Tag: KBC

  • Politique d’austérité : les médias dominants sont complices

    ‘‘La presse se présente comme un contre pouvoir, mais elle joue plutôt le rôle d’attaché de communication du gouvernement en cette période de crise. Ce n’est pas un complot, c’est une proximité idéologique.’’ C’est ce que déclare Geoffrey Guens, chargé de cours en communication à l’Université de Liège. Ce n’est pas étonnant, et ça s’explique.

    Concentration et homogénéisation

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    L’édition de l’hebdomadaire Le Vif/ L’Express qui a suivi la publication du Budget 2013 a consacré…une page (sur 98) au budget antisocial ! Mais 9 pages au ‘‘vote ethnique’’ avec un sous-titre lourd de sens : ‘‘Faut-il en avoir peur’’. Parce qu’une personne d’origine immigrée qui vote, ce n’est tout de même pas trop rassurant. L’image utilisée est d’ailleurs une femme voilée, histoire de bien enfoncer le clou.
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    La ‘‘presse libre, indépendante et objective’’ est un mythe. En Belgique, seule une petite dizaine de grands groupes contrôle la majorité de la presse d’initiative privée, et on ne retrouve pas n’importe qui à leur tête. Albert Frère, l’homme le plus riche de Belgique, est un grand actionnaire de RTL-TVI. Axel Miller, l’ancien patron de Dexia, est président du conseil d’administration du groupe IPM (La Libre, la DH), Thomas Leysen est président de la banque KBC, mais aussi du groupe Corélio (De Standaard, Het Nieuwsblad),… Et toutes les personnes mentionnées ci-dessus siègent au conseil de direction de la toute puissante organisation patronale Fédération des Entreprises Belges (1). A côté de ces groupes existent encore les médias publics, directement contrôlés par les partis traditionnels totalement soumis à la logique patronale.

    Dans ces conditions, il est tout à fait normal de se retrouver avec des lignes éditoriales interchangeables et une analyse politique, sociale et économique qui ressemble de plus en plus ouvertement à de la propagande gouvernementale et patronale. Ceci dit, même si les propriétaires des médias ont évidemment une grande influence, cela n’explique pas encore tout.

    Conditions de travail et qualité de la presse

    Ces dernières années, les conditions de travail n’ont fait qu’empirer, notamment suite aux nombreux licenciements qui ont considérablement augmenté la charge de travail pesant sur le personnel restant. Il n’est pas rare de trouver des articles quasiment totalement identiques dans la presse écrite, tout simplement parce que les rédacteurs n’ont pas eu de temps pour faire autre chose que d’encadrer une dépêche de l’agence de presse Belga, par exemple. Et encore moins de la vérifier par un minimum de travail de recherche.

    Le président de la Société des journalistes professionnels du Soir Bernard Padoan a ainsi expliqué fin novembre que ‘‘Les effectifs de la rédaction [du Soir, NDLR ] ont déjà fortement baissé ces dernières années : à peu près 20 % en équivalents temps plein sur les trois dernières années (…) On peut dire que la rédaction, elle est déjà à la corde. Nous sommes déjà sous pression et nous craignons que de nouvelles économies ne viennent faire craquer cette corde et, malheureusement, que la qualité du journal s’en ressente.” Il réagissait ainsi à l’annonce d’une restructuration prévoyant le licenciement d’environ 10% du personnel restant, soit 34 équivalents temps-plein.

    La vente avant l’information

    L’information est un produit qu’il faut vendre pour s’attirer des rentrées publicitaires, ce qui renforce l’uniformisation de l’information et l’adoption de méthodes bassement mercantiles. Début septembre, Le Soir s’auto-glorifiait (avant d’annoncer un plan de restructuration deux mois plus tard) : ‘‘Sur le plan qualitatif, il faut aussi observer que Le Soir gagne des lecteurs dans les catégories supérieures dont les cadres (+ 10.000), précise Didier Hamann, rédacteur en chef du Soir. Nous continuons à attirer ce type de lecteurs par le soin que nous apportons à notre qualité éditoriale.’’ La chasse à l’électorat aisé est donc un des objectifs ouvertement affichés par le journal. Et pour cela, autant appuyer l’approche idéologique qui leur correspond le mieux.

    Tout cela permet de comprendre pourquoi les médias se sont contentés de régurgiter la bonne parole néolibérale à l’occasion de la journée européenne d’action contre l’austérité du 14 novembre ou lors des discussions concernant la confection du budget 2013.

    Les médias dominants : une arme aux mains du système

    Les médias ont un rôle de préparation idéologique avant que les attaques antisociales ne soient réellement lancées, puis un autre rôle, de dénigrement cette fois, pour isoler la lutte et faire passer l’idée que, de toute façon, cela ne sert à rien de combattre.

    Ainsi, alors que les travailleurs et les allocataires sociaux apprenaient avec désarroi la vague de licenciements qui a suivi les élections, la presse en a profité pour défendre le programme du patronat. Rebondissant sur les milliers de pertes d’emplois, la presse a tenu à les justifier par le ‘‘manque de compétitivité’’ de nos entreprises. Ils ont donc comme dans La Libre appelé à : ‘‘un (petit) choc pour favoriser la compétitivité des entreprises’’ ou dans Le Soir appelé à ‘‘oser 10 mesures choc’’ (Faut-il partir à la retraite à 67 ans ? Faut-il supprimer l’indexation des salaires ? Faut-il supprimer la durée légale du temps hebdomadaire de travail? Faut-il limiter dans le temps les allocations de chômage ? Etc.) Tout a été fait pour nous enfoncer dans le crâne que la meilleure méthode pour sauvegarder nos acquis sociaux, c’était de les perdre…

    A chaque grève, les médias expliquent en long et en large que ces actions sont soit nuisibles, soit inutiles. A chaque grève de la SNCB, les journalistes partent à la chasse au passager ‘‘pris en otage’’, parfois même carrément à côté du piquet de grève ! Ils ne faut pas compter sur eux pour dire que c’est la politique néolibérale et le manque de moyens qui en découle qui prend les passagers en otage !

    La résistance à l’austérité doit s’armer, y compris pour organiser la contre-attaque idéologique. Internet et les réseaux sociaux sont des moyens utiles, mais cela n’est pas suffisant. Les distributions de tracts explicatifs devraient être beaucoup plus systématisées et développées en préparation d’une grève ou d’une manifestation devant les gares, comme cela se fait souvent, mais aussi aux portes des entreprises, dans les centres-villes,… Mais il faut aussi soutenir la presse alternative, la presse réellement du côté des luttes sociales, à l’image de Lutte Socialiste.


    Abonnez-vous à Lutte Socialiste! Cet article est tiré de l’édition de décembre-janvier de notre journal, Lutte Socialiste. Si vous désirez recevoir les prochaines éditions dans votre boîte aux lettres, prenez vite un abonnement. Vous pouvez verser 20 euros (pour 12 n°) ou 30 euros (abonnement de soutien) au n° 001-3907596-27 de "socialist press" avec la mention "abonnement". Pour plus d’infos, des remarques, propositions d’articles,… : prenez contact avec nous via redaction@socialisme.be


    (1) Données issues du Cetro, un journal à édition unique édité avec le soutien du CADTM, de la Jeunesse Ouvrière Chrétienne, de l’ASBL Aquilone, de Financité, d’Attac,… (www. lacrisepourlesnuls-liege.blogspot.be/p/cetro_ 18.html)

  • PLAN D’AUSTERITE: Ca va faire mal après les élections

    Tous les partis traditionnels sont d’accord : la crise économique va mener à un déficit budgétaire record. Les revenus des contributions vont baisser : si les revenus de la plupart des gens actifs sont aisément vérifiés et le paiement de leurs impôts étroitement contrôlé, le gouvernement, avec Reynders aux Finances, accepte par contre sans problème que les entreprises soient plus “créatives” avec les impôts pour en payer toujours moins.

    Par Peter Delsing

    e, les dépenses pour le chômage et la sécurité sociale augmentent par contre rapidement. Le déficit de la sécurité sociale pourrait monter cette année à presque 2 milliards d’euros. Comme c’est le cas pour beaucoup d’estimations économiques ces derniers temps, il est fort probable que celle-ci devra encore être revue à la hausse. Sans les réductions de charges sociales patronales qui atteignent 5 à 6 milliards d’euros par an, la situa-tion financière de la sécurité sociale serait évidemment bien plus saine. Comme dans le cas des milliards versés pour les banques, la logique est claire : les bénéfices sont pour le secteur privé, les charges pour la collectivité.

    De son côté, le nouveau gouvernement Van Rompuy doit revoir les prévisions économiques à la baisse. Il y a quelques semaines, il se basait encore sur le pronostic d’une décroissance de 1,9%. Aujourd’hui cela semble encore trop optimiste. Selon le FMI, nous allons atterrir dans “une récession profonde” où la croissance négative atteindrait les -2,5%. Les banques ING et KBC sont encore plus pessimistes : leurs analystes prévoient respectivement une décroissance de 2,7 et 3,2%. Van Rompuy est bien décidé à garder le silence jusqu’aux élections. D’autres avancent de noirs scénarios au sujet des mesures à venir. Le Conseil Supérieur des Finances (CSF) estime que le déficit budgétaire atteindra 4,5 ou même 5% du PIB dans les prochaines années. Ce qui ferait entre 15 et 17 milliards d’euros. Selon le journal De Standaard, nous allons vers “la mère de tous les plans d’austérité”. Le CSF conseille “d’assainir” 3,7 milliards d’euros par an pendant quelques années, ce qui représente une somme bien plus élevée que le Plan Global de 1993 (voir l’article qui sera publié demain).

    Cela s’ajoute au fait que la protection sociale a été fortement réduite. La pauvreté en Belgique, qui atteint aujourd’hui 15%, a triplé depuis les années 1980. Est-ce que ce taux va atteindre 20 ou 25% dans les prochaines années ? Dans la presse, on peut déjà lire des appels à porter l’âge de la retraite à 67 ans. Et cela, à un moment où les sondages montrent que 47% des travailleurs belges éprouvent des problèmes de stress à cause de la charge de travail trop élevée. 21% des retraités sont pauvres. Comment pourrait-on encore “assainir” les pensions ? Il serait plutôt nécessaire de les augmenter à un niveau correct mais cela exige le choix politique d’aller chercher l’argent là où il se trouve : chez les capitalistes et les grands actionnaires qui contrôlent la moitié de la richesse du pays.

    Les dépenses dans les soins de santé seront également touchées par les assainissements. Nous payons déjà personnellement un tiers des frais de santé et cette proportion risque encore d’augmenter. Faute d’un refinancement public de l’enseignement et des soins de santé, l’accès à ces services devient de plus en plus coûteux. Si les gouvernements doivent encore couper dans l’enseignement, le danger d’une forte augmentation des coûts d’inscription dans l’enseignement supérieur devient réel. L’enseignement deviendra un privilège pour les riches, directement au service du monde patronal, et non tourné vers le développement général de l’individu ou de la société.

    Les discussions sur une scission communautaire de la sécurité sociale (en tout ou en partie) seront utilisées pour diviser et affaiblir la riposte des travailleurs et pour pouvoir ainsi “assainir” davantage. Cela se voit clairement dans l’enseignement, déjà “scissionné” et tout aussi attaqué des deux côtés. Les travailleurs doivent s’opposer à ce rideau de fumée communautaire. Nous ne devons pas nous laisser entraîner dans une lutte nationaliste pour gérer les déficits produits par un capitalisme en crise.

    Rudy De Leeuw (président de la FGTB) a raison lorsqu’il dit qu’il est impossible “d’assainir” encore plus sur le dos des travailleurs et des pauvres. Mais, s’ils le pensent vraiment, lui et les autres dirigeants syndicaux devraient arrêter de négocier les mesures “d’accompagnement social” des plans d’assainissement et des restructurations d’entreprises et organiser une véritable opposition aux plans de régression que les gouvernements vont nous imposer à tous les niveaux au cours des prochaines années. Il nous faut un plan d’action solide couplé à une réponse idéologique claire au capitalisme décrépit : c’est la seule façon d’éviter un retour aux années 1930 avec leur chômage et leur appauvrissement massifs.

  • Négociations salariales: les patrons réalisent des profits records, mais en veulent toujours plus

    Réponse à un courrier des lecteurs de la FEB

    Le 6 octobre, notre rédaction a eu l’honneur de recevoir un courrier d’un lecteur inhabituel. Le service d’information de la FEB (Fédération des Entreprises Belges) nous a demandé d’attirer l’attention de nos lecteurs sur une rectification. Il y aurait eu, selon lui, une « erreur » dans un article de notre site. Nous y avions parlé de « l‘avarice » de la FEB et des topmanagers, en nous référant entre autre à l’augmentation des salaires des membres de la direction des entreprises reprises dans l’indice boursier belge, le Bel-20. Si nous savions déjà que nos articles et positions avaient un certain écho, notre étonnement a cependant été grand d’apprendre que le patronat belge suivait également notre argumentation.

    Peter Delsing

    Topmanagers nécessiteux?

    La FEB nous écrit ainsi : « Nous avons lu l’article ci-dessous avec intérêt. Noussignalons cependant que la supposition selon laquelle les salaires des membres de la direction des entreprises côtées au BEL-20 auraient augmenté de 12 % (cfr Trends/Tendances) est complètement fausse »

    S’agit-il alors de pauvres nécessiteux, à l’aube des négociations salariales avec les syndicats? Il semblerait que oui… « Le rédacteur de Trends/Tendance a reconnu quelques semaines après que ses calculs étaient erronés et que la véritable hausse des salaires des topmanagers n’était que de 2 %, moins que l’inflation donc. Il nous semble opportun que vous indiquiez à vos lecteurs cette rectification. »

    On pourrait donc croire en lisant ces lignes que les topmanagers, à cause de l’inflation, ne peuvent plus mettre de beurre sur leurs tartines.

    A partir de novembre se dérouleront les négociations salariales entre les syndicats et le patronat qui devraient déboucher sur un nouvel Accord Interprofessionnel (AIP). Les enjeux – et la FEB le sait- ne sont pas minces. La colère de beaucoup de salariés et de militants syndicaux remontera-t-elle à la surface un an après un mouvement contre le Pacte des générations stoppé de façon anti-démocratique par les directions syndicales? Ou bien les patrons arriveront-ils encore à faire payer les salariés pour augmenter des profits déjà exorbitants, en dépit du pouvoir d’achat à la baisse et de la misère croissante

    Des profits records !

    Depuis le début de la politique néolibérale, faite d’austérité et de modération salariale, un gigantesque transfert de richesses s’est produit des travailleurs vers les riches. En 1981, début de cette politique et année de crise économique, les profits des entreprises représentaient 20 milliards de francs belges. Six ans seulement plus tard, ils pesaient déjà 167 milliards, soit 8 fois plus. Dix ans après, en 1997, les profits atteignaient 1.240 milliards de francs. Pendant cette même période (de 1981 à 1997), les prix ont augmenté d’environ 60 % sous l’effet de l’inflation. Les 1.240 milliards de francs de 1997 représentent donc 775 milliards en francs de 1981. Les profits (inflation déduite) de 1997 sont donc 4,5 fois plus élevés qu’en 1987 et… 39 fois plus élevés qu’en 1981.

    La FEB devrait aussi savoir que, pendant la dernière décennie (1997-2006), les patrons n’ont pas vu fondre leurs profits. Tout au plus, à cause d’une croissance plus faible, le rythme d’augmentation a-t-il ralenti. En 2003, les profits des entreprises étaient de 37 milliards d’euros ! Inflation déduite, on arrive ainsi à l’équivalent de 870 milliards de francs de 1981, soit plus de 43 fois le montant de 1981 !

    Ces dernières années n’ont pas été non plus faites de vaches maigres pour le patronat. Les 97 plus grandes entreprises qui ont clôturé leur comptabilité fin 2005 ont indiqué un profit net commun de 18 milliards d’euros, en hausse de 31 % par rapport à 2004. En 2005, les profits des banques Dexia et KBC ont augmenté respectivement de 12 et 39%.

    Celui ou celle qui a vu sa fiche de salaire augmenter pareillement peut lever la main. Les études montrent que le pouvoir d’achat des salariés du privé a baissé de 2,08 % depuis 10 ans, celui des fonctionnaires de 2,28 % et ceux des non-salariés de 2,61 à 3,25 %. Les modifications imposées à plusieurs reprises à l’index ont engendré une baisse de notre pouvoir d’achat. Ces pourcentages sont encore probablement sous-estimés, vu que le loyer n’est pas encore totalement compris dans l’index actuel.

    L’index sapé engendre, depuis des années, une baisse de notre pouvoir d’achat. Ces pourcentages sont encore probablement une sous-estimation, vu que le loyer n’est pas encore totalement compris dans l’index actuel.

    Topmanager: 1,5 millions d’euros par an. Et vous?

    Le PDG d’une entreprise du Bel-20 gagne en moyenne 1,5 milions d’euros par an. Et quand Pieter Timmermans, manager à la FEB, juge que les salaires des travailleurs ont trop augmenté, il veut en fait dire qu’ils n’ont pas encore assez perdu de pouvoir d’achat.

    Nous devons exiger une véritable hausse des salaires: les patrons et les grands actionnaires ont augmenté énormément leur part du gâteau depuis 25 ans. Leur soif de profit face à la ‘concurrence’ a entraîné la société dans une logique terrible. Plus de richesse d’une part, plus de pauvreté d’autre part. Nous devons nous opposer à une indexation qui ne porterait plus que sur les salaires nets (comme le réclame le VOKA, une organisation extrémiste du petit patronat flamand), ce qui minerait la sécurité sociale. Les directions syndicales ne doivent pas se laisser séduire par cette proposition qui aboutirait à limiter la hausse du pouvoir d’achat à la minorité des salariés aux revenus les plus bas.

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