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Tag: Norvège
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Norvège : Les partis de droite remportent les dernières élections
Plus tôt ce mois-ci, en Norvège, le Parti Conservateur a gagné les élections, et pour la première fois, le Parti du Progrès, raciste et populiste, fera son entrée au gouvernement. Les conservateurs (Høyre) sont passés de 30 à 48 sièges (26,8%). Les 4 partis qui envisagent la formation du nouveau gouvernement (Conservateurs, Parti du Progrès, Parti des chrétiens et Libéraux) ont obtenu ensemble 96 sièges sur 169. Les partis qui composaient l’ancien gouvernement (Parti travailliste, Parti Socialiste de Gauche et Parti du Centre) ont perdu 14 sièges et n’en partagent plus que 72. Le Parti Vert a obtenu son premier siège. Le taux d’abstention a presque atteint les 80%.
Rättvisepartiet Socialisterna (CIO-Suède)
Que se cache-t-il derrière ces résultats ? La réponse la plus claire nous est donnée par un candidat des Verts à Oslo : ”Il n’y a aucune différence entre les Travaillistes et les Conservateurs… les deux partis suivent une politique commune, mais tentent d’entretenir le mythe que le problème le plus important cette année est de choisir entre leurs dirigeants, Jens Stoltenberg ou Erna Solberg.”
Depuis 2005, les gouvernements travaillistes ont suivi les mêmes politiques que les gouvernements de droite sociaux-démocrates en Suède et dans d’autres pays. Des ”réformes de marché” ont été introduites dans les services de santé, entraînant privatisations, fermetures et fusions d’hôpitaux. La politique d’immigration est devenue plus dure, et le pays a participé à la guerre en Afghanistan avec les Etats-Unis. Comme en Suède, l’environnement est aussi menacé, notamment par les forages pétroliers au nord.
Le gouvernement sortant présentera dans quelques semaines un budget incluant une baisse des impôts sur la fortune et sur les héritages de plus de 250.000 euros. Sur ce sujet, les alternatives des deux gouvernements ne sont que très peu éloignées.
Le plus grand perdant est le Parti Socialiste de Gauche (SV), qui pendant ses 8 ans au gouvernement a pris toute responsabilité pour la politique des travaillistes. Le SV a obtenu le pire résultat de son histoire, et a failli ne pas dépasser le seuil des 4% (il a obtenu 4,1%). Un de ses membres, Hallgeir Langeland, qui a perdu son siège, a admis au journal Aftenposte que c’était le département des Finances qui était aux commandes du dernier gouvernement. Il pense aussi que ”la politique d’asile a été agressivement menée par le FrP (le Parti du Progrès)” et que les travaillistes et les conservateurs ont pris soin de ne pas critiquer le FrP.
Le nouveau gouvernement sera annoncé le 14 octobre. Il est clair que les conservateurs et le FrP y siégeront. Le FrP est passé de 23,9% aux précédentes élections à 26,3% celles-ci, mais il entrera quand même au gouvernement pour la première fois. Il faut considérer l’acceptation de ce parti comme un ”parti comme les autres” par les autres formations politiques comme un avertissement. Il existe nombre de similarités avec les Démocrates Suédois et d’autres partis racistes en Europe, mais aussi des différences. L’approche populiste du FrP consiste à insister sur le fait que la Norvège devrait dépenser davantage des revenus issus de son pétrole, notamment dans l’infrastructure. Le dirigeant du parti, Siv Jensen, a soutenu de manière enthousiaste le Tea Party, parti d’extrême droite américain, et a parlé durant sa campagne d’une ”hystérie climatique”.
Mais le leitmotiv du FrP, ce sont ses arguments racistes anti-immigration. Siv Jensen s’est exclamé lors d’une visite à Malmö en Suède que la ville était sous le joug de la Sharia. Même pendant la campagne électorale, des représentants du parti ont défendu l’importance de protéger ”la culture norvégienne” contre le multiculturalisme. Le FrP coopère ouvertement avec des organisations islamophobes. Plus précisément, le parti exige de limiter le nombre de réfugiés entrant dans le pays à 3000 par an, et veut les garder enfermés dans des camps. Ils veulent aussi limiter les possibilités pour les familles d’immigrés de rejoindre leurs proches, et limiter les mariages des immigrés.
Ces propositions ne deviendront pas directement des priorités gouvernementales. Mais elles font partie du débat et mettent la pression sur les autres partis, qui ne s’offusquent pas du racisme du FrP.
Ce sont des Travaillistes, et particulièrement des jeunes, qui ont été pris pour cible lors du massacre du terroriste raciste Anders Behring Breivik et les bombardements de juillet 2011. Les Travaillistes ont reçu un soutien important après ces attaques. Mais la colère et la tristesse générales qui ont marqué 2011 n’ont pas été organisées en une réelle campagne contre le racisme, et par conséquent le FrP, dont Breivik a fait partie des années durant.
Une majeure partie du manifeste de Breivik rejoint la campagne de haine contre l’islam et le socialiste que mène le FrP. Le dilemme des Travaillistes, c’est que la direction du parti voulait condamner moralement le racisme, mais sans le lier à la lutte contre l’injustice et les politiques de droite, qui forment le terreau de la xénophobie. Le FrP s’en est sorti en faisant profil bas pendant un moment, mais est vite revenu à ses racines.
La perte de votes pour les Travaillistes et le Parti Socialiste de Gauche n’illustrent pas l’impopularité des idées de gauche, au contraire ; elle met doigt sur l’urgence d’une vraie alternative socialiste dans la politique Norvégienne.
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Norvège: massacre du terroriste d’extrême-droite – Comment devrait répondre le mouvement des travailleurs?
Le massacre commis par l’extrémiste de droite Anders Behring Brevik à l’île d’Utøya, à une quarantaine de kilomètre d’Oslo, la capitale de Norvège, a choqué et horrifié partout où la nouvelle a été entendue. C’était un acte de cruauté à peine imaginable. De sang froid, Behring Brevik a tiré et tué des dizaines de personnes, principalement des jeunes, et en a blessé des dizaines d’autres. Aujourd’hui, le choc et la peine sont les sentiments dominants en Norvège. Beaucoup de questions demeurent sans réponse. Qu’il y-a-t-il derrière le terrorisme d’extrême-droite ? Comment le mouvement des travailleurs et les marxistes doivent-ils répondre ?
Per-Åke Westerlund, Rättvisepartiet Socialisterna (CIO-Suède)
Anders Behring Breivik a préparé son attaque pendant presque 10 ans, en combinant les méthodes de deux massacres précédents – l’attaque à la bombe l’Oklahoma par Timothy McVeigh et la fusillade responsable du massacre à Columbine. Tout comme McVeigh, Anders Behring Breivik s’est construit une énorme bombe pour s’en prendre à des bâtiments du gouvernement et, tout comme pour le massacre de Columbine, il a tiré sur de jeunes victimes innocentes, de sang froid. L’attaque terroriste d’Oslo a été conçue pour attirer un maximum d’attention.
Haine du “marxisme culturel” et de la “colonisation islamique”
Quelques heures avant l’attaque, Behring Brevik avait envoyé les 1.500 pages de son ‘manifeste’ d’extrême-droite à des destinataires choisis, et avait posté une vidéo sur youtube. Le manifeste contient également une sorte de journal intime commencé en 2002. Les principaux titres du manifeste sont éloquents et s’en prennent au ‘‘marxisme culturel’’ et à la ‘‘colonisation islamique’’.
Behring Breivik déteste le marxisme, l’internationalisme et l’Islam. Sur Internet, il s’est décrit comme ‘‘conservateur’’ plutôt que nazi ou néolibéral. C’est un chrétien pratiquant, un franc-maçon et, de 1999 à 2006, il a été membre du Parti du Progrès, un parti raciste, jusqu’à récemment encore le deuxième plus grand parti de Norvège. Il n’a pas caché son admiration pour le politicien hollandais islamophobe Geert Wilders, et a essayé de lancer une branche norvégienne de l’English Defence Ligue, la Ligue de défense anglaise, un groupe d’extrême-droite anglais fondé en 2009. Il était également actif sur le site Web nazi suédois nordisk.nu.
Le Parti Travailliste, au gouvernement en Norvège, ainsi que son organisation de jeunesse, AUF, représentaient le mouvement des travailleurs aux yeux de Behring Breivik, et ils ont donc été ses cibles. Par conséquent, il est nécessaire pour les syndicats, les organisations et les militants de gauche de discuter de ces événements et des initiatives à prendre. De leur côté, les conservateurs de l’opposition ne savent pas quoi dire et se limitent à des expressions vides concernant la démocratie et la défense de la Norvège.
Au début, les forces de la réaction ont tenté de rejeter le blâme pour le massacre sur d’autres. En Suède, l’attaché de presse des Démocrates Suédois (extrême-droite), tous comme des journaux tels que le Dagbladet en première page ou comme le commentateur politique Henrik Brors, ont bien vite identifié des islamistes comme étant responsables des attaques. Maintenant, médias et politiciens pro-establishment parlent seulement de l’extrémisme, en évitant généralement de discuter des idées et des motivations de droite de Behring Brevik. L’éditorial du Dagens Nyheter du 24 juillet a même tenté d’assimiler le massacre d’Olso avec une ‘‘menace’’ imaginaire de ‘‘l’extrémisme de gauche’’. En fait, tant Behring Breivik qu’Al-Qaeda représentent les réactionnaires et les idées de droite contre le mouvement des travailleurs, les droits démocratiques et les droits des femmes.
Les véritables socialistes s’opposent au terrorisme d’individus ou de groupes, de même qu’ils s’opposent au terrorisme d’Etat qui est l’œuvre de l’impérialisme américain et de ses alliés, y compris la Suède et la Norvège. Les attaques terroristes d’Oslo sont aussi choquantes pour la Norvège que le 9/11 l’a été aux USA ou que l’a été le meurtre du premier ministre Olof Palme en Suède en 1986.
En Norvège, la solidarité avec les victimes de Behring Breivik s’est immédiatement exprimée, notamment illustrée par ces propriétaires de bateaux qui ont risqué leurs vies afin de sauver les jeunes qui avaient sauté dans les eaux entourant l’île pour se sauver du terroriste armé. En une expression d’incrédulité et de sympathie avec les jeunes assassinés, des montagnes de fleurs ont été déposées à l’extérieur des bureaux et des bâtiments des sociaux démocrates du parti Travailliste et dans les églises. C’est un élément révélateur du potentiel des travailleurs et de la jeunesse pour agir contre la terreur de droite et le racisme ainsi que contre les conditions sociales qui les provoquent.
Unité du mouvement des travailleurs contre les idées réactionnaires
Le terrorisme est essentiellement un produit de la société. Les anciennes sociétés basées sur l’Etat-Providence en Norvège et en Suède ont petit à petit été détruites, avec une extension des pénuries de moyens pour pourvoir aux besoins sociaux et la création de nouvelles injustices. En l’absence d’organisations de travailleurs capables de mener campagne en unissant ceux-ci pour résister au néolibéralisme et au système dans son ensemble, l’espace a été créé pour que des racistes et des extrémistes de droite puissent en profiter pour blâmer de commodes boucs émissaires. La droite populiste, les racistes, les néonazis et quelques fondamentalistes chrétiens s’en prennent aux immigrés, aux minorités, aux travailleurs et aux militants de gauche et les rendent responsables de la crise croissante que connaît la société. Les politiciens de l’establishment préparent le terrain sur lequel se développe ce climat réactionnaire en menant des politiques qui ont pour conséquence de traiter durement les réfugiés et de miner la solidarité dans la société à coups d’attaques contre les malades, les chômeurs, et ainsi de suite.
Pour couper court au développement des idées et organisations réactionnaires, ainsi que pour s’en prendre au terreau pour le terrorisme de droite, il faut une campagne du mouvement des travailleurs, uni internationalement. Combattre le terrorisme, c’est aussi combattre la guerre, la mondialisation capitaliste et le racisme. C’est lutter pour des conditions de vie décentes pour tous, pour de bons salaires, et pour une société qui réponde aux besoins de chacun.
Cela doit commencer dès maintenant, par des mobilisations contre l’extrême droite et le terrorisme inspiré par l’extrême-droite, et aller en direction d’une alternative socialiste démocratique contre la dictature des marchés capitalistes.