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  • Perspectives mondiales : ‘‘L’ère de l’austérité’’ prépare des convulsions sociales sismiques

    Nous vivons une des périodes les plus dramatiques de l’Histoire

    Les travailleurs grecs, suivis par les portugais et les espagnols, sont à l’avant-garde du mouvement contre cette interminable austérité. Plus personne ne peut aujourd’hui affirmer que la classe ouvrière reste passive face aux attaques du système capitaliste malade et pourrissant. Sa résistance s’est exprimée par une série de grèves générales épiques, mais elle a encore à créer un parti de masse ainsi qu’une direction dignes d’elle pour cette bataille entre travail et capital qui va dominer le début du 21ème siècle. La tâche du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO), grâce à la clarté théorique de ses idées liée à un programme orienté vers l’action, est d’aider à créer cette nouvelle direction, une direction capable d’assurer la victoire de la classe ouvrière.

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    Ce texte est un résumé du projet de document sur les perspectives mondiales discuté lors de la dernière réunion du Comité Exécutif International (CEI) du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) qui a eu lieu en décembre. Le document final est disponible, en anglais, sur le lien suivant.
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    Le caractère instable des relations mondiales (qui peuvent entraîner l’éclatement d’un conflit dans de nombreux endroits du monde et à n’importe quel moment) s’est illustré lors des récents affrontements entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza. Ils se sont limités à un échange de roquettes et de missiles et un accord de cessez-le-feu a été atteint, mais la guerre pourrait reprendre et un assaut d’Israël sur la Bande de Gaza n’est pas à exclure. En retour, des troubles auraient lieu dans le Moyen-Orient.

    D’autre part, une ou plusieurs guerres régionales sont toujours de l’ordre du possible. La Syrie représente un véritable baril de poudre avec le régime de Bachar el-Assad assiégé et menacé d’être renversé, mais avec une opposition divisée sur des lignes sectaires. Les véritables socialistes ne peuvent soutenir ni Assad ni l’opposition, mais doivent s’orienter vers les masses que nous pouvons atteindre avec une voie clairement indépendante basée sur un programme et des perspectives de classe.

    Certaines minorités du pays recherchent encore la protection d’Assad par craintes des conséquences d’une victoire de l’opposition, laquelle bénéficie clairement d’un soutien prédominant de la part de la majorité sunnite de la population, avec une influence grandissante significative d’organisations du type d’Al-Qaïda. De plus, l’intervention de la Turquie contre le régime a augmenté la tension entre les deux pays. Des affrontements armés pourraient avoir lieu entre eux, ce qui pourrait devenir hors de contrôle. Une intervention de l’Iran dominé par les chiites pour soutenir les chiites en Syrie n’est pas non plus à exclure. Pareillement, le conflit pourrait déborder au Liban avec l’éclatement de conflits sectaires. Cela en retour pourrait conduire Israël à saisir l’opportunité de lancer des attaques aériennes contre les supposées infrastructures nucléaires iraniennes, avec sans doute en riposte des salves de missiles et de roquettes de la part de l’Iran et du Hezbollah contre les villes et infrastructures israéliennes.

    Au cours du récent conflit, le régime israélien et la population, plus largement, ont été pris de court par la capacité des roquettes du Hamas de frapper au cœur même de Tel Aviv. Le CIO s’oppose aux prétendues ‘‘frappes chirurgicales’’ d’Israël (qui ne sont en rien chirurgicales) qui ont tué au moins 160 Palestiniens. Mais nous ne soutenons pas pour autant les méthodes du Hamas, qui a lancé des roquettes à l’aveugle contre les villes les plus peuplées d’Israël. Cela a uniquement servi à jeter la population d’Israël dans les bras de Netanyahou, dont les actions punitives seraient soutenues par 85% de la population tandis que 35% soutiendraient maintenant une invasion de Gaza, opération qui verrait des centaines et des milliers de Palestiniens tués ou mutilés, de même que des Israéliens. Le peuple palestinien a le droit de résister aux méthodes terroristes de l’Etat Israélien, mais cette tâche peut être mieux accomplie par des mouvements de masse dans but de faire séparer la classe ouvrière d’Israël du régime vicieux de Netanyahou. En cas d’invasion de Gaza ou d’un autre territoire occupé, le peuple palestinien a tous les droits de résister, avec des armes si nécessaire, contre les envahisseurs.

    Les mineurs sud-africains montrent la voie

    Nonobstant l’influence des facteurs géopolitiques comme les guerres sur le cours des évènements (ce qui peut, sous certaines circonstances, sérieusement altérer nos perspectives), les principales caractéristiques de la situation présente sont l’approfondissement de la crise du capitalisme mondiale et la réponse combattive des la classe ouvrière et des pauvres.

    Cela est symbolisé par le magnifique réveil de la classe ouvrière sud-africaine à la suite des mineurs. Ces grèves héroïques, à l’instar des révolutions au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, ont inspiré la classe ouvrière des pays industriels avancés. Un élément ‘‘d’Afrique du Sud’’ pourrait lui aussi être exporté en Europe avec un mouvement similaire au sein des syndicats afin de renverser les dirigeants qui refusent d’organiser la classe ouvrière pour sérieusement résister aux attaques du capitalisme.

    A la suite des mineurs, d’autres pans de la classe ouvrière d’Afrique du Sud sont eux aussi entrés en action dans cette grève qui est en ce moment la plus grande et la plus sanglante au monde.

    Cette lutte a également été caractérisé par un haut degré de conscience de la classe ouvrière (un héritage qui a su être préservé après les révolutions avortées des années 1980, avant la fin du régime de l’apartheid). Cela s’exprime par l’aspiration à la construction de nouveaux syndicats combattifs pour les mineurs afin de remplacer le syndicat officiel des mineurs, complètement corrompu, le NUM. Confrontés à l’ANC tout aussi corrompue, les mineurs (avec l’aide du Democratic Socialist Movement, le DSM, section du CIO en Afrique du Sud) ont lancé un appel pour un nouveau parti de masse des travailleurs. Cela ne peut que renforcer les revendications du même type portant sur la question de la représentation indépendante de la classe ouvrière dans tous les pays (c’est-à-dire la majorité) où la masse des travailleurs n’a pas de parti, pas même un capable de les représenter ne fut-ce que partiellement.

    Même le magazine The Economist, la voix du grand capital, a déclaré : ‘‘le meilleur espoir pour le pays dans les années à venir est une scission réelle dans l’ANC entre la gauche populiste et la droite afin d’offrir un vrai choix aux électeurs.’’ C’est surprenant, sinon incroyable, au premier abord. Aucun journal capitaliste ne propose cela pour la Grande Bretagne ! Mais ce qui alarme The Economist, c’est que face au discrédit de l’ANC (un fossé de la taille du Grand Canyon existe à présent entre les seigneurs, chefs et rois de l’ANC et la classe ouvrière), les masses appauvries ont commencé à se tourner brusquement vers la gauche, vers les véritables militants pour le socialisme, les membres du DSM. Ils vont donc remuer ciel et terre pour essayer d’empêcher les masses d’aller dans notre direction, même si cela signifie de mettre en place une alternative ‘‘populiste’’ pour bloquer le développement d’un vrai parti de masse des travailleurs.

    Les élections américaines

    Le plus important évènement de cette période, au moins dans l’Ouest capitaliste, a été la réélection d’Obama aux USA. Il a été le premier président à être réélu depuis 1945 avec un taux de chômage supérieur à 7,5% dans le pays. Certains stratèges du capital (ou certains imaginant l’être) ont tiré des conclusions complètement fausses hors du résultat de cette élection. Ils affirment que la principale raison pour laquelle Obama a été élu, c’est que le peuple américain blâmait Bush, l’ancien président, pour les catastrophes économiques actuelles. Cela a sans doute été un facteur, certes, mais ce n’était ni le seul, ni le plus décisif. Une grande polarisation a pris place dans la société américaine avec les électeurs d’Obama (malgré leur déception face à son bilan) se rendant massivement au bureau de vote pour empêcher le candidat des 0,01% des riches et des plutocrates, Romney, de remporter les élections.

    Il y avait une réelle peur de ce que signifierait une victoire de Romney, qui aurait fait tourner à l’envers la roue de l’histoire, briser les aides sociales et les réformes limitées dans la santé, etc. Cela a fait accroître la participation électorale qui, même si elle n’était pas aussi élevée qu’en 2008, était néanmoins d’un niveau historique. Le vote populaire a été serré, Obama l’emportant par 50,8% contre 47,5%. Mais il est crucial que la majorité des femmes l’aient soutenu, avec une majorité encore plus forte concernant les jeunes femmes. Il a aussi gagné 80% du vote des minorités (Latinos et Afro-Américains), bien sûr, et des sections significatives de travailleurs syndiqués (dans l’automobile par exemple) ont milité pour lui et l’ont soutenu. Dans cette élection, ce n’était pas seulement une question de victoire du ‘‘moindre mal’’ pour Obama pour ‘‘arranger l’économie’’. Bien sûr, il ne sera pas capable de le faire, à cause du caractère de la crise économique.

    Le magnifique résultat de la candidate de Socialist Alternative aux élections de la chambre des représentants de l’Etat de Washington (un splendide 28% des suffrages) a été un triomphe non seulement pour nos camarades Américains mais pour l’ensemble du CIO.

    C’était la confirmation du fait que présenter des candidats des travailleurs indépendants peut conduire au succès, et à un nouveau parti de masse des travailleurs. De plus, cela s’est produit au cœur même de la plus grande puissance capitaliste au monde. Cette élection est un avant-goût de ce à quoi nous pouvons nous attendre ailleurs dans la prochaine période, en particulier en Afrique du Sud et en Europe, et cela montre le potentiel qui existe dialectiquement aux USA pour les idées et le programme du socialisme.

    L’héritage des trahisons social-démocrates et staliniennes n’existe pas aux USA, ce qui en fait un terrain encore plus favorable pour les vraies idées du socialisme en comparaison de nombreux endroits d’Europe et d’ailleurs à ce stade. De notre point de vue, il en va de même pour la victoire d’Obama. Son deuxième mandat pourrait préparer la voie à la création d’un troisième parti, mais d’un parti de la classe ouvrière cette fois, socialiste, radical et populaire. Bien sûr, toutes les perspectives sont conditionnées par la façon dont l’économie se développera aux USA et dans le monde entier.

    L’économie mondiale fait face à une série de crises

    L’économie américaine (l’une des seules à ré-atteindre le niveau de production d’avant 2008) a ralenti pour atteindre son rythme le plus faible depuis 2009, avec une croissance de moins de 2% alors que, simultanément, toutes les plus grandes économies mondiales ont perdu de la vitesse. Si les Républicains refusent un accord avec Obama, si les USA échouent face à la falaise fiscale, cela pourrait presque automatiquement plonger l’économie mondiale (fondamentalement stagnante) dans une nouvelle dépression encore plus profonde. Les intérêts des capitalistes devraient logiquement forcer les Républicains à chercher un accord avec Obama. Mais le système politique des USA, conçu à l’origine pour une population prédominée par les petits fermiers au XVIIIème siècle, est maintenant complètement dysfonctionnel, de même que le Parti Républicain.

    En 2009, lors de l’un de ses discours parmi les plus révélateurs devant les banquiers américains, Obama a déclaré : ‘‘Mon administration est tout ce qu’il y a entre vous et les fourches.’’ Mais lors des élections, cela ne lui a pas pour autant apporté le soutien de la bourgeoisie américaine dans son ensemble, qui a en général préféré Romney. Cela tend à montrer qu’une classe ne reconnait pas toujours ce qui est dans son meilleur intérêt ! Ce sont les stratèges et les penseurs de la classe dominante, parfois en opposition avec ceux qu’ils sont sensés représenter, qui sont préparés à défendre les meilleurs intérêts des capitalistes et à planifier le chemin à suivre. Aujourd’hui, le problème pour eux est que les différentes routes qui mènent toutes le capitalisme à la ruine.

    Leur perte de confiance est visible dans leur refus d’investir ainsi que dans les avertissements des institutions sacrées du capitalisme : le FMI, la Banque Mondiale, etc. Leurs perspectives de sortie rapide hors de la crise actuelle ont toutes été balayées. Dorénavant, ils sont plongés dans un pessimisme total. Le premier ministre britannique David Cameron et le Gouverneur de la Bank of England ont averti que la crise peut durer encore une décennie, et c’est le même son de cloche au FMI. Le thème des ‘‘banques zombies’’, d’abord employé au Japon, est à présent utilisé pour décrire non seulement les banques mais aussi les économies de l’Amérique, de l’Europe et du Japon. Comme dans le cas du Japon, les économistes bourgeois prédisent une ‘‘décennie perdue’’ pour certains pays et pour l’ensemble de l’Europe. Ils comparent cela à la dépression de 1873 à 1896, au moins en ce qui concerne l’Europe. Martin Wolf, du Financial Times, réfléchit ainsi : ‘‘l’âge de la croissance illimitée est-il terminé ?’’ en citant beaucoup une nouvelle étude ‘‘La Croissance Economique des USA Est-Elle Terminée ? L’Innovation Hésitante Confronte Les Six Vents Contraires’’. (NBER Working Paper no 18315)

    Cela a posé la question essentielle du rôle de l’innovation dans le développement du capitalisme, et en particulier dans l’amélioration de la productivité au travail. Les auteurs de l’étude mentionnée ci-dessus ont conclu qu’il y avait eu ‘‘trois révolutions industrielles’’ depuis 1750 qui ont été cruciales pour le développement du capitalisme.

    La première s’est située entre 1750 et 1830, a vu la création des machines à vapeur, du filage du coton, des chemins de fer, etc. La deuxième était la plus importante des trois avec ses trois inventions principales : l’électricité, le moteur à combustion interne et l’eau courante avec la plomberie, dans une période relativement courte, de 1870 à 1900. Ces deux révolutions ont pris à peu près 100 ans pour que leurs effets se répandent complètement dans l’économie. Après 1970, l’augmentation de la productivité a nettement ralenti, pour un certain nombre de raisons. La révolution informatique et internet (décrits par les auteurs comme la révolution industrielle n°3) ont atteint leur apogée à l’ère d’internet, fin des années 1990. Selon cette étude, son principal impact sur l’économie s’est altéré au cours des 8 dernières années. Les chercheurs en concluent que, depuis les années 2000, l’invention a largement été concentrées dans les appareils de loisir et de communication qui sont plus petits, plus smart et ont plus de capacités, mais ne changent pas fondamentalement la productivité du travail ou le niveau de vie de la même manière que la lumière électrique, les voitures à moteur et la plomberie. Cela ne veut pas dire que la science et la technique n’ont pas le potentiel de considérablement rehausser la productivité, mais le problème est posé par l’état actuel du capitalisme en déclin, incapable de développer pleinement le potentiel de ses forces productives. La baisse tendancielle du taux de profit (et les baisses réelles de rentabilité) décourage les capitalistes d’adopter des innovations qui pourraient développer les forces productives.

    Il y a ensuite le problème de la ‘‘demande’’ qui en retour a conduit à ‘‘une grève de l’investissement’’, avec un minimum de 2000 milliards de dollars de ‘‘capital au chômage’’ dans la trésorerie des entreprises américaines. Et le problème du surendettement par-dessus tout. Styajit Das, du Financial Times, admoneste la bourgeoisie américaine qui ‘‘parait incapable d’accepter la vérité : la perspective d’une croissance économique faible ou nulle pour une longue période. (…) Le maintien de la croissance nécessite toujours plus d’emprunts. En 2008, aux USA, 4 ou 5 dollars de dettes étaient nécessaires pour créer 1 dollar de croissance, contre 1 ou 2 dollars dans les années 1950. A présent, la Chine a besoin de 6 ou 8 dollars de crédit pour générer 1 dollar de croissance, une augmentation de 1 à 2 dollars par rapport à il y a 15 ou 20 ans.’’

    Le capitalisme ne fait pas face à une crise, mais à une série de crises. Ses partisans essaient de faire accepter à la classe ouvrière la perspective d’une croissance faible, voire de pas de croissance du tout, et ainsi qu’elle soit plus encline à accepter de voir ses conditions de vie se réduire drastiquement, comme en Grèce. Nous devons contrer cela par notre programme et en mettant en avant les possibilités illimitées (évidentes même aujourd’hui) qui sont présentes pour autant que la société soit organisée de façon rationnelle et planifiée, c’est-à-dire grâce à l’instauration du socialisme.

    L’insoluble crise de l’Europe

    La crise économique en Europe est la crise la plus sérieuse à laquelle fait face le système capitaliste. Cette crise parait insoluble avec la politique d’austérité qui ne fonctionne clairement pas, l’éclatement de conflits et la mise en garde du FMI contre ‘‘l’austérité excessive’’ appliquée par les gouvernements nationaux en Europe avec la bénédiction des autorités de l’UE et de la Banque Centrale Européenne (BCE). La BCE a d’un côté cherché à implanter, comme l’US Federal Reserve et la Bank of England, une forme de keynesianisme par l’achat d’obligations d’Etat ainsi qu’en accordant des prêts meilleurs marché à certaines banques et pays. Mais de l’autre, ces mêmes autorités (la ‘‘Troïka’’) ont été l’instrument des politiques d’austérité. Pourtant le FMI critique ‘‘l’effet multiplicateur’’ négatif qui s’opère quand une austérité drastique est appliquée (coupes dans les dépenses d’Etat, pertes d’emplois, etc.) car cela réduit les revenus de l’Etat. La BCE et les gouvernements nationaux rétorquent avec l’argument de ‘‘l’absolue nécessité’’ de faire des coupes dans les dépenses d’Etat, accompagnées de toutes les autres mesures d’austérité, de privatisation, etc. Mais en dépit de toutes les attentes, l’austérité a eu pour effet d’éteindre les braises économiques qui subsistaient encore durant la crise.

    Il est vrai que les politiques keynésiennes ont échoué à générer la croissance. Dans la situation actuelle, cela revient à ‘‘pousser un objet avec une corde’’. Cela a conduit les nouveaux keynésiens, comme l’ancien monétariste thatchérien Samuel Brittan, à faire pression pour des mesures plus audacieuses ; il défend ce qui revient à une ‘‘chasse au trésor’’ géante, dans une tentative désespérée de faire bouger l’économie. Il suggère, en plaisantant seulement à moitié, d’enterrer des montagnes de cash, et que les aventuriers qui les découvriraient aillent les dépenser ! Il n’y a pas d’indication que cela se produise, cependant. Les largesses qui ont été distribuées jusqu’ici ont été utilisées pour payer les dettes, pas pour augmenter les dépenses. C’est une indication du désespoir de la classe dominante pour une amélioration, à ce stade. Le keynésianisme a été partiellement essayé et a échoué, mais cela ne signifie pas que, face à une explosion révolutionnaire, les capitalistes ne vont pas recourir à des mesures keynésiennes de grande ampleur. Des concessions peuvent être accordées, et par la suite les capitalistes vont tenter de les reprendre par le biais de l’inflation.

    Même à présent, les autorités européennes tentent d’éviter que la Grèce soit en défaut de paiement en suggérant que plus de temps lui soit donné pour payer. Cela ne va pas empêcher les attaques sauvages contre la classe ouvrière grecque, qui sont appliquées sans état d’âme par l’UE. Cela ne va pas non plus résoudre les problèmes de base de la Grèce, qui vont encore s’accumuler avec la dette colossale. Un défaut de la Grèce est donc toujours probable, ce qui aura d’énormes répercussions dans toute l’Europe, dont en Allemagne, lourdement endettée envers les banques d’autres pays. Il est même possible que l’Allemagne elle-même prenne l’initiative de quitter la zone euro, telle est l’opposition politique intérieure contre la politique de renflouement. Même la proposition de donner à la Grèce plus de temps pour payer ses dettes rencontre une opposition de la part des capitalistes allemands parce que cela signifierait d’effacer une petite partie de leur dette. Il est possible que, en ce qui concerne l’Espagne et certains autres pays, ‘‘la canette soit envoyée plus loin’’. Mais, en fait, la canette va devenir trop grosse pour pouvoir être envoyée au loin ! Par conséquent, une rupture de la zone euro reste en jeu.

    Même les Chinois sont alarmés par la tournure des événements en Europe. Un haut fonctionnaire Chinois, Ji Liqun, assis au sommet d’un fond souverain d’Etat de plus de 350 milliards d’euros, a averti que le public européen est à un ‘‘point de rupture’’. Auparavant, il avait argumenté que les Européens devraient travailler plus, mais il reconnait maintenant que la profondeur de la colère publique pourrait conduire à un ‘‘rejet complet’’ des programmes d’austérité. ‘‘Le fait que le public descende dans les rues et recoure à la violence montre que la tolérance du public en général a atteint ses limites’’, a-t-il commenté. ‘‘Les syndicats sont maintenant impliqués dans des protestations organisées, des manifestations et des grèves. Ca sent les années ‘30.’’ Ses préoccupations inexprimées sont que l’exemple de la classe ouvrière européenne puisse faire des vagues en Chine. Il craint d’autre part pour la sûreté des investissements chinois en Europe.

    La Grèce est la clé de la situation

    En ce moment, l’Europe est la clé de la situation mondiale : c’est là que la lutte des classes est la plus aigüe, c’est là que se trouvent les plus grandes opportunités pour une percée de la gauche et des forces révolutionnaires. Mais s’il en est ainsi, la Grèce est en conséquence la clé de la situation en Europe, suivie de près par l’Espagne et le Portugal dans la chaine des maillons faibles de l’Europe capitaliste. Comme Trotsky le disait de l’Espagne dans les années ‘30, non pas une mais 3 ou 4 révolutions auraient été possibles si les travailleurs grecs avaient une direction prévoyante et un parti de masse à sa tête. Le jour de la dernière grève générale, un programmeur informatique grec a commenté dans le journal britannique The Guardian : ‘‘Personnellement, je suis épaté qu’il n’y ait pas encore eu de révolution.’’ La télévision britannique a aussi commenté que seulement 3% de la population soutient effectivement les mesures d’austérité du gouvernement et de la Troïka. Avec tous les tourments que les Grecs sont forcés d’endurer, à la fin du programme d’austérité actuel, la dette de la Grèce sera encore de 192% du PIB ! En d’autres termes, il n’y a absolument aucune chance que cette dette soit payée. L’austérité sans fin est cependant l’avenir que le capitalisme a décrété pour le peuple grec.

    Toutes les conditions pour la révolution ne sont pas seulement mures, mais pourries. 19 jours de grève générale (parmi lesquelles quatre de 48h et le reste, de 24h) témoignent des réserves colossales d’énergie dont disposent les travailleurs grecs et de leur capacité à résister. Cependant, ils en ont conclu que, malgré une lutte magnifique, la Troïka et les capitalistes grecs n’ont pas encore capitulé. Il est donc nécessaire de se tourner vers le front politique, vers l’idée d’un gouvernement de gauche capable de montrer la voie pour sortir de la crise. Ce processus a trouvé place malgré le fait que les masses soient sceptiques vis-à-vis de Syriza et de sa direction. Des sections significatives des masses sont prêtes à soutenir Syriza, qui reçoit actuellement 30% de soutien dans certains sondages, mais ils ne sont pas prêts à rejoindre ses rangs et à s’engager activement. Il y a une part de cet élément dans beaucoup de pays. La forte déception consécutive à l’échec des partis ouvriers a entraîné un scepticisme extrême envers ceux-ci, même ceux qui sont formellement de gauche. La volonté est bien présente de soutenir les formations et partis de gauche aux élections, mais pas de leur donner du temps et de l’énergie en s’engageant dans leurs rangs et en les construisant. Les travailleurs ont été déçus dans le passé et craignent d’être à nouveau laissés tomber. Bien sûr, cet état d’esprit peut et va être modifié une fois qu’ils auront vu ces partis véritablement accomplir ce qu’ils ont promis. Cependant, au lieu d’aller vers la gauche, les partis de gauche en général – et Syriza en particulier – ont eu tendance à aller vers la droite, en baissant leur programme et en ouvrant même leurs portes à d’ex-dirigeants de la social-démocratie (comme le Pasok en Grèce) qui ont ouvertement joué un rôle de briseurs de grève dans la dernière période.

    Dans les circonstances de la Grèce, les tactiques souples employées par nos camarades grecs – tout en restant fermes sur le programme – répondent aux besoins de cette situation très complexe. Nous devons avoir l’œil non seulement sur les forces de gauche à l’intérieur de Syriza, mais aussi sur les forces importantes qui se situent à l’extérieur et qui, dans certains cas, ont revu leurs positions politiques. Nous ne pouvons pas dire à quel moment le gouvernement actuel va s’effondrer (car il va surement s’effondrer), avec la probable arrivée au pouvoir d’un gouvernement de gauche emmené par Syriza. Mais nous devons être préparés à une telle éventualité, dans le but de pousser ce gouvernement vers la gauche, tout en aidant à créer des comités démocratiques populaires qui peuvent en même temps soutenir le gouvernement contre la droite mais aussi faire pression pour la prise de mesures en défense de la classe ouvrière. Il n’est pas impossible qu’une nouvelle force semi-massive significative émerge des tactiques dans lesquelles nous nous sommes à présent engagés.

    Cela implique non seulement une concentration sur les développements dans la gauche et dans les partis des travailleurs mais aussi contre les dangers de l’extrême-droite, et en particulier celui de la montée du parti fasciste Aube Dorée, dont le soutien est récemment monté jusqu’à 14% dans les sondages, mais qui est maintenant descendu autour des 10%. Une des raisons de cette diminution est la formation de comités de masse antifascistes, que nous avons aidé à initier et dans lesquels nous avons attiré des travailleurs, des jeunes et des réfugiés. Ce travail est d’une importance exceptionnelle et pourrait être le modèle pour le genre de situation à laquelle la classe ouvrière peut être confrontée dans beaucoup d’autres pays à l’avenir.

    Si la classe ouvrière et la gauche échouent à mener à bien une révolution socialiste, l’Histoire témoigne qu’ils devront en payer de lourdes conséquences. Les tensions sociales qui existent en Grèce ne peuvent être contenues pour toujours dans le cadre de la ‘‘démocratie’’. Il y a déjà une guerre civile voilée, avec plus de 90% de la population opposée aux ‘‘un pour cent’’ et cela peut exploser en un conflit dans le futur. Quelques éléments d’extrême-droite en Grèce ont discuté de l’idée d’une dictature, mais ce n’est pas immédiatement à l’agenda. Tout mouvement prématuré qui paraitrait imiter le coup d’état militaire de 1967 pourrait provoquer une grève générale totale, comme en Allemagne en 1920 avec le Putsch de Kapp, et entraîner une situation révolutionnaire. De plus, un coup d’Etat ne serait pas acceptable en ce moment pour l’impérialisme, la ‘‘communauté internationale’’, dans cette ère de ‘‘démocratie et de résolution des conflits’’.

    Dans un premier temps, les capitalistes vont plus probablement recourir à une forme de bonapartisme parlementaire, comme le gouvernement Monti en Italie, mais en plus autoritaire. La position économique et sociale risquée de la Grèce va demander un gouvernement plus ferme et plus à droite qu’en Italie, avec le pouvoir de renverser le parlement ‘‘en cas d’urgence’’. Si cela ne fonctionne pas, et qu’une série de gouvernements de caractère similaire est incapable de forcer l’impasse sociale, et si la classe ouvrière, faute d’un parti révolutionnaire conséquent, échoue à prendre le pouvoir, alors les capitalistes grecs pourraient passer à une dictature ouverte.

    Nous devons avertir la classe ouvrière que nous avons encore du temps en Grèce, mais nous devons utiliser ce temps pour préparer une force capable d’accomplir un changement socialiste de société. Le 14 novembre dernier, la réponse dans toute l’Europe a illustré que les luttes de la classe ouvrière sont liées entre elles. Si les travailleurs grecs brisaient les chaines du capitalisme et en appelaient aux travailleurs de l’Europe de l’Ouest, ou au moins aux travailleurs du Sud de l’Europe, il y aurait une énorme réponse pour un appel pour une confédération socialiste – qui impliquerait probablement l’Espagne, le Portugal et peut-être l’Irlande dans un premier temps, sinon l’Italie.

    La Chine à la croisée des chemins

    Comme le montre le fait que la première visite d’Obama après sa victoire électorale était en Asie, l’impérialisme américain a identifié ce continent comme une région-clé (plus importante que l’Europe, par exemple, stratégiquement et économiquement). Il s’agissait en partie de réaffirmer l’enjeu économique de l’impérialisme américain mais aussi à avertir la Chine de l’importance des intérêts stratégiques militaires des USA. Cela paraissait nécessaire à cause de la réaffirmation militaire de la Chine, qui a été révélée récemment dans les clashs de la marine chinoise avec le Japon à propos d’îles inhabitées contestées. Le Japon commence à construire ses forces militaires, seulement pour sa ‘‘défense’’ bien sûr ! Cela signifie que l’Asie va devenir un nouveau dangereux théâtre de conflits militaires, avec la montée du nationalisme et la possibilité de conflits déclarés, où les diverses puissances seront préparées à se confronter les unes aux autres, avec les armes si nécessaire, afin de renforcer leur influence, leur pouvoir et leurs enjeux économiques.

    La Chine est le colosse de l’Asie, la deuxième puissance au monde après les USA. La façon dont elle se développe va avoir un effet énorme, peut-être décisif, sur la région et le monde. Et la Chine est certainement à la croisée des chemins, comme son élite dirigeante le comprend bien. Comme beaucoup de groupes dirigeants dans l’Histoire, elle sent les tensions contradictoires monter d’en bas et est incertaine concernant la façon de les gérer. Les érudits Chinois décrivent la situation actuelle du pays à The Economist comme ‘‘instable à la base, découragée dans les couches moyenne, hors de contrôle en haut.’’ En d’autres termes, en ce moment, les ingrédients pour une révolution fermentent en Chine. Le temps des taux de croissance spectaculaires de l’ordre de 12% est révolu. La Chine est aujourd’hui telle une voiture embourbée dans la neige : les roues tournent mais le véhicule n’avance pas. La croissance s’est probablement contractée entre 5 et 7%. Le régime revendique une certaine ‘‘reprise’’ mais ne s’attend pas au retour d’une croissance à deux chiffres. Cela va automatiquement affecter les perspectives pour l’économie mondiale. Un taux de croissance de plus de 10% n’était possible que par l’injection de ressources, qui est monté jusqu’à 50% du PIB investi dans l’industrie, ce qui est énorme et sans précédent. Cela a en retour généré du mécontentement et du ressentiment contre la croissance des inégalités et la dégradation de l’environnement ainsi que contre l’accaparation illégale des terres collectives par des fonctionnaires avides.

    Cela et les conditions de surexploitations dans les usines ont généré une opposition énorme parmi les masses avec 180.000 manifestations publiques en 2010 (et ce chiffre a augmenté depuis), en comparaison à l’estimation officielle de 40.000 en 2002. Le retrait du ‘‘bol de riz en fer’’ (la sécurité sociale) et les attaques contre la santé et l’éducation ont ajouté au mécontentement. Cela a forcé la direction à réintroduire un minimum de couverture-santé. La direction chinoise est hantée par la gestion de ce volcan et par la voie économique à adopter. Le village de Wukan s’est soulevé il y a un an et a été victorieux après des batailles avec la police pour réclamer des terres qui leur avaient été volées par la bureaucratie locale. Ceci était symptomatique de ce qui se passe sous la surface en Chine : une révolte souterraine qui peut éclater à n’importe quel moment. A cette occasion, les fonctionnaires locaux ont battu en retraite mais d’un autre côté, les manifestants n’ont pas donné suite à leur mouvement. Il semble que cet incident et beaucoup d’autres sont ‘‘de petits soulèvements qui ne cessent de bouillonner à travers toute la Chine.’’ (Financial Times)

    Beaucoup de protagonistes pensent naïvement que si seulement les seigneurs de Pékin connaissaient l’échelle de la corruption, ils interviendraient pour y mettre fin. Quelque chose de similaire se produisait en Russie sous le stalinisme. Au départ, les masses tendaient à absoudre Staline de toute responsabilité dans la corruption, pour laquelle il n’aurait pas été ‘‘au courant’’. Cela était considéré comme étant le crime de la bureaucratie locale et non pas de Staline lui-même. Mais l’arrestation de Bo Xilai et le procès de sa femme ont aidé à dissiper ces illusions dans la Chine actuelle. Il a été accusé d’avoir abusé de sa position pour amasser une fortune, acceptant d’énormes pots-de-vin tout en permettant la promotion de ses amis à de hauts postes. Bo, membre du sommet de l’élite (un prince rouge, fils d’un dirigeant de la révolution chinoise) est accusé de complicité de meurtre, de corruption passive et de corruption à grande échelle. Cela pose naturellement la question de la manière dont il a pu s’en sortir si longtemps.

    En réalité, ce ne sont pas ces crimes (bien qu’ils soient probablement vrais) qui ont conduit à son arrestation et à son procès imminent. Il représentait un certain danger pour l’élite et faisait campagne pour un poste au plus élevé en évoquant, élément très dangereux pour l’élite, certaines expressions radicales du maoïsme associées à la Révolution Culturelle. En faisant cela, il aurait pu inconsciemment libérer des forces qu’il n’aurait pas été capable de contrôler, qui auraient pu aller plus loin et exiger des actions contre les injustices du régime. Qui sait comment cela se serait terminé ?

    Le régime chinois est en crise. Il est assez visiblement divisé sur les prochaines étapes à accomplir (en particulier sur la question économique). Un prince rouge l’a exprimé brutalement au Financial Times : ‘‘La meilleure époque de la Chine est révolue et le système entier a besoin d’être remanié.’’ Les commentateurs bourgeois de journaux comme The Economist, le Financial Times, le New York Times, etc., ont récemment recouru à la terminologie qu’utilise le CIO, en décrivant la Chine comme ‘‘un capitalisme d’Etat’’. Ils n’ajoutent pas la clause que nous y ajoutons, ‘‘un capitalisme d’Etat avec des caractéristiques uniques’’. Cela est nécessaire pour différencier notre analyse de la position rudimentaire du Socialist Workers Party et d’autres, qui décrivent inexactement les économies planifiées du passé de cette façon. Le sens de la marche de la Chine est clair. Par le passé, le secteur capitaliste a augmenté au détriment des entreprises d’Etat. Mais récemment, et en particulier depuis le plan de relance de 2008, il y a eu une certaine recentralisation et le pouvoir économique a tendu à être plus concentré dans le secteur d’Etat, à tel point que maintenant les entreprises d’Etat pèsent maintenant 75% du PIB total. D’un autre côté, selon The Economist : ‘‘Les experts ne s’accordent pas à dire si l’Etat représente la moitié ou un tiers de la production chinoise, mais sont d’accord pour dire que cette part est plus basse qu’elle l’était il y a deux décennies. Depuis des années, depuis la fin des années 1990, les entreprises d’Etat paraissent battre en retraite. Leur nombre a décliné (à environ 114000 en 2010, une centaine d’entre elles étant des champions nationaux contrôlés centralement), et leur part dans l’emploi a chuté. Mais à présent, même alors que le nombre de compagnies privées a augmenté, la retraite de l’Etat a ralenti et, dans certaines industries, s’est inversées.’’

    Il est clair qu’une discussion féroce a lieu derrière les portes fermées de l’élite. Les ‘‘réformateurs’’ sont en faveur d’un programme déterminé de démantèlement du secteur d’Etat pour se tourner de plus en plus vers le ‘‘marché’’. Ils proposent de lever les dernières barrières à l’entrée et l’action du capital étranger. Selon la rumeur, le nouveau ‘‘dirigeant’’ Xi Jinping, malgré la rituelle rhétorique du ‘‘socialisme avec des caractéristiques chinoises’’ soutient ces réformateurs. D’un autre côté, ceux qui ont proposé l’ouverture, dans l’économie mais aussi avec des réformes ‘‘démocratiques’’ limitées, paraissent mis à l’écart. Des études ont été réalisées sur la façon dont d’anciennes dictatures comme la Corée du Sud aurait réussi une ‘‘transition froide vers la démocratie’’. Elles ont eu lieu quand l’expansion économique ne s’était pas épuisée et même alors, il s’agissait d’un contexte de mouvement de masses. La ‘‘transition’’ proposée en Chine prend place au milieu d’une crise économique massive. Il paraitrait que les dirigeants chinois étudient avidement le rôle de Gorbatchev en Russie. Il avait d’abord l’intention de ‘‘réformer’’ le système et a fini par présider son démantèlement. Dans la Chine actuelle, des réformes importantes d’en haut provoqueront une révolution d’en bas. On ne peut pas exclure qu’une période ‘‘démocratie’’ très faible (avec le pouvoir encore aux mains des anciennes forces, comme aujourd’hui en Egypte avec l’armée et les frères musulmans au pouvoir) pourrait se développer après un soulèvement révolutionnaire en Chine. Mais cela ne serait qu’un prélude à l’ouverture des vannes à un des plus grands mouvements de masse dans l’Histoire.

    Conclusions

    En quatre ou cinq ans de crise économique mondiale dévastatrice, nous pouvons conclure qu’il y a des perspectives très favorables pour la croissance du marxisme, avec toutefois certaines réserves compte tenu du fait que la conscience (la vision large de la classe ouvrière) doit encore rejoindre la situation objective, qui peut encore être décrite comme prérévolutionnaire, surtout à l’échelle mondiale.

    Les forces productives n’avancent plus, mais stagnent et déclinent. Cela a été accompagné d’une certaine désintégration sociale de certaines sections de la classe ouvrière et des pauvres. En même temps, de nouvelles couches de la classe ouvrière se créent ainsi que de parties de la classe moyenne (prolétarisées) et sont forcées d’adopter les méthodes traditionnelles de la classe ouvrière avec les grèves et les organisations syndicales. Le pouvoir potentiel de la classe ouvrière reste intact, même entravé et affaibli par les directions syndicales droitières ainsi que par la social-démocratie et les partis ‘‘communistes’’.

    Le CIO n’a pas encore fait de percée décisive dans un pays ou un continent. Cependant, nous avons maintenu notre position globale en termes de membres et, surtout, nous avons augmenté notre influence dans le mouvement ouvrier. Beaucoup de travailleurs sympathisent et regardent de notre côté, ils peuvent nous rejoindre sur base des événements et de notre militantisme. Nous devons faire face à la situation en formant et préparant nos sympathisants pour le prochaine période tumultueuse, dans laquelle de grande opportunité se présenteront de renforcer les organisations et partis du CIO et l’Internationale dans son ensemble.

  • Quel avenir pour le secteur automobile américain ?

    Aux Etats-Unis, un plan de sauvetage d’un montant de 15 milliards de dollars a été approuvé pour le secteur de l’automobile. Des entreprises telles que General Motors, Chrysler et Ford menacent de tomber en faillite. La vente d’automobiles a fortement chuté aux USA ; des entreprises comme GM vendent moitié-moins que l’année dernière. En outre, les conséquences de la crise du crédit se font aussi fortement ressentir. Les démocrates songent à couronner un néolibéral pur et dur en tant que tsar de l’automobile.

    Contrôle néolibéral ?

    Nancy Pelosi (présidente de la fraction démocrate au parlement américain) a affirmé que le banquier Paul Volcker, âgé de 81 ans, serait le candidat idéal pour prendre la responsabilité du plan de sauvetage du secteur automobile. Actuellement, Volcker est le conseiller économique du président nouvellement élu, Obama. Entre 1979 et 1987, Volcker a été président de la Federal Reserve (la Fed); la banque centrale américaine.

    En tant que président de la Fed, Volcker était partisan de la ligne néolibérale dure. Il a expliqué par après que la défaite de la grève des aiguilleurs du ciel en 1981 a constitué «l’acte individuel le plus important du gouvernement dans sa lutte contre l’inflation». En 1981, le personnel du trafic aérien américain est entré en grève pour se battre pour de meilleures conditions de travail et pour une semaine de 32 heures. De ce fait, l’interdiction de grève dans le secteur public avait été enfreinte. Le président Ronald Reagan savait que des remplaçants étaient formés en secret et il a donné l’ordre aux grévistes de reprendre le travail. 11.345 grévistes (sur les 15.000) ont été licenciés sur-le-champ. Le syndicat perdit sa reconnaissance. Cette grève symbolique a ensuite été utilisée pour justifier une politique néolibérale plus dure.

    A présent, Volcker devrait s’occuper du secteur automobile. Il devrait surveiller toutes les transactions importantes et pourrait fermer les robinets si les restructurations n’étaient pas suffisantes. En d’autres termes, si l’on ne licencie pas suffisamment de travailleurs, alors, les cadeaux de la collectivité aux entreprises prendront fin.

    Nationalisation…

    Une autre piste dans la discussion au sujet de l’avenir du secteur automobile est venue du réalisateur Michael Moore. Moore est originaire de la ville de Flint et, ces dernières années, il a vu disparaître le secteur automobile dans cette ville. Il a publié quelques diatribes sur le plan de sauvetage et a aussi formulé certaines alternatives.

    Le secteur automobile demande des milliards de dollars au gouvernement pour «assainir» la production. Michael Moore affirme avec raison que les moyens de la collectivité ne doivent pas être utilisés pour mettre des milliers d’américains à la rue. Moore : «s’ils reçoivent les milliards, ils promettent d’assainir 20.000 jobs. Vous lisez bien : on leur donne des milliards pour jeter des milliers d’américains à la rue. Ces idiots ne méritent pas un cent. Virez-les et reprenez cette industrie pour le bien des travailleurs, du pays et de la planète».

    Nous sommes tout à fait d’accord avec cela et pensons, tout comme Michael Moore, qu’il faut investir beaucoup plus dans la recherche pour des sources d’énergie alternatives et des voitures qui consomment moins d’énergie. Un plan public de travaux d’infrastructure et le développement de transports publics accessibles à tous ; voilà qui nous semble un emploi plus efficace des milliards qui seraient utilisés pour licencier des travailleurs.

    … sous le contrôle des travailleurs

    Seulement, Michael Moore reste assez superficiel lorsqu’il s’agit de la reprise des entreprises automobiles par la collectivité. Il suggère qu’il suffirait que le gouvernement rachète des parts dans les sociétés. Ensuite, il veut qu’un certain nombre d’experts en transport soient engagés pour diriger les entreprises. Nous ne sommes pas d’accord ; nous pensons que c’est une nationalisation sous le contrôle des travailleurs qui est nécessaire. Pourquoi chercher des experts extérieurs alors que les gens qui y travaillent quotidiennement ont une très grande expérience ?

    La collectivité doit prendre le contrôle sur les secteurs-clés de l’économie. Cela est vraiment une meilleure option que de laisser piller les biens de la collectivité pour mettre en sécurité les profits d’un petit groupe de super riches.

  • Pauvreté : la révolte gronde et fait peur à certains

    Le secrétaire d’Etat à la pauvreté Jean-Marc Delizée (PS) prépare son plan d’action contre la pauvreté qui sera présenté le 4 juillet. Son principal souci ? Eviter "une révolte des pauvres". Quand on se dit socialiste, ne vaudrait-il pas mieux organiser celle-ci?

    Jean-Marc Delizée a déclaré que "Quinze pour cent des Belges vivent sous le seuil de pauvreté et des dizaines de milliers de personnes avec un emploi s’ajouteront à eux si nous ne faisons rien. (…) Chaque pauvre est un pauvre de trop. (…) Si nous n’y prenons pas garde, d’autres viendront rapidement s’ajouter. (…) Si nous n’entreprenons rien pour augmenter les salaires bruts les plus bas, les gens pauvres de ce pays vont se révolter".

    Tout d’abord, le chiffre de 15% est une grossière sous-estimation (voir ici 3 millions de pauvres en Belgique!). Pour le reste, nous sommes bien évidemment pour une hausse du salaire brut conséquente (nous revendiquons 1 euro de plus par heure en plus de l’indexation avec un index qui reflète le coût réel de la vie ainsi qu’une hausse des allocations sociales), pour tous, et pas seulement pour les salaires les plus bas. La crise du pouvoir d’achat ne crée pas seulement de problèmes à la population la plus précaire. Au regard du "camarade" de Jean-Marc Delizée Guy Quaden, gouverneur de la Banque Nationale et membre du PS, tous les salaires ne sont pas assez élevés (ce fameux Guy Quaden, qui par ailleurs veut s’en prendre à l’index, a gagné en 2007 quelques 474.792 euros brut, c’est-à-dire 4 fois plus que son collègue américain de la Federal Reserve…)

    Mais il nous semble particulièrement intéressant de révéler la panique du secrétaire d’Etat quant il dit que "Si nous n’entreprenons rien pour augmenter les salaires bruts les plus bas, les gens pauvres de ce pays vont se révolter." Un parti qui se dit socialiste devrait justement organiser la révolte pour éviter que la frustration et la colère ne se dilapide inutilement. Mais on sent derrière cette phrase que la préoccupation du secrétaire d’Etat est avant tout de préserver l’ordre établi, de donner une obole aux pauvres pour éviter une remise en question du système.

    S’il fallait encore le démontrer, cette citation illustre que la phraséologie sociale du PS est avant tout sa spécificité dans le panel des partis à la disposition du patronat. Sur le site du PS, dans la partie consacrée au nouveau secrétaire d’Etat à la pauvreté, on peut lire que "Lutter contre la pauvreté et réduire les inégalités, voici un combat qu’il entend mener avec toutes les forces du PS." On se demande ce que le PS va vraiment mettre en œuvre pour réduire les inégalités. Le PS va-t-il mettre à la disposition du mouvement pour le pouvoir d’achat ses moyens financiers gigantesques, ces relais avec les journalistes et ses militants ? Va-t-il oser s’en prendre aux intérêts du patronat qu’il soutien activement (en votant par exemple l’introduction des intérêts notionnels, le Pacte des Générations, la chasse aux chômeurs,…)?

    Nous en doutons, même si le PS en connaît un bout en terme d’inégalités et de pauvreté. La pauvreté a au moins triplé sur ces 20 dernières années, et le PS était au pouvoir (pour un taux officiel – et sous-évalué – de 6% de pauvreté dans les années ’80, nous sommes passés à 15% aujourd’hui, toujours selon la sous-estimation officielle). Le PS va juste s’employer à tenter de faire baisser la vapeur. Les travailleurs et les allocataires n’ont aujourd’hui plus de relais de masse pour porter leurs revendications sur le terrain politique. Il est urgent que les syndicats brisent leurs liens privilégiés avec des partis traditionnels pour qui la moindre parcelle de contrôle qu’ils peuvent encore exercer sur les syndicats est un argument à faire valoir auprès de la classe dirigeante.



    Le MAS propose de considérer les revendications suivantes :

    • Plus de pouvoir d’achat par plus de salaire et des allocations liées au bien-être, pour que nous ne payons pas nous-mêmes nos augmentations comme avec des réductions de taxes : 1€ de plus par heure
    • Un index qui reflète réellement le coût de la vie, pas d’accords all-in
    • Abolition de la norme salariale, des accords interprofessionnels comme dans le passé, avec un seuil salarial et non un plafond (un minimum qui revient à tous, pour que les secteurs faibles puissent en bénéficier également)
    • Pour les collègues qui tombent hors de l’AIP: casser tout les accords salariaux de plus de 2 ans, tel que l’accord 2005-2010 dans le non-marchand
    • Une suppression de la TVA sur les produits de première nécessité
    • Un plan massif de construction de logements sociaux publics

    Pour financer cela :

    • Une forte répression de la grande fraude fiscale
    • Un impôt sur les grandes fortunes

    Ces dernières mois, nous avons pu constater à quel point il est désastreux de laisser des secteurs-clés tels que l’énergie et les banques à l’avidité du secteur privé. Quand des grandes banques se trouvent en difficulté, l’Etat peut alors soudainement intervenir. Pour nous, le contrôle de tels secteurs revient à la collectivité. Nous plaidons donc pour leur nationalisation sous le contrôle démocratique du mouvement ouvrier et de toute la collectivité.

  • Le capitalisme se dirige-t-il vers une crise économique profonde?

    Récession aux USA – Bientôt ici aussi ?

    L’économie mondiale est sans doute à un tournant. Une récession économique ou une crise aux USA aurait des conséquences bien plus profondes que la baisse des Bourses à laquelle nous avons assisté ces derniers mois. Elle se traduirait très certainement en Europe par de nouvelles vagues de licenciements massifs, de délocalisations et d’attaques contre les salaires et contre la sécurité sociale.

    Peter Delsing

    Au cours des années ‘90, le capitalisme a connu une forte croissance économique grâce, entre autres, aux nouvelles technologies (en particulier en informatique) ainsi qu’aux privatisations et aux délocalisations. L’ouverture de l’Europe de l’Est, de la Russie et de la Chine au capitalisme a aussi permis de réaliser des profits massifs parce que les sociétés multinationales ont trouvé sur place une gigantesque réserve de main-d’œuvre qualifiée et à bon marché. Tout cela a provoqué en retour une forte pression à la baisse sur les salaires dans les pays capitalistes les plus développés, encore une fois au bénéfice des patrons.

    Mais les années ‘90 ont aussi déjà connu différentes « bulles spéculatives » (des hausses de prix excessives sur différents marchés) à cause de l’afflux d’argent provenant des énormes profits réalisés par les entreprises. Ainsi, en 1997, la crise asiatique a entraîné une chute des monnaies et de valeurs boursières surestimées ainsi que l’éclatement d’une première bulle immobilière.

    Spéculation: le capitalisme de casino

    La part des sociétés financières dans le chiffre des profits globaux de toutes les entreprises après impôt a considérablement augmenté aux USA : elle est passée de 5% en 1982 à 41% en 2007 ! Ce poids des profits spéculatifs illustre le caractère malsain et pourri du capitalisme actuel. Les grands actionnaires se servent de la richesse qu’ils se sont appropriées sur le dos des travailleurs pour investir non pas dans la production réelle, mais bien dans toutes sortes de constructions financières en espérant réaliser ainsi de plus grands profits basés sur la spéculation.

    Après la crise de 2001, ce développement malsain et parasitaire du capitalisme n’a pu être maintenu que par la consommation des salariés. Mais comme leurs salaires réels avaient chuté, ceux-ci ont été incités à dépenser de l’argent qu’ils n’avaient pas encore gagné – en l’empruntant. En 2005, aux USA, les dettes pour le remboursement d’une maison s’élevaient en moyenne à 98% du revenu disponible alors que ce chiffre n’était encore “que” de 60% dans les années ’90.

    Afin de contrôler cette montagne de dettes, la Banque Centrale des Etats-Unis, la Federal Reserve (Fed), a commencé très progressivement à augmenter le prix de l’emprunt. Mais cette hausse – même limitée – des taux d’intérêts a eu immédiatement un effet ravageur sur les subprimes (les crédits à haut risque) et les prêts « NINJA » (pour « No Income, No Job, No Assets » : sans revenu, sans travail et sans patrimoine). Grâce à de tels emprunts, des gens qui n’étaient pas du tout solvables avaient tout de même pu acheter une maison puisqu’ils étaient sensés s’enrichir grâce à la hausse de la valeur de celle-ci et pouvoir décrocher ensuite de nouveaux prêts plus avantageux. Mais la saturation du marché et la hausse des taux d’intérêt par la Fed a fait s’écrouler cette illusion.

    L’économie américaine au-dessus de ses moyens

    Tant que les prix de l’immobilier augmentaient, beaucoup d’Américains ont eu l’impression de s’enrichir et ont ainsi contracté massivement d’autres types d’emprunts (voitures, MasterCard, etc.). C’est cette bulle de crédit qui a poussé la croissance américaine dès 2001 et qui a aussi gonflé artificiellement le dollar. Comme le gouvernement américain recevait aussi beaucoup d’argent, il pouvait se permettre de maintenir pour une certaine période des prix bas pour les bons d’Etats, c’est-à-dire les emprunts qu’il accorde lui-même. Pour soutenir une économie américaine basée sur la consommation, des pays asiatiques comme la Chine, dont l’économie repose sur l’exportation, ont acheté des bons d’Etats US afin de consolider leur propre position et de maintenir des prix élevés pour les produits américains.

    Cet équilibre artificiel entre les USA et les banques asiatiques devait immanquablement conduire un jour à un retour de flamme économique et à l’éclatement de la bulle du dollar. Les USA vivent depuis longtemps au-dessus de leurs moyens. Le capital américain espérait qu’à travers une baisse progressive du dollar, il pourrait faire endosser la crise au reste du monde. Ainsi, il a joué à la roulette russe avec les banques asiatiques et les investisseurs de l’OPEP en leur disant : « Si nous baissons le dollar, oseriez-vous changer en une autre monnaie vos dollars achetés avec vos surplus commerciaux et provoquer ainsi une crise économique et financière mondiale? »

    La récession touche les salariés et les pauvres

    L’économie américaine ne peut pas se sauver elle-même en se rattrapant sur ses exportations. Le développement de la consommation intérieure demeure crucial. Aujourd’hui, nous ne nous trouvons encore que dans la première phase de la chute des prix de l’immobilier et pourtant les USA sont déjà menacés d’une récession. Alors que les prix de l’immobilier n’ont chuté « que » de 8%, deux mil-lions d’Américains ont déjà perdu leur maison. Or on estime aujourd’hui que cette baisse pourrait atteindre au final 20 ou 30%. Dans un pays où le système de retraites est privé et côté en bourse, la chute de la valeur des maisons couplée à celle des Bourses constitue une catastrophe pour beaucoup de familles.

    A partir du secteur limité des crédits à haut risque, la crise s’est étendue, par l’intermédiaire des banques, au reste du système financier. C’est que les banques avaient « titrisé » ces mauvais emprunts, c’est-à-dire les avaient inclus dans des paquets comprenant aussi des emprunts plus sûrs, des actions et des obligations. L’idée était de répartir le risque et même de l’éliminer mais il s’est en réalité étendu comme un virus en infectant au passage de larges parts du système financier.

    Prises de panique, les banques ont limité fortement leurs opérations de prêts entre elles et aux entreprises, provoquant ainsi un ralentissement de l’activité économique. Au quatrième trimestre de 2007, la croissance américaine a chuté de 0,6% sur base annuelle alors qu’une croissance de plus de 3% serait nécessaire pour garantir le maintien de l’emploi. Deux Américains sur trois estiment déjà que leur pays se trouve en crise économique et la confiance des consommateurs a connu la baisse la plus prononcée depuis seize ans.

    Les bons de consommation ne suffiront pas

    La décision de la Fed de diminuer à nouveau à deux reprises le taux d’intérêt indique qu’une certaine panique s’est installée. En janvier, l’inflation a gonflé de 4,3% sur base annuelle. Si ce phénomène de stagflation – stagnation ou récession économique liée à une inflation – se maintient, le taux d’intérêt devra à nouveau être augmenté pour diminuer la quantité d’argent disponible et une récession profonde s’ensuivra.

    Le reste du monde n’est pas immunisé

    Il est illusoire de penser que le reste du monde est immunisé contre une récession survenant aux USA. Si, jusqu’ici, les répercussions se remarquent surtout sur les Bourses, les prévisions de croissance ont tout de même été revues à la baisse tant en Asie que dans la zone euro.

    D’après une déclaration récente de la Banque Mondiale, le PIB par habitant de la Chine est équivalent à 9,8% de celui des USA. Les classes moyennes limitées de la Chine ou de l’Inde ne pourront pas reprendre le rôle moteur joué jusqu’ici par le consommateur américain.

    L’économie mondiale se trouve à un tournant de la période post-stalinienne. Et au moment même où s’effectue ce tournant, dans des pays comme la Belgique et l’Allemagne, les salariés se mettent en mouvement contre la baisse du pouvoir d’achat. L’intensification du taux d’exploitation qui a permis la croissance économique dans les années 90 commence à se retourner contre le système : il n’existe plus de marge pour que les travailleurs puissent faire face à l’augmentation des prix.

    La plupart des travailleurs n’ont connu la croissance de l’après 2001 que sous la forme d’une baisse du pouvoir d’achat. Dans ces conditions, une nouvelle crise économique entraînera une ouverture plus large pour les idées socialistes et offrira plus d’occasions pour le développement d’une alternative révolutionnaire.

  • L’impérialisme américain : affaibli et impopulaire, mais quelle est l’alternative ?

    L’impérialisme américain s’embourbe dans les problèmes. La guerre contre le terrorisme en Afghanistan et en Irak a provoqué plus d’instabilité et de terrorisme. D’autres alliés, comme le Pakistan, sont également touchés par ces convulsions. Aux USA, le moteur économique commence à capoter et on parle de récession. Ce dossier se propose de brosser l’état des lieux de l’impérialisme américain.

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    Vers une récession dure? Quelques citations

    “Si, en plus, le protectionnisme freine l’arrivage de marchandises bon marché venant d’Asie, nous entrerons bientôt dans une situation de récession économique combinée à une inflation galopante de 5 à 8 % (voire plus), bref à une stagflation. Une telle situation est à l’ordre du jour, mais le calendrier exact est difficile a estimer. Cela peut se produire à tout moment comme cela peut également être reporté. Mais plus ce sera postposé, plus la crise frappera durement, tout comme la désintoxication est plus dure si l’intoxication a été longue. L’effet sur la lutte de classe est difficile à juger. La période précédente de stagflation a provoqué une vague révolutionnaire qui a menacé l’existence du système. Les réserves construites pendant la période d’après- guerre et l’autorité qu’avaient les partis sociaux-démocrates et « communistes » (là où ils avaient une base de masse) ont finalement pu freiner ce mouvement. Mais il suffit de se rappeler les acquis de Mai ’68 – le mouvement de démocratisation de l’enseignement qui n’est toujours pas entièrement détruit – ou la Révolution des Oeillets au Portugal et les diverses révolutions dans les anciennes colonies pour en mesurer l’impact.” (“Stagflation: syndrôme d’une maladie chronique” Alternative Socialiste no 126, novembre 2007, à relire sur les sites socialisme.be ou marxisme.org)

    “Les USA n’ont connu que deux récessions ces 25 dernières années qui étaient l’une et l’autre une récession brève et douce. Il y a lieu de penser que la prochaine crise, lorsqu’elle viendra, sera plus grave.” (Wall Street Journal)

    “Le marché immobilier américain a connu la crise la plus grave depuis les années septante, avec des baisses de prix de 8% en moyenne depuis le pic de 2005, mais de 40% dans les régions les plus touchées. Le marché part de l’idée que la baisse pourrait continuer jusqu’à 30%. Cela augure de la direction que l’économie américaine pourrait prendre. Avec un taux de chômage record depuis deux ans (5% en décembre) et qui pourrait atteindre les 7% selon certaines estimations, le consommateur américain (qui a longtemps été considéré comme le moteur de la croissance mondiale) pourrait jeter le gant. La consommation des ménages a chuté de 0,4% en décembre. Les ‘experts’ en discutent encore, mais six Américains sur dix jugent que le pays est déjà en récession.” (The Economist du 12 janvier 2008)
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    La guerre contre le terrorisme n’est pas une grande réussite. Dès le début de la guerre en Irak en 2003, nous avons publié une brochure écrite par Peter Delsing qui expliquait les tenants et les aboutissants de cette “guerre pour le pétrole”. Cinq ans après, nous avons interrogé Peter sur la situation actuelle de la guerre.

    Trente mille soldats supplémentaires ont été envoyés sur place, l’impérialisme américain a-t-il réussi à stabiliser l’Irak après cette augmentation des troupes? Quelle est la situation en Irak même?

    “L’invasion en 2003 faisait partie des projets de l’aile néoconservatrice des Républicains. Ces projets existaient depuis longtemps et visaient au remodelage du Moyen-Orient. Les attentats du 11/09 ont fourni le prétexte rêvé à leur mise en oeuvre. Cette guerre devait permettre à Bush et Cie de rétablir leur emprise sur cette région vitale et pétrolifère et aussi de soutenir leur allié local : Israël. Les régimes en Irak et en Iran étaient une cause permanente d’exaspération pour les Etats-Unis. Bush n’aurait jamais envahi l’Irak s’il n’y avait pas eu de pétrole sous son sol. Mais Bush s’est fourvoyé sur la possibilité d’y établir un régime à sa botte.”

    “Le gouvernement de Maliki en Irak est assis sur un cimetière social. Chaque jour, des centaines d’adultes et d’enfants meurent des conséquences de l’occupation : le terrorisme, la violence, la misère, le grand banditisme, etc. En réalité, une guerre civile intercommunautaire y fait rage, entre chiites et sunnites ou entre Arabes et Kurdes. L’eau potable, l’électricité et même l’essence font défaut. L’augmentation des troupes a eu pour effet de militariser quasi complètement la ville de Bagdad et n’a fait que déplacer la violence ailleurs. Par exemple, les attentats terroristes se sont récemment multipliés au Kurdistan.

    “Ces divisions communautaires que les Américains ont institutionnalisées ne peuvent mener qu’à des conflits de plus en plus aïgus pour la répartition des maigres ressources encore disponibles. La seule alternative viable serait une lutte commune des masses laborieuses et pauvres pour assurer leur propre sécurité et la défense des besoins de base. Cette lutte devrait être liée au respect du droit à l’autodétermination des différentes composantes de l’Irak et enfin à la lutte pour la transformation socialiste de la société.”

    Quels sont les effets de cette politique impérialiste sur le reste du Moyen-Orient?

    “Parlons d’abord de l’autre aventure impérialiste, celle d’Afghanistan. Un politicien britannique a récemment déclaré qu’on sous-estimait la position délicate du gouvernement de Karzaï. Fin janvier, les USA ont déplacé 2.200 marines vers l’Afghanistan, car la menace d’une offensive des Talibans se précisait dans le sud du pays. Lors du Forum Economique Mondial à Davos, Karzaï a même mis en garde contre “un embrasement du terrorisme” dans la région. Une telle instabilité – que renforcerait encore un possible effondrement de la société au Pakistan – montre bien l’impossibilité de développer ces pays dans le cadre du capitalisme et de l’impérialisme. Les conditions sociales y sont déjà telles qu’une récession mondiale pourrait donner le coup de grâce à plusieurs régimes instables.”

    “Au Moyen-Orient, comme dans les pays du Golfe, il existe une élite riche qui nage littéralement dans les profits pétroliers. De l’autre côté, il y a une population souvent jeune, mais désorientée par la décadence capitaliste. La politique de Bush et de ses marionnettes locales a joué en faveur du fondamentalisme islamique, au Liban avec l’ascension du Hezbollah, à Gaza avec celle du Hamas. La soi-disant initiative de paix de Bush à Annapolis, en novembre de l’année passée, a donné plus de moyens au Fatah en Cisjordanie. Mais Israël continue à y construire des logements pour les colons.”

    “En janvier, Bush a aussi fait une tournée dans sept pays arabes. Pour contrecarrer l’influence de l’Iran, il a vendu à l’Arabie Saoudite des bombes à guidage pour une valeur de 123 millions de dollars. Il en a aussi livré gratuitement 10.000 à Israël. D’autres contrats sont prévus pour une valeur totale de 20 milliards de dollars. La région devient une poudrière et l’exemple pakistanais n’a pas servi de leçon.”

    Quels seront les effets d’une récession aux USA sur la position de l’impérialisme?

    “Le prix du baril de pétrole a chuté légèrement depuis son pic de 10 dollars, mais il oscille toujours à un niveau élevé, entre 85 et 90 dollars. La crise financière actuelle – qui se traduira bientôt par des licenciements de masse, par des fermetures d’entreprises et par de nouvelles attaques sur les salaires et la sécurité sociale – se caractérise par l’éclatement des bulles artificielles qui maintenaient à flot le capitalisme en crise.

    “Dans les années 80, dans le sillage de Reagan et de Thatcher, les gouvernements ont relancer les profits en sapant le pouvoir d’achat des salariés et des allocataires sociaux. Ils ont cependant préféré recourir provisoirement à l’emprunt public plutôt que de lancer une offensive encore plus dure contre la classe ouvrière. Dans le cas de Reagan, il s’agissait d’investir dans l’appareil militaire.”

    “Au cours des dix dernières années, et surtout depuis la récession en 2001 aux USA, les dirigeants capitalistes ont essayé de différer une crise encore plus profonde en laissant enfler une bulle de crédits à bon marché. C’était le seul moyen pour que la population continue à consommer malgré des revenus qui ne progressaient plus ou même baissaient. C’est ainsi que les salariés se sont mis à dépenser leurs revenus futurs.”

    “La bulle du marché immobilier est en train d’éclater aux USA. A l’heure actuelle, les prix n’y ont diminué “que” de 8%. Mais avec quelles conséquences ! Cela a cependant suffi pour que la Bourse américaine recule sérieusement, entraînant derrière elle toutes les Bourses à travers le monde. En Inde, la bourse a chuté de 11% en une journée. Les analystes n’en estiment pas moins que la chute des prix pourrait atteindre les 30%. La bulle d’autres formes de crédits aux USA pourrait produire des effets comparables.

    “La bulle du ‘dollar fort’ est déjà en train d’éclater depuis un moment. Si elle devait éclater pour de bon, les exportations européennes auraient du mal à se maintenir et l’économie mondiale pourrait encaisser des chocs plus importants encore. “En outre, on ignore encore l’ampleur de la diffusion des ‘créances douteuses’ qui ont été converties en paquets d’actions. Un géant bancaire américain comme Citigroup a fait ses plus grosses pertes depuis 196 ans ! Un sentiment d’inquiétude, et même de panique, commence à s’installer parmi les dirigeants capitalistes. Il suffit de voir l’intervention énergique de la Federal Reserve (Banque Centrale Américaine) qui a réduit d’un coup ses taux de 0,75%. Les Américains sont endettés jusqu’au cou, mais Bernanke (le président de la FED) les incite à continuer dans cette voie.

    “Les remèdes des rebouteux néolibéraux fonctionnent de moins en moins. La classe ouvrière américaine sera appelée à jouer un rôle important dans la construction de nouveaux partis pour les pauvres, les salariés et leurs familles, dans le feu de la lutte pour une autre société, une société socialiste.”

  • Economie malade: Grippe ou cancer?

    Capitalisme

    Selon Verhofstadt l’économie belge est en excellente forme. La Banque Nationale prédit une croissance de 2,5% cette année, ce qui, en Belgique, devrait être suffisant pour accroître légèrement le taux d’emploi.

    Peter Delsing

    La Banque Nationale, comme la plupart des économistes bourgeois, fonde ses prévisions sur base d’un pifomètre plutôt que sur une réelle méthode. Ces derniers mois, on a pu constater au niveau international, une instabilité croissante et une évolution des Bourses en " yoyo ". Début juin, la Bourse belge a perdu tous les profits de cette année. Avec une telle instabilité internationale, les prévisions de la Banque Nationale ou du gouvernement concernant la croissance en Belgique s’apparentent à ce qu’on peut déduire à la lecture du marc de café.

    Un passé fait de "croissance sans emploi"?

    Depuis la crise aux Etats-Unis en 2001, l’économie belge connaît une relance très faible. Entre 2001 et 2005, la croissance belge a été de 1,5% en moyenne, le type de maigre croissance qui s’accompagne de pertes d’emplois. La productivité (produire plus avec le même nombre de travailleurs par l’utilisation de machines plus performantes ou en augmentant l’exploitation) s’élève en moyenne de 1 à 1,5% par an en Belgique.

    La réalité c’est qu’après des années de ce "redressement" économique, notre économie est déjà menacée par un nouveau déclin de la croissance mondiale. De ce "redressement", on s’oriente vers un essoufflement de la croissance ou une récession (quand l’économie régresse plutôt que de se développer).

    Des années de croissance… artificielle

    Partout à travers le monde, les gouvernements capitalistes ont mené après 2001 une politique de crédit à bas prix pour maintenir l’économie la tête hors de l’eau. En Belgique également, beaucoup de familles en ont profité pour entamer la construction d’une maison à l’aide d’un emprunt à bas taux d’intérêt. L’accumulation de dettes dans les ménages combinée à l’amnistie fiscale -qui a surtout profité à une petite couche de gens aisés !- et, plus récemment encore, aux effets des diminutions d’impôts ont soutenu la consommation belge pendant une certaine période.

    La tendance à la constitution de dettes est visible de façon très aigüe dans l’économie la plus importante au monde: celle des Etats-Unis. Depuis 2001, 80% des travailleurs américiains ont connu une diminution salariale. Cependant, beaucoup de gens ont continué de s’endetter dans l’euphorie du crédit bon marché et de la bonne santé de l’immobilier qui en découlait. Cette bulle financière ne pouvait enfler éternellement.

    La Federal Reserve (banque centrale américaine) a commencé à relever les taux d’intérêt, les emprunts sont donc devenus moins bon marché. Aujourd’hui, la plupart des travailleurs ne voient toujours pas leurs salaires augmenter, mais ils sentent bien que le prix de l’essence s’envole et que – surtout – la bulle du marché immobilier commence à éclater.

    Selon l’Association Nationale des Constructeurs de Maisons aux Etats-Unis, la confiance du secteur a été en juin la plus basse en 11 années. Le nombre de demandes de construction de nouvelles habitations a baissé en mai de 8,5% sur base annuelle. "La tendance (sur le marché immobilier) est fortement à la baisse", selon certains économistes. Cela menace de saper les fondements de la consommation aux Etats-Unis, qui est dans une grande mesure le moteur de l’économie mondiale…

    Des déséquilibres intenables dans l’économie mondiale

    Les récents mouvements boursiers ont été une réaction à l’inflation (augmentation des prix) plus forte, provoquée par l’augmentation du prix des matières premières, et à la croissance plus faible qu’espéré aux Etats-Unis. On a ainsi assisté à un mouvement des grands fonds de placement d’actions risquées et surévaluées vers des placements plus sûrs.

    Cette place plus grande de la spéculation financière dans l’économie est une expression du déclin du capitalisme qui, à cause de sa tendance à la surproduction, investit moins dans la production réelle. Les profits des institutions uniquement financières ont grimpé aux Etats-Unis de 10 à 15% dans les années ’50 et ’60 et de 30 à 40% aujourd’hui.

    Si une inflation croissante doit être combattue avec de plus hauts taux d’intérêt, cela menace au niveau mondial d’en finir avec le régime d’intérêt à bon marché. L’inflation – et l’arme du pétrole aux mains de pays comme l’Iran ou le Vénézuéla – menace de se combiner à la stagnation économique, ce que l’on appelle la stagflation.

    La Federal Reserve pourrait aussi être forcée de faire monter les taux d’intérêt pour continuer d’attirer de l’argent de l’extérieur avec la vente d’obligations d’Etat, effort supplémentaire pour soutenir un dollar qui pourrait glisser très rapidement.

    Des riches plus riches et des pauvres plus pauvres

    La politique néolibérale a fait en sorte que la plupart des travailleurs soient confrontés à un pouvoir d’achat qui stagne ou diminue, pendant que les patrons s’approprient des profits et une richesse jamais vue jusqu’alors, avec par exemple l’augmentation de la productivité aux Etats-Unis.

    Entre 1995 et 2005 la productivité moyenne par heure prestée d’un travailleur aux Etats-Unis a augmenté de 30%. Cette exploitation plus intensive était entre autres une conséquence de l’enjeu des nouvelles technologies et des nouvelles techniques de gestion de personnel.

    Entre 2001 et 2006 les profits aux Etats-Unis ont plus que doublé: une croissance de 123%, du jamais vu depuis la seconde guerre mondiale. Sur le même laps de temps, la partie des profits dans le revenu national a augmenté de 7% du revenu mondial vers 12,2%, une croissance inconnue depuis la période de l’après-guerre.

    Alors que dans les années ’70 un patron aux Etats-Unis gagnait en moyenne 30 fois plus que le salaire moyen d’un travailleur, il s’agit aujourd’hui d’un rapport de 1 à 300 ! Le capitalisme va inévitablement recréer une conscience de classe et provoquer d’intenses luttes des masses opprimées contre leurs exploiteurs. Durant les 10 à 15 années à venir, on peut s’attendre à des chocs violents dans ce système, des chocs probablement déterminants pour la survie même du système ou de la planète.

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