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Tag: Jean-Luc Dehaene
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[DOSSIER] Dexia: aux travailleurs et à leurs familles de payer pour les bénéfices du privé ?
Pour la nationalisation de Dexia, première étape vers un secteur financier public
Dexia Banque Belgique est actuellement aux mains de l’Etat belge. La France a aussi repris une partie de Dexia, et le reste est placé dans une ‘‘bad bank’’. Début octobre, l’Etat danois a repris la banque Max et l’Etat grec la banque Proto. Ces interventions des gouvernements sont une expression de l’énorme nervosité qui règne dans les milieux économiques et politiques partout en Europe. Certains disent même qu’il faut une intervention européenne coordonnée pour sauver le secteur bancaire avec une injection de 200 milliards d’euros, de l’argent de la collectivité bien entendu.
Dossier, par Bart Vandersteene
En un weekend, le gouvernement belge a trouvé quatre milliards d’euros pour acheter Dexia Banque Belgique. Selon le premier ministre Yves Leterme et le ministre Reynders, cela ne va rien coûter aux contribuables. Dexia doit immédiatement payer une prime de 270 millions d’euros pour la garantie destinée à la ‘bad bank’, tandis que les intérêts annuels pour le prêt de 4 milliards sera de ‘seulement’ 160 millions d’euros. Bien sûr, ils passent très vite sur le fait que les 4 milliards empruntés doivent être remboursés. Par ailleurs, le gouvernement a engagé la collectivité pour un garantie de 54 milliards d’euros pour la ‘bad bank’. Cela représente 15% du PIB et environ 5.000 euros par Belge.
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Est-ce qu’une banque publique pouvait éviter la crise actuelle ?
Il est illusoire de penser qu’une banque publique qui n’a pas participé à des investissements risqués serait restée debout dans la période qui a précédé 2008. Cette illusion, qui était aussi entrée dans la gauche, suppose qu’une banque avec un taux d’intérêt de 2% sur les épargnes pouvait rivaliser avec les 4 à 6% promis par les autres banques, bien que cela fût fondé sur les grands risques.
Si une banque publique avait existé, cela aurait été une île au milieu d’un océan de logique capitaliste, et les vagues spéculatives l’auraient immergé. Qui serait resté à la banque publique face au bombardement de propagande des médias et des experts avec leurs projections de rendements attrayants ? La pression aurait été rapidement là complètement s’inscrire dans une logique de spéculation.
C’est pourquoi le Crédit Communal et la CGER ont été vendus au secteur privé. Les banques publiques ne pouvaient pas répondre de façon adéquate à la vague de spéculation financière néolibérale.
Qui gère une banque publique ?
Comment pouvons-nous assurer que la gestion des banques éviter de retourner vers la logique capitaliste, avec des managers dont la tâche est de faire des profits rapides pour gagner des bonus ? Nous plaidons pour que le contrôle et la gestion soient aux mains d’un comité de représentants démocratiquement élus des travailleurs du secteur, des clients et du monde du travail en général. Ces élus ne devraient avoir aucun privilège pour l’exercice de leurs fonctions. Les travailleurs devraient être exemptés de leur boulot pour exercer cette tâche, les représentants des gouvernements sont déjà payés pour leur mandat public.
Mais ce n’est pas juste une question de nouvelle structure. La nationalisation de Dexia et de l’ensemble du secteur financier devrait faire partie de la construction d’une autre société dans laquelle les profits d’une minorité ne seraient pas centraux, mais bien les besoins de la majorité.
Ce n’est pas ce que les ‘‘représentants’’ de la collectivité ont défendu au sein de Dexia ces dernières années. Non, ils ont délibérément défendu l’illusion néolibérale que les risques ont été réduits en les répartissant. Ils ont été bien payés pour défendre ces mensonges. Ces représentants ont-ils représenté la collectivité au sein de Dexia, ou plutôt Dexia au sein de la collectivité ? Aucun représentant public chez Dexia – et ils n’étaient pas des moindres avec le président de l’Europe Herman Van Rompuy ou le presque nouveau premier ministre Elio Di Rupo – n’a averti des dangers du secteur. Est-ce que ces politiciens vont maintenant se limiter à une nationalisation de Dexia pour que la collectivité doive payer pour les mauvaises dettes pendant que le privé peut s’en aller avec les bons morceaux pour leurs profits ?
Une fois que le secteur financier sera dans les mains publiques, le secteur ne peut pas suivre la même voie que les directions précédentes qui étaient toujours inscrites dans la logique du capitalisme. Le secteur doit être mis sous le contrôle direct et la gestion des travailleurs et des clients. Cela devrait permettre de s’assurer que le secteur bancaire et de crédit joue un rôle socialement utile.
Nous demandons que :
- Tous les représentants politiques au sein du conseil de Dexia remboursent leurs honoraires pour les 10 dernières années
- Tous les bonus pour les managers, comme Mariani, soient récupérés
- Que Dexia soit enfin complètement placé aux mains du public
- Un audit public soit réalisé sous contrôle ouvrier pour déterminer quels actionnaires et détenteurs d’effets ont droit à une indemnité équitable au nom de la collectivité
- Les livres de toutes les banques soient ouverts
- Le secteur dans son ensemble soit mis dans les mains du public
- La gestion de ce secteur et son contrôle soient effectués par un comité élu composé de représentants élus des travailleurs, des clients et du monde du travail en général
- Il faut rompre avec le capitalisme qui démontre de plus en plus sa faillite. Il faut commencer à construire une alternative socialiste dans laquelle les besoins et les désirs de la majorité de la population sont centraux.
Tous complices
Qui sont les représentants de la collectivité qui étaient supposés nous représenter au conseil d’administration de Dexia? Aperçu de quelques complices…
Le président du conseil d’administration est Jean-Luc Dehaene, député européen du CD&V. Francis Vermeiren n’est pas seulement maire de Zaventem pour le VLD mais aussi président du Holding Communal (46.000 euros par an) et administrateur chez Dexia (pour un montant similaire). Plusieurs politiciens ont fait partie du conseil d’administration de Dexia. Parmi eux se trouvait le président européen Herman Van Rompuy.
Une petite liste des politiciens qui ont été membres du conseil d’administration de Dexia ces dernières années :
- PS: Marc Deconinck, Elio Di Rupo,
- CDH: Benoît Drèze, Jean-Jacques Viseur
- MR: Antoine Duquesne, Serge Kubla.
- SP.a: Frank Beke, Patrick Janssens, Jean Vandecasteele, Geert Bervoets
- Open VLD verres Louis, Francis Vermeiren, Patrick Lachaert, Karel De Gucht, Rik Daems, Jaak Gabriels
- CD & V: Wivina Demeester, Herman Van Rompuy, Tony Van Parys, Luc Martens, Jef Gabriels, Stefaan Declerck
Dehaene: politicien ou homme d’affaires ? Ou est-ce le même?
Yves Leterme s’est trompé quand il a été à la radio en parlant de Dehaene comme un ex-politicien. Le poids lourd du CD&V est toujours eurodéputé, ce qui représente un salaire mensuel de € 6.080 ajouté aux 4.500 euros de frais et d’indemnités de voyage.
En tant que président de Dexia, Dehaene a reçu une indemnité de 88.000 euros par an (hors primes et bonus). Au conseil d’administration d’Inbev, il recueille € 79.000, chez Umicore € 33.000, chez Lotus € 17.500, … A la FIFA, il reçoit € 70.000 par an. Ce montant a été récemment doublé en raison d’une pression de travail élevée. Ces revenus comptent pour environ 30.000 par mois. Rembourser ce qu’il a reçu de Dexia ne sera donc pas un grand problème pour Dehaene.
Jean-Luc Dehaene est officiellement de l’aile du Mouvement Ouvrier Chrétien du CD&V. Les membres du MOC (y compris les membres d’Arco) pensent-ils que les intérêts des travailleurs sont bien défendus par de tels représentants ?
[/box]Pour des logements abordables, un enseignement gratuit et de qualité, des soins de santé,… il n’y a jamais de garantie de l’Etat. Pourquoi le problème des listes d’attente dans les soins de santé n’est-il pas résolu en un weekend en donnant les moyens adéquats ? Pour les banquiers et les spéculateurs, les politiciens trouvent facilement de l’argent en ‘un weekend de courage politique’. Mais pour les manques qui frappent la majorité de la société, il n’y a pas de moyens.
La collectivité perd
La décision de scinder Dexia a de lourdes conséquences. Cela est évident rien qu’au regard de la liste des principaux actionnaires:
- Arco, le holding du Mouvement Ouvrier Chrétien, contrôle 13% des actions
- Le Holding Communal : 14%
- L’association d’assurance Ethias : 5%
- Les gouvernements régionaux : 5,7% et le gouvernement fédéral : 5,7%
Non seulement les grands actionnaires privés connaissent une perte de valeur, mais tous les niveaux de gouvernement et même la coopérative du mouvement ouvrier chrétien vont payer le prix fort pour avoir rejoint l’idéologie néolibérale avec le casino de Dexia.
La perte de valeur pour le gouvernement fédéral et les gouvernements régionaux est de 2 milliards d’euros. Pour les 700.000 membres de la société Arco, une solution sera développée correspondant à la garantie de l’Etat pour les comptes d’épargne. La perte du Holding Communal, en théorie, doit conduire à la faillite. Il est possible que les régions et le gouvernement fédéral interviennent pour le maintenir à flot. Mais, pour les communes, cela signifie de toute façon un gouffre financier. Il y a la disparition des dividendes (en 2008, il s’agissait de 8,5 millions d’euros pour Anvers) et aussi la perte de valeur du Holding Communal. Ce holding avait acheté ses actions Dexia à 8,26 € alors que leur valeur boursière a chuté à moins de 1 euro. La collectivité va payer un prix élevé, la seule discussion est de savoir quel niveau va supporter quelle partie du prix.
Enfin, le gouvernement a également engagé la collectivité pour 54 milliards d’euros pour la ‘bad bank’. Si quelque chose va mal – et le nom de ‘bad bank’ indique que le risque est grand – la collectivité intervient. Parmi les 200 milliards d’euros d’actifs dans cette ‘bad bank’, il y a 12 milliards d’euros en obligations des gouvernements d’Europe du Sud et 7,7 milliards d’actifs toxiques. Comme le dit l’économiste Van de Cloot (Itinera): ‘‘S’il y avait seulement de bons morceaux, pourquoi faudrait-il une garantie du gouvernement ?’’
Les agences de notation vont bientôt se pencher sur la solvabilité de la Belgique, qui sera réduite après les garanties que l’Etat a prises en charge. Les belles paroles du gouvernement concernant l’argent que les garanties pour la ‘bad bank’ rapporteront à la collectivité ne sont pas prises au sérieux par les économistes des agences de notation.
La ‘Bad Bank’ : étape vers un scénario grec?
Dans le quotidien flamand ‘De Morgen’ le rédacteur en chef Yves Desmet a dit que la ‘bad bank’ est un énorme pari. ‘‘Si ça tourne mal, le gouvernement met la prochaine génération devant une dette semblable à celle de la Grèce ou de l’Irlande. C’est ni plus ni moins que mettre l’avenir en péril.’’
Un scénario grec en Belgique suite à l’éclatement d’une bulle de spéculation et de crédit, c’est ce que la ‘bad bank’ peut nous apporter. Juste un rappel de ce que signifie ce scénario grec : un doublement du taux de chômage, la chute de moitié du revenu moyen d’une famille grecque au cours des quatre dernières années, une montagne de nouveaux impôts pour les travailleurs et leurs familles, la fin des livres scolaires parce qu’ils ne peuvent pas être payés, 200.000 fonctionnaires en moins,…
De cyniques journalistes placent la responsabilité de ce scénario grec chez les Grecs eux-mêmes. Steven De Foer du ‘De Standaard’ avait écrit le 7 octobre : ‘‘Cette violence, cette protestation arrogante contre les institutions internationales, cette innocence théâtrale, comme si le Grecs sont justes des victimes. (…) Bien sûr, cela n’a pas de sens de réélire pendant des années des politiciens corrompus et de profiter du travail au noir, du népotisme, de la mauvaise gestion,… et après de venir dire que ce n’est pas de sa faute.’’ C’est vrai que le capitalisme met en évidence les éléments les plus mauvais des gens. Dans le cas d’un scénario grec dans notre pays, ce journaleux s’excusera-t-il pour le rôle joué par son journal dans l’élection des politiciens traditionnels ?
Qui suit après Dexia ?
Dexia a ouvert la danse dans cette deuxième phase de la crise financière. Beaucoup l’ont vu venir de loin, mais les responsables ont tout fait pour entretenir l’illusion qu’ils avaient tout sous contrôle. Il y a quelque mois, Jean-Luc Dehaene affirmait qu’il n’y avait aucun problème, pour dire aujourd’hui que Dexia est désormais plutôt un hedgefund.
La garantie de l’Etat pour la ‘bad bank’ de Dexia (une garantie qui représente 15% du PIB) n’est que le début. Que faire si d’autres banques suivent ?
Le FMI a estimé, avant l’épisode Dexia, qu’il faut 200 milliards d’euros pour protéger le secteur bancaire contre les conséquences de la crise de la dette dans la zone euro. Combien faudrait-il si, après la Grèce, le Portugal, l’Italie et l’Espagne entre aussi en difficulté ? Tout semble indiquer que nous allons bientôt avoir une vue plus claire sur ce scénario. Combien d’argent public sont-ils prêts à donner pour sauver les richesses, la position de pouvoir des grands actionnaires et les spéculateurs du secteur financier ?
Gagnants et perdants
Malgré tout l’argent public consacré au sauvetage des banques en 2008, la même culture de la spéculation et de la cupidité est restée à l’ordre du jour. Le manager de Dexia Mariani avait reçu 1,95 million d’euros en 2009 et, en plus de son salaire régulier, il a encore reçu plus de 1 million d’euros en 2010 en cadeau pour sa retraite de 200.000 euros, avec un bonus de 600.000 euros. L’homme avait sans aucun doute travaillé très dur ? Ses notes de frais à l’hôtel – l’hôtel cinq étoiles ‘Amigo’ à Bruxelles – démontrent qu’il était à Bruxelles en moyenne deux fois par semaine. Et c’est bien sûr Dexia qui payait 185 euros par nuit. Sans doute Mariani et Dehaene vont-ils encore encaisser une prime de départ pour quitter le bateau en plein naufrage ?
Les politiciens veulent maintenant nettoyer les débris des vautours avec l’argent public. Les débris sont soigneusement triés dans les ‘‘toxiques’’ (lire: les pertes) qui sont pour la collectivité et une partie rentable qui, par la suite, peut être retournée aux mêmes vautours à prix d’ami. Alors que les spéculateurs sont sauvés, nous sommes confrontés à des projets d’austérité dans la sécurité sociale, les soins de santé, les services sociaux et publics, l’éducation,…
Les principaux actionnaires ont encaissé de gras dividendes des années durant et ont consciemment joué les parasites. Leurs complices dans les médias et la politique ont menti au public et quelques personnes se sont laissé tenter pour placer leurs épargnes et participer à la fête boursière. Cela est maintenant utilisé pour dire que chacun est responsable, y compris ceux qui ont été trompés par cette campagne de propagande massive.
Les responsables de la spéculation, les principaux actionnaires et les managers, n’ont besoin d’aucune compensation pour l’expropriation par le public. Pour les petits actionnaires, une compensation doit être possible sur base de besoins prouvés. Nous ne voulons pas mettre en encore plus grande difficulté ceux qui avaient espéré compléter leur maigre pension avec le revenu de quelques actions.
Il faut aussi que l’épargne et les prêts des travailleurs et de leurs familles soient garantis. La société Arco doit être dissoute, avec une compensation pour les 700.000 membres victimes de la participation de la direction d’Arco au casino de Dexia.
Une alternative socialiste
La nationalisation complète et définitive de Dexia en tant que première étape vers un secteur financier dans les mains du public avec une gestion démocratique
La première banque entièrement détenue par l’État est un fait. Le ministre Reynders suggère que Dexia Banque Belgique peut rester dans la propriété publique pendant des années. Le rédacteur du ‘De Standaard’ Guy Tegenbos n’est pas d’accord : ‘‘une banque n’est pas une tâche essentielle pour un gouvernement.’’ Bien protéger l’épargne et l’utiliser pour accorder des prêts à ceux qui veulent, par exemple, investir en achetant une maison ou au gouvernement pour investir dans des travaux publics nous semble bien être une tâche essentielle de la collectivité.
Le système bancaire et de crédit est trop important pour être laissé aux vautours à la recherche de profits rapides. Il est vrai que cela ne sera pas réglé si ‘nationalisation’ signifie que les banques seraient dirigées par des (anciens) politiciens aux attitudes identiques à celles de leurs copains du privé. Tegenbos écrit: ‘‘Même si l’objectif des administrateurs du gouvernement est d’avoir des services bancaires objectifs, il y aura toujours la tentation de poursuivre des objectifs moins honorables’’.
Une banque publique ne signifie pas automatiquement qu’elle fonctionne au service de la majorité de la population. Ces dernières décennies, de nombreuses entreprises publiques ont été utilisées comme tremplin pour le secteur privé. Elles étaient sellées avec des achats inutiles, une mauvaise gestion et un agenda destiné à servir un noyau d’élite. Pensons à la mauvaise gestion au sommet de la SNCB, où à la faillite orchestrée de la Sabena, après quoi le privé a pu reprendre le morceau intéressant de Brussels Airlines.
L’ensemble du secteur financier doit être retiré des mains du secteur privé afin de pouvoir jouer un rôle socialement utile. Faire de Dexia Banque une banque publique ne peut être qu’une première étape pour prendre l’ensemble du secteur hors des mains des spéculateurs.
Mais un Etat servant les intérêts de l’élite capitaliste n’appliquera pas une telle politique dans les pans de l’économie dont il est propriétaire. Pour échapper à la logique du libre marché, une banque, une société ou une industrie dans les mains du public doit être placée sous le contrôle démocratique des travailleurs.
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L’entièreté du secteur financier aux mains du public!
Une “Bad bank” pour collectiviser les dettes et sauvegarder les profits?
La Grèce est en faillite, c’est peu à peu officiel. La note de solvabilité de l’Italie est revue à la baisse. La foi en l’avenir de la zone euro est au plus bas. Le gouvernement belge a opté pour la création d’une ”bad bank” pour y mettre tous les déchets de Dexia. Lors du stresstest européen pour les banques, Dexia s’est retrouvé à la 12e position sur 91 banques, seules 11 banques sont donc mieux préparées face à la crise. Il est possible que cela ne soit seulement que le début d’une nouvelle tournée d’opérations de sauvetage dans le secteur bancaire.
“Un clou dans le cercueil de la Belgique”
La valeur des actions de Dexia a chuté hier de 22%. L’occasion de cette baisse était la crainte que Dexia soit exposée dans une large mesure à la dette publique grecque, à hauteur de 3,4 milliards d’euros. Avec également les dettes grecques privées, Dexia est exposée à concurrence de 4,8 milliards d’euros. Une partie des dettes grecques, 21%, a déjà été amortie, mais il est possible qu’il faille faire de même pour plus de la moitié de celles-ci.
Juste avant l’été, l’agence de notation Moody’s avait expliqué : ”Dexia est le clou sur le cercueil de la Belgique et peut signifier la fin de la zone euro.” L’effondrement de la valeur de Dexia a également de profondes implications pour le financement des villes et des communes qui représentent 14,4% des actions Dexia. Les communes réussiront-elles à reporter les opérations d’économies au niveau local jusqu’après les élections communales de 2012 ? Ces économies, conséquentes au jeu sur les dettes, viendront s’ajouter aux attaques du fédéral et des régions.
Les spéculateurs et les banquiers ont reçu carte blanche des politiciens
Dexia est entremêlée à l’establishment politique, et ce n’est pas une coïncidence si Jean-Luc Dehaene (CD&V) en est le président. Lors de la crise financière de 2008, Dexia avait reçu 6 milliards d’euros des gouvernements français et belge. Les communes et le gouvernement, via Dexia, ont participé au capitalisme-casino et ils veulent maintenant nous en faire payer la facture. À tous niveaux, les élus ont fermé les yeux sur les risques pris au nom de la collectivité.
La direction de Dexia, avec le soutien des gouvernements français et belge, a élaboré un scénario où les activités à risque seraient regroupées dans une ”bad bank” pendant que les‘’ parties ‘saines’ du groupe seraient vendues pour recapitaliser Dexia. Cela signifie en pratique que les pertes sont nationalisées et que les bénéfices sont privatisés. Le Premier ministre Yves Leterme a immédiatement annoncé que le gouvernement belge accorde une garantie d’Etat pour la ”bad bank”. Il serait question de 57 milliards d’euros.
L’épargne en danger?
Nombreux sont ceux qui s’interrogent au sujet de la sécurité de leur épargne. Le gouvernement offre des garanties à hauteur de 100.000 euros par client. Hier, 300 millions d’euros ont été retirés des comptes de Dexia. Ce n’est pas encore une panique bancaire, mais cela indique bien que la méfiance et la peur sont grandissantes.
Il est exact que nous ne pouvons pas accorder de confiance aux banquiers et aux spéculateurs qui jouent avec notre argent. Les politiciens font tout pour nous rassurer, mais que faire si, après la Grèce, l’Italie glisse elle aussi ? Cela signifierait un nouveau coup dur pour Dexia et d’autres banques belges. Le gouvernement peut bien intervenir pour entièrement ‘nationaliser’ Dexia’. Cela pourrait coûter presque 4 milliards d’euros aux contribuables, mais sur un actif total de 247 milliards d’euros (soit deux tiers du PIB belge). Des opérations de cette taille peuvent difficilement être répétées plusieurs fois.
Les banques aux mains du public !
Une banque publique avec toutes les mauvaises dettes ne servirait uniquement qu’à collectiviser les pertes pour que les spéculateurs privés puissent sauvegarder leurs profits futurs. Ce n’est pas ce que nous entendons par ‘nationalisation’. Nous plaidons pour que le secteur financier entier soit placé hors de portée des spéculateurs et des banquiers pour être mis sous contrôle public.
Comme nous l’avons écrit sur la première page de l’édition d’octobre de notre journal : ”Si nous voulons stopper la dictature des marchés et faire jouer au secteur financier un rôle utile à la société, nous devons reprendre ce secteur hors des mains des requins de la finance et le placer sous contrôle public, non pas pour que les ménages supportent les conséquences de leurs actes, mais pour en finir avec ces spéculateurs qui veulent nous dicter nos conditions de vie. Cela fait partie de la lutte pour une société où les intérêts de la majorité de la population seront centraux.”
Nationaliser le secteur entier
Ces dernières années, les grands actionnaires ont reçu dividende après dividende. Les managers ont été récompensés avec des bonus gigantesques. Maintenant qu’ils sont trop grands, les risques doivent êtres repris par les contribuables. C’est une illusion de penser que cela ne nous coûtera rien, comme Leterme le suggère. S’il ne s’agissait pas de crédits problématiques, il y aurait aucune raison pour que le gouvernement les reprenne.
Au lieu de nettoyer le secteur peu à peu pour le rendre ensuite aux mains des mêmes charognards, le secteur complet doit venir aux mains du public. Les grands actionnaires ne doivent recevoir aucune indemnisation. Ils ont profité assez longtemps du système en parasites. Pour le petit actionnaire, convaincu de placer sont épargne sous forme d’actions dans le secteur financier par une propagande massive, une compensation doit être prévue sur base de besoins prouvés.
Une fois le secteur financier dans les mains du public, il ne doit pas suivre la même voie que les anciennes banques où les autorités constituaient les actionnaires les plus importants et qui fonctionnaient totalement dans le cadre de la logique du capitalisme. Le secteur doit être placé sous le contrôle et l’administration directs des travailleurs et des clients. Cela doit permettre d’assurer que les banques jouent un rôle socialement utile : assurer notre épargne et permettre des emprunts payables.
A la place d’être géré par des topmanagers grassement payés, le secteur doit être géré par un comité élu composé de représentants des employés, des clients et du mouvement ouvrier. Ces élus ne doivent avoir aucun privilège lié à leur fonction. C’est la seule façon d’éviter que ces représentants, par le biais de diverses subventions et primes, soient soudoyés pour aller contre les intérêts de la population.
Le système est malade
La nouvelle crise bancaire est la conséquence de la nouvelle phase de la récession qui, depuis 2007-08, a la mainmise sur l’économie mondiale. Ces dernières années, le capitalisme a testé toutes sortes de mesures pour y faire face. Tous les remèdes, des mesures de stimulus aux économies –dures, ont échoué. Le capitalisme est très gravement malade, une aspirine n’y changera rien. Le mouvement ouvrier doit aller à l’offensive pour défendre ses intérêts. Sur les plan syndical et politique, nous devons lutter pour que le secteur des banques et du crédit soit placé dans une institution publique forte, en tant que partie d’une politique de relance socialiste.
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Nouveau parti de gauche en Belgique: des semaines cruciales sont devant nous
Le 30 mars et le 1er avril se sont tenues à Bruxelles deux importantes réunions sur la construction d’une nouvelle formation politique de gauche. Des militants du MAS/LSP y ont participé en nombre et activement. Le défi est de lancer le 1er mai une initiative nationale, soutenue par des groupes locaux dans tout le pays.
Bart Vandersteene
Ce ne sont pas les arguments qui manquent pour lancer publiquement les discussions sur la nécessité d’un nouveau parti de gauche large. A Imbev, malgré un nouveau record en terme de profits, 232 travailleurs sont de nouveau licenciés tandis que trois managers ont reçu une prime de départ de 31 millions € (ce qui serait suffisant pour maintenir l’emploi de ces 232 travailleurs pendant 5 années…) La priorité apparaît clairement, surtout quand on sait que Jean Luc Dehaene est présent au conseil d’entreprise.
Ce n’est évidemment pas uniquement dans les salaires que nous remarquons le fossé grandissant entre riches et pauvres. Les profits record que font les entreprises illustrent les gigantesques moyens disponibles. Si seulement nous pouvions les utiliser pour une politique sociale! En 2005, Fortis a fait 3,9 milliards € de profit. Malgré cela, on y discute une diminution drastique de personnel: 13.700 emplois d’ici 2009. Ceci évidemment dans le but de faire encore plus de profits et non pas pour améliorer le service à la clientèle. Réaugmenter le budget de l’enseignement francophone jusqu’au niveau de 1980 –7% du PNB (Produit National Brut) à l’époque – exige 2,5 milliards €, chiffre bien en dessous du profit net de Fortis en 2005. La politique, c’est faire des choix, et pour nous ces choix doivent être complètement différents de ceux du patronat et de ses laquais.
Un parti qui dénonce cela, qui met le doigt sur la plaie, gagnera facilement l’attention de ceux qui seront confrontés dans un avenir proche à l’absence de moyens dans l’enseignement, aux assainissements, aux factures qui arrivent…
Le potentiel pour un nouveau parti croît quotidiennement. Certains continuent à avancer que des marxistes doivent s’orienter vers les partis “progressistes” actuels, tels que le PS. La base sociale pour reconquérir ce parti n’y existe plus. Comme l’activiste, scénariste et publiciste bien connu Michael Moore le disait: « Qui faut-il craindre le plus? Celui qui annonce qu’il va te dépouiller et qui le fait, où celui qui prétend être ton allié, mais te dépouille quand-même? »On ne peut qu’attendre des libéraux qu’ils défendent l’intérêt des riches et des patrons. Mais des ministres qui se prétendent socialistes et qui appliquent une politique néo-libérale donnent irrémédiablement envie de vomir.
La seule option de la gauche est de construire de toutes nos forces un nouveau parti qui choisisse de lutter en faveur des opprimés, des salariés, des pensionnés et des jeunes. Le MAS espère, avec d’autres, pouvoir offrir une alternative crédible et large aux travailleurs et aux jeunes lors des prochaines élections législatives. En avant pour le 1er mai, fête du travail et de la lutte des travailleurs!
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INBEV: Tournées de licenciements après tournées de licenciements pour étancher la soif de profit du géant de la bière…
Plus de 500 licenciements ont été annoncés en Belgique, ainsi que la fermeture des brasseries de Hoegaarden et de Molenbeek. Inbev est déjà la plus grande brasserie au niveau mondial – un de ses slogans est d’ailleurs « going from bigger to best » – mais les concurrentes Anheuser-Busch et SABMiller font plus de bénéfices avec un volume plus petit. En d’autres termes, il faut faire plus de profit, de préférence sur le dos du personnel. Mais quand il s’agit des primes des managers, il y a deux poids deux mesures.
Luc Janssens
En chiffres
- 1,024 milliard de profits en 2005…
- 31 millions d’euros en prime de départ pour trois managers…
- Les familles Spoelberch, de Mevius en Vandamme, les plus importants actionnaires d’Inbev, ont une fortune de 7.357.577.790 euro, ce qui fait d’eux de loin les plus riches familles de Belgique…
- Et 500 licenciements…
La première restructuration a eu lieu en octobre dernier: 45 employés au bureau principal ont été licenciés. Alors que les négociations étaient encore en cours, les 45 travailleurs ont reçu, en décembre, leur lettre de licenciement. Fin novembre, une deuxième restructuration eut cours en Belgique. Il s’agissait de la fermeture des brasseries d’Hoegaarden et de Molenbeek et de licenciements dans presque tous les sièges. Cette restructuration était encore en cours lorsque Inbev en a annoncé une nouvelle le 24 février, lors d’une réunion extraordinaire du conseil d’entreprise : 360 licenciements à travers l’Europe, dont 201 en Belgique. Cette fois, c’est le siège de Jupille qui est visé, dont l’administration sera délocalisée vers la Tchequie et la Hongrie. Mais ça ne s’arrête pas là. Une semaine plus tard, plus de 200 licenciements étaient annoncés en Allemagne, en France, aux Pays-Bas et en Grande-Bretagne. Il apparaît clairement que d’autres restructurations auront lieu. Les sièges de Belgique ne seront pas touchés dans l’année à venir, à l’exception de cinq licenciements. Mais qu’arrivera-t-il ensuite? Une nouvelle tournée pour les sièges de Belgique? En appliquant la restructuration en différentes phases et en délocalisant, Inbev suit la stratégie de diviser pour mieux régner. Il s’agit de monter les travailleurs des différentes entreprises les uns contre les autres: méthode qu’Inbev continuera d’utiliser pour s’attaquer aux conditions de travail et de salaire du personnel (sauf évidemment pour les managers).
Les réactions ont fusé immédiatement. Après l’annonce de la fermeture de la brasserie de Hoegaarden, 3000 personnes ont manifesté dans le village. Après l’annonce des licenciements à Jupille, l’évêque de Liège et l’évêque auxiliaire de Namur ont déclaré dans une interview : « Si les lois économiques ne tiennent pas compte de l’être humain, ces lois doivent changer. Les pertes d’emploi s’empilent. Hier c’était à Arcelor, aujourd’hui à Inbev. Et demain? Est-ce cela le côté européen de la mondialisation de l’économie? Cela nous touche. Avec les victimes, leurs familles, leurs collègues et beaucoup de citoyens nous disons: si la logique financière provoque tant de souffrance, elle est inhumaine et elle doit changer. »
La logique du système actuel est en effet au service du profit. Pour augmenter ces profits, des travailleurs sont jetés à la rue. Ici et là, on entend proclammer l’impuissance quant à la volonté arbitraire des multinationales. Les politiciens crient au scandale, mais au moment décisif ils disparaissent. Ou peut-être ont-ils peur de perdre leur (futur) siège dans le conseil d’administration? Pourquoi n’entendons- nous rien de Jean-Luc Dehaene présent au conseil d’administration d’Inbev? Pas de commentaire? Quelques larmes de crocodile pour ensuite repasser à… de nouvelles attaques sur nos salaires et nos pensions. Bien que des multinationales comme Inbev sont influentes, cela ne signifie pas qu’elles peuvent faire n’importe quoi. Mais pour les arrêter, il faut établir un rapport de force. Il est donc nécessaire de répondre à la stratégie de division d’Inbev. Pour cela il faut un plan d’action commun, européen et combattif, discuté sur les lieux de travail, avec comme point central la lutte pour chaque emploi. Mais même si cela mène à une victoire, elle ne serait que temporaire. Tant que nous vivrons dans un système capitaliste, les profits seront toujours primordiaux, et l’attaque suivante n’est qu’une question d’échéance. Des victoires ponctuelles sur des multinationales comme Inbev sont possibles à condition de construire un rapport de force. Une longue phase de concessions systématiques occtroyées par les multinationales, comme, dans une certaine mesure, lors des « golden sixties », est par contre exclue dans cette phase du capitalisme. Pour de véritables résultats, il faut fondamentalement briser le système et construire une société socialiste.