ont-ils à jouer dans cette nouvelle initiative ?
Les militants du MAS/LSP s’implique énormément dans le mouvement ouvrier. C’est positif et très important que le MAS/LSP ait pris position sur la nécessité d’un nouveau parti des travailleurs. J’ai beaucoup de respect pour vos militants, comme pour tous les militants de gauche. Une nouvelle initiative pourra compter sur beaucoup de bons militants pour approfondir certains points du programme et aider à les diffuser et à les défendre au-dehors. A mes yeux, tous les militants de gauche sans la moindre exception joueront un rôle important.
Un dernier mot pour nos lecteurs?
J’espère que le 1er Mai de cette année préfigure un nouveau printemps et un nouveau cri. Un nouveau cri qui réaffirme la solidarité entre tous les travailleurs où qu’ils habitent. Une autre politique signifie aussi que tous les gens de gauche devront, sans renier pour autant leur identité, mettre de côté les grandes certitudes de leur propre groupe pour aider à façonner une autre politique avec tous ceux qui veulent une autre politique, solidaires autour d’un programme commun, ainsi que pour combattre efficacement l’extrême droite.
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ATTAQUES CONTRE LES pensions en europe
Attaques contre les pensions en Europe
La lutte contre les pensions est menée avec hargne par les patrons et les gouvernements à l’échelle internationale. Les raisons sont les mêmes dans tous les pays. Les gouvernements de l’Union européenne qui n’ont pas de déficit budgétaire peuvent être comptés sur les doigts de la main. Avec une population qui vieillit et une croissance économique extrêmement faible, les dirigeants craignent que la croissance des dépenses pour les pensions ne gonflent les dettes déjà immenses. De leur côté, les patrons espèrent augmenter leurs profits par des allocations de pensions plus basses. Par un système plus privatisé, ils veulent libérer de l’argent pour placer en bourse. L’argent ne doit pas stagner dans les coffres des gouvernements mais doit servir à faire du profit par la spéculation.
Peter Delsing
L’attaque généralisée contre les pensions est surtout due au changement du rapport de force entre les travailleurs et les patrons après la chute du stalinisme. L’offensive néo-libérale s’est accélérée ces 15 dernières années. Les patrons s’imaginent qu’ils peuvent abolir tous nos droits pour se remplir les poches. Beaucoup d’exemples montrent cependant que le thème des pensions est très sensible. Ce sujet peut provoquer des mouvements de masse dans la classe ouvrière. En Autriche, les attaques sur les pensions ont déclenché, en mai 2003, la plus grande grève générale depuis un demi siècle et ce après des décennies de luttes isolées et sporadiques.
Italie
En 1994, le premier gouvernement Berlusconi a échoué dans sa tentative de démanteler les pensions. Une grève et des manifestations de masse avaient suffit pour que la Ligue du Nord, partenaire dans la coalition, fasse tomber le gouvernement. Sa base ne pouvait pas avaler la réforme. Le mouvement contre Berlusconi avait ainsi porté au pouvoir la coalition de l’Olivier, qui se revendique de la gauche. Mais le gouvernement Dini a aussi introduit une réforme des pensions : pour les jeunes travailleurs, les pensions ne seraient plus comptées sur base du salaire – plus élevé – des dernières années de carrière, mais sur base des contributions pendant toute la carrière. Les travailleurs qui cotisaient depuis plus longtemps restaient, eux, dans l’ancien système. Le pire, c’est que cette stratégie de division a été soutenue par les trois grandes fédérations syndicales.
De leur côté, les patrons ne voulaient pas du plan de Dini. Ils trouvaient que celui-ci n’allait pas assez loin. La politique antisociale de la coalition de l’Olivier a donné l’opportunité à Berlusconi de revenir au pouvoir. Confronté à des dépenses pour les pensions de près de 15% du PIB et à des dettes toujours plus importantes, Berlusconi a présenté un nouveau plan d’austérité en septembre 2003. Celui-ci prévoyait de faire cotiser les travailleurs italiens pendant 40 ans pour une pension complète, au lieu de 35 ans précédemment, et ce dès 2008. L’âge moyen de la pension, 57 ans, devait systématiquement augmenter à 65 pour les hommes et 60 pour les femmes. A terme, Berlusconi comptait économiser 12,5 milliards d’euros par an, soit 1% du PIB (dès 2012). C’est donc une pure mesure d’austérité. Le président du syndicat CGIL, Epifani, menaçait déjà à l’époque d’organiser une grève générale. Le jour suivant l’annonce du projet, de nombreuses grèves spontanées éclataient de toute part dans la péninsule.
Le 24 octobre 2003, les trois grands syndicats – CGIL, CISL et UIL – organisaient une grève générale de 4 heures, à laquelle 10 millions de travailleurs ont participé. Plus de 100 manifestations ont été organisées. Bizarrement, le dirigeant de la CGIL Epifani déclarait qu’il ne s’agissait pas d’une « grève politique ». Il disait également que la chute du gouvernement Berlusconi en 1994 était la conséquence de la position de la Ligue du Nord et non pas des manifestations contre la réforme des pensions. Cette position souligne le manque d’alternative politique de la part des dirigeants syndicaux. A Rome, le dirigeant du parti d’opposition le plus important, la Gauche Démocratique (ex-communiste), a pris la parole lors de cette manifestation.
Malheureusement, Bertinotti, dirigeant du grand parti de gauche Refondation Communiste, a essayé de s’appuyer sur les partis discrédités de la coalition de l’Olivier. Alors qu’il fallait garder une attitude totalement indépendante de l’ex-«aile gauche» de la politique bourgeoise. Refondation Communiste ne pouvait et ne peut pas regagner la confiance des travailleurs de cette façon.
Le samedi 6 décembre 2003, à Rome, les syndicats organisaient une manifestation de 1,5 million de participants contre les plans de réforme des pensions de Berlusconi sous le slogan «Défendez votre avenir!». «Les contre-réformes ne passeront pas!», disait Angeletti, dirigeant de l’UIL. Le 26 mars 2004, une deuxième grève générale autour des pensions était organisée. De nouveau, plus d’un million de travailleurs étaient dans la rue. Mais aucun plan d’action réel n’était mis en avant pour chasser définitivement Berlusconi. Cela a permis au gouvernement de faire voter par le parlement les propositions de réforme pendant l’été 2004. Réaction de la direction syndicale: protestation verbale.
France
En France, les attaques contre les pensions ont également suscité des manifestations de masse. Le 13 mai 2003, une grève de la fonction publique, soutenue par quelques secteurs privés, a rassemblé près de 2 millions de manifestants dans 115 villes. Le mouvement contre la réforme des pensions de Raffarin montrait son potentiel à unifier les différentes luttes. Raffarin voulait allonger la durée de cotisation des travailleurs de la fonction publique de 37,5 ans à 40 ans pour une pension complète vers 2008 et à 42 ans vers 2020. Le 19 mai 2003, 700.000 travailleurs sont de nouveau descendus dans la rue.
Les syndicats CFDT et CGC ont néanmoins signé un accord avec le gouvernement de droite, lui permettant ainsi de poursuivre dans la même voie. Cela a provoqué des remous à la base et dans certaines directions régionales à la CFDT. La question de la démocratie interne a été posée et certains ont demandé la démission du président du syndicat. Deux autres syndicats – CGT et FO – ont organisé une nouvelle manifestation, le 25 mai à Paris, contre la réforme des retraites. A nouveau 1,5 million de personnes étaient dans la rue. Dans un sondage publié dans Le Parisien, 65% des sondés déclaraient soutenir ces manifestations.
L’appel pour une grève générale était toujours plus fort. Thibault, dirigeant de la CGT, craignait toutefois de perdre le contrôle de la base. Il s’est prononcé contre une grève générale parce que «ça affaiblirait la CGT pour des années». Le dirigeant du syndicat Force Ouvrière de l’époque, Marc Blondel, se prononçait dans un premier temps contre une grève générale – parce que ce serait «insurrectionnel» et cela poserait la question d’une «alternative politique». Ensuite il a été gagné à cette idée, mais « n’a pas voulu casser le front syndical»… C’est pourtant une grève générale de la fonction publique, en 1995, qui a torpillé le projet de réforme des retraites du gouvernement Juppé et qui a même mené plus tard à la chute du gouvernement. Les dirigeants syndicaux ne voulaient pas faire ce pas. Le 24 juillet 2003, la loi sur les pensions était voté par l’assemblée nationale.
Leçons des mobilisations
Les mobilisations contre la réforme des pensions peuvent mener à une lutte de masse de différents secteurs. Ces mobilisations ont la sympathie de la masse des travailleurs et peuvent – comme en France et en Italie – faire tomber des gouvernements. Les dirigeants réformistes sont un frein au mouvement. À la base,des comités de grève devraient être élus pour pouvoir décider de façon démocratique des objectifs de la grève. Ils devraient se rassembler régionalement et nationalement dans différents secteurs avec une force la plus efficace possible. Et cela pour démocratiser les syndicats et empêcher la trahison par la direction. Sur le plan politique il faut rompre avec les partis « progressistes » qui mènent une politique néo-libérale. La question d’un nouveau parti des travailleurs comme instrument politique de la lutte et la nécessité d’un gouvernement des travailleurs, appuyé sur les masses, deviennent alors des questions clés pour résoudre la situation.
La rôle d’une gauche syndicale combative est fondamentale. En Grande-Bretagne nos camarades ont joué un rôle important dans différents syndicats pour mettre en avant l’idée d’une grève générale contre les plans de pensions de Blair. C’était par exemple le cas dans le PCS, le syndicat des fonctionnaires où plusieurs membres du SP ont été élus au bureau exécutif. Confronté à la menace d’une grève des services publics juste avant les élections parlementaires en mai, Blair a fait marche arrière, du moins temporairement. «Une défaite importante», selon les porte-paroles du capital. Nous devons nous organiser nous aussi en Belgique pour pouvoir répondre aux attaques des patrons et du gouvernement.