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Tag: Lidl
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Grève contre les cadences de travail intenables – La direction de Lidl doit lâcher du lest
« Il y a trop peu de bras pour tout le travail. » Voilà comment un travailleur de Lidl résumait la situation au piquet de grève installé devant le magasin de Grammont. Au Lidl de Deurne Zuid, nous avons interviewé Dylan, délégué BBTK/SETCa, qui déclarait : « Le malaise n’a jamais été aussi grand. » Une vague de grève a submergé Lidl du 13 au 18 octobre. Au plus fort des actions, plus de 200 des 300 magasins étaient fermés !Il n’existe pourtant pas de forte tradition syndicale chez Lidl. Mais l’attitude arrogante et scandaleuse de la direction n’a laissé aucun autre choix au personnel. Les magasins ont fermé les uns après les autres et les piquets de grève étaient très bien fournis. Il s’agit de la plus solide grève jamais observée chez Lidl.
La grève a suivi celle de 2018, quand s’était déroulée une semaine de grève pour obtenir plus de personnel. La direction avait promis de prendre des mesures et, en attendant celles-ci, chaque magasin a bénéficié de 42 heures de temps de travail supplémentaires par semaine. Mais aucune mesure n’a jamais été concrétisée et, à peine remis de la période du coronavirus, la direction a voulu réduire à nouveau ces 42 heures. Le manque de respect est total pour ce personnel qui fait pourtant partie des héros de la crise sanitaire.
Dans ce contexte, il y a eu une véritable révolte du personnel de Lidl. La direction s’est toutefois entêtée et a même envoyé des huissiers aux piquets de grève. Finalement, la direction a dû céder : les 42 heures supplémentaires par magasin sont maintenues et 14 heures supplémentaires viennent s’y ajouter pour tous les magasins tandis que les magasins en difficulté (avec un grand nombre de malades, une forte fluctuation du personnel ou un manque d’effectifs) obtiennent encore plus d’heures. Lidl promet également de faire passer l’équipe volante de 140 à 243 personnes (223 Équivalents temps plein).
D’autres éléments sont à nouveau renvoyés à la table de négociations. Il s’agit notamment du temps de travail, mais aussi de la question de la flexibilité. Un accord devrait arriver à ce sujet en mars 2022. Reste à savoir si cela se produira. La direction de Lidl a plus que montré ces dernières années à quel point elle n’était pas encline à tenir ses promesses. Entre-temps, le recours aux contrats à temps partiel afin d’accroître la flexibilité reste un problème majeur. Les bas salaires sont également une source de mécontentement. Lors des journées d’action contre la norme salariale de 0,4 % et la loi sur les salaires de 1996, la participation du personnel de Lidl était appréciable. La revendication d’un salaire minimum de 14 euros de l’heure est extrêmement populaire, d’autant plus que les revenus des cadres supérieurs de Lidl sont connus : tout au sommet, Dieter Schwarz se paie 1 milliard d’euros par an.
Les travailleurs sortent renforcés de cette épreuve de force. Jamais auparavant autant de magasins n’avaient fermé et autant de travailleurs n’étaient partis en grève. Lors du piquet à Deurne, Dylan, délégué BBTK/SETCa, faisait remarquer à juste titre : « Peut-être devrions-nous réagir avec l’ensemble du secteur. Chez Delhaize, de plus en plus d’aspects de l’organisation de Lidl font leur arrivée. Il y a l’arrivée de Jumbo dans le secteur, où c’est totalement le Far West. Les franchises exercent une pression sur l’ensemble des salaires et des conditions de travail. Nous devons riposter avec l’ensemble du secteur autour de nos revendications. »
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Lidl : « Le malaise n’a jamais été aussi grand »

Dylan (à l’avant) sur le piquet de grève de Lidl à Deurne Zuid pendant la grève contre la norme salariale plus tôt cette année. Grève contre la charge de travail insupportable et pour le respect : entretien avec un délégué syndical
Depuis mercredi, plusieurs succursales de Lidl sont en grève contre la pression de travail élevée. Un nombre impressionnant de membres du personnel y participent. La colère est grande. En 2018, il y a déjà eu un long mouvement de grève contre la pression au travail qui a conduit à différentes promesses de la part de la direction. Elle entend désormais revenir sur celles-ci. La direction ne montre absolument aucun respect pour le personnel, elle met maintenant les grévistes sous pression et envoyant des huissiers sur les piquets. Des consultations sont prévues ce lundi. Nous en avons parlé avec un délégué du SETCA, Dylan, sur le piquet de grève de Lidl à Deurne Zuid.
Propos recueillis par Luc
Pourquoi cette grève et pourquoi maintenant ?
« Ces actions s’inscrivent dans la continuité de la grève de 2018. À cette époque, un accord a été conclu avec la promesse de négocier une nouvelle convention collective de travail dès que possible. Jusqu’à ce qu’un accord soit trouvé, 42 heures supplémentaires allait être fournies par magasin. Trois ans se sont écoulés et le dialogue social n’a pas encore donné de résultats.
« La direction estime avoir fait beaucoup de concessions et proposé des améliorations. Dans la pratique, les choses ne font que reculer. Le malaise n’a jamais été aussi grand. Même ces 42 heures supplémentaires n’ont pas vraiment été remarquées car le nombre d’heures est manipulé de toutes sortes de manières. Nous demandons également depuis longtemps des contrats fixes à temps plein, mais Lidl continue de travailler avec des contrats à temps partiel.
« Il est frappant qu’il y ait autant de grévistes. Il n’y a pas eu d’ordre général de grève, mais les collègues ont en partie utilisé spontanément le préavis de grève pour entrer en action. Plus de 100 magasins ont fermé leurs portes mercredi. C’est énorme. C’est l’expression de la profondeur du malaise. »
En 2018, il y a eu une semaine de grève. Les revendications ont-elles changé depuis lors ?
« Il s’agit toujours de la même chose : la charge de travail élevée due au manque de personnel. Les effectifs par magasin sont calculés sur base du chiffre d’affaires et non du travail à effectuer dans le magasin. Par exemple, dans mon magasin, nous ne sommes autorisés à ouvrir qu’avec 3 ou 4 personnes, ce qui n’est pas suffisant.
« Mais beaucoup plus est en jeu. Il existe une sorte de politique de la peur dans l’entreprise. En raison de la forte pression de travail, nous avons davantage de personnes malades qui ne sont pas remplacées. La période écoulée nous a fait prendre conscience de notre caractère essentiel, mais aussi du point auquel nous sommes sous-estimés. Il y a trois ans, le salaire n’était pas vraiment un problème, mais aujourd’hui, la revendication d’un salaire minimum de 14 euros est bien vivante. Cette année, c’est la première fois que de nombreux collègues se sont mobilisés autour de l’Accord interprofessionnel, ce qui n’était jamais arrivé auparavant. Dans un tract, nos salaires étaient comparés à ce que gagne le sommet de l’entreprise. Cela a provoqué beaucoup de colère.
« En fait, vous ne pouvez pas imaginer à quel point le manque de respect est grand ici. »
Qu’est-ce qui est nécessaire maintenant ?
« La direction est sortie avec une méthode de mesure du temps sur base de laquelle elle conclut que nous avons trop de temps pour effectuer notre travail. Ce type de mesure théorique ne tient pas compte de la réalité de terrain quotidienne. Dans la pratique, on ajoute tellement de choses que ce cadre théorique ne fonctionne tout simplement pas. Nous ne devrions pas accepter cela.
« Chaque magasin a sa propre spécificité, la situation d’un magasin en ville est différente de celle d’un magasin dans la campagne, par exemple. Même à Anvers, il existe des différences. Le personnel des magasins sait mieux que quiconque combien de temps il a besoin. Nous devons proposer un chiffre distinct pour chaque magasin. »
Quelle est la stratégie ?
« Peut-être devrions-nous réagir avec l’ensemble du secteur. Chez Delhaize, de plus en plus d’aspects de l’organisation de Lidl sont repris. Il y a l’arrivée des magasins Jumbo, où c’est totalement le Far West. Le recourt aux franchisés exerce une pression sur les salaires et les conditions de travail. Nous devons riposter en réagissant avec l’ensemble du secteur et en défendant ensemble nos revendications. »
Travaillez-vous avec des réunions du personnel ?
« C’est très difficile pendant les journées de travail, un piquet de grève est en fait la meilleure réunion du personnel qui soit. Il est important qu’il y ait une participation active du plus grand nombre possible de membres du personnel, l’un des moyens d’y parvenir étant de tenir des piquets de grève, où nous pouvons aussi nous adresser aux clients. »
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Lidl. Six mois après la victoire, la bataille pour un ‘‘travail faisable’’ n’est pas finie
La chose était tout aussi symbolique qu’historique : le 1er mai dernier, après une intense semaine de grève, la direction de Lidl a dû battre en retraite. 42 heures de travail supplémentaires allaient être déployées par semaine et par magasin (soit l’équivalent d’un temps plein) pour une durée indéterminée. La charge de travail insupportable et les mauvaises conditions de travail avaient conduit à cette vague spontanée de grèves. Où en sommes-nous plus de six mois plus tard ? Nous en avons discuté avec Dylan, délégué SETCa.Ces 42 heures supplémentaires par magasin ont-elles été complètement et correctement appliquées ?
“C’est ce que prétend la direction. Mais, sur le terrain, la charge de travail reste très élevée. Chaque conquête arrachée de haute lutte est constamment remise en question ou vidée de sa substance.
“La direction a tout d’abord tenté, en vain, de modifier le nombre d’heures d’un magasin à l’autre alors qu’il avait été convenu que 42 heures seraient ajoutées dans chaque magasin. La direction a ensuite interprété ces 42 heures comme étant des heures contractuelles disponibles. Mais ce n’est pas la même chose que les heures prestées. Le nombre d’heures effectivement prestées est déterminé par le chiffre d’affaires. Si ce chiffre est faible, toutes les heures contractuelles disponibles ne sont pas utilisées. Il est possible de procéder de la sorte en raison des contrats flexibles du personnel, généralement à temps partiel de, par exemple, 24 heures. Nous travaillons 12 heures de plus ou de moins, jusqu’à 36 heures les semaines de pointe.”
Des négociations devaient porter sur le ‘‘travail faisable’’. Où en sommes-nous ?
“Nous sommes encore fort loin d’une nouvelle convention collective de travail (CCT). Après des négociations difficiles, nous sommes parvenus à obtenir certaines choses. Les équipes volantes (qui effectuent des remplacements pour maladie ou circonstances imprévues) sont passées de 69 à 112 employés. Ces derniers reçoivent également une meilleure indemnité kilométrique. D’autre part, les malades de longue durée ne sont plus obligés de passer par un ‘‘processus de réinsertion’’, mesure qui avait entraîné de nombreux licenciements pour indisponibilité médicales.
“La direction souhaite également mettre en place une équipe qui s’occuperait d’un certain nombre de tâches comme la publicité, la réorganisation des magasins et l’inventaire. Selon la direction, cela se traduirait par 10 heures supplémentaires par magasin et par semaine, mais ce que cela signifiera concrètement dans la pratique est toujours un mystère. Chez Lidl, la vigilance constante est de mise. La direction est capable de transformer chaque pas positif en son contraire. Elle vise à atteindre le plus grand chiffre d’affaires et de profit possible avec le moins de personnel possible, rien d’autre.
“Parallèlement, la direction essaye d’accroître la flexibilité. Elle arrive soudainement avec l’idée de commencer le travail une heure plus tôt, avec l’annualisation du temps de travail,… Nous avons été en mesure de repousser tout ça, mais les mêmes mesures sont revenues sur la table aux négociations suivantes ! Heureusement qu’avec le SETCa, à la fin du mois d’avril, nous n’avons pas accepté la proposition d’introduire les 42 heures par magasin pendant six mois seulement en attendant une nouvelle CCT, parce qu’à ce rythme, il nous faudra encore beaucoup de temps avant d’atteindre une CCT !
“Pour la direction, l’étape suivante est l’introduction d’une nouvelle analyse du temps nécessaire pour chaque action au travail. Cela caractérise l’attitude de la direction : elle se moque des besoins de chaque magasin et du personnel, elle calcule froidement comment augmenter la flexibilité et la charge de travail du personnel.”
Quelles sont les réactions sur les lieux de travail ?
“Beaucoup de gens se disent qu’ils ont fait grève pendant une semaine sans sentir aujourd’hui la moindre différence dans leur charge du travail. Nous sommes sortis renforcés de cette semaine pour les négociations concernant la CCT, mais c’est la direction qui détermine leur agenda.
“Nous devons davantage déposer nos propres propositions. Développer un cahier de revendications n’est pas aisé : le personnel est réparti sur de nombreux sites et le roulement de personnel est important. Lorsque je me rends sur un site, je peux parler à cinq ou six collègues pendant qu’ils travaillent, ils ne peuvent donc écouter que d’une oreille. Mais notre groupe de militants syndicaux s’est renforcé et, sur base de notre expérience, nous sommes en mesure de travailler à une plate-forme de revendications.
“Cela peut aller dans le sens d’un plus grand nombre d’heures prestées sur base de ce qui est nécessaire dans un magasin, de la participation du personnel à la gestion du magasin, de l’augmentation du nombre de contrats fixes et à plein temps, etc. Avec ce type de mesures, le personnel se sentira plus à l’aise au travail, ce qui ne peut qu’être profitable à l’atmosphère dans le magasin, entre collègues et envers les clients. Mais cette direction ne va pas tout simplement accepter, il va falloir continuer le combat.”
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[INTERVIEW] Lidl : Oui, la lutte paie !

Photo : Wikimedia La vague spontanée de grèves arrache des mesures contre la pression insoutenable au travail
Fin avril, une vague de grèves sans précédent a eu lieu dans la chaîne de supermarchés Lidl. Les magasins ont fermé leurs portes les uns après les autres. Dans plusieurs autres, les discussions sur la grève étaient animées. L’ampleur du mouvement a pris tout le monde par surprise, la direction bien sûr, mais aussi des dirigeants syndicaux. Après une semaine d’action, d’importantes concessions ont été obtenues. La lutte paie ! Nous avons discuté avec Dylan, délégué syndical du BBTK/SETCa chez Lidl, des raisons de la colère, de la grève et des résultats engrangés.
Lidl n’est pas connu pour être un bastion syndical. Cela n’a pas empêché que des pas en avant considérables soient adoptés en faveur des travailleurs fin avril. Comment est-ce arrivé ?
‘‘La charge de travail est lourde depuis bien longtemps et les conditions de travail ont nourri un mécontentement massif. Une grève dans un magasin d’Oostkamp contre un licenciement injustifié, suivi de la rupture de nouvelles négociations sur la pression au travail ont fait déborder le vase. Et la coupe était pleine chez de nombreux autres collègues, d’où le succès et l’ampleur des actions.
‘‘Dans les magasins, il y a souvent très peu d’employés. Il nous arrive régulièrement de devoir faire l’ouverture et la fermeture à trois. S’il n’y a que quatre employés pour gérer la foule du soir ; avec trois caisses, il est impossible pour le collègue restant de faire le reste et d’également aider la clientèle et, bien entendu, irréaliste d’assurer la propreté du magasin.
‘‘Ce nombre limité de travailleurs découle de la volonté de flexibilité imposée par la direction. Quatre cinquièmes du personnel n’obtient qu’un contrat à temps partiel de 24 heures. Et quand on ne travaille pas, on est malgré tout en réserve. Si quelqu’un est malade, on nous téléphone durant nos jours de congé pour venir travailler. Pareil si trop de clients arrivent à l’improviste. Et quand la journée est plus calme que prévu, le personnel est renvoyé chez lui. Essayez donc ainsi de planifier votre vie privée !
‘‘Chez Lidl une personne ayant un contrat de 24 heures peut travailler certaines semaines jusqu’à 36 heures et d’autres seulement 12 heures. Cette flexibilité est nécessaire puisque les magasins travaillent systématiquement en sous-capacité. La productivité par magasin fait l’objet d’un suivi quotidien et s’il n’y a pas assez de clients, le personnel est renvoyé chez lui.
‘‘Le déploiement du personnel ne repose donc pas sur le travail disponible, mais sur le chiffre d’affaires. Dans les magasins de la ville, en particulier dans les quartiers où les gens n’ont pas un gigantesque pouvoir d’achat, le montant des achats par client est plus faible que dans les magasins un peu plus éloignés où les clients se rendent en voiture. Par conséquent, un magasin urbain très fréquenté aura un chiffre d’affaires total moins élevé, ce qui signifie moins de personnel, même si un plus grand nombre de clients passe par la caisse. La direction suppose également que 26 articles par minute sont scannés à la caisse. Tout est calculé de manière très serrée avec un seul objectif : le chiffre d’affaires, et donc les bénéfices qui en résultent. Ce sont ces profits qui font la fortune du grand patron de Lidl, Dieter Schwarz, avec ses 20 milliards de dollars, ce qui fait de lui la 52e personne la plus riche au monde.
‘‘Tout le monde ressent la pression du travail et celle-ci n’est pas compensée par un salaire élevé. La revendication syndicale d’un salaire minimum de 14 euros de l’heure serait un pas en avant pour de nombreux collègues. Les problèmes liés à la charge de travail entraînent un taux de roulement élevé : l’an dernier, 900 employés sur 6.000 ont quitté l’entreprise. Avec un tel rythme effréné, le taux d’absentéisme est également très élevé. L’extrême flexibilité signifie que cela ne peut parfois pas être absorbé sur le lieu de travail, ce qui augmente encore plus la pression sur les autres membres du personnel.
‘‘Nous ressentons de plus en plus qu’il est impossible de faire notre travail. C’est la raison pour laquelle tant de magasins ont fait grève en même temps.’’
Comment la grève s’est-elle déroulée ?
‘‘Après une action du syndicat chrétien menée par les employés LBC-CNE contre un licenciement abusif dans un magasin d’Oostkamp, des négociations ont eu lieu au sujet de la pression du travail. Ces négociations ont été très difficiles. L’impasse lors de celles-ci a conduit le syndicat à parler dans les médias d’une grève générale dans tous les magasins.
‘‘Des négociations avaient déjà eu lieu à ce sujet ; la direction était parvenue à éviter les actions syndicales à coup de promesses. Cependant celles-ci n’ont pas été tenues, ou pas entièrement. Cela a débouché sur un nouveau ‘‘style de gestion’’ où avons tous reçu des brochures proclamant que Lidl serait ‘‘un endroit où il fait bon travailler’’. Mais ces coûteuses brochures n’étaient pas accompagnées de mesures sur le terrain.
‘‘Lorsque le blocage fut complet entre la direction et les syndicats fin avril, un certain nombre de magasins se sont spontanément mis en grève. Un jour plus tard, environ la moitié des magasins étaient fermés. Un certain nombre de délégués ont appelé leurs collègues, mais l’extension de la grève fut largement spontanée. Dans de nombreux magasins, le personnel a décidé de fermer les portes et de rentrer chez lui. Dans d’autres, le personnel en congé a été appelé pour remplacer les grévistes. À certains endroits, des interruptions de travail ont eu lieu durant lesquelles le magasin a temporairement fermé ses portes. Fermer autant de magasins simultanément n’est possible que si le mouvement vient véritablement de la base. La tradition syndicale de Lidl n’est pas si forte, beaucoup de grévistes faisaient leurs premiers pas dans la lutte syndicale.
‘‘Les premières actions ont eu lieu le mercredi 25 avril. Le lendemain, la moitié des magasins était restée fermée. Des tentatives ont été faites pour mettre l’accent sur des différences communautaires. Davantage de magasins ont été fermés en Wallonie et à Bruxelles, mais cela a plus à voir avec les traditions syndicales. L’insatisfaction est la même dans tout le pays et les syndicats sont organisés au niveau national au sein de l’entreprise. Après les grèves d’avril, cette tradition a également fait de grands pas en avant du côté flamand.
‘‘Je me suis moi-même rendu dans plusieurs endroits où le personnel m’avait contacté pour me demander ce qu’il convenait de faire et s’il était possible d’entrer en grève. Beaucoup de choses se sont passées en même temps ; c’était difficile de garder une vue d’ensemble et de discuter des prochaines étapes. En tant que délégué, j’ai essayé autant que possible d’accompagner le mouvement spontané et de mener de nombreuses discussions avec les collègues.
‘‘À ce moment, la direction a reconnu qu’il fallait faire quelque chose. Elle a écouté la revendication d’ajouter un équivalent temps plein par semaine et par magasin (42 heures). Mais la direction voulait au départ n’accepter que 8 heures. Lors de la réunion suivante, cela a été porté à 32 heures, puis à 42 heures.
‘‘Puis, la direction n’entendait accorder ces 42 heures que pour six mois. Par la suite, une convention collective devrait régir l’organisation du travail et la flexibilité. Il y a eu beaucoup de discussions entre les syndicats à ce sujet : la LBC-CNE était d’accord pour prendre ces 42 heures temporaires. Le BBTK-SETCa a exigé que ces 42 heures soient mises en œuvre de manière permanente. Vu que les précédentes promesses n’avaient pas été tenues, la méfiance était grande. Le BBTK-SETCa a décidé de poursuivre la grève avec un certain nombre de magasins supplémentaires qui ont été fermés leurs portes.
‘‘Parmi les collègues, les différentes positions des syndicats ont semé le doute, mais la méfiance à l’égard de la direction était la plus forte. C’est dans ce contexte que le SETCa a bloqué les centres de distribution. Ces actions auraient pu être plus massives, mais cela aurait nécessité l’organisation immédiate de la solidarité de l’ensemble du secteur et même d’autres secteurs. Cela ne s’est pas produit. Bien sûr, tout s’est passé très vite, donc ce n’était pas facile non plus. Distribuer un tract aux clients aurait également été utile.
Comment les clients ont-ils réagi ?
‘‘De manière étonnamment positive. Nous n’avons jamais reçu autant de soutien de la part de nos clients. Bien sûr, ils voient aussi comment nous travaillons et comment les magasins sont gérés. Il y avait beaucoup de compréhension. En outre, de nombreux clients doivent également faire face eux-mêmes à de lourdes charges de travail.
‘‘Lors des grèves de 2014 ou 2016, nous avons régulièrement reçu des réactions négatives aux piquets de grève. La propagande antisyndicale générale dans presque tous les médias a certainement eu un impact à l’époque. Or, ce n’était pas du tout le cas ici. L’enjeu du conflit et le large soutien du personnel en faveur de la grève étaient évidents pour tous les clients.’’
Le 1er mai est survenu un accord. Qu’est-ce que cela implique et qu’en est-il de son application ?‘‘Il est arrivé après presque une semaine d’action. La direction a accepté les 42 heures supplémentaires par magasin, ce qui signifie que ces heures s’appliquent réellement à chaque magasin et ne peuvent être prises en charge par des transferts entre magasins. La mesure est également prise pour une durée illimitée. Cela sera nécessaire : les négociations relatives à une convention collective sur l’organisation du travail ne progressent pas sans heurts.
‘‘La direction a laissé entendre que les actions de grève avaient eu un impact sur l’image de l’entreprise. Certaines personnes ne voudraient plus être engagées chez Lidl. Ce n’est pas à cause de la grève, mais de l’attitude de la direction ! Si Lidl veut devenir d’un ‘‘endroit où il fait bon travailler’’, il faut prendre au sérieux la thématique de la charge de travail.
‘‘Nous exigeons que les 42 heures supplémentaires par magasin soient ajoutées autant que possible aux contrats à temps partiel existants. Nous avons remarqué que la mise en œuvre de l’accord sera lente. Avec le Setca, nous insistons pour que chaque magasin obtienne effectivement ces 42 heures supplémentaires dès que possible.
‘‘La direction doit en tenir compte. La pression de la grève et la possibilité de nouvelles actions si les engagements ne sont pas mis en œuvre sont fortement ressenties à la table des négociations. La position des syndicats a été considérablement renforcée. Pour maintenir cette situation, nous devons transformer la large participation à la grève de fin avril en un travail syndical plus actif.’’
Quel sera l’impact de cette grève et de ses résultats sur le reste du secteur ?‘‘Les travailleurs de l’ensemble du secteur subissent une pression croissante sur pour de plus longue plage horaire avec moins d’employés. Le personnel doit également faire preuve d’une plus grande polyvalence entre les différentes fonctions. Dans d’autres chaînes, cela se fait également en travaillant avec des commerçants indépendants (franchisés) ou en démantelant les caisses au moyen de systèmes de self-scan.
‘‘Cela n’existe pas chez Lidl, mais toutes les autres chaînes se tournent vers Lidl pour la flexibilité de son personnel. Idéalement, ils seraient tous ouverts 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, avec le moins de personnel possible. Lors des négociations fin avril, la direction de Lidl a laissé entendre qu’elle trouvait l’ouverture dominicale intéressante. Il est important de mettre un terme à cette flexibilité croissante, sinon elle deviendra la norme dans l’ensemble du secteur.
‘‘Nous voulons du personnel avec des contrats à plein temps et de meilleurs salaires. Afin de rendre la charge de travail supportable, une réduction générale du temps de travail à 30 ou 32 heures sans perte de salaire pour tous est nécessaire. En outre, la flexibilité toujours plus grande doit être limitée par de bons accords sur les tableaux de service et de bonnes conditions de travail. Il doit y avoir plus de personnel pour les équipes volantes, des remplaçants pour les collègues malades. En bref, il faut totalement revoir notre organisation du travail.
‘‘Ceci entre, bien sûr, en contradiction avec les bénéfices de l’entreprise. Cependant, nous devons nous demander quelle est la chose la plus importante : servir les clients ou donner des milliards de profits au grand patron Schwarz en pressant le personnel comme des citrons ? Cela soulève la question sur le type de société que nous désirons.’’
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[Interview] “Il n’y a jamais eu une telle grève chez Lidl”

Le magasin de Deurne Nord. Photo : socialisme.be Ce samedi, c’était le quatrième jour de grève à Lidl. Les négociations de la veille ont abouti à une proposition de la direction rejetée par le SETCa / BBTK. Les deux autres syndicats veulent défendre la proposition. Hier, plus de 100 magasins avaient encore portes closes. Parmi le personnel, la colère gronde depuis un certain temps maintenant. Nous en avons discuté hier avec un délégué sydcial de Lidl à Anvers.
Interview réalisée par Luc (Anvers)
Avant-hier, les négociations ont échoué. Quelle est la situation aujourd’hui ?
“En ce moment, nous faisons le tour de tous les magasins pour informer nos collègues. Avec plus de 100 magasins fermés aujourd’hui, il est clair que nous allons continuer. Les négociations sont bloquées sur notre demande de 42 heures supplémentaires par semaine à allouer immédiatement à chaque magasin, ce qui est une mesure urgente. La direction ne veut l’autoriser que pour une période temporaire de six mois et, dans l’intervalle, entamer des négociations sur une nouvelle convention collective de travail (CCT). Sans nouvelle CCT après 6 mois, les 42 heures supplémentaires seront perdues et nous nous nous retrouverons à nouveau avec rien. Nous voulons que ces 42 heures par magasin/semaine soient permanentes. Ensuite, la pression pour conclure une convention collective de travail saine incombera à la direction et non aux syndicats. Dans le pire des cas, nous aurons toujours ces 42 heures.”
Le porte-parole de Lidl s’est déclaré “amer” suite au rejet de l’accord. Il estime que l’accord était bon et qu’il comprenait même plus que ce que les syndicats demandaient.
“Ils ont fait beaucoup de promesses mais, avec des promesses, nous n’en sommes nulle part. Lidl a déjà promis tant de choses pour faire face à la pression du travail, mais rien n’arrive jamais. L’année dernière, par exemple, l’entreprise a envoyé un courriel à tous les employés pour leur dire que, après les consultations avec les syndicats, il était devenu évident que la charge de travail posait problème et que cela allait être réglé. Rien n’a été fait. Dans les faits, ils nous promettent des choses depuis deux ans. J’ai tout un dossier remplis de points d’action et de plans de la direction pour faire face à la charge de travail. Mais rien n’a encore été réalisé.”
Comment la grève a-t-elle commencé ? Elle semble s’être développée en grande partie spontanément ?
“Il y a quelques semaines, une grève a éclaté dans un magasin d’Oostkamp après le licenciement d’un directeur des ventes. La problématique de la charge de travail a également été posée. La CSC a lané un préavis de grève pour l’ensemble du groupe Lidl. Des consultations ont eu lieu mercredi dernier mais, une fois de plus, la direction n’a pas été plus loin que les promesses de s’en prendre à la charge de travail. Pour couronner le tout, la direction voulait aussi parler de prolongation des heures d’ouverture et d’ouverture le dimanche.
“A ce moment, un certain nombre de magasins se sont mis en grève presque immédiatement. Quelques magasins étaient bien préparés et se sont mis en grève immédiatement après la consultation. Le personnel de nombreux autres sites s’est joint spontanément au mouvement. C’est aussi la force de la grève. On a pu voir où les syndicats sont plus présents, mais dans beaucoup d’endroits, la grève a commencé spontanément de bas en haut, sans que la délégation syndicale ait beaucoup de contrôle sur elle.
“Dans la région d’Anvers, où je travaille, c’est parfois plus difficile en raison de la rotation et de la composition du personnel. Parfois, je dois commencer par expliquer ce qu’est un syndicat. Mais je reçois aussi des appels de collègues qui me demandent s’ils peuvent fermer leur filiale. En considérant que les directeurs de filliale et la direction répandent beaucoup de mensonges et que des menaces de sanctions existe, on se rend compte que cette vague de grèves est vraiment forte.
“Cette grève est déjà historique. Jamais auparavant Lidl n’avait fait grève à une telle échelle. Dans de nombreux magasins, les collègues ont spontanément pris l’initiative de se joindre au mouvement de grève. Les pressions sont toutefois nombreuses de la part de la direction et des directeurs de filliale. Localement, il y a des menaces de licenciement, de délocalisation, etc. Hier, dans certaines filiales, il a été dit qu’il ne fallait pas faire grève puisque des négociations étaient en cours. Cela a été officiellement contredit, mais il est clair qu’il y a une stratégie derrière ces allégations. Pour de nombreux collègues, ce n’est pas facile de s’opposer à leur direction, mais ils le font.”
Quelles sont les prochaines étapes ?
“En ce moment, c’est plutôt chaotique. Aujourd’hui, nous informons le plus grand nombre possible de collègues sur l’état des lieux. Une certaine confusion existe et parfois des doutes, parce que les dirigeants syndicaux ne sont pas du même avis. Certains pensent qu’il vaudrait mieux accepter la proposition de la direction parce que c’est quelque chose de concret à avoir et que sinon nous courons le risque de nous retrouver les mains vides. En même temps, la prise de conscience que ce n’est pas une véritable solution se développe.
“Le défi est maintenant, avant tout, de faire du lundi une grande journée d’action où le plus grand nombre possible de magasins resteront fermés. Tous les magasins ne seront peut-être pas en grève, mais les actions vont s’étendre.”
La concurrence dans le secteur de la distribution est féroce. Fin de l’année dernière, il y a eu l’annonce d’une restructuration chez Carrefour, et cela été le cas chez Delhaize. Comment situes-tu ce problème dans son contexte ?
“Oui, Lidl veut concurrencer Delhaize, Carrefour,…. Lidl est passé d’un hard discounter à des magasins avec une gamme plus large : avec des marques, sa propre boulangerie, un plus vaste rayon frais,… Tout exige de prendre plus de temps, mais nous devons tout faire avec le même nombre de collègues, voire même moins. Nous devons travailler plus et plus intensément pour recevoir moins d’argent.
“En ce moment, Aldi connaît une forte progression. Il y a de bonnes chances que Lidl soit rattrapé ou dépassé dans la compétition. De cette telle manière, nous sommes aux prises avec une spirale infernale où la pression ne cesse d’augmenter sur nos épaules afin de protéger les profits. Il est important d’y faire face.
J’imagine que des mesures gouvernementales comme la Loi Peeters ne sont pas particulièrement utiles non plus.
“Nous travaillons déjà de manière extrêmement flexible. Une grande partie des mesures introduites par Peters étaient déjà en vigueur depuis un certain temps. Un problème particulier pour nous est l’extension des emplois flexibles au commerce et la facilitation du travail de nuit pour le commerce électronique. Le commerce électronique est actuellement très limité chez Lidl, mais il peut avoir un impact énorme sur nos conditions de travail. Sans parler des pensions. Presque personne chez Lidl n’a un contrat à temps plein. Les conséquences pour nos pensions seront désastreuses si les projets du gouvernement sont effectivement mis en œuvre.
Comment penses-tu que des avancées peuvent être arrachées ?
“Tout d’abord, il est important que nous gagnions cette bataille et ainsi, à court terme, de gagner ces 42 heures de manière permanente. Cela ne sera possible que si nous sommes en mesure d’étendre les actions ce lundi. En fait, j’avais espéré que d’autres enseignes rejoignent la lutte, mais ce n’est malheureusement pas le cas. Mais si nous voulons contrecarrer la concurrence actuelle dans le secteur de la distribution, ce sera la voie à suivre et nous devons étendre la lutte à l’ensemble du secteur.”
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Le personnel de Lidl se soulève contre la pression insoutenable au travail
Les clients réguliers peuvent le constater à chacune de leurs visites : la charge de travail est terriblement élevée chez Lidl, le personnel y est très peu respecté et tout doit être le plus bon marché possible. Le problématique est commune à l’ensemble du secteur, cela fait l’objet de négociations entre les syndicats et les employeurs depuis déjà de nombreuses années. Sans grand effet jusqu’ici: le rythme et la pression au travail ne cessent d’augmenter. Si l’on ne peut pas tenir le coup, c’est la porte de sortie. La concurrence s’intensifie de même que la recherche de profits par les actionnaires. Ces profits ne manquent pas : Lidl a réalisé un bénéfice global de 1,5 milliard d’euros en 2015.Par un délégué du secteur
Le 7 avril, un magasin Lidl à Oostkamp est resté fermé pendant une demi-journée en raison de la pression au travail. La direction a tenté de limiter la situation à un cas isolé. On s’est même permis de rire avec la charge de travail. Mais quelque avait été enclenché. La direction a promis de parvenir à une solution négociée, mais quand une autre négociation s’est révélée infructueuse s’est terminée le 25 avril, une vague spontanée de grèves a commencé. Le personnel a décidé de faire pression sur la direction pour qu’elle trouve des solutions.
L’initiative a été prise par la base, sans qu’un appel ne soit lancé par les syndicats. La grève s’est propagée à grande vitesse, confirmant par là même à quel point la problématique de la charge de travail est répandue dans toute la chaîne. Le personnel en a assez.
La direction a-t-elle compris le message ? C’est discutable. Le grand patron Dieter Schwarz est le 52e homme le plus riche du monde avec un actif de 20,9 milliards de dollars, mais ce n’est pas encore suffisant pour lui. Cela n’a pas été compensé par une attitude humaine à l’égard de son personnel.
Au cours des négociations, le conseil d’administration a proposé que chaque magasin puisse déployer 42 heures de travail supplémentaires par semaine, soit un employé à temps plein supplémentaire. Mais la direction a voulu limiter cela à six mois afin de trouver d’autres solutions dans l’intervalle. Étant donné cette courte période et les nombreuses promesses non tenues dans le passé, le SETCa n’a pas accepté la proposition.
L’augmentation de la pression du travail cause des problèmes dans un nombre croissant d’entreprises. Cela pousse les travailleurs à entrer en action. Pensons aux actions de l’an dernier chez Volvo Cars et Volvo Trucks. Lorsque les syndicats mettent la question sur la table, les employeurs ne veulent rien faire. Le gouvernement parle beaucoup de “travail faisable”, mais sa politique facilite la tâche des employeurs qui rendent notre travail impossible. Cette question reviendra de plus en plus souvent : l’augmentation de la charge de travail est un moyen d’augmenter les profits des actionnaires.
Une solution au problème serait, bien sûr, le recrutement de personnel permanent supplémentaire afin que le travail puisse être réparti. Une réduction du temps de travail à 30 heures par semaine avec maintien du salaire et recrutement supplémentaire (où les contrats actuels de 30 heures seraient automatiquement convertis en contrats à plein temps avec salaires associés) fait également partie de la solution. Nous devons organiser la lutte et discuter des revendications et des tactiques nécessaires au sein des syndicats et avec nos collègues afin de remporter des victoires.