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Tag: Floride
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Royaume-Uni : Une révolution très britannique ?
Pour une extension de la démocratie authentique
“Une révolution très britannique” a bruyamment titré le Telegraph, après l’expulsion de Michael Martin, Président de la Chambre des Communes, une première depuis 1695. Jonathan Freedland poursuivait dans le Guardian : «Le Président de la Chambre sort, tandis qu’une odeur de révolution se répand dans l’air. I say, tant mieux… Nous vivons en effet une époque révolutionnaire – et ce changement radical, anticonventionnel est possible».
Peter Taaffe, Secrétaire Général du Socialist Party, CIO-Angleterre et Pays de Galles
Car article est la suite d’un précédent texte paru sur socialisme.be: Raz-de-marée de scandales politiques au Royaume-Uni : à bas les voleurs et leur système!
Est-ce là le spectre du “jacobinisme”, ou juste une hyperbole journalistique ? Pas si on écoute les voix enragées de la “rue”, dans les transports en commun, dans les conversations sur les lieux de travail ou sur la BBC à «Question on Time». Qui plus est, plutôt que de retomber, la vague de colère et d’amertume de masse, face à l’avidité sans gêne de leurs «représentants parlementaires» a grandi sans cesse avec les révélations quotidiennes de nouveaux faits de pillage de notre argent par les parlementaires. Par exemple, le parlementaire Tory Douglas Hogg, qui avait réclamé des milliers de livres pour le nettoyage des douves de son château, a maintenant été mis de côté pour les prochaines élections. Un travailleur, résumant l’humeur générale, a déclaré au Sunday Times que «L’électorat britannique doit envier Ali Baba. Lui n’a eu affaire qu’à quarante voleurs!» Un autre faisait ce commentaire : «A partir de maintenant, je vais utiliser le mot «parlementaire» au lieu de «grippe-sou»».
La parlementaire New Labour Margaret Moran a conservé sa propriété, mais a maintenant promis de rembourser l’argent dépensé sur sa résidence secondaire à Southampton. Mais cela n’a nullement adouci le commentaire d’une personne interrogée par le Sunday Times : «C’est bien simple. Elle devrait être arrêtée. Ils devraient tous être arrêtés».
Comme le Socialist (journal du Socialist Party, NDLR) l’a fait remarquer, les révélations du Telegraph ont totalement discrédité la soi-disant élite de la «classe politique», constituée des dirigeants et de l’immense majorité des parlementaires des trois principaux partis politiques. Afin de détourner l’attention, ces dirigeants ont eu recours à des mesures cosmétiques – la démission du Président de la Chambre, la «mise à pied» d’une poignée de parlementaires, y compris des démissions et la promesse de «se tenir à l’écart» des prochaines élections générales, et la promesse de Gordon Brown d’une «enquête extérieure» concernant les demandes de remboursement de frais des parlementaires dans le futur. Mais seule une «enquête» par des comités impliquant des travailleurs ordinaires peut réellement commencer à constituer une menace pour les parlementaires. Il est probable qu’aucune des mesures proposées ne sera capable de satisfaire la masse des gens, totalement dégoûtée des parlementaires qui ont demandé le remboursement de «télévisions à écran plat» – comme l’inénarrable parlementaire New Labour de droite Gerald Kaufman – ou un «matelas pour enfant» – comme Michael Glove, ce «vautour de la culture» -, etc.
En réalité, le Telegraph n’a pas appelé à une révolution – pas même à une «révolution politique» dans le cadre du capitalisme – mais à des mesures minimales. Tout en jetant des accusations à la tête des parlementaires, l’ancien propriétaire du Telegraph – un des journaux les plus à droite du Royaume-Uni, si pas du monde – languit en ce moment dans une prison de Floride pour une corruption d’une ampleur qui fait de l’ombre même aux actions honteuses des parlementaires britanniques. Dans les faits, le Telegraph, les médias capitalistes et les dirigeants des trois grands partis capitalistes ne souhaitent que retoucher quelque peu leur système. Ils ont ouvertement utilisé le licenciement du Président de la Chambre afin d’échapper à leur responsabilité dans des pratiques douteuses du même acabit ; eux aussi ont bénéficié de «remboursement de frais» inacceptables.
Peu de publicité a été donnée au fait que la belle-mère de Cameron (le porte-parole des Tories) a offert des meubles à un parlementaire Tory qui, à son tour, en a réclamé le remboursement au bureau de la Chambre des Communes ! Clegg, le dirigeant Libéral-Démocrate, est lui aussi impliqué, de même que Gordon Brown lui-même. C’est chez les anciens électeurs Labour – broyés par le chômage de masse, les coupes dans le niveau de vie et dans les salaires – que se fait ressentir le plus grand dégoût aux hypocrites du New Labour.
Il y a également une acceptation tacite, inexprimée, qu’il ne faut s’attendre à rien d’autre venant des «aristos» dans les Tories. Mais de nombreux travailleurs et personnes de la classe moyenne, surtout ceux de l’ancienne génération – malgré l’expérience brutale de Blair pendant la guerre d’Irak et les attaques menées par Blair et Brown sur les droits des travailleurs – gardaient un vague espoir que le New Labour était quelque peu « différent ». Cet espoir a maintenant été totalement mis en pièces, avec la révélation que le New Labour ne diffère en rien des Tories et des Libéraux-Démocrates, remettant en cause son droit à être considéré comme une représentant des travailleurs.
La plupart des “mécréants” qui se retrouvent dans cette situation – en réalité, des gens plongés jusqu’au cou dans la corruption – ne subissent d’autre blâme qu’un appel à «rembourser» ce qu’ils ont volé. Mais comme le disait un pensionné, «Si moi j’allais au magasin et prenait une bouteille de shampoing sans la payer, on ne me demanderait pas seulement de la rembourser, mais je serais aussi arrêté et je devrais payer une amende». Assiégé par cette rage de masse, le gouvernement, poussé par les Tories et la presse, y compris le Telegraph, souhaite concentrer la discussion sur la manière dont on pourrait «améliorer» le Parlement, plutôt que de mettre un terme au «déficit démocratique» criant du Parlement dans sa forme actuelle. Un allié de Gordon Brown a confié à Seamus Milne, chroniqueur du Guardian, que «Il y a un dangereux vide. Si l’élite au pouvoir ne saisit pas l’opportunité, les gens vont la renverser».
Mais le besoin pressant de changer le Parlement est maintenant mis à l’avant dans la vision du peuple britannique. Le fait de remplacer Martin avec n’importe quel autre parlementaire parmi les candidats au poste de Président de la Chambre – de la manière la plus incroyable, certains parlementaires New Labour ont mis en avant pour ce poste John Bercow un ancien Thatchérien de la ligne dure, qui se trouve maintenant au centre-gauche des Tories – ne va pas changer la situation d’un iota. Le dégoût de masse ressenti vis-à-vis des parlementaires de tous les partis, et même du Parlement lui-même dans sa forme actuelle, ne pourra pas être atténué par des mesures dérisoires, même déguisées en «révolution».
Le Socialist Party se bat pour l’établissement d’une société socialiste démocratique et d’un Etat ouvrier démocratique gérés et contrôlés à tous les niveaux par les travailleurs. Même sans les récents développements, la masse des gens au Royaume-Uni accepte et soutient le concept de démocratie, y compris le Parlement, dans un sens général. Mais ce que nous avons au Royaume-Uni est une démocratie capitaliste, dans laquelle la classe salariée peut dire ce qu’elle veut – et même cela est attaqué par la «société de surveillance» – tant que les grands capitalistes et leurs représentants politiques restent ceux qui prennent les véritables décisions.
N’est-ce pas ce que nous avons vu avec trois partis quasiment identiques, qui défendent encore le «marché libre» qui est en train de causer tant de dévastation économique pour le peuple britannique ? Les élections au Parlement sont des choix périodiques afin de savoir lequel des trois principaux partis capitalistes aura la chance d’opprimer et d’attaquer la classe salariée et les pauvres pendant les cinq prochaines années. Les «gagnants» sont récompensés avec la plus grosse part du butin : prestige, limousines gouvernementales, salaires énormes, etc. Mais même les «losers» se retrouvent dans une situation de «gagnant-gagnant», comme l’a révélé le récent scandale. Non contents de faire partie des 5% des plus hauts salariés du pays – sur base de leur salaire uniquement – ils ont «rehaussé» ce traitement grâces aux pratiques répugnantes révélées par le Telegraph.
Nous défendons tous les droits démocratiques acquis par les travailleurs à travers la lutte, y compris l’élection de représentants à un Parlement, ce qui est le niveau actuel de compréhension et de perspective de la majorité des gens au Royaume-Uni. Toutefois, la réalité est, comme tous les analystes sérieux l’admettent maintenant, que le Parlement actuel n’est rien de plus qu’un grand parloir, et encore. Les parlementaires ne sont qu’un bétail votant pour la politique décidée par une petite cabale du gouvernement et son armée de Ministres, chefs de cabinet, secrétaires privés parlementaires – le « personnel votant ». Les véritables affaires sont dirigées par le gouvernement et, de plus en plus, par une petite cabale autour du Premier Ministre lui-même. Ils règnent à travers l’Etat y compris la fonction publique, qui exécute leurs décisions. Mais, comme l’Histoire l’a montré, des périodes de grandes convulsion sociale – et nous traversons une telle période en ce moment – voient la classe salariée se mettre en branle pour tenter de combler le fossé entre le «législatif» – le Parlement – et l’«exécutif» – le gouvernement et la machine d’Etat.
La réponse face à la situation antidémocratique que nous vivons à présent n’est pas de se débarrasser des institutions de représentation telles que le Parlement, mais de mettre en oeuvre une démocratie plus généreuse, une expansion des moyens d’implication de la masse des gens dans la formulation et dans la mise en œuvre des décisions, avec un contrôle direct sur leurs représentants. Ceci signifierait, en premier lieu, l’abolition de la Chambre des Lords (la «Chambre des Fraudes») et de la monarchie. Ces institutions ont été gardées en réserve, pas pour des raisons décoratives ou historiques, mais en tant qu’armes potentielles qui peuvent être utilisées contre un Parlement ou un gouvernement radical qui menacerait le pouvoir des grandes entreprises à l’avenir.
Sous le capitalisme, un système bicaméral – deux chambres parlementaires – n’est pas un sceau «démocratique» sur la législature principale. Ce système peut être utilisé afin de contrecarrer la volonté populaire, en particulier au cours d’une période radicalisée, révolutionnaire, en utilisant la «Chambre supérieure» ou le «Sénat» contre les mesures dans la législature qui menaceraient les intérêts des classes possédantes.
Par conséquent, ce dont le Royaume-Uni a besoin est d’une Assemblée unique, qui combine les pouvoirs législatifs et exécutifs. Celle-ci devrait être élue par un élargissement de la franchise électorale, en particulier en impliquant les jeunes en leur donnant le droit de vote dès l’âge de seize ans.
Le fait d’élire des parlementaires pour une période de quatre ou cinq ans à un poste où ils reçoivent un salaire indécent mène inévitablement à la situation qui scandalise en ce moment le peuple britannique. Une forme de représentation proportionnelle véritablement démocratique devrait immédiatement être mise en œuvre afin de briser le monopole des trois partis pro-capitalistes, et permettre à ce qu’une authentique voix des travailleurs émerge, en particulier via l’édification d’un nouveau parti de masse des travailleurs.
Les capitalistes n’ont aucun fétiche par rapport aux arrangements électoraux. Ils vont passer de l’un à l’autre, en fonction de quelle forme d’élections servira le mieux leurs intérêts et leurs partis. Voyons par exemple l’étourdissant carrousel organisé par les capitalistes italiens lors des cinquante dernières années, passant sans arrêt d’une forme de représentation proportionnelle à une autre et vice-versa, avec maintenant la tentative de Berlusconi de créer un système «bipartite» à l’américaine.
Leur position est déterminée non pas par «principe», mais par la meilleure manière de s’assurer que la majorité soit détenue par les partis de droite pro-capitalistes (y compris la social-démocratie). De la même manière, les véritables socialistes luttent pour la meilleure et la plus équitable forme d’expression pour le point de vue de la majorité de la population.
Dans les années ‘70 et ‘80, lorsque la menace d’un gouvernement Labour de gauche – mené par une figure publique telle que Tony Benn – était une réelle possibilité, les capitalistes se préparaient à abandonner au vénéré système du «tout au premier», pour le remplacer par un système de représentation proportionnelle. La plupart de leurs suggestions ont pris la forme du Vote Alternatif, qui visait à mettre au pouvoir les coalitions pro-capitalistes, avec un «cordon sanitaire» autour d’un Labour alors radicalisé.
Nous rejetons toute forme d’élections antidémocratique telle que celle-ci, qui a la faveur des Libéraux-Démocrates et même aujourd’hui de certains analystes capitalistes. Des élections organisées une fois tous les deux ans seraient un avantage par rapport au cycle actuel de cinq ans. Mais même des élections organisées sur une base encore plus régulière – comme la revendication des Chartistes qui voulaient des élections chaque année – ne pourraient surmonter l’absence frappante de tout contrôle au jour le jour sur les représentants au Parlement qui a été révélée par cette crise.
Le fait d’élire les parlementaires via des assemblées locales démocratiquement organisées et élues (plutôt que par une campagne d’affichage et dans les médias) serait un grand pas en avant. De même en ce qui concerne le suivi et le contrôle permanent des parlementaires par leurs électeurs, et le droit de révocation immédiate par ces mêmes gens.
Dans certains pays – comme les Etats-Unis ou le Venezuela – il existe des mesures permettant la “révocation” des représentants du peuple, essentiellement à travers toutes sortes de référendums. Mais un moyen plus direct d’exercer la révocation n’est pas nécessaire dans le système actuel, ce qui fait que le Parlement et les parlementaires actuels restent hors de contrôle.
Les parlementaires ne devraient pas recevoir plus que le salaire moyen d’un travailleur qualifié. Il est remarquable de noter que cette revendication, qui a constitué une pierre d’angle du programme du Socialist Party trouve maintenant un écho dans certaines couches de la presse capitaliste. Par exemple, Aditya Chakrabortty, dans l’article «Une nouvelle politique» paru dans le Guardian, a écrit que «Le salaire de 64.766 £ par an les place confortablement parmi les 5% des personnes au plus grand revenu. Le salaire médian au Royaume-Uniest de 25.100 £ ; mais si on regarde du côté des pensionnés et des allocataires sociaux, on se rend compte que la moyenne de la population vit avec 16.000 £ par an». Sa solution est de «lier les salaires des parlementaires au revenu moyen. Mettons-les, disons à deux fois le salaire moyen, et n’augmentons leur salaire que en fonction de l’évolution du revenu moyen. Ceci devrait rappeler aux politiciens que leur job est de représenter leur électeurs – et leur donner un intérêt dans l’amélioration du sort de ces électeurs».
Nous applaudissons cette proposition. Sa suggestion ne va sans doute pas le mettre dans les petits papiers des parlementaires, mais trouvera sans doute un écho parmi la population, de même que les positions de Dave Nellist, Terry Fields et Pat Wall (d’anciens parlementaires du Labour, représentants de l’aile marxiste qui existait alors en son sein et qui est le prédécesseur du Socialist Party, NDLR) ont pu en trouver un, et constituent encore maintenant un véritable exemple. Chakrabortty est trop généreux en suggérant qu’un parlementaire devrait recevoir deux fois le salaire moyen – puisqu’il montre bien que la plupart des gens vivent sous le salaire moyen – mais il se dirige dans la bonne direction.
Nos suggestions sont là pour aider à faciliter la lutte des travailleurs contre l’offensive du capital, qui ne peut que s’aggraver à cause de la crise organique du capitalisme. Il ne fait aucun doute qu’il y a dans la campagne menée par le Telegraph un élément de tentative de «coup d’Etat» contre le gouvernement Brown, campagne reprise par l’ensemble de la presse capitaliste et par la direction Tory. L’effondrement probable du soutien au Labour lors des élections de juin sera utilisé comme un levier non seulement pour se débarrasser de Gordon Brown, mais aussi en tant que plaidoyer pour des élections nationales anticipées, qui pourraient maintenant être organisées bien avant que le mandat parlementaire actuel se termine en juin 2010.
Un gouvernement Cameron est maintenant clairement perçu par les patrons comme la meilleure option pour leur système. Dave le «Compatissant» appartient au passé, vu qu’avec chaque jour qui passe, Cameron ressemble un peu plus à une réincarnation de Thatcher. Les analystes capitalistes parlent ouvertement de la nécessité d’un gouvernement Cameron, le seul qui serait prêt à lancer l’offensive contre le mouvement ouvrier et la classe salariée. Selon leur raisonnement, ceci sera nécessaire afin de résorber le gigantesque déficit budgétaire, qui s’élèvera probablement à 12-13% du PNB, pour une valeur de 175 milliards de livres. Ils sont forcés de tolérer ce déficit pour l’instant, afin d’éviter une dépression totale. Mais sur une base capitaliste, ce déficit ne peut être réellement résorbé que par une offensive brutale, en particulier contre les salaires des travailleurs du secteur public et le massacre à la tronçonneuse généralisé des services publics.
Comme dans la période qui a précédé l’arrivée au pouvoir de Thacther, c’est là l’objectif conscient des capitalistes britanniques. Par conséquent, un gouvernement Cameron serait bien pire dans ses intentions que ne l’était même celui de Thatcher à son début. Un tel objectif garantit une confrontation ouverte entre le gouvernement les classes qu’il représente d’une part, et la masse des travailleurs d’autre part. D’énormes conflits sociaux, y compris la grève générale, seront à l’ordre du jour.
Par conséquent, dans la crise actuelle, nous nous battons pour la forme la plus large possible, la plus extensive, de démocratie, afin de rehausser la lutte de la classe ouvrière. Mais nous reconnaissons aussi que, du point de vue de la classe salariée et du mouvement ouvrier, il n’existe dans le cadre du capitalisme aucune forme « parfaite » de démocratie ou d’arrangement électoral. Par exemple, la Chambre des Représentants américaine organise des élections tous les deux ans, mais ne représente d’aucune manière que ce soit la majorité de la population américaine. La masse de la classe salariée américaine est confrontée à près de 500.000 licenciements par mois, un nombre incroyable de saisies immobilières, et l’intention de massacrer les emplois et les services dans le secteur public, comme on peut le voir en ce moment en Californie.
Mais aucune véritable solution ne peut provenir n’aucune des deux chambres du Congrès américain. La «démocratie» américaine est dominée par de gigantesques machines capitalistes bâties autour des partis républicain et démocrate, lesquelles sont à leur tour au service des milliardaires et de leur «démocratie du dollar», agissant comme un écran de protection pour leur système. Tout comme au Royaume-Uni, il y a un besoin urgent de l’alternative d’une nouvelle opposition radicale de masse pour la classe salariée, qui peut alors chercher à utiliser cette démocratie électorale théorique en sa faveur.
La même tâche se pose aujourd’hui au Royaume-Uni. La classe salariée disposait dans le passé une voix politique de masse, jusqu’aux années ‘70 et ‘80, dans la base ouvrière du Labour Party, lequel s’est aujourd’hui effondré dans son avatar du New Labour, sous la coupe de Blair et Brown. Par conséquent, si on doit même se contenter de la mise en œuvre des revendications démocratiques nécessaires, le facteur le plus urgent pour contribuer à cette réforme est la création d’un nouveau parti des travailleurs de masse. Sans cela, toutes sortes de faux prophètes, de démagogues irresponsables de la droite, et toute une série d’ «indépendants» vont apparaître pour s’installer dans le vide politique qui existe aujourd’hui.
La tentative d’Esther Rantzen (une présentatrice télé active dans des programmes de charité pour les enfants maltraités ou pour la Birmanie) de prendre le siège de Margaret Moran (une parlementaire Labour dont le total des «remboursements de frais» s’élève à 168.569 £) – “Je suis une célébrité, donnez-moi un siège” – pourrait être le signe avant-coureur de l’arrivée de toutes sortes de soi-disant «indépendants» – Martin Bell (un célèbre reporter de guerre, qui a été en 1997 le premier élu indépendant au Parlement britannique depuis 1951) est lui aussi en train de dépoussiérer son costume blanc – ce qui montre le dangereux vide qui existe à l’heure actuelle. Mais ces indépendants ne seront capables d’occuper le vide que s’il un nouveau parti des travailleurs de masse, ou des pas en avant vers la création d’un tel parti, ne sont pas urgemment entrepris. C’est pourquoi la campagne «No2EU, Yes to Democracy» soutenue entre autres par le Socialist Party et le RMT (le syndicat des transports), est si importante. De même, la décision du PCS (le syndicat du secteur public et des ex-secteurs publics) d’entamer une discussion quant à la présentation et au soutien de candidats syndicalistes est une nouvelle étape cruciale dans la création d’une telle force.
Le New Labour a démontré encore et encore – et de manière encore plus évidente dans cette crise-ci – qu’il se tient fermement dans le camp du capitalisme. Alice Mahon a enfoncé le clou en prenant la décision de quitter le New Labour après dix-huit ans au Parlement, déclarant que le New Labour est «irréformable». Par conséquent, dans ce débat autour Parlement, les véritables socialistes et les travailleurs doivent réclamer une extension de la démocratie réelle, en luttant pour des réformes démocratiques et pour la forge d’armes politiques, et par-dessus tout la création d’un parti des travailleurs de masse, capable de défier les partis capitalistes et leur système, en combattant pour une démocratie socialiste véritable.
Le Comité pour une Internationale Ouvrière, CIO
Cet article est issu de la section Angleterre et Pays de Galles du CIO.
Le capitalisme est un système mondial et il doit être combattu à la même échelle. C’est pourquoi le Parti Socialiste de Lutte fait partie d’une organisation marxiste internationale: le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO), un parti mondial actif sur tous les continents. Notre lutte en Belgique s’inscrit dans le cadre d’une lutte des travailleurs du monde entier pour un société socialiste car si la révolution socialiste éclate sur le plan national, elle se termine sur l’arène internationale. La démocratie ouvrière et la planification socialiste de la production ne peuvent se limiter à un seul pays. C’est d’ailleurs l’isolement de la Russie soviétique qui a conduit à sa dégénérescence à partir de 1924.
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La démission de Castro ouvre un nouveau chapitre
Quelles sont les perspectives pour la révolution ?
La démission formelle de Fidel Castro du poste de Président de Cuba ouvre un nouveau chapitre dans l’histoire de Cuba et de sa révolution. Depuis le début de sa maladie en 2006 (un problème intestinal) d’intenses discussions ont été menées sur le rôle de Castro, lui-même lié au futur de Cuba. Sa démission indique qu’il ne se remettra probablement pas de sa maladie et que le gouvernement Cubain prépare la population cubaine à sa mort, peut être même bientôt.
Peter Taaffe, Socialist Party ( CIO Angleterre et Pays de Galles)
Quand cela arrivera, de nombreuses manifestations de masse, surtout en Amérique Latine, seront organisées. Malgré quelques erreurs et défauts de Fidel Castro, il est reconnu par les masses opprimées dans le monde comme une figure monumentale qui s’est battu avec ténacité contre leurs oppresseurs capitalistes et impérialistes.
Cependant, les cercles capitalistes (de Bush aux exilés cubain à Miami qui salivent déjà à l’idée de profits plantureux après le « retour » de leur propriété) spéculent peu cette fois-ci, contrairement à 2006, sur l’écroulement imminent du régime de l’île. A l’époque, c’est Bush qui exprimait les prédictions de l’impérialisme américain : des émeutes dans les rues cubaines, un rapide « changement de régime » , non seulement du gouvernement cubain mais aussi de son système social – l’économie planifiée.
Inversement, des millions d’ouvriers et les pauvres du monde entier espéraient le contraire ; que Cuba et les acquis sociaux de la révolution perdureraient même dans le cas d’un décès de Castro par sa maladie. Il est certain que sa présence considérable sera encore ressentie, mais sa démission traduit son incapacité à exercer le pouvoir comme il l’a fait précédemment et c’est probablement son frère Raul qui le reprendra.
Depuis 1959 la révolution Cubaine est confrontée à un embargo sauvage imposé par l’impérialisme US, et on compte 600 tentatives d’assassinat à l’encontre de Fidel Castro. Cependant, Cuba a, au travers de son économie planifiée, a pu donner un aperçu des formidables possibilités de l’espèce humaine quand la mainmise des propriétaires terriens et des capitalistes est éliminée. Des figures héroïques comme Che Guevara et Fidel Castro exercent une profonde influence sur de nombreux jeunes et travailleurs dans le monde entier.
La bonne réputation de Cuba sur sa gestion des problèmes sociaux tels que le logement, l’éducation, et particulièrement la santé a beaucoup progressée recemmnent. Le film incroyable de Michael Moore « Sicko » met bien en valeur le contraste entre le système de santé US, brutal et orienté vers une maximisation des profits et le système de santé gratuit cubain. Des citoyens américains ordinaires se retrouvant sans logement suite à des problèmes de santé (dont une personne ayant développé un cancer) ainsi qu’une travailleuse ayant participé aux secours lors du 11 septembre n’ont pu bénéficier de soins de santés à un prix abordable par le système de santé privé, honteux et orienté vers les entreprises que connaît les Etats-Unis. Ils ont cependant été secourus et soigné gratuitement quand Moore les a amenés à Cuba.
En outre, huit étudiants américains ont été diplômés l’année passée après six années d’études gratuites. Un de ces diplômés déclara que « les soins de santés ne sont pas considérés comme un commerce à Cuba ». C’est exactement pour cela que par le passé les Etats-Unis et leurs Etats complice en Amérique latine ont tout fait pour essayer de détruire le modèle d’économie planifiée ayant émergé de la révolution cubaine. Et cela a provoqué une réaction massive de soutien à Cuba des populations d’Amérique latine, particulièrement dans la dernière décennie vu le néo-libéralisme sur le continent. Elles comparent les réalisations cubaines à la triste expansion record de la grande propriété terrienne et du capitalisme dans la région, tout comme en Afrique et en Asie.
Les réalisations de la révolution
Dans un livre révélateur récemment publié, (« Fidel Castro – ma vie ») pour lequel Castro a collobaré avec l’écrivain Ignacio Ramonet, il rapporte les impressionnantes réalisations de la révolution. Et commente : « Nous avons maintenant plus de 70000 médecins et 25000 jeunes étudiants en médecine… Nos voisins du nord [les USA] ne peuvent envoyer que des hélicoptères et non pas des médecins, ils n’en ont pas assez pour résoudre les problèmes du monde. L’Europe, cette « championne des droits de l’Homme » ne peut rien y faire non plus. Ils ne peuvent même pas envoyer 100 médecins en Afrique où plus de 30 millions de personnes sont infectées par le Sida… Je pense que nous aurons dans dix ans 100 000 médecins et que nous pourrions en avoir formé 100 000 de plus d’autres pays. Nous sommes les plus grands pourvoyeurs de médecins [dans le monde] et je pense que nous pouvons maintenant former dix fois plus de médecins que les Etats-Unis, ce pays qui nous a privé d’un bon nombre de nos médecins et qui a fait tout ce qui était possible pour priver Cuba de médecins. Ceci est notre réponse à cette politique. »
Entre 1959 et aujourd’hui, l’espérance de vie à Cuba a augmenté de 19 ans. Suite à la contre révolution en Russie au début des années 90 elle est retombée pour les hommes à 56 ans ! Peut-il y avoir un plus grand contraste entre les objectifs de la révolution sociale et la barbarie de la contre-révolution capitaliste ? Et ceci a été mené à bien au moment fort d’une crise économique massive au début des années 90 suite au retrait de l’aide, particulièrement la fourniture de pétrole, d’abords par l’ancien président russe Boris Eltsine puis poursuivie par Vladimir Poutine, comme Castro l’explique dans son livre.
Alors que les réalisations historiques (éducation gratuite et soins de santé performant) sont préservées à Cuba, un programme d’austérité brutal a cependant été infligé à la masse de la population. Le régime a été obligé de faire des concessions « au marché » et donc au capitalisme. A travers la « dollarisation », une économie parallèle s’est développée et a amené certains privilèges pour ceux travaillant dans le tourisme (payé en dollars) et les secteurs impliquant certains partenariats économiques internationaux.
Malheureusement, ceux qui restent défenseurs de l’économie planifiée, comme les médecins, les enseignants, etc., sont toujours payé en peso cubain et souffrent énormément. Selon le célèbre auteur de gauche Richard Gott, même le monopole de l’Etat sur le commerce extérieur a été formellement aboli en 1992. Mais Cuba reste essentiellement une économie planifiée, avec des entreprises étrangères requerrant des autorisation du ministère du commerce pour effectuer leurs opérations. La décentralisation c’est opéré avec des centaines d’entreprises pouvant importer et exporter librement. Castro a cependant déclaré « que rien d’utile ne sera privatisé à Cuba et peut donc être maintenue comme une propriété de la nation des collectivité de travailleurs ».
Il n’est pas exact actuellement de dire que la bureaucratie et les inégalités n’existent pas à Cuba. Fidel Castro l’a déclaré par le passé ainsi que dans son dernier livre. Il n’est pas la copie conforme de Staline comme l’on essayé de faire croire ses opposants capitalistes. Aucun culte de la personnalité financé par l’Etat n’existe à Cuba, et on ne voit aucun portait, statue ou image de Castro tant qu’il est vivant. De plus, alors qu’il admet ouvertement avoir commis des erreurs et zigzagué d’une politique à l’autre en causant significativement du tort lors des 49 dernières années, rien de tout cela n’est comparable aux crimes monstrueux du stalinisme : collectivisation forcées, grandes purges, etc.
Politiques changeantes
Ce livre révèle aussi un comportement parfois erratique de Fidel Castro. Il a par exemple proposé au dirigeant soviétique Nikita Khrouchtchev lors de la crise des missiles en 1962 une « première attaque » nucléaire soviétique contre les Etats-Unis. Khrouchtchev répondit à Castro : « Vous me proposez de mener une « première attaque » contre le territoire ennemi. Ceci ne sera pas une simple attaque mais le début d’une guerre thermonucléaire. » [p281]
Castro s’en prend parfois à Staline : « Il a été responsable, de mon point de vue, pour l’invasion en 1941 de l’URSS par la puissante machine de guerre Hitlérienne, sans même que les forces soviétiques ai entendu un appel de mobilisation… Tout le monde connaît ses abus de pouvoir, la répression, et sa personnalité, le culte de la personnalité. ». Mais il affirme aussi que Staline « a l’immense mérite d’avoir industrialisé le pays, déplacé les industries militaires en Sibérie ; des facteurs décisifs dans la grande bataille mondiale contre la nazisme. ».
Il affirme que Staline c’est « lui-même désarmé », mais en réalité a démantelé les défenses de l’union soviétique alors que les Nazis se préparaient à attaquer. Mais Staline n’était pas le concepteur originel du « plan quinquennal » ainsi que de son idée d’industrialisation. C’est Trotsky et l’opposition de gauche qui a formulé ces idées en premier. Staline les a empruntés et appliquées bureaucratiquement à grands frais inutiles pour l’Union Soviétique et sa population. Et Castro nie ostensiblement – à tort comme l’a indiqué Célia Hart – que Che Guevara a pu avoir des « sympathies trotskystes ». Castro affirme qu’il « ne l’a jamais entendu parler de Trotsky… Il était léniniste et, sur certains point reconnaissait des mérite en Staline ». Che Guevara, il est vrai, n’était pas un trotskiste conscient et convaincu. Mais lors de sa dernière période à Cuba il est devenu critique par rapport à la bureaucratie, et particulièrement dans les pays dis « socialistes » qu’il avait visité. De plus il avait un livre de Trotsky dans son sac de voyage quand il a été assassiné en Bolivie en 1967.
Castro révèle dans ces commentaires, au mieux, une compréhension inégale du Stalinisme, d’un point de vue « sociologique » et politique. L’erreur des collectivisations forcées, les procès monstrueux, les purges, l’anéantissement des derniers restes de l’héroïque parti bolchevique n’étaient pas juste le résultat de la personnalité de Staline ou des « erreurs » mais bien les conséquences du caractère bureaucratique de la machine qu’il a mis en place. Staline dirigea une contre-révolution politique bureaucratique qui craignait le mouvement indépendant de la classe ouvrière et les idées de démocratie ouvrière, comme l’analysa brillamment Trotsky. Fidel Castro et Che Guevara se distancient de Trotsky et de sa critique du Stalinisme car le régime cubain est, en fin de compte, lui aussi dirigé par une élite bureaucratique détachée des masses populaires.
Cuba et sa révolution est différente en de nombreux points avec la révolution russe, et Castro n’est pas Staline. Cependant, malgré son énorme popularité à ses débuts, ses faiblesses étaient traduites par le manque de contrôle et de gestion démocratique ainsi que par l’absence de conscience de classe claire parmi la classe ouvrière et les pauvres. Castro affirme lui-même qu’une « conscience socialiste » n’était pas présente au début. En outre, il n’y a tout au long du livre pas de perception claire du rôle de la classe ouvrière – comme expliqué par Marx- dans le rôle de moteur de la révolution socialiste, ni de son rôle de contrôle, avec les paysans pauvre, de l’Etat ouvrier né de la révolution.
Il parle de 1968 mais reste silencieux sur le mouvement ouvrier en France cette année là, la plus grande grève générale de l’histoire. Il ignore aussi honteusement les massacres d’étudiants la même année au Mexique. A ce moment, à cause des liens diplomatiques avec le Mexique (le seul Etat d’Amérique latine a avoir reconnu Cuba à l’époque) Castro n’a pas dis un mot à propos des actions meurtrière du gouvernement mexicain.
Quel est le caractère de l’Etat cubain ?
La conséquence de tout cela est que l’Etat dominé par Fidel Castro et Che Guevara, tous deux énormément populaire pour avoir guidé et installé la révolution aux portes du monstre US, n’est pas contrôlé par des conseils ouvriers et paysans, comme c’était le cas en Russie en 1917. Ceci classe historiquement l’Etat cubain et le type de société qui émergea par la suite.
Ceci se reflète dans la pensée de Castro à propos du caractère de l’Etat qu’il préside. Questionné par l’auteur Volker Skierka, Castro affirme directement : « Je ne pense pas qu’il faut avoir plus qu’un parti… Comment notre pays aurai t’il pu tenir debout en étant coupé en dix pièces ?… Je pense que l’exploitation de l’homme par l’homme doit cesser avant qu’on puisse avoir une réelle démocratie. »
Cependant, sans réelle démocratie ouvrière, la transition vers le socialisme est impossible. La fin du monopole du parti unique, des élections libres et transparentes pour des conseils ouvriers avec le droit à tous de se présenter (incluant les trotskystes), un contrôle strict des revenus et le droit de révoquer les élus est le minimum d’exigences pour un Etat ouvrier démocratique. Sans réel contrôle et sans gestion de l’Etat et de la société, une machine bureaucratique va inévitablement se mettre en place et remettre en cause l’existence de l’économie planifiée. Ceci peut être une réalité dans une économie fort avancée et développée, pas comme Cuba qui n’a qu’un PIB représentant 0,3 % du PIB des Etats-Unis.
Il est vrai qu’au début des années 90, faisant face à une situation économique en détérioration, un débat ouvert sur la constitution est apparu à Cuba, et des amendements constitutionnels (incluant une forme d’élections directes) furent proposé à l’assemblée nationale. Cette démarche était cependant toujours réalisée sur la base d’un candidat par siège au parlement. C’était une forme de « démocratie » permettant aux électeurs de choisir un candidat d’une liste, mais juste d’un seul parti. Aux récentes élections de janvier 2008, il y avait 614 candidats pour 614 sièges ! Parallèlement, les membres du comité central du parti communiste, le politburo et le conseil d’Etat, étaient soumis au veto, si nécessaires, de Fidel Castro.
Dans « Ma vie », Fidel Castro semble contrer l’idée d’avoir un tel pouvoir quand il commente l’exécution du chef de l’armée Arnoldo Ochoa pour trafic de drogue présumé. Il affirme : « C’était une décision unanime du conseil d’Etat, qui avait 31 membres… Le conseil d’Etat est devenu un juge… La chose la plus importante est que vous avez à lutter pour vous assurer que chaque décision est prise par consensus entre tous les membres. » Le fait qu’une décision consensuelle a pu être prise au conseil d’Etat dans une situation aussi importante et hautement controversée en dis long sur cette institution et sur le pouvoir détenu par Castro.
Dans l’introduction de son livre, même Ramonet déclare que Castro « prend toutes les décisions, petites et grandes. Malgré le fait qu’il consulte avec beaucoup de respect et de professionnalisme les autorités politiques concernées du parti et du gouvernement pendant le processus de décision, c’est Fidel qui a le dernier mot. ». Castro réfute cette accusation : « Beaucoup de monde me considère comme un voisin, me parle. ». En fin de compte, le pouvoir est détenu dans tout Etat par des dirigeants et des partis. Mais chaque direction et chaque parti devrait, spécialement dans un Etat ouvrier sain, être strictement contrôlé par les masses de la base.
Dans un Etat ouvrier sain, tel qu’il existait en Russie entre 1917 et 1923, ce pouvoir était détenu par les soviets (assemblée) avec un contrôle strict des différences salariales, un droit de révocation des élus,etc. Ceci n’existe malheureusement pas encore à Cuba. C’est pourquoi le dilemme posé en Union Soviétique est également posé à Cuba, mais à une échelle plus réduite et sans l’héritage monstrueux du Stalinisme. Léon Trotsky a posé la question il y a 70 ans en parlant de l’Union Soviétique : « La bureaucratie va t’elle dévorer l’Etat ouvrier, ou la classe ouvrière va-t-elle nettoyer la bureaucratie ?… Les ouvriers ont moins peur, en jetant dehors la bureaucratie, d’ouvrir la voie de la restauration capitaliste. »
Mécontentement grandissant
Pour de grandes parties de la population cubaine, ceci résume probablement l’état d’esprit actuel. Le mécontentement s’étend, et particulièrement parmi la nouvelle génération. En effet 73% de la population est née après le triomphe de la révolution en 1959. L’aliénation de la nouvelle génération risque d’amener une « révolution sans héritiers ». Le remplacement de Fidel Castro par son frère Raul ne résoudra pas le problème sous-jacent. Il est associé à l’armée cubaine comme ministre de la défense.
Au début des années 90, Raul était confronté à une forte austérité et eu l’idée d’utiliser l’armée dans quelques « expériences sur l’économie de marché ». Des officiers étaient envoyés étudier la gestion hôtelière en Espagne et la comptabilité en Europe. Raul a visité la Chine plusieurs fois afin d’étudier les politiques économiques de Pékin. Hans Modrow, le dernier premier ministre de la RDA, est actuellement en visite à Cuba pour partager des expériences sur la transition de son pays vers le capitalisme. Raul a aussi réduit la taille de l’armée et a poussé à une série d’innovations : des marchés de fermiers, le travail indépendant des plombiers, coiffeurs et autre entrepreneurs peu importants. C’est au travers de telles mesures que le capitalisme a déjà été réintroduit à Cuba, mais pas encore dans une position permettant la destruction des principaux aspects de l’économie planifiée.
Il y a sans aucun doute des divisions au sein même de l’élite bureaucratique qui contrôle Cuba. Une partie voudrai « s’ouvrir » au capitalisme dans une forme « démocratique ». Leur difficulté est la loi Helms-Burton américaine. Même ces bureaucrates qui souhaiteraient le démantèlement de l’économie planifiée sont confronté à la perspective du retour à Cuba des réfugiés de Miami protégé par l’impérialisme US : « Pour mettre aux enchères les entreprises publiques, et vendre au plus offrant » (The wall street journal). Tout comme en Allemagne de l’est après la chute du mur, ces brutes demanderont vigoureusement le retour de « leur propriété », y compris des maisons occupées par des ouvriers et des paysans aujourd’hui. De plus, ils n’hésiteront pas à recourir à des bains de sang à l’encontre toute personne associée au régime de Castro.
Plusieurs événements, et particulièrement les élections présidentielles américaines, pourraient avoir un effet profond sur Cuba. Barack Obama a déjà indiqué qu’il adopterai une ligne moins dure par rapport aux ennemis traditionnels des Etats-Unis : Cuba, Iran etc. B. Obama ou même Hillary Clinton – malgré ses récentes déclarations belliqueuses à l’encontre du régime cubain – pourrait agir pour démanteler partiellement ou totalement l’embargo. En Floride, la récession économique américaine apparaît avec des rangées entières de propriété vides. Même la nouvelle génération de réfugiées de Miami a atténué son opposition à la fin de l’embargo, pourtant longtemps implacable.
Il y a déjà une pression considérable d’agriculteurs, du secteur touristique, sans parler de McDonald’s, afin de baisser les barrières pour prendre de bonnes parties bien profitable de Cuba. 100 membres du congrès américain demandent la levée de l’embargo. Et c’est bien cela qui est le plus grand danger pour les restes de l’économie de marché à Cuba. Des millions de touristes américains envahissant Cuba, même avec des dollars dévalués dans leurs poches, risque de donner un sérieux coup, peut-être mortel aux éléments restant de l’économie planifiée. Comme l’a expliqué Léon Trotsky, le réel danger pour un Etat ouvrier isolé n’est pas vraiment une invasion militaire mais « des biens bon marché dans les bagages de l’impérialisme ». Cette « invasion » de Cuba prendrai de nos jours vraisemblablement la forme du tourisme et des investissements capitalistes si le régime « s’ouvrait » dans le futur, sous Raul ou tout autre dirigeant. Mais ceci est une perspective peu probable, tant que Fidel sera en vie. Un réel danger de restauration capitaliste est cependant toujours existant.
Le pétrole vénézuélien est vital pour Cuba. Mais que se passera t’il en cas d’explosion des cours du pétrole, ce qui est probable avec le début de la récession économique mondiale ? Le Venezuela sera profondément affecté, et par conséquent Cuba aussi.
Il y a , et cela ne fait aucun doute, une autre frange de la direction et de la bureaucratie cubaine qui fera tout pour maintenir l’économie planifiée. Les marxistes, comme Trotsky l’a préconisé, devraient dans cette phase critique former un bloc avec cette frange de la direction et de la bureaucratie cubaine et chercher à mobiliser une résistance cubaine de masse contre toute menace de retour au capitalisme.
Démocratie ouvrière
Ceux qui, comme le membre du parlement britannique George Galloway, affirment que c’est l’embargo capitaliste sur Cuba qui est un important facteur de manque de démocratie sur l’île ont raison. Toutes les révolutions – même la guerre civile aux Etats-Unis – confrontées à une contre-révolution armée ont refusés de donner la liberté d’agir à ses opposants sous prétexte de « démocratie ». Mais nous ne soutenons pas à Cuba la liberté pour la contre-révolution de s’organiser afin de renverser la révolution. Vu les avantages de l’économie planifiée, et particulièrement si celle-ci s’organiserai dans le cadre d’une confédération socialiste démocratique rassemblant le Venezuela, la Bolivie et éventuellement l’Equateur, les contre révolutionnaire désirant revenir à la barbarie de la propriété terrienne et du capitalisme tel qu’il existe sur le continent Latino Américain auraient peu de marge de manœuvre.
Cependant, si la question de l’interdiction de partis politiques de droite désirant un retour au capitalisme peut être un sujet un débat, ce ne devrai pas être le cas de la question de la démocratie ouvrière. Tout ceux qui soutiennent l’économie planifiée, y compris les trotskystes et autres, devraient pouvoir agir à Cuba. Ceci devrai faire partie du maintien et de l’extension de l’économie planifiée. Sans démocratie ouvrière, Cuba pourrait se retrouver des décennies en arrière et avec cela les espoirs de révolution socialiste en Amérique latine et dans le monde sérieusement mis à mal. Le maintien de cette révolution ne devraient pas être mis dans les mains d’un seul homme, aussi loyal et courageux soit t’il, ni dans les mains d’un groupe d’hommes et de femmes, mais dans les mains d’une classe ouvrière cubaine engagée et politiquement consciente, et liée aux masses d’Amérique latine et d’ailleurs.
Ceci ne peut être accompli par le haut, comme l’ont montré les erreurs de Hugo Chavez au Venezuela. Les décisions doivent être prise tout de suite pour organiser une campagne de masse à Cuba afin de préparer le terrain à une vraie démocratie ouvrière. La crise mondiale du capitalisme globalisé et la révolte contre le néo-libéralisme en Amérique latine renforcent la perspective de défendre et de consolider les acquis de la révolution cubaine. Mais il ne faut pas perdre de temps dans lutte pour la démocratie ouvrière et le socialisme à Cuba, au Venezuela, en Bolivie et ailleurs.