Tag: Interview

  • Interview d’Anja Deschoemacker sur le site lavenir.net

    Ce samedi 1er février, une septantaine de personnes ont manifesté à Bruxelles, à la station Albert, contre une nouvelle augmentation des tarifs de la STIB. Anja Deschoemacker, porte-parole de “Gauches Communes” et membre du PSL, a répondu aux question de la rédaction de L’Avenir en défendant la gratuité des transports en commun.

    Photo ci-contre: Anja Deschoemacker (Gauches Communes, PSL) et Gilles Smedt (Gauches Communes, Parti Humaniste)

  • Mamadou, cible d’Aube Dorée

    Interview de Mamadou Ba, jeune immigré guinéen arrivé en Grèce en 2006, réalisée par le Collectif Krasnyi. A cause de ses origines et son engagement, sa vie est aujourd’hui menacée en Grèce par Aube Dorée, parti néonazi grec. Après avoir dénoncé les exactions extrêmement violentes des milices d’Aube Dorée et les tentatives de meurtre commises avec la connivence de la police, Mamadou en est devenu lui-même une cible. Attaqué par 8 néonazis et laissé pour mort par ces derniers, il a alors été contraint de fuir le pays. Aujourd’hui, il est demandeur d’asile en Belgique et demande donc à l’Etat belge de lui accorder sa protection, en tant que membre d’un groupe “cible” de discriminations et de la violence d’extrême-droite, mais aussi policière, et comme réfugié politique au sens strict, personnellement pourchassé pour ses opinions et ses activités.

    Informations pour le soutenir.

  • [INTERVIEW] Collectif Krasnyi : l’image comme arme de changement social

    Les passionnés de l’image ne manquent pas dans les manifestations, les grèves ou les actions de protestation. Bien souvent, c’est d’ailleurs à ces journalistes improvisés que l’on doit les meilleurs captures de moments de lutte, ces vidéos et reportages-photos insoumis qui permettent de mieux saisir l’atmosphère d’un combat social en comparaison des informations qui passent par les canaux dominants. Reste à chercher à diffuser cette approche au-delà de son simple réseau d’amis ou de collègues… C’est le défi que s’est lancé le Collectif Krasnyi, et nous en avons brièvement discuté avec Laure Miège, par ailleurs également membre du PSL.

    D’où provient votre collectif ?

    Notre collectif était embryonnaire lors des évènements qualifiés d’”émeutes à Matongé” fin 2011 dans les médias. En fait, c’est lors de ces manifestations qu’il est né. Un des photographes à l’initiative du projet y a rencontré un autre, ils ont été arrêtés ensemble, et ont décidé de joindre leurs photos via le collectif. L’envie était forte de dépeindre, par leurs images, une réalité bien différente de celle qui transparaissait quotidiennement dans les médias classiques.

    En l’occurrence, ces “émeutes” que l’on photographiait au quotidien, étaient relatées dans les médias de manière très différente de la réalité que nous observions. Les Congolais y étaient fortement criminalisés alors que nous vivions en direct une énorme répression, dont la violence émanait d’abord des policiers. Le collectif est donc parti d’une constatation : celle que les médias traditionnels, malheureusement les plus vus ou entendus, ne diffusent pas une vision neutre de l’actualité, mais bien un point de vue. Et ce point de vue défend, la plupart du temps, les intérêts des ‘‘grands’’ de ce monde, que cela soit par la façon dont les sujets sont traités ou par le choix des sujets traités. Nous voulions faire un contrepied à cette information clairement orientée.

    Il était important pour nous de mettre l’image au service des gens que nous photographions, contrairement à ce que l’on voit trop souvent. Nous ne voulions pas de cette photographie qui se prétend “artistique”, mais qui n’a de prétention que de servir celui qui la prend, et qui ne se préoccupe en aucun cas des gens qu’elle révèle.

    Le regard que vous portez sur les événements n’est donc pas ‘‘neutre’’…

    Pour nous le regard neutre n’existe pas. Personne ne peut prétendre être neutre. D’une part parce que nous sommes des êtres humains, que nous avons chacun nos expériences, notre propre regard sur les choses. Ensuite parce que le point de vue que nous choisissons de prendre, ou qui s’impose à nous comme une évidence, est propre à chacun. Ainsi, un même sujet, traité soit disant de manière neutre, sera totalement différent s’il se place d’un côté des évènements, ou de l’autre. Nier cette réalité n’est que pur mensonge.

    Enfin, malheureusement, les médias dominants sont aujourd’hui (pardonnez l’expression) ‘‘tenus par les couilles’’ par leurs principaux donateurs c’est-àdire par l’Etat ou encore par de riches milliardaires. Quelle liberté de ton peut on avoir avec la crainte d’incriminer ceux-là même qui nous financent ?

    La question du temps évidemment joue aussi dans l’altération de la qualité de l’information. Pour faire une information de qualité, il faut pouvoir avoir le temps de faire une réelle investigation et de prendre le temps de discuter avec les gens dont l’on veut parler. Or ce temps coûte de l’argent, et la sacrosainte rentabilité domine aussi dans les médias traditionnels. Donc l’information est la plupart du temps ponctionnée par les journalistes dans de grosses banques de données telles que les agences de presse Belga ou AFP, très loin d’être neutres…

    Nous avons donc voulu poser notre propre regard, mais surtout essayer de redonner la parole à ceux qui sont trop souvent condamnés au silence dans les médias traditionnels, renverser cette balance où seule la minorité dominante peut exprimer son point de vue. Nous voulions permettre de voir et d’entendre les personnes qui luttent au quotidien, les victimes qui font face à ceux qui disposent du pouvoir économique et politique.

    Vous référez-vous à de précédentes expériences dans l’histoire des luttes sociales ?

    Bien sûr, nombreux sont ceux qui nous ont inspirés et qui ont été précurseurs de cette mise en image des opprimés, des résistants, de la majorité silencieuse, peu importe comment on l’appelle. C’est le cas de Capa, de certains de Magnum, des Medvedkines, et bien d’autres encore. Il en existe encore beaucoup aujourd’hui, mais ils restent trop souvent dans l’ombre et on connait peu leur travail. C’est aussi une volonté du collectif, réunir tous ceux qui veulent, comme nous, relayer les mouvements sociaux à travers le monde.

    Quelles sont les réalisations dont vous êtes le plus fier, qui vous semblent le mieux illustre votre action ?

    C’est difficile à dire. D’une part parce que nous sommes tous très différents dans le collectif, et que nous aurions sans doute des coups de coeur très différents.

    Mais s’il faut en choisir un, notre reportage sur les mineurs espagnols des Asturies était sans doute une des plus belles expériences pour l’ensemble des membres du collectif.

    Que retirez-vous du contact avec des travailleurs en lutte, des grévistes,… ? Comment êtes-vous reçu dans les mobilisations ?

    De manière générale, nous sommes reçus de manière très chaleureuse, très généreuse de la part des acteurs des mouvements sociaux. Ça commence souvent par un peu de méfiance, mais ça change dès que les gens comprennent que nous ne voulons pas faire un tri sélectif des moments croustillants mais au contraire leur donner la parole. D’ailleurs, cela se comprend très vite puisque nous restons la plupart du temps plusieurs heures avec eux et non quelques minutes comme les journalistes traditionnels.

    Nous avons toujours été très bien accueillis par les gens que nous rencontrons. C’est à chaque fois une agréable surprise, et un moment d’échange très riche, où l’on apprend beaucoup. Une belle leçon d’humanité à tous les coups!

    Comment fonctionnez-vous concrètement concernant votre ligne éditoriale, vos prises de décision,… ?

    Nous avons établi depuis peu des statuts, et nous sommes en train de travailler sur une charte déterminant notre fonctionnement, mais aussi notre ligne éditoriale. Globalement, nous sommes pour laisser une grande liberté à chacun pour exprimer et traiter les sujets en fonction de ses affinités, et de la manière qui lui est propre. Evidemment, le fil rouge reste toujours de relayer autant que faire se peut la parole des acteurs sociaux en résistance.

    Concernant les prises de décisions, nous sommes encore un petit noyau donc nous avons toujours réussi à nous entendre en prenant le temps de discuter. Si nous devions trancher des questions urgentes, ou très polémiques, la majorité aurait force de décision et un bilan de celle-ci serait discuté après.


    www.collectif-krasnyi.be – Le collectif réunit actuellement Karim Brikci- Nigassa, Nelson De Vos, Pierre Vanneste, Laure Miège, Pablo Ortega, et Marieau Palacio.

  • ArcelorMittal – Interview d’un délégué syndical : ‘‘Nous n’avions pas les bonnes stratégies’’

    Ce mois d’octobre, cela fera 2 ans déjà qu’ArcelorMittal a annoncé la fermeture de la phase à chaud liégeoise. Plus d’un an plus tard, la fermeture de 7 des 12 lignes de la phase à froid a également été annoncée. Nous en avons discuté avec un délégué de l’entreprise.

    Interview réalisée par Nicolas Croes

    Quel regard portes-tu sur ces deux années ?

    C’est un regard fort amer. Pourquoi? Je pense que nous avons manqué de certaines stratégies à mettre en place. Avec le front commun, que nous avons voulu soutenir le plus possible malgré les divergences, on n’a pas tout essayé. Il fallait y réfléchir quitte même à y passer des journées entières et des nuits blanches.

    Les médias, c’est un bon exemple. Il fallait mettre à mal l’image de Mittal, c’est un personnage qui tient beaucoup à son image de marque, et cela n’a pas été fait. Il tenait à ce qu’on dise de lui qu’il négociait bien, mais comment voulez-vous discuter avec une multinationale qui ne revient sur aucune de ses décisions et qui ne donne aucune garantie fiable ? Il se réfugie derrière le prétexte de la crise, mais elle a bon dos, la crise. Nous avons quand même un taux de rentabilité de 5 à 7%. Mais Mittal, lui, veut un rendement de 15% à 20%, à l’exemple de ce qui existe dans le secteur minier. Il a d’ailleurs beaucoup investi dans ce secteur.

    Mais nous avons surtout raté l’occasion de créer un précédent européen. Avec une solidarité et une cohésion convenable entre les sites des différents pays, il y avait moyen de freiner le tsunami Mittal. Le précédent aurait été créé si les ministres de l’industrie français, luxembourgeois et belge avaient clairement pris position pour les travailleurs.

    La stratégie syndicale a beaucoup reposé sur l’appel à l’aide aux partis politiques traditionnels, et particulièrement à Jean-Claude Marcourt. Une approche qui s’est révélée payante ?

    Jean-Claude Marcourt est le ministre en charge du dossier à la Région Wallonne, mais nous n’avons globalement pas eu l’appui des politiques du gouvernement wallon, du fédéral et de l’Europe ! Le PS n’est pas à gauche, on le sait. Marcourt a beaucoup joué sur l’espoir qu’il donnait aux travailleurs. Il avance en lançant de la poudre aux yeux. Ce gouvernement wallon est inodore, incolore, insipide !

    A la dernière réunion de la Task Force (qui réunissait des représentants syndicaux des métallos, du gouvernement wallon et de divers organismes publics), Marcourt a donné des espoirs qui ont stupéfait. Patrick Remacle, le journaliste de la RTBF qui a réalisé le reportage ‘‘Ni chaud, ni froid’’, était également présent avec nous et nous a dit ce jour-là ‘‘Marcourt s’est considérablement avancé.’’ Mais le fameux repreneur dont il a été question, Qatar Steel, c’était un mirage ! Aucune multinationale ne veut se mettre Mittal à dos.

    Marcourt avait analysé plusieurs schémas et celui qu’il voulait retenir était de garder l’ensemble du bassin avec un haut-fourneau en activité… Après, il n’est plus revenu sur ce schéma qui sauvait pratiquement tous nos emplois. C’est un véritable scandale de nous avoir traité comme ça. Ne sauver que le bassin avec les cinq lignes stratégiques dans le froid, c’est du court terme. Avec les 5 lignes du Froid qui restent, on ne parle que de sauver 845 ‘‘ETP internes’’ (Equivalents temps plein internes). Pourquoi parle-t-on ainsi et pas de CDI ArcelorMittal ? C’est parce qu’il y a des temporaires dans ce diktat de Mittal ! A cela il faut rajouter les emplois qui seraient prévus par la reprise de la cockerie et de l’énergie par le groupe Oxbow Mining LLC. Le discours de la direction d’ArcelorMittal, ce sont des phrases du genre : ‘‘Mettre en place une organisation LEAN et un nouveau fonctionnement permettant à Liège de retrouver une rentabilité positive.’’ Et quoi, ça existe la rentabilité négative ? Quant au LEAN (organisation du travail en structure allégée), ça veut dire une flexibilité et une externalisation à outrance.

    C’est sur ces 845 ETP que Mittal joue beaucoup maintenant afin de faire pression sur les syndicats pour qu’ils acceptent le plan social et industriel ?

    Mittal a joué sur le saucissonnage de notre entreprise avec une grande stratégie. D’abord l’annonce dans le Chaud en prenant l’emploi dans le Froid en otage, puis maintenant avec la fermeture de 7 des 12 lignes du Froid. C’était très tactique de sa part. Si tout avait été annoncé d’un coup, le choc aurait été trop grand, et la riposte aussi !

    Nos hauts dirigeants syndicaux ont eu peur d’actions plus résolues. Faire des manifestations, nous, on veut bien, mais il faut faire des actions intelligentes. Ça commence à bien faire. Nous étions d’accord pour aller au Parlement wallon à Namur, au Parlement européen à Strasbourg, voire même au siège d’ArcelorMittal au Luxembourg (où nous ne sommes finalement pas allés). Mais il ne fallait pas s’arrêter là. A Strasbourg, c’était certain que le comité d’accueil des CRS allait être violent après ce que l’on avait déjà subi à Namur.

    Il fallait aller vers les autres sites de Mittal. C’était ça, aller vraiment au combat. Il fallait mener la guerre à l’intérieur de son groupe, en arrêtant les lignes et en occupant les sites, en faisant des actions en même temps à Sidmar, Florange voire même Brème ou Dunkerque. Mais les délégations syndicales ont refusé d’étendre le conflit dans cette voie. La solidarité entre sites n’a jamais été construite. Chacun tire la couverture à soi, et Mittal sait jouer là-dessus. Mais avec un blocage de Sidmar et de Florange, il y avait moyen de le faire plier. En ayant mené ces actions, comme Mittal a des entreprises dans toute l’Europe, même la presse chinoise aurait parlé de nous ! Nous n’avions pas suffisamment d’experts de qualité en sidérurgie et d’avocats spécialisés pour nous appuyer dans notre combat ! Nous aurions dû nous inspirer du combat des travailleurs de Continental, les Contis, en France !

    Les politiques laissent couler les travailleurs comme à Carsid, à Caterpillar et à Ford-Genk. Pour ne prendre que le cas de la sidérurgie wallonne, nous n’avons plus aujourd’hui de haut-fourneau allumé. Il ne reste plus que ceux de Sidmar à Gand. C’est un véritable scandale.

    Que penses-tu du mot d’ordre de nationalisation des sites ?

    Aujourd’hui, nous payons les politiques menées dans le passé. En Wallonie, nous aurions dû avoir depuis des années une sidérurgie publique wallonne en rassemblant les deux grands bassins de Liège et de Charleroi, avec une stratégie à long terme. Cela signifie une synergie totale entre les deux sites. Nous possédons de grandes infrastructures fluviales, ferroviaires et routières. Nous avons la technologie, un grand savoir faire, nous sommes à la pointe, avec un centre de recherche très calé. Nous aurions pu développer des produits à haute valeur ajoutée dans les secteurs sidérurgiques et métallurgiques. D’ailleurs, Mittal ne veut que prendre tout notre savoir et le développer ailleurs.

    Mais il n’y a pas eu de stratégie industrielle ces trente dernières années, en Wallonie, en Belgique et en Europe. C’est ça le néolibéralisme, c’est violent, c’est une vision à court terme. L’Union Européenne n’a pas d’alternative à la mondialisation, elle n’a aucune volonté de revenir sur cela. La crise actuelle est pourtant révélatrice de l’échec de ce modèle. L’Europe n’a pas de volonté pour le bien-être des travailleurs, elle brade tous nos acquis sociaux sur l’autel de la course au profit. Bien sûr, nous devons commercer avec le monde entier, mais pas sur les bases du capitalisme.

    Je ne suis pas contre l’Europe. Mais on a un euro des spéculateurs et une Union Européenne de la Bourse. Par exemple, les services publics sont détruits par les directives européennes, cela crée d’énormes dégâts sociaux. Nous n’avons pas de bonnes lois de protection sociale, il n’y a même pas de discussions pour un salaire-minimum européen, tout est fait pour démolir les lois sociales existantes. On nous présente le Modèle allemand comme le meilleur, mais je suis content qu’on commence dans les médias à parler des salaires de misère en Allemagne et du nombre incroyable de travailleurs précaires. Ce modèle allemand vit au détriment de tous les autres pays européens et de ses propres travailleurs.

    Selon toi, que faut-il construire aujourd’hui pour renforcer le combat des travailleurs d’ArcelorMittal et d’ailleurs ?

    Nous n’avons pas d’Europe sociale, mais nous n’avons pas non plus d’Europe syndicale. C’est ça qui est triste. C’est le grand virage que nous avons raté à ce niveau là. Ce syndicalisme européen reste à construire mais pour cela il faut des dirigeants syndicaux combatifs au niveau national et européen.

    La question vient aussi de l’alternative politique, on doit construire – en Belgique et dans toute l’Europe – une vraie gauche, avec une vraie politique sociale, en regroupant les organisations de la gauche radicale. On a besoin d’une nouvelle gauche unie dans le combat.


    Le PSL défend, pour sauver l’emploi, la nationalisation de la sidérurgie sous le contrôle démocratique des travailleurs, sans rachat ni indemnité, avec comme première étape en ce sens l’occupation de l’entreprise par les travailleurs.

    Plus d’informations:

  • Homophobie en Russie : INTERVIEW d’Igor, militant russe pour les droits des LGBT

    A l’occasion des championnats Olympiques d’Athlétisme qui se sont déroulés en août dernier, une certaine attention médiatique a été accordée à la violence et aux lois homophobes en Russie. Nous en avons parlé avec notre camarade Igor, membre de la section russe du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) et militant très impliqué dans la défense des droits des LGBT (Lesbiennes-Gays-Bisexuels-Transgenres).

    ‘‘La campagne homophobe qui prend actuellement place en Russie a commencé il y a deux ans, juste avant les élections parlementaires de 2011. Le parti de Poutine, Russie Unie, sentait qu’il perdait du soutien électoral et a donc décidé d’instrumentaliser les préjugés homophobes pour diviser la population, s’attirer l’adhésion des couches les plus conservatrices de la société (en combinaison avec d’autres thèmes pour la ‘‘sauvegarde de la famille’’ et contre le droit à l’avortement) et dévier l’attention des importants problèmes sociaux et politiques du pays. Dans d’autres pays, c’est la carte du nationalisme qui est jouée à cette fin mais, dans un pays comme la Russie qui comprend une multitude de groupes ethniques et de minorités nationales, utiliser aussi ouvertement le nationalisme est périlleux.

    ‘‘Au début, la plupart des activistes ont pensé que cette campagne allait prendre fin une fois les élections terminées, nous avions prévenu que cela dépendrait avant tout de la manière dont la crise politique, sociale et économique allait se poursuivre en Russie. Un mouvement de masse a suivi ces élections, dans le cadre des protestations de masse qui ont surgi à travers le monde à la suite du processus révolutionnaire en Afrique du Nord et au Moyen-Orient cette année-là (c’était aussi l’année du mouvement Occupy aux USA, des Indignés en Espagne,…). Le régime a donc décidé de poursuivre et d’intensifier cette campagne. Nous ne pensons pas que la société russe est plus homophobe ou conservatrice qu’une autre, la situation qui s’est développée est une conséquence directe de la politique d’Etat.

    ‘‘Ce processus n’est toutefois pas linéaire. Les militants LGBT ont riposté avec leur propre campagne et, grâce à cela, le niveau des discussions sur ce sujet a considérablement évolué en deux ans. Jamais auparavant ce thème n’avait été débattu à cette échelle en Russie. Au côté d’actions spécifiques, les activistes LGBT ont commencé à participé de manière organisée aux manifestations de masse sur d’autres problèmes sociaux (particulièrement à Moscou, sous l’influence de l’activité des militants du CIO), avec leurs slogans propres et leurs drapeaux arc-en-ciel. Si une certaine hostilité a pu être présente au début, nous avons vu par la suite des manifestants défendre les LGBT contre les attaques physiques de l’extrême-droite dans les cortèges, et les délégations LGBT sont très vite devenues les plus dynamiques dans les actions de protestation, en solidarité avec l’oppression d’autres groupes dans la société.

    ‘‘En tant que socialistes révolutionnaires, nous considérons qu’il est de notre devoir de veiller à élever le niveau de conscience politique des militants LGBT tout en essayant de lier cette lutte spécifique à d’autres afin de parvenir à un combat mené en commun en défense de tous nos droits démocratiques et pour briser les préjugés néfastes entretenus par le régime. Cela est crucial pour stopper le rouleau compresseur de la politique antisociale.

    ‘‘Concernant les prochains Jeux Olympiques d’hiver de Sotchi, je pense qu’un boycott ne nous aidera pas à lutter contre l’homophobie. Nous nous opposons aux Jeux Olympiques pour des raisons différentes, parce que cela est synonyme de corruption, de gaspillage d’argent public et de destruction de l’environnement. Il sera plus efficace d’organiser des actions de protestation et de solidarité durant la tenue des Jeux, avec des athlètes bien sûr, mais aussi avec les fans. Après des années de silence et de mépris, nous devons utiliser toutes les occasions de parler et de renforcer la lutte pour l’égalité.’’

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