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Tag: Labour Party
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10 ans après le début de la guerre en Irak
La moisson impérialiste de la mort et la destruction
Il y a dix ans de cela, sous la dénomination, la coalition dirigée par les États-Unis attaquait l’Irak. Malgré une énorme opposition publique, symbolisée par dix millions de manifestants anti-guerre à travers le monde le 15 et 16 février 2003, la campagne ‘‘choc et effroi’’ de bombardement débuta le 20 mars suivie, quelques heures plus tard, de l’invasion territoriale.
Par Niall Mulholland, Socialist Party (CIO Angleterre et Pays de Galles)
L’énorme force militaire envahissait une population qui avait souffert de 35 ans de dictature sous Saddam Hussein, de la guerre du Golfe de 1991, et de 13 ans de sanctions cruelles des Nations Unies, qui ont détruit l’économie irakienne, réduit des millions de gens à la pauvreté et couté de un demi-million à un million de vies irakiennes.
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‘‘Ravager, massacrer, usurper sous de faux noms, ils appellent cela l’empire ; et, où ils ont fait un désert, ils disent qu’ils ont donné la paix.’’ Caius Cornelius Tacitus (Tacite, 56-117), historien romain.
La fiction des armes de destruction massive
La guerre de 2003 fut « justifiée » par un torrent de propagande et de mensonges émanant de Washington et de Downing Street, relayé par la complicité de l’appareil médiatique de droite.
Le président Bush accusait alors le dictateur irakien, Saddam Hussein, de tenter d’acquérir de l’uranium pour développer des « armes de destruction massive ». Le secrétaire d’État américain, Colin Powell, annonça aux Nations Unies que l’Irak se munissait de capacité d’armes biologiques. Tony Blair, le premier ministre anglais du Labour Party, proclama que les armes de destruction massive irakiennes pouvaient être prêtes à être utilisées « dans les 45 minutes ». Saddam fut aussi accusé de soutien à Al-Qaida.
Tout ceci n’était que mensonges. Très vite après l’invasion, les forces occupantes ne purent apporter les preuves d’existence des armes de destruction massive de Saddam ou des liens entre l’ancien régime de Saddam et le « terrorisme ». En fait, ce fut l’occupation qui causa le ressentiment qui permit à la terreur d’Al-Qaida de s’installer en Irak.
A la veille du 10ème anniversaire de la guerre, l’ancien premier ministre déclarait encore à la BBC : « Quand vous me demandez si je pense aux pertes de vie depuis 2003, bien sûr. Je serais inhumain de ne pas le faire, mais pensez à ce qui serait arrivé si on avait laissé Saddam en place. »
Les commentaires habituels de Blair ne s’attachent pas à l’énorme coût humain de la guerre. Selon plusieurs études ; de 2003 à 2011, de 150.000 à 400.000 irakiens ont violemment perdu la vie. The Lancet, journal médical réputé, a estimé un chiffre encore plus gros de 600.000 morts violentes entre 2003 et 2006 seulement. Ajouté à cela, il y a des milliers d’irakiens qui sont toujours portés disparus et des milliers d’américains, d’anglais et d’autres soldats de la coalition militaire qui ont péris ou ont été sévèrement blessés.
La moisson de la mort en Irak a laissé 2 millions de veuves qui doivent, seules, rapporter le pain dans leur foyer et 4 à 5 millions d’orphelins (dont 600.000 qui vivent dans les rues). La guerre a poussé 4 millions de personnes à fuir, dont 1 million vers la Syrie. 1,3 millions d’irakiens ont dû fuir ailleurs en Irak. Depuis 2008, de ceux-ci, seule 1 personne sur 8 de a pu rentrer chez elle.
L’aventure irakienne de Bush et Blair a également eu un énorme coût pour l’économie américaine. Selon l’économiste Joseph Stiglitz, ancien chef de la Banque Mondiale, cela a prélevé 3 trillions de dollars hors de l’économie américaine. Alors qu’il y a toujours des fonds pour mener des guerres à l’étranger pour le compte des profits et des intérêts commerciaux, les travailleurs anglais et américains voient leur niveau de vie tomber dramatiquement.
Les justifications de Blair continuent
Les interviews de Blair n’arrivent pas à lui faire avouer les véritables raisons de l’invasion. A la place de la guerre d’agression impérialiste, c’est « l’intervention humaniste » et les tentatives de Blair et de Bush d’exporter la démocratie libérale de type occidentale au Moyen Orient qui est présentée.
Les classes dirigeantes internationales étaient divisées quant à l’Irak. Les pouvoirs mondiaux et régionaux étaient craintifs quant aux conséquences de l’invasion et aux gains que les États-Unis allaient se faire sur leur dos. Les néo-conservateurs de Bush ont tout de même poussé à la guerre.
Les impérialismes américain et britannique, qui avaient précédemment soutenu Saddam, ne sont pas partis en guerre pour arrêter l’oppression, introduire des droits démocratiques ou améliorer les niveaux de vie.
Pendant des décennies, le régime sadique de Saddam a tué et terrorisé les irakiens tout en profitant du soutien occidental. Après le renversement d’un autre despote favori des occidentaux, le Shah d’Iran, l’occident encouragea Saddam à envahir son voisin. Des millions de personnes périrent ou souffrirent de terribles blessures à la suite de cette guerre qui dura 8 années.
Mais Saddam, en envahissant le Koweït voisin en 1991, est allé à l’encontre des intérêts des impérialistes occidentaux. Le potentiel qu’avait Saddam de contrôler l’approvisionnement vital en pétrole a terrifié les pouvoirs occidentaux qui ont très rapidement constitué une force militaire massive.
Lors de la première guerre du Golfe, la coalition menée par les États-Unis a vite repris le petit État riche en pétrole mais fut arrêtée aux frontières irakiennes. Peu d’intérêt fut porté à l’opposition à Saddam en 1991. Les forces militaires occidentales croisèrent les bras alors qu’un soulèvement des chiites et des kurdes fut brutalement réprimé par le dictateur.
Exploitant cyniquement l’attaque terroriste atroce d’Al-Qaida du 11 septembre 2001, la Maison Blanche et Downing Street ont avidement sauté sur l’opportunité d’une intervention militaire directe pour renverser Saddam et pour imposer un régime docile pro-occidental.
S’emparer du contrôle des réserves abondantes de pétrole irakien, estimé à 9% du total mondial, était un objectif clé pour l’impérialisme américain, en tant qu’intérêts géostratégiques vitaux dans le Moyen-Orient.
Peut-être était-ce pour éviter que ces véritables intentions ne deviennent de notoriété publique que le Cabinet a insisté pour que le rapport Chilcot publié tardivement ne contienne aucune preuve évidente qui pourrait révéler de quoi discutaient Bush et Blair avant l’invasion.
Appui aux dictateurs
Avant la première guerre du Golfe et les années de sanction, le taux d’alphabétisation en Irak dépassait les 90%. 92% des irakiens avaient accès à l’eau potable et 93% bénéficiaient de soins de santé gratuits.
En 2011, après l’occupation impérialiste, 78% des adultes sont instruits et 50% de la population vit dans des bidonvilles (17% en 2000).
Plus d’un million d’irakiens sont exilés à travers l’Irak. Près de la moitié des 400.000 réfugiés dans la capitale (personnes déplacées victimes de la terreur sectaire) vivent dans la misère des bidonvilles.
Selon la Banque Mondiale, un quart des familles irakiennes vit sous le seuil de pauvreté. Moins de 40% des adultes disposent d’un emploi. Des millions de personnes manquent d’électricité, d’eau potable et d’autres services essentiels.
[/box]Bush et Blair n’ont pas été confrontés à la justice pour leurs crimes de guerre irakiens. La Cour pénale internationale, tout comme les Nations Unies, est dominée par les intérêts des Etats-Nations les plus puissants. Seuls les anciens despotes et les seigneurs de guerre des Balkans et d’Afrique, qui s’étaient confrontés à l’impérialisme, ont été poussés devant la Cour à La Haye.
Parmi toutes ses justifications pour ses massacres de guerre, Blair a demandé « Si nous n’avions pas retiré Saddam du pouvoir, pensez juste, par exemple, ce qui serait arrivé si les révolutions arabes s’étaient poursuivies à l’heure actuelle et que Saddam, qui est probablement 20 fois pire qu’Assad en Syrie, essayait d’écraser un soulèvement en Irak ?
Il est incontestable que Saddam était un tyran brutal et que son régime a massacré de nombreuses personnes dont des communistes et des syndicalistes. Mais l’ancien premier ministre n’a aucun problème avec les dictateurs en-soi. Les associés de Tony Blair conseillent aujourd’hui le despote du Kazakhstan, Nazarbayev, le boucher des travailleurs du pétrole en grève. Et l’Irak « libérée » de Blair est actuellement dirigée par le Premier Ministre Nouri al-Maliki, que même le journal de droite The Economist accuse de « tendances dictatoriales ».
L’invasion de 2003 a considérablement augmenté parmi les arabes le sentiment d’humiliation et d’injustice vis-à-vis de l’impérialisme. Cela a été un facteur important qui a conduit aux révolutions de 2011 contre les dictateurs soutenus par l’occident dans le Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Tout comme cela a semé la colère contre l’absence de droits démocratiques, le chômage de masse et la pauvreté dans ces sociétés.
Le « Printemps arabe » ne justifie pas du tout l’aventure néocoloniale de Blair mais confirme en fait nos positions dans le déroulement de la guerre en Irak : que le renversement du tyrannique Saddam était la tâche de la classe ouvrière irakienne par un mouvement de masse unifié.
Fin 2010 et début 2011, le renversement des proches alliés de l’occident, Ben Ali et Moubarak – qui étaient des dictateurs soi-disant « imprenables » tout comme Saddam – a montré que c’est aussi une voie d’action possible pour les masses irakiennes.
« Résoudre le conflit israélo-palestinien ? »
John Prescott, Vice-Premier ministre du Royaume-Uni (Labour) en 2003, aujourd’hui Lord Prescott, a admis récemment à la BBC que l’invasion de l’Irak en 2003 « ne pouvait être justifiée ». Il a déclaré avoir soutenu l’invasion parce qu’il croyait que George Bush avait un plan pour résoudre le conflit israélo-palestinien.
Bush et Blair ont proclamé que la défaite de Saddam Hussein pouvait être une impulsion pour un nouveau plan pour la paix en Israël et en Palestine. Mais comme nous l’avions prévu en 2003, l’oppression des palestiniens allait continuer sans relâche après l’invasion irakienne. Pour ses propres intérêts impérialistes géostratégiques, les États-Unis continuent de soutenir Israël, son plus proche allié dans la région, pendant que l’indépendance et l’auto-détermination palestiniennes sont plus éloignées que jamais.
Dans une interview accordée à l’édition nocturne de la BBC, Blair a consenti que « la vie quotidienne en Irak aujourd’hui n’est pas ce qu’il souhaitait qu’elle soit » quand il a mené son invasion dix ans plus tôt. Il poursuivait en disant qu’il y avait des « améliorations significatives » mais que « c’était loin d’être ce que ça devait être ».
C’est un euphémisme ! Nous nous sommes résolument opposé à l’intervention impérialiste en 2003 et prédisions très justement que cela mènerait à l’oppression et au chaos – ouvrant les portes à une conflit sectaire – et que l’impérialisme serait englué dans un long conflit.
La politique impérialiste de dé-Baasification du régime de Saddam largement basé sur les sunnites et la dislocation de l’armée irakienne, a entraîné des purges sectaires des sunnites. Cela a enflammé la résistance de ceux-ci.
L’occupation coloniale brutale, incluant la torture et l’abus systématique des civils dans les prisons comme celle d’Abu Ghraib, le siège de la ville de Falloujah et le massacre de combattants de la résistance et de beaucoup de civils dans des villes comme Haditha et Balad, ont provoqué une opposition de masse croissante – non exclusivement sunnite – contre l’occupation menée par les États-Unis. Le sentiment anti-guerre a grandi aux États-Unis, en Angleterre et partout dans le monde.
En dépit de son impressionnante machine militaire et de son trésor de guerre, la coalition fut incapable d’écraser la résistance et a recouru à la technique de « diviser pour mieux régner ». Ils ont soutenu les chiites contre les sunnites, créant une orgie de sang.
Conséquences
En 2004, selon des enquêtes du Guardian et de la section arabe de la BBC, l’administration Bush s’est tournée vers « l’option salvadorienne » – nommée ainsi suite au rôle joué par les États-Unis dans la gestion des escadrons de la mort d’extrême droite au Salvador dans les années ‘80. Les milices chiites ont été armées et financées par les États-Unis. Des centaines de milliers d’irakiens ont été tués et des millions exilés par la suite. Les sunnites furent les grands perdants de la guerre civile sectaire.
Une constitution imposée par les États-Unis a institutionnalisé les divisions sectaires et ethniques. Les élections en 2005 ont vu les partis chiites remporter la majorité au parlement et le poste de premier ministre.
Une classe dirigeante corrompue et réactionnaire et des partis politiques sectaires se battent pour les ressources naturelles irakiennes pendant que la majorité de la population vit dans la pauvreté. Bien que l’Irak dispose de 100 milliards de dollars annuels en revenus pétroliers, très peu de cet argent est alloué à la population. L’Irak est le 8ème pays le plus corrompu au monde selon Transparency International.
La Capitale Bagdad, qui héberge un cinquième des 33 millions d’irakiens, est toujours une ville en guerre, divisée par les postes de contrôle militaires et en proie aux attentats sectaires. Bagdad et le centre du pays souffrent quotidiennement de bombardements, d’assassinats et d’enlèvements.
L’héritage de Bush et de Blair comprend un quintuplement des malformations congénitales et une multiplication par quatre du taux de cancer dans et autour de Falloujah. Ce sont des conséquences de l’utilisation par les forces de la coalition de munitions radioactives appauvries en uranium.
Les politiciens occidentaux aiment différencier Bagdad à la paix relative qui règne dans la région kurde riche en pétrole et dans les provinces majoritairement chiites. Mais ce n’est qu’illusion.
Les chiites dans le sud sont relativement protégés car une communauté domine largement. Le chômage y est cependant élevé et la plupart des chiites vivent encore dans une pauvreté effroyable.
Les Kurdes
Des tensions entre les Kurdes, les Arabes et d’autres minorités sont toujours présentes dans le gouvernement régional kurde semi-indépendant. Au grand dam du gouvernement central de Bagdad, le régime kurde a conclu 50 accords pétroliers et gaziers avec des compagnies étrangères et exporte directement du pétrole en Turquie.
Après des décennies d’oppression brutale, beaucoup de Kurdes espèrent pouvoir obtenir une véritable auto-détermination. Mais le gouvernement régional kurde est entouré d’états qui ont une longue histoire dans l’oppression kurde. Les dirigeants réactionnaires kurdes se sont alliés aux États-Unis et à la Turquie, qui fut l’un des pires auteurs de leur oppression.
Un élément indicateur du conflit grandissant autour du pétrole et des territoires entre le gouvernement régional turc et le régime central irakien est l’affrontement entre les combattants peshmerga kurdes et les troupes irakiennes.
Le retrait de Saddam n’a pas transformé le monde en « un lieu sûr » comme l’avaient promis Bush et Blair. Dans les faits, le monde est devenu encore plus violent et instable. Saddam ne possédait pas d’armes de destruction massive mais, après l’invasion de 2003, les « Etats voyous », comme la Corée du Nord, ont conclu que le seul moyen d’arrêter les attaques menées par les États-Unis contre eux était d’acquérir ces armes.
Malgré la déroute de l’impérialisme en Irak, les États-Unis et la Grande-Bretagne continuent de mener des conflits partout dans le monde pour servir leurs intérêts vitaux. Tentant de maintenir une distance avec la guerre de Blair, Ed Miliband a déclaré que la guerre en Irak avait été une erreur mais il continue à soutenir les troupes britanniques en Afghanistan et ne plaide pas pour la fin des frappes de drones américains.
La guerre de 2003 et l’occupation ont eu des conséquences à long terme pour la région. Installer des forces occidentales en Irak visait à isoler et à encercler davantage l’Iran. Mais Téhéran a compris qu’elle avait une influence sur le gouvernement irakien dominé par les chiites et « l’arc chiites » a été renforcé.
En partie pour contrer l’Iran, les États réactionnaires du Golf et l’impérialisme occidental sont intervenu en Syrie, exploitant l’opposition sunnite à Assad. Le conflit syrien se répercute au Liban et en Irak, ou un « Printemps sunnite » a vu des manifestions d’opposition de masse dans les zones sunnites.
Révolution
La majorité des irakiens ne veulent pas être replongés dans les horreurs de la guerre civile. Mais pour empêcher d’autres conflits, pour en finir avec l’interférence impérialiste et pour se débarrasser des élites dirigeantes réactionnaires et corrompues, les travailleurs ont besoin d’une alternative.
L’Irak avait une gauche forte jusqu’à ce qu’elle soit écrasée par la CIA dans les années ‘60 et par le régime de Saddam par la suite.
La plus importante leçon de cette tragédie et des horreurs de la dernière décennie est la nécessité pour les travailleurs d’avoir un parti de classe indépendant pour lutter pour leurs intérêts. Un tel parti revendiquerait la nationalisation des richesses pétrolières, sous la propriété publique démocratique au bénéfice de la population.
Comme les révolutions de 2011 en Égypte et en Tunisie l’ont montré, des luttes de masse peuvent se développer contre les tyrans et, malgré les limites du mouvement, peuvent les démettre du pouvoir. Mais pour parvenir à un véritablement changement de société, les travailleurs ont besoin d’un programme socialiste dans chaque pays, régionalement et internationalement.
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Action de solidarité contre la loi homophobe en Russie
Une centaine de personnes se sont rassemblées ce mardi 22 janvier en face de l’Ambassade de Russie à Bruxelles. Ces derniers ont manifesté leur solidarité avec les LGBT russes et leurs sympathisants qui s’opposent à un projet de loi visant à interdire ”la propagande homosexuelle parmi les jeunes”. Le PSL/LSP est intervenu avec une équipe de membres portant des pancartes où l’on pouvait lire, entre autres, ”Solidarité internationale contre l’homophobie et les répressions politiques en Russie”.
Rapport de Stéphane, photos de Nico M (Bruxelles)
De nombreuses associations LGBT de toute la Belgique et des organisations politiques ont aussi fait le déplacement. Notons notamment la présence de membres de la cellule diversité de la FGTB-Bruxelles qui a lancé en mai dernier une campagne de sensibilisation contre l’homophobie dans le milieu du travail.
Des parlementaires belges et un eurodéputé anglais du Labour Party ont pris la parole pour soutenir la lutte des droits des LGBT en Russie et ailleurs. Mais nous devons comprendre leur discours avec une certaine critique. En effet, ces derniers sont membres de partis politiques, en Belgique et en Europe, qui mènent des plans d’austérité les uns après les autres.
Au lieu de mettre en place des plans d’actions pour créer des emplois décents, pour construire de bons logements publics et pour maintenir des services publics gratuits et de qualité, ces ”défenseurs des droits des LGBT” mettent en place un appauvrissement généralisé d’une très grande majorité des travailleurs et de leur famille et installent ainsi les conditions propices qui créent des tensions entre les travailleurs, tensions qui s’expriment par du racisme, du sexisme et/ou de l’homophobie. Démolir les conditions de travail et de vie des travailleurs d’un côté et défendre les droits LGBT de l’autre, ce sont deux choses contradictoires.
La commission LGBT du PSL pense que c’est en se battant pour des emplois pour tous, des logements pour tous et des services publics gratuits pour tous que l’on pourra réellement commencer à lutter contre l’homophobie et toutes les discriminations qui divisent les travailleurs.
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1984 : quand Liverpool a tenu tête à Thatcher

Dès le printemps 1984, le conseil communal de la ville de Liverpool a entamé une bataille contre le gouvernement conservateur de Margaret Thatcher. Un mouvement de masse est apparu dans la cinquième plus grande ville du Royaume-Uni contre le plan d’austérité et de privatisation. Cette lutte était menée par les membres de notre parti-frère anglais, qui étaient alors organisés au sein de l’ancien Labour Party autour du journal “Militant”. À Liverpool, leur tendance était même la force dirigeante au sein du parti travailliste.
Par Bart Vandersteene
Cette lutte historique montre ce qui est possible lorsqu’un parti est prêt à donner une direction qui place en son centre les intérêts des travailleurs. À ce moment-là, les administrations locales se voyaient contraintes par le gouvernement central d’exécuter d’importantes coupes budgétaires impliquant entre autres des privatisations, la hausse des taxes locales, etc.
Mais il n’en a pas été ainsi à Liverpool. Il y avait là un conseil communal dont la direction, le programme et surtout les tactiques avaient été élaborées au cours de la lutte par la puissante organisation Militant. Le groupe Labour dans le conseil communal de Liverpool était également composé d’autres membres Labour de gauche, et même de quelques éléments de la droite du parti. Les membres de Militant étaient en minorité, mais dans la plupart des cas, ce sont leurs propositions d’actions et idées qui étaient acceptées.
Aujourd’hui, les partis de soi-disant “gauche” sont des fondamentalistes budgétaires. Ils insistent sur le fait que le budget doit être en équilibre. Mais dans le contexte d’une administration locale, Liverpool a défendu la nécessité d’un budget basé sur des pertes, dont les rentrées seraient insuffisantes pour les dépenses prévues. Sur cette base, une campagne massive a été menée afin de contraindre le gouvernement à accorder plus de ressources aux communes.
Le Labour a gagné les élections communales à Liverpool en mai 1983 à l’encontre de la tendance nationale et ce, grâce à un programme complètement différent de celui que présentait le Labour dans le reste du pays. La majorité Labour à Liverpool a cependant tenu ses promesses électorales. Elle avait promis de revenir sur les licenciements des 2000 membres du personnel communal qui avaient été effectués par la précédente administration Labour. Les libéraux avaient géré la ville pendant dix ans et avaient gelé tous les projets de construction de logement sociaux. Le nouveau conseil communal a au contraire décidé de lancer un plan ambitieux de 5000 nouveaux logements à construire en quatre ans. En quatre ans, plus de nouveaux logements sociaux ont été construits à Liverpool que dans toutes les autres communes du pays prises ensemble. 12 000 emplois ont été créés dans le secteur du bâtiment à un moment où le taux de chômage de la ville se tenait à plus de 25 %, voire 90 % parmi la jeunesse dans certains quartiers de la ville !
Le salaire minimum des employés communaux a été relevé de 100 livres par semaine, et le temps de travail est passé de 39 à 35 heures par semaine, sans perte de salaire. Le conseil communal employait 30 000 personnes, faisant de lui le plus grand employeur de la région.
Militant a démontré dans la pratique que les révolutionnaires étaient en réalité les seuls capables d’accomplir des “réformes”, sur base de la lutte.
Si Liverpool s’était abaissé à la logique d’austérité dure que voulait lui imposer le gouvernement, alors le budget de la ville pour 1984 aurait dû être de 11 % inférieur à celui de 1980-81. 6000 emplois auraient dû être perdus afin de faire passer le budget à l’équilibre.
Les administrations locales pouvaient être condamnées à payer une amende ou être congédiées au cas où elles établissaient un budget dans lequel ils dépensaient plus que ce qu’ils recevaient. Les conseillers communaux de Liverpool ont cependant proclamé que ce n’étaient pas eux qui enfreignaient la loi, vu qu’il vaut mieux aller à l’encontre d’une mauvaise loi que d’appauvrir la population de toute une ville. Selon un sondage d’opinion dans le Daily Post (24 septembre 1985), 60 % de la population – dans une ville de 500.000 habitants – était d’accord avec l’idée d’exiger plus d’argent de la part du gouvernement national. Seuls 24 % étaient contre. 74 % de la population disaient qu’en cas d’une grève des employés communaux, ils accepteraient l’interruption des services comme les écoles, la collecte des déchets, etc. afin de soutenir le conseil communal.
Le gouvernement a lancé une campagne complètement folle dans les médias à l’encontre de Liverpool – campagne qui serait poursuivie plus tard par la direction nationale du Labour. Plus d’une fois, Thatcher a menacé d’envoyer l’armée pour expulser les élus locaux ! Dans un courrier, un lecteur d’un journal local avait répondu : ‘‘Je ne sais pas qui était Léon Trotski, mais à en juger par le nombre de maisons qui ont été construites à Liverpool, il doit avoir été un fameux maçon !’’
La lutte n’a pas été limitée à la salle de réunion du conseil communal, elle s’est aussi déroulée dans les rues, sur les entreprises et dans les quartiers. Face à la mobilisation de la population, Thatcher a été contrainte de lâcher des concessions. Le 29 mars 1984, jour où devait être voté le budget d’austérité du gouvernement, une grève générale locale de 24 heures a été déclarée. Celle-ci a été une des plus grandes grèves jamais vues à l’échelle d’une ville. 50.000 personnes ont manifesté en direction de l’hôtel de ville pour exprimer leur soutien au conseil communal.
Le 9 juin 1984, le gouvernement a fait toute une série de concessions d’une valeur totale de 16 millions de livres, entre autres parce que les mineurs étaient eux aussi partis en grève. Thatcher savait qu’elle ne pouvait obtenir aucune victoire en se battant sur deux fronts à la fois, et a décidé de tout d’abord se concentrer sur les mineurs.
Thatcher n’a pas pu vaincre Liverpool sur une base démocratique. Le Labour a gagné quelques voix dans cette période. Lors des élections nationales de 1983, 47% de la ville (128 467 voix) a voté pour le Labour. Cela s’est accru à 57 % des 155 083 voix de la ville lors des élections de 1987. Les “47” de Liverpool (les 47 conseillers communaux Labour qui ont mené la lutte jusqu’au bout) ont été démis de leurs fonctions par un tour de passe-passe juridique à la chambre des Lords, un organe non-élu hérité du féodalisme! Cela n’a été possible qu’après qu’une alliance ait été conclue entre Thatcher et la direction nationale du Labour. Une somme de plus d’un-demi million de livres a été dépensée en frais judiciaires dans le cadre du procès des “47”, une somme qui aurait tout aussi bien pu être dépensée pour satisfaire aux besoins des travailleurs.
La section du parti à Liverpool a été dissoute puis placée sous un contrôle très strict d’en-haut. Les membres de Militant ont été exclus du parti et n’ont plus pu se présenter sous le nom de “Labour”. Il en a été de même avec la grande campagne de diffamation qui a suivi. Les actions contre Militant à Liverpool n’étaient que le début d’une sorte de contre-révolution politique au sein du Labour Party, qui est arrivée à sa conclusion logique sous Tony Blair, avec la reformation complète du parti en tant que parti entièrement bourgeois.
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Nigéria : meeting du DSM pour débattre de l'état de la nation
”Seule une révolution socialiste peut sauver le Nigéria – un pays immensément riche, mais dont la majorité des citoyens sont perpétuellement pauvres” – Segun Sango
Le dimanche 19 février 2012, le Democratic Socialist Movement (DSM, section nigériane du CIO) a organisé un meeting à Lagos, dont le but était de réunir nos membres, et aussi et surtout les nombreux membres potentiels que nous avons rencontrés à Lagos au cours de la grève générale et des actions de masse de janvier dernier contre la hausse du prix de l’essence.
Une discussion extrêmement intéressante a eu lieu sur l’état du Nigéria et sur les perspectives de progrès. Entamant la discussion, Segun Sango (Secrétaire général du DSM) a expliqué que la dernière grève générale en janvier est la confirmation que les masses laborieuses, les jeunes et les pauvres du Nigéria sont bel et bien capables d’accomplir une transformation révolutionnaire au Nigéria.
Lanre Arogundade a ajouté que cette dernière action ne devrait pas seulement renouveler notre confiance en notre capacité d’accomplir le changement ; nous devons également tirer des leçons utiles afin d’assurer la victoire de la lutte future. Une leçon cruciale tirée de la grève générale est le fait que nous avons besoin d’un parti ouvrier de masse afin de prendre le pouvoir politique.
Ceci est crucial, étant donné le fait que la situation va de mal en pis, malgré les promesses de palliatifs afin d’éviter que les gens ne soient trop fortement touchés par la suppression partielle des soi-disant subsides sur l’essence. Les prix de l’alimentation, des transports et d’autres produits et services de base, qui ont flambé au moment de la hausse du prix de l’essence, ne sont pas encore revenus à leur niveau d’avant janvier. D’ailleurs, l’Office national des statistiques a dit que le taux d’inflation dans le pays s’est tout d’un coup hissé à 12,6% en janvier, comparé à 10,6% en décembre, avant la hausse du prix de l’essence.
À présent, la “sonde publique pour la gestion du subside” organisée par l’Assemblée nationale est en train de créer la frénésie des médias ; toutefois, tout cela n’est qu’un cirque : il n’y a toujours aucune preuve fiable de la volonté du gouvernement de réellement faire quelque chose contre la corruption dans le secteur pétrolier.
Cela n’est pas une surprise. L’ensemble de l’appareil gouvernemental lui-même est corrompu ; le capitalisme lui-même est un système de corruption organisée. Tout en prétendant sonder la corruption dans le secteur pétrolier, les membres de l’Assemblée nationale se servent allègrement des parts du gâteau national. De récentes révélations ont montré que les 109 sénateurs vont recevoir 1,7 milliards de naïras par personne (8,2 millions d’euros!) pour pouvoir s’acheter une jeep. Ceci, en plus de toute la flotte de véhicules de luxe qui appartient déjà aux membres de l’Assemblée nationale.
Tout cela se retourne contre les promesses du président Jonathan qui avait dit vouloir s’attaquer au gaspillage de l’argent du gouvernement ; cela montre aussi à quel point aucun des problèmes (la corruption en faisant partie) qui ont fait descendre les masses dans les rues en janvier ne fait l’objet de la moindre attention de la part du gouvernement.
Segun Sango a expliqué que tout ce gaspillage et toute la la corruption de l’élite dirigeante n’est pas quelque chose d’accidentel, mais est une caractéristique du capitalisme. Cette caractéristique n’est d’ailleurs pas le propre du capitalisme au Nigéria, mais également du capitalisme au niveau international, comme nous pouvons le voir sur base de l’avidité des grandes entreprises, des banquiers et des politiciens qui sont en train de mettre l’ensemble de l’économie européenne à genoux, et aussi comme nous pouvons voir la manière dont la facture de la crise est en ce moment présentée aux travailleurs et aux jeunes via une politique d’austérité brutale.
Le capitalisme est un système fondamentalement injuste. Il y a de la richesse dans la société, mais au lieu d’être utilisée pour améliorer le sort de tous, elle est accaparée par les capitalistes, dans le gouvernement comme en-dehors. Un nouveau rapport de l’Office national des statistiques (ONS) montre que les inégalités de revenu au Nigéria se sont accrues de 0,429 en 2004, à 0,447 en 2010 – ce qui indique que nous sommes en présence d’appauvrissement de masse qui a lieu malgré toutes les fables au sujet de la croissance économique.
Le plan de transformation de Jonathan : qu’a-t-il à offrir ?
Selon l’ONS un nombre effarant de 112 519 000 Nigérians vit dans des conditions de pauvreté relative. Ce nombre représente 69% de la population totale du pays, estimée à 163 millions. Plus inquiétant encore, est le fait que le taux de pauvreté s’accroit alors que la croissance du PIB est estimée être de 7,75%. Selon le statisticien en chef de l’ONS, le Dr. Yemi Kale, le taux de pauvreté officielle pourrait même être passée à 71,5% en 2011. De même, 23,9% de la population est sans emploi.
Ces statistiques ensanglantées sont le reflet économique de la faillite de la politique capitaliste néolibérale des régimes précédents, que le plan de transformation du président Jonathan désire maintenir et intensifier. Le plan de transformation est un paquet de réformes néolibérales qui visent la privatisation, la dérégulation et la commercialisation, tout cela dans le but de servir les intérêts des riches. Selon ce plan, la Compagnie électrique du Nigéria sera démantelée pour être vendue pour une bouchée de pain à diverses compagnies privées. L’implication de cela est une hausse du tarif de l’électricité, ce qui va encore plus peser sur les masses laborieuses et les pauvres. Et sans compter les milliers d’emplois qui seront perdus. Les travailleurs de l’électricité sont déjà en train de compter les jours avant de recevoir l’annonce du licenciement de masse qui accompagnera la restructuration.
Déjà l’année passée, il y a eu une hausse du tarif, alors que la vaste majorité de la population n’a même pas l’électricité ou doit la produire soi-même avec des générateurs. Selon l’Association des entreprises du Nigéria, le piètre état du réseau de distribution électrique est le principal facteur qui explique les fermetures d’entreprises, la délocalisation des lignes de production et les centaines de milliers de pertes d’emplois qui ont eu lieu ces dix dernières années.
Cette année, une nouvelle hausse du tarif est en train d’être préparée par le gouvernement fédéral ; c’est même selon eux une des conditions pour une privatisation réussie de l’électricité publique, afin de rendre le secteur plus profitable pour les investisseurs privés. Cela seul expose l’ensemble du processus de privatisation comme n’étant pas une tentative d’améliorer la génération d’électricité, mais comme une simple opération profit. Lorsque les requins spéculateurs en auront totalement pris le contrôle et la possession, les masses devront s’attendre à un déclin drastique de l’accès à l’électricité, tandis que les tarifs grimperont au plafond.
C’est cette même politique anti-pauvres et anti-croissance qui est en train d’être appliquée à d’autres secteurs de l’économie. L’éducation et les soins de santé sont de plus en plus commercialisés. Le camarade Nicholas a raconté lors du meeting son expérience à l’hôpital général public de Lagos, où il a dû payer 30 000 naïras (140 euros) rien que pour les soins prénataux pour sa femme enceinte. Dans un pays où le salaire minimum est d’à peine 18 000 nairas (86 euros) par mois, cette histoire montre bien ce que doivent endurer les familles ouvrières et de la petite classe moyenne pour avoir accès à des soins.
Il ne faut donc guère s’étonner du fait que la plupart des accouchements se passent dans des églises et autres lieux innommables, vu que les familles ne peuvent se permettre le cout élevé des soins de santé. Le même scénario se déroule dans l’éducation. Dans les universités et hautes écoles du pays, les frais d’inscription sont en train de passer à 100 000 nairas (480 euros), voire 200 000 naïras (960 euros) par an, et même, dans le cas de l’Université d’État de Lagos, à 348 000 naïras (1670 euros) ! Il est intéressant de constater que l’ensemble des partis politiques, y compris le Congrès pour l’action du Nigéria (Action Congress of Nigeria, ACN, principal parti d’opposition), sont unis derrière ces attaques néolibérales sur l’enseignement public. En fait, les institutions publiques dans des états gouvernés par l’ACN sont celles dont les frais d’inscription sont les plus élevés.
Tous les partis d’opposition entonnent le même refrain : il n’y a pas d’alternative à la manière de gérer la société, à part la politique néolibérale ». Dans l’état de Lagos, le gouvernement ACN a vendu toute un tronçon routier, l’autoroute express Lekki-Epe, à des requins privés et ce, sous le masque d’un “partenariat public-privé”. La construction de cette route avait débuté dans les années ’80, et tout ce que la compagnie privée devait faire était ajouter une ou deux bandes le long de 49 kilomètres de la route. Même si seuls 6 de ces kilomètres ont été pour l’instant achevés, la compagnie a déjà installé un péage, et prévoit d’en construire deux de plus ! La construction d’un péage sur une route publique a été la source de nombreux troubles et actions de protestation qui ont été cruellement réprimées par le gouvernement.
Le camarade Chineda a raconté une autre fraude du partenariat public-privé organisé par l’ACN à Lagos : le système de transports rapides par bus “Lagbus”. On présente souvent ce système comme un merveilleux exemple de partenariat public-privé réussi, mais la réalité est toute autre. Tout comme la concession de l’autoroute express Lekki-Epe, Lagbus n’est rien d’autre qu’une couverture pour utiliser l’argent public afin de mettre sur pied des entreprises privées pour des pontes du parti et pour leurs copains privés. La compagnie Oando, dont le directeur, Wale Tinubu, est le neveu de Ahmed Bola Tinubu, un des dirigeants politiques de l’ACN, est le seul fournisseur de diesel à Lagbus, alors qu’Oando vend son diesel à un prix plus cher à Lagbus qu’à ses autres clients.
Évidemment, cet arrangement deverait être non-profitable pour une véritable entreprise, mais la réalité est que Lagbus n’est qu’une façade qui sert à faire partir les ressources de l’État vers des poches privées. La majorité du personnel gagne environ 25 000 nairas par mois (120 euros). Les chauffeurs de bus gagnent 35 000 nairas (170 euros), mais il travaillent plus de 60 heures par semaine ! Du fait de la mauvaise gestion, de nombreux bus sont en panne, ce qui signifie qu’il faut bientôt s’attendre à des licenciements. La compagnie a aussi toute une histoire d’attaques sur les droits démocratiques de ses travailleurs à rejoindre un syndicat, tandis que la victimisation est monnaie courante.
Mais il y a en réalité un mode alternatif de gestion de la société capable d’assurer que les ressources de la société soient utilisées pour répondre aux besoins des masses laborieuses et pauvres plutôt qu’à ceux des politiciens bien nourris et des grandes entreprises, tels que nous le voyons aujourd’hui. Ce mode alternatif de gestion de la société que défendent les socialistes, c’est la nationalisation des secteurs-clés de l’économie sous le contrôle et la gestion démocratique du public. Les socialistes s’opposent à toute privatisation, parce que nous pensons que les ressources de la société appartiennent au peuple, et par conséquent doivent être propriété collective. C’est pourquoi nous insistons sur le contrôle et la gestion démocratiques des entreprises nationalisées, afin de pouvoir impliquer les masses laborieuses et pauvres dans la gestion de l’économie et de la société.
La question nationale
Un autre aspect de l’état de la nation que les socialistes et les masses laborieuses doivent analyser avec une grande attention est la question nationale. Cela, d’autant plus qu’auparavant, vu la montée du Boko Haram – un groupe islamiste fondamentaliste du Nord-Est – dont les brutales activités terroristes et assassinats perpétrés au cours des trois dernières années menacent de déstabiliser le pays.
Segun Sango a expliqué que la crise ethno-religieuses qui semble tellement insurmontable est en réalité née du fait que le Nigeria actuel est composé de divers peuples hétérogènes qui ont, sans aucune consultation, été forcés de cohabiter dans un même pays par les colonialistes britanniques, qui n’aspiraient qu’à une exploitation facile et profitable des ressources du pays. Aucun de ces peuples n’a été consulté, il n’y a jamais eu aucune discussion démocratique quant à la volonté ou non de ces différentes nationalités de continuer à vivre ensemble et si oui, sur quelle base.
L’indépendance du Nigeria a été partiellement négociée sur base de cette division ethnique et religieuse ; l’impérialisme britannique a donné le pouvoir à la section de la classe dirigeante qu’il estimait la plus malléable. Toutefois, à cause des positions pro-capitalistes (tant sur le plan de vue économique que politique) des élites dirigeantes de toutes les principales nationalités qui ont formé le gouvernement au Nigeria depuis l’indépendance, les tensions et divisions ethniques et religieuses, plutôt que de s’atténuer, n’ont fait que s’aggraver, reflétant la lutte des diverses élites nationales pour s’accaparer leur part de la richesse sociale.
Ce n’est pas pour rien que le Nord compte le plus haut niveau de pauvreté et d’analphabétisme, malgré le fait que des élites du Nord ont dirigé le Nigéria pendant des décennies. Le dernier rapport de l’ONS a montré que le Nord-Ouest et le Nord–Est avaient en 2010 les plus haut taux de pauvreté du pays, à 77,7% et 76,3% respectivement. De tous les 36 états de la fédération nigérianne, c’est Sokoto qui a le plus haut taux de pauvreté : 86,4% !
C’est pourquoi les socialistes défendent constamment le fait que sans justice au niveau de la répartition de la richesse sociale, il ne peut y avoir le moindre espoir d’une solution durable à la question nationale. Le DSM appelle à une conférence nationale souveraine véritablement démocratique et indépendante qui soit dominée par des représentants élus des travailleurs, des pauvres, des jeunes et différents groupes ethniques afin de discuter de si oui ou non le Nigéria a encore un sens, et si oui, selon quelles modalités.
Cependant, une conférence nationale souveraine indépendante soulève la question de quel gouvernement mettra en vigueur ses résolutions. Ce ne sera certainement pas le gouvernement des pillards pour qui le statu quo injuste peut bien continuer vu qu’ils en tirent profit. Cela soulève la question de la nécessité d’un parti politique ouvrier capable de se battre pour le pouvoir politique et d’amener un gouvernement réellement démocratique des travailleurs et des pauvres, le seul à même de faire appliquer les décisions d’une telle conférence nationale souveraine.
Les socialistes soutiennent le droit à l’auto-détermination des peuples. Toutefois, nous devons bien expliquer que séparer ou diviser le Nigéria ne constituera pas une solution magique à la crise du sous-développement, du chômage et de la misère qui ravage les masses laborieuses du Nord, de l’Ouest, de l’Est, de la Ceinture moyenne et du delta du Niger.
Ce n’est pas pour rien que les gouverneurs et politiciens de la région du delta du fleuve Niger, d’où provient la plupart du pétrole du pays, sont aussi parmi les plus corrompus. Malgré les 13% de dérivés que les états de cette région reçoivent tous les mois du gouvernement fédéral en plus des allocations mensuelles, le niveau de sous-développement, de misère, de chômage et d’effondrement des infrastructures publiques telles que routes, enseignement et soins de santé, est alarmant. L’élite dirigeante de la région du delta du Niger ne fait qu’amasser et amasser tout l’argent, en abandonnant son peuple à une vie de misère et de pénurie. Si ces mêmes éléments devaient se retrouver à la tête d’une éventuelle nation indépendante du Delta du Niger, il ne faudrait alors pas s’attendre à la moindre amélioration des conditions de vie de la population. Cette perspective vaut également pour toutes les zones géopolitiques où les élites capitalistes dirigeantes sont aussi corrompues et anti-pauvres.
Tout en soutenant le droit à l’auto-détermination, nous insistons sur la nécessité pour les masses laborieuses et les pauvres de se battre pour un gouvernement des travailleurs et des pauvres qui n’appliquera pas une politique néolibérale de privatisations, mais qui utilisera les ressources de la société dans l’intérêt de tous. Les socialistes pensent qu’une sécession sur une base capitaliste n’amènera rien de plus que la continuation de la même inégalité de revenus et de misère de masse au milieu d’un pays d’abondance. Par conséquent, les socialistes défendent un Nigéria unifié, mais cette fois-ci sur base de principes démocratiques, d’une justice socio-politique et du socialisme.
La direction travailliste
La manière dont la récente grève générale “illimitée” a été tout d’un coup interrompue avant qu’elle n’atteigne ses objectifs n’a fait que souligner encore plus le fait que les dirigeants syndicaux actuels n’ont aucun programme alternatif capable de mener les travailleurs dans la lutte pour le pouvoir politique. La grève générale et les actions de masse qui ont fait descendre des dizaines de millions de Nigérians dans les rues et ont dans les faits coupé toute l’économie du pays pendant plus d’une semaine, ont soulevé la question du pouvoir politique. Toutefois, les dirigeants travaillistes n’étaient pas préparés pour cela, ni idéologiquement, ni politiquement, malgré l’énorme potentiel organisationnel que représentent les syndicats au Nigéria. Ceci explique pourquoi ils ont été si facilement mis sous pression par le gouvernement qui a accusé le mouvement d’œuvrer avec l’opposition pour chasser Jonathan de son fauteuil de président avec son slogan de changement de régime.
Il est intéressant de constater que la direction travailliste n’a pas officiellement soulevé ce slogan. D’ailleurs, aucun des partis d’opposition, aucun des politiciens de l’opposition qui ont participé à l’assemblée quotidienne place de la Liberté Gani Fawehinmi à Ojota Lagos n’ont repris ce slogan de manière consciente. Seuls le DSM et le JAF (Joint Action Front, une plate-forme de lutte syndicale) ont soulevé ce slogan de manière consciente, mais l’ont complété par un appel à une alternative économique et politique ouvrière. Le JAF a appelé à un changement de système. Sur nos tracts, nos bannières, dans nos journaux, nous proposions le slogan “À bas le gouvernement Jonathan, pour un gouvernement des travailleurs et des pauvres”. Cependant, ce qui a réellement effrayé l’élite dirigeante était le fait qu’à partir du troisième jour de grève, le slogan “Jonathan dégage!” commençait à devenir très populaire parmi de larges couches de manifestants à Lagos et à travers tout le pays. Il était très clair que les événements étaient en train d’atteindre un point qui pouvait être dangereux pour le régime et au final pour le système.
Par conséquent, les dirigeants travaillistes ont dû intervenir pour se dissocier spécifiquement de l’appel à un “changement de régime”, et ont déclaré la fin de la grève au moment où ils se sont considérés incapables de mener les travailleurs plus en avant vers l’étape suivante qui était la lutte pour le pouvoir politique. De plus, les dirigeants travaillistes actuels ne sont pas fondamentalement opposés à la politique néolibérale anti-pauvre de privatisation et de dérégulation ; ils ne désirent au mieux qu’à l’encadrer afin de lui donner un visage plus humain. Le principal élément qui faisait défaut à cette grève massive, tout comme aux mouvements précédents, était l’absence d’un parti politique ouvrier de masse, qui aurait pu se saisir de cette opportunité afin de fournir une direction au mouvement, surtout à partir du moment où la direction travailliste battait en retraite, et afin de cristalliser la colère et le potentiel du mouvement de masse jusqu’à la conquête du pouvoir politique. C’est là une des raisons pour lesquelles nous avons constamment appelé les socialistes, les travailleurs, les artisans et les jeunes à diffuser l’idée de la nécessité de la formation d’un parti ouvrier de masse.
Un parti de masse des travailleurs et des pauvres
La meilleure manière de rapidement organiser une puissante alternative politique capable de concourir pour le pouvoir lors des prochaines élections en 2015 et après est de voir le mouvement ouvrier jouer un rôle dirigeant dans la formation d’un tel parti. Mais cela ne peut se produire sans une direction syndicale combative, capable de comprendre la tâche historique de la classe ouvrière dans la direction des autres couches des opprimés dans la lutte pour le pouvoir politique. L’exemple du Labour Party formé par le NLC (Confédération des syndicats du Nigéria) mais abandonné à des carriéristes et à des politiciens professionnels montre que cette compréhension n’existe pas chez les dirigeants syndicaux actuels.
Par conséquent, l’agitation en direction d’un parti de masse des travailleurs doit être reliée à une campagne parmi la base syndicale pour une direction syndicale combative. Elle doit également être liée à la revendication de la démocratisation des syndicats et à l’implication de la base des travailleurs dans la gestion des syndicats et dans la prise de décision collective quant à la manière dont le mouvement ouvrier doit répondre aux attaques néolibérales du gouvernement.
La tâche de la construction d’un parti ouvrier de masse est de la plus haute importance. Comme l’a répété Segun Sango, tout en menant la campagne pour la formation d’un tel parti ouvrier de masse, nous devons saisir chaque opportunité, quelles que soient les limitations et les difficultés, pour construire une alternative politique socialiste dès à présent. C’est dans ce cadre que se pose la question de la transformation du DSM en un véritable Socialist Party, reconnu officiellement. Bien entendu, les lois électorales antidémocratiques présentent une myriade d’obstacles financiers et autres sur la voie vers l’enregistrement d’un véritable parti capable de représenter et de se battre pour les intérêts des masses laborieuses, des jeunes et des pauvres. Mais avec notre détermination, nous pouvons les surmonter.
Contrairement à ce qui s’est produit lors des deux dernières élections, où aucune alternative politique n’existait pour la classe ouvrière et la jeunesse, même un petit Socialist Party nous offrirait une occasion d’intervenir dans les élections et de mettre en avant un programme économique et politique socialiste.
Selon Lanre Arogundade, une organisation telle que la nôtre est nécessaire pour fournir aux masses laborieuses une issue à la crise du capitalisme au Nigéria. Il y a par conséquent la nécessité de redoubler d’efforts dans la construction du DSM. Cela inclut de faire en sorte que notre message puisse atteindre toutes ces personnes avides de changement que nous avons rencontrées au cours de la dernière gréve générale, et que nous nous battions politiquement pour les gagner à la cause du socialisme.
Le meeting s’est clôturé sur un appel aux dons qui a récolté la somme de 5500 naïras (26€), plus 3000 naïras (14€) en promesses de dons.
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[VIDEO] “Socialism on trial”, l’histoire de “Militant” à Liverpool
De 1983 à 1987, les socialistes de lutte organisés dans le Labour Party (le Parti Tavailliste) au sein de la tendance "Militant" ont obtenu la majorité à Liverpool. Ils ont donc contrôlé l’administration d’une ville et ont refusé d’appliquer une politique d’austérité telle que celle que Thatcher voulait imposer. A Liverpool, la tendance "Militant" s’est opposée à la politique néolibérale et a au contraire instauré tout un tas de mesures sociales : la construction de logments sociaux, l’amélioration de l’infrastructure, des écoles,… Dans la lutte contre ces militants marxistes, la meilleure arme de Thatcher était la direction du parti travailliste elle-même, qui s’est opposée à "Militant". Voici une vidéo (en anglais) de 35 minutes qui relate les évènements de Liverpool, avec images d’époque et interviews. Pour en savoir plus sur ce qui s’est produit à Liverpool, vous pouvez aussi lire cet article.
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Nigéria : Les élections générales de 2011 seront-elles différentes de la farce de 2007 ?
Le problème clé est : quel choix nous offre-t-on ? Que défendent les différents partis ? Et, l’un d’entre eux représente-t-il les intérêts de la classe ouvrière, des pauvres et de tous ceux qui s’opposent à la classe capitaliste corrompue ?
Democratic Socialist Movement (CIO-Nigéria)
Le professeur Attahiru Jega, président de la Commission électorale indépendante nationale, et le président Goodluck Jonathan ont, à plusieurs reprises, juré que les élections générales de 2011 seront bel et bien libres de tout incident. Même les pays capitalistes avancés, les principaux bénéficiaires du système capitaliste au Nigéria et dans d’autres pays sous-développés, expriment leurs sentiments selon lesquels le reste du monde serait heureux d’assister à des élections transparentes et paisibles en 2011. Lors de ses premières interventions devant les médias, le nouvel ambassadeur américain au Nigéria, M. Terence McCulley, a résumé son point de vue et celui des pays impérialistes lorsqu’il a déclaré : ‘‘J’espère que le processus de 2011 sera meilleur et respectera la volonté du peuple nigérian.’’ Par conséquent, nous posons la grande question : les élections générales de 2011 au Nigéria seront-elles plus “transparentes” et “respecteront-elles la volonté du peuple nigérian” mieux que la grande farce qui a été connue sous le nom d’“élections générales” de 2007 ?
Les commentateurs bourgeois voudraient pouvoir répondre immédiatement à cette question avec une note d’optimisme. Ils se dépêcheront de mettre en avant le passé radical du président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) actuel, largement perçu comme un militant respectable, en tant qu’ancien président du syndicat du personnel académique des universités (Academic Staff Union of Universities – ASUU), un syndicat de gauche, et qui ne va certainement pas permettre que qui que ce soit utilise la CENI pour manipuler ou truquer les élections. Au contraire de l’ancien président Obasanjo, qui avait ouvertement déclaré que les élections fédérales de 2007 seraient une affaire de “vie ou de mort”, le président Jonathan a, au cours de ses divers discours et visites auprès des gouvernements régionaux à travers le pays, répété à de nombreuses reprises sa promesse selon laquelle le gouvernement va assurer des élections libres et honnêtes en 2011, où chaque vote comptera. Hélas, si l’on prend en compte de manière scientifique l’ensemble des principaux facteurs, logistiques et politiques, qui détermineront la nature de ces élections, le peuple nigérian devrait s’attendre à ce que la période postélectorale soit faite d’une continuation de la détérioration de son mode de vie et d’attaques encore plus grandes sur ses droits démocratiques, quel que soit le parti ou la coalition qui sortira vainqueur de ce processus, que ce soit au niveau fédéral ou au niveau des régions.
Une autre période électorale dominée par le chaos et les intérêts personnels
À moins d’un amendement de la constitution de 1999, de nouveaux gouvernements doivent être élus aux niveaux fédéral et régionaux avant le 29 mai 2011. Ceci signifie donc que la CENI doit faire tout ce qui est en son pouvoir afin d’organiser les élections générales partout dans le pays avant la fin avril 2011. Au moment où nous écrivons, la CENI a provisoirement décidé que le mois de janvier sera utilisé pour commencer à établir le nouveau registre des électeurs, la condition minimale pour la tenue d’élections démocratiques, surtout étant donné que beaucoup de questions se posent quant à la crédibilité et à l’exactitude du registre des électeurs actuel, qui a été compilé par la CENI dirigée par le très douteux Professeur Maurice Iwu. Cela signifie que la CENI n’aura qu’environ deux à trois mois pour rédiger le nouveau registre des électeurs qui reprendrait au moins 80 millions de Nigérians sur une population estimée à 140 millions. Jusqu’à présent, on attend toujours que soient rédigés le Décret électoral et l’amendement constitutionnel qui doivent servir de base légale à ces élections ! Et si on prend aussi en compte que la période d’après les élections sera comme d’habitude dominée par les disputes et plaintes de tous les candidats, et le processus qui est requis pour résoudre tout ce bazar par la voie légale, alors il semblera clair à tout élément conscient de la jeunesse et de la classe ouvrière que les élections de 2011 ne seront rien d’autre qu’un grand vacarme, un autre tour de magouilles et de chamailleries !
Mais pour les masses laborieuses du Nigéria, l’enjeu va au-delà d’un registre électoral crédible pour une élection démocratique. Le véritable enjeu est : quel choix avons-nous ? Que défendent tous ces différents partis, et y a-t-il l’entre eux qui représente les intérêts de la classe ouvrière, des pauvres, et de tous ceux qui s’opposent à la classe dirigeante corrompue ?
Que ce soit le PDP actuellement au pouvoir, ou que ce soit un des grands partis d’opposition, tous, sans exception, défendent une politique anti-pauvres dans tous leurs programmes et mesures économiques.
Au lieu de se pencher sur un programme et sur des mesures qui puissent mettre à contribution les immenses richesses naturelles et humaines que possède le Nigéria, afin de garantir des conditions de vie décentes pour tout un chacun, tous ces partis qui nous dirigent, au fédéral comme dans les régions, se bousculent pour proposer et mettre en œuvre des mesures anti-pauvres qui ne vont faire qu’empirer les conditions de vie du peuple nigérian partout dans le pays. C’est pourquoi tous les PDP, ANPP, ACN, APGA et même le gouvernement de l’Etat d’Ondo qui est le seul à être contrôlé par le Labour se font les champions de mesures capitalistes pro-riches de privatisation, dérégulation, commercialisation, etc. À présent, dans tout le pays, quel que soit le parti politique au pouvoir, l’Etat ou les conditions des infrastructures de base telles que les routes, l’électricité, l’eau, ou des services sociaux indispensables telles que le logement, la santé ou l’éducation n’ont jamais été pires. Malgré cette situation déplorable, tous les partis dirigeants sont bien décidés à poursuivre la mise en œuvre d’une politique qui ne fera que remplir encore plus les poches des éléments capitalistes et des grandes corporations.
C’est pourquoi tous ces grands partis prônent religieusement le concept du “partenariat public privé” en tant que meilleure solution pour développer l’économie et l’industrie ruinées du Nigéria. Selon ce concept douteux, le manque honteux de bonnes routes carrossables est censé être compensé par des profiteurs privés qui seront autorisés à construire des routes puis à prélever des péages afin de récupérer leur investissement. Mis à part le fait que sur base de l’expérience concrète, cette approche a déjà montré qu’elle ne peut s’appliquer qu’à certaines routes potentiellement bien profitables, le cout réel de cette politique pour la société est impossible à chiffrer. Selon l’idéologie pro-riches et pro-capitaliste qui prévaut aujourd’hui et qui est embrassée par tous les partis dirigeants, chaque aspect essentiel de la vie, comme le logement, la santé, l’éducation, les offres d’emploi, les routes, les voies aériennes et fluviales, est une marchandise qui ne devrait être accessible qu’à ceux qui ont l’argent de se la payer.
C’est la raison centrale pour laquelle tous les partis au pouvoir partout dans le pays se sont mis d’accord sur le fait que l’éducation, la santé, l’électricité, l’eau, etc. doivent être entièrement privatisés au bénéfice des marchands de profits.
Il était donc aisé de prévoir que les grands partis bourgeois et leurs apprentis égoïstes ne se sont focalisés que sur des questions de division, telles que la “régionalisation”, le “caractère fédéral”, les embrouilles “Nord-Sud” ou “chrétiens-musulmans” et toutes sortes d’autres histoires qui n’ont rien à voir avec le vrai problème, à savoir comment apporter des conditions de vie décentes aux masses de la population, qu’elles habitent dans le riche delta du Niger, ou dans le reste du Nigéria.
On constate malheureusement que la morale pro-riche et pro-capitaliste qui constitue désormais la base de la politique des partis dirigeants en ce qui concerne l’économie ou la société a été maintenant ouvertement ancrée dans les affaires politiques et dans le processus électoral. À présent, le Décret électoral tout comme la direction de tous les partis politiques au pouvoir ont prescrit d’immenses sommes, appelées “frais de nomination”, pour quiconque désire se présenter en tant que candidat. Dans les faits, ceci signifie que seuls de gros richards et/ou les personnes sponsorisées par ces mêmes sacs à pognon peuvent espérer jouer un rôle quelconque dans les élections à venir. Il suffit donc de faire remarquer qu’une campagne électorale où seuls peuvent se présenter les plus riches personnes au sein des divers partis, ne pourra jamais être appelée “transparente” ni ne reflétera la “volonté” des Nigérians dans leur masse. En outre, la véritable raison pour laquelle de nombreux candidats à la candidature se disaient prêts à payer eux-mêmes leur “frais de nomination” est qu’ils espèrent bien pouvoir rembourser ces couts électoraux en mangeant l’argent public si jamais ils parvenaient à être élus. Par conséquent, les masses ordinaires doivent affronter bien en face le fait que ces élections ont déjà été truquées à leur détriment, bien avant que la campagne électorale à proprement parler n’ait même commencé.
Une méga-coalition des partis d’opposition peut-elle changer les choses ?
Certains prétendent que seule une grande coalition de tous les partis d’opposition parviendra à reprendre le pouvoir au PDP et ainsi à mettre un terme à la putréfaction qui domine à présent l’ensemble du paysage économique et politique de notre pays. Hélas, cette proposition qui semble de prime abord attractive ne peut se réaliser que si les soi-disant partis d’opposition ont un programme et une manière d’être qui soient fondamentalement différentes du détestable PDP qu’ils cherchent à remplacer. À présent, il y a beaucoup de bruit au sujet des grands partis d’opposition qui sont en train de s’associer afin de présenter une alternative unie et coordonnée face au PDP.
Il faut cependant noter que ceci n’est pas quelque chose de nouveau dans la politique du Nigéria. Au cours des premières et deuxièmes Républiques, les partis d’opposition ont formé ce qu’on a appelé la Grande Alliance Progressive Unie (United Progressive Grand Alliance – UPGA) et l’Alliance des Partis Progressistes (Progressive Parties Alliance – PPA). Sous le régime civil actuel, il y a eu des discussions quant à l’éventuelle formation d’une méga-coalition des partis d’opposition afin de chasser le PDP du pouvoir. Toutefois, dans la mesure où la plupart des éléments de cette soi-disant opposition sont toujours impossibles à différencier du parti qu’ils désirent remplacer, ce phénomène réduit du coup leur opposition aux simples calculs égoïstes qui leur permettront d’être ceux qui hériteront ensuite de la responsabilité de l’injuste ordre économique et politique existant. De la sorte, tous ces partis d’opposition n’ont jamais été capables de mettre sur pied une véritable plate-forme d’opposition contre le parti au pouvoir.
Par conséquent, tout comme dans la période précédente, le désir actuel de former une méga-opposition contre le PDP lors des élections de 2011 peut au final être sacrifié sur l’autel des ambitions personnelles de tous ces individus qui souhaitent devenir présidents, gouverneurs, sénateurs, etc. et surtout maintenant, étant donné l’énormité scandaleuse des salaires et des dotations de responsables politiques, en plus de tous les privilèges et opportunités de piller les ressources et l’argent public que tous ces postes octroient.
Y a-t-il un espoir pour les masses ?
Sur base de la configuration politique du moment, les élections générales de 2011 ne seront comme d’habitude rien de plus qu’une compétition pour le pouvoir politique de la part de différentes sections de l’élite de bandits capitalistes au pouvoir. Malgré les promesses de Jega et de Jonathan d’organiser des élections libres et démocratiques, le résultat des élections, dans la situation actuelle, sera certainement à l’avantage des riches et de ceux qui contrôlent aujourd’hui le pouvoir politique en utilisant une combinaison d’argent et d’appareils d’État.
Seuls un véritable programme ouvrier, avec la perspective d’utiliser les ressources humaines et naturelles du pays de manière planifiée et démocratique pourra fournir une plateforme politique réellement capable de susciter le soutien enthousiaste et les sacrifices héroïques de la part des masses populaires, et pourra triompher des politiciens capitalistes égoïstes et de tous les partis politiques au pouvoir lors des élections de 2011. Malheureusement, la grande majorité des dirigeants syndicaux et du Labour Party formé par le Congrès du travail nigérian (Nigeria Labour Congress – NLC) ne sont pas en ce moment en train de réfléchir ou de travailler à une telle alternative politique et économique pour la classe ouvrière. Au lieu de s’efforcer à bâtir le Labour Party en tant que voix politique des masses laborieuses, ses principaux dirigeants font tout ce qui est possible pour en faire tout bêtement un autre parti bourgeois.
Le Labour Party ne dispose pas d’un programme économique et politique clair qui soit radicalement différent de celui des grands partis capitalistes tels que le PDP, l’ANPP, l’ACN, etc. Dans l’état de Ondo, qui est le seul à être gouverné par le parti, on professe la même politique néolibérale, pro-capitaliste de privatisation et de dérégulation des secteurs-clés de l’économie. Aujourd’hui, afin d’espérer devenir président ou gouverneur sous le régime PDP au pouvoir, les candidats doivent payer à leur parti la somme non remboursable respectivement de 10 millions et de 5 millions de naïras (50 000 € et 25 000 €). Ce qui est très embarrassant, c’est que c’est la direction du Labour Party qui a été la première à mettre en place cette mesure honteuse, et que le PDP n’a en fait fait que copier le Labour. Donc, plutôt que d’avoir un Labour Party qui se développe en tant que plate-forme pour la classe ouvrière et pour les masses opprimées en général, il est en train de rapidement devenir un autre parti bourgeois, un phénomène qui pourrait rendre le parti incapable de décoller pour de bon, sans parler de véritablement servir les intérêts politiques et économiques des masses populaires lors des élections à venir.
Les principaux dirigeants syndicaux n’ont malheureusement pas offert une véritable alternative ouvrière face à la pourriture politique et économique du capitalisme. Politiquement, ceci est causé par leur perspective qui s’efforce de faire du mouvement ouvrier un arbitre cherchant à obtenir des élections libres et démocratiques entre les différentes couches de bandits capitalistes ! Au lieu de chercher à construire un parti politique ouvrier indépendant avec pour but de former un gouvernement ddes travailleurs et des pauvres, qui ferait passer les secteurs-clés de l’économie entre les mains du public, via leur contrôle et leur gestion démocratiques par des comités élus de travailleurs, de paysans et de jeunes, en tant que base pour garantir les besoins politiques et économiques de tout un chacun, et non pas seulement des quelques éléments capitalistes et des classes moyennes, comme c’est aujourd’hui la règle – au lieu de faire cela donc, la plupart des dirigeants Labour actuels conservent la perspective erronée selon laquelle les véritables intérêts des masses laborieuses peuvent être obtenues sans devoir renverser ce système injuste.
Par exemple, d’importants dirigeants du NLC et de la Confédération syndicale (Trade Union Congress – TUC) croient réellement qu’une oasis économique, capable de pourvoir aux besoins économiques des travailleurs, peut être créée à travers des projets économiques directs de la part des syndicats. Voilà l’impression qui est créée par des dirigeants centraux des deux fédérations syndicales qui existent en ce moment, tandis qu’ils sont en train de négocier des prêts valant des milliards de naïras afin de mettre sur pied des services de transport gérés par les syndicats.<^>Le Président-général de la TUC, Peter Esele, a récemment tenté de fournir un genre de justification théorique pour ce qui n’est rien de plus qu’une tentative d’effectivement intégrer le mouvement ouvrier dans le ccapitalisme, en défendant le fait que les besoins de la classe ouvrière doivent être satisfaits par la création d’entreprises sans but lucratif et “pro-labour” dans le cadre global de l’économie capitaliste ! Écoutez-le plutôt : « Je n’appartiens pas à l’école de pensée selon laquelle le Labour devrait être neutre, parce que je crois que c’est par la participation que nous pourrons pousser le pays dans la direction vers laquelle il doit aller. Le Labour ne doit pas être neutre ; nous devons avoir une position sur tous les enjeux, et une manière dont on peut faire cela, est qu’il nous faut des muscles financiers. Donc, si nous nous asseyons tous dans une pièce et perdons notre temps à nous critiquer, et non pas afin d’offrir des solutions ni d’apporter de nouvelles idées, je ne pense pas que je veux appartenir à un tel mouvement » (The Guardian du 5 novembre 2010).
Oui, nous autres membres du DSM sommes entièrement d’accord avec Esele sur lee fait que « Le Labour ne doit pas être neutre et doit avoir une position sur chaque enjeu », que ce soit un enjeu économique ou politique, et qui a le potentiel de susciter l’intérêt des travailleurs, positivement ou négativement. C’est pourquoi, depuis notre fondation, nous avons toujours défendu le contrôle public sur les secteurs-clés de l’économie, y compris les banques, et leur contrôle et gestion démocratique par les travailleurs et par les couches populaires. Cependant, cette stratégie révolutionnaire doit être radicalement différente de la conception de Esele qui désire apporter des « muscles financiers » aux syndicats, un phénomène qui ne ferait qu’accentuer l’étranglement bureaucratique du mouvement syndical, avec le développement de syndicats qui se reposent en grosse partie sur le business et non sur les cotisations de leurs membres, ce qui sape le pouvoir des travailleurs de la base à exercer un contrôle sur leurs dirigeants.
Les défis à relever par les masses
Sur la base de tout ce que nous venons d’expliquer, les travailleurs et les pauvres ne peuvent s’attendre après les élections de 2011 qu’à un approfondissement de leurs souffrances et de l’oppression. Toutefois, les capitalistes et les exploiteurs ne doivent pas trop se réjouir de la faiblesse politique des dirigeants syndicaux et du Labour Party qui en ce moment tend à renforcer l’idée fausse qu’il n’y a pas d’alternative à la putréfaction capitaliste actuelle et à l’échec complet des politiciens capitalistes. Mais il ne faut pas non plus oublier ni sous-estimer le bon côté de la situation politique actuelle.
Malgré le manque d’une direction générale et cohérente de la part des hauts dirigeants syndicaux, il y a une nouvelle tradition de lutte et de résistance qui se développe parmi les sections de la classe ouvrière. Le personnel enseignant de toutes les universités de la zone sud-est sont en ce moment en grève à durée indéterminée depuis des mois dans certaines zones pour de meilleures conditions de travail et plus de moyens pour l’éducation. Depuis quelque temps, les syndicats du secteur de l’électricité mènent de l’agitation contre la privatisation de la Compagnie énergétique du Nigéria (Power Holding Company of Nigeria – PHCN) et pour un financement adéquat du secteur. Les travailleurs de la santé dans de nombreux états de la fédération sont soit en grève, soit en train de mener une agitation féroce pour plus de financement des hôpitaux publics et pour de meilleures conditions de service pour toutes les couches du personnel. Bien que l’Histoire ne se répète jamais de la même manière, il ne faut pas oublier que seulement deux mois après la farce des “élections” de 2007, il y a eu une grève générale massive et largement sooutenue qui n’a malheureusement pas permis de satisfaire aux revendications parce que les dirigeants syndicaux ont signé un compromis boiteux.
Ce qui manque par contre, et c’est regrettable, est une lutte et une campagne unies impliquant les travailleurs du public comme du privé, aux niveau fédéral comme régional, et une direction nationale cohérente au sein des syndicats et sous la forme d’un véritable parti ouvrier qui puisse donner à cette résistance ouvrière non-coordonnée la vision et la force appropriées. Quoiqu’il en soit, la direction du NLC et de la TUC ont accepté d’organiser une grève d’avertissement de trois jours du mercredi 10 novembre au vendredi 12 novembre 2010, quant au refus du gouvernement du président Jonathan de faire appliquer le salaire minimum pourtant ridicule de 18 000 naïras (85€) par mois qui a été négocié avec les représentants du gouvernement aux niveaux fédéral et régional.
C’est là un premier pas dans la bonne direction, qui s’était long fait attendre. Nous, membres du DSM, avons toujours défendu l’idée que seule des actions de masse et non pas des “tactiques de relations industrielles” peuvent forcer les élites dirigeantes de tous les différents partis politiques à mettre en application des mesures capables d’améliorer le mode de vie de la population. Force est pourtant de constater que la direction du mouvement ouvrier n’apparait pas encore vouloir accepter le fait que la lutte de masse est une nécessité et non pas un outil pour “effrayer” ou “intimider” la classe dirigeante. Écoutons John Odah, le secrétaire général du NLC : « Nous soupçonnons le président Jonathan d’être en train de faire pression sur les gouverneurs d’état pour qu’ils n’appliquent pas le nouveau salaire minimum national. Le président Jonathan a un rendez-vous avec l’Histoire. Il peut soit se placer du côté des travailleurs opprimés et voir son nom être inscrit en lettres d’or dans les cœurs des Nigérians, soit se ranger du côté des gouverneurs et rater l’occasion en or d’être adulé par les travailleurs nigérians » (The Nation du 7 novembre 2010).
Plutôt qu’une perspective futile, qui cherche apparemment à liguer une section des brigands capitalistes contre l’autre, le DSM appelle de tous ses vœux à des mobilisations et à des luttes de masse y compris des manifestations et des grèves, là et quand elles sont nécessaires, avec une attention particulière sur la construction d’un parti politique ouvrier de masse qui puisse arracher le pouvoir de manière permanente aux pillards capitalistes et sur cette base commencer l’édification d’une société socialiste véritablement démocratique, dans laquelle les ressources de la société seront véritablement utilisées pour pourvoir aux besoins de tous et non pas d’une infime minorité, comme c’est le cas dans l’injuste désordre capitaliste actuel.