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Tag: Ryanair
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Pilotes de Ryanair : Pourquoi pas chaque semaine ?

Avec environ 30 pilotes, quelques responsables du syndicat chrétien des employés et un groupe de militants du PTB/Comac, j’ai participé ce matin au nom du PSL à l’action de solidarité avec la grève historique des pilotes de Ryanair à Charleroi. Des 46 vols prévus à Zaventem, 26 ont été annulés de même que 82 à Charleroi. En Irlande et en Suède, 20 vols ont été supprimés dans les deux cas et, en Allemagne où 96% des pilotes de Ryanair éparpillés sur 8 aéroports étaient favorables à la grève, 25 vols ont été annulés. A Eindhoven, avec seulement 4 avions, les vols ont été équipés de volontaires issus d’ailleurs en Europe. Finalement, Ryanair a dû annuler plus de 400 de ses 2400 vols prévus.
Par Eric Byl
Bien que les pilotes de Charleroi n’aient fait obstacle à aucun collègue désireux de travailler, c’est à peine s’il y avait du trafic aérien. Cela s’explique par un mécontentement particulièrement puissant. Un des pilotes me racontait que Ryanair était sa 8e société. Il avait volé et vécu à peu près partout dans le monde, du Moyen orient à l’Asie en passant par la Russie, etc. Lors de la période de creux de l’aviation durant la crise de 2007-09, il a travaillé dans le triage de nuit dans une société privée postale et, plus tard, a également travaillé comme chauffeur de bus. Depuis, la demande de pilotes a fortement augmenté et il a pu reprendre cette activité. Il me racontait que, tout comme dans les entreprises courriers, au moins la moitié des pilotes de Ryanair travaillent avec un statut d’indépendant et que tous les nouveaux recrutements s’effectuent ainsi. Seuls ceux qui viennent d’une autre société ont la possibilité d’obtenir un contrat fixe afin de les fidéliser à Ryanair puisque, depuis, il y a mondialement pénurie de pilotes, surtout de commandants.
Dans les années de crise, son collègue avait travaillé comme barman. Les salaires des pilotes semblent élevés, mais les chiffres qui apparaissent dans la presse sont fortement exagérés. Ils reposent sur quelques exceptions, ceux qui sont prêts à aller jusqu’au bout et acceptent n’importe quelle prestation. Aucun des pilotes présent ne pouvait s’imaginer de tels montants. De plus, beaucoup de pilotes doivent fortement s’endetter, de 90 à 100.000 euros, pour suivre la formation de pilote. Pour celui qui n’est pas issu d’un milieu aisé, cela signifie facilement un amortissement mensuel de largement 1000 euros au cours des 10 premières années. A Ryanair, les pilotes payent eux-mêmes leurs uniformes, la nourriture et les boissons, jusqu’au parking du personnel. A Zaventem, cela représente 100 euros par mois, sans être certain qu’il y ait de la place puisque le parking est souvent débordé.
La préparation de l’avion, qui prend une heure trente, et la clôture, une demi-heure, ne sont pas rémunérées. On peut alors te demander d’allonger le service à 12 heures. La plupart des indépendant n’osent pas refuser. Après quelques années, il est possible de devenir commandant moyennant une formation supplémentaire. Officiellement, il n’y a aucune pression mais, dans les faits, c’est ce que veut Ryanair puisqu’on peut dès lors recevoir n’importe quelle base de stationnement. Le gouvernement a augmenté l’âge de la retraite à 67 ans, mais l’Europe interdit que des pilotes aient plus de 65 ans. Celui qui ne passe pas le contrôle médical ne peut plus piloter d’avion. Il existe pour cela des assurances, mais les pilotes indépendants doivent payer la prime de leur propre poche. Des exceptions existent, mais la plupart des pilotes ne passent plus ces contrôles entre 55 et 60 ans. Pour autant que je le sache, parmi les participants à l’action, aucun n’excédait les 60 ans.
Les pilotes au statut d’indépendant payent évidemment eux-mêmes leurs cotisations sociales, mais les pilotes salariés sont aussi dans l’inconnu concernant leur sécurité sociale. Tous les contrats à Ryanair sont de droit irlandais et celui qui n’est pas domicilié en Irlande ne peut prétendre à des allocations sociales irlandaises. Celui qui commence sa carrière à Ryanair doit suivre une formation supplémentaire qui coûte 30.000 euros, qu’il faut ensuite rembourser. Afin de fidéliser les pilotes à la société, on peut signer pour 5 ans et, dans ce cas, le montant à repayer diminue d’année en année, un peu comme cela vient récemment d’être introduit à la SNCB pour les machinistes ou comme cela existe à la STIB pour les conducteurs. L’ancienne idée des pilotes « crème de la crème » est révolue, perdue avec la Sabena. O’Leary, le PDG de Rynair, appelle les pilotes des « chauffeurs de bus qualifiés ». Lorsque l’on regarde les conditions de travail et de salaire, la profession de pilote s’est petit à petit « prolétarisée », un peu comme celle des enseignants ou, il y a encore plus longtemps, celle de facteur.
Heureusement, on ne remarque pas seulement cela aux conditions de travail et de salaire, mais aussi à la combativité et la solidarité croissantes. J’ai été étonné par l’empressement avec lequel les pilotes ont mis leurs foulards syndicaux. La majorité d’entre eux sont tant membres de l’association des pilotes Beca (Belgian cockpit association) que de la CNE. Être membre du syndicat leur permet de déclarer la grève. La solidarité avec le personnel de cabine était elle aussi frappante. Bien que la société recrute des pilotes partout dans le monde, ceux présents à l’action étaient essentiellement belges. Parmi le personnel de cabine, ce n’est qu’une petite minorité, ils sont surtout Italiens, Espagnols, Portugais et, de plus en plus, Européens de l’Est. Cela s’explique par des salaires extrêmement bas, jusque 800 euros. Un des pilotes faisait remarquer que l’on gagne autant à temps partiel à Lidl qu’en tant que steward à temps plein chez Raynair ! Tous les participants en étaient indignés et tout à fait près à lier leur action à celle du personnel de cabine.
Les revendications des pilotes et du personnel de cabine sont pareilles. Ils veulent que le droit du travail du pays où ils sont stationnés soit en vigueur. Ils veulent que les syndicats soient reconnus et que l’on arrête l’abus de faux indépendants. Ils veulent de meilleures conditions de travail et des salaires légalement réglés. La majorité des pilotes présents étaient sceptiques. La reconnaissance des syndicats a été promise à plusieurs reprises mais continue à traîner. La société affirme explicitement ne pas vouloir quitter sa structure de bas coût. Juste avant la grève, la direction de Ryanair avait encore communiqué préférer la grève aux concessions, puisque ce serait plus « bon marché ».
Parallèlement, il est impossible de nier la ténacité du personnel. Lorsque O’Leary menace de délocaliser l’emploi en Irlande vers la Pologne, le personnel n’est plus intimidé, O’Leary est confronté à une nouvelle grève. Lorsqu’en Hollande il va en justice pour interdire la grève, l’association des pilotes décide de rejoindre la grève. La peur de mener des actions s’est évaporée, partiellement parce qu’il y a une grande demande de pilotes, mais aussi parce qu’ils sont conscients de leur force collective et du potentiel d’élargissement. Il était frappant de voir que les participants de l’action à Charleroi ne se faisaient pas le moindre souci concernant leurs collègues qui voulait travailler. La participation à la grève était trop grande pour cela. Ils sont tous convaincus qu’il faudra de nouvelles actions et annoncent avec confiance qu’en Italie, en Espagne et au Portugal, l’heure de l’action arrive. « Aujourd’hui, rien ne sera donné », m’assurait un pilote, « Mais pourquoi pas chaque semaine ? Alors, cela pourrait tourner. »
Pour Ryanair, il s’agit pour le moment d’un cas de principe : ne pas vouloir dévier d’un modèle extrêmement profitable. Mais les frais de personnel ne représentent que 12% des coûts totaux et la majorité des sociétés d’aviation ne peuvent que rêver de la marge bénéficiaire de Ryanair. Ryanair se rend bien compte que de nouvelles revendications vont suivre si la société fait de nouvelles concessions. Il est sûr qu’alors, le personnel voudra une harmonisation des salaires et des conditions de travail, un meilleur règlement des congés et des garanties en cas de maladie. De plus, le personnel recruté à travers Crewlink et Workforce commencera à exiger des droits égaux.
L’enjeu est gigantesque. Il est donc compréhensible que le secrétaire syndical de la CNE dit espérer une intervention politique de la part de l’Europe ou des gouvernements nationaux. Mais jusqu’ici, l’Europe n’a pas bougé le petit doigt et les politiciens belges se déclarent également « impuissants ». La volonté d’action du personnel qui a fait tourner la relation de force en sa faveur, ne continuera pas à croître éternellement, tout comme la demande mondiale de pilotes. On ne peut pas perdre du temps en entretenant des illusions envers l’Europe et les gouvernements nationaux. Au contraire, il faut saisir la situation relativement favorable pour arracher pour tous, pilote et personnel de cabine de partout en Europe, une solution par l’action en escalade et des grèves de plusieurs jours.

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Solidarité avec les grévistes de Ryanair !

Photo: Wikicommons Déclaration de solidarité du Parti Socialiste de Lutte / Linkse Socialistiche Partij
(parti-frère du Socialist Party irlandais, de Socialistische Alternative Voran en Allemagne, de Socialistisch Alternatief au Pays-Bas et de Rättvisepartiet Socialisterna en Suède, tous membres du Comité pour une Internationale Ouvrière)
Le Parti Socialiste de Lutte suit avec grand intérêt et enthousiasme la lutte du personnel de Ryanair.
Ryanair abuse de chaque faiblesse dans la législation pour exploiter son personnel au maximum. La compagnie emploie son personnel selon le droit irlandais. Mais puisque la législation irlandaise ne permet aux travailleurs de se constituer de droits à la sécurité sociale que s’ils sont domiciliés en Irlande, les équipes belges travaillent sans se constituer de droits à la pension ou aux allocations de chômage. Le PSL soutient la revendication des syndicats et des associations de pilotes (Beca, EERC) en faveur de l’application de la législation du travail en vigueur dans le pays où on commence et finit le boulot et où on habite. C’est la seule manière de combattre la casse sociale des patrons qui font du shoping avec les différentes législations du travail. C’est aussi la seule manière de ne pas casser cette législation au niveau européen mais au contraire de l’harmoniser vers le haut.
Une multitude de statuts existent dans l’entreprise. Le moins attractif, selon le système des « contrats 0 heures », ne permet un salaire que si l’avion est en vol. Retard ? Nettoyage de l’appareil entre deux vols ? Pas de salaire. Presque 70% des pilotes travaillent sous statut d’indépendant. Parmi le personnel de cabine, qui doit essentiellement vendre, il s’agit surtout de contrats d’intérim, avec encore moins de sécurité et de protection. Des journées de travail trop longues mettent aussi en danger la sécurité des voyageurs. Le personnel, tant les pilotes que le personnel de cabine, en a marre des conditions de travail, de la pression extrêmement élevé et de la flexibilité. Le PSL soutient ces actions collectives, les tentatives réussies de les coordonner internationalement et l’obtention de droits syndicaux.
Sous pression de cette action et des précédentes, Ryanair et O’Leary ont déjà dû faire des concessions aux pilotes fin de l’année dernière et, après la grève du personnel de cabine, à « cette petite minorité avec ses revendications déraisonnables ». La menace de déplacer des avions d’Irlande vers la Pologne, ce qui menace 300 emplois, était l’un des détonateurs de cette grève au côté des mauvaises conditions de travail et de salaire ainsi que du refus de reconnaître les syndicats. Les provocations brutales d’O’Leary ne mènent plus à l’effet espéré, elles stimulent au contraire la résistance. Il a dû ravaler ses menaces contre le personnel de cabine en Belgique et sa tentative de faire interdire par un juge la grève au Pays-Bas a poussé l’association des pilotes du pays à rejoindre la grève. Le PSL est bien d’accord : il faut répondre à chaque provocation de la direction par l’action collective : la faiblesse stimule l’agression.
Après la grève des pilotes de l’an dernier, O’Leary s’est vu forcé de reconnaître les syndicats. Mais, ces 6 derniers mois, cette concession était peu visible, jusqu’à la grève du personnel de cabine. Il a alors promis de reconnaitre les syndicats en Belgique. Mais, depuis, les syndicats vont plus loin et le PSL soutient leur revendication d’également faire reconnaitre le syndicat au sein de Crewlink, pour que les conditions de travail du personnel employé via ce bureau puissent être améliorées. Dans la presse, on essaye de culpabiliser les voyageurs. « Consommer, c’est choisir » a ainsi écrit l’éditorialiste du Soir. O’Leary ne demande pas mieux : cela monte les voyageurs et le personnel les uns contre les autres. Lui-même peut s’envoler avec 3 millions d’euros de salaire et des bénéfices pour Ryanair qui augmentent d’année en année, jusqu’au montant incroyable de 1,5 milliard d’euros pour l’année passée ! Ce n’est pas le voyageur, mais la direction de Ryanair et ses actionnaires qui sont responsables des mauvaises conditions de travail ! Ryanair exploite le personnel, trompe le voyageur avec toutes sortes de frais non-annoncés et fait payer la collectivité en jouant les aéroports entre eux.
Qu’est-ce que le PSL a à voir avec tout ça ? Toute la construction européenne et tous les partis de droite jusqu’à la social-démocratie sont ou bien d’accord avec le modèle de Ryanair ou laissent faire en soupirant. « C’est carrément scandaleux, et indigne de l’Union européenne que des gens doivent encore mener des actions pour cela. Nous espérons que l’Union européenne prendra ses responsabilités », déclare le syndicat à juste titre. Mais tant que ces partis de droite et la social-démocratie sont ceux qui dictent leur loi, rien ne se passera. Nous avons besoin d’actions collectives, de droits syndicaux mais aussi de représentants qui défendent les intérêts des travailleurs avec autant d’acharnement que la droite défend ceux des patrons. Cela signifie aussi l’imposition légale de droits du travail et de salaires convenables, y compris la possibilité de les arracher par la saisie et par l’exploitation d’une société aérienne publique sous contrôle démocratique de la communauté et des travailleurs.
Voici ci-dessous une déclaration conjointe des députés irlandais de Solidarity et membres du Socialist Party Mick Barry, Ruth Coppinger et Paul Murphy
Strike – force Ryanair to make real changes
Last December Ryanair said it would recognise trade unions. But since, it has ducked, dived, delayed and continued to decline the rights to collective bargaining or to make any serious concessions on key outstanding issues that affect all staff across Europe, including agency work, poor conditions and bogus self-employment.
Ryanair is not primarily concerned about cheap airfares or the public good. In reality they mistreat their staff and their passengers with the sole goal of maximising profits. Michael O’Leary’s wage is already way above €3 million a year and Ryanair’s profit last year was an incredible €1.5 billion!
Ryanair is a flagship for bullying and super-exploitative capitalism. So Friday 10 August sees the fifth day of industrial action forced on Ryanair staff because of the complete intransigence of Michael O’Leary and Ryanair management.
Unprecedented action across Europe – making history
Ryanair are under pressure from this spreading solidarity action spanning Ireland, Belgium, Sweden, the Netherlands and Germany.
A victory for Ryanair workers would show workers everywhere that you can fightback against vicious anti-union bosses, including multi-national corporations. This is a vital battle.
Ryanair is determined to hold out and will use every dirty trick in the book. That’s why Ryanair workers need to be united and be given the full support of the trade union movement throughout Europe.
As members of the Socialist Party and Solidarity TDs in the Dail, we offer our full support to the Ryanair workers. Will assist in whatever way we can. In addition as part of the international socialist movement, the CWI, our sister parties throughout Europe are actively supporting your campaign. In solidarity we raise the following ideas for consideration:
- No meaningful response from Ryanair, points to the need to escalate the action
- Increase the number of strike days, up to and including the possibility of all-out action
- Unite the workers – ensure that all cabin crew and pilots strike together
- Bring together a rank and file workers council for Ryanair staff across Europe
- Continue the action throughout Europe to maximise the pressure and the benefit for all Ryanair workers
- Avoid divide and rule tactics – don’t make deals separately on a country by country basis
- “Nothing is agreed until everything is agreed” – make sure acceptable agreements are achieved for all Ryanair staff in every country before action is ended
- Call on the Irish Congress of Trade Unions, the union federations in the Netherlands, Sweden, Belgium and Germany, as well as the European Trade Union Confederation, to organise a complete trade union boycott of all Ryanair operations when its workers are on strike
An injury to one is an injury to all – Unity is strength
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Grève chez Ryanair : solidarité contre les menaces de la direction

Grévistes à Zaventem. Photo : CNE Ce n’est pas un secret : les syndicats ne sont pas bien vu chez Ryanair. Le patron de la compagnie, Michael O’Leary, avait d’ailleurs déclaré l’an dernier qu’il préférerait se couper les mains plutôt qu’avoir à faire aux syndicats ! Et alors qu’un mouvement de grève éclatait aujourd’hui, la direction a annoncé un plan de réduction de sa flotte en Irlande qui menace directement 300 emplois ! L’entreprise préfère recourir au licenciement plutôt que de traiter avec les syndicats.
Ce mercredi, le personnel de cabine de Ryanair était donc en grève en Belgique, en Espagne, au Portugal et en Italie pour de meilleures conditions de travail et le respect des législations nationales du travail. Le mouvement se poursuivra demain, sauf en Italie. La CNE craint que Ryanair fasse venir du personnel d’autres sites en Europe pour remplacer les grévistes.
En Belgique, le premier jour de grève fut un véritable succès. Hans Elsen, secrétaire LBC-NVK a déclaré à la presse : «C’est un jour de grève historique, des dizaines de travailleurs ont fait grève. Des meilleures conditions de travail, c’est le message envoyé à la direction. D’autres actions suivront». Selon la CNE, la participation à la grève était de 80 % du personnel à Zaventem aujourd’hui. Environ 90 % des avions Ryanair sont restés au sol. A l’aéroport de Charleroi, environ 60% des vols avaient été annulés.
Cela fait des années que Ryanair méprise les droits des travailleurs et intimide son personnel. Maintenant qu’il est entré en action, les intimidations et les menaces montent d’un cran. La grève se poursuivra demain et d’autres journées sont également prévues pour riposter contre l’arrogance patronale.
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[VIDEO] Grèves des pilotes de Ryanair basés en Irlande
Ryanair est frappé aujourd’hui par une grève des pilotes basés en Irlande. Il s’agit de la première d’une série d’actions qui toucheront l’entreprise cet été. Les députés de Solidarity et membres du Socialist Party (parti-frère irlandais du PSL) Ruth Coppinger et Paul Murphy s’expriment sur l’importance de ce conflit.
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Pour en finir avec la crise, les guerres, l’austérité, le chômage, la destruction de l’environnement… dégageons le capitalisme, construisons un monde socialiste!
Combien de temps encore devra-t-on croire au refrain tant répété comme quoi le pire de la crise économique serait « derrière nous »? Les faits parlent d’eux-mêmes : partout, la classe des super-riches et les politiciens qui la servent redoublent d’efforts pour nous faire avaler sans cesse de nouvelles attaques sur nos droits et nos conditions de vie. Et partout, la colère des “99%” gronde : de Sidi Bouzid à Athènes, de Port Saïd à Sofia, de Pretoria à Moscou, de Montréal à New Delhi, la résistance de la jeunesse, des travailleurs et des masses pauvres ne faiblit pas, face aux conséquences dévastatrices de la crise historique que traverse le système capitaliste mondial.
Tract général du Comité pour une Internationale Ouvrière distribué au Forum Social Mondial de Tunis
«L’accumulation de richesse à un pôle signifie en même temps à l’autre pôle une accumulation de misère» (Marx)
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Socialisme 2013. Dimanche prochain, à l’occasion du week-end "Socialisme 2013", un rapport de la situation actuelle en Tunisie sera livré par Nicolas Croes, rédacteur de socialisme.be et de notre mensuel, de retour de Tunisie.
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Le destin tragique du jeune qui s’est immolé par le feu en plein coeur de Tunis est le cri de désespoir de toute une jeunesse qui n’en peut plus, condamnée au chômage de masse et à la misère quotidienne. La crise actuelle expose comme jamais la totale incapacité du capitalisme -un système basé sur la recherche incessante de profits pour l’infime minorité qui contrôlent les moyens de production et les décisions d’investissements- à offrir un avenir à la majorité d’entre nous.
Selon une étude récente de ‘Futures Company’, 86% de la population mondiale estime que le monde des affaires « maximise les profits aux dépens de la communauté et des consommateurs ». Pendant que des pays entiers sont mis en coupe réglée, que le chômage atteint des records mondiaux, et que plus d’un sixième de l’humanité souffre de la faim, la concentration des richesses est devenue telle que le revenu gagné par les 100 plus grands milliardaires au monde rien qu’au cours de l’an dernier représente quatre fois la somme nécessaire pour abolir la pauvreté sur toute la planète!
Comme d’habitude, le prix de la crise, tout le monde le paie, sauf ceux qui en sont responsables. Pour l’élite capitaliste en effet, l’année 2012 fut un “grand cru”: malgré la crise, les multinationales et les grandes banques qui contrôlent l’économie mondiale (BMW, JPMorgan Chase, Goldman Sachs, Samsung, Adidas, Ryanair,…) ont réalisé des bénéfices record.
Comme dans un gigantesque casino, une poignée d’acteurs financiers se font des juteux profits en spéculant sur le prix des biens de première nécessité, pendant que dans l’ensemble du Maghreb, du Moyen-Orient et ailleurs, la hausse vertigineuse de ces prix, aggravée par les mesures antisociales imposées par le FMI, poussent des pans entiers de la population dans une pauvreté encore plus grande.
Aux Etats-Unis, alors que les grandes banques annoncent toutes des nouveaux profits spectaculaires, le pouvoir d’Obama prépare l’opinion à une nouvelle cure d’austérité massive.
Sur l’ensemble du continent européen aussi, les travailleurs sont priés de payer la note du sauvetage des banques et des spéculateurs, subissant pour cela une offensive d’austérité sans précédent, faite de centaines de milliards d’euros de coupes dans les dépenses publiques, tandis que les taux de chômage en Europe du Sud atteignent des chiffres dignes de la Grande Dépression des années ’30. En parallèle, la trésorerie accumulée par les 265 grandes sociétés européennes ayant publié leurs résultats 2012 atteint…364 milliards d’euros ; une immense montagne de liquidités que les capitalistes refusent d’investir dans l’économie, et un exemple de plus du caractère absurde, parasitaire et complètement pourri du système en place.
Ce système craque de toutes parts. Car pour maintenir la richesse opulente d’une poignée de patrons, de banquiers et d’actionnaires, il n’a d’autre choix que de renforcer la répression contre ceux qui résistent, d’encourager la division des opprimés pour affaiblir leurs luttes, d’imposer de nouvelles souffrances, de nouveaux drames sociaux, humains et écologiques aux quatre coins du monde.
Début mars, à l’occasion du tragique anniversaire de la catastrophe de Fukushima, des dizaines de milliers de Japonais et de Taïwanais sont descendus dans les rues pour dénoncer la politique pro-nucléaire de leurs gouvernements : encore une fois, c’est la course au profit, à travers l’avidité de la multinationale énergétique TEPCO, qui avait conduit à une des plus grosse catastrophe environnementale et humanitaire de tous les temps. Dans le contexte de crise, la compétition accrue entre grandes puissances pour les zones d’influence et le contrôle des marchés est aussi à l’origine d’un accroissement des conflits armés, dont l’intervention impérialiste au Mali n’est que le dernier exemple en date. Derrière le discours d’une France « libératrice » au Mali se cachent en effet des ambitions stratégiques dans une région riche en ressources, mais aussi un juteux business de guerre pour l’industrie militaire française.
La lutte de masse à l’ordre du jour
En contrepartie, ces dernières années ont vu des millions de travailleurs et de jeunes à travers le globe s’engager sur le chemin de la lutte de masse, des grèves, des manifestations, des sit-in, des occupations…
- Le 2 mars, environ 1,5 million de personnes ont manifesté dans les rues du Portugal, sous le slogan “Que la Troïka aille se faire voir” : la plus importante mobilisation de l’histoire du pays.
- Les 20 et 21 février, l’Inde a connu la plus grande grève de son histoire, plus de 100 millions de travailleurs paralysant l’économie du pays pour protester contre la hausse des prix, la précarité et les privatisations.
- L’Afrique du Sud a été submergée par une déferlante de grèves sans précédent dans le secteur minier, chez les ouvriers agricoles, et dans d’autres secteurs encore, pour protester contre les bas salaires, contre les conditions de travail épouvantables, et contre le régime corrompu, anti-démocratique et pro-capitaliste de l’ANC.
- La récente révolte dans le village de Shangpu dans le Sud de la Chine, où des paysans protestant contre la saisie de leurs terres ont tenu tête pendant plus de deux semaine aux autorités, est symptomatique de la colère et de l’agitation sociale de plus en plus audible contre la dictature du Parti “Communiste” Chinois.
Les trois derniers exemples illustrent aussi que les pays du “BRICS” (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) n’offrent clairement pas une alternative viable pour la population de ces pays. Au contraire, là aussi, les masses se lèvent pour demander leur part d’une croissance ayant essentiellement profité aux riches.
Une époque de révolutions et de contre-révolutions
Tous les symptômes de bouleversements révolutionnaires majeurs sont en gestation, et cela dans quasiment toutes les parties du monde. Le seul élément manquant est une alternative politique de masse qui puisse organiser la classe ouvrière, la jeunesse et les pauvres autour d’un programme cohérent de transformation sociale. Cela est illustré par ce qui se passe aujourd’hui en Tunisie et en Egypte.
Le renversement de Ben Ali et de Mubarak avait démontré la puissance du mouvement des travailleurs lorsque celui-ci se met en action de manière unie et décidée. C’est en effet la menace de paralysie de l’économie, l’entrée en scène des travailleurs salariés dans de puissants mouvements de grève, mettant directement en péril les intérêts des capitalistes et des grands propriétaires, qui avait poussé ces dictateurs vers la porte de sortie. C’est d’ailleurs aussi en grande partie la faiblesse d’un tel mouvement s’appuyant sur la force collective et unifiée de la classe ouvrière qui est à l’origine de l’impasse croissante du conflit en Syrie.
Cependant, les nouveaux régimes arrivés au pouvoir au Caire et à Tunis ont rapidement dévoilé leurs vrais visages: celui de la contre-révolution. Sous leur règne, la pauvreté et le chômage ont franchi de nouveaux records. La montée de l’intégrisme religieux, l’exploitation économique, le mépris des élites et la violente répression contre tous ceux et toutes celles qui aspirent à un réel changement continuent plus que jamais.
Après les premières victoires initiales, la suite des événements a mis en évidence le fait que l’esprit de sacrifice et toute la détermination du monde ne sont pas, en soi, des ingrédients suffisants pour aboutir à une victoire décisive pour la révolution. Si dans les deux pays, le potentiel pour une nouvelle vague révolutionnaire est bien présent, encore faut-il que celle-ci soit armée d’un programme et d’une stratégie clairs, visant à en finir pour de bon avec la vieille société, et à concrétiser les aspirations de la population à une vie meilleure.
La Grèce, devenue un symbole de la résistance héroïque des travailleurs et des jeunes face à la thérapie de choc des politiques capitalistes, a connu dans les trois dernières années pas moins de 21 grèves générales de 24h, ainsi que trois de 48h. Pourtant, l’austérité continue plus que jamais : la répétition de grèves générales fort étalées dans le temps, sans objectifs bien précis, ne s’inscrivant pas dans un plan d’action à long terme visant à renforcer les mobilisations jusqu’à renverser le système en place, contribue à semer l’épuisement et le découragement plus qu’autre chose. La stratégie timorée des directions syndicales bureaucratiques a clairement montré ses limites: à l’heure d’un offensif tout azimut de la part des capitalistes, de telles demi-mesures ont autant d’efficacité que de jeter des verres d’eau sur un bâtiment en flammes. C’est pourquoi la reconstruction de syndicats de combat, organisés démocratiquement et dont les dirigeants sont responsables devant leurs membres, est une partie essentielle du processus nécessaire pour mener une lutte efficace contre l’offensive capitaliste.
Quelle alternative ?
La classe des travailleurs, alliée aux masses pauvres, aux petits paysans, et au dynamisme vital de la jeunesse, a clairement le pouvoir de transformer la société. Seule les travailleurs possèdent la puissance économique (au travers des mobilisations de masse, des grèves, des occupations d’entreprise) pour bloquer tous les canaux vitaux sur lesquels reposent la puissance et les instruments de violence des possédants.
Mais « bloquer » la société ne suffit pas : il faut que les masses laborieuses se réapproprient les leviers stratégiques de l’économie, pour la reconstruire sur des bases nouvelles. Aboutir à un tel changement nécessite la construction d’une organisation capable d’unifier les diverses couches des masses en lutte, afin de les mener résolument à l’offensive et d’arracher le pouvoir des mains des capitalistes. Au travers de comités organisés sur les lieux de travail, les universités, dans les écoles et les quartiers, coordonnés à chaque niveau, et composés de représentants démocratiquement élus, les bases pourraient être posées pour une reprise en mains collective de la société au service de ceux qui la font véritablement tourner, et non des exploiteurs actuels. Le potentiel pour un tel changement, une révolution socialiste, n’est pas une utopie: il est contenu en germes dans les luttes et les aspirations des masses qui se mettent en mouvement aux quatre coins du monde contre les horreurs du système en place.
Le socialisme signifie une société gérée démocratiquement par les travailleurs, où la production et ses fruits sont mis sous propriété publique et planifiés rationnellement et démocratiquement, en vue de satisfaire les besoins de chacun. Toutes les techniques, cultures, sciences et capacités productives modernes seraient ainsi mises ainsi au service de l’ensemble de la population, au lieu d’être monopolisées par une minorité qui s’enrichit toujours plus sur le dos de l’immense majorité des habitants de la planète.
- A bas la dictature des marchés!
- L’impérialisme hors du monde néocolonial ! A bas le FMI et tous ses plans de misère ! Répudiation du paiement de toutes les dettes, sans conditions !
- Non aux privatisations ! Non aux coupes dans les services publics, non à l’austérité !
- Pour le partage du temps de travail entre tous et toutes!
- Pour une éducation et une santé gratuite et de qualité, pour un revenu minimum vital pour tous et toutes!
- Stop au racisme, au sexisme, à la discrimination religieuse, à l’homophobie…Pour une lutte unifiée des travailleurs, des jeunes et des masses pauvres contre le capitalisme et l’impérialisme!
- Pour la nationalisation des banques et des secteurs-clés de l’économie, sous le contrôle et la gestion démocratique des travailleurs et de la population
- Pour un plan de production socialiste, déterminé démocratiquement en fonction des besoins sociaux, et respectueux de l’environnement !
- Pour une société socialiste, débarrassé de l’exploitation, des guerres et de la misère !
Qu’est-ce que le CIO ?
Le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) est une organisation internationale socialiste, qui lutte sans relâche pour les intérêts des travailleurs, des jeunes et des peuples opprimés à travers le monde. Nous disposons de partis, de groupes et de militants dans une cinquantaine de pays sur tous les continents, du Sri Lanka au Québec, du Kazakhstan au Chili. Le capitalisme est un système mondial; par conséquent, les travailleurs, les jeunes et les opprimés du monde entier ont besoin de s’unir à la même échelle pour le mettre à bas.
Si vous voulez nous rejoindre ou disposer de plus d’infos: contactez nous via cwi@worldsoc.co.uk – 0021622837971 ou visitez notre site web: www.socialistworld.net – (www.socialisme.be ou www.gr-socialisme.org en francais)
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En Bref…
Chaque samedi, nous publions dans cette rubrique quelques faits marquants, des citations, des cartoons, de petites vidéos,…
23% de la population européenne menacée de pauvreté ou d’exclusion sociale en 2010
Ce mercredi, Eurostat (l’office statistique de l’Union Européenne) a publié un communiqué de presse qui affirme qu’en 2010, 115 millions de personnes (23,4% de la population) étaient menacées de pauvreté ou d’exclusion sociale dans l’Union européenne, chiffre qui atteint même les 27% pour les moins de 18 ans.
Ce n’est pas la crise pour tout le monde…
Alors qu’on nous dit toujours plus de nous serrer la ceinture pour ”le bien commun”, différentes données expriment ce que signifie concrètement ce ”bien commun”… Ainsi, les premiers résultats pour l’année 2011 des sociétés belges cotées en Bourse illustrent que l’argent continue de se déverser dans les poches des patrons et des actionnaires (voir tableau ci-contre). Ls dividendes versés aux actionnaires augmentent de 25% chez Umicore, de 10% chez Barco et de 13,6% chez Arseus…
L’aide alimentaire atteint des sommets en Belgique
Les banques alimentaires ont reçu 13.385 tonnes de nourriture en 2011, tandis que 117.440 personnes ont fait appel à l’aide alimentaire, un record (environ 3.000 de plus qu’il y a un an, selon Het Belang Van Limburg et Gazet van Antwerpen). Toute personne disposant d’un revenu inférieur à 740 euros nets par mois peut demander de l’aide aux banques alimentaires. Selon l’administrateur délégué de la Fédération des banques alimentaires Alfons De Vadder, les bénéficiaires sont souvent des mères célibataires, des chômeurs suspendus et des nouveaux Belges.
Les médias traditionnels contre les grévistes
Nous avons déjà mentionné dans cette rubrique un article du site français ACRIMED (Action-Critique-Médias) concernant la couverture des dernières mobilisations syndicales par la presse francophone. Ce site en a remis une couche en ce basant sur un éditorial de La Libre datant du lendemain de la grève générale du 30 janvier : Nouveau tir à vue éditorial contre les grévistes en Belgique.
La lutte contre la politique d’austérité concerne aussi les jeunes!
Les politiciens, les patrons et leurs médias font tout leur possible pour monter la jeunesse contre les syndicats et leur résistance à la politique d’austérité. Cela fait partie d’une tentative consciente de diviser l’opposition sur base de contradictions qui ne sont pas fondamentales. Mais les jeunes sont aussi durement touchés par la politique actuelle que les travailleurs plus âgés. La politique d’assainissements menée par les partis établis menace notre avenir. Cela a d’ailleurs été expressément reconnu par une source irréprochable, le chef de la Sûreté d’Etat de Belgique. Il a déclaré la semaine passé dans le quotidien De Standaard : "Ce sont principalement les jeunes qui sont touchés par la crise. Il est normal qu’ils entrent en action." En Espagne, plus de la moitié des jeunes de moins de 25 ans sont actuellement sans emploi sur base de telles politiques. Si nous laissons faire les patrons et leurs politiciens, nous aurons une ”génération sans avenir”. La meilleure façon d’éviter cela est de passer à l’action, avec les travailleurs, les pensionnés, les chômeurs,…
Action durant un match de foot
Le 31 janvier dernier, Everton et Manchester City se sont opposés dans le cadre du championnat anglais de football. Peu de temps avant la mi-temps, un supporter a envahi le terrain et s’est enchaîné au goal de l’équipe visiteuse. Le jeu a été interrompu pendant cinq minutes pour arrêter cet homme, qui voulait par son action dénoncer la politique de Ryanair. Son T-shirt proclamait que Ryanair est le plus gros gangster d’Europe (la concurrence est acharnée pour ce titre…). La réputation de la politique antisociale de Ryanair vis-à-vis de son personnel n’est plus à faire. Le pire, c’est que cet homme pourrait se voir interdit de stade à vie, alors que Ryanair pourra tout simplement poursuivre sa politique antisociale.
Tout va bien à General Motors (GM)
Plus d’un an après la fin de General Motors à l’entreprise Opel-Anvers, des nouvelles positives arrivent, mais uniquement pour les actionnaires. De Tijd a écrit ce mardi: "Les résultats du constructeur automobile américain General Motors (GM) sont étonnamment bons, deux ans seulement après la faillite et l’aide que l’entreprise a reçue. Le journal The Wall Street Journal a écrit que GM avait publié le 16 février un bénéfice net de 8 milliards de dollars (6,01 milliards d’euros). C’est près du double de 2010 (4,7 milliards). C’est le plus haut bénéfice pour General Motors, principalement en raison d’une une forte croissance en Chine et des marges bénéficiaires plus élevées sur le marché nord-américain, où GM a réduit les coûts de milliards de dollars pour faire baisser les prix. En Europe, les filiales Opel et Vauxhall sont toujours trop chères. "
Cartoon: Le libre marché
”Si vous ne pensez pas que la libre entreprise est une bonne idée, souvenez-vous de ceci: jusqu’à ce que le gouvernement s’en mêle, ces enfants avaient du travail.”
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La crise exige une modification de la politique économique – La lutte des classes en déterminera le caractère (Troisième partie)
Dans cette partie, nous regardons dans quelles mesure les caractéristiques de la crise économique internationale se manifestent aussi en Belgique. Nous parcourons le marché immobilier, l’inflation, les cadeaux fiscaux aux entreprises et les salaires des managers. Nous expliquons comment cela conduit aux grèves spontanées que la bourgeoisie et les politiciens aimeraient brider. La combativité à la base s’est reflétée dans des discours plus radicaux le premier mai, dans un bon résultat pour les délégations syndicales combatives dans les élections sociales, et enfin dans la semaine d’actions de juin 2008.
Texte de perspectives du Congrès National DU PSL/LSP. Ce texte a été écrit durant l’été.
La folie des bourses laisse des traces aussi en Belgique
75. En termes de distribution inégale de richesse, la Belgique n’est pas mieux placée que les autres pays de l’OCDE. En juillet 2008, les fortunes nets des familles belges étaient de 1.610 milliards d’euros, à peu près 352.000 euros par foyer ou 151.000 euros par Belge. (1) Cela fait entretemps 14 ans qu’il n’y a plus eu de recherche sur la répartition de cette fortune. En 1994, Jef Vuchelen et Koen Rademaeckers sont arrivés à la conclusion que les 50% des fortunes appartenaient à 10% des familles les plus riches, contre seulement 1,1% des fortunes pour les 10% des familles les plus pauvres. Nous supposons que cette différence s’est plutôt creusée que diminuée. (2) Selon Merill Lynch, à la fin 2006, il y avait 68.000 millionnaires en dollars en Belgique, fin 2007 ils étaient déjà 72.000. (3) En 2007, les entreprises belges cotées en bourse ont vu pour la première fois en 5 ans diminuer leurs profits suite à la crise du crédit. En 2005 et en 2006, ces profits avaient encore monté à chaque fois de 30% contre une baisse de 11% en 2007 jusque 19,14 milliards d’euros. Pourtant, ces mêmes entreprises ont distribué 10,2 milliards d’euros aux actionnaires, une augmentation de 42% comparée à l’année précédente. Cela fait qu’en 2007, malgré la crise du crédit ou peut-être justement à cause d’elle, la moitié du profit net a été versée aux actionnaires contre un tiers en 2006.(4)
76. Ainsi, la fine fleur du capital belge s’est protégée contre les conséquences de la crise du crédit. Celle-ci n’a pas épargné la Belgique. Il est difficile de prévoir où le BEL-20 se trouvera fin 2008, mais avec une perte d’en moyenne 23%, le premier semestre de 2008 était la pire chute en 21 ans, depuis le crash boursier de 87.(5) Surtout les banques, qui représentaient en 2006 encore 42% du BEL-20, ont fortement chuté. Cela s’explique par le fait que toutes les grandes banques belges, y compris la KBC qui a perdu 32,4% de sa valeur boursière lors du premier semestre de 2008, se sont laissées séduire par des instruments financiers souvent couverts par des hypothèques à grand risque américaines. Pour Dexia (-44,4% de la valeur boursière), s’y ajoutent les difficultés de sa filiale américaine, le rehausseur de crédit FSA. Pour Fortis, -46,48% de sa valeur boursière, s’y ajoute sa reprise annoncée en grandes pompes mais mal planifiée, d’ABN Amro. Cela fait que l’action Fortis vaut aujourd’hui (juillet 2008) à peu près la moitié d’une action de la Société Générale en 1998. Au printemps précédent, l’action Fortis valait encore 35€, à la fin du premier semestre 2008 moins de 10€. (6)
77. La Banque nationale a calculé la perte totale des Belges en conséquence de la crise boursière en juillet 2008 à 50 milliards d’euros, dont la moitié en conséquence de la baisse des valeurs des actions, et l’autre moitié en perte sur des fonds de pension et des fonds d’investissement (les sicav). Les dettes des familles ont aussi augmenté. Mais c’est surtout le personnel qui paiera la facture. « Des changements des banques belges qui prendraient normalement 15 ans, tels que la rationalisation du réseau couteux des agences, seront grâce à la crise du crédit réalisés en quelques années », dit Dick-Jan Abbringh, auteur de « Trendbreuk.be ? Nieuwe spelregels in een digitale wereld » (« Inversion de la tendance.be ? Nouvelles règles du jeu dans un monde digital »), son livre pour lequel il a interviewé 15 managers du monde financier en Belgique. « Il est certain qu’il y aura des licenciements massifs. Il y a un bel avenir pour des gens qui donnent des conseils financiers de haute qualité, mais non pas pour les employés de banques qui aident les clients à remplir les formulaires de virement. » (7) En bref, celui qui amène beaucoup d’argent obtiendra un siège confortable, mais celui qui a des difficultés à s’en sortir selon laissé à son propre sort.
Les fondements minés
78. Jusqu’ici, l’économie belge n’a pourtant pas presté de façon faible. Avec un chiffre de croissance de 2,8% en 2006 et en 2007, elle a même fait un peu mieux que la zone euro. Après une augmentation du chômage en 2005, il y a eu une légère baisse en 2006, suivie d’une baisse plus forte en 2007. Le déficit budgétaire était légèrement négatif en 2007 (-0,2%), mais quand même moins que la moyenne de la zone euro (-0,6%).(8) Après quelques années de diminution (2000-2005) ou de croissance faible (2006) (9), les investissements en 2007 ont connu une vraie accélération de 8%. Notre pays s’avère d’ailleurs être une des localités les plus attirantes de l’Europe pour les investissements étrangers. En Europe (27), seulement 4 grands pays, le Royaume-Uni, l’Allemagne, la France et l’Espagne, ont accueilli plus d’investissements. Entre 2003 et 2007, les investissements étrangers directs représentaient 12,3% du PIB ! Ceci n’est que de 1,2% pour l’Allemagne, 3,4% pour la France, 5,3% pour les Pays-Bas et 3% pour la chine.(10) Nous devons évidemment considérer les proportions et aussi le caractère de ces investissements, mais prétendre que la Belgique ne serait pas attractive pour des investisseurs étrangers n’est pas possible. Grâce à la prestation durant le premier semestre, la croissance des investissements en 2008 sera de 6,6%, mais retombera ensuite jusqu’à seulement 1,7% en 2009.(11)
79. Ici s’arrêtent les bonnes nouvelles. Depuis, les 6 marchés d’exportations les plus importants de l’économie belge sont au bord de la récession. Il s’agit de l’Allemagne, de la France, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, l’Espagne et l’Italie. Ensemble, ils représentent deux tiers de notre exportation. Pour un pays dont l’exportation des marchandises représente 71% du PIB, c’est d’une importance vitale. De plus, l’industrie belge livre beaucoup de produits semi-finis. Elle est une sorte de sous-traitant pour l’industrie des partenaires commerciaux.(12) Sur cette base, la KBC estime réaliste que l’économie belge parte en récession technique à partir du deuxième semestre 2008.(13) Qu’importe, pour la première fois en 16 ans, la balance commerciale risque en 2008 d’être déficitaire. Pendant les 5 premiers mois, la Belgique a connu un déficit de 7 milliards d’euros contre un surplus de 2,5 milliards d’euros l’année dernière. Le refroidissement de l’exportation est une des raisons principales pour lesquelles le Bureau du Plan a dû réajuster ses perspectives de croissance vers 1,6% en 2008 et seulement 1,2% en 2009.(14)
Marché immobilier : illusions statistiques ?
80. L’autre raison est le ralentissement de la demande intérieure, principalement la consommation particulière. Sa croissance en 2007 encore de 2,6% retombe en 2008 à 1,4% et en 2009 même à 0,8%.Les augmentations de prix de ces derniers mois et années y sont pour quelque chose. Entre 97 et 2007, les prix des maisons dans notre pays ont augmenté en moyenne de 142% ou 9,2% par an. Même le FMI trouve, compte tenu de la croissance des revenus nets, de la population à l’âge du travail, de la croissance du crédit et des cours des actions, que c’est 17% de trop. Moins qu’en Irlande, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, mais autant qu’en Espagne et même 5% de plus qu’aux Etats-Unis. Ne devons-nous pas alors craindre une chute du marché immobilier ? Oui, selon certains économistes et le secteur immobilier. L’économiste Van de Cloot, de ING, estime que les augmentations de prix sont derrière nous et que nous allons vivre pour la première fois depuis le crash de 79-82 une stabilisation, il n’exclu même pas la première baisse des prix depuis cette époque. (15)
81. Les prix des maisons et des terrains à construire ont bien augmenté lors de la première partie de 2008 comparé au premier semestre de 2007 – de 8,1% pour des maisons d’habitation, de 5,5% pour des appartements et même de 9,7% pour des terrains à construire – mais des promoteurs parlent d’une « illusion statistique ». Ils prétendent avoir constaté un point tournant en octobre et sont d’avis qu’une correction est en train de se faire. « Ce ne sera pas de la même force qu’au RU, en Irlande ou en Espagne, disent-ils, mais elle peut durer pendant quelques années. » (16) Pourquoi pas de la même force ? Selon Dick-Jan Abbringh, parce qu’en Belgique, le marché des prêts hypothécaires ne correspond qu’à 34% du PIB contre plus de 100% aux Pays-Bas. (17) Pourquoi pendant quelques années ? Selon Van de Cloot, parce que « on croit de plus en plus au caractère élevé structurel de l’inflation. Si cela se traduit en un taux d’intérêt à long terme fondamentalement plus élevé, nous pouvons oublier un retour à l’époque des prix hypothécaires bons marché. Justement ces prêts là étaient la force conductrice derrière la croissance immobilière de ces dernières années. » (18) N’avons-nous donc rien à craindre ? La KBC ne s’attend pas seulement à une stabilisation des prix des maisons, mais aussi à une chute de la construction. (19) Ce que cela va signifier pour l’emploi dans le secteur de la construction n’a pas encore été chiffré.
82. Nous saisissons l’occasion de démontrer une autre illusion statistique beaucoup plus grande. Selon le Bureau du Plan, le revenu réel disponible des foyers, donc de salaires, y compris des managers, et d’allocations, mais aussi de fortunes financières et immobilières, connaitrait en 2008 encore une croissance de 0,1% et en 2009 même de 1,8%.(20) Avec « réel », on veut dire en tenant compte de l’inflation. Il faut se poser la question : quelle inflation ? Pour le Financial Times, l’inflation aux USA, qui serait de 2,5%, serait de 8,9% si l’on appliquait la manière de calcul d’avant 1992, qui a changé radicalement depuis !(21) Le chiffre national de l’indexation des prix de consommation, qui serait de 4,7% cette année-ci, contre 4,2% de l’index-santé, et qui serait de 2,7% l’an prochain, contre 2,6% pour l’index-santé, n’est pas du tout une réflexion correcte des véritables augmentations de prix. Ceux-ci sont beaucoup plus importants parce que des postes de dépense importants tels que le loyer y ont un poids inférieur au poids qu’ils représentent dans la réalité. Le loyer compte pour 6,2% (22) Plus de 23% de la population sont des locataires. La consommation d’habitation totale dans notre pays représente d’ailleurs 20% de toutes les dépenses des foyers. (23)
83. Ceci nous aide immédiatement à comprendre pourquoi le loyer commence à être impayable pour les familles. Une étude commandée par le gouvernement flamand démontre qu’après retrait des dépenses d’habitation, les locataires disposaient en 2005 encore de 881 euros contre, corrigé après inflation, 1041 euros en 1992 ! Le pouvoir d’achat des locataires est fortement réduit depuis 1992, de 86 euros dans la période 1992-1997 et de 161 euros dans la période 1997-2005. En 2005, les locataires détiennent depuis 1992 en moyenne 16% de moins après avoir payé leur loyer qu’en 1992.(24) Ceci a évidemment à faire avec la faiblesse du secteur des logements sociaux qui en Belgique (10%) a un grand retard sur des pays tels que les Pays-Bas (largement 40%), le RU et la Suède
Hystérie de l’inflation
84. Les CPAS de Wallonie ont construit un « index de précarité » sur base des dépenses des foyers pauvres. Il apparait qu’un foyer qui vit du revenu d’insertion social de 997€, dépense en moyenne 27% à l’alimentation, et pas moins de 42,5% à l’habitation contre une moyenne de 26% pour toute la Wallonie. L’index de précarité a connu entre janvier 2006 et janvier 2008, donc avant la forte augmentation de l’inflation, une croissance deux fois plus élevée que le chiffre officiel d’indexation. La fédération wallonne des CPAS demande une adaptation urgente du revenu d’insertion sociale, pour une personne isolé de 698 à 860€ et pour une famille avec enfant, de 930 à 1548€. Ceci signifierait selon la Cour des Comptes, une dépense additionnelle de 1,25 milliards d’euros par an si c’est appliqué sur le plan national.(25)
85. Le Bureau du Plan admet lui-même que le revenu réel des foyers a été « négativement influencé » parce que l’augmentation des prix de l’énergie n’est pas tenu en compte dans l’index-santé qui règle l’adaptation des salaires et des allocations aux augmentations des prix.(26) Cette augmentation n’est pas des moindres. Beaucoup de familles de travailleurs ont toujours été méfiants à propos de la fable selon laquelle la libéralisation du marché de l’énergie réduirait les frais du consommateur. Cette méfiance a été confirmée en octobre 2007. Après Electrabel, c’était aux distributeurs d’augmenter leurs tarifs. (27) En février, la Banque Nationale a demandé des compétences supplémentaires pour le Creg, le régulateur fédéral du marché de l’énergie, afin d’annuler au moins une partie des augmentations de prix.(28) Le Creg lui-même demande de réduire le tarif de la TVA sur l’énergie de 21 à 6%, et une approche plus dure tant vers les producteurs que vers les distributeurs (29). En avril, il est apparu que les dépenses pour se chauffer et se nourrir pour une famille moyenne avec deux enfants vont monter de 676€ en 2008, et pour une personne isolée de 330 €. (30) Vers septembre, le prix du gaz avait déjà augmenté de 48,7% sur base annuelle, celui de l’électricité de 20,7% et on y ajoute que les prix vont encore monter. (31)
86. À partir de février, les arguments du patronat sur l’hystérie de l’inflation ont définitivement été balayés. (32) Il apparait que les prix des produits alimentaires transformés montent en force depuis la deuxième partie de 2007. Ces augmentations sont d’ailleurs en moyenne de 6% plus élevées qu’ailleurs dans la zone euro. L’abolition du prix du pain réglementé en 2004 a fait monter les prix hors proportion. Sur base annuelle, les prix des produits alimentaires transformés ont monté de près de 9%. (33) Mais lorsqu’il s’agit de son propre commerce, Unizo n’est plus unilatéralement en faveur du marché libre. Au contraire, Unizo n’est pas d’accord avec la Banque Nationale que plus de concurrence et moins de règlementations contribueraient à un niveau de prix plus bas. Dans sa réaction, l’économiste en chef Van de Cloot avertit de surtout ne pas répéter les fautes des années ‘70, lorsque les augmentations de prix ont été compensées par des augmentations générales de salaires. (34)
Cadeaux fiscaux aux entreprises
87. « Le mazout : +61%. Le gaz naturel : +52%. Le spaghetti : +42%. Le diesel : +32%. L’essence : +32%. L’électricité : +20%. » C’est ainsi que De Tijd a commencé son éditorial du 31 juillet, comme s’il fallait compenser ses précédents écrits sur l’hystérie du pouvoir d’achat. Même le chiffre officiel de l’indexation, cette illusion statistique, a dû, même si ce n’est que partiellement, refléter de telles augmentations de prix. En juillet, il a atteint 5,91%, le deuxième niveau les plus élevé en Europe, le plus élevé en 24 ans. (35) « Il est plus facile de rejoindre des manifestations pour plus de pouvoir d’achat », écrivait l’éditorialiste du Tijd, comme s’il ne faisait rien d’autre de ses journées, « que de remettre en question des systèmes que nous utilisons depuis des années. Mais nous devons aussi reconnaitre qu’il n’est pas raisonnable de faire payer l’inflation par les entreprises ou les autorités, les employeurs les plus importants, qui n’ont pas cette inflation en main. » Quoi ?
88. Entre-temps, un sondage de City Bank Belgique a montré que 9 belges sur 10 réduisent leurs dépenses en réaction à la baisse du pouvoir d’achat. C’est surtout sur les loisirs, le chauffage, les vêtements et les appareils ménagers que nous faisons des économies.(36) Les 10% restants n’en ont pas besoin, ils se sont construit une bonne réserve depuis longtemps. Malgré la crise du crédit, les entreprises ont réalisé en 2007 en Belgique un profit record de 79 milliards d’euros, 4 milliards de plus que l’année record précédente, en 2006.(37) Ils ont eu beaucoup d’aide de la part des autorités. Selon le rapport annuel de la Banque Nationale, les entreprises ont reçu, en 5 ans, de 2003 à 2007 compris, 21,85 milliards d’euros en diminutions des contributions patronales à la sécurité sociale. En 2007 uniquement, c’était déjà largement 5 milliards d’euros. De plus, pendant cette même période, ils ont reçu pour 1,28 milliards d’euros de diminution du précompte professionnel, surtout sur le travail en équipe et de nuit (38), dont 730 millions rien que pour 2007.
89. Mais le vol du siècle a sans aucun doute été la déduction des intérêts notionnels, introduite à partir du 1er janvier 2006 sous le gouvernement violet, un argument que Reynders lance régulièrement à ceux qui le critiquent au sein du PS et du SP.a. Le fait est que la violette avait initialement estimé le coût des intérêts notionnels à 500 millions d’euros, alors que cela coutera 2,4 milliards d’euros annuellement. Selon ce système, des entreprises peuvent déduire fiscalement non seulement l’intérêt qu’elles paient sur des prêts, mais dorénavant aussi un intérêt fictif sur leur propre actif. Cette mesure doit stimuler les entreprises à renforcer leur propre actif et même à encrer l’industrie en Belgique. On veut de cette manière compenser l’abolition des centres de coordination.(39) L’Europe considère ceux-ci comme une aide publique illégale et doivent être dissous au plus tard fin 2010.(40)
90. Pour les entreprises, qui doivent officiellement payer 33,99% d’impôts, il s’agissait d’un jackpot. Cela réduit le taux d’imposition moyen des entreprises à seulement 25%.(41) Ce n’est donc pas étonnant que, déjà en 2006, 41% des 381.288 entreprises en ont fait usage. Le tout mis ensemble, cette année là a connu 6 milliards d’euros de déduction d’intérêt, dont 37% qui ont été accordé à seulement 25 entreprises. (42) Selon De Tijd, l’intérêt notionnel explique le fait que l’influx de capitaux en Belgique a doublé jusqu’à 72 milliards d’euros en 2006, soit plus que vers la Chine. De Tijd reconnait bien qu’une partie importante de ces capitaux sont des capitaux endormis qui créent à peine des emplois.(43)
91. Mais la déduction des intérêts notionnels est controversée. En février 2008 déjà, Di Rupo brandissait une liste sur laquelle apparaissait le fait que les entreprises du BEL-20 payaient à peine encore des impôts. (44) Les entreprises publiques sont également passées à la caisse. La Banque nationale a ainsi épargné 17 millions d’euros en taxes ; la SNCB 1,4 millions d’euros et La Poste 8,6 millions d’euros. (45) De plus, le calcul des intérêts notionnels incite à la fraude, pleins d’entreprises cumulant toutes sortes de déductions, d’une telle ampleur que l’administration fiscale a du mettre sur pied un groupe spécial d’intervention pour les combattre. (46) Mais les patrons ne vont pas facilement abandonner leur fleuron. Ils ont même fait appel à la Banque nationale pour relativiser le coût de la mesure. L’avantage fiscal de 2,4 milliards d’euros pour les entreprises est un coût brut, argumente la Banque Nationale. Sur base de « données provisoires » pour 2006, elle conclut, une année et demi plus tard, que le coût net en 2006 se situerait « quelque part entre 140 et 430 millions d’euros ». (47) La Banque admet d’ailleurs qu’une fois que la mesure arrivera à sa vitesse de croisière, le revenu des impôts des entreprises sera fortement réduit. L’administration fiscale donne des chiffres plus précis, elle a calculé le coût net de la mesure à 1,2 milliards d’euros ! (48)
92. En terme d’effets sur l’emploi, la Banque Nationale estime « possible » que la mesure aie créé 3.000 emplois. Cela fait entre 46.500 et 144.000 euros par emploi. Si nous prenons les chiffres de l’administration fiscale, cela fait même 400.000 euros par emploi. Si on avait dépensé tout cela pour élever le pouvoir d’achat, l’effet sur l’emploi aurait probablement rapporté des dizaines de fois plus, et qui sait si cela n’aurait pas amené plus d’investissement. Le PS et le SP.a devaient bien essayer de corriger le tir quelque part. Le SP.a avec sa proposition d’une mesure anti-abus, par laquelle l’administration fiscale peut refuser la déduction des intérêts notionnels si la seule intention n’est que fiscale sans création d’emploi. Le PS avec sa proposition de taxe sur la valeur ajoutée sur la vente des actions, tel que cela existe en Italie et en France. (49) Les deux propositions sont restées au frigo.
93. Depuis 1988, le SP.a et le PS se trouvent au gouvernement, pour le SP.a jusqu’en 2007, pour le PS jusqu’à aujourd’hui. Suffisamment de temps donc, si ce n’est que pendant cette même période, de nombreux dossiers de fraude ont dépassé la prescription. Paul Dhaeyer, chef de la section financière du parquet de Bruxelles, ne le cache pas. « Beaucoup d’étrangers considèrent la Belgique comme un paradis fiscal, depuis des années nous sommes en sous-effectif. Il y avait un manque chronique de moyens. C’était un choix politique. » (50) Aussi, dans le scandale récent à « Liechtenstein Global Trust », au moins une cinquantaine de personnes résidant en Belgique seraient impliqué.
94. Malgré cela, les patrons et leurs représentants politiques trouvent qu’ils paient encore trop. Et donc, Unizo et Voka plaident pour laisser les entités fédérées déterminer le taux d’imposition des entreprises. Ils pensent pouvoir ainsi réduire les impôts des sociétés jusqu’à 20%. Mais ce n’est pas seulement l’impôt des sociétés qui doit être réduit, les impôts sur les personnes physiques, qui doivent entre autres financer les services publics collectifs, sont selon eux trop élevé. Pour le CD&V Hendrik Boogaert, la pression fiscale aux Pays-Bas serait de 40% du PIB contre 44% en Belgique. « Les impôts doivent donc être réduits de 14 milliard d’euros. », conclut-il, ce qui correspond à 4% du PIB (51).
95. Ceux qui prônent les réductions de charge argumentent toujours les ‘effets de retour’. Ce que cela vaut, nous le savions déjà, mais cela a été récemment confirmé scientifiquement par deux recherches. Ive Marx, sociologue du CSB à Anvers et Kristian Orsini, doctorant à la KUL, ont constaté tous deux que l’effet des baisses des charges est surestimé. Orsini est d’ailleurs tout sauf quelqu’un de gauche. Il plaide pour une limitation des allocations de chômage dans le temps pour remplacer la baisse des charges. (52)
Des rémunérations généreuses pour les patrons
96. Ce qui n’échappe pas non plus à l’attention de beaucoup de familles de travailleurs, ce sont les salaires exagérés des managers des entreprises. Ce n’est pas pour rien que les économistes bourgeois parlent d’avidité, surtout lorsque l’on considère la modération salariale qui a été imposée aux travailleurs depuis des années. L’appel pour plus de contrôles devient de plus en plus pressant. Certainement aux Etats-Unis, où un mouvement, soutenu par les démocrates, s’est créé sous le nom « Say on pay », mais également un peu partout dans le monde, y compris en Belgique. Le patron d’Inbev, Brito, a reçu en 2007 une augmentation salariale de 9%, jusqu’à 4,25 millions d’euros, plus ou moins 375.000 euros par mois ou 12.500 euros par jour. Le patron de Fortis, Votron, a reçu une augmentation de 15% à 3,9 millions d’euros. (53) De nouveau, les patrons des entreprises publiques suivent leurs collègues du secteur privé. Didier Bellens de Belgacom a reçu en 2007 une augmentation de 42%, à 2,7 millions d’euros, à peu près 225.000 euros par mois, même si, depuis, il a dû assainir. Cette même année, Johnny Thijs a allégé la Poste de 900.000 euros, soit 75.000 euros par mois, autant que le salaire combiné d’un bon bureau de Poste de distribution. (54)
97. Pour Vincent Van Quickenborne (VLD), ce sont les affaires des actionnaires, dans lesquelles les autorités ne doivent pas intervenir. C’est ce même Van Quick qui trouve qu’il y a trop de fonctionnaires. Son camarade De Gucht est plus réaliste. « Pendant que les salaires les plus élevés connaissent un pic, il y a une classe moyenne croissante qui est de plus en plus en difficulté. Ceci fait obstacle au ‘plaidoyer de modération’ dans la sécurité sociale. (…) Le sommet des entreprises doit bien se réaliser qu’il ferait mieux lui aussi de modérer afin de ne pas stimuler des tendances populistes ; les gouvernements de l’occident doivent mieux répartir les fruits de la mondialisation, sans détruire ces fruits. » (55) De Gucht est plus ou moins le prototype du libéral, l’homme de la raison, sans dogme, et évidemment franc-maçon. Ce n’est pas un libéral vulgaire comme Van Quick, qui n’a retenu du libéralisme que le droit de se remplir les poches de façon illimitée. Pour De Gucht, le libéralisme n’est pas une carte blanche pour l’avidité. Il estime évidemment la liberté de l’individu et la propriété privée comme étant supérieure à Dieu, à la Nation, ou à la communauté collective, même si cette liberté mine celle des autres. Ce qui est inacceptable selon lui, c’est que le système même qui permet à l’individu de jouir de cette liberté soit miné.
98. Le problème de De Gucht, c’est que son système libéral est en contradiction avec les lois de fonctionnement du capitalisme. Il a dû lui-même subir cela lorsqu’il a voulu donner des leçons à Kabila et aux autorités congolaises sur la corruption et l’incompétence. Non seulement Leterme a dû intervenir pour sauver les meubles, en fait surtout les contrats lucratifs, mais en plus, son camarade Pierre Chevalier, nommé représentant belge des Nations Unies au Congo, à condition qu’il délaisse son mandat à Forrest International, avait été en cachette renommé administrateur délégué de Forrest Int. Rik Daems, le tueur de la Sabena, un autre camarade de De Gucht et ancien ministre des télécoms (de 1999 à 2003), aurait agit comme consultant en 2007 pour Belgacom au Qatar. Coïncidence ? Nous ne le pensons pas. Un système basé sur la chasse aux profits a comme conséquence inévitable que certains dépassent les lignes quand ils colorient.
Actions pour plus de salaire
99. Il n’est donc pas étonnant que beaucoup de travailleurs soient insensibles aux arguments de De Tijd et soient bien d’avis qu’il est temps que les patrons et les autorités y mettent de leur poche. Après une année record en 2005, l’année du Pacte de solidarité entre les générations, avec 669.982 journées de grèves enregistrées, il y a eu une pause de deux ans. (56) Il n’y a pas encore de statistique pour 2008, mais il est pratiquement sûr que la courbe de grève cette année fera un saut. On aurait pu le savoir. En avril 2007, quelques grèves spontanées avaient déjà éclaté à Zaventem et chez les fournisseurs de Ford Genk. Le système de sous-traitance, de fournisseur, de travail intérimaire, de travail à temps partiel ou temporaire, avait été mis sur pied afin de diminuer la force des travailleurs. Mais, comme tout système, celui-ci connait aussi ses limites. Dans une carte blanche dans De Tijd, on souligne le fait que « les travailleurs de la ‘périphérie’ (de la production) savent à peine qui est leur vrai employeur, les syndicats les considèrent comme des forces étrangères, et notre modèle de concertation n’a pas prévu de donner à ces travailleurs le sentiment qu’ils font partie du système. » (57)
100. Chez les fournisseurs de Ford Genk, on savait très bien qui étaient les vrais employeurs. Le fait que Ford Genk pouvait à peine suivre la demande n’avait pas échappé à sa ‘périphérie’. C’était le bon moment de se mettre en action. A commencer par le 14 janvier 2008, à Syncreon, fournisseur de panneaux de portière et de pots d’échappement. Ils ont obtenu 0,47 centimes d’euros et deux boni de 500 euros. Après cela, la vague de grèves spontanées ne pouvait plus être arrêtée. Fin janvier, la vague avait déjà touché 32 entreprises, dont 14 au Limbourg, mais aussi 6 à Liège et 5 à Anvers. C’était surtout le secteur automobile, avec 12 entreprises, et d’autres entreprises métallurgiques (9) qui ont été touchées. (58) Nous n’avions plus vécu une telle vague de grèves spontanées depuis la fin des années ‘60 et surtout le début des années ‘70. Là aussi, les travailleurs avaient le sentiment qu’ils avaient insuffisamment reçu les fruits de la bonne conjoncture.
101. Agoria, l’organisation patronale du métal, qualifiait ces grèves « d’illégales ». La FEB et le sommet de la CSC ont tempéré et insistaient surtout sur le fait qu’il fallait sauvegarder le modèle de concertation. (59) Finalement, selon Agoria, 42 entreprises du secteur auraient été confrontées à des revendications salariales supplémentaires. Ce n’est pas une coïncidence. Dans le secteur du métal s’applique ce qu’on appelle les « accords all-in » ou leur version adoucie, les « accords saldo ». (60) Le sommet syndical a réussi à faire dévier les revendications pour plus de salaires vers une vague de bonus. Ce système n’était entré en application qu’un mois auparavant. Il détermine que des entreprises peuvent, à un tarif fiscalement intéressant, payer un bonus jusqu’à 2.200€ nets par an au travailleur. (61) C’est attractif, mais nous devons tenir compte du fait qu’on ne paie pas des cotisations sociales et que c’est une mesure unique. Les syndicalistes les plus combatifs ont donc insistés sur des augmentations salariales réelles, ce qui explique la popularité de la revendication « 1€ en plus par heure ».
102. En mars, les actions pour l’augmentation du pouvoir d’achat ont commencé à toucher le secteur public. Les 24.000 fonctionnaires de l’administration flamande ont exigé une augmentation du pouvoir d’achat de 5% dans la période 2008-2009 avec des augmentations des primes de fin d’année et une cotisation plus élevées de l’employeur en chèques repas. Par voie du futur ex-ministre Bourgeois, le gouvernement a répondu ne pas avoir les moyens et Kris Peeters a menacé de réquisitions si les blocages des écluses n’étaient pas arrêtés. Parallèlement, ils ont avancé des propositions provocatrices pour rendre possible le travail intérimaire et niveler le statut des travailleurs statutaires au niveau de celui des travailleurs contractuels. Finalement, une augmentation salariale minimale de 2% a été imposée. Plus tard, des actions du personnel des CPAS et des communes ont suivi dans tout le pays.
Premier mai – élections sociales et semaine d’actions
103. Il fallait que les dirigeants syndicaux expriment tout cela le premier mai. Dans ses discours, la FGTB a revendiqué une augmentation salariale de 10%… pour les prochaines années. En utilisant pour cela l’argent qui va aujourd’hui à l’intérêt notionnel. Jan Renders du MOC : « certains veulent un gros poisson communautaire, d’autres veulent un gros poisson fiscal. Mais nous voulons un gros poisson social. » Luc Cortebeek : « Avec les employeurs, cet automne, il faut arriver à un accord interprofessionnel qui rende possibles des augmentations salariales. Les profits et les salaires des managers ont aussi augmenté. Celui qui ne veut pas y collaborer peut s’attendre à un hiver chaud. »
104. A nouveau dans la première partie de ce même mois de mai 2008, 1,4 millions de salariés dans à peu près 6.300 entreprises pouvaient voter pour 142.000 candidats pour les comités de prévention et les conseils d’entreprise. C’est le double des candidats que les partis politiques ont présenté lors des élections communales en 2006, 13% de plus qu’en 2004. (62) Pour la CSC, il y avait 68.000, pour la FGTB, 55.000. Contrairement à la majorité des pays de l’OCDE, le degré de syndicalisation net en Belgique a continué à croitre pendant les années 90. Avec degré de syndicalisation net, nous voulons dire seulement ceux qui sont effectivement au boulot, donc pas les pensionnés ni les chômeurs ni d’autres catégories considéré comme membres mais qui ne paient pas de contribution. (63) Pour 2003, les syndicats donnent les chiffres de 1,6 millions de membres pour la CSC, 1,2 million pour la FGTB, et 223.000 pour la CGSLB.(64)
105. Bien que 1,4 million d’électeurs soit un record, le degré de couverture des élections sociales diminuerait petit à petit. Selon une étude de Hiva, il y a divers raisons : dans les services publics, des élections sociales ne sont organisées presque nulle part, il y a la PME-tisation de l’économie, qui fait qu’il y a plus d’entreprises qui n’atteignent pas le seuil électoral, et il y a la croissance du travail intérimaire et de la construction où des élections sociales ne sont pas organisées. (65) Le degré de participation serait bien retombé un peu, mais il reste, sans obligation de vote, très élevé : 72,4% pour les comités de prévention et 70,6% pour les Conseils d’entreprises. Des jeunes qui peuvent voter, 42,5% ont participé, contre 52,4% en 2004. Probablement, le degré de participation était plus bas dans ces entreprises où des élections sociales n’étaient pas tenues par le passé. (66)
106. Comme nous l’avions pensé, les élections sociales n’ont pas amené de très grands glissements. Contrairement à ce qu’elle avait annoncé, la CGSLB n’a de nouveau finalement pas obtenu les 10%. La FGTB a avancé légèrement, tant en Flandre qu’en Wallonie. La CSC a reculé légèrement, mais gagne à Bruxelles. Les listes séparées de cadre, de la Confédération Nationale des Cadres, et les listes individuelles d’entreprises ont fortement perdu. Un phénomène classique lors de l’augmentation de la lutte des classes, c’est que le mouvement entraine différentes couches à différents moments. Pendant qu’une avant-garde tire déjà ses premières conclusions politiques, il y a des couches qui viennent seulement de rejoindre le mouvement et qui reflètent encore la phase précédente du développement. (67) Nous ne pouvons donc pas concentrer notre attention sur la stabilité apparente des résultats généraux. Au contraire, lorsque l’on regarde de plus prêt, la FGTB a gagné dans les entreprises, surtout dans le secteur automobile, où des actions sur le pouvoir d’achat ont été menées plus tôt dans l’année. En général, les délégations syndicales qui sont connues comme étant combatives ont gagné, indépendamment du syndicat auquel elles adhèrent.
107. En juin, les délégations nouvellement élues étaient déjà confrontées à un test important, lorsque les directions syndicales ont annoncé une semaine nationale d’action pour le pouvoir d’achat. A peu près partout, la mobilisation était très forte, 80.000 travailleurs au total ont répondu à l’appel. Celui qui prétendait que le débat sur le pouvoir d’achat ne vivait pas en Wallonie a eu sa réponse. Les manifestations à Liège, Mons, Namur et même Arlon, étaient systématiquement plus grandes qu’en Flandre. A Anvers et à Hasselt, tout comme en Wallonie, différentes entreprises ont spontanément fait grève. La présence de beaucoup de femmes, mais surtout de jeunes, souvent élus pour la première fois, démontre qu’une nouvelle couche combative a pris sa place. Rarement nous avons reçu une telle ouverture, tant pour notre programme que pour notre appel aux syndicats de casser les liens avec leurs partenaires politiques traditionnels. Là où les syndicats ont optés pour des actions « nouvelles », telles que « Foodstock » à Gand ou des ballades en vélo ou d’autres inventions de ce type à Bruges et à Courtrai, la mobilisation était faible. La méthode d’action ne correspondait pas à la demande de la base.
Le droit de grève restreint ?
108. « Les actions d’une minorité pour plus de salaire sont absurdes » déclare Caroline Ven, anciennement active dans le service d’étude de l’organisation patronale flamande VKW, et désormais économiste en chef du Cabinet du Premier Ministre Leterme, qui est pourtant officiellement de tendance ACW (MOC en Flandre). (68) « Ils n’ont jamais été aussi forts et pourtant ils n’ont jamais eu aussi peu à dire », déclare un élu de la chambre du CD&V- qui n’a pas de cachet ACW. (69) Caroline Ven et les patrons essayent, en fait, de toujours présenter les actions comme de l’aventurisme d’une minorité bruyante, contre laquelle la majorité silencieuse n’ose pas se rebeller. De cette manière, on prépare l’opinion publique aux restrictions sur le droit de grève.
109. En avril 2007, le personnel de sécurité et les pompiers de l’aéroport de Zaventem ont commencé une grève spontanée. 26.000 passagers ont été bloqués. L’avocat de droite Peter Cafmeyer qui, pendant le Pacte des Générations, était déjà le conseiller juridique des patrons ayant subis des pertes à cause de la grève, s’est attaqué à cette grève. Cafmeyer a réussi à laisser payer 500 passagers pour plaider une affaire contre 46 employés et CSC-Transcom. Pour retrouver l’identité de ces 46 employés, il a fait appel à des détectives privés. Cafmeyer a agi de sa propre initiative et il est peu probable qu’il gagnera cette affaire qui a été reportée à la fin de l’année 2009. Cela n’empêche pas Rudi Thomaes de la FEB d’espérer un procès, selon ses propres dires. « Une condamnation ferait réfléchir les autres avant qu’ils ne passent à des actions inacceptables ».
110. Selon Thomaes, ce n’est pas une atteinte au droit de grève. (70) Pour lui, le droit de grève doit exister, mais doit être réglementé à un tel point que dans la pratique il ne reste presque plus rien. Mais cela aussi à ses limites. Ainsi Guy Cox, directeur général du service de médiation collective du travail, estime que les procédures de concertation moyennes prennent tellement de temps que la pression de la base devient trop forte. (71) D’une manière ou d’une autre, les grèves spontanées sont attaquées. En août 2007, Ryanair a menacé de partir de Charleroi si les syndicats n’acceptaient pas un service minimum, et ils ont également exigé une indemnisation immédiate d’un million d’euros pour la grève spontanée du 15 juin. En mai 2008, le Ministre wallon du transport, André Antoine, a jugé une grève de la TEC comme étant une habitude « inadmissible ». Presque au même moment, l’Open VLD a plaidé pour la prestation d’un service minimum à la SNCB. Pour Vervotte, Ministre responsable des Services Publics, c’est une mesure “inapplicable”, mais elle a affirmé en même temps vouloir discuter sur des procédures plus strictes, plus claires et plus responsables des mouvements spontanés. (72)
111. En août 2008, la discussion est revenue sur table à la suite d’une grève spontanée des bagagistes. Dans un premier temps, toutes les responsabilités étaient mises sur le dos des grévistes mais, pour une fois, l’attention de la presse a commencé à se déplacer également sur les conditions de travail intenables. (73) Même De Tijd qui, dans son édito du 12 août avait plaidé pour dresser une liste des services stratégiques, a dû remettre une balance dans le journal du samedi. « Ce qui est arrivé cette semaine à Zaventem est la conséquence du rachat de l’activité de l’aéroport… La sous-traitance a aussi des inconvénients. Que devons-nous proposer par un service minimum dans ce cas ? Que seuls les bagages des passagers de la classe Business soient emmenés ? D’ailleurs, le traitement des bagages est-il un service essentiel ? Non. Le trafic aérien n’est plus une affaire du gouvernement, il a été privatisé il y a déjà longtemps. » (74) Compare cette attitude à l’accord que les syndicats ont signé avec la direction de la SNCB, accord qui dit notamment qu’une grève spontanée peut être une raison acceptable pour un licenciement.
(1) De Tijd, 25 juillet 2008, Financieële crisis kost Belgiëen 50 miljard euro
(2) De Tijd, 28 juillet 2007, Belgiëen samen 71 miljard rijker dan verwacht.
(3) Le Soir, 25 juin 2008, La Belgique abrite 72.000 millionaires.
(4) De Tijd, 5 avril 2008, Belgische bedrijven geven aandeelhouders 10 miljard
(5) Le Soir, 2 juillet 2008, La pire chute depuis 21 ans.
(6) Le Soir, 29 juillet 2008, L’action Fortis vaut une demi G-Banque.
(7) De Tijd, 20 septembre 2008, “Grote ontslagronde bij Belgische banken onvermijdbaar”.
(8) BNB, indicateur économique pour la Belgique, 19 septembre 2008.
(9) De Tijd, 8 janvier 2008, Ondernemingen trekken investeringen dit jaar op
(10) The Economist, country briefings, fact sheet par pays
(11) Bureau fédéral du Plan, communiqué 12 septembre 2008.
(12) De Tijd, 10 septembre 2008, Belgische afzetmarkten op rand van recessie
(13) KBC épargner et investir, 5 septembre 2008, Wanneer de zon schijnt in New York …
(14) Bureau fédéral du Plan, communiqué 12 septembre 2008.
(15) De Tijd, 4 avril 2008, Economen verwachten afvlakking huizenprijzen
(16) De Tijd, 26 août 2008, Hogere vastgoedprijzen zijn statistische illusie et Le Soir, 26 augustus 2008, Prix en hausse, baisse en cours
(17) De Tijd, 20 septembre 2008, ‘Grote ontslagronde bij Belgische banken onvermijdbaar’
(18) De Tijd, 26 août 2008, De onvermijdelijke correctie op de vastgoedmarkt is begonnen.
(19) De Tijd, 4 avril 2008, Economen verwachten afvlakking huizenprijzen
(20) Bureau fédéral du Plan, communiqué 12 septembre 2008
(21) Financial Times, 7 septembre 2008, Government lies and squishy ethics
(22) La liste complète des produits et de leur poids dans le panier de l’index peut être trouvé sur le site du Service Public fédéral sous index des prix à la consommation ou ici : http://www.statbel.fgov.be/indicators/cpi/cpi1_fr.pdf
(23) BBSH Bouwen aan Vertrouwen in de Woningmarkt, Ruimte geven, bescherming bieden Een visie op de woningmarkt
(24) De Morgen, 30 juillet 2008, Woning huren wordt voor gezinnen onbetaalbaar
(25) Le Soir, 30 août 2008, La crise cogne d’abord les précaires.
(26) Bureau fédéral du Plan, communiqué 12 septembre 2008
(27) Le Soir, 13 octobre 2007, Le gaz en hausse (épisode II)
(28) De Morgen, 23 février 2008, Gas en electriciteit toch fors duurder
(29) De tijd, 19 janvier 2008, Creg vraagt lager btw-tarief voor energie
(30) La Libre, 12 avril 2008, Selon Olivier Derruine van de studiedienst van het CSC
(31) Le Soir, 19 septembre 2008, Le prix du gaz enflera encore
(32) L’édito de De Tijd du 30 janvier 2008 a pour titre: “inflatiehysterie » et l’éditorialiste conclu : « il est important de ne pas prendre des mesures hâtives. Puisque jusqu’ici, il n’y a vraiment pas de raison de créer de l’hystérie sur l’inflation. »
(33) BNB, Indicateurs économiques pour la Belgique, 19 septembre 2008
(34) De Tijd, 23 fevrier 2008, Belg betaalt levensmiddelen te duur
(35) Le Soir, 31 juillet 2008, Pas d vacances pour l’inflation
(36) De Tijd, 22 mai 2008, Negen op de tien Belgen schroeven uitgaven terug
(37) De Tijd, 14 fevrier 2008, Bedrijfswinsten stijgen tot record van 79 miljard euro, sur base du rapport de la Banque Nationale
(38) Rapport annuel de la Banque Nationale, 2007, p. 98 tableau 25
(39) Les centres de coordination ont été introduits à la fin de l’année 1982 comme un régime fiscal favorable aux entreprises belges ou aux multinationales avec des filiales belges. Pour en illustrer l’importance : le 31 décembre 1997, 236 centres de coordination ont assuré 11,4% des profits avant impôt et 13,5% après impôt pour l’ensemble des entreprises belges. Ces mêmes centres de coordination n’ont pourtant payé que 0,82% des impôts de sociétés. Voir : taxincentives : analyse van de impact van notionele interestaftrek – Riet Janssens – http://statbel.fgov.be/studies/ac735_nl.pdf
(40) Rapport annuel de la Banque Nationale, 2007, p. 159
(41) De Tijd, 27 octobre 2007, Didier Reynders, vader van de notionele intrestaftrek
(42) De Tijd, 20 août 2008, Bijna helft firma’s pas notionele rente toe
(43) De Tijd, 27 octobre 2007, Heldere belastingen
(44) De Tijd, 12 février 2008, Bel 20’ers betalen amper belastingen
(45) Le Soir, 5 mars 2008, Les entreprises publiques profitent des notionnels
(46) De Tijd, 27 octobre 2007, Van ‘double dip’ tot misbruik
(47) Le Soir, 24 juillet 2008, La BNB clémente avec les intérêts notionnels
(48) De Tijd, 20 août 2008, Bijna helft firma’s pas notionele rente toe
(49) De Tijd, 25 janvier 2008, ‘U vernietigt de notionele intrestaftrek’
(50) De Tijd, 31 mai 2008, ‘Achterstand was politiek keuze’
(51) De Tijd, 5 avril 2008, ‘Belastingen moeten met 14 miljard euro omlaag’
(52) DeTijd, 7 mai 2008, Effect lastenverlaging wordt overschat
(53) Le Soir, 3 avril 2008, Salaire des patrons: “une affaire des actionnaires.”
(54) L’Echo, 15 mars 2008, Les salaires fous du secteur public
(55) De Morgen, 24 mars 2007, Karel De Gucht bindt de strijd aan met de toplonen.
(56) Site des autorités Fédérales, grèves
(57) De Tijd, 19 avril 2007, De opstand van de periferie
(58) De Tijd, 31 janvier 2008, Stakingsgolf januari trof 32 privebedrijven
(59) De Tijd, 31 janvier 2008, ACV en VBO willen vermijden dat stakingsgolf escaleert
(60) Dans les accords all-in, la norme salariale est un plafond absolu qui ne peut pas être dépassé, même pas si l’index-santé dépasse la norme salariale. Dans des accords saldo, le même principe s’applique, mais sans pouvoir toucher à l’indexation. Dans De Standaard du 13 avril 2008, un exemple concret est calculé. (61) De Standaard, 28 septembre 2007, Akkoord over loonbonus
(62) De Tijd, 30 avril 2008, 13 procent meer kandidaten voor sociale verkiezingen
(63) Monthly Labour Review, janvier 2006, Union membership statistics in 24 countries
(64) Le Soir, 5 mei 2008, Les Belges et le syndicat: l’amour-haine
(65) De Tijd, 4 april 2008, Amper een op drie kan stemmen
(66) De Tijd, 11 september 2008, Liberale vakbond haalt 10 procent toch niet
(67) Trotsky explique ce phénomène dans son livre sur la révolution russe lorsqu’il décrit la situation en juin 1917. C’était au moment où les partis du gouvernement provisoire, qui avaient été portés au pouvoir lors de la révolution de février, perdaient le soutien des travailleurs et des soldats les plus actifs et conscients à l’avantage des bolcheviks, du moins dans les grandes villes. La surprise était donc grande, surtout chez elle-même, lorsque le plus grand parti gouvernementale, les SRs, gagnaient les élections avec plus de 60%. Trotsky dit là-dessus que la révolution de février avait provoqué beaucoup de poussière et avait fait un impact sur, avec quelques mois de retards, beaucoup de valets de maisons et d’écuries. Ceux-ci adhéraient logiquement chez ceux que la révolution de février aveint mis au pouvoir, c’est-à-dire les sociaux-révolutionnaires. Ils n’étaient pas encore conscients du frein que ce parti représentait, ceci ne serait compris généralement qu’après le coup échoué du général Kornilov en août 1917. Trotsky remarquait que les révolutionnaires doivent baser leur politique sur les couches les plus actives et conscientes parce que celles-ci reflètent le mieux les conditions réelles et ne doivent donc pas se baser sur les couches qui ne commencent à s’intéresser au changement qu’avec un certain retard.
(68) De Tijd, 10 mai 2008, ‘Acties van een minderheid voor meer loon zijn absurd’
(69) De Standaard, 27 avril 2008, Wij zijn allen ACW’er
(70) Le Soir, 28 avril 2008, Raid surprise sur grève sauvage
(71) De Tijd, 21 avril 2007, Hoe wild is wilde stakingsactie
(72) Le Soir, 21 mai 2008, Grève: les priorités de la ministre.
(73) Le Soir, 12 août 2008, Pourquoi les bagagistes débrayent en plein coup de feu.
(74) De Tijd, 16 août 2008, De cruciale rol van bagagesjouwers
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PS et Région wallonne. Demotte lave plus bleu ?
Rudy Demotte, le successeur que s’est choisi Di Rupo comme Ministre-président de la Région wallonne, a donné une interview de rentrée au Soir. Elle illustre à merveille le dicton populaire « Avec un socialiste comme ça, qui a encore besoin des libéraux ? ».
Après avoir rappelé le credo du PS wallon (non au confédéralisme, tout pour le redressement économique wallon), Demotte en arrive aux moyens à employer pour assurer ce redressement. Et le festival commence : « La Wallonie doit redevenir une ‘’terre laborieuse’’. Je serai celui qui y veillera. Qui va libérer le marché ». Un peu surpris par ce mâle discours sarkozyste, le journaliste risque « ‘’Libérer le marché’’, de la part d’un socialiste… ». Demotte appuie alors sur l’accélérateur : « Un socialiste moderne, convaincu de l’importance d’offrir les meilleures conditions aux investisseurs – à commencer par les investisseurs flamands (…). Il faut offrir des garanties aux gens qui détiennent des capitaux et qui sont prêts à investir. L’accord social chez Ryanair récemment est un bel exemple d’une Wallonie aux antipodes de son image conservatrice, grévicultrice, etc. ». Et Demotte assène le coup final « Il faut un nouveau « pacte social wallon », liant mouvement syndical, patronat, responsables publics (qui) renvoie à l’impératif wallon : la prise de conscience (de) ne compter que sur nous-mêmes ».
Ce nouveau pacte social pour attirer les investisseurs, on voit donc bien ce que cela signifie pour Demotte : ligoter les mains des syndicats en convainquant leurs dirigeants qu’il n’y a pas d’autre moyen que de supprimer les « rigidités » du marché du travail (fini les contrats à durée indéterminée, vive les contrats précaires, la flexibilité des horaires, l’intérim à gogo et la « facilitation » des licenciements) et en réduisant les possibilités de grève (en les faisant bloquer par les dirigeants syndicaux et, si besoin, en imposant le service minimum dans les services publics cher au cdH.
Les intentions de Demotte sont donc claires comme du cristal au niveau de la Région wallonne. Il continuera – et accentuera – la politique social-libérale qu’a menée Di Rupo. Mais ses déclarations ont aussi une signification au niveau fédéral. Elles sont d’abord une offre de service en bonne et due forme adressée aux partis de l’Orange bleue, et en particulier au CD&V : si vous n’arrivez pas à vous entendre à quatre, le PS est disponible et mener une politique libérale ne nous fait pas peur ! Mais elles montrent aussi quelle « opposition » le PS s’apprête à mener au cas où il ne ferait pas partie du nouveau gouvernement : Là où la droite cherche à passer à force, nous, nous réussissons à rassembler les dirigeants du patronat, des partis et des syndicats autour d’une politique favorable aux investisseurs ». Le PS en champion du libéralisme consensuel contre le libéralisme d’affrontement social !
Espérons que ces déclarations feront réfléchir ceux qui pensent encore que le PS rejeté dans l’opposition développerait une critique de gauche d’un gouvernement chrétien-libéral et desserrerait le frein qu’il a placé sur la FGTB afin que les syndicats secouent le gouvernement. En candidats permanents au pouvoir et à la gestion néolibérale, les dirigeants du PS n’ont pas la moindre envie de voir les travailleurs dans la rue… même contre la droite !
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Travailleurs wallons, bruxellois et flamands. Tous ensemble contre la droite
Au moment de la parution de ce journal, nous n’avons toujours pas de gouvernement. Après plus de cent jours, les négociations ne semblent pas bouger. Les politiciens du Nord montrent du doigt « les Francophones » tandis que ceux du Sud dépeignent « la Flandre » comme un bloc homogène égoïste obnubilé par la scission du pays.
Pourquoi les revendications communautaires sont-elles devenues si importantes? Le pays est-il vraiment en voie de scission, comme certains médias et politiciens amateurs de sensations fortes le disent ? Avec la crise politique qui se développe autour de la (non-) formation du gouvernement, c’est devenu un sujet de discussion partout parmi la population, à la maison, dans le train ou au boulot.
Les politiciens bourgeois, de part et d’autre de la frontière linguistique, ne peuvent pas se vanter d’avoir réalisé grand’chose sur le plan social. Il leur serait difficile d’affirmer que notre pouvoir d’achat a augmenté. Bien au contraire, les manipulations de l’index, la hausse continue du coût du logement et aujourd’hui l’augmentation du prix de beaucoup de produits de base (pain, oeufs, bière, etc.), les salaires et les allocations des travailleurs et de leurs familles ont systématiquement perdu de leur valeur.
Les politiciens ne peuvent pas dire non plus qu’ils ont amélioré la sécurité de l’emploi: une entreprise rentable comme Janssen Pharmaceutica vient de licencier 688 salariés. Ont-ils contribué à réaliser une combinaison meilleure entre le travail et la famille? La pression au travail, le stress et le manque d’épanouissement individuel sont devenus la norme. A la fin de la route toujours plus longue (à cause du Pacte de Solidarité), c’est une pension au rabais qui nous attendra.
Le seul thème sur lequel la plupart des politiciens, y compris ceux du PS et du SP.a, souhaitent encore se positionner, c’est le thème communautaire. Tout serait la faute, selon les cas, des Flamands ou des francophones. Ce jeu politique est scandaleux, si on prend en compte les problèmes sociaux réels qui existent dans la société et le clivage toujours plus important entre les riches et les pauvres.
Nous ne pensons pas qu’une scission de la Belgique est aujourd’hui à l’ordre du jour, même si cela peut devenir un scénario bien réel si nous laissons faire les politiciens actuels. Suite à l’excitation que font monter les médias, le soutien à la division du pays aurait, selon les sondages, augmenté de part et d’autre de la frontière linguistique. C’est un développement bien inquiétant pour les travailleurs. La majorité de la population n’a rien à gagner dans les jeux communautaires qui dominent le débat actuel.
Du côté flamand, les partis de droite, et derrière eux beaucoup de petits patrons, espèrent pouvoir imposer des mesures d’austérité importantes en Wallonie, à Bruxelles… et en Flandre par le biais de la régionalisation. Le VOKA (l’organisation du patronat flamand) veut scissionner les caisses de chômage avec une politique envers les chômeurs differenciée selon les régions. Ils espèrent ainsi briser plus facilement la résistance des syndicalistes à leur politique antisociale.
Mais, du côté francophone, le front « communautaire » n’est pas plus « social » : tant le MR et le CDH que le PS se sont déjà prononcés en faveur de restrictions au droit de grève, comme chez Ryanair. Leur résistance à une régionalisation accrue vient des difficultés économiques que connaissent la Wallonie et Bruxelles et de leur inquiétude face au rythme élevé et à l’ampleur des mesures d’austérité que veulent imposer les partis flamands. Mais pas du tout d’une opposition de fond à cette politique d’austérité.
Il est clair que la période à venir sera marquée par des crises économiques et de nouvelles et dures mesures d’austérité. Tous les salariés de Belgique, qu’ils soient flamands ou francophones, doivent se préparer aux attaques du patronat. Cela ne sera pas possible si la droite et ses laquais nous divisent. Pour un nouveau parti des travailleurs, contre la droite et la politique antisociale, participez au CAP dans votre région, informez-vous des idées du MAS/LSP. Organisez-vous pour défendre les intérêts de tous les travailleurs. Rejoignez-nous !
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Faire la grève est et reste notre droit ! Pas de pacte contre les grèves « sauvages », des patrons arrêtez le chantage !
Tant Reynders que Leterme ont mis en avant dans leurs notes pour la formation d’un gouvernement l’idée d’un service minimum en cas de grève Avant cela, le MR avait déjà introduit une proposition de loi dans ce sens. Les organisations patronales poussent de hauts cris à chaque grève des services publics. Ryanair fait du chantage pour obtenir l’octroi d’un service minimum. 48 travailleurs de l’aéroport de Zaventem sont traînés en justice pour avoir fait grève le 13 avril contre la politique dictatoriale de leur direction.
Luc Janssens
A l’aéroport de Charleroi, la société irlandaise Ryanair a menacé de cesser ses activités si elle n’obtenait pas de dédommagement pour les pertes causées par la mise à l’arrêt de l’aéroport, suite à la grève menée le 25 juin par les agents des services de sécurité contre la proposition de privatiser leur service.
Avec ce chantage, Ryanair exigeait un dédommagement d’un million d’euros et l’interdiction de fait du droit de grève dans l’aéroport ! O’Leary, le dirigeant de Ryanair semble ainsi vouloir aller encore plus loin dans la discussion sur le service minimum.
Pourquoi s’en prennent-ils au droit de grève ?
Avant les élections, il y a eu plusieurs grèves « sauvages » (c’est-à-dire spontanées), entre autres dans les transports en commun. Le patronat a saisi ces occasions pour s’en prendre au droit de grève. Il est clair qu’il se passerait bien de mouvements comme ceux contre le Pacte des Générations et qu’il veut d’ores et déjà se tenir prêt face à d’éventuels mouvements à venir.
Mais nous devons aussi nous demander pourquoi le patronat et les politiciens arrivent à faire passer leurs propositions sans trop de souci. Les directions syndicales portent également une part de responsabilité. Les grèves dans les transports en commun sont souvent peu organisées et sans revendications concrètes qui puissent être comprises et soutenues par les usagers. Craignant de perdre le contrôle sur un mouvement d’ampleur, les directions syndicales préfèrent une tactique de guérilla où de petits groupes paralysent tout le réseau plutôt que d’opter pour la construction d’un front large de solidarité entre le personnel et les usagers.
Si les « réactions à chaud » du personnel contre les actes de violence et les revendications syndicales à ce sujet étaient reliées clairement à une opposition à toute privatisation, à l’exigence de plus de personnel et par conséquent à des transports en commun plus confortables, plus ponctuels et meilleur marché, les exigences du personnel rencontreraient beaucoup mieux les préoccupations des voyageurs. Ainsi, le grand public accueillerait les grèves avec plus de compréhension et cela rendrait beaucoup plus difficiles les attaques contre droit de grève.
N’entrons pas dans la logique patronale !
Au lieu d’essayer de construire un soutien aux travailleurs dans l’opinion publique, les directions syndicales se plient de plus en plus à la logique du patronat. Luc Hamelinck, dirigeant flamand de la CSC-Services Publics, fort de l’appui du président national de la CSC Cortebeeck, a proposé un « pacte contre les grèves sauvages » comme « riposte » aux propositions de service minimum. Ce pacte impliquerait que la grève ne pourrait avoir lieu qu’en tout dernier recours, après dépôt obligatoire de préavis de plusieurs jours et intervention de médiateurs gouvernementaux. La CGSP flamande a réagi en affirmant qu’il valait mieux faire des conventions secteur par secteur !
A De Lijn (les TEC flamands), on a même été plus loin. Après que la direction syndicale ait déjà conclu à la fin 2006 un accord avec la direction mettant en avant que tout serait fait pour empêcher des grèves sauvages, il est stipulé dans la collection collective 2007-2008 qu’en cas de grève sauvage, un service minimum serait prévu pour les écoliers.
Si nous rentrons dans la logique patronale, nous ne tarderons sans doute pas à connaître les mêmes sentences juridiques qu’en Allemagne ou à subir des lois imposant un service minimum (la proposition de loi du MR a provisoirement encore été rejetée par le Conseil d’Etat). Une opposition déterminé à cette logique est nécessaire, tant sur le plan syndical que sur le plan politique.