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Tag: Fine Gael
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Référendum irlandais : La campagne du ‘OUI’ a utilisé toutes les menaces possibles
Aujourd’hui, les Irlandais se prononcent par référendum concernant le Pacte budgétaire européen, également qualifié de traité d’austérité. Une victoire du ‘oui’ serait utilisée comme une justification pour de nouvelles attaques antisociales, comme des coupes budgétaires et des augmentations de taxes. Le texte ci-dessous a été écrit par Joe Higgins, député du Socialist Party (notre parti frère en République irlandiase).
Joe Higgins, député du Socialist Party (CIO-Irlande)
Si vous votez ‘Non’, vous serez exiles en Sibérie ! C’est très probablement la seule menace qui n’a pas été utilisée contre le people irlandais au cours de ces dernières semaines. Et il ne faut pas être surpris si elle sort encore dans cette dernière ligne droite de la campagne sur le référendum au sujet du Traité fiscal/d’austérité.
Cette campagne a rapidement atteint le niveau ‘un autre jour, une nouvelle menace’. La semaine dernière, le ministre des finances a lu au Parlement un avis du National Treasury Management Agency [NTMA, l’agence de gestion de la dette publique] qui déclarait qu’il : ‘‘considère qu’un ‘Non’ au référendum signifierait, selon toute vraisemblance, qu’il ne serait pas possible pour l’Irlande d’entrer dans les marchés obligataires à des taux durables.’’ En laissant de côté le fait qu’un organisme d’État s’implique ainsi dans un débat politique très polarisé, nous constatons que cette agence n’a toutefois aucunement affirmé l’inverse, à savoir qu’une victoire du ‘oui’ garantirait l’accès à ces mêmes marchés.
Juste histoire d’assurer que nous n’ayons pas manqué cette prétendue nouvelle menace pesant sur le financement de l’État, le porte-parole du Fianna Fail [le parti d’opposition capitaliste] a demandé au ministre de répété son point. ‘‘Le ministre peut-il clarifier le conseil que lui a donné le NTMA?’’ Et le ministre de répondre : ‘‘Je vais à nouveau relire ma note pour le député (…)’’ Réponse du député concerné : ‘‘Ces conseils sont-ils en accord avec l’opinion du ministre en tant que ministre des Finances ?’’ Le ministre conclut enfin : ‘‘Cela rencontre pleinement mon opinion’’.
Quelle impressionnante solidarité entre le ministre des finances du Fine Gael [le principal parti capitaliste au sein du gouvernement] et le loyal parti d’opposition Fianna Fail ! Frères dans l’austérité et les menaces ! Nulle trace ici des attaques du dirigeant du Fianna Fail, Micheal Martin, lancées contre le Pacte fiscal lorsqu’il a été annoncé suite à un sommet européen en décembre dernier. Se référant aux objectifs du déficit budgétaire structurel et de la réduction automatique de la dette, il avait déclaré à ce moment-là que ‘‘les nouveaux objectifs sont très inquiétants. Il semblerait qu’ils mineraient significativement la croissance et constitueraient un frein sur l’emploi (…) en d’autres termes (…) une austérité efficace sur une base permanente.’’
Il est heureux pour lui que les médias aient massivement fait campagne pour le ‘oui’. Dans le cas contraire, il aurait pu avoir à s’expliquer publiquement sur son engagement dans une campagne destinée à faire passer un traité qui représente un tel désastre et qui, selon lui, loin de ‘‘sauver le marché de la dette souveraine européenne, cela signifierait sa fin.’’
Que masquent ces menaces ?
Ce n’est pas par hasard que les menaces se multiplient du côté du gouvernement. Le genre d’austérité inflexible et institutionnalisée tel qu’inscrit dans ce traité a démontré l’étendue de ses conséquences catastrophiques en Grèce, tandis que l’économie irlandaise est elle aussi en crise profonde après des années de mesures d’austérité. Toutes les menaces du camp du ‘oui’ sont autant de tentatives désespérées visant à masquer ces faits et à éviter d’avoir à répondre à des questions au sujet du détail des futures coupes budgétaires et augmentations d’impôts qu’impliqueront la mise en œuvre de ce traité à partir de 2015.
Les Irlandais sont quotidiennement menacés avec diverses menaces, et il s’agit d’une grave infraction au droit du peuple irlandais de voter librement et sans contrainte. Il convient de rappeler que la contrainte physique et la violence ne sont pas les seules armes d’un despote. Les menaces économiques et l’intimidation sont également souvent employées.
Ce qui se passe actuellement en Allemagne explique l’empressement du gouvernement irlandais pour essayer de nous forcer à voter pour l’austérité. Le Parlement fédéral allemand devait récemment voter sur ce même traité. Mais les parlementaires sociaux-démocrates et verts ont refusé de donner la majorité des deux tiers nécessaire parce que les mesures à venir ne sont pas claires. Mais le gouvernement irlandais, composé du Fine Gael et du Parti Travailliste, sont tellement poltrons qu’ils ne veulent pas laisser le moindre espace au peuple irlandais.
Le ‘oui’ est essentiellement une invitation pour que le peuple irlandais se rendre complice des mesures d’austérité qui s’appliqueront à lui-même. La victoire du ‘Oui’ serait utilisée par ce gouvernement et les prochains comme la justification de nouvelles attaques antisociales : "Vous avez voté pour ces objectifs, vous ne pouvez pas vous plaindre maintenant."
La possibilité d’une alternative à l’Europe d’austérité est maintenant en train d’apparaître. Les révoltes électorales en France et en Grèce, le mécontentement grandissant en Espagne, l’anxiété aux Pays-Bas et l’opposition de certaines sections de la classe ouvrière allemande sont autant d’éléments caractéristiques de l’aspiration croissante pour une alternative. Avec un ‘non’, les Irlandais peuvent renforcer cette voix qui exige, à une échelle continentale, de mettre fin aux effets destructeurs des mesures d’austérité imposées par les requins de la finance et de construire une alternative au capitalisme-casino qui enrichit une infime minorité au détriment des intérêts de la grande majorité.
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Reprise de la lutte des classes en Europe tandis que la crise de la zone euro s’approfondit
Le Comité Exécutif International (CEI) du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) s’est réuni du 17 au 22 janvier 2011, en Belgique, avec 33 pays d’Europe, d’Asie, d’Amérique Latine et d’Afrique représentés. Après le premier rapport du meeting du CEI sur la situation mondiale, voici un rapport de Finghin Kelly sur les développements cruciaux en développement en Europe.
Finghín Kelly, Socialist Party (CIO en Irlande)
L’année dernière, l’Europe a connu une forte remontée des luttes, avec des mobilisations et des mouvements considérables. L’Europe a aussi été balayée par les mouvements Occupy et des Indignés. C’est dans ce contexte et celui de la crise économique, politique et sociale que le CEI a discuté des perspectives européennes, discussion introduite par Tony Saunois et conclue par Clare Doyle, tous deux membres du Secrétariat International du CIO.
La classe dominante européenne a implanté des programmes d’austérité vicieux pour tenter de faire payer la crise du capitalisme à la classe ouvrière. Les réformes qui ont été obtenues après des années de lutte, comme les droits à la pension, à la sécurité sociale, les conditions de travail et les dépenses sociales, sont maintenant violemment attaquées. Ce processus élimine tous les acquis et conquêtes de la classe ouvrière depuis la seconde guerre mondiale. C’est une réponse aux idées réformistes de l’après-guerre, dans une période de croissance économique, qui a laissé place à un retour sur les conditions de vie et l’Etat-providence. Cela ne veut toutefois pas encore dire que les idées réformistes ne vont pas resurgir.
L’approfondissement de la crise de la zone euro, à laquelle le capitalisme est complètement incapable de répondre, est une bonne illustration de l’instabilité et de la fragilité de la position des capitalistes.
En réponse à cela et à la montée de la riposte des travailleurs contre les plans des banques et du marché, les Etats utilisent de plus en plus des méthodes autoritaires, anti-démocratiques ou celles du ”Bonapartisme parlementaire”, avec une augmentation de la répression et le minage des institutions ”démocratiques”.
Les attaques de l’austérité sont visibles partout en Europe. Les contributeurs à la discussion ont illustré la nature de l’austérité dans chaque pays ainsi que la révolte et les résistances qu’elles ont provoquées. L’austérité et la réaction à celle-ci ont particulièrement été aigües en Grèce. Les contributions des participants Grecs au CEI ont montré quelle situation explosive existe dans ce pays.
La Grèce a connu 14 grèves générales, dont deux de 48 heures, au cours des deux dernières années uniquement. Plusieurs intervenants ont vivement montré ce que l’austérité signifie pour les travailleurs grecs. Les conditions de vie se sont effondrées, avec des parts entières de la société ruinées ou appauvries, dont une partie de la classe moyenne. Le chômage est massif : celui des jeunes est maintenant proche de 50%. Des enquêtes montrent que 91% des foyers ont subi une forte baisse de leur revenu – en moyenne une diminution de 30%. Maintenant, 78% des foyers ont des difficultés à subvenir à leurs besoins. Ceci a conduit à des exemples tragiques de familles proposant leurs enfants à l’adoption.
L’émigration est un problème énorme dans beaucoup de pays ; l’Irlande, l’Espagne, le Portugal et la Grèce en particulier connaissent une émigration massive des jeunes. Non seulement cela a des conséquences sociales dévastatrices, mais cela complique les luttes de masse et peut agir comme une soupape temporaire pour le capitalisme, car les couches les plus énergiques sont alors éloignées des luttes.
Mouvements sociaux
Le CEI a entendu beaucoup de rapports des mouvements sociaux en Grèce, dont le mouvement de non-paiement d’une nouvelle taxe par foyer, et d’autres campagnes contre les péages routiers et le prix du métro et du bus après des hausses massives. Le CEI a aussi entendu des rapports du mouvement qui rejette l’implantation d’une décharge dans une ville grecque, une révolte ouverte contre les autorités.
Ces mouvements considérables ne sont pas confinés à la Grèce; le Portugal a connu sa plus grande grève générale depuis 1974. En Grande Bretagne et en Irlande du Nord, le secteur public a mené une grève historique contre les attaques du gouvernement de coalition contre les retraites. Entre 1 et 2 millions de travailleurs sont entrés en action : c’est la plus grande grève depuis la Grève Générale de 1926. La Belgique a aussi connu de grandes mobilisations et une grève générale du secteur public en décembre. Le 30 janvier, il y aura une grève générale contre l’austérité du nouveau gouvernement (ce rapport a été publié en anglais avant que celle-ci ne se déroule, NDLR).
L’Espagne a été secouée par les mouvements de masses, qui ont impliqué des millions de travailleurs et de jeunes, un mouvement qui a joué un rôle-clé dans le renversement du gouvernement Zapatero. De plus, l’Espagne a été le terrain du développement du mouvement des Indignados, qui s’inspirait des révolutions en Afrique du Nord et au Moyen-Orient et s’est à son tour exporté à travers le monde et a nourri le mouvement Occupy. Le CEI a entendu beaucoup de rapports de ces mouvements.
Ces mouvements ont été une manifestation importante de la jeunesse radicalisée qui souffre d’un chômage élevé et est touchée par l’austérité. En Espagne, le chômage est de 21%, celui des jeunes est maintenant de 50%.
Le mouvement Occupy est arrivé comme une première réponse des travailleurs et des jeunes à cette crise historique. C’est un mouvement extrêmement important et significatif qui s’est approfondi et qui a eu plus d’effet que les mouvements anticapitalistes de la dernière décennie. Ce mouvement contient des éléments des « mouvements sociaux », qui ont émergé en Amérique Latine dans les dernières décennies par des luttes construites par la base pour combattre dans l’intérêt des principaux secteurs de la société. Tout comme dans ces mouvements, la question de lier le mouvement Occupy aux luttes de la classe ouvrière organisée est décisive. Il est nécessaire de lier les mouvements sociaux aux mouvements de la classe ouvrière. Les camarades du CIO au Brésil ont connu une situation similaire et se sont battus pour la formation d’une nouvelle centrale syndicale, Conlutas, qui inclut les mouvements sociaux tout en étant basée sur la classe ouvrière.
Tendance anti-capitaliste
Ces mouvements représentent le développement d’une tendance antisystème et anticapitaliste. Dans de nombreux cas, il lui a manqué une alternative claire par laquelle remplacer le capitalisme. Une autre caractéristique significative de ces mouvements, c’est que, bien qu’ils n’aient la participation active que d’une minorité, le soutien pour ces mouvements est très large parmi la classe ouvrière.
Il y a eu une discussion sur l’atmosphère « anti-parti » de ces mouvements. Cette tendance reflète le scepticisme et même l’hostilité envers les partis politiques traditionnels. Les marxistes doivent dialoguer avec ces mouvements sur l’alternative au capitalisme, présenter le socialisme et lier les mouvements à la classe ouvrière et des communautés organisées, défendant l’idée du besoin d’un instrument politique pour la classe ouvrière pour permettre la lutte pour le socialisme.
Le développement de la conscience de différentes parties de la société, et de la classe ouvrière en particulier, a été discuté au CEI. Beaucoup de travailleurs espèrent encore que les politiques réformistes ou Keynésianistes peuvent vaincre la crise, alors que d’autres en arrivent à la conclusion que le capitalisme est dans une impasse.
La politique du “moindre mal” vue dans les élections, ou les succès des partis sociaux-démocrates dans les sondages, ont aussi été discutés. Cela ne reflète pas de grandes illusions dans ces partis mais un espoir qu’ils pourront amoindrir les effets des mesures d’austérité. Le soutien pour ces partis peut très vite s’éroder. Cela s’est vu en Irlande, où une coalition Fine Gael / Labour a été élue en février à une large majorité, dans l’espoir qu’ils « brûleraient les porteurs d’obligations ». Mais ces espoirs ont été balayés par les politiques de coupes du nouveau gouvernement de coalition.
La question du moindre mal est posée dans plusieurs pays dont la France, où le parti « socialiste » peut mettre en échec Sarkozy cette année (surtout après la perte du triple A par la France). Cette question est fortement liée au manque d’alternatives de masse à gauche des partis traditionnels. L’échec du NPA en France à se développer comme une référence massive dans un contexte de radicalisation montante est aussi décisif. En Espagne, ce même facteur a conduit à la venue au pouvoir du parti de droite PP : bien que son soutien n’ait pas beaucoup augmenté. Beaucoup se sont tournés vers lui pour porter un coup au gouvernement PSOE, qui a été massacré aux élections de novembre.
Les intervenants ont montré comment une conscience socialiste relativement faible parmi les masses de la classe ouvrière peut être un facteur-clé dans la limitation des mouvements de masse d’opposition.
C’est en train de changer et on peut s’attendre à des bonds en avant dans la conscience de classe à mesure que la lutte se développe, ce qui va augmenter de beaucoup l’attrait pour le socialisme. L’idée et le mot « socialisme » ont été entachés, non seulement par le stalinisme, mais aussi par les gouvernements « socialistes » qui en Europe du Sud ont appliqué des programmes d’austérité. Cela renforce le rôle des marxistes et socialistes authentiques d’expliquer et de populariser une alternative socialiste basée sur la propriété publique et le contrôle démocratique des principales ressources et industries de la société à travers un gouvernement des travailleurs.
Rôle des syndicats
Le rôle joué par les directions syndicales et les partis de gauche a été indentifié comme un facteur qui bride le développement de la conscience de la classe ouvrière. Là où les dirigeants syndicaux ont appelé à une grève, ils l’ont généralement fait les dents serrées et seulement après une forte pression venue d’en bas.
Dans certains cas, les syndicats ont été désertés par leurs activistes et ne sont plus des pôles d’attraction pour les jeunes et les chômeurs radicalisés. Certains des appareils syndicaux sont devenus des organisations « jaunes » ou « d’entreprise » qui agissent comme le bras droit du patronat. C’est une complication pour la lutte. C’est une tâche essentielle pour les militants de se battre pour construire des groupes d’opposition dans les syndicats et essayer de se réapproprier les syndicats. Les véritables socialistes n’adoptent pas une approche sectaire ou gauchiste des syndicats mais doivent aussi se préparer à des scissions et la formation de nouvelles organisations syndicales.
Le CEI a discuté de l’échec des nouveaux partis et formations de gauche à exploiter la situation.
Beaucoup n’ont pas réussi à attirer les secteurs radicalisés de la jeunesse et n’ont pas été actifs dans les luttes. Ils ont échoués à augmenter en nombre, bien que dans quelques cas ils aient eu quelques succès électoraux et de bons résultats dans les sondages.
Il est clair que la crise économique s’intensifie mondialement ; l’Europe et l’Euro sont au cœur de la crise. La question de l’éclatement de l’euro et d’une reconfiguration de l’UE est posée. Le CEI a discuté en profondeur et en détail de comment la crise peut se développer et des conséquences de cela.
Les dégradations de notes par les agences de notation montrent qu’elles n’ont pas confiance en les programmes d’austérité pour sortir de la crise. La question du défaut de paiement est beaucoup posée, les « marchés » et beaucoup de commentateurs capitalistes indiquent que le défaut de paiement de la Grèce et du Portugal est une possibilité immédiate. Cela serait le premier cas d’un pays occidental depuis 70 ans.
Quel futur pour l’euro?
L’éclatement de l’euro aurait de lourdes conséquences pour l’économie européenne et mondiale. Les estimations montrent qu’un million d’emplois disparaitraient rien qu’en Allemagne et que le PIB de l’Allemagne diminuerait de 25%. Les classes dirigeantes capitalistes d’Allemagne et des autres pays feront donc tout ce qu’elles peuvent pour garder l’euro. Les euros-obligations ou un plus grand rôle de la BCE sont mis en avant comme moyen de sortir de la crise par beaucoup de commentateurs capitalistes et une partie de la gauche soutient ces mesures. Beaucoup d’intervenants en ont parlé au CEI. Les différents pouvoirs capitalistes agiront pour protéger leurs intérêts nationaux. Le capitalisme allemand ne veut pas voir l’utilité des euros obligations à ce stade. Cependant, il pourrait y être amené par la pression des évènements, dans une tentative désespérée de sauver l’économie européenne du désastre. Mais même cela ne sera pas une solution à la crise, ni à long ni même à moyen terme.
Plusieurs intervenants ont aussi souligné et discuté de la tendance accrue à court-circuiter les procédés démocratiques parlementaires « normaux » et le rognage des droits démocratiques. L’année dernière, des gouvernements « technocratiques » ont été imposés en Italie et en Grèce, quand les marchés et l’UE ont perdu la foi dans la capacité des gouvernements de ces pays à mener à bien les énormes coupes d’austérité.
Le gouvernement italien qui a été intronisé était, en réalité, un gouvernement des banquiers, puisque chaque membre du cabinet a un passé dans les grandes banques ou les institutions financières ou de forts liens avec elles.
La commission européenne a aussi accru son intervention dans de nombreux pays ; ce qui se voit clairement dans les pays « programme », où des programmes d’austérité détaillés ont été planifiés par la « troïka », en conjonction avec les gouvernements nationaux. Même dans les autres pays, cette intervention a augmenté. En Belgique, la Commission a exigé que le gouvernement se réunisse un weekend pour trouver d’autres idées de coupes, parce que selon elle, les coupes n’allaient pas assez loin.
Mesures autoritaires
L’érosion de la démocratie ne s’est pas faite seulement aux niveaux des parlements et des gouvernements ; une tendance générale à l’usage de mesures étatiques autoritaires, la répression et la criminalisation des protestations, ont été discutés. Cela s’est vu dans les tentatives de mettre fin au mouvement Occupy, en Espagne et partout ailleurs.
L’érosion des droits démocratiques est évidente en Hongrie, le premier pays européen à être renfloué par le FMI pendant la crise économique. Les délégués ont rapporté les attaques au droit de grève, le nouveau code du travail et les camps de travail pour les chômeurs-longue durée. Comme dans les autres pays, les droits aux pensions et aux retraites anticipées ont été attaqués. La répression contre les Roms a empiré. Un nouvel impôt à taux unique augmente les difficultés économiques des pauvres. La liberté des médias a été rognée par de nouvelles lois. Une nouvelle constitution introduite par le gouvernement ronge beaucoup de droits démocratiques de base.
En même temps qu’une crise économique, les classes capitalistes européennes font face à une crise politique. Les réserves politiques de la bourgeoisie leur échappent parce que les partis politiques traditionnels sont discrédités par leurs politiques de coupes. Nous avons vu une série de crises gouvernementales en Europe. Tous les pays au premier plan de la crise de l’euro ont subi des changements politiques : l’Italie, l’Espagne, la Grèce, l’Irlande et le Portugal ont changé de gouvernement en 2011.
Même en Allemagne, où il y a eu quelque croissance économique, cela n’a pas donné un coup de pouce aux partis dirigeants. Par exemple, le FDP est en crise et est menacé de perdre ses représentants parlementaires.
Des évènements tumultueux dans les mois à venir
Les anciens partis des travailleurs se sont encore droitisés pendant la crise et se sont discrédités aux yeux des travailleurs. Le Labour en Grande Bretagne a dit qu’il ne reviendrait pas sur les coupes du gouvernement Con-Dem quand il reviendrait au gouvernement. En Italie, le PD (Parti Démocrate) a voté pour les coupes de Monti !
Dans un certain nombre de pays, le vide politique est partiellement rempli par les forces de droite. Le Front National en France utilise cyniquement une rhétorique populiste anti-banque pour essayer d’augmenter son soutien. L’émergence du parti néo-fasciste Jobbik en Hongrie a aussi été discutée en exemple de la façon dont l’extrême-droite peut occuper cet espace. Le danger de l’extrême-droite et la menace raciste peuvent être combattus par le mouvement ouvrier avec un clair programme de classe qui unifie les travailleurs contre les attaques néolibérales et lutte pour les emplois, le logement et des aides sociales pour tous, et pour un vrai changement de système.
Dans cette situation, la question nationale va réapparaitre. Les développements en Écosse et en Espagne ont été discutés par les intervenants de ces pays, où la crise a fait monter la question nationale et posé la question du séparatisme. Les forces du CIO, tout en défendant le droit à l’auto-détermination, opposent une alternative de lutte unifiée et socialiste pour atténuer le nationalisme bourgeois.
De cette excellente et très riche discussion, il ressort très clairement que l’Europe va connaitre des évènements tumultueux dans les mois et années qui viennent, au fur et à mesure que la crise économique et politique s’approfondit. Cela va donner au CIO d’énormes opportunités pour construire le soutien aux idées socialistes.
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Une année 2011 turbulente
Cette année 2011 a été marquée par une crise intense et de plus en plus profonde des structures économiques et sociales du capitalisme européen. En Irlande, les manifestations de cette situation sont extrêmement dramatiques. Dans cet article, Joe Higgins, élu de notre parti-frère le Socialist Party au Parlement irlandais, commente l’année écoulée et les perspectives pour celle à venir.
Par Joe Higgins, parlementaire du Socialist Party (CIO-Irlande)
Nous avons vu durant cette année une scène internationale secouée dans son ensemble par la mobilisation héroïque et répétées de millions de travailleurs, de paysans et de pauvres visant à renverser les dictatures brutales du Moyen Orient et d’Afrique du Nord. C’est un processus compliqué, bien sûr, avec les masses aspirant à une vie meilleure par l’obtention de droits démocratiques et le respect des droits de l’homme, de leur dignité et de leur droit à avoir un emploi, tandis que les anciennes élites et le sommet des forces armées tentent de se construire une nouvelle image de ‘‘démocrates’’ pour mieux s’accrocher à leurs richesses et leurs privilèges, au détriment des intérêts de la majorité.
Les masses, de façon on ne peut plus compréhensible, entrent dans l’action révolutionnaire avec une haine extrêmement palpable de l’ordre ancien qui les a froidement brutalisé, et sans nécessairement avoir une vue exacte du système qui constituerait une véritable alternative démocratique garantissant le partage des richesses jusqu’ici accaparées par les élites. C’est un débat qui va cependant s’intensifier à mesure que des alternatives radicales seront considérées comme nécessaires.
Par une ironie des plus amères, alors que le peuple d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient lutte pour l’obtention de ses droits démocratiques contre des systèmes dictatoriaux, l’élite politique de la ‘‘démocratique’’ Union Européenne s’assure que le peuple européen devienne sujet d’une nouvelle dictature de plus en plus affirmée, celle de l’oligarchie bancaire et des spéculateurs des marchés financiers.
Les gouvernements de Papademos en Grèce et de Monti en Italie, loin d’être composés de technocrates désintéressés, sont en réalité rempli de banquiers et de représentants des grandes entreprises. Leur objectif est d’instaurer une politique visant à sauver les fortunes des grands acteurs des marchés financiers. Ils sont là pour s’assurer que les milliards avec lesquels ces rapaces ont joué soient repayés par la majorité de la population, ces 99% dont les conditions de vie et l’accès aux services publics sont détruits dans ce processus.
‘‘Les marchés sont endormis, mais pas pour longtemps…’’ a été le titre de bien mauvais augure d’un éditorial du Daily Mail, qui avertit que ‘‘dans les semaines à venir, ces marchés vont à nouveau bander leurs muscles’’. L’image évoquée est celle d’un peuple primitif terrorisé par un ogre vorace qui, s’étant gorgé du sang de victimes innocentes, se retire dans sa tanière et tombe dans un sommeil repu tandis que les survivants attendent dans la terreur son réveil et les conséquences de son inépuisable soif de sang.
La question qui frappe l’esprit est la suivante : pourquoi donc la majeure partie des médias font fidèlement rapport de cette situation, sans condamner le moins du monde ce règne de la terreur. Loin de contester cette moralité, les médias spéculent sur ce qui doit être fait pour satisfaire la bête et pour accabler les victimes – les travailleurs et leurs organisations syndicales et sociales – qui osent se soulever et résister à ses incessantes exigences.
La majeure partie des médias est bien entendu elle-même un instrument des marchés, une créature servile qui a encouragé en Irlande le développement de la bulle immobilière ainsi que l’avidité vorace des promoteurs et des banquiers, avec des conséquences très désastreuses pour la société. Voilà pourquoi, face à la colère de leur lectorat, les médias peuvent diaboliser certains excès parmi les plus évidents, mais sans jamais admettre leur propre culpabilité. Dans les temps à venir, les gens considèreront très clairement que cette frénésie de profits des marchés financiers européens est profondément destructrice pour la société, et qu’une partie importante des médias a collaboré à ce développement.
Le gouvernement du Fine Gael et du Parti Travailliste, installé au pouvoir depuis le mois de mars dernier, s’est avéré aussi lâche devant les exigences des marchés que tous leurs homologues de l’Union Européenne. Avant les élections, ces partis s’étaient engagés à opérer un changement révolutionnaire face à la politique menée précédemment par la coalition du Fianna Fail et du parti écologiste. Il devait y avoir de nombreuses mesures énergiques destinées à lutter contre le chômage et visant à aider concrètement le plus grand nombre de personnes face au paiement d’hypothèques insoutenables.
Au lieu de cela, nous assistons à une capitulation servile devant les diktats du Fonds Monétaire International, de l’Union Européenne et de la Banque Centrale Européenne. La population irlandaise devrait se retrouver à payer pour le sauvetage des grandes institutions financières européennes et pour les conséquences de leurs actions sauvages dans le cadre de la bulle immobilière irlandaise. Elle devrait faire le sacrifice de ses soins de santé et de son enseignement alors que de nombreux jeunes gens fuient le pays ou sont confrontés au chômage. C’est une politique qui trouvera face à elle une résistance acharnée pour l’année à venir.
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Irlande: “Faisons de 2011 l’année de la percée de la vraie gauche!”
Vœux de Nouvel An de Joe Higgins
Des élections générales anticipées vont se dérouler en Irlande, dans un contexte très particulier. Les travailleurs irlandais en sont déjà à leur troisième budget d’austérité, plus de 100.000 suppressions d’emplois sont prévus dans les services publics, entre autres attaques antisociales. C’est dans ce cadre que notre euro-parlementaire Joe Higgins présente ses vœux pour l’année à venir.
Joe Higgins, eurodéputé du Socialist Party (CIO-Irlande)
A West Kerry, ce Noël, le temps a changé à une vitesse stupéfiante. Le jour de Noël, nous avons dû déverser du sel devant la vieille ferme familiale afin de faciliter la venue des amis et de la famille, en brisant l’épaisse couche de neige compacte et de glace laissée là suite aux semaines précédentes, quand le temps avait été littéralement arctique. Moins de vingt heures plus tard, le vent du sud ouest venu de l’Atlantique avait reconquis ses routes familières, amenant dans son sillage des températures plus chaudes et une forte pluie. En l’espace de quelques heures, seuls les sommets des montagnes environnantes de Slieve Mish gardaient encore des traces de neige, disparaissant rapidement.
Cela aurait pu être une métaphore pour illustrer la vitesse ahurissante à laquelle se sont produits les changements économiques et politiques survenus dans cet Etat en quelques semaines. Il est vrai que les gros titres faisant état de la perte ‘‘soudaine’’ de notre souveraineté étaient exagérés au regard du fait que l’establishment politique a déjà, et depuis longtemps, remis une grande part de la destinée de notre peuple aux mains d’une infime cabale de pirates de la propriété et de financiers sans visage, uniquement guidés par l’avarice privée et sans aucun égard pour le ravage social qu’ils causent. Il est toutefois clair à l’esprit de chacun que nous quittons cette année 2010 en tant qu’Etat vassal du capital européen et international, avec la Commission Européenne et le Fonds Monétaire International comme autorités – aux prises avec ces mêmes forces qui ont dévasté la vie économique.
Et donc une nouvelle année commence et, avec elle, vont arriver de grands changements, plus particulièrement dans la vie politique. Cela se verra tout d’abord dans le résultat des élections générales de mars. Un mot au sujet de cette date, toutefois, car personne ne doit être dupe de la posture adoptée par les Verts en novembre, quand ils ont précipité la tenue d’un scrutin. Le dirigeant du parti John Gormley a été forcé d’effectuer cette demande par les pressions désespérées de membres du parti Vert qui entretiennent toujours l’illusion que leur part défend quelque chose. Mais la vérité est que les ministres “écologistes” auraient préféré joyeusement poursuivre leur besogne avec le Fianna Fail jusque l’échéance prévue en mai 2013 s’ils l’avaient pu.
En fin d’année, même les membres les plus calmes de la communauté s’imprègnent avec zèle de l’atmosphère de festivités. Les boissons se mêlent à la musique pour mettre temporairement de côté les problèmes de l’année, juste pour quelques heures de joie.
Cette année, cependant, rien n’a pu masquer les plaies dont le pays est affligé. De nombreux jeunes gens, après avoir célébré Noël avec leurs proches, se préparent à partir au loin dans l’espoir de d’y trouver de quoi se construire la vie qui leur est refusée en Irlande.
Ils espèrent, tout comme leurs parents, que cela ne sera que provisoire, en attendant que passe le pire de la tempête. Mais cela dépend d’un changement révolutionnaire de politique, à l’opposé des diktats de l’Union Européenne et du Fonds Monétaire International qui veulent sauver les establishments politiques et économiques sur le dos du contribuable, du pensionné et du pauvre, qui doivent payer des milliards au bénéfice des spéculateurs et de la finance internationale.
Nous faisons face à des élections parlementaires où le choix réel est limité. Les deux principaux partis d’opposition, le Fine Gael et le Labour, sont favorable à la poursuite d’une politique identique à celle du Fianna Fail et des Verts, avec tout au plus quelques changements cosmétiques. On fera beaucoup pour montrer des différences politiques entre ces partis, mais la réalité est que qu’ils prévoient pour un milliard et demi d’euros de taxes et de coupes dans les budgets publics.
Le Sinn Fein va se présenter aux élections en adoptant une posture de forte opposition à la politique de l’establishment. Il faut cependant se demander si l’on doit prendre ces déclarations comme argent comptant au regard de la politique menée par ce parti dans le Nord, dictée par le gouvernement libéral-conservateur de Westminster. Dans cette république, ils étaient encore prêts, il y a à peine deux ans et demi, à considérer de former une coalition gouvernementale avec le Fianna Fail.
A l’approche des élections générales, c’est l’United Left Alliance (Alliance de la gauche unie), composée de plusieurs groupes de gauche, qui posera les questions les plus judicieuses et défendra une alternative de principe et de gauche contre le consensus capitaliste. Il est crucial que cette alliance parvienne à obtenir une représentation significative au Parlement pour être une opposition vibrante tant à une coalition Fine Gael/ Labour qu’à chaque reste de l’équipe dirigeante actuelle. Une bonne année, de la Gauche Alternative !