Tag: Occupy

  • Solidarité internationale avec Siham Byah Jihad

    Soutien à Siham BYAH JIHAD, résidente marocaine aux Etats-Unis menacée d’expulsion

    Par Abou Farid Hassan, Mouvement du 20 février – Belgique

    Le samedi 1er mars dernier, un rassemblement de soutien à Siham avait été organisé à Bruxelles.

    Depuis janvier 2014, plusieurs militants des droits humains en Amérique et en Europe se mobilisent pour défendre Siham BYAH JIHAD, militante marocaine menacée d’une expulsion imminente des Etats-Unis sans son fils âgé de 4 ans et demi.

    En effet, Siham qui réside à Boston, la capitale de l’État du Massachusetts au nord-est des États-Unis d’Amérique, avait reçu le 31 décembre 2013, après que sa demande d’asile ait été ignorée auprès du panel des juges de la Cour d’Appel d’Immigration, une ordonnance d’expulsion par contumace l’enjoignant de quitter les Etats-Unis dans un délai d’un mois.

    Siham qui vit depuis plus de 16 ans légalement aux USA a été confrontée dès les premières années de son arrivée à un problème familial. Après avoir fui son mari du fait d’abus conjugal chronique, elle s’est résolue à recommencer sa vie à zéro.

    Siham BYAH JIHAD a toujours consacré sa vie à combattre la corruption, l’impérialisme sauvage et à défendre la justice, les droits humains, à dénoncer la répression, les souffrances exercées par le régime dictatorial marocain en place subies par le peuple.

    Dès 2011, elle milita au sein du « Mouvement du 20 février » marocain (section Etats-Unis) en participant à toute une série d’actions telles que les manifestations, les communiqué, les débats ou encore par l’intermédiaire de son blog-vidéo. Selon Siham BYAH JIHAD, qui est la cofondatrice du Mouvement républicain marocain (MRM), le peuple marocain ne pourra avoir un avenir qu’avec la fin de cette monarchie absolue mercantile, seule responsable du malheur du peuple et par l’édification d’une République démocratique populaire.

    Le Mouvement du 20 février prenant de l’ampleur, elle fit l’objet à maintes reprises de menaces de mort, publiques et privées, de menaces de viol, d’une campagne de diffamation émanant des baltajia, des agents de la police politique, la DGED (Direction Générale des Études et de la Documentation), qui l’accusaient de trahison, de vouloir déstabiliser le « royaume » et de violer la sacralité du roi. Selon ses accusateurs, elle avait franchi les limites que la société impose à tout Marocain.

    Ces accusations qui pourraient lui valoir beaucoup dans une dictature telle que le Maroc qui interdit dans ses successives constitutions « octroyées » à quiconque, tout comme aux soi-disant députés de la nation, de discuter et mettre en cause la monarchie.

    Siham ne s’intéresse pas seulement à des situations dramatiques au Maroc au regard du respect des droits humains mais aussi à toutes les causes nobles. Pour preuve, elle a travaillé dans de nombreuses organisations d’aide aux migrants et a participé bénévolement en tant que coordinatrice à des programmes de soutien aux enfants migrants pour faciliter leur intégration aux États-Unis.

    Par ailleurs, le militantisme de Siham au sein du mouvement citoyen américain « Occupy Wall Street » n’a apparemment pas plu à certains. Le lobby marocain aux Etats-Unis aurait profité de ce nouvel activisme pour former une pseudo-alliance avec certains services américains pour transmettre des informations partiellement erronées notamment sur sa vie privée dans un but de désinformation visant à salir son image, la faire taire et la contraindre à quitter les USA, et à défaut, de l’expulser vers le Maroc, pays ou elle risque d’être soumise à la torture.
    Ceci est d’autant plus grave que le droit international interdit à tout pays d’extrader tout individu, y compris un criminel, qui risquerait de subir la torture s’il retournait dans ce pays.

    Le mardi 11 février 2014, Khadija RYADI, récente lauréate du Prix des Nations unies pour les droits de l’homme, décerné par l’ONU en 2013, a été interpelée sur cette affaire lors de la conférence-débat organisée par l’AMDH – Paris sur la situation des droits humains au Maroc.

    Des actes de torture et d’autres mauvais traitements infligés à des détenus politiques et des prisonniers continuent à être signalés au Maroc. Récemment des plaintes ont été déposées à Paris contre des hauts responsables marocains accusés de torture.

    Suite à ces atteintes aux droits humains, plusieurs initiatives ont été prises par des personnes et par certaines organisations. Des mobilisations ont vu le jour sur internet et des actions ont été organisées sur le terrain pour protester contre la menace d’expulsion de Siham BYAH JIHAD et pour réclamer sa régularisation administrative. Toutes ces actions alertent sur le risque de séparer une mère de son enfant et cherchent à attirer l’attention des autorisées américaines sur les risques qu’elle encourt en cas d’extradition. Elles demandent aussi à ce que Siham soit entendue par les autorités américaines concernées pour qu’elle puisse obtenir que sa situation soit réexaminée et présenter tous les éléments en sa possession.

    Après la mise en place d’une pétition et d’une collecte d’argent, pour couvrir les frais de justice dont les frais d’avocats ont été estimés à un peu plus 8 000 $, des rassemblements ont été organisés.

    A Paris, le 15 février 2014, le Collectif des Amazighs de France pour le Changement Démocratique au Maroc (CAFCDM), a tenu un rassemblement, place de la Madeleine.

    En Allemagne, à Cologne, le 21 février 2014 à l’occasion du troisième anniversaire du « Mouvement du 20 Février » un autre rassemblement a été organisé par des militants issus du Mouvement 20 février Europe en solidarité avec Siham BYAH JIHAD.

    En Belgique, un rassemblement s’est tenu le 1er mars 2014 à l’initiative du Mouvement du 20 février – Belgique, avec le soutien du CAFCDM, de l’AMDH-Belgique, du Parti Socialiste de Lutte (PSL) et du Collectif des Militants du Maroc de l’Immigration d’Action. Des courriers ont été envoyés aux ambassadeurs des Etats-Unis à Paris et à Bruxelles.

    Nous saluons toutes celles et tous ceux, organisations, militants, journalistes…, qui ont participé et soutiennent Siham qui a osé franchir les barrières imposées par des régimes d’un autre âge. Nos seules armes sont la solidarité et la détermination. Nous continuerons à soutenir Siham et son enfant. Faisons de son exemple un combat pour un monde meilleur épris de justice et de dignité.

     

  • Quelle démocratie réelle pour quelle société ?

    Posez la question autour de vous : qui croit encore que nous sommes dans une véritable démocratie ? De manière écrasante, la réponse sera à n’en pas douter négative, teintée ou non de cynisme à l’exemple du dicton ‘‘la dictature, c’est ferme ta gueule; la démocratie, c’est cause toujours’’. L’homme de la rue n’a voix au chapitre sur rien, son ‘’contrôle démocratique’’ se limite à se rendre de temps à autre aux urnes, sans la moindre garantie que ‘’ses’’ élus respecteront leurs promesses, et sans pouvoir faire quoi que ce soit pour les y contraindre. Que faire sur base de ce constat ?

    Dossier de Nicolas Croes

    Des citoyens tous égaux ?

    A la Chute du Mur de Berlin et avec l’effondrement du stalinisme dans les pays du bloc de l’Est, une gigantesque offensive a pris place proclamant la ‘‘fin de l’histoire’’ (selon les célèbres mots du ‘‘philosophe’’ Francis Fukuyama, retombé dans l’anonymat par la suite) ainsi que la victoire de la ‘‘démocratie’’ sur le totalitarisme stalinien. L’establishment pouvait encore bien admettre que quelques ajustements démocratiques devaient toujours prendre place, mais en douceur, à l’aide d’initiatives ‘‘citoyennes’’ et grâce à l’œuvre de sensibilisation (et non de mobilisation) de la ‘‘société civile’’.

    Ces termes avaient l’avantage de balayer les différences de classes sociales et de mettre côte-à-côte le ‘‘citoyen’’ travailleur, le ‘‘citoyen’’ patron d’entreprise, le ‘‘citoyen’’ actionnaire et le ‘‘citoyen’’ premier ministre. C’est dans le prolongement de cette idée que, en 2002, le ‘‘citoyen’’ premier ministre belge Guy Verhofstadt a publié une lettre ouverte aux ‘‘citoyens’’ altermondialistes dans laquelle il disait: ‘‘comment éviter une lutte des classes violente entre les plus pauvres et les plus riches de ce monde ?’’ Par un étrange tour de passe-passe facilité par la confusion politique consécutive au recul idéologique des années ’90, la ‘‘lutte des classes’’ était présentée comme une lutte entre ‘‘deux milliards de personnes qui (…) essayent de survivre (…) et un demi-milliard de personnes dont la préoccupation principale est de démêler l’intrigue du feuilleton télévisé quotidien.’’ Les ‘‘citoyens’’ des pays capitalistes développés étaient donc tous responsables à parts égales, une logique qui – dans un autre style – a fait le bonheur de ceux pour qui ce sont avant tout les choix de consommation qui gouvernent le monde.

    Tout ce discours euphorique et hypocrite a pris du plomb dans l’aile. La ‘‘démocratie’’ a servi de prétexte aux interventions impérialistes en Afghanistan, en Irak et ailleurs, avec des résultats dramatiques. Quant à la construction européenne ‘‘démocratique’’, elle a été marquée par nombre d’entorses majeures, à l’instar des référendums concernant le TCE, Traité sur la Constitution Européenne, rejeté en France et aux Pays-Bas en 2005. Le même texte est revenu par la bande sous un nouveau nom, ‘‘Traité de Lisbonne’’, n’a plus été soumis à un référendum en France et aux Pays-Bas (où il a été ratifié par les parlementaires) mais bien en Irlande, où il a été rejeté une nouvelle fois. Qu’à cela ne tienne, il a été représenté en 2009, l’establishment s’assurant cette fois de suffisamment terroriser les électeurs sur les conséquences d’un nouveau refus pour qu’il soit accepté… En gros, on peut voter pour ce qu’on veut, tant que cela va dans le sens de l’establishment capitaliste !

    Avec la crise économique, l’establishment capitaliste européen ne s’est pas toujours embarrassé de perdre du temps avec l’organisation de nouvelles consultations. En Grèce et en Italie, on a même carrément assisté à l’imposition de gouvernements technocratiques non-élus dirigés, comme par hasard, par d’anciens banquiers. Quant aux ‘‘recommandations’’ de la Commission Européenne, elles sont de plus en plus considérées – à juste titre – comme de véritables diktats. Ce n’est pas destiné à s’améliorer : le TSCG (traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance) veut accroître le pouvoir coercitif de la Commission européenne. La banque JP Morgan Chase (une des plus grandes banques au monde) n’a pas hésité à suivre cette logique jusqu’à l’extrême en réclamant, dans un document intitulé ‘‘L’ajustement de la zone euro – bilan à mi-parcours’’, l’instauration de régimes autoritaires en Europe.

    La crise, ainsi que l’impact grandissant des privatisations et libéralisations, a aussi totalement fait voler en éclat toute cette idée de ‘‘citoyens’’ égaux. Licenciements, enseignement à deux vitesses, justice à deux vitesses, soins de santé à deux vitesses,… le rêve de la ‘‘démocratie’’ occidentale ressemble de plus en plus à un cauchemar. La ‘‘démocratie’’ parlementaire est partout à travers le monde minée par l’abstentionnisme chronique et la perte confiance vertigineuse des ‘’citoyens’’ face aux institutions et aux politiciens traditionnels. Ceux qui pensent encore être en mesure de pouvoir décider de leur destinée sont extrêmement peu nombreux, et ils se trouvent généralement derrière les bureaux luxueux des conseils d’entreprise, des banques,… Sur base de ce sentiment d’élections qui semblent n’être que symboliques et de l’ordre du rituel, la voie est ouverte pour la recherche d’alternatives.

    Une démocratie sans représentants élus ?

    Récemment, David Van Reybrouck, a défendu l’idée d’une démocratie par tirage au sort. Cet auteur flamand, qui a su acquérir une certaine notoriété avec son livre ‘‘Congo. Une histoire’’ fut également l’un des parrains du ‘‘G1000’’, un grand forum de débat public qui a débouché en 2012 sur un sommet dont est sorti une série de recommandations synthétisées dans un rapport remis aux présidents des sept parlements belges.

    C’est entre autres sur base de cette expérience qu’il en est venu à publier un essai ‘‘Tegen verkiezingen’’ (‘‘Contre les élections’’) destiné selon lui à dépasser le ‘‘syndrome de fatigue démocratique’’, notamment sur base de divers exemples historiques (Athènes durant l’Antiquité ou encore les républiques de Florence et de Venise à la Renaissance) et aller au-delà de ‘‘nos démocraties devenues impuissantes’’.

    Il est extrêmement frappant de voir combien cette idée traverse nombre de discussions, que ce soit parmi divers intellectuels et académiciens ou entre amis, autour de soi, une adhésion illustrative du profond dégoût – totalement justifié – que suscitent le clientélisme et la chasse ouverte aux postes rémunérés en vigueur chez les politiciens traditionnels. Mais si nous sommes d’accord avec David Van Reybrouck pour dire qu’une ‘‘démocratie qui se réduit aux élections est trop maigre’’, cette idée d’une démocratie par tirage au sort ne nous semble pas faire le tour de la question.

    Selon nous, le problème n’est pas le principe électif en lui-même, mais bien l’organisation même de ces élections et le cadre dans lequel elles se placent. Toutes les élections ne sont pas marquées par le népotisme et la soif de privilèges personnels qui caractérisent les institutions pro-establishment. Un exemple ? Les élections sociales qui désignent les délégués syndicaux dans les entreprises. En Belgique, aux dernières élections sociales (2012), 125.116 candidats (le double des élections communales) se sont présentés et 44.608 d’entre eux ont été élus. Pour ces élections, pas d’agences de publicité ni de coûteuses campagnes médiatiques, les délégués sont directement élus par leurs collègues sur base de leur dévouement quotidien. Voilà un exemple de démocratie à suivre.

    Ce rejet de l’élection de représentants était aussi un élément du fantastique mouvement d’occupation des places en Espagne lors du mouvement des Indignés, à l’été 2011 autour du slogan ‘‘¡Democracia Real YA!’’ (Une Vraie Démocratie Maintenant!), à la suite de l’enthousiasme du processus de révolution et de contre-révolution enclenché quelques mois plus tôt au Moyen-Orient et en Afrique du Nord.

    Ce mouvement pour la ‘‘démocratie réelle’’ exprimait une aspiration profonde pour une société où les gens disposent d’un véritable contrôle sur leurs vies et ne sont plus à la merci d’une poignée d’ultra-riches, de banquiers voleurs et de politiciens corrompus. Les assemblées populaires tenues sur des centaines de places à travers toute l’Espagne ont donné l’image vivante d’une multitude de personnes se rassemblant, discutant et prenant leurs propres décisions concernant leur avenir. En Grèce, à la même époque, les débats sur la place athénienne de Syntagma avaient pris une orientation similaire. Ces gigantesques assemblées populaires qui réunissaient quotidiennement des milliers de participants ont remis au goût du jour le processus de la discussion collective, un élément d’une importance cruciale qui est absent du principe de tirage au sort. La démocratie ne se décrète pas, elle se construit, et la formation politique par la discussion collective est une donnée essentielle. Seule la formation politique la plus large possible permet d’assurer que personne ne soit indispensable et donc qu’un représentant puisse être élu de façon à ce qu’il soit révocable à tout moment par la base qui l’a choisi.

    Mais dans le cadre des assemblées populaires du mouvement des Indignés, la méfiance était totale vis-à-vis de l’élection de représentants, un sentiment compréhensible suite aux multiples trahisons des dirigeants syndicaux ou des représentants de partis sociaux-démocrates ou staliniens, précisément par manque de contrôle démocratique au sein de ces structures. Cette absence d’élection de représentants a cependant empêché le mouvement de réellement se coordonner à l’échelle nationale. Il faut imaginer quelle serait la situation aujourd’hui, deux ans plus tard, si les diverses assemblées avaient démocratiquement élu des représentants au niveau local pour des réunions nationales du mouvement destinées à tracer des perspectives communes pour la lutte, avec une orientation vers la mobilisation de la base des syndicats qui cherchait, et cherche toujours, à dépasser le rôle de frein joué par les directions syndicales empêtrées dans la logique du syndicalisme de collaboration de classe.

    Pas de démocratie réelle sans démocratie économique !

    Plus fondamentalement, chaque mesure vers une plus grande démocratie se heurte à la dictature des marchés capitaliste. Ce système est génétiquement incapable de donner naissance à une démocratie puisque les intérêts de la majorité de la population entreront toujours en conflit avec le pouvoir exercé par l’infime minorité de propriétaires des moyens de production. Le fait que la lutte n’est pas été fondamentalement orientée sur cette question permet de comprendre pourquoi le mouvement des Indignés est retombé, de la même manière que le mouvement Occupy aux Etats-Unis qui avait marqué l’automne 2011.

    Les mobilisations de masse qui se sont produits depuis lors ont tous illustré la manière dont la révolte des masses conduit à la recherche d’un gouvernement alternatif. Pour nous, l’aboutissement de ce processus est l’instauration d’un gouvernement des travailleurs représentant les intérêts de la majorité de la population, et non pas ceux de l’élite. Et si nous faisons ici référence aux travailleurs, ce n’est pas par fétichisme marxiste, mais tout simplement parce que le mouvement organisé des travailleurs est le seul à pouvoir bloquer l’économie – et donc la base du pouvoir de l’élite capitaliste – à l’aide de la grève générale et des mobilisations de masse, pour pouvoir poser la question d’une nouvelle société où les secteurs-clés de l’économie seraient au mains de ce mouvement et fonctionneraient dans le cadre d’une planification démocratique. Cet élément de démocratie dans le processus de production est un point fondamental car, pour reprendre les mots du révolutionnaire russe Léon Trotsky : ‘‘une économie planifiée a besoin de démocratie comme le corps humain a besoin d’oxygène.’’ C’est cette absence de démocratie qui a conduit à l’effondrement des pays du Bloc de l’Est, étouffés par le cancer dictatorial bureaucratique.

    Dans le cadre de l’organisation de la lutte, des assemblées sur les lieux de travail, dans les quartiers, dans les écoles et dans les universités sont nécessaires pour poursuivre le combat en construisant un puissant mouvement impliquant le plus de monde possible en unifiant les travailleurs, les jeunes et les pauvres organisés démocratiquement par la base au travers de comités de base. Pour autant que ces comités soient reliés localement, régionalement et nationalement, toujours sous le contrôle des assemblées et avec des représentants sujets à révocation, ils peuvent progressivement passer d’organes de lutte à organes de pouvoir. Il y aurait ainsi une extraordinaire multitude de ‘‘parlements’’. Il suffit de voir comment les récents mouvements de masse ont fait appel les uns aux autres et ont été capables de constituer des sources d’inspiration à travers tout le globe pour être convaincu qu’une telle dynamique enclenchée dans un pays donné aurait inévitablement ces répercussions sur l’arène internationale, ce qui est une nécessité pour parvenir au renversement du système économique capitaliste. C’est cela que nous entendons lorsque nous parlons de société socialiste démocratique. Cette démocratie réelle privilégierait les intérêts de la population en utilisant les richesses de la société pour mettre fin à la pauvreté, au chômage et à la destruction de l’environnement.

  • USA : Grandes Victoires électorales pour Socialist Alternative!

    D’énormes opportunités politiques se présentent pour la classe des travailleurs

    Deux candidats de Socialist Alternative ont provoqué une onde de choc historique aux Etats-Unis la nuit du 5 novembre dernier. Ces deux candidats – Kshama Sawant à Seattle et Ty Moore à Minneapolis – ont mené des campagnes ouvertement anticapitalistes et socialistes, les campagnes de ce type les plus soutenues depuis des décennies dans une métropole du pays. Kshama Sawant a obtenu le résultat provisoire de 47% et Ty Moore celui de 37%.

    Par Bryan Koulouris, Socialist Alternative (CIO-USA)

    Les résultats annoncés sont encore provisoires, d’autres bulletins doivent encore être dépouillés au cours de ces deux prochaines semaines. En ce moment, les deux courses se jouent au coude-à-coude. Ty Moore en est à 130 voix seulement de la victoire ! Kshama Sawant, quant à elle, n’a obtenu que 4% de moins que son adversaire alors que seuls 38% des bulletins ont été dépouillés, et le reste pourrait fortement pencher à sa faveur.

    Au final, qu’importe le résultat, les suffrages recueillis par ces candidats ouvertement marxistes illustrent clairement quel est l’espace politique présent aux Etats-Unis sur base de la colère ressentie à l’encontre de l’establishment capitaliste.

    Le désaveu de l’establishment politique est gigantesque aux Etats-Unis, en conséquence de la Grande Récession et de la faiblesse de la ‘‘reprise’’ économique. Cela a bien entendu alimenté les deux campagnes. Le Shutdown du gouvernement a aussi provoqué une rage populaire qui a permis aux campagnes de Socialist Alternative de toucher la corde sensible des gens ordinaires. Durant le Shutdown, le taux d’approbation du Congrès est tombé jusqu’au taux historiquement bas de 5% ! Dans un sondage de l’agence Gallup, 60% des sondés ont déclaré qu’il fallait un nouveau parti aux Etats-Unis, un pourcentage qui n’avait encore jamais été atteint. Seuls 26% des sondés ont déclaré que les partis Républicains et Démocrates faisaient bien leur travail, là aussi un taux record, mais vers le bas.

    Nombreux sont les Américain qui se sentent découragés et démoralisés par ce système électoral pro-Big Business. Ces campagnes ont cependant démontré que des candidats indépendants et des travailleurs ordinaires peuvent défier l’establishment sans toucher un centime du patronat ! Ty Moore a récolté plus d’argent que sa principale rivale soutenue par le patronat, et Kshama Sawant a récolté près de 110.000 dollars, là où son adversaire en a mobilisé 230.196.

    Les campagnes de Socialist Alternative ont clairement montré qu’il est possible pour des travailleurs et les jeunes de s’organiser et de lutter ensemble pour changer le monde. Sur base de ce momentum, Socialist Alternative veut se construire, appeler à effectuer une donation et à rejoindre l’organisation afin de développer de nouvelles campagnes en faveur des ‘‘99%’’, selon le terme popularisé par le mouvement Occupuy, à l’instar de la lutte pour l’instauration d’un salaire minimum de 15 dollars, pour le droit de se syndiquer sans risque de se faire licencier et pour s’en prendra aux super-riches afin de financer un programme de création d’emplois et de transports en commun écologiques, entre autres.

    Les deux partis capitalistes que sont le parti Républicain et le parti Démocrates verront encore leur base de soutien s’amoindrir au cours des mois à venir, puisque de nouvelles coupes budgétaires dans la sécurité sociale et d’autres programmes populaires sont envisagés pour les mois à venir. A l’approche des élections de mi-mandat de 2014, ces campagnes menées par Socialist Alternative ont illustré l’énorme ouverture qui existe pour la présentation des candidats indépendants de la classe des travailleurs. Des coalitions de dirigeants syndicaux combatifs, de socialistes, d’écologistes et de groupes de défense des droits civiques devraient être construites dans chaque ville du pays afin d’organiser des mouvements et de déposer des candidats indépendants des deux partis du capital aux élections.

    Ces résultats électoraux – à l’instar du processus révolutionnaire au Moyen Orient et en Afrique du Nord, des révoltes ouvrières du Wisconsin et le mouvement Occupy – ont rendu possible ce qui paraissait impossible. Ils introduisent un tout nouveau processus dans la société américaine. Non seulement ces campagnes donnent naissance à un nouveau et puissant mouvement socialiste aux Etats-Unis, mais elles servent aussi de modèle qui contribuera à l’inévitable ascension d’un nouveau parti qui luttera contre les ‘‘1%’’ les plus riches : un parti de masse de la classe des travailleurs.

    Développement de l’audience pour les idées du socialisme

    De nombreuses personnes à gauche disent que les idées socialistes ne peuvent pas remporter un soutien massif dans leur pays. Ces campagnes prouvent qu’ils ont faux sur toute la ligne. Les sondages du Pew Research Center montrent sans cesse qu’une majorité des jeunes et des personnes de couleur aux USA préfèrent maintenant le ‘‘socialisme’’ au ‘‘capitalisme’’. Evidemment, cette conscience est teintée de confusion, ce que revêt ce terme de ‘‘socialisme’’ est peu clair, mais cela illustre que les gens en ont marre de l’inégalité croissante, de l’augmentation insupportable du coût de la vie et du système capitaliste lui-même.

    C’est ce qui permet de comprendre pourquoi les adversaires de Kshama Sawant et de Ty Moore ont à peine eu recours au ‘‘red baiting’’, cette pratique éprouvée aux Etats-Unis consistant à lancer un flot incessant de calomnies à l’encontre des communistes ou des anarchistes. Richard Conlin, conseiller communal sortant à Seattle, a préféré faire des commentaires sexistes et anti-immigrés à peine voilés à l’encontre notre camarade Kshama Sawant. Quant à Alondra Cano, candidate à Minneapolis, elle a préféré compter sur le soutien de ses amis de l’establishment et de l’immobilier plutôt que de se risquer à s’aventurer dans une campagne négative.

    Les idées socialistes sont clairement de retour, et Socialist Alternative détient maintenant une position unique pour aider à construire un nouveau mouvement pour le socialisme. Ce mouvement doit être lancé par les socialistes eux-mêmes, les plus qualifiés pour lutter pour les besoins de la classe des travailleurs. Socialist Alternative s’est démarqué du reste de la gauche par sa capacité à entrer en dialogue avec des travailleurs politisés en utilisant un langage compréhensible et basé sur le concret. Parallèlement, nous avons expliqué avec honnêteté que les réformes dans cette société ne peuvent être maintenues que si le pouvoir est arraché des mains des grandes entreprises et qu’un nouveau système basé sur la propriété publique et démocratique des 500 plus grandes entreprises est établi, une société socialiste démocratique.

    Construire le mouvement

    La campagne de Ty Moore dans le Ward 9 (9e district) de Minneapolis a été lancée en parallèle de l’importante campagne d’Occupy Homes Minnesota. Ty Moore et Socialist Alternative ont contribué à la fondation de cette organisation qui a défendu avec succès des propriétaires de maison menacés d’expulsion par les grandes banques et la police. Le centre de la ‘‘Zone sans expulsion’’ d’Occupy Homes se situait dans le Ward 9, une communauté ouvrière diversifiée, et les campagnes de Ty Moore et d’Occupy Homes se sont mutuellement renforcées.

    De même, à Seattle, la campagne de Kshama Sawant a contribué à placer les ‘‘Fight for 15’’, un mouvement de grèves et de manifestations de travailleurs à bas salaires, au cœur du débat politique. Socalist Alternative a énergiquement aidé à construire cette campagne en aidant concrètement les travailleurs en grève et en contrant les arguments des opposants à l’augmentation du salaire minimum. Quand des organisations de travailleurs ont pris l’initiative de lutter pour augmenter le salaire minimum jusqu’au seuil des 15 dollars de l’heure dans la banlieue de SeaTac, la campagne de Kshama Sawant a soutenu l’initiative avec énergie, ce qui a contribué à son succès historique.

    Enfin, les deux candidats à la mairie de Seattle, qui avaient passé sous silence cette question du salaire minimum au début de leurs campagnes, ont fini par soutenir – vaguement – la proposition. Le succès qu’a rencontré Kshama Sawant dans la maîtrise du débat politique a conduit le Seattle Times, le journal le plus lu de Seattle, à déclarer avec même la tenue des élections que ‘‘le vainqueur est déjà la socialiste Kshama Sawant’’.

    Le mouvement des travailleurs

    Ces campagnes indépendantes de la classe des travailleurs sont des leçons importantes pour le mouvement des travailleurs, qui traverse actuellement une crise sérieuse. Le mouvement des travailleurs est sous l’assaut des grandes entreprises, et les républicains du Tea Party tentent d’en finir définitivement avec les syndicats. Les politiciens démocrates sont quant à eux souvent les pionniers des coupes budgétaires, des privatisations et des autres attaques antisyndicales. Dans cette situation, le mouvement des travailleurs a besoin de renouer avec ses traditions de lutte et de présenter davantage de candidats ouvriers indépendants.

    Au lieu de cela, la direction de ces mouvements soutient le plus souvent les démocrates, soit par peur des républicains, soit par habitude, soit parce que beaucoup des membres de cette direction mènent eux aussi une vie luxueuse bien plus proche de celle des politiciens que de celle de ceux qu’ils sont censés représenter.

    Les campagnes de Ty Moore et de Kshama Sawant ont toutefois montré que les travailleurs en ont plus que marre de la politique traditionnelle et que leur soutien peut être acquis par des campagnes crédibles et des revendications concrètes. Ty Moore a obtenu le soutien actif du syndicat SEIU (Service Employees International Union, soit Union Internationale des Employés des Services en français, il s’agit d’un syndicat nord-américain représentant 2,2 millions de travailleurs aux États-Unis, à Porto Rico et au Canada) qui a joué un rôle essentiel dans la campagne. Kshama Sawant a reçu le soutien de 6 syndicats locaux, et une majorité du King County Labor Council (conseil du travail du comté de King, où elle se présentait) a voté pour la soutenir, sans cependant obtenir la majorité suffisante pour un soutien officiel.

    Lors des mois et années à venir, les syndicalistes seront la cible d’attaques continues contre leurs droits et leurs conditions de vie. Dans cette bataille, nous aurons besoin de manifestations, de piquets, de grèves et d’actions directes pour nous défendre. Les travailleurs devront lutter pour obtenir le contrôle démocratique de leurs syndicats et élire des dirigeants qui veulent vraiment résister à l’assaut capitaliste. Ces batailles illustreront le besoin pour les travailleurs d’une représentation politique indépendante, et les campagnes de Ty Moore et de Khsama Sawant montrent que les syndicats peuvent présenter des candidatures très populaires, ce qui représente un pas en avant vers un nouveau parti des 99%.

    Prochaines étapes

    Nombres de ceux qui ont soutenu Ty Moore et Kshama Sawant sont en rupture avec le parti démocrate, mais ne sont pas encore prêts à la quitter définitivement. Socialist Alternative continuera à clamer au sein des mouvements pour la justice sociale et des diverses coalitions de lutte que le parti Démocrate représente fondamentalement un parti pro-capitaliste, et que la classe des travailleurs ne devrait en aucun cas le soutenir, pas même les candidats de son ‘‘aile gauche’’.

    Nous avons urgemment besoin d’un parti des travailleurs lié aux mouvements sociaux, aux syndicats de lutte, aux organisations communautaires, aux écologistes et aux socialistes. Un pas concret pour y parvenir serait de former des coalitions à travers tout le pays, liées entre elles à l’échelle nationale, afin de présenter 100 candidats indépendants des travailleurs pour les élections de mi-mandat de 2014. Les syndicats qui ont soutenu les campagnes de Ty Moore et de Kshama Sawant, comme beaucoup d’autres, devraient présenter des listes complètes de candidats aux élections de mi-mandat ainsi qu’aux élections nationales et locales.

    Le capitalisme américain est plongé dans une profonde crise économique et sociale. L’establishment politique est discrédité, et son système gouvernemental semble ruiné. Une énorme colère se développe contre l’inégalité, le racisme, le sexisme et l’homophobie. La destruction de l’environnement s’intensifie. La situation nécessite une alternative.

    Si les socialistes, les écologistes et les dirigeants syndicaux ne capitalisent pas sur cette ouverture, alors la droite le fera. Par exemple, un candidat libertarien (droite radicale) pour le siège de gouverneur de l’Etat de Virginie a remporté plus de 145.000 votes lors de ces élections. Pire encore, des rapports montrent que des groupes ouvertement d’extrême droite se développent.

    La situation actuelle exige une riposte urgente. Nous avons besoin de construire activement le mouvement pour le socialisme avec de plus larges coalitions des 99% pour contrer l’agenda des capitalistes. Les incroyables résultats électoraux de Ty Moore et de Kshama Sawant sont de brillants exemples qui montrent la voie à suivre.

  • USA : Les socialistes révolutionnaires ouvrent la voie vers une représentation politique des travailleurs indépendante du capital

    L’an dernier, les États-Unis ont été moins plongés dans la tourmente économique que l’Union Européenne. Il ne faudrait pourtant pas en conclure que des changements fondamentaux n’y sont pas à l’œuvre. Ce bon vieux ‘‘Rêve Américain’’ gît sur le sol, brisé. L’impressionnant mouvement Occupy qui a déferlé sur le pays en 2011 passera à l’Histoire comme l’une des premières manifestations de ce virage dans la société américaine.

    Par Bart Vandersteene

    L’économie sous perfusion

    L’élite américaine est parvenue à repousser une crise similaire à celle qui frappe l’Union Européenne à l’aide d’une intervention gouvernementale sans précédent. Sans cette ingérence de la part d’autorités publiques qu’ils détestent pourtant tellement, tous les grands adeptes du ‘‘libre marché’’ et du libéralisme auraient assisté, impuissants, à l’effondrement total de leur système. Sans l’intervention du gouvernement et l’instauration d’une politique monétaire basée sur l’injection permanente d’argent dans le système, le chaos économique se serait abattu sur le pays de même qu’une révolte sociale de grande ampleur.

    Avec une croissance de 2,2% en 2012, le pire semble être passé. D’ailleurs, commentateurs et politiciens bourgeois proclament l’arrivée de la fin de la crise: le déficit budgétaire US est passé de près de 10% à 4%, le Dow Jones a atteint un niveau plus élevé que celui d’avant la crise et le taux de chômage a chuté de 9,4% en 2009 à 7,4% aujourd’hui.

    Pourtant, la crise n’a pas disparu. Pas moins de 5% de la population a perdu son logement, les investissements privés sont à un niveau excessivement bas malgré des taux d’intérêts historiquement bas et les politiques d’austérité font des ravages à tous niveaux. De l’ensemble des emplois créés depuis 2010, les bas salaires en représentent… 76% ! Il s’agit d’emplois temporaires qui fondent comme neige au soleil dès que l’économie cahote à nouveau, avec des salaires qui descendent régulièrement sous les 11 $ de l’heure (soit 8,22 €). Un quart des travailleurs américains gagnent moins que le salaire minimum en vigueur en Belgique. Pour tous ceux là, le Rêve Américain a cédé la place à une longue et pénible lutte pour la survie. En 2007, 55% de la population américaine décrivait sa situation financière comme étant ‘‘bonne’’ ou ‘‘parfaite’’. Ils ne sont aujourd’hui plus que 32%. Les autorités sont toujours tenues de maintenir l’économie sous perfusion pour éviter le pire. Les moyens de la collectivité ne sont pas orientés vers l’investissement public et la création d’emplois, mais vers l’impression d’argent pour maintenir au plus bas les taux d’intérêt et ainsi donner du temps aux banques pour se nettoyer quelque peu avant l’arrivée de la nouvelle vague de la crise.

    La faillite de Detroit constitue-t-elle un précédent?

    En juillet, la faillite de la ville de Detroit, autrefois le berceau de l’Amérique industrielle moderne, fut un coup dur pour le prestige des Etats-Unis. C’est l’exemple le plus extrême de l’effondrement de la société américaine. Pendant des décennies, Detroit a constitué un réservoir à profits pour les grandes entreprises du secteur automobile. Aujourd’hui, la ville est désertée et polluée.

    Cette ville jadis synonyme de prospérité et de progrès connaît un terrifiant taux de chômage (50%) tandis que deux tiers des enfants vivent sous le seuil de pauvreté. Conséquence de la désintégration du filet social suite à de nombreuses années de coupes dans les budgets des services publics et des services sociaux, la criminalité y est cinq fois plus importante que la moyenne américaine. 47% de la population est analphabète. Mais Detroit n’est que le sommet d’un iceberg titanesque. Des dizaines de petites villes sont au bord de la faillite et plusieurs États sont aux prises avec une énorme montagne de dettes. Dans la pratique, une faillite signifie que de nombreux engagements des autorités sont en péril, comme le paiement des pensions.

    ‘‘15 dollars de l’heure et un syndicat’’

    Cette année, des dizaines d’actions se sont produites sous ce slogan, sur base de la colère des travailleurs des secteurs à bas salaires (notamment dans les fast-foods). Le salaire minimum fédéral est actuellement de 7,25 $ de l’heure (5,5 euros). Si le salaire minimum de 1968 avait suivi l’inflation, il serait aujourd’hui de 16,8 dollars. Impossible de se construire une vie décente avec de tels salaires. Des millions d’Américains combinent donc plusieurs emplois pour pouvoir joindre les deux bouts, ce qui explique le soutien rencontré par les actions en faveur d’un salaire minimum de 15 $ de l’heure. Il s’agit aussi du slogan principal de Socialist Alternative à Seattle.

    Socialist Alternative : une belle percée à Seattle, et maintenant à Minneapolis?

    Démocrates et Républicains ne représentent que les deux facettes d’une même médaille : celle d’une politique aux ordres de l’élite capitaliste. Il a fallu une campagne très intelligente à Obama & Co pour réussir à faire croire en la perspective d’un ‘‘changement’’ en 2008. Mais Obama n’a rien changé, et sa popularité est très fortement retombée. Les promesses non tenues ont alimenté une grande frustration dont le danger est qu’elle soit instrumentalisée aux élections de mi-mandat de 2014 par les Républicains et, surtout, par les populistes de droite du Tea Party. Ils ne manqueront pas d’accuser des boucs émissaires tels que les immigrés, les demandeurs d’emploi, les syndicats,…

    Mais cela peut être différent. L’espace pour une alternative politique de gauche radicale est étonnamment grand. Nos camarades de Socialist Alternative, malgré leurs moyens limités, ont pu s’en rendre compte dans leurs campagnes menées pour les élections locales dans les grandes villes que sont Seattle, Minneapolis et Boston. Défendre un programme explicitement anticapitaliste et socialiste ne constitue pas un obstacle.

    À Seattle vient de se dérouler un premier tour destiné à désigner les deux candidats du second tour du 7 novembre. La candidate de Socialist Alternative, Kshama Sawant, a obtenu le résultat impressionnant de 35% (44.458 voix). C’est un résultat sans précédent pour un tel type de campagne. Un commentateur politique en parlé en ces termes: ‘‘ce n’est rien de moins qu’un tremblement de terre. Kshama a tracé une nouvelle voie pour des candidats indépendants qui prennent directement en main la défense des intérêts et des thèmes de la classe ouvrière.’’ Des dizaines de militants et de volontaires sont maintenant sur le pied de guerre pour la dernière ligne droite vers le second tour du 7 novembre.

    Nous sommes tout aussi impatients de voir quels seront les résultats obtenus à Boston et Minneapolis. Ty Moore, candidat de Socialist Alternative à Minneapolis, y affrontera le candidat démocrate Alondra Cano dans la neuvième circonscription de cette ville de 400.000 habitants. Ty et Socialist Alternative ont acquis une certaine renommée au fil du temps grâce à leurs campagnes, notamment contre les expulsions et les saisies immobilières. Ces dernières années, des millions de familles ont été littéralement foutues à la porte de chez elles faute de pouvoir rembourser leurs hypothèques, la plupart du temps en raison de clauses scandaleuses imposées par les banques lors de la conclusion des prêts. Essentiellement sous l’impulsion de Socialist Alternative, le mouvement Occupy s’est orienté sur cette question et a lancé ‘‘Occupy Homes’’. De plus, la campagne de Ty bénéficie du soutien de la principale centrale syndicale de Minneapolis et de nombreux militants locaux. Ty a une petite mais réelle chance de se faire élire au conseil communal.

    Socialist Alternative est la seule organisation de gauche radicale américaine à avoir correctement estimé les profonds changements en cours dans la société et les possibilités que cela ouvrait sur le plan politique. Le mouvement Occupy a laissé éclater au grand jour la colère et la rage de millions de personnes. La tonalité du débat politique a été puissamment modifiée au sein de la population. La jeunesse refuse de plus en plus la logique du système qui l’étrangle avec des prêts étudiants hors de prix et des emplois aux salaires de misère tandis que les travailleurs s’opposent à l’austérité et aux attaques antisyndicales. C’est sur ce contexte que ce sont rajoutés les scandales des révélations de Bradley-Chelsea Manning sur les crimes de guerre de l’armée US et du programme de surveillance massif de l’administration Obama.

    Dans une déclaration qui a suivi le succès du premier tour à Seattle, Socialist Alternative a notamment expliqué reconnaître que ‘‘les élections ne sont pas l’endroit idéal pour faire de la politique et que c’est en soi insuffisant pour aboutir à un réel changement. Le pouvoir du Grand Capital et des médias contrôle la politique sous le capitalisme. L’histoire nous montre que chaque victoire des travailleurs a été remportée par des mouvements de masse. (…) Le développement de la lutte sociale dans les mois à venir déterminera le résultat exact des élections.

    La ‘‘faisabilité’’ se mesurera à l’aune de l’organisation des jeunes et des travailleurs ainsi qu’à l’augmentation d’actions, de grèves, etc. (…) Nos campagnes constitueront un exemple vivant de la manière dont la gauche et les travailleurs peuvent mener des campagnes indépendantes et servir de modèle pour se répandre dans tout le pays. Ce n’est que l’avant-goût de la prochaine vague de résistance qui va défier la politique des deux partis du Big Business.’’

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