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Tag: Human Rights Watch
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Sahel : Non à la guerre au Mali ! L'intervention impérialiste va approfondir la crise et l'instabilité
La crise des otages de quatre jours qui a eu lieu dans le complexe gazier d’In Amenas dans le Sud-Est de l’Algérie ainsi que son issue sanglante a constitué un véritable choc au niveau international. Ce raid et la riposte de l’armée algérienne ont tué au moins un travailleur algérien, 37 otages et 29 preneurs d’otages. Ces derniers étaient membres de la brigade Al Multhameen, la ”Brigade des Masqués”, qui a annoncé de nouvelles attaques contre des intérêts étrangers à moins que ne cesse l’offensive militaire étrangère au Mali. Dans la foulée, le Premier ministre britannique, David Cameron, a averti que la lutte contre le terrorisme en Afrique du Nord pourrait continuer "des décennies".
Cédric Gérome, Comité pour une Internationale Ouvrière
Nombreux sont ceux qui sont légitimement repoussés par les actions des groupes djihadistes réactionnaires tels que celui qui a effectué cette opération en Algérie. Cela s’est ajouté aux nombreux rapports faisant état des horribles méthodes qui prévalent sous le joug imposé par les combattants islamistes dans le Nord du Mali (exécutions sommaires, torture, amputations, lapidations, interdiction de la musique, destruction de lieux saints,…). Cette barbarie constitue la principale réserve de munitions idéologiques aux défenseurs de l’intervention militaire de l’armée française dans cette région, qui semble actuellement avoir un important taux de soutien dans l’opinion publique. Les derniers sondages indiquent que le soutien pour "l’Opération Serval" au sein de la population française est actuellement de plus de 60%. Néanmoins, les récents développements en Algérie indiquent que cette offensive militaire terrestre, contrairement aux arguments officiels, est susceptible de générer davantage de crise et de violence dans la région.
Pour le moment, la plupart des rapports des médias indiquent que les Maliens, dans leur grande majorité et en particulier dans le Sud, accueillent favorablement l’intervention française. Avec la propagande qui accompagne inévitablement ces épisodes de guerre, à ce stade, beaucoup de maliens pourraient véritablement penser et espérer que l’intervention du gouvernement français pourrait les protéger contre certains des groupes armés qui terrorisent la population du Nord.
L’état d’esprit de la population dans les différentes régions du pays est toutefois difficile à estimer de façon indépendante, surtout dans le Nord, puisque tant le ”gouvernement de transition” malien (qui est essentiellement la façade politique d’un régime militaire) que les militaires français interdisent l’accès aux zones de combat aux journalistes. Dans ces zones, les soldats ont reçu l’ordre de ne pas laisser passer les journalistes, certains ont même vu leur matériel être saisi par les autorités.
Le fait que tant d’efforts soient effectués afin d’éviter toute libre information est en soi une raison suffisante pour faire naître de sérieux soupçons quant au véritable agenda des dirigeants maliens et de l’impérialisme français. Cela pourrait-il être lié d’une façon ou d’une autre avec l’accumulation de rapports qui parlent d’atrocités commises par l’armée malienne ? Quelques jours seulement après le début des opérations militaires, la Fédération internationale des droits de l’homme, Human Rights Watch et Amnesty International dénonçaient déjà des cas d’exécutions sommaires du fait de l’armée malienne et des milices pro-gouvernementales.
Représailles ethniques et violations des droits de l’homme par l’armée malienne
Lors de la reprise de villes précédemment perdues par l’armée malienne, soutenue par les forces françaises et de la CEDEAO (la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest), les punitions collectives contre la population locale et les règlements de comptes sanglant avec les minorités touareg et arabe, en particulier, on connu une escalade.
Dans les villes de Sévaré et de Niono, au centre du Mali, les preuves de massacres, de ”chasse à l’homme”, de cadavres jetés dans les puits par l’armée, de soldats empêchant les témoins de quitter la ville et d’autres graves violations se sont amassées depuis quelques jours. Deux jeunes habitants interrogés par un journaliste français ont expliqué que "Etre arabe, touareg ou habillé de façon traditionnelle pour quelqu’un qui n’est pas de Sévaré suffit à vous faire disparaître. Le port de la barbe est un suicide."
Le Modèle malien
Ces exemples dévoilent le côté sombre d’une guerre engagée sous la bannière des ”droits de l’Homme” et de la ”démocratie”. Tout cela porte un sérieux coup à la version d’une guerre du ”bien contre le mal” telle que décrite par les politiciens capitalistes occidentaux. Un rapport d’Amnesty International a par exemple mis en lumière, avant même que l’offensive militaire n’ait commencé, que le recours à des enfants-soldats n’est pas la pratique exclusive des combattants djihadistes. Des officiers maliens et des milices pro-gouvernementales font de même.
La réalité est que l’exemple malien de ”démocratie” et de ”stabilité” tant vanté n’a jamais existé. Le régime d’Amadou Toumani Touré ("ATT") était corrompu, clientéliste et autoritaire. Beaucoup de ses propres hauts fonctionnaires ont directement été impliqués dans le trafic de stupéfiants et ont trempé dans des trafics et des enlèvements de toutes sortes, avec l’aide de certains de ces gangsters du Nord et du Sahara actuellement désignés comme étant des ”terroristes” et contre qui se mène la guerre actuelle.
La vérité qui dérange, c’est que les activités d’AQMI (Al Quaïda dans la Maghreb Islamique) et d’autres groupes armés a été tolérée des années durant par le régime de Bamako. Ces groupes ont été un élément essentiel dans les circuits criminels qui ont contribué à l’enrichissement personnel et à la corruption de hauts fonctionnaires du gouvernement et de l’armée (d’après le Bureau de lutte contre la drogue des Nations Unies, 60% de la cocaïne présente en Europe aurait transité par le Mali). Ces groupes avaient également l’avantage de pouvoir être utilisés comme un contrepoids à l’influence et aux exigences des Touaregs.
Dans l’armée, les généraux siègent dans des bureaux richement décorées tandis que les soldats ont parfois envoyés au champ de bataille sans matériel appropriés, sans bottes par exemple. Le ressentiment et la colère des soldats du rang contre la corruption de la hiérarchie et contre le refus du régime d’ATT de mener une lutte sérieuse contre les groupes armés du Nord ont constitué un élément clé dans le processus qui a conduit au coup d’Etat militaire de mars 2012 réalisé par des officiers subalternes. Ce coup d’État, ironiquement, a été dirigé par un capitaine de formation américaine, Amadou Sanogo, et a entraîné la disparition du ”régime démocratique” d’ATT.
Les puissances occidentales, dans un premier temps, ont craint que la nouvelle junte au pouvoir n’échappe à leur contrôle et l’ont donc rejeté. Ils ont même décidé, après le coup d’Etat, de suspendre l’aide au Mali, entraînant toute la société dans une pauvreté plus grande encore. Ils ont ensuite changé d’attitude en se rendant compte que Sanogo, qui avait tout d’abord adopté une rhétorique anti-élite et populiste afin de s’attirer du soutien, était hésitant et s’est finalement montré prêt à collaborer avec l’impérialisme.
Le Nord du Mali: un désastre social et humanitaire en cours
Les effets dévastateurs provoqués par les politiques néolibérales du régime d’ATT, soutenu par l’Occident, ont permis au capital français de dominer des pans importants de l’économie malienne, ont ruiné la vie de beaucoup de gens et ont considérablement augmenté le chômage de masse, la pauvreté, la précarité.
Le Mali est aujourd’hui l’un des pays les plus pauvres au monde, se classant 175e sur 187 pays en 2011 selon la grille de l’Indice de développement humain du Programme des Nations Unies. Ce pays a un taux de mortalité infantile et maternelle, de maladies et de malnutrition plus élevé que dans la plupart des pays d’Afrique sub-saharienne, et un taux d’analphabétisme de 75%.
La marginalisation sociale de longue date du Nord du pays ainsi que le manque d’investissements et d’infrastructures dans cette région ont créé un océan de misère extrême et un niveau très élevé de ressentiment et de désespoir.
En outre, tous les experts affirment que la sécheresse va s’approfondir dans le Sahel et que les pluies se tarissent en raison du réchauffement climatique. Il s’agit d’un désastre environnemental de grande ampleur pour tous les peuples de la région, car ils dépendent presque entièrement de l’élevage et de fermes.
La forte baisse de l’activité économique touristique suite à l’augmentation du niveau de violence a été un facteur aggravant, avec un impact désastreux sur certaines régions et villes complètement dépendantes du tourisme pour leur survie (comme Tombouctou).
Ce cocktail a créé une catastrophe sociale monumentale qui fut le terreau fertile du développement d’un territoire quasiment sans droit, fait d’une interaction complexe de mafias de trafiquants de drogue et de milices armées, aux côtés de combattants de type Al-Qaïda, de kidnappeurs et de bandits de toutes sortes.
Une guerre pour la domination et le profit
Une série de turbulences politiques ont été connues depuis l’épisode du coup d’État de Sanogo, qui a reflété la crise politique organique du pays et est l’acte de naissance de l’actuel gouvernement intérimaire. Formellement, la légitimité démocratique de ceux qui détiennent le pouvoir à Bamako est réduite à zéro. Cela n’empêche pourtant pas le gouvernement français d’exploiter le fait que ce régime militaire a ”demandé” à la France d’intervenir. Il ne s’agit que de la propagande destinée à alimenter l’idée que l’intervention militaire a été décidée suite à la demande d’aide du ”peuple malien” !
Mais combien de temps sommes-nous censés croire que cette guerre n’a rien à voir avec le fait que le Mali possède de l’or, de l’uranium, du bauxite, du fer, du manganèse, de l’étain et du cuivre ? Ou avec le fait que ce pays est voisin du Niger, la source de plus d’un tiers de l’uranium utilisé dans les centrales nucléaires françaises ?
La dure réalité est que cette escalade militaire dans le Sahel, sous la bannière de la ”guerre contre le terrorisme”, ne vise à rien d’autre qu’à servir les intérêts impérialistes de la France : garantir la poursuite du pillage des immenses ressources de la région aux avantages de ses multinationales et de ses institutions financières.
Les entreprises françaises ne sont pas les seules à avoir un appétit croissant pour cette région du monde. Les investissements directs chinois au Mali ont été multipliés par 300 de 1995 à 2008. Le Mali occupe effectivement avec la Zambie, l’Afrique du Sud et l’Egypte le sommet de la liste des pays africains où la Chine réalise ses plus gros investissements.
Un rapport conjoint de l’office allemand des Affaires étrangères et du ministère de la défense montre qu’un budget de plus de trois millions d’euros a été alloué aux activités allemandes au Mali depuis le début de l’année 2009. Une dépense supplémentaire de 3,3 millions d’euros est prévue pour les années 2013 à 2016. De toute évidence, cette guerre s’inscrit dans un contexte plus large de compétition entre les différents puissances afin d’étendre leur influence régionale et de garantir leur accès à des ressources et des marchés importants.
Vers un ”Sahelistan” ?
Politiciens et commentateurs capitalistes ont prévenu du danger de l’instauration d’un ”Sahelistan”, un paradis pour les groupes terroristes de la région du Sahel.
Bien entendu, aucun militant marxiste ou progressiste ne peut éprouver de la sympathie pour les djihadiste d’Al-Qaïda et d’autres groupes de ce type, dont l’idéologie et les méthodes constituent un danger mortel pour le mouvement ouvrier et les masses pauvres en général. Un lieu où les couples d’adolescents risquent la mort par lapidation s’ils se tiennent la main en public est une perspective répulsive pour l’écrasante majorité des travailleurs et des jeunes.
Ces groupes prétendent appliquer la volonté de Dieu, mais ne sont pas exempts de contradictions. Ainsi, ces groupes ont des pratiques telles que l’amputation ou le fouettement de gens qui fument des cigarettes tout en étant eux-mêmes impliqués dans la contrebande de cigarettes et de drogue. Pour certains de ces groupes, l’idéologie religieuse n’est qu’une préoccupation de second ordre, et parfois tout simplement une couverture pour leurs activités mafieuses.
Ces groupes réactionnaires ne sont que des champignons naissant sur un organe pourri qui est incapable de fournir à la majorité de la population, et surtout aux jeunes, un moyen d’aller de l’avant et d’avoir une vie décente. La peur, le manque de moyens de survie, l’absence de ressources financières, le besoin de protection, ou tout simplement l’absence d’alternative intéressante pour lutter contre la corruption des élites locales et les envahisseurs étrangers sont autant de motivations pour rejoindre ces groupes. En l’absence d’un mouvement fort et indépendant de la classe ouvrière uni aux pauvres des villes et des campagnes qui se mobilise pour offrir une perspective et un programme de changement social et politique, ces groupes armés peuvent continuer à exister et à se développer.
Tout cela ne rend pas l’intervention militaire plus justifiable, de même que cela n’enlève en rien la responsabilité des puissances impérialistes bellicistes et de leurs marionnettes au pouvoir à Bamako face à cette situation.
Les premiers rapports des frappes aériennes françaises contre les villes de Gao et de Konna, la semaine dernière, faisaient état d’entre 60 et 100 personnes tuées dans ces deux villes, y compris les enfants déchiquetés par les bombes. Les responsables militaires français ont eux-mêmes averti que des dizaines de morts parmi les civils sont presque ”inévitables”, puisque les rebelles vivent parmi la population et utilisent une tactique de guérilla pour se cacher.
L’intervention militaire: une solution miracle?
Tout cela jette de sérieux doutes sur l’objectif d’une brève campagne militaire de "quelques semaines". Encore une fois, c’est une chose d’envahir un pays et d’engranger de premiers succès militaires, mais c’en est une autre de se retirer et de compter sur une armée faible, impopulaire, fragmentée et corrompue pour reprendre le contrôle d’un territoire immense sans s’en prendre à la moindre des causes de la situation sociale explosive qui prévaut. La comparaison avec le bourbier afghan vient légitimement à l’esprit: selon le dernier rapport du Pentagone sur les progrès des forces afghanes, une seule des 23 brigades de l’armée afghane est "capable de fonctionner sans aucune aide extérieure".
Peter Chilson, des Affaires étrangères américaines, a écrit : ”Le vaste désert du Nord du Mali est un endroit difficile à vivre, sans même parler de guerre. Pendant huit mois de l’année, la température y dépasse 120 degrés Fahrenheit en journée (48 degrés Celsius), dans un pays vaste et peu peuplé où il est facile de se cacher, surtout pour les forces djihadistes qui connaissent bien le terrain. Toute armée, qu’importe sa taille et son équipement, aura difficile à les chasser."
La France peut être incapable d’éviter un engagement à long terme avec ses propres forces militaires. Au fur et à mesure que le nombre de blessés civils augmentera et que l’occupation occidentale et ses abus réveilleront les amers souvenirs de la période coloniale, cette intervention pourra précisément fertiliser le sol pour les djihadistes et d’autres groupes réactionnaires et leur attirer de nouveaux candidats pour participer à la ”croisade contre le maître colonial".
A mesure que se poursuivra le conflit et que ses dramatiques conséquences seront exposées, l’atmosphère de relative acceptation cèdera place au doute, à la réticence et à l’hostilité. L’opposition va grandir et devenir plus audible. En France, les illusions envers la politique étrangère du gouvernement soi-disant ”socialiste”, qui serait fondamentalement différente de celle de Sarkozy, aura du mal à se maintenir. Toute l’idée défendue par François Hollande de la fin de la ”Françafrique” sera de plus en plus considérée pour ce qu’elle est : une plaisanterie cynique.
Par ailleurs, ce qui s’est passé dans le Sud de l’Algérie n’est peut-être que le premier exemple d’une longue série d’effets boomerangs. En conséquence de cette intervention, plusieurs choses peuvent revenir à la face de l’impérialisme. Le chaos se répand et les problèmes de la région vont s’accumuler.
Socialisme ou barbarie
Un mouvement organisé sur une base de classe qui lierait la lutte contre la réaction fondamentaliste à un programme économique audacieux visant à exproprier les grandes entreprises et les grandes propriétés foncières ainsi qu’à résoudre les problèmes sociaux et la corruption pourrait rapidement obtenir un large soutien parmi la population malienne.
Un tel mouvement pour l’égalité sociale devrait respecter les revendications et les droits de toutes les minorités ethniques et culturelles de la région afin de gagner en sympathie dans le pays comme sur la scène internationale.
La construction d’un tel mouvement de masse peut apparaître comme une solution lointaine pour beaucoup de gens. Mais il s’agit du seul moyen de sortir de ce cauchemar grandissant. Le système capitaliste a montré à maintes reprises, partout sur le continent africain et au-delà, que le seul avenir qu’il a à offrir est de plonger la majorité de la population dans un cycle de barbarie, de crise économique, de guerre et de misère.
- Non à l’intervention impérialiste dans le Nord du Mali ! Retrait des troupes étrangères du Mali – retrait des troupes françaises du Sénégal, de Côte-d’Ivoire, du Burkina Faso, du Tchad,…
- Non à l’Etat d’urgence, pour le rétablissement de toutes les libertés démocratiques au Mali !
- Pour la construction de comités de défense multiethniques démocratiquement organisés par la population malienne afin de chasser toutes les milices réactionnaires, mais aussi de résister à toute tentative d’occupation néocoloniale militaire du Nord !
- Pour l’autodétermination des Touaregs! Tous les peuples du Sahel et du Sahara, ainsi que tous les peuples au sein de chaque pays, doivent avoir l’égalité des droits, et doivent décider de leur propre avenir !
- Les richesses du Mali appartiennent au peuple malien ! Pour le contrôle et la gestion démocratique des grandes propriétés foncières, de l’Office du Niger, des mines et des secteurs stratégiques de l’économie malienne par les travailleurs et les pauvres, et non pas des gestionnaires corrompus ! Pour la nationalisation des secteurs-clés de l’économie sous contrôle démocratique !
- Pour le financement d’un plan de développement économique basé sur les besoins des masses maliennes et contrôlées par elles !
- A bas le régime de Bamako ! Pour un gouvernement des travailleurs et des paysans pauvres, afin de commencer la mise en œuvre de politiques socialistes pour développer le pays, sur base de la lutte commune des masse, organisées démocratiquement de la base.
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Thas: ''Votre solidarité assure que je ne renonce pas et que je continue à me battre"
La campagne contre la détention et la possible expulsion de notre camarade Murugathas, Thas pour ses amis, reçoit beaucoup de soutien. Le caractère arbitraire de cette décision d’expulser un père de deux enfants, après 18 ans de présence en Belgique, vers un pays où il sera en danger est particulièrement choquant. Thas, lui, est encore sous le choc de son arrestation et de sa détention dans le centre de Steenokkerzeel. ”C’est surtout terrible la nuit”, nous a-t-il dit. Le large soutien dont il bénéficie lui permet de ne pas perdre courage.
Par Geert
- Pétion contre l’arrestation et l’expulsion de Thas
- Appel à la solidarité
- Les protestations contre l’expulsion de notre camarade Murugathas se développent
Armés de messages de solidarité, de lecture, d’un dictionnaire néerlandais-tamoul et de tabac pour Thas, j’ai enfin pu lui parler durant une heure. Pour pouvoir rendre visite, il faut d’abord envoyer une copie de la carte d’identité par fax, puis appelé pour confirmer la visite. Les visiteurs sont fouillés, même les GSM sont interdits. Les personnes enfermées peuvent en garder un, à condition qu’il ne puisse pas prendre de photo.
Un autre Tamoul est également détenu, quelqu’un qui n’est pas politiquement actif. Thas: "Il s’agit d’un jeune homme qui vivait à Courtrai et qui avait là une amie belge maintenant enceinte de plusieurs mois. Il est depuis quatre mois à Steenokkerzeel et a fini par signer un document de retour volontaire parce qu’il pensait que c’était la seule alternative à un retour accompagné de policiers, qui ne serait pas sûr pour lui en arrivant au Sri Lanka." Un autre emprisonné d’origine népalaise tenait un restaurant à Tirlemont. Son certificat de naissance et d’autres documents ont disparu dans les violences que connaît le pays. Les autorités veulent le renvoyer, mais avec un document européen qui en feraient un sans-papier au Népal.
Le désespoir est grand dans les salles de Steenokkerzeel, très peu de gens savent quels sont leurs droits. Thas leur donne des conseils et passe des appels autour de lui pour aider à faire avancer leurs dossiers et entamer les procédures. À propos de la vie à Steenokkerzeel, il confie : ”Il s’agit presque d’une prison, la seule différence est que nos portes sont ouvertes et nous pouvons être tous ensemble à l’intérieur du bâtiment. Mais nous ne pouvons que partager la misère de l’autre. Le soir, il est possible de jouer au football dans la cour, mais ma tête n’y est pas. Il y a un poste de télévision, mais ce n’est pas évident avec le groupe de personnes très diverses qui est là. La journée, ça va encore, nous parlons, nous entendons tous quelque chose. Le pire, c’est la nuit. Il y a toujours des mouvements, toujours quelqu’un qui commence à taper sur les murs ou à crier. Réussir à dormir ici est très difficile."
Thas: "Tout le monde recherche le type de solidarité dont je bénéficie contre mon expulsion. La lettre du député européen Paul Murphy m’a fait beaucoup de bien et est utilisée dans ma procédure judiciaire." La pétition a pu compter sur un écho très large. Des élus locaux du PTB et de Groen l’ont notamment signée, et elle a été publié sur différents sites (Rood!-Anvers, Antifachistisch Front, LCR, Kif Kif, Avanti4). Thas tient à chaudement remercier chaque signataire de cette pétition pour ce soutien et cette marque de solidarité.
"J’espère bien entendu pouvoir rester ici avec ma femme et mes enfants. Nous faisons tout notre possible pour nous marier. Mais j’ai peur de ce qui pourrait m’arriver en cas d’expulsion. Je ne veux pas devenir un des cas qui figure dans les rapports de Human Rights Watch. Les abus des droits de l’Homme sont terribles au Sri Lanka, et j’y suis connu en tant que militant. J’ai peur de ça. Mais la solidarité autour de moi assure que je n’ai pas renoncé à l’espoir de voir ma situation s’arranger et je continue à me battre."
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Une action urgente est nécessaire pour protéger un militant tamoul de l'expulsion
Un militant de ”Tamil Solidarity” et du PSL menacé d’expulsion en Belgique. Les autorités belges collaborent avec le régime meurtrier du Sri Lanka
Muruganandam Murugathas, 42 ans, connu sous le nom de Thas pour ses amis, a été arrêté mardi matin et immédiatement transféré au centre fermé de Steenokkerzeel. Thas venait juste d’accompagner ses enfants à leur école et sa femme était au travail. Thas, après 18 ans de séjour dans notre pays, n’a toujours pas droit à des papiers.
Thas est l’un des militants actifs de la campagne internationale ”Tamil Solidarity” et a participé à toutes les actions de la communauté tamoule dans notre pays. Il est très actif pour organiser la communauté tamoule, mais est aussi un militant politique. Thas ne s’est pas limité aux activités de la communauté tamoule, on a pu le voir sur de nombreux piquets de grève ces derniers mois, tout comme à des manifestations ou durant la campagne de Rood! à Anvers. Il est également membre du PSL.
Cette arrestation est d’autant plus choquante qu’un récent rapport clairement fait état de l’incapacité de l’Organisation des Nations Unies dans la protection des civils au cours des derniers mois de la sanglante guerre civile qui a pris place au Sri Lanka. Le documentaire "Sri Lanka’s Killing Fields" de Channel 4 a montré ce qui s’est passé en 2009. On estime qu’il y a eu à ce moment-là plus de 75.000 morts. Les soldats bombardaient les hôpitaux, les écoles, les abris temporaires et les zones de ”non-agression”. Les 400.000 réfugiés ont été transférés dans des ”camps de détention” et les violations des droits de l’homme ont été massives. Après la guerre, trois ans plus tard, les Tamouls sont toujours victimes de violations de leurs droits humains.
Les chances de survie pour un Tamoul connu comme militant en Europe sont plus qu’incertaines. Même la Haute Cour britannique a jugé qu’il fallait arrêter les expulsions de Tamouls vers le Sri Lanka car ils courent le risque d’être torturés. Human Rights Watch a publié un rapport accablant sur ce qui est arrivé à des Tamouls renvoyés au Sri Lanka.
Mais en dépit de cela, les autorités belges ont l’intention de renvoyer Thas dans un pays où il n’était pas présent ces 18 dernières années. Loin de sa femme et de ses deux jeunes enfants. Cette décision arrive au moment où une procédure est en cours pour qu’il puisse officiellement épouser sa femme, ce qui auparavant n’était pas possible pour des problèmes de papier. Aujourd’hui, sa femme est parfaitement en ordre et travaille. Thas attend depuis longtemps divers documents nécessaires, comme un certificat de naissance, mais l’ambassade du Sri Lanka refuse de fournir des documents aux Tamouls ou fait tout son possible pour rendre cela très difficil.
Mardi et mercredi, nous avons brièvement parlé avec Thas, une demi-heure. Mercredi, sa femme a été lui rendre visite. Nous avons appelé le centre fermé de Steenokkerzeel pour lui rendre visite également. C’est impossible d’ici lundi puisque la direction doit approuver chaque visite et que cette dernière est en week-end prolongé… Thas affirme être choqué, mais le courage ne lui manque pas. Cependant, il a toujours peur d’être expulsé vers le Sri Lanka et de quitter sa famille. À Steenokkerzeel, il y a encore un Tamoul qui peut être expulsé le 27 novembre. Sa première préoccupation lorsqu’il a été pris a été le sort de ses enfants (7 et 4 ans) et de sa femme.
Particulièrement depuis le génocide des Tamouls en 2009, Thas joue un rôle de premier plan dans les manifestations et les campagnes contre les massacre commis au Sri Lanka. Son implication dans des activités politiques augmente les risques en cas d’expulsion. Sa vie est en danger.
Le Parti Socialiste de Lutte et la campagne internationale ”Tamil Solidarity” proteste énergiquement contre cette possible expulsion de Muruganandam Murugathas . Le renvoyer au Sri Lanka, c’est déchirer une famille avec de jeunes enfants qui, après de longues années de misère, voyait enfin la perspective de commencer à se construire un avenir. Cela signifie aussi qu’un militant politique est remis aux mains d’un régime qui a suffisamment démontré comment il traite ceux qu’il considère comme une menace.
PROTESTEZ!
1/ Par mails :
Envoyez une lettre de protestation au secrétaire d’Etat Maggie De Block et au service de l’immigration (e-mails: info.maggiedeblock@ibz.fgov.be et helpdesk.dvzoe@dofi.fgov.be avec une copie à tamil@socialisme.be). Voici une lettre-type.
Madame, Monsieur,
Je proteste contre l’arrestation ce 13 novembre de Muruganandam Murugathas, un militant politique d’origine tamoule (Sri Lanka) et père de deux jeunes enfants. Il a été arrêté et envoyé au centre de Steenokkerzeel. L’expulsion de Murugathas signifierait de déchirer une jeune famille – sa femme et ses enfants ont des papiers et tout a été préparé pour que Murugathas puisse enfin se marier.
Ce militant politique a joué un rôle de premier plan parmi la communauté tamoule dans notre pays, il est membre du Linkse Socialistische Partij / Parti Socialiste de Lutte est est également actif au sein du mouvement ouvrier belge.
Le régime du Sri Lanka opprime et discrimine la minorité tamoule, il y a dans ce pays des centaines de milliers de prisonniers politiques et de personnes disparues. Si Murugathas est renvoyé là-bas, il sera sans aucun doute persécuté par le régime. Laissez Murugathas avec sa famille !
Bien à vous,
2/ Déclarations de solidarité
Faites savoir à Murugathas que vous êtes solidaires et que vous soutenez la campagne pour sa libération. Envoyez une déclaration de solidarité à tamil@socialisme.be, nous lui ferons parvenir.
3/ Signez la pétition
Nous avons initié une pétition en ligne disponible ici: http://www.petities24.com/stop_uitwijzing
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Militantisme internet : Le phénomène “Kony 2012”
Rarement auparavant une idée s’est répandue aussi rapidement à la surface du monde. En quelques jours, des dizaines de millions de gens ont regardé la vidéo “Kony 2012” de l’association Invisible Children, qui s’est propagée telle un virus dans tous l’internet et les réseaux sociaux. Choqués par les histoires de meurtres, viols et d’abus d’enfants soldats, de nombreuses voix se sont élevées pour demander que “quelque chose soit fait” contre Joseph Kony et son Armée de résistance du Seigneur (Lord’s Resistance Army (LRA)) en Afrique centrale et orientale.
Robert Bechert, CIO
Comment faire cesser le cauchemar ?
Pendant un moment, Invisible Children semblait mener la danse, au fur et à mesure que le soutien s’accroissait rapidement en faveur de leur appel à une action contre Kony. En quelques jours, cette vidéo a engendré une vague de colère, particulièrement parmi la jeunesse américaine. Invisible Children a fait appel à l’idéalisme de nombreux jeunes désireux de se battre pour un monde meilleur, libéré de l’oppression et de la misère. La vidéo a encouragé de nombreux jeunes à se demander ce qu’ils pouvaient faire eux-mêmes. Toutefois, il est rapidement devenu clair que la campagne d’Invisible Children n’était pas ce qu’elle semblait être de prime abord. Certains ont entre autres commencé à se demander pourquoi, dans son dernier rapport financier, Invisible Children, une association charitable dont le but avéré est d’aider les enfants de l’Ouganda, n’a dépensé en Ouganda que 37,14 % de son revenu total.
L’an dernier, le mouvement “Occupy” contre les “1 %” s’est répandu très rapidement à travers tous les États-Unis et dans le monde, fédérant la méfiance et l’hostilité larges à l’encontre des classes dirigeantes et de l’élite. La colère anti-Kony s’est répandue encore plus vite. Beaucoup plus vite. Toutefois, Invisible Children ne s’oppose pas à l’élite américaine ; le logo de leur campagne “Kony 2012” représente l’âne et l’éléphant symboles des deux partis américains, démocrate et républicain. On retrouve parmi les principaux sponsors d’Invisible Children des groupes chrétiens fondamentalistes qui ont leur propre agenda de droite pro-capitaliste.
Nous ne voulons pas ici dénigrer les millions de gens qui ont été enragés par l’histoire de cette vidéo et qui veulent urgemment faire quelque chose, mais ces événements sont un autre exemple de la manière dont les classes dirigeantes, les 1 %, tentent d’utiliser, voire manipuler, l’authentique colère populaire et ce , dans leurs propres intérêts.
Dans ce cas, la réalité est que Invisible Children appelle les États-Unis à maintenir et à approfondir son intervention militaire contre Kony et la LRA. Jason Russell, producteur et narrateur de cette vidéo, prétend que la décision d’Obama d’octobre dernier concernant l’envoi de 100 soldats américains en Afrique centrale afin de chasser Kony ”était la première fois dans l’Histoire américaine que le gouvernement américain a lancé une action non pas pour sa propre auto-défense, mais parce que le peuple l’exigeait.”
Cette position se trouve au centre de la campagne d’Invisible Children. Elle a d’ailleurs répété cette position dans sa réponse officielle aux critiques qui ont été émises à l’encontre de la vidéo et de la campagne “Kony 2012”.
”La mission d’Invisible Children est de mettre un terme à la violence de la LRA et de soutenir les communautés affligées par la guerre en Afrique centrale et orientale… L’objectif de Kony 2012 est de voir le monde s’unir jusqu’à ce que Kony soit arrêté et jugé pour ses crimes contre l’humanité.”
”La campagne Kony 2012 appelle le gouvernement américain à faire quelque chose concernant ces deux problèmes. Nous sommes pour le déploiement de conseillers américains et pour l’envoi du matériel d’information et autre qui puisse aider à localiser Kony et à le soumettre à la justice ; nous sommes aussi en faveur d’une intensification de la diplomatie afin de voir les gouvernements régionaux se tenir à leurs engagements de protéger les civils de ce genre de violence brutale”. (Déclaration officielle d’Invisible Children postée dans la section “Critiques” de leur site internet)
Les arguments d’Invisible Children ont été exprimés plus en détail dans leur lettre du 7 mars adressée au Président Obama :
”Votre décision de déployer des conseillers militaires américains dans la région en octobre 2011 a été une mesure bienvenue visant à plus d’aide aux les gouvernements régionaux dans leurs efforts afin de protéger le peuple des attaques de la LRA …
”Cependant, nous craignons qu’à moins que les efforts américains déjà entrepris ne soient étendus, votre stratégie puisse s’avérer inefficace … Nous vous encourageons à intensifier le déploiement de conseillers américains jusqu’à ce que la LRA cesse de représenter une menace pour les civils …
”Le gouvernement congolais, en particulier, a cherché de manière active à diminuer l’importance de la présence de la LRA et de son impact sur les communautés congolaises. Qui plus est, l’Ouganda a retiré plus de la moitié des forces initialement déployées dans la traque des commandants et groupes de la LRA, et leurs forces n’ont plus le droit d’opérer au Congo, où la LRA commet la majorité de ses attaques sur des civils. Nous vous implorons de contacter directement les Présidents de chacun des quatre pays concernés – en partenariat avec l’Union africaine – afin de renforcer la coopération régionale, d’accroitre les effectifs et la liberté d’action des troupes déployées dans les zones affligées par la LRA, et de renforcer les efforts visant à encourager les désertions des soldats rebelles.”
Mais la politique du gouvernement américain en Afrique ne part pas de l’idée de défendre les intérêts de la vaste majorité des Africains. Quelques jours seulement après que cette lettre ait été envoyée, le général Carter Ham, commandant du United States Africa Command (Africom, Commandement des États-Unis en Afrique), a entamé ainsi son discours annuel devant le Comité des services armées du Sénat américain : ”Nos opérations, nos exercices, nos programme de coopération à la sécurité continuent à contribuer aux objectifs politiques américains en Afrique, à renforcer le partenariat et à réduire les menaces envers l’Amérique, les Américains, et les intérêts américains basés en Afrique.”
Malgré le taux de croissance relativement élevé de l’Afrique en ce moment, principalement basé sur l’exploitation des matières premières, la majorité de la population n’en tire quasiment aucun bénéfice. Dans de nombreux pays, le niveau de vie ne s’élève qu’à peine ; souvent l’inflation élevée des prix de l’énergie et de la nourriture sape en réalité ce niveau de vie.
Le Nigéria est en ce moment présenté comme étant un des meilleurs “espoirs” du capitalisme en Afrique, mais rien que le mois dernier, l’Office national des statistiques a rapporté que ”Alors qu’en 2004, le taux de pauvreté relative du Nigéria s’élevait à 54,4 %, celui-ci s’est accru à 69 % en 2010, soit 112 518 507 Nigérians ». Ceci, malgré les statistiques officiels qui montrent que le PIB nigérian s’est accru de 7,35 % chaque année entre 2004 et 2010. Et la situation continue à empirer. En même temps que l’annonce de ces chiffres, le Statisticien général du Nigéria a ajouté que « en mesurant la pauvreté en termes relatifs, absolus et en dollars-par-jour, l’Office national des statistiques estime que la pauvreté pourrait s’être accrue respectivement à environ 71,5 %, 61,9 % et 62,8 % en 2011” (The Guardian de Lagos, 14 février 2012).
C’est l’échec permanent de l’Afrique à se développer qui est la cause de tous les troubles, de toute l’oppression et de toutes les guerres qui semblent être la caractéristique de ce continent. Cela n’est pas quelque chose de typiquement “africain” : les autres continents du monde n’ont pas non plus connu une histoire sans guerre ni oppression ; mais aujourd’hui, dans un monde dominé par l’impérialisme, les perspectives pour un développement capitaliste en Afrique sont sévèrement limitées.
Voilà la raison pour les nombreux maux qui affligent le continent.
L’histoire de l’Ouganda
L’histoire sanglante de l’Ouganda et des pays l’environnant n’est qu’un autre triste exemple de ce fait.
Au cours des dernières décennies, l’Ouganda a vu une dictature faire place à une autre, au fur et à mesure que les différentes élites dirigeantes en lutte les unes contre les autres ont cherché à s’accrocher au pouvoir dans une situation où les droits démocratiques étaient réprimés ou limités parce que l’économie capitaliste locale était trop faible que pour pouvoir se permettre la moindre concession durable. Rien qu’en avril et mai dernier, les manifestations contre la hausse des prix de l’énergie et de la nourriture n’ont reçu pour seule réponse que la répression policière et la censure de la part du régime autoritaire de Museveni. L’inflation galope à près de 44 %, ce qui veut dire que le taux de pauvreté de l’Ouganda va certainement continuer à s’accroitre.
L’ONG Human Rights Watch, dans son rapport mondial 2012, a condamné le fait qu’en Ouganda « pendant les manifestations d’avril 2011, à la suite des élections présidentielles de février, l’utilisation non-justifiée de violence mortelle par les forces de sécurité ougandaises ont causé la mort de neuf personnes. Les politiciens de l’opposition et des centaines de leurs partisans ont été arrêtés et condamnés pour réunion illégale et incitation à la violence, tandis que des agents étatiques battaient et harcelaient les journalistes qui relayaient le mouvement » (22 janvier 2012).
Mais ces conflits ne visent pas seulement des enjeux économiques ; s’y retrouvent mêlés également des conflits nationaux et des rixes entre différentes couches rivales au sein de l’élite, tout cela parfois en collusion avec diverses puissances impérialistes rivales.
En Ouganda, le dirigeant actuel, Museveni, est arrivé au pouvoir en 1985 après le renversement de Milton Obote. Au cours de son règne, Obote avait le soutien de la population Acholi du nord de l’Ouganda ; cette population a beaucoup souffert après son renversement.
Human Rights Watch, qui soutient la campagne anti-Kony, a dû admettre que ”L’Armée de résistance du Seigneur a commencé à se battre contre le gouvernement ougandais au milieu des années ’80, en partie en guise de réponse à la marginalisation de la population du nord du pays par le gouvernement” (9 mars 2011).
Kony lui-même est un Acholi. Dans son “Histoire de la guerre”, Invisible Children décrit ce qui est arrivé aux Acholis : ”À partir de 1996, le gouvernement ougandais, incapable de stopper la LRA, a exigé des habitants du nord de l’Ouganda qu’ils quittent leurs villages pour se rendre dans des camps gouvernementaux pour “personnes déplacées en internes” (IDP). Ces camps étaient censés avoir été créés pour la sécurité des populations, mais ils étaient pleins de maladies et de violences. À l’apogée du conflit, 1,7 millions de gens vivaient dans ces camps à travers toute la région. Les conditions y étaient ignobles et il n’y avait pas moyen d’y vivre. C’est ainsi que toute une génération du peuple acholi est né et a grandi dans ces camps.”
Il a été estimé que près de 80 % de la population du nord de l’Ouganda a été déportée de force dans ces camps ou “villages protégés”, et bien que la plupart ait apparemment quitté les camps, les réfugiés qui revenaient chez eux se sont de plus en plus retrouvés confrontés à des conflits ayant pour enjeu leur droit de revenir vivre sur la terre qu’ils ont autrefois habitée et cultivée.
Mais bien que les origines de la LRA tirent en partie leurs racines de la tragédie du peuple acholi à partir du milieu des années ’80, il ne fait aucun doute que la LRA n’a jamais, au grand jamais, été un mouvement de libération visant à protéger les Acholis ; dans les faits, elle n’a été qu’un oppresseur de plus.
La LRA a quitté l’Ouganda en 2006 au moment du démarrage des négociations de paix ; mais ces pourparlers ont finalement échoué à parvenir à un accord. Ceci a mené à l’attaque militaire sur la LRA, la toute première opération organisée par l’Africom récemment créée. Cette attaque, soutenue par Invisible Children, est décrite en ces termes par l’association dans son “Histoire de la guerre” : ”En décembre 2008, lorsqu’il est devenu clair que Kony n’allait pas signer l’accord, l’opération “Tonnerre d’éclair” (Operation Lightning Thunder) a été lancée. Cette opération était le résultat d’une action coordonée de l’Ouganda, de la République démocratique du Congo, de la République centrafricaine et du Soudan, avec le soutien des États-Unis en matière de logistique et de renseignements.”
Il est clair que, vu son silence autour de ce qui est maintenant en train de se passer en Ouganda et son soutien actif pour l’intervention militaire américaine, les organisateurs d’Invisible Children sont en train, intentionnellement ou non, de mobiliser pour des actions qui, tout en pouvant permettre de porter le coup final à ce qui reste de la LRA, ne feront pas pour autant cesser le cycle de violence à l’encontre des enfants et des adultes.
Invisible Children ne peut même pas affirmer que l’administration Obama est sérieuse concernant une de leurs principales revendication – la fin de l’exploitation d’enfants-soldats. Rien qu’en octobre dernier, l’administration Obama a donné son feu vert à une continuation du financement militaire par les États-Unis du Yémen, du Tchad et de la RDC, malgré la persistance de l’utilisation d’enfants-soldats par ces pays. Cela était censé cesser après l’adoption du Child Soldiers Pervention Act en 2008, pour lequel Obama lui-même avait voté en tant que sénateur. Mais maintenant, en tant que président, Obama signe des accords justifiés par “les intérêts de la sécurité nationale” (ABC News, 5 octobre 2011). Le gouvernement américain est d’une hypocrisie monstre concernant les enfants-soldats. Alors que Kony est dénoncé pour son usage d’enfants-soldats, personne ne dénonce le pays dans lequel la LRC est basé aujourd’hui, la RDC !
Tout cela montre bien que, malgré tout le vernis humanitaire, la politique de la classe dirigeante américaine (et d’autres) n’est déterminée que par la défense de ses propres “intérêts nationaux” (càd, les intérêts de ses “propres” capitalistes).
Il est tragique, vu l’énorme soutien qu’ils ont gagné au cours des dernières semaines, de constater qu’Invisible Children suivent la politique étrangère du gouvernement américain sans la moindre critique, et sont très sélectif dans ce qu’ils dénoncent.
Tout en dénonçant Kony, Invisible Children se tait sur les exactions de Museveni en Ouganda, ce qui est cohérent avec la position du gouvernement américain qui le considère comme un allié crucial dans la région.
Ce silence sur la véritable situation en Ouganda pousse Invisible Children à mettre en avant la Cour pénale internationale qui a émis des mandats d’arrêt à l’encontre Kony et de deux autres commandants de la LRA, mais à se taire sur le fait que le gouvernement ougandais a lui-même ignoré une décision de la Cour de justice internationale, prise en décembre 2005, selon laquelle l’Ouganda devrait compenser la RDC pour les exactions et le pillage des ressources qui y ont été commises par sa propre armée entre 1998 et 2003. En ce moment, la RDC réclame 23,5 milliards de dollars à l’Ouganda en guise de réparation pour ses opérations militaires sur le territoire de la RDC.
Par cette mise en question des véritables motivations d’Invisible Children, nous ne voulons en aucun cas nier la brutalité et la barbarie de la LRA, mais nous voulons nous opposer aux tentatives de mobiliser sur cette base un soutien à la politique hypocrite qu’Obama mène en Afrique.
Invisible Children mobilise
Invisible Children prétend avoir « inspiré la jeunesse américaine à faire “plus que simplement observer” ». Il ne fait aucun doute que des millions de gens ont senti qu’ils pourraient faire “quelque chose”. La vidéo “Kony 2012” a eu un énorme effet. La rapidité de son impact n’a jamais été vu auparavant. À peine 4 personnes avaient vu la vidéo le 3 mars, mais ils étaient 58 000 le 5 mars à avoir visionné la vidéo, puis 2,7 millions le 6 mars et 6,2 millions le jour suivant. Aujourd’hui, plus de 80 millions de gens ont vu cette vidéo.
De nombreux jeunes américains ont donné de l’argent à Invisible Children, d’autres achètent le “kit d’action” à 30 dollars ; la journée d’action du 20 avril pourrait générer un large soutien.
Mais, étant donné la politique suivie par Invisible Children, il existe un grave danger que cette énergie sera simplement détournée afin de fournir un soutien à la politique de l’administration Obama qui vise à renforcer son influence en Afrique, à un moment où les autres puissances telles que la Chine ou le Brésil se lancent également dans la course pour ce nouveau repartage de l’Afrique. Malgré toutes les belles paroles contre Kony et la LRA, l’administration Obama, tout comme ces prédécesseurs, est complètement hypocrite dans son soutien à “ses propres” régimes autoritaires et dictatoriaux, tels que l’Ouganda. Tout en comprenant bien le désir de la part des victimes de la LRA de recevoir une aide extérieure contre Kony, les socialistes rappellent que les gouvernements capitalistes extérieurs ont leurs propres intérêts. La BBC a beau faire état maintenant de populations en RDC qui appellent Obama à intervenir contre la LRA, cela ne représente pas une solution durable pour le peuple congolais. N’oublions pas que pendant des décennies, tous les présidents américains, républicains comme démocrates, ont soutenu le règne brutal du bandit Mobutu et l’ont aidé dans son pillage du pays qui est aujourd’hui la RDC.
La seule manière de réellement agir dans les intérêts des enfants, des pauvres, des opprimés et de la population laborieuse de manière générale en Afrique, est d’aider ces gens à construire leurs propres mouvements indépendants, des mouvements qui n’auront aucune confiance dasn les gouvernements capitalistes ou dans la moindre intervention étrangère, mais qui mèneront la lutte pour transformer la société.
Malgré les horreurs de la guerre en Afrique centrale et orientale, nous avons déjà vu cette année de puissants mouvements de masse dans d’autres pays africains contre l’oppression et la misère et pour le changement, tel que les grèves générales au Nigéria et en Afrique du Sud.
La rapidité avec laquelle s’est répandue la colère contre Kony est une véritable source d’inspiration. Le mouvement ouvrier doit tout faire pour s’assure que l’idéalisme enthousiaste et le désir de changement affiché par l’explosion exponentiel de l’intérêt en faveur de la campagne “Kony 2012” puisse être mobilisé en tant que partie prenante d’une véritable lutte contre l’exploitation, la misère et la guerre.
Le défi pour les socialistes authentiques est de contribuer à relier la colère de la jeunesse face aux crimes commis par des groupes tels que la LRA et son désir de faire quelque chose à la construction de mouvement capables de renverser le système capitaliste qui corrompt et empoisonne les vies de tant de gens, au lieu de voir cette colère et ces aspirations se faire canaliser par des personnes qui veulent éviter de voir remis en question l’ordre capitaliste existant.
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Chine: Au Jiangxi, une seconde protestation majeure contre la pollution en moins d’une semaine
Ce 16 août, les habitants de Lianhua, dans le sud-est de la province de Jiangxi, ont manifesté contre une usine chimique polluante. Cette protestation impressionnante arrive deux jours à peine après que plus de 12.000 personnes aient occupé les rues de Dalian, dans le nord-est, ce qui a d’ailleurs été jusqu’à forcer les autorités à fermer l’usine pétrochimique de Fujia.
Chinaworker.info
Les habitants impliqués dans les protestations de Jiangxi ont organisé un blocage durant des mois, à l’entrée de la Longsen Industrial Company qu’ils accusent d’être responsable d’une pollution sévère des eaux, des poissons et des récoltes dans la région. Le mardi 16 août, le gouvernement local a décidé de réprimer la manifestation en envoyant des centaines de policiers armés. Divers rapports font état de violence policière contre les manifestants, qui ont été battus et comportent de nombreux blessés dans leurs rangs.
La manifestation s’est alors dirigée sur une autoroute importante afin de bloquer le trafic, entraînant une répression encore plus féroce de la part des autorités. Des rapports, non-confirmés toutefois, affirment que plus de 2.000 personnes ont participé aux protestations. Différentes arrestations ont eu lieu et un témoin a rapporté au journal Epoch Times que “La police a fait usage de matraques électriques pour frapper les manifestants, y compris des enfants de parfois 12 ou 13 ans.”
Selon des commentaires que l’on peut lire sur différents blogs, l’usine relâche des substances très toxiques dans l’environnement local. On peut constater cela à la mort des poissons ainsi qu’à la destruction de la végétation. “Depuis l’an dernier, les enfants ont commence à être malades. Lorsque deux enfants sont décédés, les villageois ont été tellement furieux qu’ils ont bloqué l’entrée de l’usine, et ne lui ont plus permis de fonctionner. Ils ont bloqué cette entrée avec des briques et de la boue depuis déjà quatre ou cinq mois” a déclaré un villageois à l’Epoch Times.
Les manifestations de ces derniers jours ne constituent que le ‘‘sommet de l’iceberg’’. Chaque année, il y a des millions de protestations liées à l’environnement en Chine. Les raisons qui expliquent cela ne sont pas difficiles à comprendre, la destruction de l’environnement atteignant une ampleur sans précédent résultant du véritable emballement d’une industrialisation chaotique et non-dirigée ainsi que de la totale absence de droits démocratiques et d’organisations qui pourraient influencer ces développements dans les collectivités locales.
Plus tôt durant le mois d’août, une usine de la province de Shandong a subi une fuite de gaz mortelle, qui a tué ou blessé 125 personnes. A Dalian, une tempête tropicale a causé des vagues qui ont ébranlé la digue de l’usine pétrochimique de Fujia, faisant craindre un scénario à la Fukushima avec déjection de liquide très dangereux. Il y a de cela trois mois, de grandes protestations ont encore eu lieu dans la province du Yunnan suite à un emprisonnement de poissons après qu’une usine se soit débarrassée de produits chimiques en les envoyant tout simplement dans les égouts.
Au niveau national, des centaines de milliers d’enfants souffrent dans le pays des conséquences d’un empoisonnement, avec des désordres permanents mentaux ou physiques, comme en fait notamment état Human Rights Watch. Son rapport parlait aussi de la répression, des détentions et d’autres actions de la police qui veulent briser toute protestation de la part des victimes.
Les véritables socialistes et le site chinaworker.info font campagne pour l’instauration de syndicats et d’organisations indépendants pour représenter les intérêts des travailleurs et des paysans pauvres. Nous appelons à la libération de toutes les personnes détenues après les protestations de Lianhua. Lutter pour la protection de l’environnement n’est pas un crime !
La Chine est devenue un dépotoir pour déchets dangereux tandis que ses ressources naturelles sont exploitées avec la plus grande insouciance, sans la moindre considération pour les gens ou l’environnement. Tout cela ne sert que la soif de profit à court terme des capitalistes et des fonctionnaires corrompus avec qui ils travaillent. Leur contrôle de l’économie doit être brisé si nous voulons empêcher la destruction de l’environnement !
Nous revendiquons la tenue d’élections réellement démocratiques à tous les niveaux de gouvernement. Nous avons besoin d’une planification démocratique de l’économie pour partager les ressources et pour utiliser des méthodes de production propres.
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La Russie de Poutine fait couler du sang homosexuel
"Pédés, pervers!" "Renvoyez les tapettes dans les camps de concentration"… Voilà les cris qui ont déchaîné Moscou lors du 14ème anniversaire de la dépénalisation de l’homosexualité en Russie. Rien (ou presque) ne laissait présager que ce dimanche d’apparence ordinaire serait marqué par des violences homophobes dans la capitale ni que les visages en sang des rescapés homosexuels allaient horrifier l’Europe toute entière à la veille du sommet du G8 en Allemagne.
Tout remonte à l’année dernière, au moment où des centaines de militants LGBT (lesbiennes, gays, bi’s, trans-genres ou hétéros) se sont rassemblés à Moscou pour la première Gay Pride russe. Cette manifestation avait été interdite. Devant la ténacité des homos à faire valoir leurs droits, celle-ci a quand même eu lieu, mais fût violement réprimée (un article de notre Internationale publié sur ce site relate ces évènements).
Aujourd’hui, les plaies ayant cicatrisé, les homos ont décidé de revenir à la charge. Au programme cette année, manifester devant le bureau du maire de la ville et lui remettre une pétition pour protester contre l’interdiction de la Moscow Pride 2007.
Evidemment, les déclarations des politiciens et des religieux ne se sont pas faites attendre. Le mufti suprême de la région de Talgat Tajuddin a également déclaré: "S’ils vont dans la rue, il faudra les frapper. Tous les gens normaux le feront, qu’ils soient musulmans ou orthodoxes." Il a ajouté que le Prophète Mahomet a ordonné de tuer les homosexuels, car "leur comportement conduirait à la fin de l’espèce humaine". Selon l’évêque orthodoxe Daniel Yuzhno-Sakhalinsk, cette marche n’est qu’une "plaisanterie cynique", il a comparé l’homosexualité à la lèpre et a mis en garde la population contre "la propagande du vice".
Lors de la première Gay Pride, un député nationaliste criait fièrement: "J’ai une solution pour les homos: la Sibérie!". Depuis l’an dernier déjà, le maire de Moscou, Iouri Loujkov, affirme que toute tentative pour organiser une Gay Pride (qu’il qualifie d’"acte satanique" sic!) serait "résolument écrasée". Issu de la droite dure, Igor Artioumov a tenté de légitimer sa récente attaque contre une boîte homo de Moscou en déclarant: "Je proteste contre ces sodomites qui rampent comme des cafards!". Le président russe a lui même sous-entendu lors de sa conférence de presse annuelle que "les homosexuels nuisent à la cause nationale en ne participant pas au renouvellement des générations" etc.
Les organisateurs de la Gay Pride avaient quant à eux invité les journalistes internationaux, des VIP’s et plusieurs députés d’Angleterre, de Belgique, de France, des Pays-Bas, d’Italie, du Brésil et du Parlement européen, croyant naïvement que leur présence empêcherait que le mouvement soit à nouveau réprimé.
Mais rien à faire, la Russie de Poutine se la joue dure. Comme en 2006, la disproportion entre le dispositif policier et le petit nombre de manifestants était évidente.
La presse de droite colporta si bien les menaces homophobes que le rassemblement dégénéra en une véritable chasse aux homosexuels. Des néo-fascistes ont rué de coups les manifestants aux cris de "morts aux homosexuels". A chaque fois, les policiers ont tardé à intervenir. Le député européen Marco Cappato a été agressé par un groupe de néo-nazis alors qu’il parlait à des journalistes. "Que fait la police? Pourquoi ne nous protégez-vous pas?", a-t-il lancé aux policiers qui l’ont ensuite arreté malgrè son immunité parlementaire puis placé dans le même camion que plusieurs militants d’extrême droite.
En Russie, le climat anti-gay a en effet donné confiance aux fascistes pour entrer en jeu et laisser sortir toute leur haine, sans scrupule. Un groupe de jeunes hommes solidement bâtis se sont présentés équipés de masques chirurgicaux, destinés selon leurs termes à les protéger de la "maladie homosexuelle". D’autres, brandissant fièrement des photos d’Hitler, faisaient le salut nazi en beuglant "nous sommes pour un véritable amour (sic!)". Un homme muni d’un crucifix "venu aider les policiers" a menacé de s’en servir pour frapper tout homosexuel qui croiserait son chemin.
En plus de recevoir des coups, les homosexuels qui défendaient leurs droits ont été arreté manu militari, jetés dans un camion de la police et emmené sous les yeux de dizaines de journalistes. Plusieurs fachos ont également été interpellés (puis immédiatement relachés) pour avoir frappés des homos ou des députés. La lenteur de l’intervention des policiers leur laissait cependant tout l’espace pour asséner plusieurs coups rapportent les témoins. Selon Scott Long, un militant de Human Rights Watch, ONG de défense des droits de l’homme: "La police n’a pas vraiment essayé de séparer les deux camps et, par conséquent, des gens ont été passés à tabac. Je conseillerais aux autorités russes de protéger la liberté de rassemblement et la liberté d’expression, et de protéger les manifestants."
"Nous défendons simplement nos droits" a déclaré un jeune homosexuel qui saignait du nez après avoir reçu un puissant coup de poing au visage par un homme hurlant "les homos sont des pervers". "C’est atroce, mais cela ne me fait pas peur. C’est un endroit assez effrayant, un pays assez effrayant pour les homosexuels. Mais nous persisterons jusqu’à ce qu’ils nous permettent d’exercer nos droits", a-t-il ajouté.
"Il faut que nous nous battions pour faire valoir nos droits!" insistait Lena, toute jeune lesbienne qui avec un groupe de copines aura tenu plusieurs minutes face à des néo-nazis qui les couvraient d’insultes. "Vous êtes des animaux!", "Sales putes!" leur lançaient les crânes rasés, bavant de rage. "C’est plutôt vous les animaux!" répondaient bravement les filles. Cette scène-là s’est achevée par des crachats et quelques coups de pieds dans le dos quand elles ont finalement battu en retraite. "Mais nous reviendrons l’année prochaine, et jusqu’à ce qu’on puisse enfin s’affirmer homo en Russie !" assuraient-elles au journal français LIBERATION.
Les deux chanteuses russes du groupe TATU qui ont bâti leur célébrité en s’affichant lesbiennes étaient également présentes à la manifestation, assaillies tant par les néofascistes que par les journalistes, celles-ci ont rapidement dû fuir la mêlée. Quelque secondes après son arrivée, le leader du mouvement gay, Nikolaï Alexeïev, a été "emmené sans explication" dans un poste de police du centre de Moscou.
Un député Vert allemand, Volker Beck, déjà roué de coups lors de la première Gay Pride l’an dernier, a de nouveau été battu par des néo-nazis puis interpellé par la police. Une fois libéré, il a déclaré à la presse avoir été ensuite roué de coups par les policiers. Le député allemand a ajouté que lui et ses compagnons d’infortune s’étaient fait confisquer leur passeport au cours de leur détention. La présidente de son parti a exigé que la chancelière Angela Merkel évoque la question des droits de l’homme avec le président russe lors du sommet du G8 prévu le mois prochain en Allemagne.
Un célèbre défenseur britanique des homosexuels, Peter Tatchell, à été jeté au sol et frappé à deux reprises. Quand il s’est relevé, couvert de sang, il a été frappé une nouvelle fois à l’oeil et embarqué par deux policiers anti-émeutes qui n’étaient visiblement pas génés par les caméras filmant la scène.
Des nationalistes ont lancé des oeufs sur une député transexuelle de Rifondazione Comunista, Vladimir Luxuria, qui, tremblante, déclarait après coup: "Dès mon retour, je vais faire pression sur notre parlement pour que le président italien évoque ce grave incident avec Vladimir Poutine lors de sa prochaine visite. Malheureusement Nikolaï Alexeïev (le leader du mouvement) restera cette nuit au poste de police et il y aura un procès lundi car il est accusé d’avoir résisté à la police".
Cependant, ces réactions homophobes ne reflètent pas forcément l’opinion publique car, selon un sondage récent, 51% des russes pensent que les gays et les lesbiennes devraient avoir les même droits que les autres. Mais il est clair que les déclarations politiques ou autres propagent la haine et la violence dans le pays tout entier. Poutine est d’ailleurs arrivé au pouvoir en attisant la haine et les divisions dans son pays (Tchétchénie, terreur, assassinats politiques, magouilles financières…). Le sommet du G8 nous a montré que sa doctrine était: "diviser pour mieux régner". Tenter de faire pression sur la Russie à cette occasion n’est pas sérieux.
Que faire, alors?
Nous devons bien sûr nous organiser pour combattre le racisme sous toutes ses formes. Pour changer la donne, nous devons dépasser le chacun pour soi et rester unis: homos et hétéros, hommes et femmes, travailleurs et chômeurs, flamands et francophones, belges et immigrés… mais ce n’est qu’un début.
Aucun changement radical n’est possible tant que nos vies seront dirigées par des puissances économiques, comme le G8. Notre rôle en tant que socialistes est de prouver que c’est seulement en combattant le système capitaliste, ainsi que toutes les pourritures toxiques qui émannent de lui et en mettant sur pied une nouvelle société basée cette fois sur la solidarité et l’égalité -une société socialiste-, que ces problèmes seront réglés une fois pour toutes.
