Tag: Philippe Defeyt

  • Conférence Nationale des Etudiants de Gauche Actifs: se préparer pour les luttes à venir

    Le jour même où se tenait cette conférence, Le Soir publiait un article expliquant que le chômage avait augmenté de 10,6% durant le premier semestre 2010. Pour les jeunes, il s’agit de 12,8% d’augmentation ! A Bruxelles, le taux de chômage pour les moins de 25 ans a atteint les 44,2% pour le second trimestre 2010… Cette Conférence Nationale tombait donc à point nommé pour faire l’évaluation de nos campagnes, et notamment de notre implication dans les Jeunes en lutte pour l’emploi.

    Dans la capitale, le chômage des jeunes est au niveau le plus haut depuis 12 ans. Et encore, ces chiffres issus du ministère de l’Economie ne mentionnent qu’un nombre de 406.000 chômeurs. Selon l’économiste Philippe Defeyt, en intégrant d’autres couches comme les chômeurs âgés, on arriverait au-delà des 750.000 chômeurs en 2010, et le Bureau du Plan a prévu que le cap des 800.000 chômeurs serait atteint en 2011 (soit un taux de chômage de plus de 15%).

    La crise du capitalisme frappe donc véritablement les jeunes de plein fouet. A côté du chômage de masse, il reste la multiplication des emplois précaires, des contrats temporaires, des intérims,… L’avenir réservé à la jeune génération actuelle est des plus sombre.

    Au-delà de l’emploi, il est clair que le futur plan d’austérité qui ne manquera pas de toucher la Belgique s’en prendra notamment à l’enseignement. Nous avons vu en Grande-Bretagne le gouvernement mettre sur table des frais d’inscription triplé, à hauteur de 9.000 livres, soit 10500 euros! Ecoles, hautes écoles, universités, soins de santé, services sociaux,… A coups de restrictions budgétaires, on va tenter de nous faire payer la crise une seconde fois!

    Nous devons nous organiser et lutter contre ces plans et contre ce système basé sur la course aux profits. Partout en Europe, la résistance se développe, et nous avons vu ces derniers jours la plus grande grève générale de l’histoire du Portugal, plus de 100.000 personnes dans les rues de Dublin samedi dernier,… Cette vague de résistance arrivera aussi chez nous en réaction des projets d’austérité.

    De tout cela, il en a été question lors de cette journée, avec des ateliers consacrés à l’enseignement, à la lutte antiraciste et aux jeunes face à l’emploi. Une discussion en plénière à abordé le thème de la nécessité de s’organiser et une dernière discussion a concerné l’environnement et la manière de lutter contre le contre le capitalisme, en amenant clairement la perspective d’une société socialiste. Il ne suffit pas simplement de se dire anticapitaliste, la direction vers laquelle nous voulons aller doit clairement être établie, de même que les moyens pour y parvenir: la mobilisation de la classe ouvrière avec ses méthodes de grève générale, d’occupation d’entreprises,…

    Nous avons lancé EGA dans les écoles secondaires depuis un an. Dans l’enseignement supérieur, EGA a déjà construit de nombreuses campagnes: pour le droit de vivre dans un environnement sain; avec les Jeunes en lutte pour l’emploi; contre le racisme et les néofascistes avec la campagne Blokbuster pour les mobilisations anti-NSV (l’organisation étudiante du Vlaams Belang) et avec les JAF (Jeunes Antifascistes) du côté francophone; contre les assainissent dans l’enseignement,… Nous avons aussi participé aux élections étudiantes à Gand et à Bruxelles cette année. En tout, une cinquantaine de jeunes ont participé à cette journée et ont pu échanger leurs expériences.

  • Jeunes en lutte pour l’emploi – Faites votre choix : le chômage ou un job de misère

    Dans les pages de Lutte Socialiste ous ur ce site, nous avons déjà abordé la problématique du chômage des jeunes dans de nombreux articles, notamment avec le chiffre alarmant d’un jeune de moins de 25 ans sur trois au chômage en 2011 ou encore avec la perspective de 800.000 chômeurs en Belgique pour la même année.

    Par Nicolas Croes

    A NOUS DE PAYER NOS EMPLOIS PRÉCAIRES

    Pour les politiciens traditionnels, tout n’est qu’une question de volonté et de formation du sans-emploi… ainsi que d’incitants à l’employeur bien entendu. Johan Vande Lanotte, ancien président du SP.a (le PS flamand), insiste sur l’expérience. Quand on reste au niveau du principe, là, comme ça, ça peut paraître sympa. Qui pourrait dire qu’on n’a pas besoin d’expérience? Sauf que, concrètement, c’est vraiment, mais alors vraiment loin d’être sympa. Son idée, c’est de transformer la période de stage d’attente (1) en une ‘‘période d’expérience au travail’’.

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    PARLER, OK, MAIS AUSSI AGIR !

    NOUS – POUR DES MARCHES DES JEUNES POUR L’EMPLOI !

    Le PSL participe à des comités ‘‘Jeunes en lutte pour l’emploi’’ avec les jeunes FGTB de différentes villes et d’autres organisations comme la Jeunesse Ouvrière Chrétienne pour organiser des manifestations locales sur le thème de l’emploi des jeunes.

    Pour nous, il s’agit clairement d’aider à construire un rapport de forces en faveur des travailleurs et des jeunes. N’hésitez pas et participez avec nous : pour avoir un avenir, il nous faudra lutter! Contactez nous! (02/345.61.81)

    EUX – MAQUILLAGE CONTRE CHÔMAGE

    Deux communes du nord des Pays-Bas ont mis en place un plan destiné à relooker les chômeuses pour les aider à trouver un mari riche qui les dispenserait de devoir toucher les allocations de chômage! Difficile de trouver plus absurde comme méthode de lutte contre le chômage. On doit aussi dénoncer le caractère extrêmement sexiste de cette mesure qui considère que les femmes ne sont pas beaucoup plus que de jolis objets à vendre.

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    Derrière les mots, la ‘‘période d’expérience au travail’’ consiste à forcer un jeune à accepter un stage en entreprise, qu’il ne peut refuser, tout comme il serait obligé d’accepter une offre d’emploi dans cette entreprise après le stage. En guise de ‘‘salaire’’ le jeune recevrait une allocation d’attente considérée comme subside à l’emploi. Expliqué plus brutalement, il s’agit d’aller puiser dans les caisses de la collectivité (c’est-à-dire notre argent, celui de nos impôts) pour que des patrons puissent bénéficier de travailleurs quasigratuits, forcés d’accepter n’importe quelle condition.

    Ça ne reste qu’une proposition en l’air nous direz-vous. Mais Joëlle Milquet, la ministre de l’emploi du précédent gouvernement, a suivi exactement la même logique avec l’application de son plan win-win (2) : payer des salaires de misère avec l’argent des caisses de l’Etat.

    Les diminutions de charges et autres cadeaux aux entreprises ont permis de donner plus d’argent aux patrons tout en laissant ces derniers libres de presser un travailleur comme un citron pour le jeter ensuite quand il n’y a plus assez de ‘‘subside à l’emploi”” pour le soutenir. Cette somme gigantesque, plusieurs milliards d’euros par an, aurait pu être consacrée au développement des services publics, en engageant des travailleurs avec de bons statuts. Il y aurait ainsi moins de chômage, et plus de service à la population. Pas mal hein ? Attendez, parce qu’il y a moyen d’aller encore plus loin.

    UN CHOIX DE SOCIÉTÉ

    Partout en Europe, les gouvernements regardent les pensions le couteau entre les dents. On parle partout d’élever l’âge d’accès à la retraite. En France, on estime que le projet du gouvernement Sarkozy de repousser l’âge de départ à la retraite représente l’équivalent d’un million d’emplois de jeunes… En Espagne, le gouvernement (dirigé par l’équivalent local du PS) aimerait bien faire pareil, dans un pays où 40% des moins de 25 ans sont au chômage !

    Toujours selon Philippe Defeyt, ‘‘le chômage n’a jamais été aussi élevé, il augmente de manière tendancielle, depuis 30 ans, il touche aujourd’hui, quasiment 15% de la population active (…) comment peut-on vivre dans une société, quand de manière aussi structurelle et durable, il n’y a pas assez d’emplois pour tout le monde ? Il est peut-être temps de voir s’il n’est pas possible de s’organiser autrement, sur le plan économique et sur le plan social.”

    Pour le PSL, la solution est simple : partager le temps de travail disponible en fonction des forces disponibles. Aujourd’hui, chaque avancée technologique met plus de gens à la rue, alors que cela devrait permettre d’avoir plus de temps à consacrer pour soi et pour la société. Concrètement, le PSL revendique les 32 heures de travail par semaine, avec embauches compensatoires et sans perte de salaire. L’argent existe! Vous vous souvenez des banques qui ont été sauvées à coups de milliards par la collectivité ? Et bien les quatre banques belges ont réalisé ensemble un bénéfice de 1 milliard d’euros uniquement au cours du premier trimestre 2010. Si le secteur financier était placé sous contrôle démocratique des travailleurs et non pas sous celui de requins capitalistes, ces moyens n’iraient pas finir dans les poches de parasites actionnaires et spéculateurs, mais seraient investis pour les besoins de la société.

    On est loin d’entendre de telles choses de la bouche des partis traditionnels, et c’est normal. Pour le PS, le MR, Ecolo ou le CDH, ce sont les patrons qui créent la richesse. Pour nous, ce sont les travailleurs : le patron a besoin des travailleurs, les travailleurs n’ont pas besoin de patron.

    C’est pourquoi nous luttons contre le capitalisme, pour une société où les richesses extraordinaires dont dispose notre monde seraient consacrées à la satisfaction des besoins de chacun dans le respect de notre environnement. C’est ce que nous appelons une société socialiste démocratique.


    1. Stage d’attente : période comprise entre la demande d’allocations de chômage et le premier versement, généralement de 9 mois
    2. Plan win-win : mesure entrée en vigueur le premier janvier et faisant bénéficier les patrons de diminutions de taxes énormes pour un jeune de moins de 26 ans. Dans certains cas, les patrons n’ont même plus rien à payer à l’Etat.
  • La crise exige une modification de la politique économique – La lutte des classes en déterminera le caractère (Quatrième partie)

    Dans cette partie, nous analysons les propositions à l’approche des négociations pour un accord interprofessionnel. Nous soulevons les difficultés pour boucler les budgets de 2008 et de 2009, qui devraient être finalisés le 14 octobre. Dans la dernière partie, nous révélons les drames sociaux déjà présents même avant que la crise se soit étendue à l’économie réelle.

    Texte de perspectives du Congrès National DU PSL/LSP. Ce texte a été écrit durant l’été.

    Handicap salarial ?

    112. Mais d’où vient alors cette ténacité chez les travailleurs à se mettre tout de même en action ? C’est vrai que nous n’avons pas encaissé les profits des entreprises, les dividendes des actionnaires ou encore les augmentations salariales des managers, mais nos salaires augmentent quand même plus vite que dans les pays voisins, n’avons-nous pas un handicap salarial ? Notre salaire horaire nominal a été relevé de 7,5% en 2007 et 2008, largement plus que la norme salariale de 5,1% que les syndicats avaient eu dans l’accord de février 2007. (1) Mais avec les statistiques, tout peut être prouvé. Le chiffre du Bureau du Plan de 2007-2008 est une estimation. En outre, le Bureau du Plan s’attend à une inflation de 6.5% pour la même période. Après déduction de l’inflation, il ne reste donc que 1% d’augmentation salariale. Cela doit représenter aussi bien l’augmentation de la productivité que les glissements des salaires et les augmentations barémiques. La Banque Nationale estime que l’augmentation de la productivité en 2007 a été plus basse que 1%, et ce pour la première fois depuis 2001. Elle estime le glissement des salaires sur 1% cette même année, c’est le phénomène d’augmentation du salaire moyen par le fait que le nombre d’emplois non qualifiés diminue pendant que le nombre d’emplois qualifiés augmente. (2) De plus, il s’agit ici de moyennes qui sont déformées par certaines catégories.

    113. En août, le Bureau du Plan a dégagé des chiffres qui donnent le vertige. Les salaires bruts réels, adaptés à l’inflation, des ouvriers masculins dans l’industrie auraient, dans le meilleur cas, diminués de 2.6% de juillet 2007 à juillet 2008. (3) Cela confirme une étude similaire précédente du Bureau du Plan en février de cette année, lorsque les salaires bruts réels de ces mêmes travailleurs avaient, à ce moment là, diminué de 2% sur base annuelle. (4) Les chiffres de la Banque Nationale ont confirmé que cette tendance valait aussi pour les employés et les ouvriers des autres secteurs. Comme raison principale, le Bureau du Plan met en avant l’index santé. Pourtant, déjà avant, la situation n’était pas positive. Fin 2007, il semblait déjà que « le paiement des salariés belges », le salaire, y compris les cotisations sociales, était pour la première fois depuis ’71 en dessous de 50 % du PIB. (5) Dans sa réaction, Cortebeeck, le président de la CSC, avait dit: “cela ne peut pas durer”, tandis que Rudi Thomaes de la FEB avait qualifié ces chiffres de “purement symboliques”.

    114. Des études ont paru, pour un oui ou pour un non, afin d’affirmer que les coûts salariaux belges déraillent, que le handicap du coût salarial augmente, etc. La plupart du temps, ce sont des études de l’OCDE qui reçoit ses chiffres des gouvernements nationaux qui, eux, les reçoivent des patrons. Selon la FEB, le handicap salarial s’élève à 12%. On se demande alors comment la Belgique reste un pays si attractif pour les investisseurs. Un coup d’oeil sur les frontières nous l’explique rapidement. Il semble que dans les pays voisins, on raconte les mêmes histoires. Le but de l’OCDE, des gouvernements nationaux,… n’est jamais de parler des salaires à voix haute, au contraire. La Banque Nationale est toutefois, elle, obligée de publier les chiffres réels. Il semble dès lors que les coûts salariaux par heure de travail dans le secteur privé, entre 1996 et 2007, ont diminué en Allemagne de près de 10%, en Belgique de 1% et a augmenté en France et au Pays-Bas de, respectivement, 6% et un peu plus de 15%.(6) La fête en Allemagne se prolonge d’ailleurs jusqu’à la fin. IG-Metall, le syndicat faisant autorité dans toute l’Europe avec ses 3.5 millions de membres, a exigé cette année 8% d’augmentation, revendication la plus élevée depuis 16 ans. Aujourd’hui, près de la moitié a été obtenu, mais cela aurait pu se finir autrement.(7)

    115. Il n’est donc pas étonnant que les attaques du président de la BCE Trichet sur l’indexation aient peu impressionné.(8) Les patrons ne sont pas réellement chauds pour une confrontation là-dessus, mais avec une adaptation de l’index à la fin 2007, deux fois en 2008, et probablement encore une fois dans la première partie de l’année 2009, l’avidité patronale peut être stimulée. Lorsque Thomas Leysen est devenu président de la FEB, qui selon lui représente 33.000 entreprises, il a déclaré : « il faudra bien que quelque chose se passe. » (9) Guy Quaden, gouverneur de la Banque Nationale, a suggéré une indexation en chiffres absolus plutôt qu’en pourcentage. De cette manière, les revenus les plus élevés feraient des économies sur l’indexation. Les syndicats ne sont pas tombés dans le piège. Luc Cortebeeck a répondu : « En tirant une partie de l’index à celui qui gagne un peu plus, on mine la portée de tout le système. » (10)

    Un accord interprofessionnel en fin d’année

    116. Contrairement à ce que les patrons suggèrent tout le temps, le travailleur belge n’a rien à se reprocher. A chaque fois, il apparait qu’il se trouve au top de la productivité. En terme de valeurs produites par heure de travail, avec une moyenne de 53,4$ par heure, il ne laisse passer devant lui que les travailleurs luxembourgeois (71,3$) et norvégiens (53,5$).(11) En Norvège, c’est principalement dû au secteur pétrolier. Les travailleurs américains (52,3$), néerlandais (52,2$), allemands (49,3$), français (51,3$) et surtout japonais (37,5$) sont tous moins productifs. En termes de valeur produite par travailleurs, les belges sont « seulement » à la cinquième place. C’est parce que les travailleurs belges travaillent en moyenne 1.610 heures par an, les américains 1.785 et les irlandais 1.870. Les néerlandais, par contre, travaillent en moyenne 1.413 heures, les français 1.559 et les allemands 1.432. (11)

    117. Mais pour certains, ce n’est jamais assez. Le provocateur Van Eetveelt, d’Unizo, ne nous a pas réellement surpris lorsqu’il a prétendu qu’il n’y aurait pas d’espace pour des augmentations salariales. « Ce serait déjà tout un art de pouvoir sauvegarder notre système d’indexation. » Pour la diminution des charges par contre, il voit encore quelques possibilités. (12) Son rêve ? « Travailler 6 jours, pas d’augmentation. Pourquoi ne pas augmenter la semaine de travail de 38 à 48 heures ? Pendant des périodes chargées, on doit pouvoir prester plus. » (13) Ainsi, Van Eetvelt joue son rôle classique : il lance des pistes là où d’autres n’osent pas se prononcer. La FEB va aussi aux négociations pour l’accord interprofessionnel avec des mots d’ordre clairs. Ils en ont 5 : le pouvoir d’achat n’est pas un problème, les salaires sont trop élevés, le marché du travail n’est pas assez flexible, les belges travaillent trop peu et les autorités n’ont pas une vision à terme car malgré l’augmentation de l’espérance de vie, les carrières restent trop courtes. Peter Timmermans, directeur général, rajoute que les négociations d’un accord seront plus difficiles que jamais.

    118. Il y a déjà quelques années que nous disons que les petites et moyennes entreprises de livraison seront très vulnérables dans le cas d’une récession. Les 8 premiers mois de 2008, on comptait déjà 5.191 faillites, 8,3% de plus qu’en 2007 et nous sommes sur la voie de casser le record de 2004 de 7.935 faillites. Ces faillites ont entrainé la perte de 12.000 emplois, il s’agissait surtout de petites entreprises. L’assainissement du groupe pharmaceutique UCB où 555 emplois sont menacés à Bruxelles et à Braine-le-Comte, n’en fait pas partie. Il ne s’agit pas d’une faillite. Mais c’est bien un affront pour le gouvernement wallon, puisqu’il appartient au secteur de pointe du plan Marshall. La plus grande augmentation des faillites s’est produite à Bruxelles (+20%), en Wallonie (+10%) et beaucoup moins en Flandre (+1,4%) où 2.387 faillites ont néanmoins été enregistrées. Mais tout ceci avant que la récession n’ait réellement commencé. (14)

    119. En septembre, une accélération s’est produite aussi en Flandre. Déjà avant l’été, Beekaert avait fermé sa production de cables d’acier à Lanklaar : une perte de 136 emplois. En été, Punch International a fait de même avec son usine d’enjoliveurs à Hoboken : -315 emplois. En septembre, Barco a décidé de railler 113 emplois dont 2/3 en Belgique. Ce même mois, Picanol a annoncé la perte de 190 emplois à Ypres. L’entreprise de textile Beaulieu restructure à Wielsbeke, -209 emplois et ferme sa filiale à Ninove, -178 emplois. Chez Gilbos à Herdersem, construction de machines de textile, 48 emplois disparaissent en conséquence du démantèlement d’activités de livraison. Domo Gand ferme sa filiale Cushion Floor à Zwijnaarde, 91 ouvriers et 47 employés perdent leurs emplois. En termes de faillites, il y a la fermeture d’UCO-Gand, -400 emplois et du fabricant de meubles Sint-Jozef à Aarschot, -33 emplois. Tout cela seulement en septembre 2008.

    120. Pour le patronat, c’est la situation rêvée pour faire monter la pression et se débarrasser de personnel superflu. Probablement espère-t-il effrayer les travailleurs et en même temps procurer une arme pour paralyser la base aux amis secrétaires syndicaux, tels que Herwig Jorissen de la centrale des métallos de la FGTB qui vient d’être divisée sur base communautaire. Bien que la vague de faillites pourrait provoquer des doutes pendants quelques semaines, nous ne croyons pas que cela va paralyser le mouvement des travailleurs. L’appel confus de la FGTB pour une journée d’action le 6 octobre l’exprime. Les différentes centrales interprètent la situation de manière différente.

    121. Certains plaident à juste titre pour démarrer la mobilisation par une manifestation nationale. Le 25 septembre déjà, les travailleurs des autorités locales et régionales de Bruxelles ont bloqué toute la ville par des blocages filtrants. A Belgacom, les trois syndicats ont organisés une assemblée commune pour la première fois en 40 ans. (15) Dans la centrale des métallos de la FGTB Wallonie et Bruxelles, on voulait partir immédiatement en grève durant 48 heures, entrainant le danger d’être trop en avance sur la conscience qui vit dans d’autres secteurs. La Centrale Générale et le Setca ont plaidé pour organiser d’abord une manifestation nationale. A De Lijn et à la STIB, on a pratiquement immédiatement commencé à organiser la journée de grève du 6 octobre. En Flandre orientale, en préparation, des assemblées interprofessionnelles sont organisée. A Anvers, on veut organiser un blocage filtrant du port. Cette situation chaotique va restaurer l’atmosphère d’action qui existait avant l’été et préparer les forces pour une confrontation à l’approche des négociations sur l’accord interprofessionnel (AIP).

    122. Dans les appareils syndicaux, la contradiction sera poussée jusqu’au bout entre ceux qui veulent totalement atomiser le mouvement et rêvent probablement déjà d’une carrière ailleurs, et d’autres plus sensibles aux pressions de la base et veulent le refléter même si ce n’est que de façon très limitée. Les parties plus radicales des organisations patronales (Voka, Unizo, VKW, Agoria) vont vouloir se baser sur cette contradiction pour lancer des revendications de plus en plus osées et aboutiront probablement à un discours très communautaire. Les parties plus intelligentes du patronat, le sommet de la FEB, reflèteront de temps en temps la pression de ces fragments radicaux et l’utiliseront lorsque cela leur conviendra, mais essaieront en général de temporiser pour permettre aux dirigeants syndicaux de ne pas perdre leur contrôle sur la base et pour permettre aux politiciens de rétablir la stabilité.

    123. Il y a probablement une partie des organisations patronales qui estime ne pas avoir besoin d’un accord interprofessionnel. Les grosses entreprises et leurs représentants, par contre, considèrent un accord interprofessionnel comme un instrument pour freiner une vague d’actions et de grèves dans les secteurs et entreprises et seront probablement en faveur d’un accord même si cela exige des concessions limitées. Mais un des problèmes, c’est que le gouvernement ne dispose pas de moyens pour aider à venir à un accord avec des moyens supplémentaires.

    La création d’un budget

    124. Le gouvernement a d’ailleurs un gros problème. Après s’être chamaillé pendant 15 mois sur le communautaire, il doit toujours faire aboutir son premier budget. Le précédent, était a à l’époque été fait par les ministres de la violette. Le fait que Melchior Wathelet, le ministre du budget sous Leterme Ier, soit devenu le « secrétaire d’Etat au Budget », alors qu’il est en plus responsable de la politique des familles, était déjà un signe. Avec Reynders sur les finances, c’est fatal, celui-ci s’est de nouveau trompé dans ses comptes. Selon le service d’étude des finances, les impôts en 2008 rapporteront 1,1 milliards d’euros en moins que prévu lors du contrôle budgétaire de juillet.(16) Ce sont surtout les revenus de la TVA, et les précomptes professionnels, qui ont été décevant, l’un à cause de l’affaiblissement de la consommation, l’autre à cause des diminutions de charge sur les heures supplémentaires, le travail de nuit et en équipe. Mais pour Reynders, un déficit de -0,3% n’est pas problématique. Cela pourrait d’ailleurs devenir -0,5%. La contribution de Suez de 250 millions d’euros n’est toujours pas réalisée et celle du gouvernement flamand, presque 400 millions d’euros, ne rentrera pas puisqu’il n’y a pas encore de réforme d’Etat.

    125. La construction d’un budget pour 2009 sera encore plus difficile. Pour le Bureau du Plan, la croissance diminue jusqu’à 1,2% et si la politique appliquée n’est pas changée, il faudra au moins trouver 5 milliards pour arriver à un équilibre. De plus, le gouvernement a promis de lier les allocations au bien être (200 millions en 2009), de diminuer encore les charges sur les entreprises et de réaliser une marge de 0,3%. (17) Leterme prétend chercher 5 milliards, mais selon Knack et Trends, il devrait en trouver 7. Le 14 octobre, il doit prononcer son discours sur sa politique dans le parlement fédéral. Luc Coene, vice-gouverneur de la Banque nationale, de cachet VLD, a lancé déjà quelques pistes début septembre. « Les années précédentes, les dépenses sociales ont connu une croissance de 2,3% du PIB de plus que prévu. Ce rythme de croissance des dépenses doit diminuer. » Il trouve aussi que « les dépenses publiques doivent être tenues sous contrôle. »

    126. Coene ne veut évidemment pas dire que le gouvernement doit quitter sa politique de baisse des charges. Evidemment non, car il prétend que « Après la suède, la Belgique est toujours à la deuxième place sur le plan mondial en ce qui concerne la pression fiscale. » Que faut-il alors ? Voici une sélection du Standaard. Celui-ci titre le 6 mai 2008 : « 40% des fonctionnaires partent en pension d’ici 5 ans ». Le 22 mai, « remplacer seulement un fonctionnaire sur 3 ». Le 26 juin, « Avec 72.000 fonctionnaires de moins, cela marche également ». Finalement, Van Eetvelt a écrit dans une carte blanche à la presse : « L’Etat doit vivre selon ses moyens, comme toute entreprise ». Qui vient de décider que l’Etat est une entreprise ? Il ne le mentionne pas. Pour Van Eetvelt, les dix prochaines années, 11.000 fonctionnaires peuvent disparaitre, et ceci sans bain de sang social et sans diminuer l’efficacité des autorités. Ainsi Van Eetvelt veut répondre à quelques experts financiers qui venaient de déclarer il y a quelques jours qu’ils ne croient pas en des économies sur les fonctionnaires et les soins de santé. (18)

    127. Selon ces experts, une économie sur les 80.000 fonctionnaires fédéraux ne rapporte que très peu. Le gros des coûts salariaux se trouve d’ailleurs dans les communautés et les administrations locales. Ils disent ne pas conseiller d’économiser sur les enseignants. Et évidemment, Van Eetvelt et compagnie ne sont pas d’accord. Ils savent aussi qu’une entreprise sur trois est en infraction selon l’inspection sociale (19), que l’administration fiscale est en manque systématique de personnel. Ne plus remplacer les fonctionnaires fédéraux qui partent en pension signifie parallèlement l’érosion de services publics gênants tels que l’inspection sociale et la lutte contre la fraude fiscale. En ce qui concerne l’enseignement, Van Eetvelt et compagnie ont leur réponse : l’immigration économique, c’est meilleur marché. Avec la ministre Open-VLD Turtleboom, ils ont installé une dame de fer sur cette matière.

    128. Les spécialistes trouvent aussi que faire des économies sur les soins de santé est irréaliste. « A cause du vieillissement, les dépenses pour les soins de santé croissent systématiquement ce qui rend difficile d’économiser. » Marc Devos, du groupe de réflexion ultralibéral Itinera, totalement hors de soupçon d’une quelconque sympathie de gauche, dit que les soins de santé sans réforme vont directement vers des déficits. Ce que les patients paient pour les soins de santé a augmenté systématiquement contre la tendance européenne et ceci pendant que la qualité a systématiquement reculé. L’OCDE place nos soins de santé à la 18e place (sur 26) en termes de performance. Le nombre de soins prestés est bon mais les résultats sur la santé, tels que l’espérance de vie, la mortalité infantile, les décès dus à des cancers guérissables,… tirent notre système vers le bas. Aux USA, au Canada, en Suisse, en Espagne et au Portugal, les patients eux-mêmes paient une plus grande partie de soins de santé. Pourtant, Itinera plaide pour une limitation de la croissance du budget : « Puisque, autrement, la volonté de réforme n’est pas stimulée. »

    129. Van Eetvelt a calculé qu’en diminuant la norme de croissance de 4,5 à 2,8% en 2009, 365 millions d’euros peuvent être économisés sur les soins de santé. « Sans problème pour la santé de la population », ajoute-t-il. Sur le terrain, on n’en est pas convaincu. Là, on montre du doigt le fait qu’il faut tenir compte des développements techniques et scientifiques. Les prothèses des genoux, des hanches, ou les opérations de la cataracte sont heureusement devenus beaucoup plus accessibles qu’à la fin des années ‘80, mais la facture augmente. La norme de croissance actuelle menace d’ailleurs tout le secteur. Des hôpitaux se plaignent de déficits structurels. A Bruxelles, plusieurs hôpitaux sont au bord de la faillite. Au rythme actuel, on évolue de plus en plus vers des soins de santé à 2 vitesses, avec des soins de base pour ceux qui ne peuvent plus se le permettre. On fait d’ailleurs appel de plus en plus à des aides soignants mal payés et la charge du travail est systématiquement augmentée.

    130. Où les experts voient-ils alors les possibilités pour équilibre le budget ? « Du côté des revenus, il y a encore des possibilités. C’est déjà la deuxième année consécutive que les revenus des impôts sont en retard de 1 milliards sur le schéma. Avec plus de contrôle, une partie du problème budgétaire serait résolu. » Et plus encore : « Le gouvernement fédéral doit quitter les recettes classiques et taxer le capital. » La crise de crédit internationale et l’indignation généralisée sur l’avidité d’une infime minorité aux dépend de la grande majorité de la population traversent toute la société. C’est ce qui explique le sens soudain des réalités de quelques experts qui voient dans l’avidité de Van Eetvelt et compagnie une menace pour la légitimité du système de profits. Nous sommes ici témoins d’un phénomène classique, c’est-à-dire que la révolution se manifeste d’abord au sommet de la société et non comme on le pense souvent à la base de celle-ci.

    131. Pour la majorité des stratèges (petits-) bourgeois et leurs marionnettes politiques, le danger n’est aperçu que lorsqu’il se trouve déjà sous leur nez. En général, ils y ajoutent encore une cuillère. En juin encore, le VLD a revendiqué une baisse des charges à hauteur de 4,4 milliards d’euros. Au niveau de la Flandre, le VLD voulait en plus une diminution de taxe, de ce que l’on nomme le job-korting, à la hauteur de 600 euros, une diminution de l’impôt des sociétés à hauteur de 350 millions d’euros et une augmentation de l’exonération des précomptes professionnels sur le travail de nuit et d’équipe de 10,7 à 15,6%. Finalement, le VLD veut aussi de plus grands avantages fiscaux pour des heures supplémentaires.(20) A la fin de février 2009, tous les flamands qui ont un travail recevront une diminution de taxe de maximum 300 euros, avec un maximum de 600 euros par foyer. Cette diminution ne sera cette fois pas éparpillée sur les 12 mois, mais calculée dans le précompte professionnel sur le salaire de février, trois mois avant les élections. « De cette manière, la diminution est visible pour chaque flamand. »

    132. Sur le plan fédéral, le VLD a aussi un liste de revendications : activation plus intensive des 50 ans et plus, réduction des termes d’invitation des chômeurs à un entretien de contrôle, dégressivité des allocations, remplissage plus souple de la semaine de 38 heures et immigration économique. Et, enfin, l’Open-VLD veut s’attaquer aux fraudes sociales. Selon Rik Daems, on peut aller y chercher 3 milliards d’euros, ce qui n’est pourtant qu’un dixième de la fraude fiscale estimée dans une étude de Mc Kinsey et de la VUB à 30 milliards d’euros annuellement. Daems ne vise évidemment pas les cotisations sociales non payées par les patrons, ni les heures supplémentaires payées en noir ou les patrons qui emploient illégalement des travailleurs. Il vise exclusivement ceux qui combinent une allocation avec un peu de travail en noir à gauche et à droite. Selon la criminologue de l’ULB Carla Nagels, Daems a une vision extrêmement libérale de la lutte contre la fraude sociale.

    Drame social en construction

    133. Daems et compagnie sont à peine capables de s’imaginer ce qui pousse des gens à accepter du travail au noir, pour autant que ça les intéresse. Dans une étude pour l’institut du développement durable, Philippe Defeyt, président du CPAS de Namur, est venu à la conclusion que de plus en plus de familles refusent dorénavant de prendre en charge leurs enfants. Un jeune de moins de 25 ans sur vingt est dépendant d’une allocation du CPAS.(21) Le nombre de personnes dépendantes d’un revenu d’insertion sociale a augmenté de 75.400 en 2005 à 82.000 en janvier 2008.(22) Un belge sur 7 (14,7%) a un revenu inférieur à 60% du revenu médian, le seuil de pauvreté officiel. Celui-ci est de 860€ pour une personne isolée et de 1.805€ pour une famille avec deux enfants. (23) En Wallonie, ils sont 17%, en Flandre 11,4%. Le salaire minimal est de 1.355,78€ brut. 260.000 belges combinent deux ou plusieurs emplois. Selon Elsy Verhofstadt, chercheur à la RUG, ils le font principalement « pour pouvoir gérer les prix de mazout, d’immobilier ou de nourriture. » (24)

    134. Les propositions du VLD pour augmenter la politique d’activation et pour la dégressivité des allocations arrivent à un moment où une personne sur 8 en Belgique vit dans une famille sans emploi. En Europe (27), seules le Royaume-Uni et la Hongrie font un plus mauvais score sur ce plan là. 16% des européens vivent avec un revenu en dessous du seuil de pauvreté, dont la moitié fait partie d’un foyer où au moins une personne travaille. Le phénomène du « travailleur pauvre » se produit donc aussi en Europe.(25) Depuis 2004, 12.516 chômeurs se sont vus suspendre leurs allocations, dont 3.605 définitivement, les autres temporairement, en général pour 4 mois. Plus de la moitié des suspensions ont été faites sur la seule année 2007 ! En Flandre, on laisse sousentendre systématiquement que la politique d’activation en Wallonie et à Bruxelles serait appliquée de manière insuffisante. Pourtant, bien que la Flandre compte 32,96% des chômeurs au niveau national, « seulement » 28,63% des suspensions y ont été appliquées. La Wallonie, avec 49,62% des chômeurs, compte 50,02% des suspendus. Pour Bruxelles, 17,42% des chômeurs et 21,35% des suspendus. (26)

    135. On aurait l’impression que le chômage n’est pas vraiment un problème, à l’exception de quelques profiteurs acharnés. En 2007, 116.000 emplois auraient été créés. Le nombre total de travailleurs est de 4,4 millions contre 3,6 millions au début des années 80. Nous avons toujours dit que des bons emplois étaient remplacés par des mauvais, des emplois flexibles, partiels et temporaires, évidemment aussi avec un salaire bas et partiel. De plus, la majorité de ces emplois font partie de ceux qui sont payés avec des moyens publics tels que les chèques-services. Selon l’enquête des forces de travail (EFT) du service public fédéral, 3,9% de la population active en Flandre était sans emplois, 10,3% de celle en Wallonie et 16,3% de celle à Bruxelles. Les chiffres d’EFT utilisent la définition de sans-emploi du Bureau International du Travail et sont plus bas que ceux de l’ONEM. (27)

    136. En 1964, le nombre d’heures de travail prestées annuellement en Belgique a reculé pour la première fois en dessous de 8 millions, en 1973 en dessous de 7 millions. En 1964, cela se faisait avec 3.740.000 travailleurs, en 1973 avec 3.777.000 travailleurs. C’était la conséquence de la réduction du temps de travail arraché par la lutte des travailleurs. En 1999, nous étions pour la première fois plus de 4 millions de travailleurs et ensemble nous avons presté 6,5 millions d’heures de travail. Ce n’était plus le résultat d’une lutte pour une réduction du temps de travail, mais plutôt de l’augmentation de l’emploi à temps partiel jusqu’à 19,5%. En 2007, 4.337.000 travailleurs, dont déjà 23,7% à temps partiel, ont presté 6,9 millions d’heures de travail, fortement moins que pendant les golden sixties. (28) A cette époque, un salaire par foyer suffisait pour s’en sortir, aujourd’hui c’est devenu intenable. Surtout ceux qui gagnaient le moins dans le foyer, sont obligé de combiner l’entretien de la famille avec un emploi à temps partiel ; 42,6% des femmes travaillent à temps partiel, 7,8% des hommes. (29)

    137. Mais tout ceci, c’était avant que la crise ne se traduise dans l’économie réelle. Entre-temps, le nombre de faillites augmente de manière spectaculaire. Les récessions précédentes menaient systématiquement à de fortes explosions du chômage. Celle de 74-75 a rayé 350.000 emplois dans l’industrie. Ceci a été compensé parce que les autorités ont créé à peu près 250.000 emplois dans les services publics, mais les chiffres de chômage de la période précédente, autour de 75.000, appartenaient définitivement au passé. La crise de ‘81-83 a doublé le nombre de chômeurs officiels jusqu’à 500.000, un chiffre en dessous duquel on n’a plus jamais réellement été. Depuis, les gouvernements consécutifs ont commencé à modeler les statistiques. Mais cela n’a pu empêcher une augmentation forte du degré de chômage officiel lors de la crise de ‘90 de moins de 9% à 15% dans la deuxième partie de ‘95. La mini crise de 2008 a fait sauter le nombre de chômeurs de presque 200.000. Ces dernières années, le chômage est descendu, mais malgré les chèques services et d’autres types de statuts, même pas jusqu’au niveau du point le plus bas précédent, de juin 2001, ne parlons même pas de celui du début des années ‘90. (30) En août 2008, De Tijd s’est demandé : « Un orage d’automne menace-t-il le marché de l’emploi ? » Le journal fixe notre attention sur le fait que le marché du travail ne réagit qu’avec un retard d’une demi-année sur des changements conjoncturels et que pour la fin de l’année, il y a bien des raisons de se faire des soucis. (31) A Bruxelles, depuis, le chômage est remonté de 18,8% avant l’été à 19,4% en septembre 2008. (32)

    138. Leterme avait probablement espéré autre chose, mais il peut se préparer à une augmentation forte des dépenses sociales. Celles-ci avaient légèrement reculé dans la période 2003-2007 de 23% du PIB à 22,5%. Pendant cette même période, la sécurité sociale a connu trois fois un surplus, une fois un déficit (2003) et une fois un équilibre (2005). En 2007, les recettes de la sécurité sociale étaient de 64 milliards d’euros. C’est composé principalement de salaires différés – nommées cotisations patronales et les cotisations des travailleurs – pour 43 milliards d’euros et de ce que l’on nomme les contributions des autorités, pour 18 milliards d’euros, principalement des financements alternatifs (presque 10 milliards d’euros). Encore en 2007, la sécurité sociale a dépensé 62,5 milliards d’euros, principalement dû à ce qui était son but, c’est-à-dire les allocations sociales et les coûts du personnel, mais aussi de plus en plus pour des subsides aux entreprises (1,6 milliards déjà). Des allocations sociales en 2007, 21 milliards ont été dépensés aux soins de santé, 19 milliards aux pensions, 7,8 milliards au chômage (comprenant aussi une partie des prépensions), 4,5 milliards aux allocations familiales, et 4 milliards aux incapacités de travail. (33)

    139. Pendant des années, on nous a effrayé avec le vieillissement et le fait que nos pensions seraient impayables. Pour chaque personne de plus de 60 ans, il y a aujourd’hui 2,5 travailleurs actifs, en 2015 ce ne sera plus que 2,1 travailleurs actifs. Presque tout le monde connait l’ordre de grandeur de ces chiffres. Via la télé et d’autres médias, ils ont été imprégnés dans notre conscience de la même manière que l’on marque le bétail au fer rouge. Cela servait à nous faire accepter l’érosion de notre pension. Pendant des décennies, des économies à charges de nos personnes âgées n’auraient provoquées que des indignations. Encore aujourd’hui, il n’y a rien de pire que quelques jeunes qui se moquent, volent ou maltraitent des personnes âgées, ou qui les laisse tout simplement à leur propre sort. C’est pourtant l’exemple que nos gouvernements donnent depuis des années. L’allocation de retraite moyenne d’un salarié masculin n’est plus que de 1.000 euros, d’une salariée féminine, de 700€. Les recherches démontrent que les « pensions supplémentaires » arrivent pratiquement exclusivement chez ceux qui ont déjà une pension légale élevée. (34)

    140. Entretemps, la pension moyenne après taxation n’est plus que de 64,4% du salaire moyen. En Grèce et aux Pays-Bas, c’est plus de 90%. Au Luxembourg, un pensionné reçoit, pendant sa vie, si on totalise toutes ses allocations, en moyenne 664.240€ contre 179.056€ en Belgique, moins qu’en Grèce qui connait pourtant un niveau de vie en moyenne beaucoup plus bas (35). Délaisser les personnes âgées de telle manière est l’expression la plus écoeurante d’une société basée sur l’avidité. Après avoir réalisé ce drame, le Bureau du Plan nous amène des nouvelles : le vieillissement sera dans les prochaines années moins fort qu’on ne l’avait prévu. Mais ceci n’est pas une raison de ne plus rien faire : en 2050 (la date a reculé de 35 ans), il y aura 44 personnes âgées de plus de 65 ans (on n’y a ajouté 5 ans) sur 100 travailleurs actifs. Les voyants du Bureau du Plan prévoient 30,38 personnes âgées de plus de 65 ans sur 100 travailleurs actifs pour la région Bruxelles-Capitale, 42,68 en Wallonie et 47,38 en Flandre. (36)

    141. Nous avons déjà traité des économies sur les salaires et sur les conditions de travail des salariés, des emplois flexibles et sous-payés des jeunes, de l’immigration sélective, des attaques sur les chômeurs, les malades et les pensionnés. Et pourtant nous ne sommes pas encore à la fin. Selon l’Agence flamande des personnes handicapées, les listes vacantes pour les personnes handicapées ont augmenté de 5.689 en 2003 à 8.200 en 2007. (37) Pour une région qui est capable de donner le fameux « job-korting » et d’autres cadeaux à l’approche des élections, cela témoigne de mauvais goût.


    (1) Bureau Fédéral du Plan, communiqué du 12 septembre 2008

    (2) Rapport annuel de la Banque Nationale, 2007, p. 97 et 99

    (3) De Tijd, 27 août 2008, Reële lonen werknemers dalen

    (4) De Tijd, 27 février 2008, Lonen kunnen prijzen niet volgen

    (5) De Tijd, 3 octobre 2007, Lonen stijgen trager dan BBP. Entre 2002 et 2006, les salaires (nominaux) et les allocations sociales ont augmenté de 13% pour atteindre 158,2 milliards €, dans cette même période, le surplus d’exploitation brut et les revenus mixtes, principalement composé des revenus des entreprises, a connu une croissance de 26% pour atteindre 121 milliards €. Le PIB était de 316,6 milliards €.

    (6) Rapport annuel de la Banque Nationale, 2007, p. 103, graphique 41

    (7) De Tijd, 9 septembre 2008, IG Metall eist 7 tot 8 procent meer loon

    (8) Des 15 Etats-membres, 6 possèdent une indexation automatique ou partielle : la Belgique, le Luxembourg, l’Espagne, la Slovénie, Chypre et Malte. Dans certains pays, il existe en plus une indexation du salaire minimum.

    (9) De Morgen, 19 avril 2008, De index is geen ideaal systeem

    (10) La Belgique et le Luxembourg sont les seuls pays avec une indexation automatique. Le système se base sur les prix de 507 produits. Dès que l’index atteint un certain, niveau, appelé l’index pivot, une adaptation à l’index s’applique. Pour les allocations dans le mois qui suit, pour les services publics et quelques secteurs du privé dans le deuxième mois qui suit. Si certains perdaient une partie de leur indexation, cela minerait leur attachement à l’index et détricoterait le front en défense de l’indexation.

    (11) The Conference Board & Groningen Growth and Development Centre – summary statistics et total economy database, janvier 2008 – en 2007 US $

    (12) De Tijd, 25 juillet 2008, Unizo trekt streep onder loonsverhogingen

    (13) Het Nieuwsblad, 17 septembre 2008, Zes dagen werken, geen opslag

    (14) De Tijd, 2 septembre 2008, Faillissementen op record na acht maanden

    (15) De Tijd, 2 septembre 2008, CAO-overleg Belgacom nog onzeker

    (16) De Tijd, 3 septembre 2008, Belastingsinkomsten met 1,1 miljard in het rood

    (17) Knack, 24 septembre 2008, Rolverdeling met een hoge prijs

    (18) De Tijd, 4 septembre 2008, We moeten besparen, maar waar?

    (19) De Tijd, 8 février 2008, Een op drie bedrijven overtreedt wet

    (20) De Tijd, 6 juin 2008, Open VLD eist 4,2 miljard minder lasten

    (21) Le Soir, 12 septembre 2008, Un tiers de jeunes dans les CPAS

    (22) Le Soir, 5 juillet 2008, Le public des CPAS continue de s’élargir

    (23) Le revenu médian est la somme qui compte autant de gens avec un revenu supérieur que de gens avec un revenu inférieur. Le revenu moyen est la somme de tous les revenus divisée par le nombre de personnes ayant un revenu.

    (24) Laatste Nieuws, 26 mars 2008

    (25) De Tijd, 26 février 2008, Een op de acht Belgen leeft in gezin zonder job

    (26) De Tijd, 21 février 2008, RVA-activeringsbeleid leidde sinds 2004 tot 12.500 schorsingen

    (27) De Tijd, 15 mai 2008, 116.000 extra banen in recordjaar 2007

    (28) The Conference Board & Groningen Growth and Development Centre –total economy database, janvier 2008

    (29) Site des autorités fédérales, emploi et chômage

    (30) Taux de chômage en pourcentage de la population active

    (31) De Tijd, 2 augustus 2008, Dreigt herfststorm op arbeidsmarkt

    (32) Le Soir, 4 septembre 2008, Deuxième mois de hausse consécutive pour le chômage

  • 3 millions de pauvres en Belgique!

    La première page du Télémoustique de cette semaine (21-27 juin) est sans équivoque: "La Belgique est dans la rue – Déjà 3 millions de pauvres – MAIS OU VA-T-ON? – Témoignage d’un pays qui souffre." Un article de 7 pages qui vient admirablement compléter le dossier du même magazine de la semaine dernière sur la grande fraude fiscale. On aimerait que d’autres médias pourtant réputés plus sérieux aient autant les yeux en face des trous…

    Le premier paragraphe donne le ton : "Alors que ses dirigeants sont englués dans la panade communautaire, la Belgique d’en bas n’en peut plus. L’escalade de la vie fait grimper la pauvreté en flèche. Y compris chez ceux qui travaillent…"

    Ici, on est loin des études qui relayent la propagande patronale et selon lesquelles nous n’aurions pas à nous plaindre. Pensons à celle de Mr Philippe Defeyt – ancien secrétaire fédéral d’ECOLO et actuel président du CPAS de Namur (!) – qui argumente, sur base du fait que nous travaillons autant de minutes aujourd’hui qu’en 1983 pour acheter quelque chose, que rien n’a changé et que le mouvement pour plus de pouvoir d’achat est avant tout un mouvement d’humeur. Sans revenir sur toutes les critiques que nous avons déjà mises en avant dans différents articles, rappelons que la production a, elle, terriblement augmenté (dans quelles poches s’est engouffrée toute cette richesse que nous produisons en plus ?). Rappelons aussi que le nombre de pensionnés et de pauvres (officiels comme non-officiels) a lui aussi, terriblement augmenté.

    Et c’est avec ce constat que commence le dossier du Télémoustique. Il y a en Belgique 1.470.000 pauvres selon les statistiques officielles, soit un septième de la population. "Mais ce chiffre, déjà insupportable, est calculé sur la base d’un seuil de pauvreté qu’on peut franchement qualifier de complètement ridicule : est considéré comme pauvre l’isolé qui dispose d’un revenu inférieur à 860 euros par mois ou le ménage avec deux enfants (!) qui gagne moins de 1.805 euros net par mois. Qui peut vivre avec de telles sommes aujourd’hui ? Les statistiques sont complètement dépassées par la réalité." Le journaliste, Vincent Peiffer, poursuit en faisant remarquer que les données disponibles sont, en plus, datées de 2006, soit avant la flambée actuelle des prix…

    Selon la plupart des spécialistes interrogés pour l’article, tout isolé ou ménage qui n’a pas réussi à joindre les deux bouts, à fournir le strict nécessaire à ses enfants et à lui-même, est considéré comme pauvre. Sur cette base, la pauvreté a explosé en Belgique. Déjà confrontée à la hausse des coûts du logement, la population est depuis une année sous les coups des augmentations des prix de l’énergie et de l’alimentation. "Tous nos interlocuteurs sont d’accord : on peut estimer que la Belgique compte aujourd’hui… 3 millions de pauvres. Sans risquer de se tromper."

    Une situation destinée à évoluer… dans le mauvais sens !

    Il faut encore rajouter ceux qui s’en sortent à peine et pour qui la pauvreté n’est pas bien loin. "Ceux-là basculeront dans la pauvreté au moindre accroc (maladie, accident) et si le coût de la vie (logement, énergie, alimentation) continue de s’envoler. Et plus tard, puisque l’épargne leur est déjà impossible, beaucoup ne pourront compter que sur leur pension légale et rejoindront les rangs déjà bien serrés des «retraités pauvres»." Précisons juste qu’une récente étude de l’Université d’Anvers pointe une montée aigüe de la pauvreté parmi les pensionnés. D’ici 2016, 40% des plus de 75 ans seront sous le seuil officiel de pauvreté si la politique actuelle est maintenue… Pour l’instant, environ un quart des pensionnés sont officiellement pauvres.

    Vincent Peiffer aborde après le cas des "working poors" (voir notre article à ce sujet). "Avoir un emploi n’immunise plus contre la précarité. Depuis quelques mois, de plus en plus de travailleurs pauvres font appel aux CPAS et aux maisons sociales." Histoire d’illustrer ce phénomène neuf, Télémoustique donne la parole à Fabienne Perot, coordinatrice du Centre liégeois de service social : "Récemment, une dame en procédure de divorce est venue nous trouver. Elle travaille à temps plein et gagne 1.250 euros net. Quand elle a payé son loyer, la nourriture, quelques vêtements, les dépenses médicales et un abonnement de transport pour aller travailler, il ne lui reste presque plus rien! Or, sa séparation implique des frais. Elle ne peut donc pas payer les provisions de chauffage et d’électricité. Son fournisseur va lui mettre un compteur à consommation minimale. Ce qui, vu l’état de santé de sa fille, est inenvisageable. Même si sa fille n’était pas malade, elle ne s’en sortirait pas. Elle n’a pas de vacances, pas de loisirs, aucune dépense de plaisir alors que cette dame travaille à temps plein! Et 1.250 euros, c’est un salaire très courant!" Que rajouter de plus ? Plus de pouvoir d’achat par plus de salaire et une hausse des allocations…

    L’eau deux fois plus chère en 2008 par rapport à 2000…

    Et un endettement endémique

    Une étude du groupe Sud-Presse est ensuite relayée. Cette étude a comparé l’augmentation des prix de l’énergie et de l’eau pour deux familles types belges entre 2000 et 2008, à consommation égale. Les dépenses en eau ont ainsi doublé et le chauffage au mazout coûte trois fois plus cher. L’électricité coûte 70% plus cher qu’en 2000 et le gaz 110% plus cher…

    Pour Fabienne Perot : "Ce qui est tout à fait nouveau depuis une petite année, c’est que le CPAS est sollicité par des personnes qui travaillent mais n’arrivent plus à assumer leurs factures de gaz et d’électricité. Avant, nous n’avions que des gens défavorisés. Et là, il y a une grosse affluence de travailleurs qui demandent une aide alimentaire pour pouvoir payer leur énergie. Ce sont des familles monoparentales avec un salaire régulier ou même des ménages à deux revenus, mais modestes. Ceux-là non plus ne s’en sortent plus. Nous accordons l’aide alimentaire quand la personne dispose de moins de 7 euros par jour pour s’alimenter. Quantité de personnes qui travaillent n’ont même plus 7 euros par jour pour s’alimenter…"

    L’article révèle ensuite que près de 340.000 Belges étaient considérés comme endettés en 2007, uniquement pour les crédits à la consommation et les emprunts hypothécaires, sans compter les dettes de soins de santé, d’énergie et les arriérés de consommation. "Fin 2007, 491.000 contrats de crédits défaillants étaient répertoriés auprès de la Banque nationale de Belgique. Et c’était avant la grosse flambée des prix de la consommation… Les spécialistes craignent un surendettement qui toucherait 600.000 à 700.000 Belges fin 2008."

    Cet article est encadré de différents autres, plus petits, qui abordent l’arrivée de l’aide sociale même dans des régions riches, la situation des parents isolés, les loisirs, le logement,… Impossible ici de tout reprendre sans continuer à recopier l’intégralité du dossier, ce que nous avons déjà largement fait ici.

    La conclusion vaut cependant son pesant d’or : "La grogne se transforme petit à petit en sentiment d’écœurement. Sentiment attisé par l’apathie de décideurs embourbés dans la bisbille institutionnelle. Attisé aussi par les salaires indécents de certains patrons, les bénéfices pharaoniques de certaines banques ou entreprises, souvent les mêmes qui vendent leurs "services" et leurs produits beaucoup plus cher en Belgique qu’ailleurs en Europe. Quelque chose ne tourne plus rond. «Quand les gens qui travaillent commencent à ne plus pouvoir nourrir leurs enfants» prévient cette dame active depuis quinze ans dans un CPAS, «il faut craindre la révolte. On dit que le combat communautaire n’a jamais fait de morts, en Belgique. Il va en faire si ça continue. Indirectement.»"

    Ne vous contentez pas d’être en colère, luttez !

    Le constat tiré dans ce dossier est on ne peut plus correct. Il fait froid dans le dos. La question est de voir maintenant comme inverser la vapeur, comment récupérer la richesse produite à la sueur de notre front accaparée par les patrons, les banques et les actionnaires.

    La semaine d’action syndicale pour le pouvoir d’achat s’est terminée il y a maintenant un peu plus d’une semaine. Plus de 80.000 personnes ont défilé dans les rues du pays, beaucoup plus qu’initialement attendu, avec une forte présence de jeunes militants syndicaux et de femmes. Cette semaine était à peine terminée que, ce lundi, le personnel communal er régionnal de Bruxelles défilait avec plus de 2.000 manifestants, toujours sur la question du pouvoir d’achat. Continuons sur cette lancée !

    Yves Leterme a dit qu’il nous "comprend", mais qu’il a des problèmes plus urgents, comme Bruxelles-Hal-Vilvorde. Selon lui, il n’y a pas d’argent. Assez toutefois que pour accorder la déduction des intérêts notionnels : un cadeau de 3,5 milliards d’euros (selon les derniers chiffres cités) au patronat. S’il ne dépendait que des libéraux, cette somme serait encore augmentée. Si rien ne change, beaucoup de travailleurs sont sur la voie d’un hiver froid qu’ils subiront en ayant faim. La résistance de façade du PS à la logique de profit (PS qui a approuvé la chasse aux chômeurs, qui a voté le Pacte des Générations, qui a voté la déduction des intérêts notionnels, qui est directement responsable de la privatisation de Belgacom, des attaques dans l’enseignement,… et bien plus encore!) ne changera pas grand-chose.

    Une journée d’action nationale avec un mot d’ordre de grève nous permettrait de lutter tous ensembles: jeunes et moins jeunes, travailleurs et étudiants, hommes et femmes, Belges et immigrés. Cela clarifierait une bonne fois pour toute que la majorité de la population veut d’urgence des mesures pour plus de pouvoir d’achat. Que les partis établis essayent de mettre 80.000 personnes dans la rue pour BHV!

    Nous ne disposons malheureusement pas de notre propre prolongement politique. Comme aux temps du mouvement contre le Plan Global ou contre le Pacte des Génération, les revendications syndicales n’arrivent pas sur le terrain politique ce qui permet au gouvernement de simplement attendre que l’orage passe. Un parti de type "syndical" serait un outil important pour éviter que les partis traditionnels puissent continuer leurs jeux en occupant seuls la scène politique.

    Le MAS défend l’idée d’une journée d’action nationale après l’été avec un mot d’ordre de grève pour défendre entre autres une augmentation salarial fondamentale (au moins 1 euro de plus par heure en plus de l’index rétabli). Nous voulons sur le même temps poursuivre la discussion sur la nécessité d’une formation politique propre aux travailleurs et aux allocataires.



    Le MAS propose de considérer les revendications suivantes :

    • Plus de pouvoir d’achat par plus de salaire et des allocations liées au bien-être, pour que nous ne payons pas nous-mêmes nos augmentations comme avec des réductions de taxes : 1€ de plus par heure
    • Un index qui reflète réellement le coût de la vie, pas d’accords all-in
    • Abolition de la norme salariale, des accords interprofessionnels comme dans le passé, avec un seuil salarial et non un plafond (un minimum qui revient à tous, pour que les secteurs faibles puissent en bénéficier également)
    • Pour les collègues qui tombent hors de l’AIP: casser tout les accords salariaux de plus de 2 ans, tel que l’accord 2005-2010 dans le non-marchand
    • Une suppression de la TVA sur les produits de première nécessité
    • Un plan massif de construction de logements sociaux publics

    Pour financer cela :

    • Une forte répression de la grande fraude fiscale
    • Un impôt sur les grandes fortunes

    Ces dernières mois, nous avons pu constater à quel point il est désastreux de laisser des secteurs-clés tels que l’énergie et les banques à l’avidité du secteur privé. Quand des grandes banques se trouvent en difficulté, l’Etat peut alors soudainement intervenir. Pour nous, le contrôle de tels secteurs revient à la collectivité. Nous plaidons donc pour leur nationalisation sous le contrôle démocratique du mouvement ouvrier et de toute la collectivité.

  • Une semaine d’action qui en veut plus !

    La discussion se poursuit au sujet de l’estimation la plus correcte du nombre de participants à la semaine d’action des syndicats. Les sous-évaluations auxquelles la presse a eu recours, parfois en mentionnant plus de participants dans l’article que dans le titre, ont disparu. Les politiciens, la presse et même les patrons n’osent plus remettre en question que le mouvement pour le pouvoir d’achat est porté par la base, plus d’ailleurs que ce qu’avaient imaginé les dirigeants syndicaux dans un premier temps.

    Même le dirigeant de la CSC Luc Cortebeeck a reconnu dans le quotidien flamand De Morgen qu’il y a eu «plus de monde qu’attendu». Jusqu’à trois ou quatre fois plus même. Les chiffres varient de 80 à 100.000. Liège et Anvers ont ouvert la danse, les gens y étaient bien conscients qu’ils allaient donner le ton pour le reste de la semaine. La semaine précédente, la délégation de GM avait précisé que seule la délégation allait manifester, mais par la suite, l’usine a été fermée sous la pression de la base. La même chose s’est passée à Atlas Copco, et dans d’autres entreprises anversoises aussi, la volonté de passer à l’action a dépassé toutes les attentes. Résultat : 7.500 participants, bien plus que toutes les prévisions.

    A Liège, il y a eu pas moins de 25.000 manifestants. Qui a prétendu que « le débat sur le pouvoir d’achat » n’était pas lancé en Wallonie ? Il est exact de dire que la vague de grève du début de cette année dans environ 70 entreprises principalement flamandes ne s’est pas étendu vers la Wallonie et Bruxelles. Cela peut partiellement s’expliquer par le haut taux de chômage dans ces deux régions, par le retard économique et par le fait que les travailleurs wallons et bruxellois ont ces dernières années été systématiquement brutalisés par la presse, les patrons et les politiciens. Toutefois, dès qu’un mot d’ordre arrive, le mouvement se généralise, les gens n’ont plus alors la responsabilité du retard de la région entière placée sur leurs épaules en tant que délégation et les traditions de lutte des travailleurs wallons ressurgissent alors pleinement.

    LES GRÈVES ET LES MANIFESTATIONS « DÉMODÉES » RAPPORTENT PLUS QUE LES ACTIONS « LUDIQUES ».

    Le Hainaut a été à la hauteur des camarades liégeois, il y avait 20.000 manifestants à Mons. Quelle différence avec les 2.500 participants à « Foodstock », à Gand. Les régions qui ont opté pour des combinaisons classiques et « démodées » de grèves et de manifestations ont eu un résultat beaucoup plus grand que les régions qui ont privilégié les actions « nouvelles et ludiques », comme en Flandre Orientale, ou pire encore avec les randonnées à bicyclette et autres actions aux grandes surfaces à Bruges et Courtrai. Qui avait auparavant participé à la manifestation de Mons avec ses 20.000 participants a dû se sentir bizarre à Courtrai au milieu de 500 participants. Nous avons beaucoup entendu des remarques sur le fait que nous ne sommes pas dans un syndicat pour faire la fête ou des excursions, mais bien pour protéger notre travail et nos salaires.

    De toute façon, le ton a été donné. À Hasselt, il y a eu 3 à 4.000 participants, dont beaucoup de délégations d’entreprises entièrement ou partiellement stoppées, entre autres le sous traitant de Ford Lear Corporations. À Namur, nous avons été 4.500, avec quelques légers débordements d’une dizaine de syndiqués, ce qui a été présenté plus tard dans la presse comme des « émeutes ». Arlon a connu sa plus grande manifestation depuis 1977, depuis la fermeture de la société métallurgique d’Athus. À Bruxelles, où les syndicats avaient dans un premier temps fixé un quota de 1000 manifestants chacun, les directions syndicales ne pouvaient pas se permettre de perdre la face au regard des autres régions. Malgré la pluie battante, nous avons été 10.000 et beaucoup d’autres sont restés dans les commerces environnants ou se sont abrités dans les métros ou les gares.

    LE NOMBRE DE JEUNES ET DE FEMMES A ETE FRAPPANT

    A chaque manifestation, le nombre de jeunes participants a été frappant. Beaucoup venaient d’être élus au cours des récentes élections sociales et ont considéré une manifestation syndicale pour le pouvoir d’achat comme le prochain pas logique de leur engagement. Un grand nombre s’est adressé à nos militants afin de demander où leur délégation se trouvait ou encore où ils pouvaient encaisser l’indemnisation de grève, indépendamment de leur couleur, rouge ou verte. À la base, la couleur ne fait souvent pas de différence, on considère soi-même et autrui avant tout comme des travailleurs qui sont dans le même bateau. Beaucoup de femmes étaient présentes également, et c’est une donnée relativement nouvelle dans ce genre de mobilisation.

    Il fallait chercher loin l’affinité avec le CDH chez beaucoup de militants CSC, ce qui est un changement remarquable en comparaison des années de la coalition violette. L’attachement de militants FGTB au PS était aussi à un point historiquement bas. Le peu de mandataires PS présents doivent aussi l’avoir senti et ils sont restés étonnamment discrets. En Flandre, SPa-Rood, qui a bénéficié d’une certaine attention des médias ces derniers mois, n’a pas été aperçu, nous n’avons même pas vu un tract.

    LES PATRONS SOUFFLENT LE CHAUD ET LE FROID

    Du côté patronal, on a eu très peur. On ne parle plus de « l’hystérie de pouvoir d’achat ». La parution d’innombrables « études » sensées nous montrer que la situation s’est améliorée pour nous tous ne prend plus. Qu’en ’83 nous devions travailler aussi longtemps qu’aujourd’hui pour acheter une voiture, cela est bien possible, mais depuis lors, sur le même laps de temps, nous produisons beaucoup plus qu’en ‘83. On sait tous que les patrons sont pour le progrès, mais qu’ils veulent exclusivement mettre dans leur propre poche tout ce que rapporte ce progrès, nous ne devons pas être d’accord avec ça.

    Il y a même eu une étude qui a comparé nos habitudes alimentaires avec celles du siècle dernier. Et devines quoi, nous avons consacré à ce moment-là une plus grande partie de notre revenu à la nourriture comparé à aujourd’hui. Nous supposons que les auteurs ne plaident pas pour envoyer à nouveau les enfants dans les puits de 8 jusqu’à 12 heures par jour, 6 jours par semaine. Quant aux vacances, nous consacrons en moyenne 2.000 euros pour les voyages. Est-ce qu’on a comparé les prix des hôtels par rapport à il y a quelques années, ou encore le prix d’un billet d’avion ou d’une assurance de voyage ? Si nous consacrerions aujourd’hui environ autant qu’en ’83 en voyages, alors nous serions tous stockés dans des tentes sur un terrain de scouts dans les Ardennes ou à la mer.

    Le président français Sarkozy, pourtant bien à droite, veut abaisser la TVA sur les combustibles. Le ministre italien des finances, tout aussi à droite, veut même instaurer une taxe à la Robin des Bois sur les bénéfices des sociétés pétrolières. En bref, ça panique du côté patronal, comme le reflètent Sarkozy & Co. Dans ce cadre, même la commission européenne s’est sentie obligée d’intervenir, et son côté néolibéral est tout de suite apparu. Au Sommet européen des ministres du travail, il a été décidé d’autoriser un temps de travail pouvant aller jusqu’à 48 heures par semaine, jusqu’à 60 heures même dans certains cas, et même jusqu’à 65 heures pour les métiers qui comprennent un temps d’attente « inactif ». Joëlle « Madame Non » Milquet a été contre, mais n’a malheureusement pas voté non et s’est abstenue. Le Sommet des ministres européens des finances veut débattre, sur proposition de Reynders, du « mécanisme d’indexation », et ce ne sera pas pour l’améliorer. La Banque Centrale Européenne risque d’augmenter les taux d’intérêt si les gouvernements européens ne tiennent pas sous contrôle leurs prix et surtout les salaires. Est-ce encore surprenant si les Irlandais, les seuls qui ont pu se prononcer via un référendum au sujet du Traité de Lisbonne, ont – heureusement – rejeté ce Traité?

    LETERME I : UN MILLIARD D’EUROS POUR LE POUVOIR D’ACHAT, 3,5 MILLIARDS D’EUROS POUR LES PATRONS

    Leterme nous « comprend », mais n’a malheureusement pas de sous. « Il n’y a aucun gouvernement au monde » prétend-il, « qui peut compenser à 100% la perte du pouvoir d’achat par la hausse des prix du pétrole ». Grâce à l’index, 1 milliard d’euros a déjà été injecté dans le pouvoir d’achat, ajoute-t-il, comme si ce à quoi nous avons droit avec l’indexation était un cadeau personnel de sa part. Avec le dépassement de l’index pivot, les salaires des fonctionnaires augmenteront de 2%, ce qui représente des coûts supplémentaires de 25 millions d’euros mensuellement, soit 300 millions d’euros par an. De plus, il y a encore 700 millions d’euros qui partiraient vers l’indexation des allocations sociales comme les retraites et les allocations familiales.

    En sachant que les 30.000 plus grandes entreprises ont de nouveau réalisé l’année précédente un bénéfice record d’au moins 77 milliards d’euros et que les entreprises du Bel 20 ont rapidement distribué 50% de leurs profits en dividendes, alors on se rend compte combien les paroles de Leterme sonnent creux. L’ancien leader étudiant de mai ’68 en Belgique et membre du PS Guy Quaden, le gouverneur de la Banque Nationale, accourt aujourd’hui à l’aide de Leterme. Il affirme vouloir partiellement réviser le mécanisme d’indexation en supprimant ou en révisant fortement l’indexation pour les hauts salaires. Bref, il donne à Leterme le moyen de s’en prendre à l’indexation sans que cela ne soit de prime abord une menace pour les bas revenus. Quaden brode en fait aujourd’hui sur base de l’idée de Caroline Ven – ancienne chef des services d’études de la FEB et du VKW (fédération patronale catholique flamande) et actuelle économiste en chef de Leterme, étiqueté « CSC » – qui a reproché aux militants syndicaux de monter aux créneaux uniquement pour les privilégiés alors que certains allocataires ont vraiment difficile. Nous nous sommes alors demandé si Caroline Ven manifestera autant de préoccupations pour eux quand le gouvernement mènera demain sa politique de suspension vis-à-vis des chômeurs et des invalides…

    PS, SPa, ECOLO : DE PETITES MESURES POUR DE PETITES INTERVENTIONS DANS LES JOURNEES D’ACTION

    Du côté de la social-démocratie, l’imagination est au pourvoir, suivant l’exemple de leur représentant à la direction de la Banque Nationale. Le SPa a ainsi trouvé des solutions qui ne coûtent pas un euro, en s’appuyant sur l’exemple de différentes mesures prisent dans des pays européens. De son marché aux mesures, le SPa est revenu avec l’idée d’instaurer un blocage des prix pour le gaz et l’électricité, de manière temporaire… en attendant une vraie libéralisation du secteur de l’énergie ! Autre proposition, donner plus de pouvoir au Creg (la Commission de régulation des prix de l’énergie) et à la commission de régulation de l’énergie. Cela ne coûte effectivement rien… Les pouvoirs étendus du service de répression à la fraude fiscale n’empêchent pas, faute de moyens et de volonté politique (et pas que de la part du parti du ministre des finances…), qu’environ 30 milliards d’euros par an (selon la CGSP-Finances) restent dans les poches des grandes entreprises plutôt que de revenir à la collectivité.

    Le Parti Socialiste revendique pour sa part une hausse des allocations, le renforcement des mécanismes de régulation et de contrôle pour empêcher les pratiques spéculatives et abusives de la part des patrons et veut aussi s’en prendre aux parachutes dorés. Plus concrètement, il affirme aussi vouloir rénover 35.000 logements par an pour les isoler énergétiquement, ce qui pourrait créer 16.000 emplois, et travaille encore à un bonus net de 1.250 euros. Enfin, le PS revendique, tout comme le PTB, la réduction de la TVA sur le gaz et l’électricité de 21% à 6%. Bien peu de choses en définitive, avec le grand avantage que ces propositions ne sont pas chiffrées pour la plupart. Du reste, elles ne font que s’ajouter à la montagne des revendications promises à être sacrifiées sur l’autel de la participation gouvernementale. Pour ne pas tomber du navire, il vaut mieux ne pas trop s’accrocher à ce que les partenaires veulent lancer par dessus bord.

    On a aussi fort peu vu le PS et le SP.a dans les mobilisations de la semaine d’action. Quelques mandataires ont bien fait leur apparition (sous les huées dans le cas du Bourgmestre Willy Demeyer à Liège) mais aucune intervention organisée n’a pu être vue. Pourtant, ces partis ont démontré que de l’argent, ils en ont (assez en tout cas pour leurs campagnes électorales), mais visiblement pas encore suffisamment assez pour participer à la construction du mouvement. Ou bien alors ne faut-il pas à leurs yeux trop développer ce mouvement pour le pouvoir d’achat qui, à chaque pas, les pousse un peu plus dans leurs contradictions. On a beaucoup parlé de la déduction des intérêts notionnels durant cette semaine, mais cette mesure n’a pas été approuvée que par la droite officielle. Comme toute la coalition violette l’a votée, PS et SPa ont accordé avec cette seule mesure entre 2,4 et 3,5 milliards d’euros (les estimations varient) aux patrons. On attend en vain quelque chose de cette ampleur aujourd’hui pour le pouvoir d’achat. Mais cela n’en étonnera pas beaucoup en souvenir du Pacte des Générations, de la chasse aux chômeurs, des différentes privatisations des services publics, des attaques dans l’enseignement,… Les attaques contre Reynders & Co sont opportunément utilisées pour masquer les responsabilités de ces partis.

    Ecolo, au contraire de Groen !, était présent à quelques manifestations avec de (très) petites délégations et de (gros) drapeaux. Mais si le parti « écologiste » a fait parlé de lui durant cette semaine, c’est surtout par l’intermédiaire de son ancien secrétaire fédéral (durant la participation électorale d’Ecolo…) et actuellement président au CPAS de Namur, Philippe Defeyt, responsable de l’étude sur le temps de travail nécessaire pour pouvoir acheter un bien aujourd’hui comparé à ‘83. Pour le reste, dans son tract, Ecolo précise qu’il veut relever les bas salaires, augmenter les allocations sociales, organiser un contrôle des prix, supprimer la redevance télé, développer les transports en commun, entre autres mesures pour favoriser l’isolement énergétique des habitations par des primes. Mais tout comme pour le PS, rien n’est précisé sur celui qui va devoir payer tout cela, ni par quels moyens Ecolo compte imposer ces mesures. Mis à part en appelant les gens à voter pour lui bien entendu.

    C’est en fait surtout là que se trouve le but des partis traditionnels, avancer des (légères, très légères) mesures, et reprocher ensuite aux électeurs de ne pas avoir assez voté pour eux. Une méthode originale pour faire retomber la responsabilité de leur soutien aux politiques néolibérales sur les électeurs. Pourtant, les partis traditionnels n’ont pas leur pareil pour faire venir la presse chez eux pour qu’elle relaye leurs propos. Pourquoi ne pas avoir utilisé leur influence sur les journalistes et leur position pour réellement relayer les positions des syndicats ? Pourquoi ne pas avoir par exemple protesté contre les mensonges que l’on a pu lire sur les « émeutes » à Namur ?

    QUE RESTE-T-IL A GAUCHE ?

    En définitive, seuls le Parti du Travail de Belgique et le Mouvement pour une Alternative Socialiste sont intervenus dans les mobilisations en nombre et en tant que force organisée en Wallonie, à Bruxelles et en Flandre.

    L’intervention du PTB, dans la lignée du tournant officialisé lors de leur dernier Congrès, était particulièrement remarquable dans la mesure où elle rappelait plus celle d’un parti traditionnel que celle d’un parti de lutte. Nous avons ainsi peu vu de vendeurs du journal du PTB, Solidaire, et à certains endroits, les militants du PTB ont distribué des pommes de terre, comme lors de la manifestation du 15 décembre 2007, en référence à leur campagne dont l’illustration est composée d’une pomme de terre, d’un jerrican et d’une ampoule protégées par des préservatifs.

    Leur tract se concentrait sur trois revendications assez correctes, sous le titre «Moins de blabla, préservons notre pouvoir d’achat». Le PTB exige en premier lieu, comme le front commun syndical et le PS, la diminution de la TVA sur le gaz et l’électricité de 21% à 6%. Ce thème est à la base de la pétition initiée par le PTB qui vise à réunir 100.000 signatures et qui a été la principale activité des membres du PTB durant la semaine d’action. Nous n’avons rien contre cette revendication, mais ce n’est pas un hasard si c’est justement celle-là qui a été reprise par le PS… L’abolition pure et simple de la TVA sur les produits de première nécessité aurait été une exigence plus à la hauteur du mouvement. Le PTB revendique aussi une forte hausse des salaires, de 1 euro par heure, qui est également à la base de notre campagne, tandis que la dernière exige un contrat à durée indéterminée pour chaque travailleur qui passe plus de 60 jours chez le même employeur. Aucune indication ne figurait par contre sur la manière de construire le mouvement, de même qu’il n’y avait aucune critique à l’encontre des directions syndicales.

    POUR LA LUTTE, LA SOLIDARITE ET LE SOCIALISME

    Le MAS/LSP a pu être présent à toutes les manifestations, à l’exception de celle d’Arlon. Nos camarades y sont activement intervenus, en diffusant 448 exemplaires de notre mensuel, l’Alternative Socialiste. Le temps aurait été plus favorable lors de la dernière journée à Bruxelles, il ne fait aucun doute que nous aurions pu atteindre les 550 ou même les 600 journaux.

    Le tract que nous avons distribué a été bien reçu et est à la base, tout comme notre journal, d’innombrables discussions avec des syndicalistes de tous âges et de tous lieux. Il était axé sur la dénonciation du marché « libre », sur le soutien aux actions syndicales, mais en mettant en avant que c’est à la base de décider et qu’elle doit être impliquée dans l’élaboration d’un plan d’action. Les revendications proposées à être considérées par la base syndicale étaient consacrées à une augmentation salariale d’au moins un euro par heure, à l’introduction d’un index qui reflète réellement le coût de la vie, à l’abolition de la norme salariale pour en revenir à un seuil d’augmentation salariale et non à un plafond, au refus des accords salariaux portant sur plus de deux ans, à la suppression de la TVA sur les produits de première nécessité ainsi qu’à un plan massif de construction de logements sociaux publics. Pour financer ces mesures, nous proposons d’instaurer un impôt sur les grandes fortunes et d’augmenter fortement la répression de la grande fraude fiscale. Enfin, nous avons mis en avant que les secteurs clés de l’économie ne doivent pas être laissés à la merci de la soif de profit du secteur privé, et avons donc plaidé pour la nationalisation de ces secteurs sous le contrôle démocratique du mouvement ouvrier et de toute la collectivité.

    COMMENT CONTINUER ?

    Pour la suite des actions, la volonté de lutter massivement pour notre pouvoir d’achat doit être gardée à l’esprit. C’est un rapport de force puissant qui a commencé à se construire, mais rien n’est encore garanti. Pour ne pas que la pression retombe, un bon moyen serait de lancer des différentes délégations une motion pour une journée d’action nationale à l’automne, avec un mot d’ordre de grève. Un tel outil permettrait de continuer à mobiliser dans les entreprises sur base de l’enthousiasme qui est issu de la première semaine d’action sur le pouvoir d’achat.

    Mais il reste frappant de voir que le mouvement ouvrier ne possède pas de large relais politique propre. La question qui se pose aujourd’hui est la même que celle qui s’était posée lors des luttes contre le Plan Global. Comme personne ne représente les syndicats au Parlement, le gouvernement n’a qu’à attendre que l’orage passe pour ensuite, comme au temps du Pacte des Générations, voter le tout malgré l’opposition de centaines de milliers de travailleurs. Un parti de type « syndical » serait une aide précieuse pour ne pas laisser les partis traditionnels continuer leurs petits jeux en étant seuls à occuper la scène politique. La CSC et la FGTB ont réuni pour les dernières élections sociales 115.000 candidats pour les Conseil d’Entreprises et les CPTT. Ces 115.000 personnes vont représenter les travailleurs sans recevoir un centime de plus. Ce qu’il nous faut, ce sont des représentants politiques de cette sorte. Puisons dans ces 115.000 là pour nous représenter au niveau politique de la même manière qu’ils nous représentent dans les entreprises. Payés au même salaire qu’un travailleur, le reste de leurs salaires de parlementaire pourrait être reversé à une caisse pour les actions de ceux qui sont obligés de se défendre contre les agressions patronales.

    Il faut imaginer l’impact qu’aurait eu une telle formation dans les journées précédent la semaine d’action ou durant celle-ci pour populariser les actions auprès des couches larges de la population et pour contrer l’argumentaire patronal qui est seul à s’épanouir dans la presse traditionnelle. Dans une telle situation, les ballons De Decker ou Vlaams Belang se videraient très vite. Une pétition revendiquant que les syndicats rompent leurs liens privilégiés avec la social-démocratie pour la FGTB et avec la démocratie-chrétienne pour la CSC serait un bon instrument pour continuer cette discussion.

    > Tous les rapports et reportages photo de la semaine d’action pour le pouvoir d’achat du 9 au 12 juin.

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