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Tag: Métallos
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Laminoirs Longtain: Fausse reprise mais vraie saignée sociale.
La fermeture des laminoirs Longtain a fait du bruit dans la province de Hainaut et en Wallonie mais, d’après nous, certainement pas assez. Les échos des cris de révolte des travailleurs en lutte sont comme étouffés ou, en tout cas, largement déformés par la presse traditionnelle. Il ne s’agit pas ici d’une simple faillite. Si on se penche un peu sur l’histoire de l’éphémère reprise par Stéphane Jourdain (homme d’affaire de la région) on s’aperçoit très vite qu’il y a anguille sous roche. Les manoeuvres financières employées par cet ancien membre du conseil d’administration du cercle de lorraine pour, encore et toujours, s’en mettre plein les poches sont à la limite de la légalité voir carrément illégales. Et cela s’est bien sûr fait au détriment des travailleurs du site qui ne réclamaient qu’une chose: pouvoir reprendre le travail dans des conditions décentes.Par Max (Mons)
Récapitulatif:
Janvier 2015: annonce d’une faillite de Condesa Belgique (groupe espagnol leader sur le marché européen du tube en métal destiné à l’industrie), 110 emplois sont menacés.
Mars: suite à l’ouverture d’une première procédure de réorganisation judiciaire (PRJ), le tribunal de commerce accepte la proposition de Jourdain. Le voilà actionnaire majoritaire de la société qui bat de l’aile. Directement, il clame ses intentions de relancer l’entreprise et parle de reprendre 36 travailleurs pour, l’année suivante, en embaucher d’autres. Mais les choses ne se passent soit disant pas comme prévu. Prétextant une mauvaise évaluation des profits potentiels et des coûts de production dans les conditions actuelles ainsi qu’un nom respect de la loi en matière de conditions de rémunération des travailleurs, il commence à révéler de plus en plus ses vraies intentions. Une destruction totale des acquis sociaux des salariés pour rogner un maximum sur les coûts de production s’annonce. Les travailleurs qui se sont déjà mis en lutte une première fois lors de la PRJ ne se laisseront pas faire et reprennent la lutte. Jourdain dira bientôt qu’il a ”fait une erreur” avec cette reprise. Mais nous ne sommes pas dupe, nous ne pouvons pas croire une seconde que tout cela n’est pas volontaire et calculé à l’avance, en voici la preuve.
Avril – juillet: il signale aux travailleurs le transfert des avoirs de l’entreprise dans une nouvelle entreprise. Pourtant, l’entreprise est dans les faits scindée en deux. D’un coté une entreprise du nom de Vieux Waleffe s.a. (société de gestion immobilière) et de l’autre CCB (SPRL Condesa Commercial Belgium). Jourdain affirme aux travailleurs que tout les avoirs appartiennent désormais à CCB. En fait, il s’agit d’un mensonge de plus car l’immobilier de l’entreprise (les bâtiments et terrains, estimés à 17 millions d’euros) reste sous la propriété de Vieux Waleffe. Cette dernière manoeuvre lui sera bien utile lorsqu’il déclarera CCB en faillite. Une nouvelle PRJ est lancée tandis que la lutte des travailleurs continue, eux qui s’attendaient à une pareille nouvelle sous peu avec l’inquiétude qui y est liée. Comme si cela ne suffisait pas, Jourdain, dont l’audace n’a d’égal que ses capitaux, annonce qu’il se présente comme candidat repreneur de sa propre entreprise! Il aurait pu choisir de descendre directement sur le site de production pour cracher au visage de chaque travailleurs mais il a encore une fois préféré aller se cacher derrière la loi qui permet visiblement plus que ce qu’il est difficile de se l’imaginer en matière de faillite et reprise… Évidement, s’il décide de procéder à ce jeu infâme c’est parce que son intérêt y est grand, en reprenant une nouvelle fois l’entreprise, il peut de nouveau imposer de nouvelles conditions salariales et de travail (baisse de la rémunération, abandons de primes, annulation de l’ancienneté,…). Ce joli package anti-social ne passe pas auprès des travailleurs et des syndicats.
Aout: la lutte s’intensifie et une occupation du site se met en place. Jourdain se saisit alors de l’appareil policier pour déloger les travailleurs de l’intérieur du site. Mais cela ne les arrête pas pour autant: ils décident de bloquer l’usine depuis l’extérieur. Tandis que la police use de répression et menace d’amendes les membres du personnel des laminoirs, la région Wallonne, elle, est bien tendre avec le “repreneur” lorsqu’elle lui revend sans aucun garde-fou, via la Sogepa (Bras financier de la R.W.), les parts qu’elle possédait dans l’entreprise (49,9% des actions) en laissant à Jourdain 2 ans pour rembourser l’équivalent de 1,75 millions d’euros… Les délégués dénoncent la passivité de la région Wallonne qui devrait, d’après eux, réclamer l’argent immédiatement et imposer à celui qui est maintenant l’unique actionnaire l’octroi des volets sociaux nécessaires pour les licenciés.
C’est dans ce contexte que nous les avons rencontrés pour recueillir les propos résumés plus haut et aussi ceux que voici: un matin les travailleurs ouvrent les bureaux de l’entreprise pour y découvrir que les données informatiques concernant les commandes éventuelles et les chiffres nécessaires à l’élaboration d’un dossier de reprise en bonne et due forme ont disparu. Cinq ordinateurs ne sont plus là, il n’y a pas non plus traces d’effractions. Tout laisse à penser que ce vol a été commis pour le compte de Jourdain qui a envoyé des gens pour empêcher l’organisation des travailleurs de se servir de ces chiffres. Bien évidement, on ne peut accuser sans preuves mais il faut bien avoir en tête que cette pratique est assez courante dans ce genre d’affaire.
Pour les travailleurs des laminoirs, l’affaire est maintenant devenue très claire voir transparente: Jourdain n’a jamais eu l’intention de relancer quoi que ce soit. Il cherchait simplement à faire une plus-value financière immobilière importante en rachetant à bas prix une société en faillite située sur des terrains qui valent plus une fois revendus séparément du fond de commerce. Pour avoir suivis
d’autres conflits et d’autres luttes sur d’autres entreprises, nous ne nous étonnons plus de ce genre de manigances mais nous sommes par contre à chaque fois toujours autant révoltés! Et ne doutons pas que si les relais médiatiques traditionnels (Tv, radio, presse grand tirage,…) rentraient plus dans le détail de ce genre d’affaire au lieu de les survoler par soucis ”d’objectivité” en omettant les points cruciaux que sont la perte des acquis sociaux, le non respect des procédures de licenciement et le jeu financier des reprises à répétition, il y aurait bien plus de gens solidaires des travailleurs de ces entreprises. L’indignation que suscite la révélation des dessous de ce genre d’affaire est légitime et doit être utilisée à la construction d’un mouvement ouvrier fort pour faire face aux prochaines attaques patronales.Nous ne pouvons pas laisser impunément agir les Jourdain et Cie dont la soif de profit s’assouvit au dépens des conditions de travail des plus faibles. Voilà ce que ce système a à offrir à la classe ouvrière! Le PSL milite activement pour un changement de société afin d’en finir avec l’exploitation du travail, cela nécessite un rapport de force favorable à notre classe qui ne sera possible que parce que les exploités l’auront construit dans l’unité!
Sources:
– Manage: les Laminoirs de Longtain vont connaître une deuxième vie
– Laminoirs de Longtain: trois mois pour trouver un repreneur
– Bois-d’Haine: les Laminoirs de Longtain à nouveau en réorganisation judiciaire
– La Louvière: retour à la case départ pour les Laminoirs de Longtain
– Jourdain s’est engagé à racheter les parts de la Sogepa dans les Laminoirs de Longtain
– Longtain à Bois d’Haine: la police est venue demander la fin de l’occupation -
Afrique du Sud. En défense des métallos : stop aux mensonges!
Les patrons, les politiciens capitalistes de l’ANC (Congrès national Africain) et la DA (Alliance Démocratique) et les médias hurlent d’une même voix contre les travailleurs du métal. Ils dénoncent leur grève en coeur et blâment les métallurgistes d’être responsables de tous les problèmes de l’économie capitaliste sud-africaine. Les médias fourmillent d’experts pour se prononcer à ce sujet, mais ce ne sont en fait qu’un ramassis de porte-paroles du capitalisme.
Ces «experts» affirment tous que la grève des métallurgistes va « paralyser l’économie » et causer la ruine de l’Afrique du Sud. Cela est-il vrai ? Non! Il s’agit d’un non-sens. Ces mensonges visent à tenter de monter la population contre la grève, les métallurgistes et leurs syndicats. La réalité, c’est que ce sont les patrons qui sabotent l’économie.
La “violence” des gréviste ?
Afin d’aider à faire entrer ces mensonges dans la tête des gens, la grève est dépeinte dans les médias comme étant “violente”. Les “experts” aiment à parler du “droit au travail”, c’est-à-dire le droit à recourir à des jaunes, des briseurs de grève, et à saper la grève! L’Alliance Démocratique veut même faire adopter une loi disant que si une grève est “excessivement” violente, elle ne serait alors plus protégée par la loi, ce qui permettrait aux patrons de licencier les grévistes sans le moindre problème.
Cette proposition de la DA ouvre grand la voie à l’utilisation d’agents provocateurs de la part des patrons et des politiciens capitalistes. Si une telle loi est adoptée, tout ce qu’il conviendra de faire pour briser une grève sera d’envoyer des voyous engagés par les patrons pour causer des problèmes afin de pouvoir déclarer la grève non-protégée et permettre ainsi de menacer les grévistes de licenciement s’ils ne reprennent pas le travail. L’Alliance “Démocratique” n’est intéressée que par la défense des droits et privilèges des patrons.
Qui crée les richesses de la société ?
D’où provient toute la richesse de l’économie ? Fondamentalement, il s’agit de la nouvelle valeur ajoutée par les travailleurs dans le processus de leur travail – en particulier dans le secteur de l’industrie manufacturière. Les “experts” affirment que cette grève sera grandement dommageable puisque l’industrie manufacturière représente 15% de l’économie sud-africaine. Cela signifie donc que 15% de la production économique du pays est générée par 230.000 métallurgistes uniquement dans un pays de 52 millions de personnes !
Pourquoi les “experts” ne louent-ils pas cette énorme contribution à la richesse du pays et aux profits des patrons de la part d’un si petit nombre de travailleurs ? Les métallurgistes doivent être les plus généreux du pays pour être responsables de 15% de l’économie en recevant des salaires si misérables… Ces données illustrent en réalité l’extraordinaire surexploitation dont sont victimes les métallurgistes, exploités par des patrons si avides de profits qu’ils se battent bec et ongles pour éviter une modeste augmentation salariale de 12 à 15% !
De quoi parlent-ils lorsqu’ils se réfèrent à “l’économie” ?
Dans le cadre de la lutte des patrons contre les travailleurs, ils essaient de nous rendre la situation plus confuse à l’aide de prétendus “experts” économiques. Les “experts” adorent parler “d’économie”. Mais à chaque fois qu’ils utilisent cette expression, les travailleurs doivent entendre sonner l’alarme! Les “experts” ne sont parlent pas vraiment de “l’économie”, mais plutôt des intérêts patronaux au sein de l’économie. Ces intérêts ne sont pas identiques à ceux des travailleurs au sein de cette même économie. Le secteur manufacturier représente 15% de l’économie. Après la grève, même si les métallos parviennent à arracher leur augmentation de salaire et la satisfaction d’autres revendications, ce secteur représentera toujours 15% de l’économie. La seule chose qui va changer, c’est que la part de ces 15% qui revient aux patrons du secteur en tant que profits sera plus faible et la part revenant aux métallurgistes sous forme de salaire sera plus élevée.
La seule raison pour laquelle le secteur se contracterait en raison de salaires plus élevés pour les métallurgistes, ce serait à cause du sabotage des patrons. Les patrons peuvent décider de se séparer de travailleurs ou de fermer des usines afin de restaurer leurs profits. Ils chercheraient, en d’autres termes, à saper les acquis de la grève. Ce serait là l’œuvre des patrons, et en rien une conséquence de la grève.
La grève empêche-t-elle les patrons d’investir ?
La réponse habituelle des “experts” est de dire que si les patrons ont de plus faibles bénéfices, alors ils ne seraient pas en mesure d’investir et de créer de nouveaux emplois. Eh bien, tout ce que nous pouvons dire à cela est : qu’est-ce qu’ils peuvent bien encore attendre maintenant ? La part de la richesse produite nationalement qui va aux salaires n’a cessé de diminuer ces dernières années. Les entreprises sud-africaines disposent d’une réserve de liquidités de 500 milliards de rands sud-africains (environ 34 milliards d’euros, NDT). Ils ont tellement d’argent qu’ils ne savent pas quoi faire avec ! Cette somme pourrait être investie pour créer des emplois. Mais pour les capitalistes, il est plus rentable de spéculer avec cette somme sur les marchés financiers. Tout ce qu’ils veulent, c’est des bénéfices, encore plus de bénéfices.
Comment se fait-il que la grève des métallurgistes, qui a commencé il y a peu, soit subitement devenue l’excuse expliquant pourquoi les capitalistes ne peuvent pas investir ? Cet argument est bien évidemment un non-sens. En réalité, les capitalistes sont en grève de l’investissement depuis des années : les investissements des entreprises d’Afrique du Sud dans l’économie sont maintenant 3% inférieurs à ce qu’ils étaient en 2008! Est-ce la faute des métallurgistes? Non, tout ce temps, les patrons ont simplement saboté l’économie.
La grève rendrait-elle le pays moins compétitif ?
Les “experts” rétorqueront que des salaires plus élevés pour les métallurgistes rendraient l’Afrique du Sud “moins compétitive”, et que des délocalisations s’ensuivraient vers des régions du monde où les salaires sont plus bas. Les “experts” présentent ce phénomène comme s’il était tout aussi inévitable que le lever du soleil à l’Est. C’est un mensonge. Encore une fois, les patrons menacent de saboter les gains de la grève. Ce qu’ils disent vraiment, c’est qu’ils vont fermer leurs entreprises en Afrique du Sud et les déplacer à l’étranger pour obtenir des profits plus élevés pour eux-mêmes plutôt que de payer les métallos avec un salaire équitable.
Les capitalistes veulent être gagnants sur les deux tableaux. L’ANC, soutenue par les grandes entreprises sud-africaines, est allé très loin dans la défense et l’application des idées dominantes néolibérales du capitalisme mondial, qui affirment que les obstacles au commerce doivent être supprimés, les services publics privatisés, les marchés ouverts et que la loi de la concurrence doit être élevée au dessus de tout. Globalement, cette stratégie a permis aux grands capitalistes d’Amérique et d’Europe de transférer le pouvoir et la richesse de la classe des travailleurs à leur propre classe sociale. Quand cela les arrange, les patrons sud-africains soutiennent ce processus, et quand ce n’est pas le cas, ils en blâment les travailleurs. Pour les travailleurs, le néo-libéralisme est synonyme de nivèlement des salaires par le bas. C’est ainsi que des usines qui avaient été délocalisées en Chine parce que les salaires y étaient plus bas qu’ailleurs sont en train d’être transférées vers des pays aux salaires encore plus faibles en Asie du Sud-Est.
Le socialisme peut répondre à ces mensonges
Ces problèmes sont liés au système capitaliste. C’est pourquoi les travailleurs doivent être armés d’idées socialistes. Les problèmes des capitalistes n’ont aucune raison d’être nos problèmes. Nous devons disposer d’une claire compréhension que la seule alternative est une alternative socialiste. Les travailleurs doivent exiger la transparence de la comptabilité des sociétés sud-africaines qui prétendent qu’ils ne peuvent pas rivaliser avec les entreprises étrangères. Des comités de travailleurs doivent ensuite examiner leurs profits, les rémunération de la direction, les frais d’entretien, les salaires versés aux travailleurs et les prix qu’ils facturent pour leurs produits ou services. Mais même dans les cas où les entreprises parviendraient à prouver qu’elles ne peuvent pas rivaliser avec leurs concurrents, les travailleurs ne devraient pas soutenir les profits capitalistes en demandant à la classe ouvrière de payer des prix élevés pour des biens et des services ou en maintenant les salaires au plus bas au nom de la classe capitaliste.
Si les entreprises ne peuvent véritablement pas rivaliser, dans un premier temps, nous allons exiger leur nationalisation sous le contrôle démocratique des travailleurs. Ce doit être la revendication essentielle du mouvement syndical en lutte pour défendre les emplois. Mais au final, seule une société socialiste peut mettre fin à la course vers le bas des conditions de travail et de salaire et sera capable de donner de bons emplois et un bon niveau de vie à tous les travailleurs et leurs familles.
De la même manière qu’ils sont organisés dans les syndicats, les travailleurs doivent être politiquement organisés, dans des partis comme le Workers and Socialist Party (WASP) afin de lier la lutte sur les lieux de travail à une lutte commune de la classe des travailleurs pour une société socialiste.
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Afrique du Sud – Décision historique du syndicat des métallos
Au cours de ce qui restera dans l’Histoire comme le plus important congrès syndical depuis la fondation du Congress of South African Trade Unions (Cosatu) en 1985, les délégués du congrès spécial de la National Union of Metal Workers of Soutah Africa (Numsa) ont pris la décision audacieuse et historique de couper les ponts avec l’ANC, parti au pouvoir depuis la fin de l’apartheid. Avec le retrait de leur soutien financier et logistique à l’ANC, celui-ci va entrer dans les élections 2014 sans le soutien du syndicat membre du Cosatu le plus nombreux et le plus influent politiquement. Etant donné le soutien de la base de toutes les composantes du Cosatu envers la Numsa, y compris dans celles dirigées par des leaders pro-capitalistes, cela signifie que l’ANC est partie pour perdre non seulement le vote des 340.000 membres de la Numsa, mais potentiellement également plus d’un million de voix des autres syndicats affiliés au Cosatu. L’ANC va sortir des élections de 2014 significativement affaiblie. Les scénarios-catastrophes des stratèges de l’ANC eux-même, où l’ANC obtiendrait moins de 50%, ne peuvent être écartés.
Article du Workers’ And Socialist Party, parti large au sein duquel travaille le Democratic Socialist Movement, section du CIO en Afrique du Sud

Les répliques du séisme commencé à Marikana, qui ont ébranlé les fondations de l’ordre politique post-apartheid ingénieusement établit dans les négociations de la Conférence pour une afrique du Sud Démocratique (CODESA), ont maintenant trouvé une expression sur le plan politique.
Pour adapter le titre du livre du commentateur politique Allister Spark sur les perspectives du pays après la CODESA (tomorrow is another country), ”aujourd’hui, l’Afrique du Sud est un autre pays”. Les barreaux en or de la prison politique dans laquelle la classe ouvrière est maintenue depuis 20 ans sont brisés et le processus de l’émancipation de classe et d’indépendance politique de la classe ouvrière a commencé avec force.
De plus, la Numsa va cesser sa contribution financière au Parti Communiste Sud-Africain, coupant les liens politiques avec ce parti ”en faillite idéologique”, selon les mots du secrétaire général de la Numsa, Irvin Jim.
La colère et le sentiment de trahison des délégués envers les dirigeants de l’ANC et du PC Sud-Africain se sont exprimés pendant toute la conférence. A aucun moment un seul délégué n’a donné d’argument sérieux pour la poursuite du soutien à l’ANC. Pour les membres de la Numsa, la réalité est claire : l’ANC et le PC Sud-Africain sont des partis de la classe capitaliste. Le prochain gouvernement dirigé par l’ANC, avec le Programme de Développement néo-libéral comme pièce maîtresse, sera un gouvernement consciemment anti-ouvrier et ne mérite pas le soutien de la classe ouvrière.
A ce stade, la Numsa s’est gardée de décider de soutenir un parti alternatif en 2014 et a simplement réitéré le droit de ses membres de voter individuellement selon leurs convictions. Au lieu de prendre une position claire pour 2014 au cours du congrès, la Numsa a pris la décision de lancer un ”front uni” modelé sur le United Democratic Front des années ’80, pour unir les luttes des travailleurs et des communautés tout en contribuant à former un ”Mouvement pour le Socialisme”. Le Workers’ And Socialist Party, dans sa lettre ouverte à la Numsa, a appelé au lancement d’un réseau syndical socialiste pour aider à surmonter les divisions au sein de la classe ouvrière et à surmonter la paralysie de la lutte unifiée causée par la crise du Cosatu. Nous appelons aussi à une Assemblée de l’Unité de la Classe Ouvrière pour établir un plan de bataille pour les luttes de masse. Dans la décision de la Numsa de lancer un Front Uni et un Mouvement pour le Socialisme, nous voyons que ces appels ont trouvé un écho.
Cependant, avec les élections nationales et provinciales à quelques mois d’ici, nous avons invité la Numsa à ”prendre sa place dans la direction du WASP”. Le WASP a été lancé pour unir les luttes des travailleurs, des communautés et des jeunes et est organisé de façon démocratique et fédérative qui permettrait à Numsa d’utiliser l’étiquette du WASP pour présenter ses propres candidats, sélectionnés selon ses propres procédures. La Numsa pourrait s’opposer au Plan de Développement National au parlement en tant qu’auxiliaire des luttes qui vont avoir lieu dans les lieux de travail et les communautés.
Au congrès spécial de la Numsa, la direction a établi les critères que tout parti politique devrait présenter pour obtenir son soutien politique. Ces critères ont été approuvés par les délégués au cours de l’adoption du rapport du secrétariat. Nous pensons que le WASP présente ces critères. Le WASP s’est forgé dans les luttes des mineurs et se base sur la classe ouvrière ; il défend la nationalisation des mines, des banques, des exploitations agricoles, des usines et des autres grandes entreprises sur base du contrôle ouvrier et dans le cadres de la lutte pour une société socialiste ; le WASP est une organisation complètement démocratique. Dans leur nouvelle stratégie politique, la direction de Numsa a reçu le mandat ”d’être attentif à tout parti engagé pour le socialisme dans les élections futures”. Nous répétons donc notre appel envers la Numsa à prendre place dans la direction du WASP et à soutenir et à présenter des candidats sous l’étiquette du WASP aux élections de 2014, ce qui serait une étape cruciale dans la construction du nouveau Mouvement pour le Socialisme.
Les limites de la position spécifique de la Numsa pour les élections 2014 ne peuvent cependant amoindrir le changement monumental dans le paysage politique annoncé par sa décision. La rupture de l’ordre politique est maintenant bien engagée et le chemin vers l’indépendance politique de la classe ouvrière est ouvert. La décision de la Numsa a accéléré le processus commencé par les mineurs en 2012. En reconnaissant que le changement dans la situation politique post-Marikana demandait la convocation d’un congrès spécial, la Numsa a amené ce processus à un plus haut niveau de conscience.
Les délégués ont accueilli les survivants du massacre de Marikana et leurs familles et ont levé des fonds à hauteur de 20.000 rands (plus de 20.600€) pour les familles des tués. Ce montant sera augmenté à 500.000 rands (plus de 34.300€) par les employés de la compagnie d’investissement de la Numsa et par la compagnie elle-même. L’importance que le congrès a donné à la lutte des mineurs en 2012, y compris au massacre de Marikana, a montré la reconnaissance de la Numsa envers le rôle des mineurs en tant qu’avant-garde de la classe ouvrière dans sa libération de la prison de l’Alliance Tripartite (ANC, PC sud-africain et Cosatu). L’exode massif de la National Union of Mineworkers était aussi une rupture des liens politiques avec l’ANC. C’est de cette bataille ouverte qu’est né le WASP. La Numsa a maintenant complètement rejoint la bataille que les mineurs ont commencée.
La Numsa a envoyé un signal clair aux mineurs et aux autres travailleurs, en montrant qu’il ne va pas les abandonner aux directions syndicales pro-capitalistes qui continuent à s’accrocher à l’ANC. Irvin Jim a déclaré que la Numsa ”ne rejettera plus jamais un seul travailleur”, en défi ouvert à la politique ”une industrie, un syndicat” du Cosatu. Jim a même regretté que cela n’ait pas été la politique de la Numsa à l’époque de Marikana. Cela va mettre la Numsa en opposition avec l’aile droite pro-ANC du Cosatu et va certainement mener à une rupture avec le Cosatu. La décision de retirer leurs 800.000 rands de cotisation de membre au Cosatu tant que leur demande de congrès spécial n’a pas aboutit est une autre mesure audacieuse.
Les projets d’action de masse début 2014 et la solidarité du congrès envers les mineurs (qui vont sûrement mener d’autres luttes pour les salaires et contre les licenciements cette année) montrent que la Numsa va être au centre des luttes des travailleurs dans la prochaine période. La conférence pour le socialisme qui est prévue va continuer la discussion sur la construction d’une alternative politique de la classe ouvrière commencée au congrès spécial. La Numsa a fait les premiers pas dans le nouveau paysage politique qu’ils ont aidé à créer et, avec le WASP et les mineurs, ont entamé la tâche historique de reconstruire une indépendance politique de la classe ouvrière. Le WASP salue la direction de la Numsa et les délégués pour leur décision. -
Nouveaux mouvements de protestations sur les lignes du froid à ArcelorMittal
De nombreux arrêts de travail se sont déroulés cette semaine à Liège sur les différents sites de la phase à froid à ArcelorMittal, et plusieurs piquets se prolongeront jusqu’à la fin de la semaine. Pour cause, la négociation finale du plan social que direction et syndicats ont prévu normalement de clôturer le samedi 30 novembre. Pour rappel, c’est le 24 janvier 2013 qu’ArcelorMittal avait annoncé la fermeture de 7 lignes de la phase à froid. Sur les 3053 travailleurs concernés, il n’en restera plus que 845, dont 370 ouvriers. 260 externalisations sont également prévues.
Par Cécile (Bruxelles)
Ce mercredi 27 novembre, je me suis rendue sur trois piquets de grève, Flerbatil, Kessales et Flemalle afin de montrer le soutien du PSL avec les grévistes et pour m’informer de la situation.
Un climat d’insécurité dans un contexte de chômage de masse
C’est d’abord un climat d’insécurité et de crainte quant à l’avenir qui transparaît dans les discussions avec les travailleurs. A Flerbatil, il y a une dizaine de jours, les nouvelles structures de travail avaient été présentées aux travailleurs, ce qui avait provoqué au sein des travailleurs une quarantaine de malaises (1). C’est à ce moment-là que la direction annonçait la suppression de presque la moitié des emplois. Les ouvriers attendent pour l’instant anxieusement lesquels d’entre eux passeront à la trappe. Comme me l’exprime François (2), 51 ans, ouvrier sur le site de Tilleur depuis 10 ans, l’avenir a toujours été incertain à ArcelorMittal. Les ouvriers sont toujours dans la crainte qu’un jour ou l’autre on leur annonce la fermeture de l’usine. Aujourd’hui, cette peur est redoublée par le contexte de crise économique. Comment retrouver du travail ? La reconversion des ouvriers comme François est très difficile car ceux-ci n’ont pas de qualification autre que le boulot qu’ils ont toujours effectué à l’usine mais qui n’existe pas ailleurs. Christophe, délégué syndical FGTB sur le même site, me parle de ce contexte : la plupart des ouvriers du site sont déqualifiés par rapport au marché du travail et en plus, il y a une véritable chasse aux chômeurs qui est mise en place par le gouvernement. Il en résulte une situation plus qu’inquiétante pour les ouvriers et leur famille.
Que faire ? ‘‘Pourquoi on lutte ?’’
‘‘Le monde politique ne reflète plus la société’’ affirme Christophe, ‘‘on ne cesse d’aider les patrons pour qu’ils créent de l’emploi mais ça ne marche pas, il y en a de moins en moins.’’ Les 138 millions que la Région Wallonne va ‘‘prêter’’ à ArcelorMittal pour investir les quelques lignes stratégiques restantes du froid en sont l’exemple même (3). Sur le piquet de Kessales, Marc, autre délégué syndical FGTB, m’explique également qu’ils n’ont aucune confiance dans les solutions que Jean-Claude Marcourt tente d’établir. Celui-ci, après qu’un bureau d’expertise ait prouvé que la sidérurgie liégeoise valait la peine d’être sauvée car elle possédait des outils de qualité, avait proposé un décret d’expropriation temporaire pour trouver un repreneur. Son plan est tombé à l’eau assez rapidement. ‘‘Notre première revendication était le rachat de l’outil, comme ils ont fait avec la FN à Herstal, c’était la seule solution pour sauver les emplois. Mais le plan industriel a été ficelé au mois de juillet, maintenant c’est trop tard pour ça’’, commente Marc.
C’est sur le troisième piquet à Flémalle qu’Alain, qui travaille depuis 30 ans dans la sidérurgie, donne le même point de vue sur la situation politique et ses conséquences sur le syndicalisme : ‘‘On n’a plus de relai politique, c’est ça le grand problème, ici la structure syndicale de la FGTB est complètement inféodée au PS et à Marcourt, ils essayent de calmer la base.’’ Il m’explique que les piquets de grève actuels sont le résultat d’une pression de la base qui a poussé à mettre en place ces actions à la fois spontanées et organisées. Il m’explique également que ce qui se passe à ArcelorMittal, c’est la faillite du mouvement syndical et de son indépendance. On en conclut tout les deux que l’appel de Daniel Piron à construire une nouvelle alternative de gauche est dans ce contexte très important.
Dans cette situation très difficile, revient souvent la question de ‘‘pourquoi faire grève, à quoi ça sert ?’’. Véronique, travailleuse à ArcelorMittal et militante très combative, me dit qu’il faut tout le temps expliquer aux travailleurs à quoi sert de lutter : ‘‘on ne lutte plus pour sauvegarder les emplois, c’est finit ça, mais on lutte pour garder nos acquis sociaux. Avec tout l’argent que Lakshmi Mittal s’est mis en poche, on peut bien avoir des plus grosses primes que ça !’’ Alain partage le même avis et ajoute que la lutte, c’est pour affirmer haut et fort qu’un changement politique et social est nécessaire et possible, qu’il faut changer les consciences. Il ajoute : ‘‘chaque jour de lutte est un jour de fête, parce que l’outil nous appartient.’’ La lutte, la grève, permet de mettre les conditions matérielles en place pour faire évoluer les consciences et pour affirmer au gouvernement que, cette politique, on en veut plus.
Actuellement, le site de Flerbatil repart en grève pour 24h. Certains veulent une grève ‘‘au finish’’. D’autres camarades du PSL ont visité le piquet le mercredi soir (voir photos ci-dessus).
(1) http://www.lalibre.be/economie/libre-entreprise/des-travailleurs-d-arcelormittal-font-un-malaise-apres-la-presentation-des-organigrammes-528275603570ea593db99246
(2) Tous les noms sont fictifs.
(3) http://www.7sur7.be/7s7/fr/1536/Economie/article/detail/1732569/2013/10/31/La-Wallonie-va-preter-138-millions-a-Mittal.dhtml
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Ils bloquent nos salaires ? Bloquons leur politique !
Le blocage des salaires imposé par le gouvernement Di Rupo pour les années 2013-2014 (et destiné à perdurer avec la révision de la loi de 1996 sur la formation des salaires) a fait grincer bien des dents, et il y a de quoi. Nos factures, elles, poursuivent leur courbe ascendante, et avec les diverses manipulations du calcul de l’indexation automatique des salaires, celle-ci ne correspond pas à l’augmentation réelle du coût de la vie quotidienne.
Vous devenez rouges de colère en tenant en main votre facture d’électricité? Soyez certain que cet argent est bien géré : Elia (gestionnaire du transport d’électricité en Belgique) l’a notamment utilisé pour engager son ancien patron, Daniel Dobbeni, comme consultant. Salaire : 400.000 euros pour 170 jours… soit 2.400 euros par jour ! Les syndicats s’opposent bien entendu à ce gel des salaires révoltant, certainement au regard des salaires scandaleux des patrons des entreprises publiques et privées. La presse en a largement fait écho.
C’est d’abord la centrale des métallos wallons et bruxellois de la FGTB (MWB) qui a déposé une requête auprès du Conseil d’Etat, rejointe ensuite par la centrale des employés de la CSC (la CNE). Ensuite, la FGTB, la CSC et la CGSLB ont ensemble déposé une plainte auprès de l’Organisation Internationale du Travail (OIT), toujours contre le gel des salaires. Dans ces deux cas, l’argumentation est la même : l’arrêté royal ne respecte pas la liberté de négociation.
‘‘Ce gel nous empêche de négocier une hausse des salaires, ce qui est pourtant l’un des droits de base du travailleur. C’est une violation des conventions de l’OIT en matière de liberté de négociation’’, a défendu le président de la CSC Marc Leemans. C’est très correct. Mais, dans le cas de l’OIT, la Belgique peut être condamnée… à rien du tout. Ce ne serait qu’une condamnation morale qui serait ‘‘tout de même un camouflet pour notre pays’’, poursuit Leemans, ‘‘La Belgique se retrouverait alors en compagnie de pays comme la Colombie ou le Guatemala, souvent pointés du doigt par l’OIT.’’ Patronat et gouvernement n’ont qu’à bien se tenir…
Nous n’avons aucun problème à utiliser tous les moyens qui sont à notre disposition pour défendre les travailleurs, leurs acquis sociaux et leurs droits, y compris la justice belge et l’OIT. Mais soyons clairs : sans le poids de la lutte active du mouvement organisé des travailleurs, jamais nous n’aurions eu la journée des 8 heures, ni même le droit de simplement faire grève !
Sans construction d’un rapport de force, dans la rue et dans les entreprises, impossible de faire face au tsunami antisocial que nous réservent le patronat et ses marionnettes politiques. Les petits outils juridiques et autres ne doivent servir qu’à renforcer la lutte effective, pas de prétexte pour éviter de mener le combat sur le terrain. Les syndicats avertissent que le système de concertation sociale belge est sans cesse rompu par le patronat et son avidité. Il serait grand temps d’en prendre acte, d’en tirer les conclusions pratiques et d’en revenir au syndicalisme de combat et de lutte qui n’aurait jamais dû être délaissé.
Avant l’été, tous les appels à l’action avaient pu compter sur une réponse enthousiaste et massive, mais nous en sommes restés à attendre le prochain pas à poser, sans perspectives de plan d’action clair et constructif. Nous avons perdu un temps précieux, mais il n’est pas trop tard pour organiser notre combat.
Le 26 septembre dernier, une petite manifestation a eu lieu à Bruxelles contre le gel des salaires à l’initiative de la CNE, de la régionale bruxelloise de la CGSP-ALR (Administrations Locales et Régionales) et des Comités Action contre l’austérité en Europe. Ce fut une action limitée mais qui, incontestablement, s’est située dans la voie à suivre pour obtenir un réel résultat : celle de la résistance active.
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ArcelorMittal – Interview d’un délégué syndical : ‘‘Nous n’avions pas les bonnes stratégies’’
Ce mois d’octobre, cela fera 2 ans déjà qu’ArcelorMittal a annoncé la fermeture de la phase à chaud liégeoise. Plus d’un an plus tard, la fermeture de 7 des 12 lignes de la phase à froid a également été annoncée. Nous en avons discuté avec un délégué de l’entreprise.
Interview réalisée par Nicolas Croes
Quel regard portes-tu sur ces deux années ?
C’est un regard fort amer. Pourquoi? Je pense que nous avons manqué de certaines stratégies à mettre en place. Avec le front commun, que nous avons voulu soutenir le plus possible malgré les divergences, on n’a pas tout essayé. Il fallait y réfléchir quitte même à y passer des journées entières et des nuits blanches.
Les médias, c’est un bon exemple. Il fallait mettre à mal l’image de Mittal, c’est un personnage qui tient beaucoup à son image de marque, et cela n’a pas été fait. Il tenait à ce qu’on dise de lui qu’il négociait bien, mais comment voulez-vous discuter avec une multinationale qui ne revient sur aucune de ses décisions et qui ne donne aucune garantie fiable ? Il se réfugie derrière le prétexte de la crise, mais elle a bon dos, la crise. Nous avons quand même un taux de rentabilité de 5 à 7%. Mais Mittal, lui, veut un rendement de 15% à 20%, à l’exemple de ce qui existe dans le secteur minier. Il a d’ailleurs beaucoup investi dans ce secteur.
Mais nous avons surtout raté l’occasion de créer un précédent européen. Avec une solidarité et une cohésion convenable entre les sites des différents pays, il y avait moyen de freiner le tsunami Mittal. Le précédent aurait été créé si les ministres de l’industrie français, luxembourgeois et belge avaient clairement pris position pour les travailleurs.
La stratégie syndicale a beaucoup reposé sur l’appel à l’aide aux partis politiques traditionnels, et particulièrement à Jean-Claude Marcourt. Une approche qui s’est révélée payante ?
Jean-Claude Marcourt est le ministre en charge du dossier à la Région Wallonne, mais nous n’avons globalement pas eu l’appui des politiques du gouvernement wallon, du fédéral et de l’Europe ! Le PS n’est pas à gauche, on le sait. Marcourt a beaucoup joué sur l’espoir qu’il donnait aux travailleurs. Il avance en lançant de la poudre aux yeux. Ce gouvernement wallon est inodore, incolore, insipide !
A la dernière réunion de la Task Force (qui réunissait des représentants syndicaux des métallos, du gouvernement wallon et de divers organismes publics), Marcourt a donné des espoirs qui ont stupéfait. Patrick Remacle, le journaliste de la RTBF qui a réalisé le reportage ‘‘Ni chaud, ni froid’’, était également présent avec nous et nous a dit ce jour-là ‘‘Marcourt s’est considérablement avancé.’’ Mais le fameux repreneur dont il a été question, Qatar Steel, c’était un mirage ! Aucune multinationale ne veut se mettre Mittal à dos.
Marcourt avait analysé plusieurs schémas et celui qu’il voulait retenir était de garder l’ensemble du bassin avec un haut-fourneau en activité… Après, il n’est plus revenu sur ce schéma qui sauvait pratiquement tous nos emplois. C’est un véritable scandale de nous avoir traité comme ça. Ne sauver que le bassin avec les cinq lignes stratégiques dans le froid, c’est du court terme. Avec les 5 lignes du Froid qui restent, on ne parle que de sauver 845 ‘‘ETP internes’’ (Equivalents temps plein internes). Pourquoi parle-t-on ainsi et pas de CDI ArcelorMittal ? C’est parce qu’il y a des temporaires dans ce diktat de Mittal ! A cela il faut rajouter les emplois qui seraient prévus par la reprise de la cockerie et de l’énergie par le groupe Oxbow Mining LLC. Le discours de la direction d’ArcelorMittal, ce sont des phrases du genre : ‘‘Mettre en place une organisation LEAN et un nouveau fonctionnement permettant à Liège de retrouver une rentabilité positive.’’ Et quoi, ça existe la rentabilité négative ? Quant au LEAN (organisation du travail en structure allégée), ça veut dire une flexibilité et une externalisation à outrance.
C’est sur ces 845 ETP que Mittal joue beaucoup maintenant afin de faire pression sur les syndicats pour qu’ils acceptent le plan social et industriel ?
Mittal a joué sur le saucissonnage de notre entreprise avec une grande stratégie. D’abord l’annonce dans le Chaud en prenant l’emploi dans le Froid en otage, puis maintenant avec la fermeture de 7 des 12 lignes du Froid. C’était très tactique de sa part. Si tout avait été annoncé d’un coup, le choc aurait été trop grand, et la riposte aussi !
Nos hauts dirigeants syndicaux ont eu peur d’actions plus résolues. Faire des manifestations, nous, on veut bien, mais il faut faire des actions intelligentes. Ça commence à bien faire. Nous étions d’accord pour aller au Parlement wallon à Namur, au Parlement européen à Strasbourg, voire même au siège d’ArcelorMittal au Luxembourg (où nous ne sommes finalement pas allés). Mais il ne fallait pas s’arrêter là. A Strasbourg, c’était certain que le comité d’accueil des CRS allait être violent après ce que l’on avait déjà subi à Namur.
Il fallait aller vers les autres sites de Mittal. C’était ça, aller vraiment au combat. Il fallait mener la guerre à l’intérieur de son groupe, en arrêtant les lignes et en occupant les sites, en faisant des actions en même temps à Sidmar, Florange voire même Brème ou Dunkerque. Mais les délégations syndicales ont refusé d’étendre le conflit dans cette voie. La solidarité entre sites n’a jamais été construite. Chacun tire la couverture à soi, et Mittal sait jouer là-dessus. Mais avec un blocage de Sidmar et de Florange, il y avait moyen de le faire plier. En ayant mené ces actions, comme Mittal a des entreprises dans toute l’Europe, même la presse chinoise aurait parlé de nous ! Nous n’avions pas suffisamment d’experts de qualité en sidérurgie et d’avocats spécialisés pour nous appuyer dans notre combat ! Nous aurions dû nous inspirer du combat des travailleurs de Continental, les Contis, en France !
Les politiques laissent couler les travailleurs comme à Carsid, à Caterpillar et à Ford-Genk. Pour ne prendre que le cas de la sidérurgie wallonne, nous n’avons plus aujourd’hui de haut-fourneau allumé. Il ne reste plus que ceux de Sidmar à Gand. C’est un véritable scandale.
Que penses-tu du mot d’ordre de nationalisation des sites ?
Aujourd’hui, nous payons les politiques menées dans le passé. En Wallonie, nous aurions dû avoir depuis des années une sidérurgie publique wallonne en rassemblant les deux grands bassins de Liège et de Charleroi, avec une stratégie à long terme. Cela signifie une synergie totale entre les deux sites. Nous possédons de grandes infrastructures fluviales, ferroviaires et routières. Nous avons la technologie, un grand savoir faire, nous sommes à la pointe, avec un centre de recherche très calé. Nous aurions pu développer des produits à haute valeur ajoutée dans les secteurs sidérurgiques et métallurgiques. D’ailleurs, Mittal ne veut que prendre tout notre savoir et le développer ailleurs.
Mais il n’y a pas eu de stratégie industrielle ces trente dernières années, en Wallonie, en Belgique et en Europe. C’est ça le néolibéralisme, c’est violent, c’est une vision à court terme. L’Union Européenne n’a pas d’alternative à la mondialisation, elle n’a aucune volonté de revenir sur cela. La crise actuelle est pourtant révélatrice de l’échec de ce modèle. L’Europe n’a pas de volonté pour le bien-être des travailleurs, elle brade tous nos acquis sociaux sur l’autel de la course au profit. Bien sûr, nous devons commercer avec le monde entier, mais pas sur les bases du capitalisme.
Je ne suis pas contre l’Europe. Mais on a un euro des spéculateurs et une Union Européenne de la Bourse. Par exemple, les services publics sont détruits par les directives européennes, cela crée d’énormes dégâts sociaux. Nous n’avons pas de bonnes lois de protection sociale, il n’y a même pas de discussions pour un salaire-minimum européen, tout est fait pour démolir les lois sociales existantes. On nous présente le Modèle allemand comme le meilleur, mais je suis content qu’on commence dans les médias à parler des salaires de misère en Allemagne et du nombre incroyable de travailleurs précaires. Ce modèle allemand vit au détriment de tous les autres pays européens et de ses propres travailleurs.
Selon toi, que faut-il construire aujourd’hui pour renforcer le combat des travailleurs d’ArcelorMittal et d’ailleurs ?
Nous n’avons pas d’Europe sociale, mais nous n’avons pas non plus d’Europe syndicale. C’est ça qui est triste. C’est le grand virage que nous avons raté à ce niveau là. Ce syndicalisme européen reste à construire mais pour cela il faut des dirigeants syndicaux combatifs au niveau national et européen.
La question vient aussi de l’alternative politique, on doit construire – en Belgique et dans toute l’Europe – une vraie gauche, avec une vraie politique sociale, en regroupant les organisations de la gauche radicale. On a besoin d’une nouvelle gauche unie dans le combat.
Le PSL défend, pour sauver l’emploi, la nationalisation de la sidérurgie sous le contrôle démocratique des travailleurs, sans rachat ni indemnité, avec comme première étape en ce sens l’occupation de l’entreprise par les travailleurs.
Plus d’informations:
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Nouvelle manifestation des métallos d'ArcelorMittal à Namur
Ce lundi, quelques centaines de travailleurs d’ArcelorMittal se sont rendus à Namur afin de soutenir leurs représentants à la table de négociation avec des représentants de la direction de la multinationale et du gouvernement wallon.
- ArcelorMittal – Interview d’un délégué syndical : ‘‘Nous n’avions pas les bonnes stratégies’’
- Rubrique “Métal” de ce site
En mars dernier, suite à une autre manifestation des métallos, nous avions écrit dans notre rapport : “Nombreux sont ceux qui – en plus du manque de perspective claire pour la poursuite du combat – nous ont parlé de la présence particulièrement limitée à cette action. Le sort de l’acier liégeois concerne pourtant directement des milliers de personnes. L’égoïsme serait-il donc tellement répandu ? N’est-ce pas plutôt l’expression d’une lassitude et d’un découragement après avoir été baladés vers Namur, Strasbourg ou encore Bruxelles ? Depuis le début du conflit, en octobre 2011 déjà, beaucoup se sont sentis comme pris au piège dans un sombre tunnel sans percevoir la moindre lumière au loin, sans échéancier d’action clair, sans débat sur la stratégie à adopter, sans construction effective d’un véritable rapport de force. La lutte peut tenir un moment sur le sens du devoir et la colère, deux éléments qui sont très certainement présents chez les métallos, mais il est maintenant plus que temps de sérieusement organiser la lutte, au risque de voir le noyau dur se retrouver à courte échéance totalement isolé de la majorité des travailleurs.”
“(…) Si longtemps après le début du combat, tous les travailleurs ont un avis sur la manière dont la lutte a été orientée jusqu’ici. Pourquoi ne pas commencer par organiser des assemblées générales sur les différents sites, en plus petits nombre, afin de laisser la parole aux travailleurs ? Ce serait aussi un excellent moyen de remobiliser les nombreux métallos qui se sont mis sur le bord du chemin.”
Il nous semble aujourd’hui que ces lignes ont gardé toute leur pertinence.
- Pour des assemblées générales démocratiques et l’élaboration d’un plan d’action avec l’implication de l’ensemble des travailleurs !
- Pour l’occupation des sites et leur transformation en centres névralgiques d’une campagne massive pour la nationalisation de la sidérurgie sous le contrôle des travailleurs, et en tant que premier pas en cette direction ! Organiser, mobiliser, occuper et exproprier pour nationaliser !