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Tag: Paul Krugman
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En Bref…
Cette rubrique est destinée à mettre en avant différents faits, citations, vidéos ou petites nouvelles particulièrement frappantes. Ce samedi, différentes données concernant les ”99%” et les ”1%” sont mises à l’honneur.
Les inégalités aux Etats-Unis
L’économiste américain Paul Krugman a très clairement illustré à l’aide d’un graphique à quel point augmentent les inégalités aux USA, en comparant le développement des revenus des 1% les plus riches à ceux des autres 99%. Les 80% les plus pauvres ont vu leur situation s’empirer. Les 1% les plus riches n’ont fait que s’enrichir encore. Les deux tiers de l’augmentation des richesses sont allés vers les 0,1% les plus riches. La plupart des gens qui composent ce 0,1% sont à la tête de grandes entreprises et de grandes banques. Krugman parle d’une concentration croissante des richesses et des revenus.
Quel changement sous Obama?
Les banquiers de Wall Street ont gagné bien plus sous le mandat présidentiel d’Obama que sous celui de Bush. Sous la présidence de Bush, il y a eu des années de croissance sans précédent pour les salaires et les primes des plus riches. La crise de 2008 est ensuite arrivée mais, ces 2,5 dernières années, les profits et les salaires sont allés encore plus haut. Pourtant, Obama veut épargner, principalement sur le dos de la population. La promesse de ”changement” est restée confinée à de belles paroles, le seul changement que la population peut percevoir est un changement négatif. Pendant ce temps, les riches deviennent encore plus riches.
L’homme le plus riche de tous les temps vit aujourd’hui
Dans le journal britannique The Guardian, George Monbiot a écrit cette semaine que les 10% les plus pauvres de Grande-Bretagne ont perdu 12% de leurs revenus entre 1999 et 2009, alors que les 10% les plus riches ont vu les leurs augmenter de 37%. Monbiot affirme aussi que la personne la plus riche de tous les temps vit aujourd’hui, c’est Carlos Slim, . Par rapport à la quantité des forces de travail qu’il peut acheter dans son pays, il serait 14 fois plus riche que Crésus, l’homme le plus riche de l’histoire de l’empire romain et allié crucial de Jules César. Slim est neuf fois plus riche que Carnegie, le magnat de l’acier du 19e siècle, et quatre fois plus riche que Rockefeller, autre grand capitaliste américain du 19e siècle. Forbes estime la fortune de Slim à 63,3 milliards de dollars.
”La frontière de la faim commence ici”
”La frontière de la faim, qui se situait jadis au nord du Sahara, a gagné le sud de l’Espagne et du Portugal”. C’est ce que déclare un des travailleurs de la Banque alimentaire de Lisbonne (The Guardian, relayé par Courrier International) en commentant un chiffre, celui des 160.000 personnes qui ont bénéficié de l’aide de cette banque alimentaire l’an dernier. Ce nombre augmente d’année en année.
Roger Waters (Pink Floyd) concernant le mouvement “Occupy”
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Ecole d’été 2010 – Crise économique: aucune solution sur base capitaliste
Aujourd’hui, nous ne parlons pas seulement d’une crise économique, notre environnement est également en jeu. Et si nous analysons les développements actuels, c’est pour nous préparer pour le futur, pour nous préparer à intervenir. Il est vrai qu’il est difficile de déterminer exactement la façon dont les choses peuvent se dérouler, mais il est très clair qu’un certain nombre de pays font face à l’imminence d’une explosion sociale. La crise a déjà entraîné une diminution du niveau de vie de millions de personnes et des dizaines de millions connaissent l’insécurité, la peur du lendemain.
Vers une plus grande instabilité
La crise économique mondiale est parfaitement illustrée par la crise que traverse l’Europe. Newsweek et Times (deux magasines américains) ont consacré tous les deux et au même moment leur première page à l’Europe. Il y était notamment dit que le grand secret de l’Europe était que son secteur bancaire était plus touché que Wall Street et que les banques européennes sont tout aussi voraces que les américaines quand il s’agit de jouer avec des actifs toxiques.
Les commentateurs bourgeois ne peuvent plus maintenant se permettre de parler d’un éventuel progrès, ils ne parlent que d’assainissements. La perte de confiance des classes dirigeantes et de leurs partisans, un peu partout dans le monde, est un élément important qui dans un certain sens exprime le cul-de-sac dans lequel se trouve le capitalisme. Toutefois, nous savons que le système capitaliste ne disparaitra pas de lui même, cela ne pourra arriver que par l’intervention consciente de la classe des travailleurs. Mais la division au sein même des élites dirigeantes est un élément important. Les tensions augmentent (comme les tensions commerciales entre différents pays ou encore les tensions entre différents niveaux de pouvoir). Au niveau international, de façon générale, nous allons vers une période caractérisée par de plus en plus d’instabilité.
En 1938, Trotsky a publié le ‘‘Programme de transition, L’agonie du capitalisme et les tâches de la IVe Internationale’’ dans lequel il disait notamment que la bourgeoisie ferait tout pour éviter la déroute. C’est encore tout à fait vrai aujourd’hui, et on peut d’ailleurs le voir à la façon dont la bourgeoisie se défend.
Le pouvoir le plus puissant que le monde ait jamais connu – l’impérialisme américain – est embourbé depuis 10 ans en Afghanistan. Ce que l’impérialisme américain espère, c’est de gagner assez de traitres à ses côtés pour pouvoir aboutir à une situation de ‘calme’ comme en Irak mais, même là, il n’est pas question de victoire. Tout comme Tacite le disait de l’empire romain, c’est une paix de désolations (‘‘ils firent un désert et le nommèrent paix’’). En Irak, la guerre civile a été temporairement gagnée par les chiites. Le pays est divisé sur base communautaire, mais ces délimitations peuvent voler en éclat à tout moment. Au lieu d’un Saddam Hussein, on peut en voir émerger une dizaine.
Quant à la catastrophe de BP, où l’actionnariat est majoritairement américain, elle constitue une parfaite illustration de l’incapacité du capitalisme à gérer l’environnement. La détérioration de la planète est inévitable dans le système capitaliste. Les problèmes ne vont faire qu’empirer, y compris en termes de guerre. Si ce système continue ses méfaits, nous connaîtrons d’autres guerres pour les ressources, comme la guerre pour le pétrole au Moyen-Orient. Déjà aujourd’hui, il y a de plus en plus de conflits autour de l’approvisionnement en eau potable. On estime actuellement à 50 millions le nombre de réfugiés sur la question de l’eau, et ils seraient issus de 27 pays. Dans ce cadre, le sommet de l’ONU au sujet des changements climatiques de Copenhague a été un échec total.
D’une politique de stimulants à une politique d’austérité
L’incapacité du capitalisme à faire la moindre mesure progressive peut se voir concernant la crise économique. Dans un premier temps, on a tenté de se limiter à des plans de relance mais, puisque ces programmes de sauvetage n’ont plus d’effet, dans un deuxième temps, on passe maintenant à des plans d’austérité, à des attaques contre les travailleurs. Lors du dernier G20 à Toronto, les partisans des plans de relance étaient minoritaires, l’optique générale est maintenant de passer à des plans d’austérité très durs. Après ce sommet, seul Obama était en faveur de plans de relance. S’il n’avait pas adopté cette position, il aurait eu des problèmes et se serait retrouvé en minorité, y compris au sein de son parti. Mais le fait même qu’il ait été mis en minorité à Toronto illustre que l’impérialisme américain a perdu sa capacité d’imposer sa volonté.
A certains moments les assainissements sont très brutaux, comme en Roumanie, à d’autre c’est plus léger. Le gouvernement britannique veut par exemple réduire le déficit budgétaire de 40 à 50% dans les 5 prochaines années. Les conséquences de ce genre de politique ont été illustrées, en Irlande notamment. Il y a quelques semaines, des milliers de personnes y ont manifesté: des parents d’handicapés mentaux qui s’occupent de leur enfant déficient à la maison. Ils avaient une institution où ils pouvaient déposer leur enfant une ou deux nuits pour souffler un peu, et une des premières conséquences des coupes budgétaires était, entre autres, la suppression de cette institution. Angela Merkel a déclaré que l’Allemagne devait donner l’exemple pour le reste de l’Union Européenne avec son plan d’austérité. Ces assainissements vont très certainement empirer la situation dans les autres pays, et pas seulement en Allemagne.
Essai après essai, les entreprises veulent augmenter leur profitabilité, avec l’aide des gouvernements. Dans les environs de Venise, une commune a été jusqu’à interdire de faire des châteaux de sable. La raison est toute simple: les amendes rapportent de l’argent. Cela indique à quel point de désespoir se retrouvent parfois confrontées les autorités. Ce n’est certes pas un élément de ce type qui va déclencher une révolution, mais il suffit parfois d’une étincelle, aussi absurde soit-elle. Le doute qui subsiste dans l’esprit de la bourgeoisie est de savoir jusqu’où elle sera capable d’attaquer les travailleurs sous l’argument "Vous êtes obligés d’accepter les coupes, sinon c’est la Grèce qui vous attend". Cette menace est même utilisée aux Etats-Unis.
La Grèce est le maillon faible du capitalisme européen. La situation qui s’y développe est un test pour la bourgeoisie et pour la classe ouvrière, mais aussi pour le CIO: comment une de ses sections peut-elle réagir et adapter son intervention dans une telle situation. La grève du 5 mai était la plus grande depuis 25 ans, de même que la taille des manifestations. L’attaque du Parlement avait été le fait de travailleurs du service public. Il y a aussi eu des mouvements de masse dans les secteurs de l’enseignement, des hôpitaux,… En fait, tous les secteurs les plus importants, du privé ou du public, ce sont mis en action durant cette période. A Athènes, il y a eu des mobilisations contre le gouvernement chaque semaine. Nous sommes dans une phase où les commentateurs ont peur que l’expérience grecque rate son coup à cause d’une trop grande mobilisation. Les jeunes, les travailleurs et les commentateurs font le parallèle avec l’Argentine du début de ce siècle. Mais le gouvernement tient bon, parce que les directions syndicales n’ont aucune idée de la manière de réagir, aucune réelle stratégie ni alternative.
Nos slogans sont "abolition de la dette – nationalisation du secteur financier", tout en appelant à des actions communes pour rassembler les grévistes. La lutte est actuellement en pause, mais le sentiment général est que les luttes recommenceront en septembre. Nous devons aussi renforcer la revendication de nationalisation sous le contrôle démocratique de la population du secteur financier. C’est une revendication qui avait suscité un grand enthousiasme quand Joe Higgins en avait parlé lors d’un grand meeting de la formation large de gauche grecque Syriza. Nous sommes les seuls à accorder autant d’attention à cela. Une banque publique ou des mesures visant à rester dans le cadre de la compétition entre banques sont des mesures insuffisantes.
De sombres perspectives économiques
Tous ces budgets d’austérité seront incapables de solutionner quoi que ce soit. Les capitalistes se réfèrent à la Suède ou au Canada au début des années ‘90, et ils caricaturent ce qui y a été réalisé. A l’époque, le capitalisme était en croissance, différence fondamentale avec aujourd’hui. Les éléments actuels de rémission du capitalisme sont avant tout circonstanciels et non structurels, on ne parle pas de croissance des moyens de productions.
De toute façon, avant même de discuter de cette soi-disant reprise économique, de sa nature et de sa durée, il faut bien se rendre compte que, pour l’écrasante majorité des travailleurs et des jeunes, la reprise économique n’a pas ouvert de meilleures perspectives d’avenir. Cela est tout au plus considéré comme un évènement temporaire. Même dans les pays où la reprise a été plus importante, quand on regarde les chiffres, on se rend compte qu’il s’agit pour beaucoup d’un écran de fumée. Ainsi, dans les médias, on s’est moqué de la reprise économique allemande comme d’un conte de fée. Cette année sera certes un record en termes d’exportations des automobiles allemandes, mais les ventes au sein même du pays vont reculer de 30% pour cette année. La fragilité de la reprise est notamment illustrée par l’utilisation de la capacité de production de l’économie allemande, qui se situe sous les 80% alors que la moyenne était précédemment de 84%. De plus, aucune certitude n’existe quant à la durée de cette reprise économique. Nous devons regarder tous ces chiffres avec beaucoup de prudence. Par exemple, selon les chiffres, le pays qui a connu la plus forte progression de sa production industrielle est Singapour (+64% en une année), mais ce n’est que le reflet de l’ampleur de la chute connue l’année d’avant! Aucun commentateur bourgeois n’a en fait de réelle confiance dans le système. Le dernier rapport du FMI a d’ailleurs revu à la baisse ses prévisions économiques.
Le mieux auquel s’attendre, c’est une stagnation avec un chômage de masse. Mais nous nous dirigeons vers une nouvelle récession, et très probablement vers une nouvelle crise bancaire. Les Etats réinterviendront encore avec l’argent de la collectivité (comme ils l’ont déjà fait), mais une nouvelle crise bancaire combinée à une récession aurait un grand effet. Le résultat serait une nouvelle dégradation importante du niveau de vie des masses, mais l’impact politique serait également énorme. Ce serait une défaite gigantesque pour la classe capitaliste et cela provoquerait une remise en question encore plus grande du système capitaliste, avec la recherche d’une alternative.
La dette publique a remplacé la crise des dettes financières. Mais quelle classe sociale est responsable de cette dette publique? D’un pays à l’autre, les conditions sont différentes, mais c’est généralement une conséquence du renflouement des banques. C’est encore une conséquence du fait que l’Etat a dû garantir la faillite financière et immobilière. Nous devons expliquer que la crise n’est pas provoquée par les pensionnés grecs ou par les travailleurs des services publics. Il y a 3 ans, en 2007, tous les Etats avaient un déficit d’à peine plus de 1%. Depuis lors, la moyenne est montée de 1.7% à plus de 8%, malgré l’absence d’augmentation des pensions par exemple.
Les plans d’austérité vont encore aggraver les conséquences de la crise. Les keynésiens classiques ont raison de dire que le problème fondamental, c’est la demande insuffisante. Le prix Nobel d’économie Paul Krugman a raison d’affirmer que les capitalistes sont repartis vers la politique de Hoover en 1929: liquider les acquis des travailleurs. Il a aussi raison quand il indique que les politiques actuelles vont poser les bases d’une seconde crise, beaucoup plus profonde.
En cas d’augmentation des dépenses publiques: qui va payer ? Si on fait payer les bourgeois, ils vont se retirer et arrêter d’investir. L’idée générale est de s’en prendre aux travailleurs et à leurs familles, mais il faut s’attendre à ce qu’un tsunami de résistance accompagne le tsunami d’austérité. De plus, malgré toutes les coupes, les déficits des budgets des Etats seront encore plus profonds à la fin de l’année qu’au début et les milliards retirés de l’économie par les plans d’austérité vont peser sur elle. La Chine est le seul pays à avoir connu une bonne reprise sur base des investissements d’Etat, mais cette reprise se place dans le contexte d’une grosse surchauffe de l’économie.
Remontée de la lutte des classes
Quant aux travailleurs, l’impact de la crise les frappe de plein fouet. Ceux qui retrouvent un emploi après l’avoir perdu connaissent des conditions de travail bien pires. En Grèce, la possibilité d’un effondrement complet des conditions de travail n’est pas à exclure. En Espagne, 90% des emplois disparus concernaient les couches de travailleurs précaires, mais une bonne partie de la population connait ces conditions. Tous les regards se portent vers le sud de l’Europe, et l’atmosphère combative qui y existe est inspirante. En Angleterre, certains Tories (les conservateurs) ont même été jusqu’à dire qu’ils allaient faire des manifestations contre leur propre gouvernement suite à l’annonce d’attaques contre les budgets des écoles! Tout a été utilisé pour décrédibiliser le mouvement qui se développe en Grèce. Mais toute cette propagande capitaliste a ses limites. Jusqu’ici, les capitalistes se basaient beaucoup sur l’idée que les richesses se répartiraient, que ‘‘demain sera meilleur’’. Cette idée est en train d’être réduite en morceaux.
Aujourd’hui, les protestations se généralisent. Grèce, Portugal, Espagne, France,… les luttes se développent, mais les directions syndicales jouent un rôle de frein. Lors d’une grande manifestation à Bologne, en Italie, le dirigeant syndical local a notamment dit "personne ne remet en cause qu’il doit y avoir des coupes budgétaires, mais il faut les faire autrement". Avec des dirigeants pareils, on n’est pas encore sortis de l’auberge. Quand Rosa Luxembourg décrivait le rôle des dirigeants sociaux-démocrates durant la première guerre mondiale, elle était particulièrement virulente. Mais que dirait-elle aujourd’hui? L’attitude des dirigeants syndicaux actuels est de compliquer la situation. En Belgique, cela a laissé une certaine ouverture pour approfondir la crise communautaire et aux USA cela s’exprime avec le Tea Party. En Hongrie et en Grèce, l’extrême-droite se renforce. Des questions comme l’immigration commencent à devenir des questions clés, auxquelles nous devons apporter une attention toute particulière.
Le mouvement de résistance ne se développe pas partout de la même manière. En Grande-Bretagne par exemple, les mesures mises en avant par le gouvernement actuel sont les plus dures depuis 1922, ce qui avait jeté les bases pour la grande grève générale de 1926. Nous en sommes encore loin aujourd’hui. Le niveau de conscience des masses a fortement chuté depuis la chute du mur. Avant, une grève générale posait très rapidement la question du pouvoir et de la confrontation avec l’Etat capitaliste. D’une certaine manière, toutes les grèves générales font cela. Mais l’absence actuelle d’un facteur subjectif de masse, même sous la forme d’un parti réformiste très confus, complique les choses.
Le capitalisme est incapable de résoudre les problèmes qu’il engendre. Il connaît sa plus grande crise, mais la conscience des masses n’est pas à la hauteur de la situation. Cela ne signifie toutefois pas dire qu’on ne peut pas vaincre la bourgeoisie, comme en France, en 1995, quand le premier ministre Alain Juppé avait connu une défaite avec son ‘‘plan Juppé’’.
Nouveaux partis des travailleurs, ouverture pour les idées socialistes
Un des points cruciaux pour reconstruire la conscience des masses est la création et le développement de nouvelles formations politiques larges capables d’orienter des couches larges de la population dans les luttes afin qu’elles puissent apprendre de leur expérience pratique de lutte. Mais il existe le danger de l’électoralisme. Le point le plus important est de maintenir une orientation claire vers les entreprises et le monde du travail. Ces nouvelles forces peuvent se développer très vite, mais également s’effondrer très vite, comme l’illustre l’exemple de Rifondazione Comunista en Italie. Cette formation avait un grand potentiel, qui a beaucoup souffert de sa participation au gouvernement capitaliste de Prodi ainsi qu’à des coalitions locales. Aujourd’hui, l’état général de l’opposition est tel qu’il n’est pas impossible que Berlusconi remporte d’autres victoires malgré les scandales, les conséquences de la crise économique, les attaques contre les travailleurs,…
L’espace laissé vacant par le mouvement ouvrier se rempli d’autre chose, et nous avons eu différents exemples dans plusieurs pays. Nous pouvons comprendre ces développements au vu de la pourriture des anciens dirigeants politiques. En Italie, il y a le Mouvement Violet. Vu la chute du PRC, il est quasiment inévitable de voir même des couches syndicales développer un état d’esprit antiparti et antipolitique. On peut également voir se développer des tendances au terrorisme, comme en Grèce où l’on assiste à des attentats contre des commissariats ou des banques. L’absence de formulation d’une riposte face à la crise par les directions syndicales est à dénoncer dans ces actes. Les camarades grecs ont ainsi parlé de dirigeants syndicaux qui appelaient à faire grève, mais qui étaient incapable de participer aux actions car les travailleurs les attaquaient dès qu’ils les voyaient pour leur mollesse.
Pour l’instant, ce sont surtout les organisations d’extrême droite ou populistes de droite qui connaissent une petite poussée. Même si des organisations de gauches de masses existaient, avec le racisme latent dans la société, ces organisations auraient de toute façon connu une poussée dans un premier temps. La question nationale refait également son apparition (Ecosse, Belgique, Pays Basque,…)
Les choses ne se développent pas qu’en Europe. Au Moyen-Orient, face à la corruption des régimes en place, de plus en plus de travailleurs sont ouverts à nos idées. En Russie, une opposition se développe contre Poutine. Au Kazakhstan également, avec une petite organisation, nous avons pu lancer une organisation ouvrière de masse, Kazakhstan 2012. En Chine, de gigantesques usines existent, avec des conditions de travail véritablement horribles. Des filets ont par exemple été fixés sous les fenêtres d’une usine Foxconn où 12 travailleurs se sont suicidés cette année. L’Etat est bien conscient du problème et essaye de créer de nouveaux syndicats "patronaux", pour tenter d’étouffer la contestation. Mais les grèves continuent de se développer.
Dans toute une série de pays, de grands mouvements ont déjà pris place. Plusieurs syndicats ont déjà appelé à une grève générale en septembre. Dans d’autres pays, on parle surtout de manifestation ou de journée d’action (de la part des directions syndicales), d’où l’importance de la manifestation du 29 septembre à l’appel de la Confédération Européenne des Syndicats. Il est important de voir comment nous allons intervenir dans ces évènements et comment cadrer cela dans les évènements qui forment la conscience et la combativité de la classe ouvrière. Nous ne devons pas seulement intervenir pour construire le mouvement mais aussi pour voir quel élément mettre en avant et pourquoi. Il est important de comprendre que les attaques antisociales peuvent provoquer différents types de réactions à différents moments.
Cette crise économique et sociale a aussi son impact politique avec la chute du soutien des partis au pouvoir en Allemagne, en France, en Italie ou même au Japon. La semaine dernière, des élections se sont déroulées pour le parlement japonais. Le premier ministre, élu depuis juillet seulement, a reçu une raclée électorale de grande ampleur, parce qu’il a commencé à parler d’assainissements et du doublement d’une taxe. Quant aux conservateurs britanniques, ils avaient banni le terme "austérité" de leur vocabulaire pendant la campagne, mais ce n’était qu’une opération de communication. Dans différents pays, il y a de grands changements d’état d’esprit très rapide, et une des conséquences de ce processus est que cela mine le soutien des gouvernements en place. Du point de vue des mouvements futurs, l’intervention des camarades de Chypre était intéressante, avec un gouvernement de centre-gauche qui essaye de prendre des mesures également contre les riches, mais qui est de suite bloqué au Parlement. Ce qui est encore possible, ce sont des gouvernements élus sur base de populisme,… mais qui peuvent provoquer des mouvements sociaux importants. C’est entre autres le cas de la Grèce, où le gouvernement est en place depuis 9 mois seulement, élu sur base du moindre mal et de la promesse de ne pas appliquer l’austérité, et a suscité des mouvements sociaux de grande ampleur.
Ce que le capitalisme nous propose, c’est un monde où chacun est en lutte contre chacun. Notre tâche est de préparer la classe ouvrière pour prendre le pouvoir et s’émanciper. En ce sens, la moindre erreur théorique se paye très cher dans la pratique. Mais nous avons réussi à démontrer ce que nous sommes capables de faire. Dans une telle période, un petit groupe avec des idées claires et qui est enraciné dans les masses peut avoir un impact énorme. A la fin des années ’80, dans des circonstances spécifiques, nous avons pu diriger un mouvement de masse contre la Poll Tax en Angleterre, un mouvement qui a rassemblé 18 millions de personnes, et nous étions à l’époque quelques milliers dans le pays. Cette école d’été a pour vocation de nous préparer à cela. A travers son expérience de lutte, la classe ouvrière va arriver à la conclusion que la seule façon de sortir de ce système, c’est la voie vers le socialisme.
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Plan de relance d’Obama
Parviendra-t-il à éviter une dépression prolongée et à relancer la croissance ?
Avant même de reprendre la présidence américaine, Obama a été forcé de se pencher sur la crise économique la plus profonde depuis la Grande Dépression des années ‘30. Les données effarantes sur le chômage publiées en janvier ont révélé un abrupt déclin dans l’économie américaine, et le début d’une récession profonde et, très probablement, prolongée. Un million d’emplois ont disparu entre novembre et décembre, ce qui amène le total des pertes d’emploi pour 2008 à 2,6 millions.
Lynn Walsh, article de ‘Justice’, mensuel de Socialist Alternative (CIO-USA)
Lors d’un important discours sur l’économie, le 8 janvier, Obama a présenté son plan de relance destiné à créer trois millions d’emplois et à redémarrer une nouvelle croissance. Quel est le caractère de ce plan, et peut-il éviter une dépression prolongée et relancer la croissance ?
Le plan d’Obama
Obama propose un plan de relance de l’économie de 775 milliards de dollars sur deux ans, tout en suggérant qu’il pourrait s’approcher d’un trillion (mille milliards) de dollars. Près de 300 milliards de dollars (40% de ce budget) serviront à financer des baisses de taxes pour des familles de la « classe moyenne » et des entreprises. Près de 500 milliards de dollars serviront à des dépenses keynésiennes de travaux publics. Ceci inclurait des aides aux Etats (les gouverneurs d’Etats déclarent avoir besoin d’entre 100 et 150 milliards de dollars afin d’éviter des coupes sauvages dans leurs budgets sociaux).
Des fonds supplémentaires iront à l’assurance-chômage, aux timbres alimentaires, à Medicaid, etc. Obama propose aussi d’accorder des subsides aux contributions d’assurance santé. Il y aura de plus un investissement extensif dans l’infrastructure et les installations publiques : routes, ponts, transport public, bibliothèques, réseaux de diffusion publics, conservation de l’énergie, électricité solaire et éolienne, etc. S’il est accepté, ce plan sera le plus gros plan de dépenses étatiques jamais mis en oeuvre dans le monde depuis le New Deal de Roosevelt dans les années ‘30, seconde guerre mondiale exceptée.
Obama a en outre annoncé une révision de la deuxième partie du programme de renflouement bancaire (le soi-disant Programme d’Aide aux Actifs en Danger), pour lequel il reste 350 milliards de dollars sur les 700 milliards initialement prévus. Obama promet de diminuer ce budget afin d’aider les familles de travailleurs, d’aider les propriétaires à éviter les expulsions, et de soulager le fardeau des autres dettes (emprunts automobiles, dettes des consommateurs, prêts au étudiants, etc.). Jusqu’à présent, toutefois, il n’a encore mis en avant aucune proposition détaillée afin d’annuler ou de modifier les hypothèques prédatrices, même si plus de deux millions de propriétaires sont maintenant confrontés aux expulsions.
Opposition au Congrès
Malgré ses espoirs, Obama n’a que peu de chances de voir son plan être approuvé par le Congrès dès son inauguration le 20 janvier. Dans sa forme actuelle, ce plan doit faire face à l’opposition de la droite comme de la gauche.
De nombreux Républicains – de même que certains Démocrates conservateurs – s’opposent à tout nouveau plan de relance par principe, surtout à une hausse des dépenses publiques (mais pas aux baisses de taxes). Ceci reflète en partie des calculs électoraux.
Il y a toujours une colère largement répandue face aux 700 milliards de dollars prélevés sur le compte des contribuables pour renflouer les banques et les financiers – les magnats assoiffés de profit qui ont déclenché la crise. Il y aura sans doute des soupçons quant au fait qu’une grosse portion du prochain plan de sauvetage finira dans les coffres des grosses entreprises et dans la poche des politiciens.
L’opposition des « conservateurs fiscaux » reflète aussi une adhésion doctrinaire à l’idée du « marché libre » – malgré l’effondrement financier du libre marché que nous voyons aujourd’hui – et une opposition au déficit gouvernemental.
Cependant, confrontés à une crise économique et financière profonde, qui suscite la peur de soulèvements sociaux et de radicalisation de classe, les principaux représentants du capitalisme ont abandonné l’orthodoxie de l’ultra libre marché qui prévalait du temps de la présidence de Reagan. «Lors d’une grave crise, a récemment déclaré Bernanke (président de la Réserve Fédérale américaine), l’orthodoxie peut se révéler être une très mauvaise stratégie» (Financial Times du 4 janvier).
Malgré la perspective d’un énorme déficit du gouvernement fédéral et le danger, plus tard, d’une inflation explosive, les stratèges de la classe dirigeante américaine sont en faveur d’un plan de relance massif afin de sauver leur système de l’effondrement. Obama agit dans leur intérêts.
Critiques de la gauche
Il y a des Démocrates de gauche, toutefois, qui sont critiques face au plan de relance proposé à cause des 40% (300 milliards de dollars) prévus en baisses de taxes. De ceci, 150 milliards iront aux contribuables de la « classe moyenne » (500 $ chacun), tandis que 100 milliards iront aux entreprises.
La plupart des remises de taxe personnelles sont épargnées en banque ou utilisées pour rembourser des dettes, comme l’a montré le plan de remise de taxes d’une valeur de 168 milliards de dollars lancé par Bush en février 2008. Les remises de taxes sont bien moins efficaces que les dépenses publiques pour augmenter la demande de biens et de services et pour créer des emplois.
Obama peut très bien penser que les baisses d’impôt sont toujours les bienvenues et qu’elles permettront de mieux faire passer le plan dans l’opinion publique. A part cela, il cherche certainement à apaiser les critiques des Républicains au Congrès, et donc à s’assurer un soutien bipartisan. (Étrangement, alors qu’ils se disent contre tout déficit budgétaire, les conservateurs fiscaux ne s’opposent jamais aux remises d’impôts, qui réduisent pourtant les revenus gouvernementaux et donc augmentent le déficit.)
A propos des baisses d’impôts pour la classe moyenne et les entreprises proposées par Obama, Keith Olbermann (présentateur sur MSNBC) a dit: «Le présidentiable propose des baisses de taxes qui, au total, pourraient faire rougir George Bush» (Washington News, 6 janvier).
Bien que ce soit le plus gros plan de relance jamais mis en oeuvre depuis le New Deal, quelques Démocrates de gauche doutent de sa capacité à relancer la croissance économique. Un fervent partisan d’Obama, Paul Krugman, qui a été contraint de le convaincre de mettre en oeuvre un plan de dépenses keynésiennes, maintenant juge le plan d’Obama «quelque peu décevant… il est bien loin de ce dont nous avons réellement besoin» (New York Times, 8 janvier).
«Notre économie pourrait chuter à un trillion de dollars en-dessous de sa pleine capacité (sur la période 2009-2010)» a déclaré Obama dans son discours du 8 janvier. Toutefois, comme le fait remarquer Krugman, le Bureau du Budget du Congrès estime la perte à 2,1 trillions de dollars, le double du chiffre avancé par Obama. Alors que seuls 500 milliards des dollars promis par Obama iront à des dépenses keynésiennes, ce plan pourrait ne pas suffire pour éviter «une dépression prolongée».
Enorme déficit
Obama a bien répété qu’il y aurait un énorme déficit gouvernemental – et de plus en plus grand – impliquant par là le fait qu’il a hérité d’une situation désespérée. Le déficit pour l’année fiscale 2009 s’élèvera sans doute à 1,2 trillions de dollars (8,3% du PIB) – le record d’après-guerre – même avant que n’ait été mis en œuvre le plan d’Obama.
Un déficit gouvernemental est en soi un stimulus, dans le sens que la dette du gouvernement finance des emplois et des dépenses qui autrement ne contribueraient pas à la croissance économique. Cependant, une énorme portion du déficit actuel (le dernier déficit de Bush s’élevait à 455 milliards de dollars) vient du renflouement des banques et des agents financiers – qui ont mis leur argent au frais et limitent toujours les prêts, réfrénant ainsi la croissance.
Si le plan de relance d’Obama est mis en œuvre dans les deux prochaines années, il poussera le déficit du gouvernement fédéral à environ 10% du PIB. Le rapport de la dette nationale totale cumulée par rapport au PIB augmentera de 36,9 à 54,2%, un record si l’on excepte la période de la deuxième guerre mondiale. Selon certains Républicains, nous avons déjà un « désastre fiscal », et Obama va empirer les choses.
Pour les stratèges de la classe dirigeante, cependant, le plan Obama est un mal nécessaire, afin de remettre à flots leur système qui bat de l’aile. Ils reconnaissent le fait que des dépenses déficitaires à une échelle massive pèseront sur les générations futures qui devront rembourser une dette colossale. Toutefois, ils déchargeront plus tard de ce fardeau sur le dos de la classe salariée, à travers de nouvelles taxes et des coupes dans les budgets sociaux.
Pendant trente ans, les dirigeants capitalistes ont maintenu l’orthodoxie monétaire, condamnant l’inflation comme la peste. Mais maintenant que leur système est menacé par la crise, ils sont prêts à soutenir le recours à la presse à billets afin de renflouer les banques, contrer la déflation et (au moins en partie) les dépenses publiques.
Inévitablement, l’impression d’argent aujourd’hui réveille le spectre de l’inflation demain. Mais l’éditorial du New York Times, sous son titre «Le remède de la planche à billets», concluait que «l’action de la Fed est correcte» (23 décembre 2008). Plus tard, ils reviendront au type de politique monétariste sauvage en vigueur sous Reagan dans les années ‘80, qui restreignait les dépenses publiques et augmentait le coût réel de la dette pour les travailleurs.
Obama lui-même a laissé entendre que le prix serait payé par les travailleurs dans le futur. «Je ne suis pas sur le point d’augmenter la taille du long-terme gouvernemental» a-t-il déclaré dans le New York Times du 9 janvier. Selon Obama, une partie importante de son budget sera utilisée pour «réparer» de grands programmes de droit, la sécurité sociale, Medicare (soins de santé pour les retraités) et Medicaid (soins de santé pour les pauvres).
«Réparer» signifie coupes : plus de contributions des taxes sur les salaires, la hausse de l’âge de la retraite, moins d’allocations de santé. Le plan d’Obama, selon le chroniqueur David Brooks (New York Times du 9 janvier), «n’est pas une tentative d’utiliser la crise pour édifier un Etat social de type européen». Les dépenses keynésiennes sont là en cas d’urgence, afin d’empêcher l’effondrement économique et des remous politiques. Ensuite, les dirigeants capitalistes tenteront de revenir au conservatisme fiscal.
Perspectives pour l’économie
Le plan d’Obama pourra-t-il éviter une dépression prolongée et relancer la croissance ? Malgré l’ampleur de l’intervention étatique (le déficit cyclique, en plus du plan de renflouement des banques et du plan de relance proposé), ce plan est toujours limité en comparaison aux forces économiques qui ont été déchainées par les Etats-Unis et le ralentissement mondial. Obama vise à créer trois millions d’emplois, mais il y a déjà onze millions de chômeurs, et la situation va encore empirer.
En réalité, le scénario le plus favorable pour le capitalisme américain est un scénario dans lequel l’intervention keynésienne permettrait d’atténuer la récession et de prévenir le début d’une dépression. Même cela, toutefois, n’est pas garanti. Une nouvelle crise du système financier mondial ou américain, une chute du dollar, et d’autres convulsions dans l’économie mondiale pourraient exacerber la crise du capitalisme américain.
Même si elles permettent d’éviter une dépression prolongée, les dépenses keynésiennes en elles-mêmes ne redémarreront pas nécessairement l’économie, produisant une croissance qui se renforce elle-même. Cela requérrait un investissement en capital renouvelé et extensif de la part des grandes entreprises – et les capitalistes n’investiront que s’ils sont assurés d’un taux de profitabilité acceptable.
Une grande proportion de la dette toxique et de la surcapacité industrielle, étant donné le niveau actuel de la demande soutenue par l’argent, devra être extraite hors du système avant qu’il puisse y avoir un quelconque retour à une croissance basée sur de solides fondations.
La récession actuelle va très probablement se poursuivre aux Etats-Unis et dans le monde pour un certain temps, et la reprise, lorsqu’elle commencera, sera probablement lente et inégale. Même si des mesures keynésiennes atténueront l’impact de la récession, c’est la classe salariée qui devra payer le prix fort de la crise capitaliste, à travers des bas salaires, un chômage de masse, et la pauvreté. Les mesures keynésiennes ne parviendront pas à surmonter l’anarchie des forces du marché ni purger la soif de profit des capitalistes.
En même temps, les attaques sur les travailleurs vont provoquer des luttes puissantes, une remise en question du système capitaliste, et la recherche d’une réelle alternative. Au mieux, le keynésianisme n’offre qu’un palliatif temporaire à la crise capitaliste. L’idée d’une planification socialiste démocratique, d’un autre côté, va gagner de plus en plus de soutien en tant que seule manière d’atteler la science, la technologie et les forces de production afin de subvenir aux besoins de la société, dans son ensemble.