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Tag: Front National
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Antifascisme. Pourquoi manifester contre le NSV?
Article par Geert Cool, porte-parole de la campagne antifasciste flamande Blokbuster
Le Nationalistische Studentenvereniging (NSV, cercle des étudiants nationalistes) se présente comme un sympa petit club d’étudiants flamingants qui ne s’occupe que de l’organisation d’activités estudiantines (soirées de chants,…). En réalité, il s’agit du vivier du Vlaams Belang, ce milieu étant même plus radical que le parti d’extrême-droite. En dépit de la présence de quelques membres de la N-VA, le NSV reste essentiellement un lieu de formation pour de futurs cadres du Vlaams Belang.
Lorsque le VB était au faîte de sa gloire électorale, le NSV a parfois dû quelque peu masquer son côté plus radical. Mais maintenant que le VB enregistre de moins bons résultats électoraux, l’attention des médias dominants est également moindre quant aux agissements de ses excroissances. Fin novembre dernier encore, le NSV a tenu à Anvers un meeting comprenant des orateurs internationaux dont le moins que l’on puisse dire est qu’ils sont controversés : le NSV a ainsi offert une tribune à un militant d’extrême-droite italien qui se proclame ouvertement héritier du fascisme de Mussolini ou encore à un pionnier d’une milice privée hongroise mise à l’index. Même le Vlaams Belang a trouvé l’événement risqué et n’a pas désiré mettre de salle à disposition du NSV.
Ce dossier est destiné à examiner d’où provient le NSV ainsi que ce que préconise cette organisation.
D’où vient le NSV ?
Manifestation du 20 mars : page francophone de l’événement facebookLe NSV a été créé en 1976 pour regrouper des étudiants d’extrême-droite. Très vite, le NSV a également eu une aile d’écoliers avec le Nationalistische Jongstudentenverbond (NJSV) (Union des Jeunes Etudiants Nationalistes) où Filip Dewinter et Frank Vanhecke (à Bruges), Philip Claeys (à Bruxelles) ou encore Karim Van Overmeire (à Alost) ont notamment joué un rôle.
Le NJSV a eu à son apogée quelque chose comme 18 sections (entre autres à Bruges, Anvers, Sint-Niklaas, Le Coq, Mol, Koekelare, Grammont,…). Son secrétariat national était basé à l’adresse privée de Filip Dewinter, qui habitait encore Steenkaai à Bruges, Dewinter étant le président national du NJSV. Les activités du NJSV brugeois, codirigé par Dewinter et Vanhecke, n’étaient pas spécialement ”fréquentables” : violence, racisme et défense ouverte du fascisme. Dewinter et Vanhecke organisaient aussi une bourse du livre “anticommuniste” où la police a saisi des livres révisionnistes (niant l’holocauste). Les membres du NJSV brugeois participaient également aux activités violentes de la milice privée ultérieurement interdite VMO (Vlaamse Militanten Orde, Ordre des Militants Flamands). Les responsables du VMO brugeois se sont chargés de la formation politique de Dewinter et Vanhecke.
Dans le journal commun du NSV et du NJSV, Anton de Grauwe a écrit : “Et naturellement, des termes tels que commandement, hiérarchie, ordre civil, discipline, éducation, autorité sont taxés de fascistes. Nous pouvons être fiers d’un tel fascisme.” Et en effet, dans les cercles du NJSV et du NSV, on était très fier du fascisme. C’est sans doute pourquoi Koen Dillen, dans le même numéro du périodique Signaal, a présenté le bourreau nazi Göring comme un idéaliste, ce qu’il a encore répété dans sa critique d’une biographie d’Adolf Eichman.
Les membres du VMO et du NJSV brugeois ont régulièrement fait preuve de violence. Dans d’autres sections, c’était aussi le cas et les jeunes d’extrême-droite en étaient tellement fiers que lors des cantus (soirée de chants), ils chantaient des chansons destinées à glorifier leur propre violence : “le sang coule dans les rues, des rats crèvent dans les égouts mais nous n’en resterons pas là, tous ces gauchistes doivent mourir” disait ainsi le refrain de la chanson ”A mort” (sur la mélodie de Blauwvoet) qui se terminait par : “Toute cette vermine rouge doit être abattue. Repoussons-les, repoussons-les. Tous ces gauchistes à la tombe.” Nous ne pouvons qu’apprécier la subtilité du propos…
Arrivé à Anvers pour y étudier, Dewinter a joué un rôle important dans le Nationalistisch Studentenverbond, nom du NSV de l’époque. Le NSV avait une tradition très radicale.
Ainsi, le 7 mars 1984, il y eut une occupation du café d’étudiants ‘Het Stuc’ à Louvain, dont les portes avaient été forcée à coups de barres de fer et de bâtons. Un étudiant en a gardé des blessures incurables suite à une une fracture ouverte. A ce moment-là, Jurgen Ceder était président du NSV-Leuven. En 1985, une étudiante a été menacée d’un couteau à cran d’arrêt à l’UFSIA parce qu’elle demandait qu’un calicot portant le slogan “le NSV a gagné” (après une victoire électorale du Vlaams Blok…) soit enlevé. Cette même année, un commando du VMO et du NSV a attaqué une manifestation anti-missiles à Gand.
Dans la deuxième moitié des années 1980 et au début des années 1990, le NSV a eu des difficultés à maintenir sa position. La percée électorale du Vlaams Blok, le 24 novembre 1991, a constitué un tournant à la suite duquel une nouvelle génération a repris en mains les traditions du NSV. Les années 1990 se sont déroulées suivant les mêmes recettes que dans les années 1980 : racisme ouvert, nostalgie pour le fascisme et, là où c’était possible, actions musclées et violentes. C’est de ces actions que vient son surnom de Rob Verreycken, qui devait lui aussi devenir une figure de premier plan du Vlaams Belang ; ‘Rob Klop’ (”Rob la frappe”).
Dans une édition controversée des ‘nouvelles de l’association’ gantoise du NSV datant de décembre-janvier 1996-97, sous le titre “Egalité : un mythe”, un point de vue extrêmement raciste avait été avancé, à tel point que le NSV a tenté de détruire cette édition et que des militants du NSV s’en sont violemment pris à un nationaliste flamand de gauche qui avait confirmé l’authenticité de l’édition. En voici un extrait, traduit par nos soins : “Un nègre coiffé de bouse de vache et avec des dents burinées donne une meilleure image de la vraie nature d’un nègre qu’un nègre élevé comme un blanc et qui a appris à rouler en voiture et parle couramment une langue de blanc. La culture nègre est non seulement différente de la culture blanche, elle est aussi moins avancée et INFERIEURE par rapport à la culture blanche.” Rien à ajouter. Le président du NSV gantois de l’époque, Dieter Van Parys siège encore aujourd’hui au conseil communal d’Oostkamp pour le Vlaams Belang.
A la même période, l’organisation écolière NJSV a un peu refait surface à Bruges. Dans le journal des membres de cette organisation, au milieu des années 1990, on pouvait lire, entre autres : “le NSDAP [le parti nazi, NDLR] n’existe hélas plus”, “l’homosexualité reste une maladie à éradiquer”,… Le NJSV brugeois a aussi commencé, au milieu des années 1990, une violente campagne contre la gauche, les immigrés et les jeunes alternatifs. Cette violence a dégénéré, entre autres, avec un commando qui a conduit une attaque contre de militants faisant campagne contre le rôle joué par la multinationale pétrolière Shell au Nigéria et a fait irruption dans des cafés de jeunes alternatifs. La campagne antifasciste flamande Blokbuster a riposté par une campagne nationale contre la violence fasciste qui a rassemblé des centaines de manifestants début 1997.
Le NJSV a connu une fin douloureuse lorsque l’un de ses chefs de file n’a manifestement plus supporté la pression des protestations contre la violence et a commis un acte de désespoir : l’ancien militaire a mis en scène un attentat à la bombe raté contre lui pour ensuite pourvoir accuser la campagne Blokbuster. Il a vite fini par avouer. Il était dangereux, certes, mais pas très malin.
A la même époque, il y a eu une série d’incidents à Gand aussi, parfois avec les mêmes personnages que ceux qui faisaient du grabuge à Bruges. Les militants de gauche, surtout, ont à nouveau été pris pour cible. Des réunions d’Etudiants de Gauche Actifs (EGA, organisation étudiante du PSL) ont été attaqués et, lorsque le NSV n’a pas été reconnu à l’université pour cause de racisme et de violence, un groupe de 30 membres du NSV a pris en otage l’assemblée de la Convention politique et philosophique gantoise (Gentse Politiek en Filosofisch Konvent – PFK) du 27 janvier 1997. En mars 1998, des militants de Blokbuster ont subi une attaque de la part de membres du NSV au restaurant universitaire De Brug. Le militant de Blokbuster Eric Byl a dû être emmené aux urgences de l’hôpital Jan Palfijn. Quelques jours plus tard, des menaces de mort à l’encontre d’autres militants de Blokbuster, Els Deschoemacker et Geert Cool, ont suivi. Quelques squats anarchistes ont également été attaqués et/ou menacés. Blokbuster a de suite réagi par des mobilisations contre la violence fasciste. Depuis lors, les manifestations organisées par le NSV reçoivent chaque année une riposte antifasciste sous la forme d’une contre-manifestation qui est devenue aujourd’hui le plus grand événement antifasciste de Belgique.
Le NSV aujourd’hui : toujours une bande raciste et violente
Sous la pression de la protestation antifasciste et électorale du Vlaams Blok puis du Vlaams Belang, les jeunes du NSV ont dû se tenir à carreau depuis les années 2000. Cela a conduit de ci de là à une certaine frustration et à des fractions dissidentes suivant les lignes des anciennes traditions. Ainsi, une réunion des Etudiants de Gauche Actifs d’Anvers a été attaquée en octobre 2009 par un commando de ‘Camarades Autonomes’. Cette attaque est survenue après plusieurs provocations, y compris du NSV, qui avait une telle confiance en lui que l’attaque a été annoncée à l’avance. La charge a été stoppée net par un service d’ordre des Etudiants de Gauche Actifs et de Blokbuster.Mais, généralement, les néofascistes arrivaient sans problème au NSV. Ainsi, en 2005, une nouvelle section du NSV à Hasselt a été mise en place par un militant qui n’hésitait pas à faire des déclarations douteuses sur des forums internet. En voici une : ”Une fois que la démocratie se mêlera au chaos, j’espère qu’une main de fer fasciste sera là pour reprendre les choses en mains.” Et il n’y a pas eu que des figures de second rang qui ont été prêtes pour des actions musclées et punitives. Dans des discussions sur internet, le futur parlementaire flamand Tom Van Grieken a ainsi revendiqué l’indépendance flamande “par les armes si nécessaire” et, en tant qu’étudiant, il en est venu plusieurs fois aux mains avec des opposants politique. Et en 2004, une authentique charge a été menée contre la manifestation anti-NSV organisée par Blokbuster à Gand. Un groupe d’extrême-droite entraîné a procédé à une attaque physique à la suite de laquelle plusieurs antifascistes ont eu besoin de soins médicaux.
Aujourd’hui, le NSV est face à un nouveau tournant. La croissance électorale du Vlaams Belang est stoppée et, au sein des cercles nationalistes flamands, il y a la forte concurrence de la N-VA. Au NSV, il semble y avoir plusieurs courants, de ceux qui regardent explicitement vers la N-VA à ceux qui préconisent un cap plus radical et voient, avec non pas la N-VA mais plutôt Aube Dorée comme exemple. Lorsque Filip Dewinter a déclaré, sous la pression des médias, que des partis tels que le NPD et Aube Dorée sont une “caricature”, le président du NSV à Anvers de l’époque, ‘Stijn v Boebel’ (il n’ose pas écrire sous son nom propre) a alors réagi par un article dans lequel il déclarait le NPD ‘brothers in arms’ (frères d’armes). Ce n’est pas étonnant quand on sait que le NSV-Anvers a déjà organisé un meeting avec Udo Voigt du NPD.
Fin novembre 2013, le NSV a tenu un meeting international. Sous pression de la protestation, il n’a pas pu se tenir à l’université de Louvain et ils se sont ensuite rabattus sur Anvers. Ce n’était pas la première fois qu’un militant de Casa Pound était invité (une organisation italienne ouvertement fasciste), mais à ses côté se trouvait aussi un orateur de la Garde hongroise, une milice privée hongroise qui a été interdite. Même le Vlaams Belang trouvait le meeting à ce point discutable qu’il n’a pas mis l’infrastructure des locaux du parti à disposition.
La direction du parti ferme les yeux sur tout ça. Que voulez-vous d’autre comme réaction dans un parti dont les mauvaises langues de ses propres rangs affirment que quelques dirigeants fêtent, chaque année, l’anniversaire d’Hitler le 20 avril… La violence n’est pas un problème non plus, du moment qu’elle n’attire pas trop l’attention des médias, car cela pourrait effrayer des électeurs. Mais sans ça, pas de problème. L’ancien président du VB, Bruno Valkeniers disait encore en 2007 dans une interview : “Le Vlaams Belang a toujours recruté dans les sphères du NSV. Beaucoup de membres du Belang comptaient parmi mes amis pendant mes années NSV. C’est vrai que ce n’était pas des enfants de chœur. Mais bon, quand on est jeune, on veut que ça bouge. Alors, on se radicalise. Je n’ai pas honte de cette violence de rue occasionnelle.” Occasionnelle ?
Aujourd’hui, le VB est moins fort d’un point de vue électoral mais des exemples dans l’Europe entière montrent que l’extrême-droite et la droite populiste peuvent souvent connaître à nouveau une rapide progression. Il n’y a qu’à regarder ce qui se passe en France, où le Front National est, à nouveau, annoncé comme le plus grand parti dans les sondages. Sur fond de crise, un retour électoral n’est pas exclus, de même que l’apparition de groupes plus radicaux, comme les néonazis d’Europe de l’Est ou d’Aube Dorée en Grèce. Nous verrons peut-être les premiers signes de tels développements chez les jeunes générations. Ce n’est pas par hasard que les néonazis liés à Blood&Honour se rendent chaque année à la manifestation NSV.
Une campagne solide qui maintient une forte pression antifasciste est importante pour étouffer dans l’oeuf tout éventuel développement d’un courant plus ouvertement néonazi en le démasquant et en répondant par la mobilisation.
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France : L’interdiction des groupuscules néo-nazis est insuffisante pour les stopper
A la suite de l’assassinat du jeune militant antifasciste Clément Méric le 25 juin dernier à Paris, le conseil des ministres a officiellement dissous les groupes d’extrême droite ‘‘Troisième Voie’’ et ‘‘Jeunesses Nationalistes révolutionnaires’’ ainsi que l’association ‘‘Envie de rêver’’ ce mercredi 10 juillet. Leur chef de file, Serge Ayoub, avait cependant déjà annoncé leur autodissolution. S’il sera dorénavant plus difficile de s’organiser pour Serge Ayoub & Co, le terreau sur lequel peut se développer la violence fasciste reste bel et bien présent.
Le meurtre de ce jeune militant antifasciste n’était pas le premier cas de violence fasciste en France. Ces derniers temps, les néonazis se sont sentis encouragés par les grandes manifestations réactionnaires contre le mariage homosexuel et par la nouvelle croissance du Front National dans les sondages. Cela a conduit à une série d’incidents violents, l’assassinat de Clément Méric en constituant le point d’orgue.
La réponse des partis de l’establishment face à cette violence s’est limitée à lancer une procédure de dissolution des ‘‘Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires’’ (JNR), dont était membre le meurtrier présumé de Clément Méric. Les JNR constituaient le service d’ordre du mouvement ‘‘Troisième Voie’’, contre lequel avait également été lancé une procédure d’interdiction. Enfin, l’association ‘‘Envie de rêver’’, l’association exploitant le local du mouvement ‘‘Troisième Voie’’ a subi le même sort. Ces interdictions sont basées sur une loi datant de 1936 interdisant les milices privées, une mesure qui avait été prise à l’époque contre les milices fascistes. Ce n’est pas la première fois que des groupes d’extrême-droite sont interdits en France. Au cours de ces 77 dernières années, pas moins de 49 milices d’extrême-droite ont été interdites. Cette loi a par ailleurs également été utilisée contre des mouvements de la gauche radicale ou régionalistes.
Qui est Serge Ayoub ?
Le leader de ‘‘Troisième Voie’’, Serge Ayoub, n’est en aucun cas une figure irréprochable. Ayoub, alias ‘‘Batskin’’ (en raison de sa préférence pour les battes de baseball dans les confrontations avec ses opposants), est actif depuis le début des années ’80, notamment sur la scène rock néonazie. C’est à cette même période qu’a commencé à se développer le Front National, sous la direction de Jean-Marie Le Pen, et Serge Ayoub s’est impliqué dans les campagnes du FN. Parallèlement, on l’a retrouvé auprès de hooligans, et c’est sur cette base qu’il a constitué son propre groupe, les ‘‘Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires’’ (JNR), à la fin des années ’80. Ce groupuscule a travaillé un moment au sein du mouvement ‘‘Troisième Voie’’ (qui sera dissout en 1992 et relancé en 2010 sous l’impulsion de Serge Ayoub) et même avec le GUD (Groupe Union Défense, organisation étudiante d’extrême-droite). Ce dernier groupe, qui avait lancé ‘‘Unité Radicale’’ en 1998, a été dissous en 2002 après qu’un de ses membres ait tenté d’assassiner Jacques Chirac, à l’époque président français. Ce groupe a toutefois poursuivit ses activités et a fait son retour sur la scène publique en 2009.
Au début des années ‘90, le Front National ne rechignait pas à faire appel aux forces plus ouvertement néonazies comme les JNR, le GUD et autres. Tout en refusant d’endosser toute la responsabilité des actions de ces groupuscules, le FN leur a offert un espace pour développer leurs activités. En 1995, l’ancien dirigeant du FN Carl Lang (qui a depuis lors fondé le Parti de la France, PDF) avait même offert un emploi à Ayoub en tant que permanent du parti, ce que ce dernier a finalement refusé parce que le service d’ordre du FN aurait livré à la police les noms et adresses des skinheads néonazis suspectés d’avoir assassiné un immigré lors du défilé du 1er mai 1995 du FN.
Dans la seconde moitié des années ’90, Serge Ayoub a connu beaucoup de problèmes qui avaient bien moins à faire avec la politique. Il a ainsi été arrêté en mars 1997 pour possession et trafic de stupéfiants. Après quelques temps en prison, il a disparu à l’étranger pour rentrer en France au milieu des années 2000. Il a alors ouvert un bar et a tenté de récupérer ses anciens contacts. Des rumeurs disent que son séjour à l’étranger avait été décidé dans le cadre d’un accord avec la police.
C’est autour de son café parisien qu’il a finalement redonné une nouvelle vie aux JNR et à ‘‘Troisième Voie’’ en 2010. Afin de sortir du pur cadre parisien, il a cherché à nouer contacts avec des nationalistes régionalistes, avec un succès cependant modéré. Au début de cette année, une manifestation nationaliste ‘‘contre l’impérialisme’’ à l’initiative de Serge Ayoub avait réuni quelques centaines de manifestants, avec parmi eux une délégation belge du groupuscule francophone Nation et du groupuscule néerlandophone des Autonome Nationalisten (nationalistes autonomes). Serge Ayoub est quant à lui venu à Bruxelles pour participer au défilé du 1er mai de Nation.
Interdiction des JNR et de ‘‘Troisième Voie’’
L’interdiction des JNR et de ‘‘Troisième Voie’’ survenue cette semaine est la conséquence directe de l’assassinat de Clément Méric. Serge Ayoub avait lui-même décidé d’annoncer fin juin l’autodissolution de ces deux organisations. Maintenant que l’interdiction a été officiellement prononcée, il a décidé de se pourvoir en appel. La fermeture du local de ces néonazis à Paris entraînera sans aucun doute quelques problèmes pratiques pour l’organisation groupée autour d’Ayoub.
S’il y a bien quelque chose que démontre l’actualité récente des groupuscules néonazis français, c’est que des mesures d’interdiction sont insuffisantes pour briser leur activité. De nombreux groupes ont déjà été interdits sans que la violence néofasciste ne disparaisse pour autant. Pour peu que l’extrême-droite ‘‘officielle’’ passe à l’offensive – dans le cas des succès électoraux du FN ou des mobilisations réactionnaires contre le mariage homosexuel – les franches les plus radicales en profitent aussi pour se renforcer et pousser de l’avant leur violence.
Interdire ces groupes peut rendre plus difficile aux néonazis de s’organiser, mais cela ne change rien au terreau sur lequel ils peuvent se développer. Une société caractérisée par la crise et la dégradation sociale qui y est associée offre un espace d’intervention pour les groupes néonazis violents, qui essayent d’instrumenter la colère et le mécontentement en l’orientant non pas vers les véritables responsables de la crise et de l’austérité, mais vers des boucs-émissaires. En cas de poursuite de la casse sociale, ils peuvent même disposer d’un certain soutien dans la population (il suffit de penser à Aube Dorée en Grèce). S’en prendre aux raisons qui expliquent ce soutien signifie de construire une force capable de lutter efficacement contre le système de crise qu’est le capitalisme et pour une alternative.
Le premier test concernant ces mesures d’interdiction ne sera pas long à venir : une manifestation est annoncée à Paris le 14 septembre prochain contre ‘‘la répression socialiste’’. Cet événement est officiellement destiné à soutenir Esteban Morillo, le militant des JNR suspecté d’avoir tué Clément Méric et est à l’initiative d’un ‘‘collectif pour la défense des libertés publiques’’. Il s’agit très clairement d’une tentative visant à continuer à organiser les troupes néonazies de Serge Ayoub. Cette manifestation pourra-t-elle avoir lieu sans entraîner une forte mobilisation pour une contre-manifestation ?
Il faut aussi se demander ce qui va se produire avec les alliés d’Ayoub & Co dans notre pays. Le groupuscule Nation collabore très explicitement avec le mouvement construit autour de la figure d’Ayoub et était notamment particulièrement fier de pouvoir dire que le ‘‘leader’’ français avait participé au défilé marginal organisé par le mouvement le 1er mai. Nation, et d’autres, continuent d’ailleurs de défendre Ayoub et son groupe et essayent de parler de cette violence meurtrière de manière positive, ou au moins de la minimiser.
Contre des groupuscules comme Nation, la vigilance est nécessaire. Leurs alliés français ont clairement démontré qu’ils n’hésitaient pas à recourir à la violence contre leurs opposants. Leurs alliés grecs illustrent qu’une crise profonde peut leur fournir un certain soutien social. A nous d’éviter que des gens puissent se tromper de colère en menant une lutte résolue contre le capitalisme et en construisant une résistance collective de toutes les victimes du système – jeunes, aînés, hommes, femmes, travailleurs de toutes origines et de toutes langues,… – contre les responsables de la crise. Le problème, c’est le banquier, pas l’immigré !
- Dossier sur Serge Ayoub
- Dossier sur Serge Ayoub
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En flamand ou en français, il n’y a pas de langue pour combattre l’extrême-droite !
Le 7 mars se déroule traditionnellement la marche du NSV (Nationalistische StudentenVereniging), l’organisation étudiante officieuse du Vlaams Belang. Chaque année, notre campagne antifasciste flamande Blokbuster mobilise pour ne pas laisser la rue aux néofascistes en organisant une contre-manifestation antifasciste le même jour, dans la même ville. Nous trouvons de la plus haute importance d’également mobiliser les antifascistes francophones à cette occasion. Premièrement parce que le danger de l’extrême-droite flamande ne s’arrête pas à la frontière linguistique, ensuite parce que nous voulons aussi répondre au nationalisme avec une manifestation combative unissant des militants francophones et néerlandophones, et enfin parce que l’extrême-droite existe aussi du côté francophone – de même que le terreau sur lequel elle peut se développer – et que nous avons beaucoup à apprendre des méthodes et de la tradition uniques de Blokbuster.
Par Clément (Bruxelles)
Ces dernières années l’extrême-droite francophone s’est particulièrement distinguée par son manque de cadres et son incompétence. Le Front National a connu des sommets de ridicule et sa pitoyable saga (de même que celles de ses diverses émanations) a pu faire penser à certains que c’en était fini de l’extrême-droite. Mais un groupuscule, dont nous avons déjà parlé à plusieurs reprises, s’est patiemment construit sur une base plus solide et commence à réunir diverses personnalités d’extrême-droite (issues du vieux FN, de la Nouvelle Wallonie Alternative ou de Solidarité Unitaire) suite à son relatif succès électoral (1500 voix sur le district de Charleroi, 4.5% à Evere…).
Instrumentaliser la colère sociale
Nation est le groupe d’extrême-droite francophone qui a le plus consciemment tenté de détourné des thématiques sociales. Ses militants dénoncent ‘‘les médias-larbins du système’’, le ‘‘capitalisme néo-libéral destructeur’’ qui veut ‘‘faire de l’homme un mouton de la consommation et de la production, au profit des puissants et des multinationales’’ et réclament une ‘‘pension minimale décente pour nos retraités’’ tout en fustigeant les partis de l’establishment. Mais à partir de là, tous leurs efforts visent à détourner la colère des véritables responsables.
Nation pointe comme responsables le ‘‘mondialisme’’ (FMI, Union Européenne, multinationales) ainsi que ‘‘l’immigration sauvage qui (…) exerce un dumping sur le coût de la main d’œuvre et éjecte nos travailleurs du marché de l’emploi’’ Mais ce ne sont pas les immigrés qui sont responsables de ce dumping, pas plus qu’ils ne sont responsables des conditions de vie qu’ils fuient dans leurs pays d’origine. Mais Nation refuse de s’en prendre aux véritables responsables – le grand patronat – car son projet de société est basé sur le ‘‘solidarisme’’, une doctrine selon laquelle patrons et travailleurs d’un même pays auraient les mêmes intérêts (exit donc les syndicats et le droit de grève…) Nation fait ouvertement l’éloge d’Aube Dorée en Grèce, une organisation qui s’en prend physiquement aux immigrés, homosexuels, militants de gauches, syndicalistes,… Et laisse bien tranquille le monde patronal. Même si aujourd’hui les militants de Nation prennent bien garde à ne pas recourir à des méthodes violentes, le danger existe bel et bien.
Des emplois, pas de racisme
La meilleure manière de leur couper l’herbe sous le pied est de dénoncer leurs réels objectifs tout en ne les laissant pas seuls à dénoncer l’establishment capitaliste (politiciens, médias dominants,…) et l’effet néfaste des mesures d’austérité. C’est pourquoi nous jugeons de la plus haute importance de lier l’antiracisme et l’antifascisme à la question sociale et à la lutte contre la politique des partis établis. C’est ce que nous exprimons par notre slogan ‘‘Des emplois, pas de racisme, tout ce qui nous divise nous affaiblit’’
N’hésitez pas et participez à nos actions, prenez contact pour en savoir plus sur nos analyses, nos méthodes et notre histoire, et manifestez avec nous contre le NSV !
Manifestation anti-NSV :7 mars, 20h, à la gare de Louvain
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Pour une année de lutte, rejoins les Etudiants de Gauche Actifs !
En septembre, pour tous les étudiants, c’est la rentrée. Concrètement, cela veut dire des classes surpeuplées pour l’inférieur et des minervals élevés pour le supérieur. Du côté des jeunes travailleurs, la situation n’est pas plus rose. La flexibilité et les bas salaires constituent le quotidien de ceux qui ont trouvé un emploi. Tandis que l’allongement du stage d’attente pèse sur les plus malchanceux qui n’en ont pas. Partout à travers le monde, ce sont les jeunes et les travailleurs qui payent pour la crise. Dans un nombre croissant de pays (Québec, Grèce, Espagne, Israël…), les jeunes s’engagent de plus en plus sur le chemin de la lutte. C’est pour organiser les jeunes qui veulent participer à ces luttes dans leur université ou leur école que nous travaillons avec Etudiants de Gauche Actifs (EGA).
Par Julien, EGA-Bruxelles
Di Rupo prétendait que l’austérité était nécessaire afin d’assurer l’avenir des Belges. Mais de quels Belges parle-t-il exactement en attaquant notre sécurité sociale, nos pensions ? Face à cette situation, l’extrême-droite tente d’instrumentaliser la crise, les violences (notamment homophobes) se multiplient. Les problèmes sont nombreux, le système entier croule de partout. La planète connaît le même sort avec de plus en plus de catastrophes climatiques. Cela peut sembler tellement vaste que le fatalisme s’impose. Pas de ça avec EGA, nous voulons lutter contre tous ces maux en ciblant leur origine commune : le système de production capitaliste.
Contre l’extrême droite
Comme dans les années ‘30, l’extrême-droite s’empare du thème de la crise au service des plus riches et contre les immigrés. En Grèce, l’austérité imposée par tous les partis traditionnels et les banques a complètement détruit les services publics et les conditions de vie en général. Et c’est loin d’être fini… Le groupe néonazi Aube Dorée en rejette la faute sur les immigrés et l’establishment politique européen, en laissant les patrons et les actionnaires bien tranquilles. Faute d’une réponse suffisamment rapide, offensive et audacieuse de la part des véritables organisations de gauche, un tel discours a pu trouver écho parmi une partie de la population et conduire le parti néo-fasciste jusqu’au Parlement. Leur confiance ainsi renforcée a conduit ces organisations à des attaques très violentes contre les immigrés, les homosexuels et les militants politiques et syndicaux. En France, le Front National s’est vu ouvrir les portes de l’Assemblée Nationale.
En Belgique également, l’extrême-droite fait parler d’elle avec, par exemple, des membres du Vlaams Belang investissant une école pour fourrer de force des saucisses de porc dans la bouche de tous les enfants pour stigmatiser les musulmans. Du côté francophone, une manifestation contre l’islam a été organisée par les populistes de droite du Parti Populaire, avec la participation du groupuscule néonazi Nation. Bien que Sharia4Belgium ne regroupe que quelques illuminés réactionnaires et soit une organisation rejetée par l’écrasante majorité de la communauté musulmane, les médias et les politiciens n’ont pas hésité à fustiger l’ensemble de celle-ci en ramenant sur la table tous les préjugés contre les immigrés. Plusieurs politiciens évitent de parler du social en surfant ouvertement sur le sécuritaire et les idées racistes. Ils espèrent que personne ne rappellra l’impact de leurs trente années de politique néolibérales et leur écrasante responsabilité envers ces centaines de milliers de jeunes dits ‘‘immigrés’’ qui n’ont bien souvent pour seule perspective que le chômage ou des emplois précaires. A Molenbeek, le taux de chômage flirte avec les 40% parmi les moins de 26 ans. L’approfondissement de la crise renforcera leur isolement et leur aliénation ainsi que les remarques racistes. Pour l’élite de la société, ce n’est pas un problème mais une solution : diviser pour mieux régner.
Chaque année, le NSV (les jeunes du Vlaams Belang) organise une manifestation raciste et nationaliste dans une ville flamande. Depuis une vingtaine d’années, nous organisons systématiquement une contre manifestation non-violente avec l’objectif politique de donner une réponse sociale à la crise avec notre slogan ‘‘des emplois, pas de racisme’’ et l’objectif pratique de montrer que la rue appartient aux travailleurs et à leurs familles et non pas aux fachos.
Apprendre de l’expérience internationale
Les luttes internationales n’ont pas manqué l’an dernier ! Au Québec, la hausse du minerval a entraîné des centaines de milliers de jeunes dans la lutte contre le gouvernement Charest. Dans le sud de l’Europe, le mouvement des Indignés a popularisé l’idée que le pouvoir doit revenir dans les mains du peuple. Aux Etats-Unis, c’est le mouvement Occupy qui a connu un large succès parmi l’ensemble de la population. En France, la campagne de Mélenchon a montré qu’un programme de gauche radical pouvait rencontrer un soutien énorme. L’analyse de ces expériences et le développement de critiques constructives sur plusieurs aspects de ces différents processus sont au cœur de la réflexion politique d’EGA, afin de se préparer pour les combats à venir. Nous accueillons ainsi régulièrement des orateurs internationaux qui peuvent livrer un rapport issu du mouvement social lui-même, sans être contaminé par la propagande des médias dominants.
Etudiant – Travailleurs : Solidarité !
Le 30 janvier dernier, le pays était à l’arrêt, sous l’impact de la grève générale contre les premières attaques antisociales du gouvernement. Pour les médias dominants, c’était une grève de vieux, incapables de faire des sacrifices pour les générations à venir. Mais les jeunes aussi sont concernés par ces mesures ! Et pas qu’un peu ! Augmenter l’âge de la pension signifie plus de chômage pour les jeunes d’aujourd’hui, mais aussi un temps de carrière de plus en plus élevé. Ce jour-là, partout en Belgique, les Etudiants de Gauche Actifs ont fait la tournée des piquets dès avant la levée du jour pour exprimer leur solidarité et renforcer ces piquets. Ainsi, à Ixelles, à l’Athénée Charles Jansens, une trentaine de jeunes du secondaire s’étaient réunis sous la bannière d’EGA : ‘‘Nous voulons des écoles, du travail, un avenir!’’ Aucun autre piquet écolier n’a été vu en Belgique depuis les grèves de 1996 dans l’enseignement, et ils étaient déjà conséquents à l’époque. Cela montre le potentiel qui existe parmi la jeunesse quand elle est organisée !
Nous avons aussi organisé différents meetings au sujet de cette grève. A Gand, un débat a réuni partisans et adversaires de la grève générale devant 150 personnes. Le lendemain, Marc De Vos, un des orateurs libéraux, concluait sur tweeter que ‘‘Karl Marx était dans l’auditoire.’’
EGA a aussi été très présent dans les manifestations de solidarité avec les travailleurs d’ArcelorMittal et a mené une campagne de solidarité active à Liège, dans les rues et à l’université. A l’Université Libre de Bruxelles, l’entreprise sidérurgique voulait participer à une journée de l’emploi sur le campus. A l’initiative des Etudiants-FGTB, nous avons mené une action de protestation… et le géant du métal a refusé de venir !
Rejoins EGA !
Pour les Etudiants de Gauche Actifs, la crise économique, les divisions (racistes, sexistes, homophobes…), la destruction de l’environnement (catastrophe de Fukushima ou de BP dans le Golfe du Mexique…), etc. ont une même racine : le système économique à la base de la société, le capitalisme. Nous prenons le temps nécessaire pour analyser l’actualité et en discuter entre nous, car il est évident que sans comprendre le système, lutter contre lui ne pourrait être efficace. Mais nous ne sommes pas des intellectuels de gauche dans leur tour d’ivoire. Tout au long de l’année, nous sommes à l’initiative d’actions partout en Belgique (‘‘Occupy University’’ à Gand, Anvers, Louvain et Bruxelles en octobre dernier, actions antifascistes, rassemblement de solidarité avec les luttes à l’étranger, etc.) et participons à d’autres actions plus larges : mobilisations syndicales, manifestation antinucléaire suite à la catastrophe de Fukushima, pour défendre le droit à l’avortement, contre la répression policière…
Ne nous regarde pas : rejoins-nous ! Une nouvelle page de l’Histoire est en train de s’écrire, participe toi aussi à la lutte pour une autre société ! Seul, tu ne peux rien contre ce système. Mais ensemble et organisés, nous représentons une force qui est destinée à croître à mesure que la colère se développera face aux conséquences de la crise de ce système pourri.
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De Rostock à Aube Dorée
La violence raciste est de retour, sans avoir jamais véritablement disparu
Vingt ans après les émeutes racistes de Rostock, en Allemagne, les images d’attaques physiques contre les immigrés et ceux qui n’ont pas la ‘‘bonne couleur’’ sont de retour. Le championnat d’Europe de foot ne restera pas dans les mémoires que pour le sport, mais également pour ces images de hooligans néonazis. En Grèce, le parti néonazi Aube Dorée a obtenu 6,9% des voix, ce qui a renforcé la confiance de ses militants, avec à la clé une augmentation de leurs faits de violence.
Article par Geert Cool
Rostock. Violence d’extrême droite et protestations de masse
En août, nous commémorerons le triste 20e anniversaire des émeutes racistes de Rostock, en ex-RDA. Du 22 au 26 août 1992, plusieurs centaines de militants d’extrême-droite avaient attaqué la ‘‘résidence des tournesols’’ où habitaient des demandeurs d’asile à coup de pierres et de cocktails Molotov. Tout ce temps durant, le voisinage et la police n’avaient pas réagi, ou à peine.
Début des années ’90, les néonazis ont pu compter sur un soutien croissant parmi la jeunesse qui, suite aux diverses mesures néolibérales, voyaient leur avenir s’assombrir terriblement. En ex-Allemagne de l’Est, la restauration du capitalisme signifiait qu’une infime élite s’enrichissait à grande vitesse tandis qu’une portion grandissante de la population était confrontée au chômage et à la misère. C’était un terrain fertile pour le développement du racisme et des partis d’extrême droite, qui ont pu électoralement croître et être plus actifs dans la rue.
Les évènements de Rostock ont choqué. Il s’agissait de la pire agression raciste connue en Allemagne depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Auparavant, c’est à peine s’il y avait des réactions suite aux actes de violence racistes, mais l’horreur de Rostock a tout changé. Des milliers de jeunes et de travailleurs sont descendus dans les rues pour participer à des mobilisations antiracistes. Dans toute l’Europe, les sections du Comité pour une Internationale Ouvrière ont réagi par une large campagne antiraciste qui s’est notamment exprimée par une manifestation internationale, à l’initiative de notre campagne antifasciste flamande Blokbuster, en octobre 1992. Environ 40.000 personnes ont participé à cette manifestation des ‘‘Jeunes contre le racisme en Europe’’ dans les rues de Bruxelles.
Dans le cadre de ces protestations antiracistes, nous avons constamment souligné la nécessité de se baser sur une mobilisation active contre l’extrême droite, sur le terrain, afin de ne pas lui laisser d’espace d’activité, tout en défendant un programme social capable de s’en prendre au terreau sur lequel ces idées nauséabondes se développent. Cette approche est résumée dans le slogan ‘‘des emplois, pas de racisme’’. Ces 20 dernières années, chaque grand rassemblement néonazi en Allemagne a eu à faire face à une riposte antifasciste active. D’autre part, le développement du parti de gauche ‘‘Die Linke’’ a rendu plus difficile aux partis d’extrême-droite de se construire en détournant la colère de la population contre la politique antisociale des partis traditionnels.
Le duo de la mobilisation et de l’alternative politique
Les dramatiques évènements de Rostock se sont déroulés au moment où l’ancien Vlaams Belang, le Vlaams Blok, connaissait sa percée électorale en Flandre. D’importants enseignements peuvent être tirés des débats et actions de cette époque.
Sur base de mobilisations de masse, il a été possible de stopper les pires excès de la violence raciste de l’extrême droite. En Belgique aussi il était nécessaire de se battre sur ce terrain. Ainsi, dans les années 1996-97, à Bruges, les antifascistes et d’autres ont dû faire face aux agressions physiques de l’extrême-droite. Les mobilisations de masse ont brisé leur confiance, car ils n’ont même pas pu trouver de soutien parmi les électeurs d’extrême-droite pour leur ligne politique violente.
La progression électorale de l’extrême-droite est instable. En Allemagne, plusieurs partis de la droite radicale ont en grande partie disparu de la scène politique en raison de l’existence de ‘‘Die Linke’’, vers où s’exprime l’opposition à la politique de l’establishment. Mais si la gauche échoue à livrer une opposition cohérente tout en défendant une alternative crédible face à la faillite du capitalisme, l’extrême-droite restera une menace.
Europe de l’Est : La violence n’a pas disparu
En Allemagne de l’Est, le nombre d’agression a diminué. Les statistiques officielles parlent de 750 cas de violence fasciste en Allemagne en 2010, soit 15% de moins qu’en 2009. C’est tout de même encore deux incidents par jour! Le terreau sur lequel la violence et le racisme peuvent se développer existe encore, tout comme c’est le cas en dans le reste de l’Europe de l’Est.
A l’occasion du championnat d’Europe de foot, les groupes de hooligans néonazis polonais et ukrainiens ont fait parler d’eux. Les joueurs de couleur ont été hués, ce qui n’est pas une surprise au vu d’images de précédents évènements durant lesquels ces hooligans effectuaient le salut nazi ou agressaient des immigrés. La violence néonazie frappe d’ailleurs également la communauté LGBT (Lesbiennes, Gays, Bisexuels et Transgenres). Dans cette région, il est quasiment impossible d’organiser une Gay Pride. En Russie, ‘‘promouvoir’’ l’homosexualité, c’est même s’exposer à des sanctions.
En raison de la mauvaise réputation des supporters polonais et ukrainien, certains ont défendu que le Championnat se déroule ailleurs. Faire l’Autruche ne fait pourtant jamais disparaître un problème. Ce championnat aurait pu être l’occasion d’un débat sur le racisme parmi les supporters. Dans ce débat, les arguments moralisateurs ne sont d’aucun secours : on ne combat pas le symptôme d’un système pourri en condamnant la pourriture avec de belles paroles. Une campagne antiraciste basée sur l’explication que le racisme sert avant tout l’élite pour diviser la population qu’elle exploite aurait trouvé un bon écho.
Avertissements de Grèce
La profonde crise qui a happé la Grèce a ouvert des possibilités au parti ‘‘Aube Dorée’’ qui, le 17 juin, a réalisé un score de 6,9% et obtenu 18 parlementaires (une perte de trois sièges comparativement aux élections de mai). Ce parti a vu son soutien quelque peu faiblir après le mois de mai en raison de déclarations abominables et suite à diverses agressions physiques. Le dirigeant du parti, Mihaloliakos Nikos, a nié l’existence de l’Holocauste face aux caméras tandis que son collègue le parlementaire Iliad Kasidiaris a frappé ses contradicteurs de gauche lors d’un débat télévisé. Au port de Patras, un groupe d’immigrés a été attaqué à coups de cocktails Molotov par Aube Dorée.
Malgré ces incidents, le soutient électoral d’Aube Dorée est resté relativement stable. Son noyau actif est en plein essors et dispose d’un grand soutien parmi la police malgré les menaces ouvertes à l’encontre des immigrés, des homosexuels et des militants de gauche. Juste avant les élections, le porte-parole d’Aube Dorée a déclaré : ‘‘Si Aube Dorée est au Parlement, nous allons nous en prendre aux hôpitaux et aux crèches pour foutre dehors les immigrés et leurs enfants afin de libérer la place pour les Grecs.’’ Ils ne remettent donc pas réellement en cause la logique d’austérité et préfèrent affronter les déficits budgétaires en privant les immigrés de leurs droits.
Ce danger doit être pris au sérieux. La large participation aux campagnes de Syriza ainsi que l’opposition active à la politique d’austérité doit être couplée à l’organisation de la défense du mouvement contre la violence d’extrême-droite. La gauche et les syndicalistes doivent constituer des comités antifascistes dans les quartiers et sur les lieux de travail afin de riposter contre la violence fasciste tout en participant à l’organisation de la lutte contre l’austérité.
Et chez nous, quel est le danger ?
L’extrême-droite est actuellement dans une position plus défensive en Belgique, très certainement dans le cas du Vlaams Belang, mais le rapide retour du Front National sur le devant de la scène en France illustre que cela peut n’être que temporaire. Et tout progrès de l’extrême-droite aux élections renforce inévitablement, dans le pays-même et ailleurs, la confiance des néo-fascistes qui veulent aller plus loin pour imposer leur vision par la violence. Le groupuscule néonazi francophone Nation ne l’a pas caché dans son article consacré au succès d’Aube Dorée et intitulé ‘‘La radicalité, ça paie !’’
Si la colère contre les politiciens et leur politique antisociale ne s’exprime pas par une résistance active avec manifestations, campagnes de terrain, grèves,… ainsi qu’avec le développement d’un prolongement politique large et démocratique, alors la frustration peut être instrumentalisée par l’extrême-droite. L’austérité, c’est encore moins d’emplois, de logements sociaux, de services publics,… Répondre à cette situation signifie de lutter ensemble, que l’on soit ou non d’origine immigrée, pour arracher les moyens nécessaires des mains de l’establishment capitaliste.
C’est pourquoi nos campagnes antiracistes ne se limitent pas au rejet du racisme. L’infime minorité capitaliste à la tête de la société a besoin de diviser la majorité qu’elle exploite sur base de racisme, de sexisme, d’homophobie,… au besoin par la violence. Il nous faut une alternative au capitalisme, ce qui selon nous ne peut être que le socialisme démocratique, une économie où la satisfaction des besoins de tous seront centraux et non la soif de profits d’une élite de parasites.
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Namur : Succès remporté par le rassemblement antifasciste
Une soixantaine de personnes étaient présentes aujourd’hui à Namur pour protester contre l’extrême droite. Le groupuscule Solidarité Unitaire avait en effet voulu manifester dans la capitale wallonne et diffuser son message de haine et de division. En définitive, ce rassemblement réactionnaire avait été interdit, mais les différentes organisations signatrices de l’appel antifasciste avaient voulu maintenir leur rassemblement, avec un certain succès compte tenu du court délai de mobilisation, de l’heure matinale du rassemblement et du fait que l’interdiction de cette contre-manifestation avait été annoncée dans la presse.
Par Nico
- Appel commun des Indignés – PSL – JOC – jeunes FGTB – PTB
- Le problème c’est les banquiers, pas les immigrés !Tract des Etudiants de Gauche Actifs
Derrière Solidarité Unitaire, on retrouve pour responsables deux anciens du Front National, fiers d’avoir entre autres été récemment soutenir la campagne de Marine Le Pen en France. Leur approche se veut plus sociale que ce que l’on entend habituellement de l’extrême-droite. Solidarité Unitaire se positionne ainsi contre l’austérité, contre les attaques sur les chômeurs,… mais ne fait en réalité que stigmatiser l’immigration. Ainsi, sur leur site, si on peut lire qu’il faut dire ”stop à l’austérité dans notre pays au profit du dictat financier de l’Europe”, on ne trouve comme manière de dégager des moyens que de ”diminuer le coût de l’immigration afin de préserver un capital pour nos citoyens.” A l’opposé de cette recherche du bouc émissaire, selon nous, il faut s’en prendre aux véritables responsables de la crise sociale et économique que nous connaissons. Le problème, c’est le banquier, pas l’immigré !
Dans le contexte de crise actuel, il est possible que de nombreuses personnes se trompent de colère. Un espace existe pour que l’extrême-droite puisse réussir à s’attirer un certain soutien en instrumentalisant la frustration qui existe face aux diverses pénuries croissantes (manque d’emplois, de logements sociaux, de places dans les crèches,…) ainsi que la colère qui se développe contre l’establishment (dont font partie les partis traditionnels).
La meilleure manière d’assurer que suffisamment de moyens existent pour répondre aux besoins sociaux n’est pas de diviser la population pour qu’elle se batte pour les et miettes qui tombent du festin capitaliste : il faut lutter ensemble – jeunes, moins jeunes, travailleurs avec ou sans emploi, d’origine belge ou immigrée, hommes et femmes – pour récupérer toutes les richesses que nous produisons et qui nous sont volées. Pour le PSL, cela signifie concrètement de lutter pour une société où les secteurs clés de l’économie sont retirés des mains du privés et placés sous le contrôle démocratique des travailleurs. Nous voulons poursuivre ce débat et les discussions sur la meilleure façon d’en finir avec l’extrême-droite avec les participants à ce rassemblement, parmi lesquels des militants des Jeunesses Ouvrières Chrétiennes, des Jeunes FGTB, de la CSC, du Parti Communiste, du PTB ou encore du groupe des Indignés de Namur.
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Le problème c’est les banquiers, pas les immigrés !
Stop au racisme !
Suite à la crise et à la politique d’austérité, beaucoup de jeunes se retrouveront dans la galère. Niveau études, ce sont des classes surpeuplées dans un enseignement de moindre qualité qui nous attendent dans le secondaire, tandis qu’il faudra payer plus cher les droits d’inscription dans le supérieur. Niveau ‘‘marché de l’emploi’’, le stage d’attente est dorénavant allongé : décrocher un job relève désormais du parcours du combattant. Et lorsque l’on parle d’emplois, on parle surtout de jobs précaires et flexibles qui rendent presque impossible de se consruire un avenir. La politique antisociale des partis traditionnels, c’est plus de chômage, de précarité, d’exclusion et de pauvreté parmi la jeunesse.
Tract d’été des Etudiants de Gauche Actifs
En France et en Grèce, le Front National et les néonazis d’Aube Dorée pénètrent dans les parlements. En Flandre, les néofascistes du Vlaams Belang ont forcé des enfants d’une école primaire à manger des saucisses ‘‘pur porc’’. A Bruxelles, les petits réactionnaires populistes de droite du Parti Populaire ont fait une marche raciste et xénophobe en compagnie des néonazis de Nation. Etc. L’extrême droite instrumentalise l’absence de perspective et la frustration engendrée par la crise pour répandre leurs messages de haine. Ils pointent du doigt les immigrés, les musulmans, les ‘‘Wallons’’, les ‘‘Flamands’’, ou encore les syndicalistes combatifs afin de dévier l’attention des véritables responsables du déclin social: les banquiers et les 1% les plus riches qui spéculent et détruisent notre avenir.
Les De Wever, Renders & Co suivent les traces de Sarkozy et de la ‘‘droite décomplexée’’ avec un discours raciste et populiste: diviser pour mieux régner. A l’image de leur modèle, Margaret ‘‘la Dame de Fer’’ Thatcher, ils rêvent de briser la résistance des jeunes et des travailleurs afin d’imposer des décennies d’austérité à la grecque. Les sociaux-démocrates et les verts sont également contaminés par le dogme néolibéral, tout juste s’arrangent-ils pour que l’emballage soit un peu plus social. Jeunes et travailleurs, belges et immigrés, Wallons et Flamands, ne comptons que sur notre force collective pour résister à l’offensive de l’austérité !
Résistance contre le chômage et la précarité
Après une manif régionale à Bruxelles des syndicats ayant rassemblé 1500 personnes en juin, une manifestation nationale aura lieu en septembre contre les attaques du gouvernement Di Rupo contre le système de chômage et pour une flexibilisation accrue du marché du travail. Les jeunes, déjà les plus fortement touchés par le chômage, en seront les principales victimes. L’allocation de cohabitant diminuera jusqu’à 483 euros et l’allongement à 12 mois du stage d’attente plongera des dizaines de milliers de personnes sous le seuil de pauvreté. EGA mobilise les jeunes aux côtés des syndicalistes pour s’en prendre au chômage, pas aux chômeurs, et mettre un terme à l’avalanche d’austérité.
Résistance contre les catastrophes nucléaires et climatiques !
Le désastre nucléaire de Fukushima illustre les conséquences qu’a la logique de course au profit du privé sur nos vies et notre environnement. Pour EGA, il faut retirer le secteur de l’énergie des mains du privé et le placer sous contrôle public. EGA mène chaque année campagne à la rentrée en vue de la manifestation de début décembre organisée par la coalition climat des ONG en défense de l’environnement.
Résistance contre le racisme et l’extrême-droite !
Chaque année, nous organisons avec la campagne Blokbuster une manifestation nationale d’un bon millier de jeunes contre la marche de la haine du NSV (organisation étudiante du Vlaams Belang). La prochaine contre-manifestation se déroulera en mars prochain, à Louvain. Soyons beaucoup plus nombreux qu’eux ! Nous menons aussi campagne contre l’extrême droite francophone et en faveur de la régularisation des sans-papiers, notamment avec la manifestation contre le centre fermé de Vottem (à Liège), qui se tiendra début avril.
Résistance contre le sexisme et l’homophobie !
Sexisme en rue, à l’école, sur les festivals,… le combat est loin d’être terminé. Idem pour le mouvement LGBT avec l’augmentation de la violence homophobe. Pour la première fois en trois ans, la marche réactionnaire contre le droit à l’avortement, les droits des femmes et des LGBT a été moins nombreuse que celle des pro-choix. Nous ne devons pas nous arrêter là, mais construire la résistance pour stopper leurs intimidations contre les femmes devant les centres d’avortement ainsi que leurs propos et actes homophobes avec une manifestation massive le 23 mars prochain !
Résistance contre l’europe des banques et des multinationales !
L’Union Européenne, la Banque Centrale Européenne et le Fonds Monétaire International (la troïka) essayent de forcer les jeunes et les travailleurs à accepter une diminution très forte de leur niveau de vie au lieu de s’en prendre aux véritables responsables de la crise. Partout en Europe, les gouvernements ont sauvé les énormes profits des banques et des multinationales et mènent maintenant une politique d’austérité qui approfondit la récession et augmente la pauvreté. Contre l’Europe du Capital, participe avec EGA au mouvement de solidarité avec le peuple grec, au mouvement Occupy/Indignés,…
Rejoins EGA !
EGA, c’est quoi ?
Les Etudiant de Gauche Actifs constituent une organisation de gauche par et pour les jeunes, active dans ton école, ta haute-école, ton université, ton quartier ou ta ville. Nous nous rassemblons, discutons des idées, organisons des actions et mobilisons.
Crise, sous-financement de l’enseignement, précarité, austérité, racisme, sexisme, danger nucléaire, guerre,… Nous lions tous les problèmes auxquels nous sommes confrontés au capitalisme, un système qui est basé sur la course au profit à court terme pour une petite élite.
EGA est présent en Flandre, en Wallonie et à Bruxelles car nous nous opposons à la logique de surenchère communautaire des politiciens traditionnels.
EGA fait partie d’une organisation de jeunes, ISR (International Socialist Résistance), présente dans plus de 40 pays et sur tous les continents. Cela nous permet de tirer les leçons des révolutions en Afrique du Nord et au Moyen-Orient avec des jeunes tunisiens impliqués dans les événements ou encore d’apprendre de nos interventions dans les mouvements de masses en Grèce, en Espagne, au Québec,…
Partout, nous lions les luttes des jeunes à celles des travailleurs et de leurs organisations syndicales, car ce sont ceux qui produisent les richesses et détiennent la position clé pour renverser la société capitaliste.
EGA lutte quotidiennement parmi la jeunesse afin construire un monde où la production et toute la société sera démocratiquement gérée et contrôlée par les organes issus des luttes de masse des travailleurs et des jeunes eux-même. Cette démocratie réelle pourra alors satisfaire les besoins de tous et leur épanouissement dans une société socialiste démocratique. Rejoins-nous !
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France : Les élections législatives renforcent le Parti Socialiste au pouvoir
La France sort d’une période profondément marquée d’un côté par les élections, de l’autre par l’aggravation de la crise économique. Bien que la France n’en est pas encore à subir la sinistre austérité qui frappe d’autres pays de l’Union européenne, les inégalités de classe et la polarisation sociale se creusent et ont été reflétées lors des dernières élections.
Gauche Révolutionnaire (CIO-France)
Après avoir fait dégager l’ancien président Nicolas Sarkozy et l’UMP (l’Union pour un Mouvement Populaire), les électeurs les ont giflés une fois de plus en donnant une majorité absolue au Parti Socialiste. Ainsi, bon nombre d’influents ministres du précédent gouvernement ont perdu leur siège à l’Assemblée Nationale. Après l’ère Sarkozy, la droite traverse maintenant une crise idéologique majeure combinée à une crise de direction. L’UMP sort de cette échéance électorale avec une capacité sérieusement affaiblie de pourvoir se présenter comme une opposition au gouvernement de Jean-Marc Ayrault (nommé Premier ministre par le nouveau président François Hollande). C’est d’ailleurs encore plus le cas au vu de la position renforcée du Front National.
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L’orientation plus droitière que Sarkozy a essayé d’impulser à l’UMP a rencontré la résistance de l’aile conservatrice plus traditionnelle, plus gaulliste, de l’électorat. Sarkozy a également perdu le soutien d’une section des électeurs de la classe ouvrière dont le niveau de vie a gravement été compromis durant ces cinq dernières années. Sarkozy et l’UMP ont aussi été puni par ceux qui préfèrent ‘‘l’original à la copie’’ et ont voté pour la dirigeante du Front National Marine Le Pen aux élections présidentielles et pour les candidats du FN aux élections législatives.
Le PS, qui a remporté toutes les élections nationales ces cinq dernières années, apparaît renforcé. Certains éléments contredisent toutefois cette observation. Bien que le PS soit sorti grand vainqueur des élections, son score à l’élection présidentielle du mois de mai ne représente pas une si grande victoire sur l’UMP. De plus, la faible participation aux élections législatives (43% lors du second tour) confirme le rejet croissant éprouvé par la population envers les politiciens traditionnels et leur opportunisme. Cela laisse à penser que ce vote a avant tout revêtu un caractère très tactique de la part de la classe ouvrière.
En dépit de son passé, le PS n’a pas encore pleinement exposé sa véritable nature aux yeux de la population, il n’y a pas encore une compréhension généralisée que c’est l’austérité qui sera appliquée par ce gouvernement. Sa politique locale repose sur des relations de népotisme, ce qui confirme localement l’embourgeoisement total du parti, même s’il peut encore recevoir le soutien passif de certaines couches de la population, surtout dans les banlieues. Mais ce répit ne saurait être que temporaire puisque la marge de manœuvre du gouvernement, tant économiquement que politiquement, est limitée.
La France connait une situation politique unique en Europe. Alors que de nombreux pays sont gouvernés par des coalitions instables, la France a à sa tête un PS hégémonique qui contrôle la présidence, le Sénat, l’Assemblée ainsi que la plupart des régions et des conseils locaux. Cela masque toutefois un intelligent jeu d’équilibre entre les différentes tendances du PS et ses alliés dans la composition du gouvernement. Cela sera sérieusement mis à l’épreuve dans ce contexte où la crise économique s’approfondit de jour en jour. Nous en avons d’ailleurs déjà eu un aperçu au cours de la récente controverse concernant la baisse du nombre de travailleurs du secteur public.
Des mesures telles que la limitation du salaire des ministres et du président, l’augmentation de l’impôt sur la fortune (l’ISF) et d’autres taxes sur les riches, etc., sont positivement observées par la plupart des gens. D’autres mesures comme l’augmentation du salaire minimum – même limitée à ce point (2%, soit 21,5 euros) – l’engagement de 1.000 enseignants dans l’enseignement primaire et l’annonce de pourparlers avec les syndicats seront aussi favorablement considérées, même si certains travailleurs trouvent tout cela nettement insuffisant. Le fait est que cette approche se situe loin des violentes attaques du gouvernement Sarkozy et de son arrogance.
D’autre part, bien que le PS ait tenté de capitaliser la colère contre la grave destruction d’emplois dans le secteur industriel connue sous la présidence de Sarkozy (300.000 emplois perdus en cinq ans), le gouvernement de Hollande sera très rapidement confronté à une situation similaire. Les plans de restructuration, les licenciements et les fermetures d’usine qui avaient été retardées par les entreprises privées en raison de la période électorale sont maintenant de retour à l’ordre du jour.
La prochaine étape pour le gouvernement Ayrault est la présentation du budget 2013 à l’automne. Peu de chiffres sont sortis mais avec l’objectif de réduire le déficit budgétaire à 3% en 2013, chacun sait que le secteur public sera l’objet d’attaques, sans doute en commençant par le système de soins de santé.
Ces élections ont également été marquées par un vote élevé pour le FN, qui a récolté 10% en moyenne avec des pics atteignant près de 20% dans ses bastions. Bien que le parti d’extrême-droite ait perdu un peu de soutien électoral comparativement à l’élection présidentielle, il a réussi à gagner deux députés. Sans ignorer le facteur du racisme, il est clair que ce résultat exprime le rejet des partis traditionnels associés à l’establishment (l’UMPS, comme le dit le FN). L’accent mis sur les questions sociales par le FN a également joué un rôle important dans ce vote.
Le Front de Gauche a obtenu un résultat légèrement meilleur que celui dont avait bénéficié le seul Parti communiste (PCF) il y a cinq ans de cela (677.000 voix de plus), mais c’est bien plus bas que le score obtenu aux élections présidentielles (1.115.600 voix comparativement à 3.984.800 aux présidentielles). Ces élections, cependant, étaient particulièrement antidémocratiques, et le Front de Gauche a vu son groupe parlementaire s’affaiblir. Ce soutien électoral plus faible par rapport aux élections présidentielles est en partie dû à la campagne plutôt classique du Front de Gauche, de type PCF, sans critiques conséquentes contre le PS. La dynamique autour de la campagne de Jean-Luc Mélenchon est retombée, à l’exception de Hénin-Beaumont, dans la région du Nord-Pas-de-Calais, où Mélenchon a affronté Le Pen. Là-bas, la déception a été palpable puisque le vote pour Le Pen a été très important et que Mélenchon a été éliminé au premier tour. Dans cette circonscription, marquée par le chômage et les emplois précaires, le FN a été capable d’exploiter la misère sociale qui a augmenté nombre d’années durant. Étant donné le faible poids du Front de Gauche au parlement, et le fait que le PS dispose d’une majorité parlementaire sur ses seules forces, la possibilité d’une entrée du PCF au gouvernement est pour le moment exclue. La probabilité d’une scission au sein du Front de Gauche n’est donc pas immédiatement posée.
Le vote obtenu par Lutte Ouvrière et le Nouveau Parti Anticapitaliste n’a même pas atteint 1%. L’extrême-gauche paye le prix fort pour des années de sectarisme et d’analyses erronées de la situation ainsi que pour son incapacité à exprimer les besoins et les aspirations des travailleurs et des jeunes sur la scène politique.
Bien que relativement calme en France pour l’instant, la situation économique est instable à l’échelle européenne. Des pays comme la Grèce et l’Italie sont aux prises avec des situations critiques et les banques françaises sont impliquées dans des investissements pourris avec ces pays, ce qui pourrait les affecter assez vite. Il est probable que les petites réformes et les quelques gestes sociaux de la nouvelle administration Hollande cèderont rapidement place à l’austérité. Dans cette situation très changeante, la conscience des masses va rattraper son retard. De nouvelles opportunités se présenteront pour construire une force réellement socialiste de masse afin d’armer le mouvement ouvrie
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France : L'austérité rejetée dans la seconde économie de l'eurozone
A côté de la profonde défaite des partis pro-austérité en Grèce, la chute de Sarkozy constitue un réel tournant dans la situation actuelle. Il s’agit du huitième gouvernement européen à subir le désaveu des urnes au cours de cette dernière année, mais les élections françaises et grecques ont représenté jusqu’ici les plus grands rejets de l’austérité sur le plan électoral.
Par Robert Bechert, CIO
A la suite de la lutte massive sur les pensions en 2010, nombreux ont été les travailleurs, les jeunes et les membres d’autres couches de la société à concentrer leur attention sur l’effort visant à assurer que Sarkozy ne soit pas réélu. Mais cette élection présidentielle n’a pas seulement été un vote de nature à rejeter la personne de l’arrogant président Nicolas “bling-bling” Sarkozy. Il s’agissait également d’un rejet des attaques antisociales qu’il a lancées ainsi que d’une réaction face à l’impact croissant de la crise économique sur les travailleurs et leurs familles.
Tous les sondages illustrent que la plupart des gens n’ont pas voté pour Hollande en soutien à sa politique, mais principalement pour faire dégager Sarkozy. Cependant, la victoire de Hollande a suscité de grands espoirs et de grandes attentes, pas seulement en France mais internationalement, que le temps est venu pour un changement face à la politique d’attaques contre les conditions de vie. Hollande a dû refléter cette pression anti-austerité et anti-riches issue de la base de la société, en faisant quelques promesses limitées et en se présentant comme le candidat de la croissance et contre l’austérité. Le programme de Hollande comprend ainsi une augmentation du salaire minimum, la création de 150.000 emplois pour la jeunesse, l’engagement de 60.000 nouveaux enseignants et de 5.000 policiers supplémentaires.
Hollande a continué à jouer sur le thème pro-croissance lors de la soirée des élections, en disant que “L’austérité ne peut plus être la seule option” dans son discours à Tulle. Plus tard cette nuit-là, Place de la Bastille à Paris, Hollande a affirmé à la foule que “Vous êtes plus que des gens qui veulent un changement. Vous êtes déjà un mouvement qui se lève en Europe et peut-être dans le monde.” Cela est vrai, mais Hollande peut-il donner ce que des millions de gens réclament et espèrent ?
Que fera Hollande?
L’étroite victoire de Hollande est la première pour le Parti Socialiste (PS) aux élections présidentielles depuis 24 ans, et il s’agit seulement de la troisième (après 1981 et 1988) dans toute l’histoire de la cinquième République, créée en 1958 par Charles de Gaulle. Mais, en dépit du nom du parti de François Hollande, ce n’est en rien une victoire pour le socialisme pour ce qui est de rompre avec le capitalisme. Bien que, dans sa campagne, Hollande ait déclaré que son “réel adversaire” était le monde de la finance, il n’y oppose aucune résistance réelle sous la forme de la nationalisation des banques, des sociétés financières et des grandes entreprises. Le PS est un parti qui cherche avant tout à fonctionner au sein même du système capitaliste. Cela ne signifie toutefois pas que de nombreux partisans du PS ne veulent pas de changement, de réformes, etc., cela veut simplement dire que ce n’est pas un parti qui a vocation d’en finir avec le capitalisme. Le fait que Dominique Strauss-Kahn, l’ancien chef millionnaire du Fonds Monétaire International, ait été avant sa disgrâce publique le candidat favori du PS en dit énormément au sujet de l’attitude du PS face au capitalisme.
A côté de ses promesses d’améliorations, Hollande a également un plan de réduction du déficit similaire à celui de Sarkozy. Tant les plans économique de Hollande que ceux de Sarkozy sont basés sur une perspective de croissance de 1,7% pour l’an prochain. Cela est incroyablement irréaliste; une croissance plus faible ou aucune croissance du tout augmentera la pression des marchés sur Hollande.
Le nouveau président français propose également d’introduire une obligation constitutionnelle pour que le gouvernement ait systématiquement un budget en équilibre et d’éliminer le déficit budgétaire d’ici 2017, un an plus tard que ce que Sarkozy avait prévu de faire. Hollande cherche à y parvenir en sauvant 100 milliards d’euros par an avec un mélange d’augmentation de taxes et de coupes dans les dépenses, sans qu’il ait précisé de quelles coupes il allait être question.
Le potentiel pour des luttes de masse
Cependant, de nombreux capitalistes craignent que Hollande soit sous pression pour au moins limiter les mesures d’austérité et l’impact de la crise sur la population. Sa victoire a renforcé la confiance des travailleurs, des jeunes et de tous les opprimés de France en montrant que la droite pouvait être vaincue.
Cela peut réveiller les traditions françaises de mouvements de masse par en-bas, ce qui pourrait forcer Hollande à aller plus loin que ce qu’il avait initialement prévu.
De telles luttes pourraient surgir tant sur base de revendications offensives, comme pour des augmentations de salaire, que sur base de riposte contre des attaques, comme des licenciements. A la fin du mois d’avril déjà, Hollande avait averti dans Le Parisien que sa victoire pourrait voir une vague de licenciements en disant que des décisions prises puis postposées pour après les élections, et que ce n’était pas l’arrivée du PS au pouvoir qui allait être responsable de ces licenciements. Dans une interview radio, Hollande a déclaré qu’il ne laisserait pas ce cortège de licenciements prendre place. Les travailleurs qui auront à faire face à ces attaques tenteront de pousser Hollande à respecter ces phrases et lui demanderont de soutenir leurs luttes.
Hollande et son gouvernement feront face à une grande pression des marchés pour résister à l’opposition aux coupes budgétaires et aux revendications visant à améliorer les conditions de vie des masses. Mais en même temps, les divisions deviennent de plus en plus grandes entre les divers gouvernements et capitalistes concernant ce qu’il convient de faire. Même les agences de notation reflètent cette situation en demandant plus de coupes et en se plaignant simultanément que trop peu est fait pour stimuler la croissance économique, ce qui est nécessaire pour rembourser les dettes.
L’Europe de l’après "Merkozy"
Merkel et le gouvernement allemand ne veulent pas changer de position, tant face à l’appel de Hollande pour renégocier le traité fiscal européen que sur la Grèce, mais ils pourraient être forcés d’accepter certaines mesures destinées à atténuer l’impact de la crise. De tous les dirigeants des principaux pays européens qui étaient en fonction au début de la crise, seule Angela Merkel est restée au pouvoir, et il est loin d’être garanti que l’actuel gouvernement allemand survivra aux prochaines élections de septembre 2014. Le jour de la victoire de Hollande, Merkel a parlé des “deux faces d’une même pièce – le progrès n’est possible qu’avec des finances solides, en plus de la croissance”.
Un commentateur allemand a écrit “Jusqu’à présent, il n’existe pas d’alternative réaliste sur la table autre que de consolider les budgets nationaux en coupant dans les dépenses. Hollande devra reconnaître ce fait dans un délai de quelques courtes semaines. Le nouveau dirigeant français aura un paquet de stimulus en tant que complément au pacte fiscal, mais rien de plus. Cette concession a déjà été acceptée par la chancelière allemande, par le président de l’euro-goupe Jean-Claude Juncker et par le président de la Banque Centrale Européenne Mario Draghi.”
La pression combinée de la crise économique et de la base de la société constituera un test pour Hollande. Sans défier le capitalisme, Hollande pourra être poussé dans des directions contradictoires, forcé à la fois de faire des concessions sociales et de mener des attaques contre le niveau de vie de la population.
Après les leçons tirées de l’expérience du PS au pouvoir entre 1981 et 1995 sous la présidence de François Mitterrand et entre 1997 et 2002 avec le gouvernement Jospin, de nombreux travailleurs en France n’accordent plus aucune confiance au PS, un parti qui est considéré par cette couche radicale comme un administrateur du capitalisme. Le gouvernement de Jospin a ainsi plus privatisé que les gouvernements de la droite traditionnelle. Cela explique l’enthousiasme extraordinaire qui a soutenu la candidature de Jean-Luc Mélenchon et du Front de gauche aux premier tour des présidentielles, dont le slogan de “Prenez le pouvoir” a été vu comme un cris de ralliement contre la classe dirigeante. Cette atmosphère anticapitaliste a aussi été illustrée par les plus de 600.000 personnes qui ont voté au premier tour pour le Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) et pour Lutte Ouvrière (LO), qui se situent à la gauche du PS et du FdG. De façon similaire, le soutien électoral était déjà large en 2002 et en 2007 pour LO et la LCR qui se situaient à la gauche de la ‘Gauche Plurielle’ de Jospin (qui rassemblait le PS et le Parti Communiste).
Dans cette période trouble, Hollande va être testé. Mais comme son gouvernement se base sur le capitalisme, il est inévitable qu’un processus similaire à celui connu avec Jospin se développe après un certain temps. Mais en ces temps de crises sociale et économique, cette période sera bien plus agitée qu’alors. Nous assiterons à une radicalisation à gauche, avec l’opportunité de construire une nouvelle force capable de rompre avec le capitalisme. Mais des opportunités existent aussi pour le Front National qui recourt à un mélange de populisme, de racisme et de nationalisme afin de se construire un soutien. Une nouveau chapitre s’ouvre en France et en Europe.
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Présidentielles françaises : Le volcan de la lutte des classes est prêt à entrer en éruption
Le dimanche 18 mars, anniversaire de la Commune de Paris, environ 100.000 personnes (selon la plupart des rapports des médias), chantant l’internationale, ont défilé dans les rues de Paris en réponse à l’appel du candidat du Front de Gauche Jean-Luc Mélenchon, pour ‘‘reprendre la Bastille’’ et commencer ‘‘une insurrection civique’’. Son discours à la manifestation était plein de références au passé révolutionnaire de la France. Mélenchon a déclaré que sa campagne électorale veut ‘‘ouvrir une brèche vers le volcan français que toute l’Europe attend’’.
Leila Messaoudi, Gauche Révolutionnaire (CIO-France)
Si, en surface, la France apparait relativement calme en comparaison à la tempête de manifestations massives et de grèves générales qui se déroulent en Europe du Sud, la lave du ‘‘volcan’’ français est en fait bouillonnante. Les élections présidentielles de cette année prennent place dans un contexte de colère sociale imminente et contagieuse. En ce moment, ceci s’exprime dans un paysage électoral très polarisé, dont le rassemblement du Front de Gauche dans la capitale ce dimanche est la plus récente manifestation, et certainement la plus claire.
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Au moment ou nous publions cet article sur la France, les tueries récentes à Toulouse ont laissé le pays en état de choc. Le CIO condamne sans ambigüité ces actes terribles. Ces évènements peuvent potentiellement affecter le développement de la campagne électorale des présidentielles dans les prochains jours et semaines. L’article ci-dessous, qui aborde la question des élections, a été écrit avant ces meurtres dramatiques.
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Il est significatif que tous les candidats à l’élection présidentielle aient été vus à la télé devant ou à l’intérieur des grandes entreprises industrielles qui risquent la fermeture, entourés par les médias. Jamais auparavant les candidats à la présidence n’avaient visité si volontiers les usines de tout le pays, dans l’espoir de se montrer comme des politiciens ‘‘amis de la classe ouvrière.’’
Polarisation
Les gens qui veulent voter n’espèrent pas nécessairement de grands changements, mais beaucoup veulent utiliser ces élections pour se débarrasser du détesté Sarkozy et lui donner une bonne claque. C’est pourquoi le camp de Sarkozy essaie désespérément de remonter ses faibles scores dans les sondages, dont en essayant de jouer la carte du « peuple » contre ‘‘l’élite’’ – comme si Sarkozy ne faisait pas partie intégrante de l’élite – en multipliant les provocations racistes pour regagner des électeurs au Front National, ou en prenant un virage populiste ‘‘anti-Europe’’ et protectionniste, après avoir profilé le président en sauveur du continent et de la monnaie commune.
En 2 ans, Sarkozy a perdu de plus en plus de soutien de la population. Depuis son élection en 2007, sa base électorale s’est drastiquement rétrécie. Attirer une partie entière de l’électorat de la classe ouvrière vers sa campagne, comme il a su le faire il y a 5 ans, parait à présent infaisable. Dans un sondage début février, seuls 12% des travailleurs manuels et 17% des employés ont déclaré qu’ils voteraient pour Sarkozy au premier tour.
Le soi-disant “Président du Pouvoir d’Achat” est maintenant largement identifié comme “le président bling-bling”, ami seulement des super-riches. Les déclarations de sa femme multimillionnaire Carla Bruni selon lesquelles le couple présidentielle vit très modestement, ou de son Ministre de l’Intérieur Claude Guéant prétendant que Sarkozy vit une vie ‘‘extrêmement austère’’ ont seulement eu pour effet d’empirer l’insulte que le mode de vie de Sarkozy représente pour les millions de personnes qui ont souffert d’une série sans fin d’attaques aux conditions de vie sous son règne.
Huit millions de personnes en France sont maintenant officiellement pauvres. Depuis que Sarkozy est au pouvoir, le chômage a monté de 20 %, mais 3 millions de chômeurs ont disparu des chiffres officiels, rayés des listes et laissés sans revenus. Une grande partie de la population est inquiète pour des raisons sociales. Une enquête publiée le 23 février par La Croix, un journal chrétien, a annoncé que 79% des gens interrogés sentaient que leur pays était en crise complète dont 66% qui déclarent qu’ils devront réduire leurs dépenses en 2012.
La campagne de Francois Hollande
Dans ce contexte, le candidat du Parti Socialiste François Hollande a compris que quelque chose devait être fait pour rattraper le large mécontentement qui existe dans la société. C’est pourquoi on peut entendre parfois des choses un peu plus à gauche dans sa campagne. Hollande se décrit comme le candidat “du changement” et de l’”unité”, et essaie de mettre l’accent sur la croissance plus que sur l’austérité dans sa campagne. Il plaide pour la création de 60.000 emplois d’enseignants s’il est élu, et se dit pour l’annulation des 29 milliards de réductions d’impôts introduites par Sarkozy. Il a aussi surpris beaucoup de monde (dont sa propre équipe de conseillers) en défendant tout à coup un impôt de 75% sur ceux qui gagnent plus d’un million d’euros par an. Il a promis de séparer les banques de détail des banques d’investissement, dénoncé les revenus des banquiers, ‘‘indécents’’, et pointé le monde de la finance comme son ‘‘pire ennemi’’.
Cependant, c’est la seule face de la médaille. Quand il a visité Londres début mars, le candidat du PS, dans une interview de presse, expliqué que ‘‘la gauche a été au gouvernement pendant 15 ans durant lesquelles nous avons libéralisé l’économie, ouvert les marchés à la finance et aux privatisations. Il n’y a rien d’inquiétant.’’ Hollande défend clairement le projet de l’Union Européenne et la diminution des déficits budgétaires. Il veut assurer qu’il soit bien clair qu’il est un administrateur responsable et tranquille, sérieusement engagé à équilibrer les comptes du pays. Par exemple, sa promesse de 60.000 enseignants supplémentaires n’est pas basée sur des dépenses publiques, mais seulement sur la limitation des embauches dans d’autres secteurs, déjà en sous-effectif.
Hollande essaie, d’un côté, de se montrer plus à gauche et plus populaire, mais de l’autre, de ne pas perdre sa crédibilité devant les marchés qu’il ne veut pas s’aliéner sur cette question. C’est pourquoi les propositions les plus ‘‘gauchistes’’ de son programme électoral sont régulièrement ‘‘corrigées’’, parfois de manière complètement contradictoire, par des manœuvres plus à droite, visant à rassurer la classe capitaliste – de même que l’aile droite de son propre parti – sur ses intentions.
Les propositions d’Hollande d’augmenter les impôts des millionnaires peuvent recueillir un certain soutien, compte tenu de l’énorme colère de classe qui existe parmi les votants français contre l’élite ultra-riche. Les profits obscènes des 40 plus grosses entreprises françaises cotées en bourse (qui atteignent 73,5 milliards d’euros en 2011), ou les 24 % d’augmentation, l’année dernière, des salaires des grands patrons (déjà les plus hauts en Europe) ne peuvent que donner des arguments à de telles propositions.
En tant que socialistes authentiques, nous sommes évidemment en faveur de toute mesure qui va dans la direction d’une répartition plus juste des richesses. Mais il est important de comprendre que même si ces impôts sont mis en place (ce qui est loin d’être certain), aussi longtemps que les principaux leviers de l’activité économique restent dans des mains privées, les possesseurs de capital n’hésiteront pas à utiliser leur pouvoir économique pour amoindrir les mesures comme celle-ci, notamment en menaçant de faire fuir leurs capitaux.
C’est pourquoi les propositions de Hollande de ‘‘taxer les riches’’ serait de courte durée ou pourrait ne même pas voir la lumière du jour. Le tête-à-queue humiliant vers l’austérité entrepris par le gouvernement PS-PCF de François Mitterrand en 1983, deux ans après son entrée en fonction, est un bon exemple qui montre qu’une politique de réformes sociales qui ne touche pas à la domination de l’économie par le capital est absolument insoutenable.
Alors que 58 % de la population française considère que François Hollande ‘‘représente un changement’’, il lui est plus facile de miser sur la haine envers le président que de tenir ses promesses une fois au pouvoir, surtout dans un contexte de crise économique où la classe dominante a partout engagé une guerre de classe acharnée contre les travailleurs et les pauvres. Pas moins significativement, selon un sondage, 61% des gens qui vont voter pour Hollande expliquent leur vote par l’idée de battre Sarkozy, et seulement 39 % par le soutien au projet de Hollande !
Le bilan néolibéral du PS au gouvernement pendant les années de la “gauche plurielle” de 1997 à 2002 était celui des privatisations qui allaient encore plus loin que ce que la droite avait fait auparavant quand elle était au pouvoir. De même, l’héritage de son parti dans les administrations régionales avertit que le pendule du PS pourrait revirer à droite très rapidement.
Néanmoins, sous pression de la classe ouvrière et ses attentes qu’Hollande amènerait “quelque chose de différent”, il pourrait essayer de gagner du temps en lâchant quelques concessions et des mesures sociales limitées dans les premiers temps de sa présidence. Son but affiché de renégocier le traité fiscal européen a soulevé des inquiétudes chez les dirigeants européens sur ses possibles tournants dans cette direction, ce qui pourrait le mener à des conflits avec l’austérité ‘‘orthodoxe’’, défendue surtout par la classe dominante allemande.
En ce qui concerne les travailleurs et les jeunes, certaines couches vont voter Hollande uniquement pour frapper un coup à Sarkozy, quoi qu’ils pensent de Hollande lui-même. Pour le moment, ces couches essaient surtout de limites les conséquences de la crise pour eux-mêmes et leurs familles, et leur principale préoccupation est, qui sera le meilleur candidat contre Sarkozy ? Dans la plupart des sondages, Hollande l’emportait au premier tour aussi bien qu’au second récemment. Cependant, les sondages des principales organisations d’enquêtes d’opinion suggèrent que le fossé entre lui et Sarkozy va maintenant diminuer, certains mettant même Sarkozy devant le candidat du PS au premier tour. Un sondage récent donnait 30% à Sarkozy et 28 % à Hollande.
S’il y a une remobilisation autour de Sarkozy, elle vient bien plus de l’appareil de son propre parti (l’UMP) que d’une vraie vague d’enthousiasme dans la société. En pratique, il a gagné peu de nouveaux électeurs depuis l’annonce officielle de sa candidature. Mais ces développements, couplés avec le scepticisme parmi certaines couches envers le passé du PS et ce qui est vu assez largement comme les ‘‘vagues promesses’’ de Hollande, ont augmenté les questionnements de certains sur la force suffisante du candidat du PS pour gagner même contre Sarkozy. Bien que ce ne soit pas la plus probable, on ne peut pas écarter l’hypothèse d’une victoire de Sarkozy. Un tel scénario ouvrirait sans doute une crise énorme dans les rangs du PS ainsi qu’une nouvelle phase de confrontation de classes explosive dans le pays.
Mélenchon et le Front de Gauche
De plus, de nouveaux troubles sont apparus dans le camp de Hollande, car un autre candidat fait de plus en plus de vagues dans la campagne présidentielle et complique l’idée d’une victoire facile pour le PS au premier tour; c’est-à-dire Mélenchon.
Pour la plupart des couches radicalisées de la classe ouvrière qui ont essayé de riposte à la politique de Sarkozy pendant 5 ans, la question des élections est double. Ce n’est pas seulement celle de virer Sarkozy mais aussi de mettre en avant en même temps une vraie alternative aux politiques des capitalistes, représentés plus ou moins par les principaux candidats de l’ordre établi.
Dans ce contexte, Mélenchon, le candidat du Front de Gauche, est vu par beaucoup de travailleurs comme le seul candidat de gauche. Environ 300.000 exemplaires du programme du Front de Gauche (l’Humain d’Abord !) se sont vendus en quelques mois.
Le Front de Gauche a été formé par une alliance entre le Parti Communiste Français et le parti de Mélenchon, le Parti de Gauche, plus petit avec pour modèle ‘‘Die Linke’’ en Allemagne. la carrière de Mélenchon a d’importantes similitudes avec celle d’Oskar Lafontaine, un dirigeant de cette organisation. Mélenchon est un ancien membre du PS et un ancien Ministre délégué à l’éducation professionnelle sous le Premier Ministre Lionel Jospin entre 2000 et 2002.
Beaucoup de travailleurs – surtout ceux qui viennent de la classe ouvrière traditionnelle et d’une culture PCF – ainsi qu’une part notable de la jeunesse assistent à ses énormes rassemblements. Notamment, à ce rassemblement de dimanche, un certain nombre de délégations de travailleurs venant d’entreprises qui sont en moment en lutte étaient présents.
Le dynamisme et l’attraction de sa campagne se reflètent dans le fait que, alors que pour la première fois depuis 1974 le PCF n’a pas de candidat à lui, le candidat que ce parti soutien trouve un écho bien au-delà de l’électorat traditionnel du PCF. Alors que Mélenchon était encore à 5-6% en septembre dernier, et 3,5% il y a un an, il a reçu un soutien de 11% dans le dernier sondage d’opinion. (Un nouveau sondage, publié le 22 mars par le journal Les Echos, lui donne 13%, seulement un demi point en dessous de la candidate Marine Le Pen du Front National, NDLR). En comparaison, aux dernières élections présidentielles il y a 5 ans, la candidate du PCF Marie-Georges Buffet n’avait obtenu que 1,93% des voix.
Mélenchon combine une rhétorique républicaine influencée par la Révolution Française et un mélange d’adresses à la classe ouvrière. Il appelle le peuple à ‘‘prendre le pouvoir’’, plaide pour une ‘‘révolution citoyenne’’, une ‘‘insurrection civique’’, et d’autres slogans paraissant radicaux qui, bien que vagues, trouvent un écho positif parmi ces couches de travailleurs, de militants et de jeunes qui cherchent quelque chose à gauche, plus radical et différent de la campagne démagogique de Hollande.
Défiant l’idée que la classe ouvrière doit payer la crise du système et accepter les politiques d’austérité, s’attaquant aux marches financiers et aux medias de masse, parlant de “planification écologique”, des droits des femmes et de l’avortement, Mélenchon ouvre un certain nombre de portes au débat que la classe dominante n’a pas forcément envie de mettre en avant.
Il plaide pour un salaire minimum de 1700 € et la retraite à 60 ans, pour la nationalisation de l’entreprise de pétrole Total rentable et des autres producteurs d’énergie. Le caractère de classe des arguments de Mélenchon contre le FN, démasquant la politique pro-capitaliste de ce parti, contraste aussi avec ce qui est entendu ces dernières années de la part de la plupart des politiciens.
Dans la crise actuelle de représentation politique de la classe ouvrière, renforcée par l’échec du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) à apporter une réponse à ce problème, les socialistes authentiques ne peuvent ignorer ces développements mais doivent, au contraire, engager un dialogue fraternel avec les couches des travailleurs et des jeunes qui regardent vers la campagne de Mélenchon avec sympathie.
En même temps, il est également nécessaire de montrer les faiblesses politiques et les limites de ce programme. Alors que Mélenchon mentionne le capitalisme, et appelle à ‘‘la fin des privilèges du capital’’, ses propositions ne vont pas jusqu’à donner un vrai moyen d’en finir avec le système, et ne montrent par une représentation compréhensible de ce que l’alternative au système pourrait être. En réalité, son programme reflète une certaine tentative de s’en prendre au capital spéculatif et financier, plutôt que de défier le fonctionnement capitaliste de l’économie en tant que tel.
Se réclamant de l’héritage de la révolution française, Mélenchon tempère sa référence au drapeau rouge, à l’Internationale et à la commune de Paris avec le drapeau tricolore de la révolution bourgeoise, la République Française et la Marseillaise. D’un côté, Mélenchon parle de solidarité avec les luttes des travailleurs Grecs ou autres, mettant en avant quelques éléments de la perspective internationaliste nécessaire ; d’un autre côté, le côté ‘‘républicain français’’ de sa rhétorique, particulièrement mis en avant dans son discours à Paris dimanche dernier, pourrait être un obstacle à s’adresser en particulier aux couches immigrées de la population. Beaucoup de personnes présentes à la manifestation dimanche n’ont pas manqué de noter le contenu faible et abstrait du discours de Mélenchon.
Plutôt que de soutenir la prise des banques et des grandes entreprises par la classe ouvrière, le projet de Mélenchon soutient dans les faits une économie hybride, avec des nationalisations limitées et un secteur public plus fort. Ainsi, si nous sommes fondamentalement d’accord avec l’idée générale que la classe ouvrière devrait ‘‘prendre le pouvoir’’ et si nous sommes en faveur d’une lutte commune, s’adressant à la classe ouvrière large, à faire campagne dans ce but, malheureusement nous pensons qu’un tel slogan de la part de Mélenchon vise tout simplement à gagner du soutien pour lui-même dans les élections, plutôt que de constituer un engagement à construire une lutte sérieuse par la majorité pour défier le capitalisme et construire une société socialiste.
Cela dit, nous croyons encore qu’un bon score pour Mélenchon serait un signe positif pour la classe ouvrière et déplacerait le débat sur la manière de construire la riposte et les politiques nécessaires contre les attaques capitalistes. Si, en ce moment, l’essentiel des militants qui maintiennent la campagne de Mélenchon sont des membres du PCF et que l’autre composante du FdG, le Parti de Gauche, reste surtout une étiquette électorale, cela ne signifie pas dire que les choses vont rester ainsi. Nous devons suivre attentivement ce que va devenir ce soutien dans la période à venir. Un appel public large de Mélenchon, suivant un fort score électoral, pour rejoindre dans les faits la riposte et transformer le succès électoral du Front de Gauche en un nouveau parti de la classe ouvrière massif, trouverait surement un écho chez beaucoup de travailleurs, de jeunes, de chômeurs et de retraités, et encouragerait la continuation de ce qui reste un débat urgent dans la situation actuelle (un débat qui a d’une certaine façon été ‘‘inaudible’’ à cause du cours désastreux suivi par le NPA) : comment construire un parti politique de masse qui pourrait défendre les millions de travailleurs et non les millionnaires.
Cependant, toute nouvelle initiative dans cette direction devra tirer les leçons de l’expérience du NPA. Ce dont la classe ouvrière a besoin n’est pas une machine électorale, mais un instrument combattif et démocratique pour l’aider à construire ses propres luttes. Un instrument qui se positionnerai sans compromis du côté des travailleurs et des opprimés, défierai l’inertie des bureaucraties syndicales, et développerai un programme qui lie les luttes de la classe ouvrière avec une réelle stratégie politique pour en finir avec la dictature des 1%.
Le NPA et la campagne Poutou
Aujourd’hui, il n’y a pas un important soutien pour les organisations de gauche comme Lutte Ouvrière ou le NPA, auparavant la Ligue Communiste Révolutionnaire. Ils font ensemble 1% dans les sondages, contre presque 10% en 2002 et plus de 5% en 2007. Cela illustre l’incapacité de ces partis à construire à partir de leurs succès électoraux passés et à s’adresser à de nouvelles couches de travailleurs et de jeunes. Le NPA n’a eu aucun profil notable dans la dernière période, et refuse de proposer une stratégie réellement anticapitaliste, basée sur la lutte contre les licenciements, appelant à la nationalisation sous le contrôle ouvrier des secteurs-clés de l’économie, et défendant une société socialiste. Le retrait d’Olivier Besancenot de la candidature NPA à la présidentielle indiquait que la direction du NPA refusait de tirer les bénéfices d’une situation politique favorable.
Le candidat du NPA, Philippe Poutou, a un bon profil comme représentant des luttes de la classe ouvrière et de ses aspirations. C’est un ouvrier industriel, un syndicaliste à l’usine Ford à Bordeaux où ils ont été victorieux contre un plan de licenciements. Sa candidature pourrait être une expression des aspirations des ouvriers à en finir avec ce système, bien qu’elle ne soit pas assez offensive contre le capitalisme. Cependant, le manque d’un réel parti derrière lui, le fait que sa candidature n’est pas connue à une échelle de masse et l’absence d’une perspective sérieuse de développer le NPA comme un outil politique indépendant pour la classe ouvrière et les jeunes va obligatoirement limiter l’attrait de Poutou. (Pour une analyse plus approfondie du NPA, lisez notre article.)
Le danger du FN
Dégoûtés par les résultats désastreux des politiques pro-capitalistes des partis traditionnels, une autre partie de la classe ouvrière et de la classe moyenne va voter pour la candidate d’extrême-droite Marine Le Pen, qui a tenté de mettre de côté les liens néo-fascistes de son père, excluant quelques néo-fascistes du parti. Marine Le Pen a eu quelques succès électoraux, surtout dans le Nord désindustrialisé, en se présentant comme la ‘‘candidate des travailleurs’’, dénonçant l’élite politique (‘‘l’UMPS’’ comme elle dit) et le ‘‘système mafieux’’, et par-dessus tout, blâmant les immigrés pour la crise par une énorme campagne raciste, visant en particulier les musulmans.
Quelques sections de la classe ouvrière, des jeunes et des pauvres, surtout ceux qui ne se sentent pas représentés (les gens des quartiers pauvres, les 2èmes et 3èmes générations des familles immigrées, etc.) n’iront pas voter du tout. Le niveau d’abstention, qui augmente à chaque élection, va probablement être encore plus élevé au premier tour, alors que la situation et l’ambiance ainsi qu’une certaine pression à aller ‘‘voter utile’’ pour virer Sarkozy ou Le Pen du 2ème tour, peuvent tempérer cela dans certaines couches (notamment parmi ceux qui sont toujours influencés par le spectre de ce qui s’est passé en 2002, quand Jean-Marie Le Pen a éliminé Jospin, candidat du PS, et est allé au 2nd tour). Cependant, à cette étape, le FN n’est pas encore vu comme aussi fortement qu’en 2002 comme un moyen de rejeter la politique du gouvernement et il n’est pas probable qu’il va répéter ce résultat.
Des luttes importantes mais isolées
Alors que maintenant la champagne électorale fait les gros titres et domine la situation politique, les lutes des travailleurs ne se sont pas arrêtées.
En effet, une autre facette de la crise, c’est les luttes qui prennent place dans les usines contre les fermetures et les licenciements et dans le service public contre les coupes budgétaires. Des luttes dans beaucoup d’entreprises (comme Peugeot et Lejaby) ont fait les gros titres des journaux pendant 2 mois et les luttes locales se développent.
Le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux qui quittent leur emploi a un effet énorme sur le service public, surtout dans les secteurs de la santé et de l’éducation. Depuis l’annonce de février des prochains budgets de l’éducation primaire, les parents et les profs luttent contre les coupes dans les écoles primaires et maternelles. Dans certaines villes, des actions continuent à être organisées pour sauver les classes et une éducation publique décente pour les enfants. Parfois, un village entier ou une ville est impliqué. Il en est de même pour les coupes dans les hôpitaux ou les fermetures de cliniques. Les grèves, dont des grèves d’une heure, se sont développées à Renault Cléon pendant deux semaines et dans d’autres usines comme à l’aciérie LME près de Valenciennes, dans le Nord de la France. Les travailleurs de la poste sont engagés dans de véritables vagues de luttes dans plusieurs endroits, certaines très longues, de plus de 50 jours, dans la région parisienne.
Malgré tout cela, il y a un manque cruel d’un quelconque lien entre les luttes pour une riposte sérieuse à l’échelle du pays. Dans la raffinerie emblématique de Pétroplus à Petit-Couronne (près de Rouen), les travailleurs ont organisé leur propre lutte depuis fin décembre avec l’implication de l’Union Locale de la CGT et un soutien important de la population locale. Tous les principaux candidats à la présidence ont rendu visite aux travailleurs. Mais le principal dirigeant de la CGT, Bernard Thibault, est venu seulement le 10 février – presque à la fin de la bataille – pour soutenir surtout de ‘‘faire pression sur les politiques’’. Alors que la situation des travailleurs de Pétroplus est similaire à celle de beaucoup d’autres dans tout le pays, la direction de la CGT n’a jamais appelé à un vrai jour de grèves national contre les licenciements, les coupes budgétaires et l’austérité.
Plus généralement, il n’y a eu aucun appel des dirigeants syndicaux à lutter ensemble, n’y d’appel à une journée nationale de manifestations. Néanmoins, un énorme potentiel existe. Le 29 février, la ‘‘journée européenne contre les plans d’austérité’’, ils étaient des dizaines de milliers dans les rues bien qu’il n’y ait pas d’appel à la grève. Il y a un vrai potentiel pour une réponse massive de la classe ouvrière française et des jeunes. Mais pour le moment, elle ne trouve pas d’expression collective.
Nous ne savons pas quels vont être les résultats de l’élection, mais ce que nous tenons pour certain, c’est que la classe ouvrière et les jeunes de France n’ont pas baissé la tête.
Les luttes continuent et à cette étape, la crise est un accélérateur pour la lutte de classe et une opportunité de s’opposer aux attaques contre les conditions de vie. Mais pour que des changements conséquents arrivent et pour stopper les attaques contre nos conditions de vie, nos emplois et nos services publics, une vraie lutte dans la rue et sur les lieux de travail devra être menée. Comme de plus en plus vont tirer cette conclusion dans la période à venir, l’audience pour notre programme socialiste va augmenter, de même que la chance de tester notre programme dans le développement concret des luttes à venir.