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Tag: Inondations
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Témoignage. Le drame des inondations atténué par une extraordinaire solidarité

Photo : Wikimedia Commons 41 personnes ont perdu la vie en Belgique au cours des inondations de cet été. Plus de 50.000 foyers ont été sinistrés. Nous avons tous en tête les images dramatiques de la montée des eaux, de la force du courant dans les rues inondées, de l’effondrement de certains bâtiments… Mais nous retenons aussi l’esprit d’initiative solidaire de la population.
Partout, des voisins ont prêté leurs pompes pour vider les caves et se sont organisés pour bloquer les soupiraux de leurs rues tandis que les propositions d’hébergement et d’aide ont foisonné sur les réseaux sociaux. La réponse de la population ordinaire a été très impressionnante : de nombreux foyers se sont transformés en « centres de crise » pour héberger des dizaines de personnes. Des agriculteurs ont amené leurs tracteurs, des ouvriers du bâtiment ont acheminé des engins de génie civil… D’autres des canots à moteur ou autres engins flottants. Cette solidarité n’a pas cessé au lendemain du drame. Nous en avons discuté avec Clément, une personne parmi les milliers d’autres venue en aide aux sinistrés.
« C’est peu dire que nous avons tous été profondément choqués par les images sur les réseaux sociaux et dans les médias. Avant même d’avoir fini de ranger ce qu’on avait mis en hauteur face au risque d’inondation, nous avons été gagnés par un sentiment d’urgence pour aller porter assistance dans les zones qui avaient eu moins de chance.
« Dès le samedi, le surlendemain, nous nous sommes rendus sur place, sans trop savoir quoi faire ni comment. On était très nombreux dans ce cas, au point qu’il était très difficile de se garer à proximité des points d’entrée dans les zones sinistrées.
« Sur place, nous avons d’abord vu les services communaux à pied d’œuvre qui déblayaient le plus gros, les axes routiers,… Plus loin dans la zone, on a tout de suite trouvé du travail, ce n’est pas ce qui manquait. Il n’est pas exact de dire que la police et les pompiers n’étaient pas présents. Ils étaient là, mais noyés dans la masse des personnes venues aider.
« La solidarité s’est organisée relativement spontanément. À côté du déblayage, on a rapidement vu venir des gens avec des colis de première nécessité (dentifrice, brosses à dents, savon…), de la nourriture… Toute cette auto-organisation était très impressionnante. Des dizaines de groupes d’entraide ont été créés sur les réseaux sociaux avec des propositions très généreuses, y compris des meubles et de l’électroménager alors que le nettoyage commençait à peine.
« À côté de cela, il y a eu les initiatives de la ville ou de la croix rouge, que les autorités avaient demandé de contacter au lieu de se rendre directement sur place. Mais je connais des gens qui attendent toujours d’être recontactés aujourd’hui après avoir rempli leurs formulaires… Ils ont bien fait d’aller sur les lieux au petit bonheur la chance. Sans doute n’étaient-ils pas préparés à gérer un tel afflux de propositions.
« Dès le deuxième week-end, les choses ont commencé à s’organiser de manière plus sérieuse. On a rencontré des gens qui ont installé une sorte de « base arrière » avec du matériel, des repas et des boissons dans une maison après l’avoir nettoyée. Un d’entre eux assurait la permanence, faisait le tour du quartier pour identifier les demandes d’aide et les besoins, puis établissait un parcours pour une équipe d’une bonne dizaine de personnes. Le tout via un simple groupe messenger.« C’est impossible de faire état de toutes les initiatives. J’ai rencontré des gens du Hainaut – une demi-douzaine de gros bras – qui sont passés de porte en porte pour proposer de déplacer les objets les plus lourds. D’autres passaient à leur suite pour nettoyer, ranger… Le gérant d’un magasin de bricolage a vendu du gros matériel à prix coûtant et offrait du matériel de base (des gants, des raclettes…). Quelqu’un s’est installé dans la maison d’un ami relogé ailleurs et, après avoir remis la cuisine en état de marche, a improvisé une cantine en affichant à quelle heure les plats allaient être disponibles. Durant des semaines, des gens ont fait les vas-et-viens pour apporter aux sinistrés des centaines et des centaines de plats préparés ailleurs.
« Autre élément : le racisme a clairement reculé sous les coups de la solidarité. Unis dans l’effort porté à l’autre, les préjugés ne tiennent pas. J’ai pu entendre quelqu’un dire, épaté : « je viens d’un petit village, je n’imaginais pas toute cette diversité » en regardant les équipes à l’œuvre où se mélangeaient les origines et les couleurs de peau.
« Bien entendu, cette énergie incroyable a besoin d’être organisée pour tenir le coup sur le long terme et être plus efficace. Il faut drastiquement augmenter les moyens de la protection civile, des services de pompiers, des services communaux… Je parlais tout à l’heure de gens qui n’ont pas été recontactés par les autorités, il y a fort à parier que c’était parce qu’ils étaient débordés. Imaginons quel rôle pourrait jouer une protection civile démocratiquement organisée et financée à hauteur des défis actuels pour donner tout son poids à la solidarité spontanée de la population que nous avons si merveilleusement vue à l’œuvre ? »
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Inondations. Encore à nous de payer? Nationalisation du secteur des assurances et indemnisation de tous les sinistrés!

Routes et chemins de fer détruits, maisons démolies, réseau d’électricité endommagé, dépollution et traitement des déchets charriés par les eaux, dératisation,… Plus d’un mois après les événements, il est encore bien difficile de chiffrer les dommages des inondations. Rendons-nous compte déjà que pas moins de 202 des 262 communes de Wallonie sont admises au fonds des calamités. On estime que 42.000 tonnes de terre polluée doivent être traitées, alors que plus de 11.700 km de cours d’eau doivent être vérifiés et éventuellement assainis.
Editorial de l’édition de Septembre de Lutte Socialiste, par Nicolas Croes
L’accord scandaleux du gouvernement Di Rupo
L’intervention des compagnies d’assurances lors de catastrophes naturelles est réglée par la Loi du 4 avril 2014 relative aux assurances proposée par le gouvernement fédéral, dirigé à l’époque par Elio Di Rupo. Lors d’une catastrophe de type « inondations », les assureurs peuvent plafonner le montant total de leurs dépenses à 375 millions d’euros, le reste étant à la charge du Fonds des calamités. Suite à de récentes négociations, le secteur des assurances a accepté d’augmenter le plafond de son intervention à 590 millions d’euros. L’estimation actuelle des dommages assurés oscille entre 1,3 et 1,7 milliard d’euros. Plus de la moitié sera donc à charge de la collectivité !
Le PTB a dénoncé à très juste titre cette situation parfaitement aberrante. Il souligne que les bénéfices nets cumulés du secteur des assurances en Belgique se sont élevés à 14,72 milliards d’euros entre 2012 et 2019, grâce aux primes de plus en plus élevées payées par les assurés. Constatant que les bénéfices de ces entreprises sur cette période sont dix fois plus importants que l’estimation actuelle des dommages, le PTB défend que les compagnies d’assurances couvrent l’entièreté des dégâts subis par les victimes assurées et que le milliard d’euros ainsi libéré soit investi dans la construction de 8.000 nouveaux logements sociaux publics de qualité pour les sinistrés. C’est un bon pas en avant, mais il faut aller plus loin.
Revoir l’urbanisme et l’aménagement du territoire… et s’en donner les moyens !Nous manquons de logements sociaux, ce n’est pas neuf. Cela à nouveau été souligné par les inondations, de même que l’absence de structures d’accueil d’urgence, de services de secours… Le gouvernement wallon cherche aujourd’hui à emprunter 1 milliard d’euros sur sa première enveloppe budgétaire de 2 milliards d’euros consacrée à la reconstruction. D’autres enveloppes suivront, c’est certain.
Il faudra bien plus pour ne pas se contenter de reconstruire à l’identique et repenser le territoire, son urbanisme, la gestion des rivières. Nous sommes passés à un cheveu d’une inondation complète de Liège en juillet, ce qui aurait considérablement aggravé les dégâts matériels et humains. Nous ne devons pas nous contenter de prier que le risque ne se présente plus. La reconstruction doit être pensée pour s’adapter à la nouvelle norme des événements climatiques extrêmes et encaisser des chocs d’inondations de plus en plus fréquents. Elle doit également comporter un volet portant sur un plan public d’isolation des bâtiments quartier par quartier sur la totalité du territoire de manière à limiter les émissions de gaz à effet de serre liées au chauffage. Elle doit encore s’axer sur la gratuité des transports en commun et leur extension. Etc. Etc.
Pour tout cela il faudra nous battre. Moins d’un mois après les inondations meurtrières, le secteur de la construction a critiqué la circulaire visant à interdire de bâtir dans les zones les plus à risque en prévenant : les prix vont augmenter. Certaines personnes étaient encore portées disparues que les promoteurs immobiliers parlaient de reconstruire sur des zones inondables…
Les bâtiments inoccupés pour raison spéculative doivent être de toute urgence expropriés et rénovés pour y loger les personnes sinistrées. Les grandes entreprises du secteur des assurances et celles de la construction doivent être expropriées et placées sous contrôle et gestion démocratiques de la collectivité. De cette manière, nous aurons non seulement les moyens d’indemniser la totalité des victimes et pas seulement les assurées (les personnes non assurées étant par ailleurs des personnes précarisées) mais aussi de mobiliser les moyens nécessaires à faire face à la situation actuelle : réduire nos émissions tout en protégeant la population et ses conditions de vie.
Les organisations de gauche et les syndicats doivent impérativement axer leurs propositions et leur action sur ce qui est nécessaire pour faire face au péril climatique, pas sur ce qui est acceptable en restant dans le carcan du système capitaliste. C’est ce système qui est responsable du drame auquel est confrontée l’humanité ! Nous devons aujourd’hui plus que jamais faire résonner la nécessité d’une approche rationnelle et démocratiquement planifiée de l’économie contre le chaos de l’économie de marché. Chacune de nos mobilisations doit s’en faire l’écho. Faute d’atteindre cette issue, la civilisation humaine s’enfoncera dans une barbarie telle qu’elle n’en a encore jamais connu.
