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  • 20.000 personnes à Paris pour la marche pour le climat

    Ce samedi 21 septembre, 20.000 personnes ont participé à la marche pour le climat à Paris, dans le cadre d’une “grève de la terre ” internationale qui a mobilisé plus de 4 millions de personnes dans le monde. Le même jour, les Gilets Jaunes avaient également organisé leur 45ème journée d’action.

    Par Tim (Gand)

    Les “Gilets Jaunes” ont été empêchés de se rassembler le matin en raison d’une importante présence policière qui a occupé les principaux points de rencontre de leurs manifestations. Environ 7.500 policiers étaient mobilisés dans la capitale française. Tous ceux qui étaient ne fut-ce que légèrement soupçonnés de faire partie des mobilisations des Gilets Jaunes ont été arrêtés ou dispersés par l’utilisation de grandes quantités de gaz lacrymogènes.

    Dans l’après-midi, les manifestants pour le climat se sont réunis dans le centre-ville, où ils ont été rejoints par certaines des couches les plus conscientes du mouvement des Gilet Jaunes. Plusieurs milliers de personnes étaient présentes pour souligner le lier entre leurs protestations contre les prix élevés et les bas salaires, d’une part, et la nécessité d’une action urgente pour sauver la planète, d’autre part. Les slogans appelaient à faire payer les riches et les multinationales pour la crise climatique et à changer le système. Ces slogans étaient corrects et constituent un bon point de départ pour débattre du type de société dont nous avons besoin pour sauver la planète et garantir des conditions de vie décentes à chacun.

    Le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) était présent avec du matériel soulignant que l’écrasante majorité de la pollution est causée par un petit groupe de multinationales. Nous avons souligné que les ressources et la technologie existent pour assurer une reconversion économique efficace et immédiate afin de sauver la planète. Le système capitaliste assure que cette richesse et ces technologies soient contrôlées par une infime élite de capitalistes fortunés, ce qui rend impossible leur mobilisation pour l’effort climatique.

    Sous le pression du mouvement pour le climat, divers gouvernements à travers le monde ont déclaré l’urgence climatique, sans toutefois prendre de mesures efficaces pour sauver le climat. Les seules mesures qui sont prises visent à faire payer la crise à la classe ouvrière, par exemple par de nouvelles taxes.

    La classe ouvrière a le pouvoir de changer la société. Le mouvement ouvrier organisé a le pouvoir de paralyser l’ensemble de la société s’il se mobilise efficacement. Ce pouvoir s’est avéré capable de forcer les classes dirigeantes à faire de profondes concessions à la classe ouvrière, et c’est le seul moyen efficace de forcer les capitalistes et leurs politiciens à prendre des mesures climatiques efficaces dans l’intérêt de la majorité de la population. La manière la plus efficace d’y parvenir est de remplacer le système capitaliste actuel, qui repose sur la cupidité et les profits de quelques-uns, par une société socialiste basée sur les besoins réels de la population et de l’environnement.

    Par conséquent, il est crucial que le mouvement pour le climat se lie à la classe ouvrière organisée et au mouvement syndical. Il était problématique que les dirigeants des syndicats français aient refusé de mobiliser pour cette manifestation. Des militants syndicaux étaient présents à titre individuel, sans aucune mobilisation organisée. C’était également vrai concernant les principaux partis de gauche en France : ni la France Insoumise ni le NPA (Nouveau Parti Anticapitaliste) n’avaient de délégations dans la manifestation, et nous étions l’une des rares organisations révolutionnaires de gauche à intervenir avec du matériel politique.

    Cette absence de partis politiques et de syndicats a également eu un effet sur la conscience dans la manifestation. Nous avons pu constater une grande ouverture à nos idées, mais il existait une très forte atmosphère antiparti et antisyndicale parmi de nombreux participants.

    Malgré cela, notre intervention a été couronnée de succès : nous sommes intervenus avec une équipe internationale enthousiaste composée de camarades belges, allemands, suédois, anglais, irlandais et français, et nous avons vendu les 100 exemplaires de notre journal français spécialement produit pour cette occasion de même que 12 exemplaires de la version française de notre journal belge, Lutte Socialiste. Avec cette intervention, nous avons réanimé la tradition du CIO d’organiser des mobilisations internationales afin d’intervenir dans des événements importants ou d’aider à construire des sections plus petites de notre Internationale.

    Le CIO est ouvert à tous ceux qui veulent lutter avec nous pour une société socialiste ainsi que contre la dictature barbare du capital et ses guerres et catastrophes écologiques. Rejoignez-nous !

    Voici ci-dessous le texte d’un des tracts qui accompagnait nos journaux et qui abordait plus spécifiquement la thématique des Gilets Jaunes.

    STOP À LA POLITIQUE POUR LES RICHES Organisons la colère et orientons?là vers tout le système !

    10 mois après le début du mouvement, à quelques mesurettes près, rien n’a changé concernant nos conditions de vie. Elargissons la lutte à tous ceux qui souffrent de la politique pro?riches menée par les élites économiques et politiques !

    CONSTRUISONS L’UNITÉ FACE AU CAMP D’EN FACE

    Le mouvement ouvrier doit s’engager dans la lutte

    Si le mouvement ouvrier utilise son outil de travail comme outil de combat, il est capable de jouer un rôle primordial pour un changement réel de système. Il pourrait aider à l’organisation d’une véritable grève générale qui bloquerait toute l’économie et ferait extrêmement mal aux grands capitalistes et à leurs relais politiques. Il permettrait aussi de davantage structurer le mouvement et de s’organiser contre la répression.

    Malheureusement, plusieurs directions syndicales ont refusé de soutenir le mouvement. Mais ce n’est pas le cas partout. En France, le mouvement est le plus fort justement là où il y a une convergence. Comme à Toulouse où le blocage a été massif à plusieurs reprises, aussi grâce au renfort des syndicats de routiers.

    Les organisations du mouvement ouvrier doivent entrer en action, avec et aux côtés des Gilets Jaunes. Elles doivent rejoindre la lutte avec respect, sans donner de leçons, en tenant compte du fait que la direction syndicale a miné son autorité auprès d’une grande partie de la classe ouvrière.

    Structurer la lutte et l’orienter contre le système permettraient de s’opposer plus efficacement aux tentatives de division de la protestation. Cela permettrait de contrer les provocations policières qui ont pour but de criminaliser notre mouvement, et aussi les frustrations de gens bloqués, voire même de certains d’entre nous qui, sans perspective pour aller vers une victoire, peuvent se laisser entrainer par les provocateurs policiers. Depuis le début du mouvement, de nombreuses références ont été faites à Mai 68. Au plus fort de ce mois de révolution, c’était la combinaison de la jeunesse en lutte et de la grève générale de 10 millions de travailleurs qui avaient failli faire tomber le système. Un tel type de lutte pourrait arracher nos revendications.

    Faisons le lien avec le milieu syndical, pour organiser une grève générale qui puisse bloquer l’économie de l’intérieur La lutte pourrait s’organiser, sur base d’assemblées locales qu’il faudrait développer localement et nationalement. Elargissons nos grandes journées de lutte, d’action, et de blocages avec une grève générale unissant travailleurs du public et du privé avec les jeunes et les retraités contre la politique de Macron.

    Exigeons :

    • La baisse immédiate et le blocage des prix de l’essence et de l’énergie ;
    • L’augmentation des salaires et des allocations sociales et leur indexation sur les prix, y compris du carburant ;
    • Mettre les besoins au centre de la politique : transports publics gratuits et non polluants, services publics (notamment de proximité : crèches, écoles, maternités, bureaux de poste, logements publics sociaux, …),
    • La remise en place de l’impôt sur la fortune, la lutte contre l’évasion fiscale par les ultra?riches et les multinationales, y compris par la réquisition sous contrôle démocratique, la fin des taxes indirectes (TVA, etc.) remplacées par une imposition forte des riches et des grandes entreprises ;
    • Un grand service public environnemental pour créer des centaines de milliers d’emplois nécessaires à la transition énergétique et écologique (agriculture écologique, alimentation en circuits courts, énergies renouvelables, …)
    • Un tel programme nécessite des mesures réellement socialistes telles que la nationalisation et l’unification de tous le secteur financier dans un service national d’investissement et de financement sous contrôle démocratique de la collectivité ; la nationalisation des secteurs?clés de l’économie afin que les grandes entreprises ne puissent continuer à saboter la transition écologique et que la planification démocratique et écologique, basée sur les besoins y compris écologiques, devienne possible.

     

  • J’veux du soleil : Ruffin porte la voix des Gilets Jaunes

    Si vous n’êtes jamais allés sur un rond-point occupé par les Gilets Jaunes ; si vous avez des à priori sur le mouvement et sa composition ; si vous croyez les propos de leurs détracteurs les identifiant comme racistes, homophobes, casseurs, fous furieux ; si vous vous demandez pourquoi et comment il se fait que le mouvement, bien qu’essoufflé, perdure encore aujourd’hui : allez voir ce film.

    Par Laure, Gauche Révolutionnaire (CIO-France)

    Le mouvement GJ en image

    De villes en ronds-points, le député du groupe parlementaire de la France Insoumise François Ruffin et son cameraman sillonnent la France à la rencontre de ceux qui, depuis le 17 novembre, se sont relayés pour tenir ces ronds-points transformés en ‘‘villages de Gaulois réfractaires’’, ‘‘mini ZAD’’ (Zone à défendre),… Qu’importe leur dénomination, ces endroits ont été transformés avant tout en lieux de rencontre et d’organisation, de vie et d’échange, de résistance et de reconnaissance, entre frères de galère, sœurs de misère, exploités et petits exploitants dont le dénominateur commun est celui du ras-le-bol, du refus de cette survie imposée. De gens qui refusent, parfois pour la première fois, d’être les oubliés d’un système où la minorité se gave goulûment sur le dos des autres qui en bavent.

    Portraits des invisibles qui subissent

    Il ne faut pas s’attendre à un film qui permettrait de comprendre l’organisation de ces lieux de résistance, de la mise en place des Assemblées générales à l’organisation logistique ou stratégique des blocages. Il n’aborde pas non plus la gigantesque répression policière et judiciaire. Le film nous propose un recueil de portraits de GJ asphyxiés par la vie, sortant de la honte pour relever la tête et dire que ça suffit. Il nous présente une diversité de portraits émouvants d’une couche auparavant silencieuse de travailleurs précaires, chômeurs, retraités, mères célibataires et petits indépendants en galère qui se relayaient sur les carrefours occupés.

    Les naufragés du capitalisme

    Ces portraits donnent à voir à quel point la société piétine, exploite, presse jusqu’à la moelle, puis laisse pourrir tous ceux qui la composent et pourtant créent les richesses. Personne n’est épargné sauf la classe dominante. Elle laisse sur le banc la plupart d’entre nous, nous met en compétition, nous tue à petit feu.

    Le film ne montre qu’une partie du tableau. Il faut y rajouter l’abandon des services publics, les postiers et cheminots qui luttent depuis de nombreux mois contre la privatisation des services; les profs et les lycéens en lutte contre les lois qui dégradent l’éducation. Le pays est traversé de luttes sociales et une certaine convergence a eu lieu autour du mouvement des Gilets Jaunes.

    La solidarité pour tenir

    Comme on l’entrevoit dans le film, la solidarité engendrée par les occupations quotidiennes et nocturnes des ronds-points est frappante : dons, démonstrations de solidarité, discussions,… Une puissante force collective et une volonté (et nécessité) de s’organiser ensemble se dégageaient des lieux d’occupation.

    Lever la tête collectivement est une prise de conscience qui restera gravée dans les mémoires. Certains ont décidé de ne plus se laisser faire à l’usine non plus. C’est le cas notamment des ouvriers des entrepôts de Décathlon qui, grâce au mouvement, ont senti qu’il était temps que la peur change de camp et ont bloqué leur lieu de travail pour la première fois depuis 30 ans, afin d’exiger de meilleures conditions de travail et de salaire.

    Réappropriation des richesses : une nécessité

    Le film laisse ouvertes les pistes qui pourraient être tirées de ce mouvement d’envergure, notamment quant à la manière de poursuivre la lutte. La seule conclusion possible d’un tel mouvement, c’est la nécessité de l’appropriation des moyens de production et de décision par la collectivité. C’est la seule manière de faire vaciller ce système moribond qui nous plonge dans la violence sociale, puis policière et judiciaire dès qu’on le remet en cause. Le mouvement des Gilets Jaunes a montré de quoi nous sommes capables en termes d’organisation et de solidarité.

  • France. Gilets Jaunes : entretien au cœur du mouvement


    “Faire le lien avec le milieu syndical, pour organiser une grève générale qui puisse bloquer l’économie de l’intérieur”

    Plusieurs mois après le début du mouvement, la colère est insatiable contre Macron et son monde. Un mouvement puissant et déterminé, même s’il connait bien sûr des hauts et des bas. Déclenché autour de la hausse des taxes sur le carburant, le mouvement s’est rapidement transformé en révolte générale contre le coût de la vie, les salaires, retraites et allocations trop faibles, les privilèges des plus riches et des élus, la manipulation de l’information par les médias établis, la violence policière et l’arrogance des élites et les manquements démocratiques. Nous avons pu discuter de ce mouvement inédit, de sa nature et de ses perspectives avec Rachel (1), Gilet Jaune organisatrice de différents blocages et manifs à Montélimar (Drôme, Sud-Est) et membre de la Gauche Révolutionnaire, organisation-sœur du PSL en France.

    “Le mouvement étonne absolument tout le monde, y compris les Gilets Jaunes, par sa durée, par la détermination des gens et la capacité à mobiliser” explique Rachel. Des mois après, et malgré les nombreuses tentatives de discréditation et de déviation, le mouvement jouit toujours d’une très grande sympathie, même si surtout encore passive.

    Depuis le début du mouvement, le gouvernement a dû reculer, peu, mais quand même : sur certaines taxes sur le pétrole et un léger bonus pour le salaire minimum. “Macron est vraiment en mauvaise posture. Il est sur un vrai champ de mine. Où qu’il aille, ça peut réexploser. Et donc il y a une certaine paralysie du programme économique que le gouvernement voulait mettre en place. Et ça, quelque part, c’est déjà une victoire.”

    La fameuse ‘lettre aux français’ de Macron, lançant le ‘Grand débat national’, est l’un de ces essais de déviation. “C’est un tentative de division. D’abord sur la question d’aller ou pas dans ce débat demandé par Macron, et deuxièmement en avançant des questions comme la procréation médicale assistée (PMA), le mariage pour tous et l’immigration. Il veut diviser un mouvement dangereux et fort.” Comment va réagir le mouvement aux appels à ‘débattre’ du président des riches ? “Des discussions que j’ai eu à notre QG, il n’y a absolument personne qui veux entrer là-dedans. Aucun gilet jaune actif avec qui j’ai pu discuter ne perçoit ce soi-disant grand débat comme quelque chose pouvant apporter une solution à nos revendications.”

    L’extrême droite et les tentatives de division

    Macron relance la discussion sur l’immigration et la laïcité. Des thèmes qui, depuis que le mouvement s’est intensifié et massifié, sont clairement plus en arrière dans les discussions et revendications parmi les Gilets Jaunes. En général, d’ailleurs, les idées racistes comme les organisations d’extrême droite sont peu présentes dans le mouvement. “Elles font beaucoup de bruit dans les médias et sur les réseaux sociaux, mais elles n’organisent pas grand-chose sur place. Beaucoup d’électeurs d’extrême droite sont par contre présents, mais n’osent pas non plus avancer ouvertement leurs idées.”

    Le mouvement fait aussi face à de nombreuses accusations d’antisémitisme. C’est, comme toujours, une tentative de diviser le mouvement et, plus largement, le soutien parmi la population. Tour à tour accusé d’être ‘anti-climat’, puis ‘complotiste’ après l’attentat de Strasbourg, le mouvement est attaqué par la classe dominante. Mise en grosse difficulté, celle-ci essaie toujours de dévier l’attention et de ‘diviser pour régner’, ou, dans ce cas : ‘diviser pour éviter un mouvement de masse de tous ceux qui ont intérêt à faire tomber Macron et son monde’.

    Dans un mouvement peu structuré, chaque personne émet une analyse ou une idée sans que celles-ci soient pour autant portées par l’ensemble du mouvement. Il est d’ailleurs particulièrement remarquable que les idées nauséabondes soient très souvent directement répondues par d’autres Gilets Jaunes, souvent plus nombreux. Mais les choses remarquables qui sont positives pour le mouvement sont très rarement relayées par les médias dominants ; elles sont peu utiles aux intérêts des puissants.

    “Dans le Gard, plus au sud, certains QG sont composés quasi que d’électeurs d’extrême-droite. Il y en a qui disent ne plus vouloir voter dans ce sens, parce qu’ils se sont impliqués dans le mouvement, avec notamment des gitans, et se sont rendus compte qu’on est tous ensemble dans la lutte.” La trahison des partis traditionnels, du PS surtout, a poussé beaucoup de travailleurs à la recherche d’une alternative politique ou même simplement d’un vote-sanction. L’absence d’une alternative correcte et claire de la part de la gauche a laissé l’espace pendant longtemps à des forces populistes de droite pour se construire, comme le Rassemblement National (ex-FN) de Marine Le Pen. Beaucoup de gens voient encore chez elle, de manière erronée, un vote plus cohérent qu’à nouveau voter pour Macron ou son camp. Il faut y apporter une alternative de gauche à ce vote anti-système.

    La France Insoumise

    “La France Insoumise de Jean-Luc Mélenchon est la formation à gauche qui a la position la plus juste depuis le départ par rapport au mouvement.” De nombreuses revendications des Gilets Jaunes étaient en effet présentes dans le programme ‘L’Avenir en commun’ pour les élections de 2017. C’est d’ailleurs la FI, bien plus que le RN, qui représente un réel danger pour Macron et les élites. “Il y a clairement une manipulation médiatique pour essayer de minimiser le lien et la représentativité que pourrait avoir la France insoumise. Surtout là avec les européennes qui arrivent, la FI est une vraie menace pour Macron.”

    Mais la classe des travailleurs se remémore les nombreuses trahisons des représentants politique de gauche. C’est pourquoi le mouvement rejette en général les étiquettes politiques, même si “beaucoup d’Insoumis sont actifs parmi les Gilets Jaunes”. La question cruciale du relais politique devra pourtant se poser. Pas seulement pour les urnes, mais surtout pour organiser la colère et l’orienter vers un réel changement. La France Insoumise, très active depuis le début de la législature pour stimuler la contestation contre la politique de Macron, a clairement les armes en termes de programme pour jouer ce rôle. Mais elle devra tout de même revoir une partie de son fonctionnement interne peu démocratique, et se battre pour une réelle rupture avec le système capitaliste et l’instauration d’une alternative sociétale.

    Revendications et structuration

    Pour son débat, Macron dit n’avoir aucun tabou, mais refuse de revenir sur les mesures déjà prises… “Il dit tout de suite qu’il ne veut pas lâcher sur les questions économiques et sociales.”

    La plateforme de 42 revendications sortie il y a quelques semaines comporte pourtant énormément de demandes socio-économiques. “A côté du RIC (2) et de la démission de Macron bien sûr, certaines revendications sortent du lot, comme l’augmentation du SMIC (3), la réinstauration de l’ISF (4), la suppression du CICE (5) qui signifie 40 milliards de cadeaux fiscaux aux plus grandes entreprises, et l’abolition des privilèges des élus.” Mais c’est bien le RIC, moins coûteux et plus inoffensif, que les médias surexposent. “Demander une réelle démocratie, c’est important. Mais pour moi, si on ne prend pas le pouvoir économique, et si on n’a pas d’égalité, on n’aura jamais de démocratie. Le système nous oppresse économiquement. Il faut le renverser, pour pouvoir imposer la démocratie.”

    “Des obligations de référendum peuvent être un premier pas. Mais la mise en avant de cette revendication par les médias, c’est une tentative d’enfermer le débat dans un truc institutionnel.” Cette surexposition pousse la demande pour le RIC à être largement reprise au sein du mouvement. “C’est présenté comme la solution miracle par tout un tas de Gilets Jaunes. Avec l’idée que, si on se limite à ça, c’est davantage possible de l’obtenir et donc, après, d’avoir le pouvoir pour tout changer. Mais beaucoup d’autres, dont la quasi-totalité dans notre QG, pensent qu’on ne peut pas se contenter de revendications démocratiques. (…) On est dans un mouvement extrêmement flou, même en termes de revendications. Les gens ne savent pas exactement ce qu’ils veulent, si ce n’est vivre mieux. Mais concrètement, comment traduire ça, ça reste flou, même si ça dépend très fort d’un endroit à l’autre.”

    “La faible structuration du mouvement est perçue par la plupart des Gilets Jaunes comme une faiblesse, une fragilité. Mais en même temps, il y a une tendance à rejeter toute représentativité. Ceci dit, c’est très divers. Il y a des endroits où ils sont très structurés, avec des représentants.” Des points forts sont présents, comme la rédaction collective de tracts comprenant les revendications et les appels aux manifs et à rejoindre le mouvement, ainsi que la tenue régulière d’Assemblées Générales. “Sur Montélimar, on a fait quotidiennement des AG avant Noël. Depuis, on est passé à deux AG par semaine. Il y a cette idée lancée au niveau départemental de faire une AG avec deux mandatés pour chaque QG de Gilets Jaunes, dans tout le département. Ça a été voté à notre AG à une très large majorité. Mais il faudra bien sûr voir comment ça se met en place.”

    La violence, l’une des manipulations des médias établis

    La violence semble être omniprésente. De la part du mouvement, elle a beau être ultra-minoritaire, les médias établis en parlent comme étant une généralité. De la part des forces de l’ordre, elle a beau être ultra-majoritaire, les médias établis n’en parlent presque pas. “La violence elle vient d’abord des autorités et de leur politique, et c’est perçu comme ça à l’intérieur du mouvement. Ensuite, c’est la répression policière qui pousse à la violence qui émane du mouvement.” Cette violence policière que les Gilets Jaunes subissent est brutale et permanente : gaz lacrymogène, tirs de flashballs, arrestations arbitraires,… Elle a pour but tant de provoquer une réponse violente de la part des manifestants, afin de discréditer le mouvement dans la société, que de pousser d’éventuels actuels ou futurs Gilets Jaunes à rester chez eux et abandonner la lutte. “Beaucoup de gens extérieurs tombent dans le piège présenté par les médias. Il reste un très grand soutien, mais la manière dont les choses sont présentées refroidit quand même la possibilité d’avoir un large soutien actif parmi les couches qui ne sont pas mobilisées.”

    “Mais ici, localement, ça se passe bien. Ça dépend vraiment des villes, et c’est surtout dans les plus grandes. On a plutôt de bons contacts avec les forces de l’ordre, si ce n’est les CRS quand on faisait vraiment de grosses actions comme le blocage d’Amazon-logistique au sud de Montélimar (…) Mais par contre, ils ont vraiment beaucoup durci tout l’aspect judiciaire. On a énormément de Gilets Jaunes qui se prennent des amendes.”

    Si la violence émanant du mouvement à l’encontre des forces de l’ordre et de journalistes est compréhensible, étant donné la méfiance qui règne contre toutes les institutions, particulièrement celles qui sont vues comme déformant l’information, elle constitue tout de même un frein au rassemblement de couches encore plus larges dans la société. Comme le disait Jean-Luc Mélenchon le 16 janvier dernier au Journal de 20h sur France2 : “(…) la preuve a été faite que quand on est très nombreux, le nombre submerge y compris les violents. (…) La conduite d’un mouvement, ça nécessite que ça s’enracine, que ça s’élargisse. Dès qu’il y a de la violence, ça rabougrit, ça réduit.”

    Et pendant que les pro-Macron (grands patrons, médias dominants, …) condamnent l’attitude soi-disant trop complaisante de Mélenchon envers la violence du mouvement, l’ancien Ministre de l’Education Luc Ferry disait le 7 janvier sur Radio Classique, sans recevoir de critiques des médias et partis établis : “ce que je ne comprends pas, c’est que l’on ne donne pas les moyens aux policiers de mettre fin à ces violences”. “Quand on voit des types qui tabassent à coups de pied un malheureux policier… Qu’ils se servent de leurs armes une bonne fois, écoutez, ça suffit ! Ces espèces de nervis, ces espèces de salopards d’extrême droite, d’extrême gauche et des quartiers qui viennent taper du policier, ça suffit”,”. “On a, je crois, la quatrième armée du monde. Elle est capable de mettre un terme à ces saloperies, faut dire les choses comme elles sont”.

    Femmes Gilets Jaunes

    L’un des points fort du mouvement, c’est la présence en très grand nombre de femmes, y compris parmi les leaders de la lutte. “J’ai été frappée par la place qu’ont les femmes dans le mouvement, de manière générale, c’est impressionnant”, explique Rachel. “Il y a eu une forme d’appel, de vague nationale pour organiser des manifs, pour valoriser la manière avec laquelle les femmes s’investissent dans le mouvement. On en a fait une ici à Montélimar le premier dimanche de janvier. Elle a été organisée complètement à l’arrach’, en une journée de mobilisation, et on était 350, donc ça a quand même rameuté beaucoup de monde. Les femmes étaient à l’avant du cortège et les hommes se sont mis à l’arrière, avec les enfants.”

    De nombreuses manifestations de femmes Gilets Jaunes ont ainsi eu lieu, comme la ‘Marche des lionnes’ du 13 janvier à Nice. Les hommes y étaient également invités, “pour ne pas ajouter un élément de division”, comme l’expliquait une participante. Ce sont notamment les revendications ‘Stop à la violence contre les femmes’ et la revalorisation des retraites et du pouvoir d’achat des mères célibataires qui y étaient à l’avant-plan.

    Grève générale et mouvement ouvrier organisé

    Différents appels à l’organisation de grèves générales ont été lancés depuis début janvier. “Il ne s’agit pas de mots d’ordres clairs. Les appels sont par exemple ‘pas de magasin ouvert’, ‘pas de consommation pendant 3 jours’,… Avec l’idée que le gouvernement cède. (…) Les gens impliqués parmi les Gilets Jaunes sont plutôt des couches périphériques de la classe ouvrière. (…) La plupart des gens ont conscience qu’il faut bouger, bloquer l’économie, mais souvent sans comprendre réellement comment l’économie fonctionne.”

    De par sa place spécifique dans la production économique et ses méthodes de lutte, et notamment la grève et le blocage de la production, le mouvement ouvrier est primordial pour un changement réel de système. Il pourrait aider à l’organisation d’une véritable grève générale qui bloquerait réellement l’économie et ferait extrêmement mal aux grands capitalistes et à ses relais politiques. Il permettrait aussi de davantage structurer le mouvement et de s’organiser contre la répression. Malheureusement, “de la part des directions syndicales, si ce n’est dans certaines villes, il n’y a aucune tentative de rapprochement. Il y a par contre beaucoup de syndicalistes qui sont investis parmi les Gilets Jaunes, et pour qui c’est un réel déchirement de voir leur direction rester à l’écart voire critiquer avec arrogance. (…) A Toulouse le week-end dernier, le blocage était massif, aussi grâce au renfort des syndicats de routiers.”

    Tout comme de nombreuses organisations de gauche dans le passé, la plupart des directions syndicales n’a pas toujours pris les décisions et initiatives nécessaires en faveur des travailleurs et leurs familles. Cela explique la méfiance qui vit également envers les dirigeants du mouvement ouvrier organisé.

    “Aujourd’hui, quand j’avance la nécessité de faire le lien avec le milieu syndical, c’est beaucoup mieux pris qu’il y a quelques mois. Au sein du mouvement, il y a davantage d’ouverture envers les syndicats qu’au début. L’idée de s’adresser aux syndicats pour qu’ils fassent un appel à une grève générale est discutée de plus en plus entre les Gilets Jaunes. Le but est d’arriver à organiser une grève et de bloquer l’économie par l’intérieur, parce qu’ils se rendent compte que de l’extérieur c’est compliqué. Jouer au chat et à la souris avec les forces de l’ordre constamment, c’est pas fructueux.”

    Les organisations du mouvement ouvrier doivent entrer en action, avec et aux côtés des Gilets Jaunes. Elles doivent rejoindre la lutte avec respect, sans donner de leçons, en tenant compte du fait que la direction syndicale a miné son autorité auprès d’une grande partie de la classe ouvrière. ” Si des bastions de la classe ouvrière ou des fédérations syndicales entrent aussi dans la bataille, ça redonnera certainement un souffle au mouvement. Que nous soyons tous organisés au sein de comités de lutte serait le pire cauchemar du gouvernement. Et c’est le moment d’y aller car il est vachement fragilisé.”

    Changer le système économique

    La jeunesse aussi, a son rôle à jouer. Dans chaque grand mouvement de classe, elle a joué un rôle dynamique. “Les lycéens en lutte il y a quelques semaines. Si le mouvement est retombé depuis, on sait que ça peut réexploser à tout moment.”

    Depuis le début du mouvement, de nombreuses références sont faites à Mai 68. Au plus fort de ce mois de révolution, c’était la combinaison de la jeunesse en lutte et de la grève générale de 10 millions de travailleurs qui avaient failli faire tomber le système. C’est vers un tel type de lutte que le puissant mouvement des Gilets Jaunes doit s’orienter pour obtenir des victoires.

    “Les discussions sur les revendications, c’est une porte ouverte pour moi pour discuter socio-économique avec les autres Gilets Jaunes et la nécessité d’un changement de société.” Nous devons nous doter d’un programme de revendications portant des mesures socialistes, telles que la nationalisation des secteurs-clés de l’économie pour décider nous-mêmes de la production nécessaire pour satisfaire aux besoins de tous, et pour pouvoir disposer des moyens financiers pour mener des politiques ambitieuses pour chacun et pour la planète sur laquelle nous vivons. Et, ceci, avec la perspective d’établir un gouvernement des travailleurs et d’aller vers un changement de système ; une société socialiste démocratique est la seule issue pour satisfaire aux revendications légitimes du mouvement.

    “Si la majorité des gens veut juste gagner quelques revendications, je vais bien sûr me battre avec eux. Mais je pense qu’on a un potentiel pour prendre le pouvoir aujourd’hui. Il y a un potentiel révolutionnaire.”

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    (1) Interview réalisée mi-janvier. Sauf mention contraire, toutes les citations de cet article sont issues de l’entretien avec Rachel. Une version courte de cet article se situe en page 11 de notre mensuel Lutte Socialiste de février 2019.
    (2) RIC = Référendum d’Initiative Citoyenne
    (3) SMIC = Salaire minimum interprofessionnel de croissance
    (4) ISF = Impôt de solidarité sur la fortune
    (5) CICE = Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi

  • France. La révolte est en marche. Étendons la grève et la lutte partout! Macron dégage!

    «Macron dégage ! », « Macron démission », c’est la révolte de ceux qui en ont marre de subir le mépris et l’arrogance du président des riches. « Ceux qui ne sont rien », comme nous avait décrit Macron, sont non seulement en train de le défier, mais également de le faire plier. Nous sommes également devenus « tout ». Travailleurs peu payés, retraités ayant perdu des centaines d’euros depuis les mesures de Macron, intérimaires galérant de contrat en contrat, les gilets jaunes ont ouvert le chemin de la révolte : lycéens, étudiants, travailleurs, il faut que tout le monde entre dans la lutte et qu’on aille vers la grève générale.

    Par la Gauche Révolutionnaire (CIO-France)

    Macron nous a servi son blabla, mais il ne comprend rien. Il ne satisfait aucune des principales demandes des gilets jaunes (pas de suppression de l’ISF, pas de remise en cause des 40 milliards d’aides publiques aux grandes entreprises, le CICE), une hausse dérisoire du SMIC, et… des heures supplémentaires pour gagner plus. Comme si on ne travaillait pas assez durement ! Comme si, avec les heures qu’on fait déjà et qui sont sous payées, on n’enrichissait pas déjà suffisamment les grands patrons et les actionnaires. Macron est déjà fini. Il n’est que le président des riches, pas celui des millions de travailleurs, avec ou sans gilet jaune. Il est le représentant du capitalisme, des ultra riches, de tous ces parasites qui nous écrasent et nous exploitent pour accumuler des milliards inutiles qu’ils seront incapables de dépenser et qui manquent aux services publics, au logement, aux emplois. Il est incapable de comprendre ce que nous vivons, incapable de répondre aux demandes les plus simples pour cesser de survivre et recommencer à vivre : il faut qu’il dégage !

    Relever la tête

    Il y a longtemps que ce n’est plus seulement une question de surtaxe de l’essence (et d’ailleurs ce n’était de fait qu’un moyen de se rassembler) qui nourrit le mouvement des « gilets jaunes », c’est bien plus grave et plus profond. Il en va du niveau de vie et en fait de la Vie elle-même : celle qu’on ne veut plus, qui se termine au 10 de chaque mois parce qu’on ne peut plus rien se payer, pas même des repas décents. Les révenus ont baissé de 440 euros par an entre 2008 et 2016. Avec la baisse des APL, la hausse de la CSG, et toute une série d’autres mesures, c’est devenu intenable.

    Et quoi d’étonnant que ce soit parti de la voiture : essence en hausse, contrôle technique fait exprès pour rendre inutilisables les voitures des plus modestes, péages en hausse, amendes stationnement en hausse, radars par milliers… le travailleur, prisonnier de sa voiture pour aller travailler se fait racketter grâce à cette même voiture.

    Et alors que le mouvement commençait, on s’est entendu répondre que le gouvernement ne changerait rien, on a reçu les charges de CRS sur les rond-points, dès le premier jour du mouvement par endroit. Au mépris, le gouvernement ajoutait déjà la répression. Il n’avait rien compris, les gilets jaunes étaient en train d’exprimer ce que ressent la majorité de la population, et surtout l’écrasante majorité des travailleurs et des retraités.

    Nous sommes un fleuve qui déborde après la pluie de sales coups répétés ces dernières années contre notre niveau de vie et nos conditions de travail. Nous sommes nourris de milliers de frustrations et d’humiliations que nous impose le capitalisme. Notre indignation ne s’arrêtera pas avec deux ou trois mesures temporaires car maintenant, la plupart des gilets jaunes voient clairement ce qui se passe.

    La lutte nous a uni

    Ce qui n’étaient que des lettres et des chiffres sans signification ont pris tout un sens aujourd’hui : CICE = 40 milliards de cadeaux aux grandes entreprises qui font déjà des milliards de bénéfices, qui ferment des usines et suppriment des emplois, pour le seul bénéfice des actionnaires.
    Suppression de l’ISF = cadeaux aux riches, augmentation des taxes qui sont par nature plus lourdes pour les plus modestes. C’est aux plus gros de payer plus, disent désormais les gilets jaunes. On n’est pas contre les impôts, on veut voir cela en retour avec des services publics, des écoles,… Les gilets jaunes sont en train de parler du fonctionnement même de la société, de l’inégalité dans laquelle le capitalisme nous plonge, au seul bénéfice des ultra-riches. Et on comprend même que les institutions, le gouvernement, la police, sont là pour protéger cet ordre injuste et inégalitaire.

    En se regroupant sur les rond-points, en discutant, en menant des actions (et de plus en plus avec les syndicalistes), en ciblant de plus en plus les grandes compagnies commerciales, pétrolières, les gilets jaunes apportent un élément révolutionnaire, remettant en cause non seulement la forme injuste et antidémocratique de la société mais aussi, de plus en plus, en questionnant le fond : la mainmise sur l’économie de quelques multinationales qui se gavent de milliards sur notre dos.

    Le mouvement des gilets jaunes a enclenché un processus, une compréhension commune à des millions de personnes, non pas seulement de la souffrance, mais des causes de celle-ci. Les revendications sont devenues communes, de même que la volonté de vivre dans une société humaine, fraternelle et démocratique et non sous la dictature tant des capitalistes et de la finance que des technocrates déconnectés de la réalité.

    Le processus enclenché le 17 novembre va continuer de s’amplifier. Il a des éléments révolutionnaires, mais pas encore suffisamment si on veut réellement changer la société. Il nous faudra remettre en cause le caractère anti-démocratique de la société, le mépris de Macron et de ses amis, mais encore plus, remettre en cause le fonctionnement même de celle-ci, basée sur l’exploitation des travailleurs au seul bénéfice des capitalistes.

    • Hausse des salaires et des retraites, SMIC à 1800 €
    • Assez des taxes injustes, c’est les riches qu’il faut imposer
    • Abolition de la CSG, restauration de l’ISF, arrêt du CICE
    • Récupération des 80 milliards de l’évasion fiscale et des milliards de profits
    • Injection de ces milliards dans les services publics pour créer des emplois dans l’éducation, la santé, l’écologie…

  • La députée Ruth Coppinger parle des Gilets Jaunes au Parlement irlandais

    Notre camarade Ruth Coppinger (députée de Solidarity et membre du Socialist Party) a introduit le mouvement des Gilets Jaunes au parlement irlandais. Ce mouvement de protestation fait de blocages, d’occupations et de manifestations dans les grandes villes s’oppose à une situation et une politique qui sont également très impopulaire ailleurs dans le monde. Le mouvement des Gilets Jaunes fait tâche d’huile.

    En Egypte, la vente de gilets jaunes a même été interdite pour tenter d’empêcher toute contagion… Lorsque Macron a été élu en mai 2017, il représentait le nouveau visage du néolibéralisme. Le premier ministre irlandais avait d’ailleurs pris Macron comme exemple. Les mobilisations françaises constituent donc un avertissement au Premier ministre (“Taoiseach”) Varadkar.

    Le mouvement se poursuit en France : il faut une grève générale de 24 heures pour faire tomber le gouvernement. Mais c’est le système capitaliste lui-même qui représente un cauchemar pour la majorité de la population. Ce dont nous avons besoin, c’est d’une économie démocratiquement planifiée à la place du chaos dévastateur du “marché libre”. Cela fait partie de la lutte pour une France socialiste comme tremplin vers une Europe socialiste.

  • La colère des ‘‘Gilets Jaunes’’ est légitime, il faut l’orienter contre le système!

    Manifestation des Gilets Jaunes vendredi dernier à Bruxelles. Photo : socialisme.be

    Depuis novembre, plusieurs centaines de milliers de personnes ont pris part à des manifestations et des actions de blocage : des travailleurs de secteurs à bas salaires, des retraités, des chômeurs, des artisans, des petits patrons,… Une protestation massive peu structurée, aux contours peu clairs et en manque de projet. Mais une mobilisation légitime, aussi en Belgique, contre la baisse du pouvoir d’achat, symbolisée par le ras-le-bol de l’envolée des prix d’une dépense régulière obligatoire pour des millions de gens : le carburant. En France, le prix de l’essence et du diesel à la pompe a augmenté de 15% et 27% en un an, principalement à cause de la hausse du prix du pétrole brut, mais aussi en raison des nombreuses taxes. Et à partir du 1er janvier 2019, une taxe de 6,5 centimes d’euro par litre de diesel et de 2,9 par litre d’essence sera ajoutée.

    Par Stéphane Delcros // Version PDF

    Manifestation des Gilets Jaunes vendredi dernier à Bruxelles. Photo : socialisme.be

    En Belgique aussi, tout augmente, sauf nos salaires !

    Le prix maximum du diesel dans notre pays est plus élevé que dans tous les pays voisins. Tout comme en France, environ 60% de ce que nous payons à la pompe va aux autorités. Un réservoir diesel de 40 litres coûte aujourd’hui environ 60 euros, dont 36 euros pour le pouvoir public. Au total, l’année dernière, les autorités ont généré 5,5 milliards d’euros de recettes provenant des taxes sur les carburants.

    Bon pour l’environnement ? Tout comme Macron, le gouvernement belge utilise l’argument selon lequel de tels prix découragent l’utilisation individuelle de l’auto. Les taxes sur les autos diesel avaient déjà été augmentées. Mais aucun investissement dans des alternatives écologiques n’a été fait : les recettes de taxes et accises sur le carburant ne sont pas destinées à des transports publics plus denses, de meilleure qualité et respectueux de l’environnement. Alors que ces recettes augmentent, les contributions des autorités aux transports publics diminuent…

    Les contributions de l’Etat à la SNCB, à la STIB, au TEC et à De Lijn sont inférieures aux 5,5 milliards d’euros de recettes provenant des taxes sur les carburants. La dotation publique de la SNCB va diminuer de 663 millions d’euros sur cinq ans ! Il n’y a pas non plus d’investissement dans la production d’énergie durable. Les investissements dans l’énergie sont laissés aux entreprises privées, avec pour résultat la menace d’une pénurie d’électricité. Carburant, énergie, eau,… Une grande partie de nos factures sont constituées de taxes. Tout devient plus cher, mais nos salaires ne suivent pas.

    La politique d’austérité du gouvernement et le manque d’investissements publics mènent à une réduction des services publics. En dehors des grandes villes, une voiture n’est ainsi pas un luxe inutile. De nombreuses personnes ont besoin de leur auto parce qu’il n’y a pas d’autres moyens de transport pour se rendre au travail ou pour amener les enfants à l’école. Il y a de l’argent pour l’achat d’avions de chasse, mais pas pour des services publics locaux accessibles ?

    Les élites économiques sont non seulement épargnées, mais en plus arrosées de cadeaux. Et c’est à nous de payer sous prétexte de défense de l’environnement… Les taxes supplémentaires sont utilisées pour remplir les caisses afin que le gouvernement puisse distribuer encore plus de cadeaux aux grandes entreprises !

    Parmi les gagnants de cette politique figurent les grandes multinationales pétrolières comme Shell ou Total, qui ont réalisé l’an dernier respectivement 4 et 5 milliards d’euros de bénéfices, et ne paient quasi pas d’impôts. Nous, à chaque plein, nous croulons sous les taxes. La lutte doit être liée aux nécessités écologiques ; mais la facture ne peut être donnée aux travailleurs et à la classe moyenne : elle doit être assumée par les principaux responsables de la pollution !

    Manifestation des Gilets Jaunes vendredi dernier à Bruxelles. Photo : socialisme.be

    Organiser la colère et l’orienter contre le système

    La colère en France et en Wallonie est justifiée. Le mouvement des Gilets Jaunes part d’un sentiment instinctif et n’est pas directement clair en termes d’exigences et d’alternative. Certains voient dans cette colère contre les impôts un mouvement de droite voire d’extrême droite. Aucun groupe existant n’a pourtant pris les devants des manifestations, qui sont nées d’en bas et organisées via les médias sociaux.

    La droite et l’extrême droite s’invitent à certains rassemblements

    Quelques actes racistes ou homophobes ont pu être observés, heureusement fort isolés à quelques individus, et souvent combattus par les autres, appelant à l’unité. Là où le mouvement ouvrier organisé est absent, l’espace est laissé à la droite pour tenter d’organiser le mouvement ; à certains endroits, ils peuvent même y parvenir.

    Mais la droite et l’extrême droite n’ont pas d’alternative à la politique actuelle. Elles ne veulent pas des transports publics denses, de qualité et gratuits ; des services publics forts et accessibles à tous ; des investissements publics dans les énergies renouvelables ; … Et elles sont pour la suppression des impôts sur les riches et le report de l’âge de départ à la retraite.

    Construire l’unité face au camp d’en face

    En novembre, plusieurs sondages ont montré que 70 à 80% des Français soutiennent ces actions ; le mouvement repose sur une large base de soutien passif. La popularité du mouvement fait notamment écho à celle des luttes contre les Lois-Travail menées principalement par le mouvement syndical. Beaucoup de gens présents sur les blocages étaient très certainement aussi présents aux manifestations syndicales et piquets de grève. Beaucoup d’autres ont vécu ici leurs premières manifestations ; cela doit nous encourager à construire l’unité de tous ceux qui souffrent et vont souffrir des politiques d’austérité. Fin novembre, les Gilets Jaunes de la Réunion ont obtenu le gel pour 3 ans de la taxe sur les carburants : une indication que la lutte peut payer !

    Le mouvement ouvrier doit s’engager dans la lutte

    Tout cela n’enlève en rien le fait que le mouvement ouvrier, de par sa place dans la production économique, et par ses méthodes, et notamment l’arme de la grève, est primordial dans la lutte pour une autre société. Malheureusement, plusieurs directions syndicales – en France comme en Belgique – ont refusé de soutenir le mouvement. Après plusieurs jours de luttes, le mouvement a tout de même commencé à recevoir le soutien de syndicats d’entreprises et de secteurs : CGT-Chimie, FO-transport, CGT-Le Havre,… et les Gilets Jaunes ont reçu à certains endroits des visites syndicales de solidarité. C’est l’ensemble du mouvement des travailleurs qui doit rejoindre cette protestation et l’orienter vers les revendications qui élargissent la lutte.

    Structurer celle-ci et l’orienter contre le système permettraient de s’opposer plus efficacement aux tentatives de division et de criminalisation de la protestation. Cela permettrait d’affaiblir la violence venant de la répression ou de la frustration de gens bloqués, et cela offrirait une perspective permettant d’atténuer les quelques éléments de violence contre-productive existants au sein du mouvement.

    Tout comme le gouvernement thatchérien Michel/De Wever, le président français est arrivé au pouvoir avec l’intention de dévaster le mouvement ouvrier et d’imposer une politique ultra-austéritaire. Jusqu’à présent, malgré de bonnes tentatives – notamment initiées par la France Insoumise – la lutte n’a pas été à la hauteur de l’enjeu. Les mobilisations des Gilets Jaunes se sont créées dans ce contexte de faiblesse de la réaction syndicale. Cela exprime le fait que le ras-le-bol est bien présent et qu’une réelle volonté de lutter existe. Ne la gâchons pas ; organisons-là !

    Gauche Révolutionnaire, notre organisation-sœur en France, intervient dans le mouvement en soulignant les nécessités de développer les assemblées de discussion et d’organisation de la lutte ; et d’une grande journée de lutte, d’action, et de blocages avec une grande grève unissant travailleurs du public et du privé avec les jeunes et les retraités contre la politique de Macron. Elle avance les revendications suivantes:

    – La baisse immédiate et le blocage des prix de l’essence et de l’énergie ;
    – L’augmentation des salaires et des retraites et leur indexation sur les prix, y compris du carburant ;
    – La réquisition des bénéfices des multinationales pour financer les besoins : transports publics gratuits et non polluants, services publics (notamment de proximité : crèches, écoles, maternités, bureau de poste…), logement ;
    – La remise en place de l’impôt sur la fortune, la lutte contre l’évasion fiscale par les ultra-riches et les multinationales, la fin des taxes indirectes (TVA, etc.) remplacées par une imposition forte des riches et des grandes entreprises ;
    – Un grand service public environnemental financé en taxant les multinationales, pour créer des centaines de milliers d’emplois nécessaires à la transition énergétique et écologique (agriculture écologique, alimentation en circuits courts, énergies renouvelables etc.)

    Un tel programme nécessite des mesures socialistes telles que la nationalisation des secteurs-clés de l’économie, afin que les grandes entreprises ne puissent continuer à saboter la transition écologique et que la planification démocratique et écologique devienne possible. Une telle planification serait basée sur les besoins, y compris les besoins écologiques.

  • 10ème jour de lutte chez les gilets jaunes à Montélimar

    Malgré une météo catastrophique, la détermination des gilets jaunes sur Montélimar ne faiblit pas. Plusieurs milliers de personnes sont mobilisées, de jour comme de nuit, tournant au gré des disponibilités de chacun. Nos actions quotidiennes ont toutes l’objectif de dénoncer la politique injuste et destructrice de Macron, ne servant que les plus riches et nous condamnant à la précarité.

    Article de la Gauche Révolutionnaire

    Ce n’est pas l’extrême droite qui tient les rênes !

    Au début du mouvement, on a pu entendre que l’appel des gilets jaunes n’était qu’un truc d’extrême droite mais il s’agit bel et bien qu’un mouvement populaire large, qui rassemble les couches de la société les plus attaquées par Macron. La solidarité et l’implication de chacun sur notre campement sont extrêmement fortes, que ce soit des automobilistes qui klaxonnent, nous donnent des vivres, de l’argent… ou des gilets jaunes qui apportent aussi nourriture, bois, tentes, bâches ou autre matériel… C’est ainsi que notre rond-point de l’A7 Montélimar-Sud est un véritable QG !

    Notre objectif n’est évidemment pas de se cantonner à vivre sur ce rond-point mais bien d’avoir un lieu de rassemblement où nous pouvons discuter tous et toutes ensemble, déterminer nos revendications, nos actions et agir ensuite de manière coordonnée pour plus d’impact. Nous avons instauré des assemblées quotidiennes à 18h, où nous prenons toutes les décisions collectivement, ce qui ne laisse aucun espace à l’extrême droite.

    Il va falloir durcir le ton

    Nous avons levé les barrières de l’A7, bloqué le site d’Amazon et d’autres plate formes logistiques, bloqué Carrefour et l’ensemble de la zone commerciale… Toutes ces actions ont certainement entraîné un manque à gagner mais il semble évident aujourd’hui que cela ne suffit pas à faire reculer, voire tomber Macron comme la majorité des gilets jaunes le souhaite.

    La défiance vis-à-vis des médias et des politiciens est très forte et pour beaucoup, les syndicats sont mis dans le même panier. Ils sont perçus comme des traîtres et des appareils qui cherchent à profiter de l’ampleur de la « vague gilet jaune ». La proposition de l’union locale de la CGT de faire une manifestation commune le 1er décembre a été vivement critiquée à notre dernière AG, pour finalement aboutir à « ceux qui veulent y aller n’ont qu’à le faire mais ce n’est pas un rapprochement officiel ». Pourtant, tout le monde s’accorde sur le fait que bloquer l’économie est nécessaire et que la grève générale est le seul moyen d’y parvenir .

    Pour la suite du mouvement…

    Nous avons un tract qui sera prêt demain, avec des revendications qui vont clairement au-delà des taxes sur les carburants : augmentation des revenus, partage du travail, répartition des richesses…

    Il sera distribué massivement lors des filtrages pour continuer à rallier du monde au mouvement et clarifier tout ce que l’on peut entendre dans les médias sur ce que l’on demande.

    Le manque de structuration du mouvement à une échelle large nous affaiblit et les discussions commencent sur comment dépasser cela. Des propositions d’actions coordonnées à l’échelle du département ou de la région émergent aussi.

    La fatigue commence à se faire sentir et ce rythme ne pourra pas être tenu sur la longueur si la grève ne s’étend pas. C’est pourquoi, en tant que militant-e-s de la Gauche Révolutionnaire, nous tentons d’expliquer le rôle crucial des syndicalistes qui doivent mettre pression sur leur confédération pour qu’un réel appel à une grève totale soit fait rapidement.

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