Tag: Instabilité politique

  • Second tour des élections présidentielles chiliennes, encore une fois l’abstention est victorieuse.

    L’instabilité sociale et politique persistera durant la prochaine période

    Le Chili est entré dans un nouveau cycle politique, un pourcentage élevé de la population ne croit plus dans les institutions démocratiques de la bourgeoisie. En effet, la droite de ”l’Alianza” ou le centre gauche de la ”Concertación”, l’actuelle Nouvelle Majorité, sont les grands perdants du deuxième tour de l’élection présidentielle. Seul 5,6 millions des 13 millions d’électeurs se sont déplacés pour aller voter, cela représente une abstention de 57% !

    Celso Calfullan, Socialismo Revolucionario (CIO -Chili)

    Le jour des élections, le dimanche 15 décembre, tous les journalistes ont montré des bureaux de votes vides ou les responsables de certains bureaux qui dormaient car personne ne venait voter.

    Dire que l’abstention démontre clairement une position politique serait absurde, mais le fait que la majorité de la population ne va pas voter indique l’absence d’une vraie démocratie au Chili. Les gens ont arrêté de croire qu’en participant, sous les conditions actuelles, ils pouvaient changer quoi que ce soit avec leur vote. Cet élément doit être mis en rapport avec l’énorme mal-être qui existe parmi la population chilienne, illustré par les grandes mobilisations des années 2011 et 2012, où plusieurs millions de jeunes et de travailleurs sont sortis manifester dans les rues de toutes les villes du pays.

    Un autre élément important à prendre en compte est que ceux qui ont effectivement été voter sont fondamentalement les personnes issues des vieilles générations, pratiquement personne de moins de 40 ans n’a participé à ces élections. Ainsi, ceux qui n’ont pas été voté sont précisément ceux qui étaient dans les rues durant les grandes mobilisations sociales de ces dernières années et n’ont aucune confiance dans le fait que les nouvelles autorités puissent faire quelque chose de concret pour résoudre leurs problèmes.

    Un ras-le-bol est clairement perceptible parmi la population, spécialement parmi la jeunesse qui n’a pas vécu sous la dictature et qui ne vit plus avec la crainte de la répression ou d’un retour à la dictature si elle va ”trop loin”. Les étudiants et les jeunes travailleurs n’ont connu que les gouvernements de la Concertation et de la droite et se sentent floués.

    Nous devons aussi ajouter que le soutien réel à Bachelet est très faible. En effet, il est théoriquement de 62%, mais avec une participation à 43% le soutien réel ne s’élève qu’à 25%, ce qui est beaucoup moins que ce qu’elle n’a obtenue lors des élections présidentielles de 2005, quand elle a été élue présidente pour la première fois.

    Le mouvement étudiant n’a aucune confiance en Michelle Bachelet, d’autant plus avec les antécédents répressifs de son ancien gouvernement. Le mouvement a déjà menacé de recevoir le futur gouvernement avec des mobilisations et des manifestations. Les jeunes veulent voir des mesures concrètes qui mettent fin à l’enseignement privé et au profit dans l’éducation.

    Tout semble démontrer que la ”Lune de Miel” du futur gouvernement sera très courte et quant aux grandes espérances que certains ont pour Bachelet, la déception aussi sera grande. Ce sera comme verser de l’essence sur le feu social que nous avons vu au cours des années précédentes.

  • Norvège : Les partis de droite remportent les dernières élections

    Plus tôt ce mois-ci, en Norvège, le Parti Conservateur a gagné les élections, et pour la première fois, le Parti du Progrès, raciste et populiste, fera son entrée au gouvernement. Les conservateurs (Høyre) sont passés de 30 à 48 sièges (26,8%). Les 4 partis qui envisagent la formation du nouveau gouvernement (Conservateurs, Parti du Progrès, Parti des chrétiens et Libéraux) ont obtenu ensemble 96 sièges sur 169. Les partis qui composaient l’ancien gouvernement (Parti travailliste, Parti Socialiste de Gauche et Parti du Centre) ont perdu 14 sièges et n’en partagent plus que 72. Le Parti Vert a obtenu son premier siège. Le taux d’abstention a presque atteint les 80%.

    Rättvisepartiet Socialisterna (CIO-Suède)

    Que se cache-t-il derrière ces résultats ? La réponse la plus claire nous est donnée par un candidat des Verts à Oslo : ”Il n’y a aucune différence entre les Travaillistes et les Conservateurs… les deux partis suivent une politique commune, mais tentent d’entretenir le mythe que le problème le plus important cette année est de choisir entre leurs dirigeants, Jens Stoltenberg ou Erna Solberg.”

    Depuis 2005, les gouvernements travaillistes ont suivi les mêmes politiques que les gouvernements de droite sociaux-démocrates en Suède et dans d’autres pays. Des ”réformes de marché” ont été introduites dans les services de santé, entraînant privatisations, fermetures et fusions d’hôpitaux. La politique d’immigration est devenue plus dure, et le pays a participé à la guerre en Afghanistan avec les Etats-Unis. Comme en Suède, l’environnement est aussi menacé, notamment par les forages pétroliers au nord.

    Le gouvernement sortant présentera dans quelques semaines un budget incluant une baisse des impôts sur la fortune et sur les héritages de plus de 250.000 euros. Sur ce sujet, les alternatives des deux gouvernements ne sont que très peu éloignées.

    Le plus grand perdant est le Parti Socialiste de Gauche (SV), qui pendant ses 8 ans au gouvernement a pris toute responsabilité pour la politique des travaillistes. Le SV a obtenu le pire résultat de son histoire, et a failli ne pas dépasser le seuil des 4% (il a obtenu 4,1%). Un de ses membres, Hallgeir Langeland, qui a perdu son siège, a admis au journal Aftenposte que c’était le département des Finances qui était aux commandes du dernier gouvernement. Il pense aussi que ”la politique d’asile a été agressivement menée par le FrP (le Parti du Progrès)” et que les travaillistes et les conservateurs ont pris soin de ne pas critiquer le FrP.

    Le nouveau gouvernement sera annoncé le 14 octobre. Il est clair que les conservateurs et le FrP y siégeront. Le FrP est passé de 23,9% aux précédentes élections à 26,3% celles-ci, mais il entrera quand même au gouvernement pour la première fois. Il faut considérer l’acceptation de ce parti comme un ”parti comme les autres” par les autres formations politiques comme un avertissement. Il existe nombre de similarités avec les Démocrates Suédois et d’autres partis racistes en Europe, mais aussi des différences. L’approche populiste du FrP consiste à insister sur le fait que la Norvège devrait dépenser davantage des revenus issus de son pétrole, notamment dans l’infrastructure. Le dirigeant du parti, Siv Jensen, a soutenu de manière enthousiaste le Tea Party, parti d’extrême droite américain, et a parlé durant sa campagne d’une ”hystérie climatique”.

    Mais le leitmotiv du FrP, ce sont ses arguments racistes anti-immigration. Siv Jensen s’est exclamé lors d’une visite à Malmö en Suède que la ville était sous le joug de la Sharia. Même pendant la campagne électorale, des représentants du parti ont défendu l’importance de protéger ”la culture norvégienne” contre le multiculturalisme. Le FrP coopère ouvertement avec des organisations islamophobes. Plus précisément, le parti exige de limiter le nombre de réfugiés entrant dans le pays à 3000 par an, et veut les garder enfermés dans des camps. Ils veulent aussi limiter les possibilités pour les familles d’immigrés de rejoindre leurs proches, et limiter les mariages des immigrés.

    Ces propositions ne deviendront pas directement des priorités gouvernementales. Mais elles font partie du débat et mettent la pression sur les autres partis, qui ne s’offusquent pas du racisme du FrP.

    Ce sont des Travaillistes, et particulièrement des jeunes, qui ont été pris pour cible lors du massacre du terroriste raciste Anders Behring Breivik et les bombardements de juillet 2011. Les Travaillistes ont reçu un soutien important après ces attaques. Mais la colère et la tristesse générales qui ont marqué 2011 n’ont pas été organisées en une réelle campagne contre le racisme, et par conséquent le FrP, dont Breivik a fait partie des années durant.

    Une majeure partie du manifeste de Breivik rejoint la campagne de haine contre l’islam et le socialiste que mène le FrP. Le dilemme des Travaillistes, c’est que la direction du parti voulait condamner moralement le racisme, mais sans le lier à la lutte contre l’injustice et les politiques de droite, qui forment le terreau de la xénophobie. Le FrP s’en est sorti en faisant profil bas pendant un moment, mais est vite revenu à ses racines.

    La perte de votes pour les Travaillistes et le Parti Socialiste de Gauche n’illustrent pas l’impopularité des idées de gauche, au contraire ; elle met doigt sur l’urgence d’une vraie alternative socialiste dans la politique Norvégienne.

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