Tag: Chine

  • Le capitalisme sur le sentier de la guerre des monnaies

    Prendre du speed ou d’autres stimulants au cours d’une soirée peut rendre infatigable et libéré de freins physiques ou moraux. Le crédit, pour le capitalisme, c’est l’équivalant du speed de notre fêtard : cela suscite l’euphorie, mais cela rend inévitablement le corps dépendant, l’épuisera et le démolira, pour finalement conduire à une dépression profonde. De la même façon, tant qu’il y a suffisamment de doses, les toxicomanes sont des amis inséparables. Par contre, en cas de manque, ils deviennent d’impitoyables concurrents.

    Par Eric Byl

    Concernant le crédit, les dealers sont les autorités. Pour sauver les spéculateurs, elles ont fait des emprunts massifs. C’est pour les amortir que les français devront économiser 1.700 € par personne durant les prochaines années, entre autres en travaillant plus longtemps. En Angleterre, il s’agit de 1.600 €, de 1.100 € en Allemagne et de 1.400 euros aux Pays-Bas. En Belgique, les politiciens ne savent pas encore trop comment, mais il s’agira de 2.200 à 2.500 € par habitant d’ici fin 2013. Ce n’est visiblement toujours pas très clair pour la N-VA. Le ministre flamand Bourgeois (N-VA) a ainsi déclaré à la radio qu’il sera difficile de trouver 22 à 25 milliard d’€… en une année (au lieu de 4).

    Pendant le grand crash des années ’30, qui a conduit à la deuxième guerre mondiale, chaque pays a essayé de protéger son marché face aux concurrents étrangers. C’est ce qu’on appelle le ‘‘protectionnisme’’. Dès le début de la crise immobilière déjà, des économistes avaient averti de surtout éviter cette erreur.

    Mais la crise immobilière refuse de passer et, de plus, elle a entrainé une crise bancaire dont le sauvetage a provoqué une crise des Etats. On deviendrait même désespéré de constater, à la fin du processus, que de rusés banquiers ont instrumentalisé la situation pour exproprier à tort des milliers de familles.

    Celui qui voit mourir son enfant intoxiqué est capable de tout, y compris de ce qu’on ne l’imaginait pas capable de faire. Pour les politiciens capitalistes, ce n’est pas différent. Tous essayent de diminuer les déficits en stimulant les exportations dans l’espoir de récupérer une partie du marché des autres pays. Au début, cela se faisait de façon cachée, en diminuant les taux d’intérêts où en créant de l’argent, le “quantitative easing” (voir notre dossier à ce sujet). Ils affaiblissent ainsi leur propre monnaie en comparaison des concurrents extérieurs, qui eux réagissent par des mesures similaires annulant cet effet.

    Dans son introduction au “Capital” de Marx, Friedrich Engels avait décrit une dépression comme une longue période de stagnation économique accompagnée d’un chômage structurel où chaque mesure provoque un effet contraire à son objectif. Le ‘‘Quantitative easing’’ a permis à de rusés spéculateurs d’emprunter des dollars à un taux de 0,25% pour acheter des obligations brésiliennes rapportant 5% de rendement. On appelle cela du Carry trade. Cela provoque des bulles au Brésil, mais aussi en Thaïlande par exemple, ces deux pays essayent de contrarier cet effet en introduisant une taxe supplémentaire sur les obligations achetées par des “investisseurs” étrangers.

    La création d’argent aux Etats- Unis provoque inévitablement le même réflexe en Chine, et au Japon, et en Corée du Sud, et… Cela menace de faire encore plus exploser les dettes publiques. Aux USA, les démocrates et les républicains, au congrès et au sénat, ont déjà menacé d’introduire des taxes supplémentaires sur les produits chinois au cas où la Chine refuserait de revaloriser sa monnaie (on songe à une augmentation de 20 à 40%). La Chine ne veut et ne peut pas appliquer cela.

    La possibilité que cette guerre des monnaies conduise à une guerre commerciale réelle et, finalement, à un crash encore plus profond que celui que nous venons de vivre semble inévitable. Cela s’explique par le fait que le système capitaliste n’est plus capable de gérer les forces productives qu’il a suscitées. Seule une économie démocratiquement planifiée est apte à utiliser ses capacités harmonieusement, en fonction de tous.

  • Portugal: 30.000 manifestants contre l’impérialisme et la guerre dans les rues de Lisbonne.

    Ce week-end, un grand sommet de l’OTAN a eu lieu à Lisbonne. Sept ans après “the coalition of willing” qui avait servi de préparation en vue de l’invasion de l’Irak, le Portugal a de nouveau fait bon accueil à un important sommet militaire. L’alliance militaire de l’impérialisme occidental s’est réunie pour discuter de sa stratégie pour les 10 années à venir. Leur objectif premier est de défendre les intérêts de l’impérialisme occidental dans un monde où d’autres blocs émergent.

    Jonas Raposeiro, Socialismo Revolucionario (CIO-Portugal)

    L’OTAN a été fondée après la Seconde Guerre Mondiale en tant qu’organe de ‘‘défense de la démocratie” et ce en dépit du fait que de nombreux dictateurs figuraient parmi les membres fondateurs, y compris le régime fasciste de Salazar au Portugal. Son véritable objectif était la défense militaire des intérêts économiques et géopolitiques des pays capitalistes majeurs contre le “péril rouge” venant d’URSS. Pour arriver à ses fins, l’OTAN n’a jamais hésité à avoir recours à la force brutale, l’invasion de l’Afghanistan n’étant que l’exemple le plus récent.

    Depuis la disparition de l’URSS il y a 20 ans, l’OTAN a cherché une nouvelle stratégie. La “guerre contre le terrorisme” a servi de prétexte pour légitimer les nouvelles “prouesses” militaires; l’envoi de troupes dans des pays riches en pétrole. Avec l’émergence de nouvelles puissances, la Chine principalement, il est maintenant temps d’adopter une nouvelle stratégie.

    L’OTAN a toujours été une organisation impérialiste. Son principal but est depuis le début de soutenir les intérêts économiques occidentaux dans le monde entier. Vu le contexte de crise économique, les contradictions capitalistes grandissent. Elles sont maintenant matérialisées sous la forme de conflits commerciaux, de protectionnisme ou de guerres des monnaies. Nous ne devrions donc pas être étonnés si dans la prochaine période, Washington utilise l’OTAN comme un moyen de pression militaire dans la guerre des monnaies, y compris contre la Chine.

    Socialismo Revolucionario (CIO-Portugal) a été l’une des organisations qui ont mobilisé pour une grande manifestation contre le sommet. Des centaines d’organisations, avec parmi elles le Bloc de Gauche et le Parti Communiste, se sont joins à cette manifestation sous le slogan “paix oui, OTAN non”.

    Samedi après midi, plus de 30.000 jeunes, travailleurs, militants et syndicalistes ont battu le pavé. Le lien entre le sommet de l’OTAN et la crise du capitalisme était souligné par de nombreuses délégations. Sur certaines banderoles, on pouvait lire: “stopper l’OTAN, le bras armé du capitalisme”, “désarmez l’OTAN, l’aile armée du capitalisme mise en place pour casser les droits des travailleurs” ou encore ‘‘contre la guerre; capitalisme et impérialisme sont la cause pas la solution”. Notre organisation-sœur est intervenue avec son dernier journal ainsi qu’un tract spécifique relatif à l’OTAN et à la grève générale qui va suivre ce mercredi.

    Le Comité pour une Internationale Ouvrière condamne fermement l’attitude provocatrice de la police durant la manifestation. Par exemple, elle a essayé de bloquer un contingent de la PAGAN (plateforme anti-OTAN et anti-guerre) en l’isolant derrière un double cordon policier. Le but était de provoquer des réactions chez les manifestants de manière à pouvoir procéder à des arrestations et ainsi criminaliser l’évènement. Ces provocations n’ont pas eu beaucoup d’effets: elles ont rencontré une réponse militantes mais sans violences.

    C’est cependant un exemple de campagnes que le gouvernement a tenté de développer ces dernières pour arriver à criminaliser les mouvements sociaux. Le gouvernement et les médias ont tenté d’effrayer les manifestant en annonçant la venue de 5.000 “black block violent” (qui ne sont d’ailleurs jamais arrivés) et en parlant de menace terroriste. Le gouvernement tente de créer un climat de peur contre la haine grandissante de la population contre sa politique, avec évidemment à l’esprit la grève générale de cette semaine. Cette campagne peut seulement être contrée par l’organisation et la lutte de la classe ouvrière.

  • Grande-Bretagne – ‘C’est seulement le commencement’ : Une manifestation étudiante massive exprime la colère face à l’austérité

    La colère des étudiants et des jeunes face aux propositions de coupes budgétaires dans l’enseignement et à la vicieuse augmentation des minerval est impossible à ignorer suite à la manifestation du 10 novembre dernier. Plus de 50.000 manifestants étaient présents, ce qui était la plus grande mobilisation de jeunes en 30 ans, et il était clair que, pour eux, il ne s’agissait là que d’un début.

    Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles)

    Des cars étaient venus des coins les plus reculés d’Ecosse, où l’augmentation des minerval n’a pas encore été introduite, et de partout en Grande Bretagne. Les slogans se déclinaient aux accents cockney, de Liverpool, Newcastle, Birmingham et Cockney. Parmi les quelques 52,000 étudiants présents, des délégations des plus importantes universités étaient présentes, avec t-shirts, pancartes et drapeaux officiels de leur université.

    Mais on notait aussi la présence de hautes écoles qui s’étaient organisés pour venire, certains se déclarant malades, d’autres séchant simplement les cours pour participer à la manifestation, et au moins un groupe est venu à la faveur d’un voyage scolaire qui a été en quelque sorte ‘détourné’ pour aller à la manifestation.

    La pourriture Tory

    Un groupe d’étudiants issu d’une haute école de l’Est de Londres a rejoint le cortège principal en criant en bloc "Pourriture Tory (la parti des conservateurs, NDLT), nous voilà!" Autour d’eux et à bien des endroits, on pouvait voir des banderoles artisanales. Souvent, la colère contre les projets du gouvernement s’exprimait en termes haut en couleur…

    Les Tories, les conservateurs, sont clairement considérés comme les ennemis. Si la menace d’un retour au Thatchérisme ne signifiait pas grand chose pour les jeunes qui n’avaient pas connu l’impact de la politique de la Dame de Fer (Margaret Thatcher a été Premier Ministre de Grande-Bretagne de 1979 à 1990), maintenant, c’est beaucoup plus concret. Une pancarte faisait référence aux slogans des années ’80 : "David Thatcher – education snatcher" (‘‘David Thatcher – braqueur de l’enseignement, en référence à David Cameron, Premier Ministre actuel). D’autres slogans illustraient encore que le discours de la coalition gouvernementale des conservateurs et des libéraux démocrates selon lequel ‘‘nous sommes tous dans le même bain’’ ne fonctionne pas. On pouvait ainsi voir des slogans comme "Classrooms not class war" (des salles de classe, pas la guerre des classes). Nick Clegg et les libéraux-démocrates étaient particulièrement le sujet d’attaques, comme ils avaient mené campagne avant les élections contre toute augmentation du minerval étudiant. On pouvait ainsi voir des pancartes portant: "Mr Clegg – you stole my vote" (M. Clegg – vous avez volé mon vote),…

    ‘La réponse la plus dramatique’

    Six mois seulement après les élections, le Guardian a qualifié la mobilisation de "plus large et plus dramatique réponse à l’austérité du gouvernement’’. Seuls les supers-riches ne seront pas affectés par ces mesures brutales.

    Les mesures concernant les logements sociaux menacent de mettre à la rue des centaines de milliers de locataires tandis que les restrictions dans les budgets des gouvernements locaux pour l’aide sociale aux adultes pourraient signifier que des centaines de milliers de personnes âgées n’auraient plus accès aux soins qu’elles méritent.

    Mais dans tout le paquet de mesures d’austérité, les coupes dans le budget de l’enseignement sont parmi les plus brutales et cruelles : le minerval va augmenter de 3.290 livres (3.874 euros) à environ 9.000 livres (10.500 euros) et 80% des dépenses dans la prestation des cours vont être supprimées.

    Ces attaques sont particulièrement lourdes de conséquences, même si la voie vers un enseignement à deux vitesses – un pour les riches, un autre pour les pauvres – avait été déjà clairement trace par le précédent gouvernement travailliste. Le précédent gouvernement du New Labour avait chargé Lord Browne, un ancien haut cadre de la multinationale pétrolière BP, pour revoir les fonds alloués à l’enseignement supérieur. Ces propositions étaient acceptables pour les millionnaires qui soutiennent le gouvernement de Con-Dem, mais pour peu d’autres personnes. Même un journaliste du journal pourtant pro-Tory London Evening Standard avait été forcé de condamner l’approche présentée dans le rapport Browne.

    Richard Godwin avait ainsi écrit: "Les politiciens semblent avoir difficile à concevoir que l’enseignement est une valeur en soi. Selon le rapport Browne, l’enseignement n’a de la valeur que parce que cela apporte ‘‘l’innovation et la transformation économique. L’enseignement supérieur aide à produire de la croissance économique, ce qui en retour aide la prospérité nationale’’."

    L’enseignement supérieur

    Dans ce contexte, les membres du Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles) et les autres militants qui ont fait campagne pour cette manifestation n’ont pas été surpris de l’affluence massive. Une grande variété d’opinions existe quant au type d’enseignement que nous devons avoir, mais les étudiants sont ouverts à la discussion. Une jeune femme a ainsi saisi une pancarte du Socialist Party (Fight the cuts – luttons contre les coupes) en disant ‘‘Je veux celui-là, il faut se battre contre ces coupes’’ tout en ajoutant directement ‘‘Mais je ne vois pas comment payer le budget de l’enseignement". Quand nous lui avons expliqué qu’environ 120 milliards de livres (140 milliards d’euros) disparaissent chaque année dans les poches des riches à cause de la fraude fiscale, elle était encore plus heureuse de défendre les slogans combatifs.

    Beaucoup d’étudiants considéraient également à la manifestation que cela n’était qu’un premier pas, la confiance rehaussée par la large participation à la manifestation.

    Les Socialist Students (les étudiants de nos camarades du Socialist Party, l’équivalent des Etudiants de Gauche Actifs en Belgique) ont distribué environ 10.000 tracts appelant à préparer des grèves et des protestations pour le mercredi 24 novembre, quand le gouvernement discutera du minerval.

    Malheureusement, le National Union of Students (NUS, un syndicat étudiant) n’a donné aucune stratégie de campagne pour la suite. Même s’il a coorganisé la manifestation, en sachant parfaitement que des cars arrivaient de tout le pays pour la manifestation, la direction du NUS, liée aux travaillistes du New Labour, ne semble pas prête à organiser une réponse de masse face aux attaques dans l’enseignement. Le site internet du NUS espérait que la marche serait terminée en 30 minutes, sans réaliser le moins du monde que des dizaines de milliers de manifestants, cela ne disparait pas comme ça des rues…

    Encadrement

    Cela a aussi signifié que l’encadrement à la manifestation était loin d’être adéquat – particulièrement à la fin. Comme ils n’ont pas levé le petit doigt pour lutter contre les attaques introduites par le précédent gouvernement travailliste, ils se retrouvent aujourd’hui avec bien peu d’expérience dans la façon d’organiser de grandes manifestations et d’y participer. D’autre part, les structures démocratiques du NUS ont été érodées, et les liens entre la direction et la base étudiante sont très ténus. Le président du NUS, Aaron Porter, qui a déclaré qu’il n’était pas fondamentalement opposé à une augmentation du minerval, a qualifié ‘‘d’ignobles’’ certaines manifestants à la Millbank Tower. Il a appelé les étudiants à "aller de l’avant", mais la stratégie du NUS se limite à dire aux dizaines de milliers de manifestants de simplement retourner derrière leurs ordinateurs et d’envoyer des emails à leurs parlementaires et à les visiter ‘‘en personne’’. Ce n’est pas encore de la protestation virtuelle, mais on n’en est pas loin!

    Au vu de l’ampleur des attaques, de la faillite de la direction du NUS à donner la moindre stratégie pour construire le mouvement et la campagne et de l’absence quasi-totale d’encadrement à la fin de la manifestation, il n’a pas été surprenant de voir certains trouver séduisante l’idée d’une occupation du QG des tories. Le Socialist Party considère les occupations comme une action légitime et comme un moyen important de construire le mouvement contre les assainissements, au côté d’autres tactiques. Pour être pleinement efficaces, ces occupations doivent être basées sur des décisions démocratiques et être organisées et encadrées autour d’une liste de revendications claires.

    Des décisions démocratiques

    Cela préviendrait l’arrivée d’actions comme celle d’étudiants jetant des objets du toit du QG des tories, ce qui était potentiellement très dangereux. De telles actions individuelles seraient stoppées par la volonté de la majorité, comme cela a été exprimé par les centaines d’étudiants qui ont demandé en criant d’arrêter de lancer des objets dans la rue. Cette occupation n’était pas une occupation organisée mais une protestation spontanée. De Chine où il était en visite, David Cameron a déclaré: "Ceux qui attaquent la police où brisent les vitrines et sassent la propriété enfreignent la loi et, oui, je l’espère, ces gens seront poursuivit. Ils doivent l’être." Les médias ont choisi de se concentrer sur l’occupation bien plus que sur l’action de masse de ces dizaines de milliers de manifestants en rue. Certains étudiants pensent qu’avec les medias capitalistes, c’est seulement l’occupation qui a permis d’assurer un minimum de couverture médiatique. Après tout, les 125.000 Tamouls qui ont manifesté contre le massacre de leurs pairs au Sri Lanka en 2009 n’avaient quasiment rien reçu comme attention dans la presse.

    Des millions de travailleurs et de jeunes qui font face à la violence des tories vont penser que les étudiants ont été ‘‘un peu trop loin’’, mais que quelques fenêtres cassées, c’est tout de même de la petite bière en comparaison des attaques du gouvernement, qui vont affecter la vie de centaines de milliers de personnes.

    La réelle violence

    Le Socialist Party approuve la déclaration des lecteurs de l’université Goldsmiths qui dit: "La réelle violence dans cette situation ne revient pas à ceux qui brisent des fenêtres, mais à l’impact destructeur des coupes budgétaires et des privatisations qui vont suivre si le minerval est augmenté et si les coupes budgétaires sont introduites."

    Dès l’élection de ce gouvernement, plusieurs commentateurs avaient prédit que ce gouvernement serait profondément impopulaire dans les six mois. Tout comme le Socialist Party l’avait lui-aussi déclaré, cette colère allait devoir trouver une expression dans la rue. Aux attaques, les travailleurs et leurs familles vont répondre par un appel à passer à l’action.

    Les étudiants ont ouvert la voie et ont permis à la colère largement ressentie dans la société de pouvoir s’exprimer. Le prochain pas requis est de construire un mouvement de masse déterminé et capable de stopper les attaques des Con-Dem en joignant à la jeunesse la puissance des organisations de la classe ouvrière.

    Une idée du potentiel dont dispose la classe ouvrière a été illustré par la récente grève des travailleurs du métro initiée par les syndicats RMT et TSSA à Londres : la capitale était à l’arrêt.

    Les étudiants doivent continuer à développer leur propre mouvement, sur base démocratique, mais doivent aussi le relier au mouvement syndical afin de construire la force qui sera suffisamment capable de stopper le gouvernement.

    Le Socialist Party déclare:

    • Le NUS doit fixer une prochaine date pour une nouvelle manifestation si aucun changement n’est observe dans la politique du gouvernement.
    • Soutenez la proposition du Socialist Students et de la campagne Youth Fight for Jobs day pour une journée d’action le 24 novembre.
    • Aucune attaque contre le droit de protester et aucune victimisation des étudiants impliqués dans les mobilisations !
    • Les dirigeants syndicaux doivent coordonner les actions des syndicats avec les organisations étudiantes pour appeler à une manifestation commune le plus vite possible, en tant que pas vers une grève générale de 24h du service public

  • Crise du capitalisme mondial : vers une guerre des monnaies?

    Début d’année, une bonne partie des économistes et des dirigeants capitalistes affirmaient ‘‘entrevoir le bout du tunnel’’, voulant dire par là que certaines statistiques économiques leur faisaient penser que le retour à un capitalisme en croissance était pour bientôt. Tout ceux-là doivent aujourd’hui se demander quelle saleté obstruait leurs lunettes au vu de la succession de crises qui frappent leur système, à travers la crise des dettes publiques, la zone euro, l’absence de perspective autre que la précarité pour les travailleurs et leur famille et aujourd’hui une ‘‘guerre des monnaies’’ qui se profile.

    Par Baptiste (Wavre)

    LA GRANDE RÉCESSION

    Les nouvelles économiques que l’on peut lire dans les quotidiens semblent assez contradictoires, soufflant tantôt le chaud, tantôt le froid. Un jour, on parle de retour à la croissance et d’apaisement sur tel marché et, le lendemain, la panique prend place, parfois concernant le même sujet. Ce caractère maniaco-dépressif des dirigeants capitalistes est caractéristique de la crise qu’ils traversent et qui s’est déclarée sur le plan financier dès 2007 déjà. Cela reflète clairement un manque de confiance dans la capacité du système à offrir une perspective de croissance.

    Cette crise, la plus importante que le capitalisme ait connue depuis les années ’30 selon une majorité d’économistes sérieux, a eu un impact sur toutes les économies de la planète, aucun pays n’a pu se retrouver sur un ‘‘îlot de croissance’’ isolé. Cela s’est traduit par une diminution du PIB mondial en 2009, une première depuis 65 ans. Mais, en contraste avec la crise de ’29, les gouvernements sont rapidement intervenus, et considérablement, afin de sauver tout ce qui pouvait l’être dans la finance mondiale. Ainsi, le FMI a qualifié la crise actuelle de ‘‘Grande Récession’’, en contraste avec la ‘‘Grande Dépression’’ des années ’30.

    Mais ces interventions ont-elles pu sauver l’économie mondiale en résolvant un problème de confiance et en relançant la machine pour un tour ? Rien n’est moins sûr. Le FMI lui-même indique que le risque de rechute est élevé, soulignant que la reprise dans les pays capitalistes avancés est trop faible en comparaison de l’importance de la récession qui a précédé. Ils veulent dire par là qu’une récession d’une telle ampleur aurait du faire le ménage et laisser à sa suite un potentiel de croissance pour un capitalisme assaini. Mais cette croissance ne venant pas réellement (les chiffres positifs ne reflètent que les effets des plans de stimulation et une augmentation des stocks, et il n’y a pas de création d’emplois alors que des millions d’entre eux ont été détruits au cours de la crise), le spectre d’un ‘‘double-dip’’ (une récession à double creux) hante de plus en plus les gouvernements.

    INJECTION D’ARGENT

    C’est la raison pour laquelle les autorités financières des différents pays épuisent encore plus les outils monétaristes de stimulation de l’économie. Les taux d’intérêts sont déjà à 0 ? Alors l’heure est venue d’injecter des milliards de liquidités à travers un ‘‘assouplissement quantitatif’’. Il s’agit pour les autorités financières de racheter des actifs toxiques, c’est-à-dire de donner de l’argent pour des papiers qui ne seront plus solvables, ce qui revient à injecter de l’argent. Des taux d’intérêt à 0 font déjà craindre à eux seuls aux économistes le développement de bulles spéculatives et, du coup, une fébrilité de l’économie. Il ne faut pas demander la fébrilité dont fait acte le capitalisme avec une telle batterie de mesures.

    Beaucoup d’économistes n’ont d’ailleurs pas confiance en ce ‘‘quantitative easing’’ pour opérer un coup de rein dans la relance, car trop peu de choses sont connues et ils indiquent que ce ne serait qu’un sparadrap sur une jambe cassée. De fait, la crise a considérablement affaibli le pouvoir d’achat des ménages. Les marxistes peuvent aller plus loin, et avancer que le capitalisme pose ses propres limites à la croissance à travers la crise de surproduction qu’il entraîne. Et quel que soit l’aménagement monétariste des capitalistes, il ne peut en rien résoudre cette crise de surproduction.

    LES CONTRADICTIONS AUGMENTENT

    Entre-temps, la crise a également remis à l’ordre du jour les contradictions inhérentes du capitalisme, des contradictions que la croissance, même faible, du néolibéralisme avait permis de mettre temporairement au frigo. Aujourd’hui, les illusions volent en éclat et ce sont les conflits qui prennent le dessus. La crise de la zone euro a illustré à quel point la coopération entre gouvernements de différents Etats-nation passe à l’arrière plan lorsque les intérêts personnels ne sont plus suffisamment garantis.

    Dans son dernier rapport, le FMI met en avant la menace d’une guerre des monnaies, qui illustre le fait que les différents gouvernements sont décidés à mener une bataille pour préserver les intérêts de ‘‘leurs capitalistes’’. Un instrument classique pour stimuler son économie est de réaliser une dévaluation compétitive de sa monnaie. De fait, les marchandises à l’exportation sont du coup moins chers (l’exportation est donc stimulée) et l’importation est plus chère (la production interne est donc stimulée). C’est précisément cette dévaluation compétitive que des pays comme la Grèce n’ont pas été en mesure de réaliser du fait du carcan de l’euro (la solution pour eux était alors de stimuler la production avec de l’austérité).

    Mais cette dévaluation compétitive ne fonctionne que si d’autres pays concurrents sur le plan des exportations n’y recourent pas. Car si un second pays dévalue également sa monnaie, les efforts du premier pays se retrouvent annulés.

    C’est ce petit jeu de dupes que l’on peut observer aujourd’hui, notamment entre l’euro, le yen, le dollar et le yuan. De la même manière que des voix se sont élevées, notamment du côté du FMI, pour demander à des pays excédentaires comme l’Allemagne de relancer sa demande intérieure, aujourd’hui il est demandé à la Chine de développer sa demande interne. L’idée est les pays qui ont une certaine marge commerciale favorable doivent exploiter cette position de force pour stimuler la demande interne, et finalement donner un marché aux exportations de pays déficitaires.

    Cette idée est clairement une illusion. L’excédent commercial chinois est indissociable du taux d’exploitation présent dans le pays et ne peut pas être conjugué à une demande soutenue. Et il est illusoire de croire que les capitalistes allemands vont sacrifier ‘‘leur compétitivité’’ par charité pour les capitalistes qui leur sont concurrents.

    “ÇA VA FAIRE MAL”

    Le titre du rapport du FMI sur l’économie mondiale est ‘‘Est ce que ça va faire mal’’, et ce n’est pas un hasard.

    Cela a tout d’une question oratoire, à la réponse connue de tous: le FMI est convaincu que cette crise va faire très mal aux travailleurs et à leurs familles. Quel que soit l’aménagement capitaliste de la crise, il s’agit systématiquement d’un cul de sac pour les travailleurs : ce système n’a plus les moyens de proposer une perspective d’avenir et de bien être pour la société. Le seul agenda présenté est rempli de crises et de précarité. Il y a quelques années encore, les idéologues des classes dirigeantes avaient la possibilité de réciter à tue tête ‘‘There Is No Alternative’’ (TINA, il n’y a pas d’alternative au néolibéralisme). Aujourd’hui, ils ne sont plus du tout dans une telle posture, la crise de leur système illustre qu’aucune issue n’existe dans le capitalisme pour les travailleurs et leur famille.

    Un système où les richesses sont produites en fonction des besoins de la population, à travers une planification démocratique de l’économie – c.à.d. le socialisme – est le seul système en mesure d’offrir une réponse aux travailleurs.

  • Au Kazakhstan, la résistance contre le régime dictatorial grandit

    Début septembre, Tanja Niemeier s’est rendue au Kazakhstan avec l’eurodéputé Joe Higgins, en tant qu’attachée parlementaire de la fraction européenne de GUE/NGL (Gauche Unitaire Européenne). Ce pays est pour le moment président de l’Organisation pour la Sécurité et la Collaboration en Europe (OSCE), mais est lui-même caractérisé par la répression et le pillage des matières premières. Nous en avons discuté avec Tanja.


    Peux-tu brièvement nous expliquer la situation politique et économique du Kazakhstan?

    Tanja: “Le Kazakhstan est une ancienne république soviétique devenue indépendante à la chute du stalinisme. Potentiellement, c’est un pays riche avec de grandes réserves de richesses naturelles (le pays dispose de la onzième réserve de pétrole et de gaz au monde).

    “Cette énorme richesse ne profite pas à la population. Un travailleur dans le secteur du pétrole gagne en général moins de 200 dollars par mois. Toute l’industrie a été vendue aux grandes multinationales qui pillent le pays. Les seuls à grignoter quelques parts du gâteau sont les oligarques et les bureaucrates qui ont vendu l’industrie.

    “Le président Nazarbayev est issu de la bureaucratie stalinienne de la période Gorbatchev. A la chute de l’Union Soviétique, il est devenu président de l’Etat indépendant de Kazakhstan au lieu de président du Soviet Suprême. En 1991, il a remporté les élections présidentielles avec 91,5% des votes, sans adversaire. Il a depuis ‘‘gagné’’ chaque élection et est au pouvoir depuis plus de 20 ans.

    “Ces dernières années, l’influence de la Chine voisine et de la Turquie ont augmenté, mais cela n’a entraîné aucune amélioration du niveau de vie de la population. Les entreprises chinoises appellent de plus en plus leurs propres travailleurs, ce qui favorise l’exacerbation des tensions ethniques. Le chômage et le sous-emploi augmentent rapidement en conséquence de la crise économique mondiale.”

    En tant que président de l’OSCE, le Kazakhstan doit surveiller l’observation de la démocratie dans le reste de l’Europe. Mais il semble quand même bien que le régime a des côtés dictatoriaux….

    Tanja: “Toute opposition est activement réprimée. Ainsi, lors de notre visite, un militant des droits de l’homme a été arrêté pour nous avoir parlé. Le régime ne voulait pas qu’il puisse témoigner des violations des droits de l’homme dans les prisons du Kazakhstan.

    “Dans ces prisons, tout le monde est soumis à un régime brutal de violence et de torture dans des prisons surpeuplées, le vol d’un GSM pouvant envoyer quelqu’un en prison pour trois ans. Un ancien prisonnier nous a raconté qu’il avait été frappé pour avoir refusé de lécher le crachat d’un gardien. En août, des protestations ont eu lieu dans les prisons de la région de Karaganda, certains prisonniers ont été jusqu’à s’ouvrir les veines ou le ventre en signe de protestation.

    “Officiellement, le Kazakhstan est une démocratie, mais la pratique est toute autre. Le droit de protester existe, mais une autorisation n’est en général accordée que pour protester à des dizaines de kilomètres, en rase campagne. Il peut officiellement exister un parti d’opposition contre le parti présidentiel, mais il faut réunir 40.000 signatures (avec numéros de cartes d’identité) et il y a un seuil électoral de 7%, que les plus grands partis d’opposition n’obtiennent pas ‘‘par coïncidence’’.

    “Le Parlement a proposé en juin d’interdire toute forme de critique contre le président et sa famille, à vie et même après la mort de Nazarbayev. Sa famille a aussi reçu une immunité totale et ne peut donc pas être poursuivie en justice.

    “La réaction de l’Occident peut se résumer ainsi : ‘entendre, voir et se taire’. Le Kazakhstan est devenu président de l’OSCE sans aucune critique de la part des 56 Etats membres. L’accès aux réserves pétrolières et gazières ainsi que le rôle du pays comme poste d’approvisionnement des troupes d’occupation en Afghanistan sont les choses les plus importantes pour l’Europe et les Etats-Unis.’’

    Comment réagit le mouvement ouvrier?

    Tanja: “Malgré la répression et le manque d’une tradition de syndicats indépendants, la résistance grandit. Nous avons récemment vu éclater une vingtaine de mouvements de grèves plus larges. Pendant une grève des ouvriers pétroliers à Zhanaozen, au début de l’année, les travailleurs ont revendiqué la renationalisation de leur entreprise sous contrôle ouvrier. On assiste donc à une radicalisation malgré la répression.

    “Ce n’est pas seulement sur le lieu de travail qu’on est passé à l’action, la résistance bouillonne dans les quartiers aussi. Beaucoup de simples travailleurs sont au bord de la faillite. Ils ont été stimulés pour faire des prêts ou prendre des hypothèques, qu’ils ne savent plus rembourser aujourd’hui. Quand les banques ont des problèmes, le gouvernement offre des garanties mais quand ce sont de simples travailleurs, ils ne reçoivent qu’une féroce répression contre leurs protestations.

    “De cette croissance de la résistance est né le mouvement ‘‘Kazakhstan 2012’’, dans lequel les membres de “Résistance Socialiste”, l’organisation-sœur du PSL, jouent un rôle important. ‘‘Kazakhstan 2012’’ essaye de lier les différentes résistances et de promouvoir l’idée de syndicats indépendants. Ils sont à l’avant plan de l’organisation des travailleurs et des pauvres contre le régime, ce qui leur attire pas mal de violence et de répression. La solidarité internationale sera une part importante de la lutte pour le socialisme au Kazakhstan. »

  • Chine : La grève de Honda, point tournant du mouvement ouvrier naissant

    Les grèves des travailleurs des usine de sous-traitance de Honda dans la province méridionale du Guangdong (Canton) ont fait trembler la Chine, « l’atelier du monde ». L’exemple combatif des travailleurs de Honda, dont de nombreux n’ont qu’à peine vingt ans, a engendré une vague de grèves à sa suite à travers toute la Chine, au fur et à mesure que les travailleurs migrants (pour la plupart, des paysans venus chercher du travail en ville en tant qu’ouvriers), surtout dans les entreprises étrangères, qui se tuent à l’ouvrage dans des conditions connues pour leurs longs horaires et leurs bas salaires, exigent des hausses salariales, de meilleures conditions et une « restructuration » des syndicats.

    Vincent Kolo, chinaworker.info

    La vague de grève ne fait que commencer, mais si elle se poursuit et se développe, elle a le potentiel de transformer le paysage politique et économique de la Chine. Cette vague de grèves est déjà la plus importante explosion de lutte ouvrière depuis 2002, lorsque les ouvriers dans l’industrie lourde se sont battus, sans succès, pour protéger leur emploi et leurs pensions lorsque les entreprises d’Etat ont été vendues et restructurées. Les luttes d’aujourd’hui se concentrent essentiellement sur le secteur manufacturier et de l’exportation, avec sa main d’oeuvre essentiellement constituée de travailleurs migrants. Les grèves actuelles, et en particulier les revendications de l’élection des représentants syndicaux, posent des problèmes majeurs à la dictature « communiste » au pouvoir, qui craint plus que tout la croissance d’un mouvement ouvrier indépendant.

    La première grève de Honda, dans la ville de Foshan, province du Guangdong, a été la « plus grande et la plus puissante grève jamais vue par une multinationale en Chine », selon le South China Morning Post. Terry Gou, le patron milliardaire de l’entreprise Foxconn, s’est exclamé : « Ceci est une déferlante. On ne peut plus se baser sur le bas coût de la main d’oeuvre chinoise ». Gou, qui a aussi annoncé de fortes hausses salariales la semaine passée dans son entreprise Foxconn, dans une tentative de rompre le cycle de suicides de jeunes et de désapprobation publique, a prédit le fait que des hausses salariales pour les ouvriers de production chinois allaient devenir « une tendance irréversible ». De nombreuses entreprises dans le même parc industriel de Foshan où se situe l’usine Honda ont relevé les salaires en tant que mesure préventive, probablement poussées par le gouvernement, afin d’éviter que ne se répande la grève à Honda.

    Au cours des derniers jours, des grèves ont éclaté dans au moins cinq provinces de Chine, touchant l’industrie automobile, mais aussi des usines de composants électroniques, de caoutchouc, d’équipements sportifs, de chaussures, et de machines à coudre industrielles. Plus récemment, dans la province du Jiangxi, 8000 travailleurs qui fabriquaient les ballons de la Coupe du Monde tant controversés sont partis en grève. Dans presque tous les cas, les grévistes ont proclamé avoir été encouragés par la victoire à Honda Foshan. « Si leur grève n’avaient pas été victorieuse, nos travailleurs ici ne seraient pas aussi unis qu’ils ne le sont à présent » a déclaré une travailleuse migrante de 22 ans à l’usine Foshan Fengfu Autoparts, où 250 travailleurs ont organisé une grève de trois jours du 7 au 9 juin.

    Bien que la grève à l’usine de transmission de Foshan, qui appartient entièrement à Honda, ait permis des hausses de salaire de 24 à 32%, les jeunes travailleurs qui se sont confiés à chinaworker.info ont exprimé leur mécontentement et ont insisté sur le fait que le retour au travail ne serait que temporaire à moins que leur liste de 147 revendications ne reçoive une réponse adéquate de la part de la direction de Honda. L’entreprise a négocié une période d’étude de deux mois afin d’ « examiner » ces revendications. Les principaux points incluent le droit d’organiser des élections afin de remplacer les pantins de la direction qui se trouvent à la tête de la branche locale du syndicat officiel contrôlé par l’Etat.

    Cela ne fait qu’une semaine que la grève des 1900 travailleurs de l’usine Foshan a été « résolue », pourtant la Chine semble depuis lors être un endroit différent. La grève qui a tout d’abord éclaté le 17 mai a redémarré avec une vigueur renouvelée le 23 mai, après que la direction ait annoncé une hausse misérable de seulement 55 yuan par mois. La revendication des travailleurs était d’une hausse mensuelle de 800 yuan, afin d’aligner les salaires de Foshan sur ceux des travailleurs dans les autres usines d’assemblage de Honda en Chine. Le sixième plus grand producteur automobile au monde a la capacité de fabriquer 650 000 véhicules par an en Chine, tout en prévoyant d’étendre sa production à 830 000 véhicules par an d’ici 2012. La grève de dix jours a été remarquablement solide, malgré les tentatives mafieuses par la direction, par le gouvernement local et par son syndicat pantin de briser la résolution des travailleurs. Sous un régime dictatorial qui interdit les grèves et de véritables syndicats, ceci est une magnifique réussite.

    En étouffant l’approvisionnement des pièces détachées, la grève de Foshan a mis à l’arrêt les quatre usines automobiles de Honda dans le Guangzhou et dans le Wuhan, ce qui aurait coûté à l’entreprise 130 millions de dollars en termes de production perdue. Ceci souligne la puissance dévastatrice des travailleurs à l’époque de la mondialisation capitaliste, avec ses chaînes d’approvisionnement complexes, et ses méthodes de production just-in-time. Sans structures formelles, et confrontés à de terribles pénalités légales pour avoir participé à une organisation indépendante, la lutte a été construite en utilisant des affiches sur les murs de l’usine, des messages SMS et par des grèves éclair grâce auxquelles un département en appelait un autre à rejoindre la grève. Ces travailleurs ont fait preuve d’une grande audace tactique : alors que la direction faisait tout son possible pour briser la grève, et que certaines sections se flétrissaient sous la pression, ils ont organisé une marche de 500 travailleurs à l’intérieur du terrain de l’usine, renforçant le moral et mettant en échec l’offensive patronale.

    Le 31 mai, les patrons de Honda ont fait monter les enchères dans leur tentative d’écraser la grève. Ils ont mobilisé les cadres du syndicat et les professeurs des écoles d’apprentissage qui fournissent Honda avec une masse d’apprentis – un autre dispositif couramment employé par les multinationales afin de maintenir le bas niveau des salaires en Chine. Les professeurs et les directeurs ont ordonné aux travailleurs de signer de nouveaux contrats comprenant un accord de non-grève, menaçant les apprentis en leur disant qu’ils ne recevraient pas leurs diplômes et devraient faire face à la police pour avoir enfreint la loi. Partout dans le monde, sont apparues des images montrant des nervis à casquette jaune en train de filmer les grévistes, de beugler des ordres et de maltraiter les jeunes travailleurs, leur criant de sortir de l’usine s’ils ne voulaient pas travailler. « Votre action a gravement endommagé la production et l’opération de l’usine », clamait un dirigeant syndical via mégaphone.

    Ces « casquettes jaunes » étaient censés être des représentants de la Fédération Panchinoise des Syndicats (FPCS), le seul syndicat légal. Des rumeurs circulent sur internet selon lesquelles le dirigeant de la branche locale du syndicat a été payé 600 000 yuan pour mettre un terme à la grève, et a engagé 100 nervis à 200 yuan par jour pour brutaliser les grévistes. Voilà bien une illustration frappante du véritable rôle des syndicats officiels – un rôle de criminels et de briseurs de grèves. Toutefois, l’incident du 31 mai a encore plus fait enrager les travailleurs de Foshan. « Maintenant, ce n’est plus une question de hausse salariale, mais de garder notre dignité », disait au South China Morning Post (1er juin 2010) un travailleur âgé de 23 ans. Un jour plus tard, le porte-parole du syndicat officiel a été forcé de publier une lettre d’excuse aux grévistes. Ceci n’a que partiellement satisfait à leurs revendications en la matière, cependant, qui demandaient que soient punis les « syndicalistes » coupables d’avoir physiquement attaqué les grévistes.

    Lorsque la direction a réalisé qu’elle ne pourrait pas facilement briser la grève par la force ou par l’intimidation, elle a reculé, offrant des hausses salariales nettement améliorées d’environ 400 yuan par mois. Mais ceci est toujours peu comparé à la revendication des travailleurs d’une hausse de 800 yuan. La nouvelle offre est parvenue à diviser la main d’oeuvre, entre une couche qui voulait accepter et d’autres qui préféraient continuer la grève.

    Certains travailleurs de Foshan qui ont discuté avec chinaworker.info étaient critiques vis-à-vis du retour au travail, et pensaient que bien plus aurait pu être obtenu, étant donné la puissance de la grève. Certains ont accepté l’accord à contre-coeur, le considérant plutôt comme un « cessez-le-feu » de 2 mois, jurant d’organiser une nouvelle grève si de nouvelles concessions ne sont pas faites. L’équipe de négociation composée de 16 personnes, qui a doublé les structures du syndicat officiel pro-Honda, semble avoir été mis sous une forte pression de la part de l’entreprise et du gouvernement pour faire cesser la grève avant la date anniversaire politiquement chargée du 4 jjuin (jour de commémoration du massacre de la place Tiananmen).

    Les experts basés à Beijing qui ont offert leurs services en tant que « conseillers » à l’équipe de négociation ont eux aussi pu insister sur une résolution rapide afin d’éviter que la grève ne soit perçue comme étant « politique ». La manière dont l’équipe de négociation des travailleurs a été sélectionnée reste peu claire étant donné les problèmes de l’illégalité et les risques de victimisation, et est le sujet de discussions ininterrompues. Etablir des structures syndicales indépendantes cachées de l’entreprise et de l’Etat, avec ses espions et ses méthodes de surveillance sophistiquées, n’est pas une tâche facile en Chine. L’internet a joué un rôle crucial tout au long de la grève en fournissant un forum anonyme aux travailleurs afin de discuter des tactiques au jour le jour.

    Les discussions et même les controverses parmi les travailleurs de Honda se sont reflétées dans une interview donnée par un travailleur à l’agence Reuters (9 juinb 2010) :

    « Nous devons toujours discuter de nombreuses conditions… Ils n’ont accepté qu’une petit nombre des revendications, y compris une très modeste hausse salariale qui est bien en-dessous de ce que nous avions demandé… Pour nous, nous faisons tout ceci simplement parce que nos salaires sont trop bas. Mais notre grève semble avoir causé un impact négatif sur la société et avoir causé des soucis aux cadres locaux. Nous ne voulons pas ceci… par conséquent, certains d’entre nous ont décidé de retourner au travail. »

    Il ne fait aucun doute que, cherchant désespérément à mettre un terme à la grève avant l’anniversaire du 4 juin, les autorités « communistes » ont été impliquées afin d’obtenir cet accord à la va-vite en faisant pression sur Honda. On ne sait pas vraiment encore dire à présent quelles garanties ils ont données à Honda. Mais ce problème était particulièrement aigu étant donné le tollé en Chine contre une autre multinationale, Foxconn, où une douzaine de suicides se sont produits cette année dans ses deux usines géantes de Shenzhen. Foxconn est devenu synonyme de l’exploitation inhumaine de la main d’oeuvre chinoise dans ses usines massives qui ressemblent à des dictatures militaires en modèle réduit. Si le but du gouvernement à Honda est de prévenir une potentielle vague d’actions de grèves à la suite de Foshan, toutefois, cette stratégie a clairement échoué.

    Ces derniers jours, deux autres usines affiliées à Honda dans le Guangdong ont été touchées par une action de grève. La composition de la main d’oeuvre – à majorité de jeunes migrants – de même que les tactiques et les revendications sont similaires à celles de la grève de Foshan initiale. Au moment où nous écrivons ces lignes, la grève de Foshan Fengfu Autoparts s’est terminée avec une modeste prime salariale, mais une troisième, à Honda Lock dans la ville de Zhongshan, est entrée dans sa troisième journée de grève avec environ 85% des 1400 travailleurs qui soutiennent la grève. Cette usine fournit les verrous et clés pour Honda.

    Certains reportages donnent l’impression que le régime chinois a adopté une approche bienveillante par rapport à ces grèves – en particulier contre les capitalistes étrangers – en tant que partie prenante d’un grand stratagème visant à renforcer le pouvoir d’achat et à rééquilibrer l’économie, mettant un terme à sa dépendance actuelle aux exportations extérieures pour se tourner vers le marché interne. Mais ce point de vue est trompeur. La police et les agences de sécurité ont brutalement attaqué les travailleurs de Zhonshang et d’autres grévistes ces derniers jours, pas vraiment une preuve d’un soutien officiel ! Un gréviste migrant de Zhongshang a raconté au South China Morning Post que la police avait distribué des tracts menaçant de trois à cinq ans d’emprisonnement toute personne prenant part à la grève. De même, les travailleurs de Fengfu à Foshan se plaignent d’avoir été forcé à retourner au travail sur base d’une pression massive et de menaces. Cette entreprise, un partenariat entre Honda et une société taïwanaise, a dit aux travailleurs que leur action serait classifiée en tant qu’ « émeute » et que la police pourrait intervenir d’un moment à l’autre.

    « Nous voulons être traités de la même manière que les travailleurs de Honda Autoparts », expliquait un travailleur de Honda Lock. Leurs revendications reprennent celles de la grève de Foshan : une hausse du salaire mensuel de base de 930 à 1600 yuan (100 à 180€), un double salaire pour toute heure supplémentaire, des blâmes pour les gardes qui battent les travailleurs, un syndicat « restructuré », et pas de victimisation pour les grévistes. A Zhongshang, de même que lors d’une autre grève chez l’entreprise taïwanaise KOK dans la province du Jiangsu, les médias officiels ont faussement rapporté que la grève était terminée. Ceci est en partie un reflet de leurs propres espoirs, en partie une tentative de semer la confusion dans une situation où les grèves doivent être dirigées de manière complètement clandestine. C’est cette même tactique qui a été utilisée contre les travailleurs de Honda à Foshan, et qui a échoué dans tous ces cas : afin de fournir une preuve que leur grève était toujours bien vivante en son troisième jour, les travailleurs de Honda Lock se sont rassemblé à l’entrée de l’usine et ont commencé à entonner : « Est-ce qu’on y retourne pour 200 ? Jamais ! 300 ? Jamais ! Pour 400 alors ? Jamais ! »

    D’autres grèves dans le delta du Fleuve des Perles (province de Guangdong) incluent une action le dimanche 6 juin de la part de 300 travailleurs de chez Merry Electronics à Shenzhen, une entreprise taïwanaise de composants automobiles, qui ont bloqué les routes en guise de protestation contre les changements de pauses. Les patrons de Merry Electronics ont affirmé avoir décidé de rehausser les salaires de +10% pour le 1 juillet, « mais ils ne l’avaient pas encore annoncé au personnel ». Lundi 7 juin, 2000 travailleurs sont partis en grève chez Yacheng Electronics à Huizhou.

    Mais les grèves ne se sont pas limitées au delta du Fleuve des Perles ; elles se sont répandues dans le delta du Fleuve Yangtze près de Shanghai, et jusqu’aux provinces de l’intérieur. Dans la province de Shaanxi, 900 travailleurs employés par Brother, un fabricant japonais de machines à coudre industrielles, ont organisé un arrêt de travail du 3 au 10 juin. Dans le district de Pudong à Shanghai, un sous-traitant de Foxconn, TP Displays, a été touché hier par « un arrêt quasi total » en réaction au plan de relocalisation de l’entreprise. Une grève « quasi unanime » de la part de plusieurs centaines de travailleurs du caoutchouc a éclaté vendredi 4 juin à KOK International à Kunshan, province de Jiangsu. Ces travailleurs se sont mis en lutte pour des hausses de salaire, le payement des heures supplémentaires et contre le non-payement par la compagnie de la sécurité sociale et de l’assurance santé. Près de 50 de ces travailleurs ont été blessés lors d’affrontements avec la police le week-end passé : « La police nous a tous battus sans distinction… Ils nous sont rentrés dedans et ont frappé tout le monde, hommes comme femmes », a rapporté une travailleuse. AU moins sept grévistes ont été arrêtés par la police. Mais les grèves en cours en ce moment ne se produisent pas que chez les multinationales. On a fait état d’une grève à l’usine de Qijiang Gear Transmission à Chonqching qui s’est déroulée en même temps que celle de Honda à Foshan.

    Les hausses de salaire à deux chiffres qui sont en train d’être arrachées de la part des patrons à travers certains des conflits en cours semblent énormes, mais comme les analystes capitalistes l’ont eux-mêmes fait remarquer, il ne s’agit que de hausses de « rattrapage » – les salaires ouvriers ont été gelés depuis fin 2008 lorsque la crise capitaliste mondiale a frappé la Chine. Dans de nombreux cas, les niveaux de salaires réels ne se sont pas améliorés depuis le milieu des années 90, tandis que l’inflation des prix, et en particulier pour les produits de base tels que la nourriture, a fortement entamé les salaires et alimente le mécontentement des travailleurs. Les travailleurs chinois ont encore un long chemin à parcourir ne serait-ce que pour rattraper le niveau des travailleurs des autres pays soi-disant émergents. Les salaires dans l’industrie manufacturière en Chine ne valent que 5% des salaires ouvriers sud-coréens, et 17% des salaires ouvriers brésiliens.

    La part du PIB qui est constituée des salaires n’a fait que diminuer depuis 22 ans, passant de 57% en 1983 à 37% en 2005. Ces statistiques illustrent bel et bien quelle classe est celle qui a payé pour les « réformes » capitalistes mises en place au cours de cette période. Au même moment, la productivité au travail – la quantité produite par chaque travailleur en Chine – a cru de plus de 9% par an lors des cinq dernières années, selon les estimations de la U.S. Conference Board (Wall Street Journal du 7 juin 2010). Pourtant, les syndicats officiels ont récemment rapporté que près d’un travailleur chinois sur quatre n’a reçu aucune augmentation salariale depuis cinq ans. En conséquence, le coût du travail ne représente qu’une minuscule fraction des bénéfices immenses engrangés par les entreprises multinationales opérant en Chine.

    Dans le cas de Honda, par exemple, une hausse uniforme de +30% des salaires à l’usine ne réduirait les marges de profit de l’entreprise que 0,6%. Même si l’on se base sur les hausses de salaires obtenues par les travailleurs de Honda à Foshan, avec un salaire relevé à 1650 yuan (180€) par mois, il faudrait 7 ans et demi de travail (sans rien dépenser du tout !) à un de ces travailleurs pour acheter la moins chère Honda Civic fabriquée en Chine. Comme Marx l’a expliqué, la source du profit des capitalistes est la force de travail de la classe ouvrière, ce qui veut dire que les travailleurs ne peuvent pas se permettre de racheter ce qu’ils produisent, poussant par là le système de marché à des crises et à des troubles inévitables.

    L’économie chinoise semble avoir bien récupéré, avec un PIB en hausse de +11,9% au premier trimestre par rapport à l’année précédente. Ceci a sans nul doute l’effet d’inciter les couches les plus exploitées des travailleurs chinois et une nouvelle génération relativement intrépide à revendiquer leur part de la reprise économique. Des pénuries de main d’oeuvre existent dans de nombreuses provinces côtières dont les économies sont dominées par des multinationales. Les données du gouvernement ont récemment montré une hausse brusque de +35% dans les postes à pourvoir publiés par les employeurs au premier trimestre de 2010, mais seulement une hausse de +8% dans le nombre de personnes postulantes.

    Un important facteur derrière ce développement est la croissance basée sur la propriété foncière dans les provinces de l’intérieur des terres, également alimentée par de grands projets d’infrastructure financés par les gouvernements locaux, qui ont généré des nouveaux emplois dans l’industrie, dans la construction et dans les services, justement dans ces régions de Chine qui sont la source traditionnelle de travailleurs migrants. Beaucoup de personnes, en particulier les migrants plus âgés avec des enfants, préfèrent chercher un travail dans ou près de leur province natale, abandonnant des emplois mieux rémunérés dans les ateliers des provinces côtières. Il semble que la province du Guangdong souffre cette année d’un déficit de 2 millions de travailleurs migrants, et les autres provinces côtières sont confrontées à des pressions similaires.

    Mais il y a d’autres facteurs économiques et sociaux derrière la hausse de combativité actuelle sur le lieu de travail, et surtout concernant la nouvelle jeune génération de travailleurs migrants. Ces travailleurs ne considèrent plus la ville comme étant un lieu d’habitation temporaire avant de rentrer à la campagne après avoir économisé assez d’argent que pour bâtir une maison et fonder une famille. Ces jeunes sont de plus en plus urbanisés dans leur vision du monde, et mis en colère par la discrimination et les mauvais traitements systématiques qui forment l’apanage du travailleur migrant. Les nombreux ingrédients présents aujourd’hui dans l’économie et dans la société chinoises (et non des moindres, le caractère de « bulle » extrêmement instable de la reprise actuelle) forment un cocktail explosif. Dans un sens négatif, ceci est démontré par le désespoir à Foxconn, et dans un sens positif, par le flambeau de la lutte qui semble avoir été passé des mains des jeunes grévistes de Honda à celles des travailleurs d’autres usines en Chine.

    Afin d’éviter la propagation des grèves actuelles, le régim chinois pourrait tenter une nouvelle tournée d’augmentation des salaires minimums (établis au niveau provincial ou municipal, avec de grandes variations). Ceci pourrait être accompagné d’une propagande massive selon laquelle le gouvernement serait convaincu que les travailleurs méritent « leur juste part » du progrès économique, mais aussi de terribles menaces comme quoi le régime ne tolérera pas les « menaces faites à la stabilité ». A de nombreuses occasions auparavant, nous avons vu une telle combinaison « carotte et bâton » être employée par le parti au pouvoir afin de tuer dans l’oeuf les mouvements populaires. Mais même cette stratégie d’action comporte d’importants risques pour le régime chinois et pour le capitalisme mondial, qui dépend si fortement de la Chine, surtout si ces concessions sont perçues comme étant le résultat de la lutte ouvrière.

    Chinaworker.info appelle à la formation de syndicats indépendants et au droit de grève au côté des autres droits démocratiques fondamentaux en Chine. Nous appelons à des hausses de salaires immédiates pour tous les travailleurs afin de compenser les longues années de stagnation et de hausses des prix. Nous exigeons un salaire national minimum de 3000 yuan (330€) pour tous. Nous appelons à la fin des heures supplémentaires obligatoires, et à un contrôle démocratique des travailleurs concernant la sécurité et la santé sur leur lieu de travail. Nous soutenons les luttes des travailleurs afin d’obtenir toute amélioration fût-elle modeste, tout en insistant sur le fait qu’une lutte de masse pour une alternative socialiste est nécessaire afin de garantir des emplois et des salaires décents, de même que le bien-être pour tous. Chinaworker.info et Socialist Action (CIO à Hong Kong) ont organisé et participé à diverses actions de protestation en solidarité avec les travailleurs de Honda en Chine de même que pour ceux de Foxconn.

  • [DOSSIER] La lutte pour des syndicats indépendants en Chine

    Le régime annonce des « réformes » syndicales – vers une démocratisation des syndicats d’Etat?

    La récente vague de grèves en Chine a revigoré les revendications des travailleurs en faveur de véritables syndicats et de représentants élus. Comment le régime et ses syndicats pantins vont-ils faire face à ce défi ? La démocratisation est-elle à l’ordre du jour ?

    chinaworker.info

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    Grève à Honda, au Zhongshan
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    Le 17 mai dernier, un travailleur de l’usine de transmission de Honda à Foshan (une Ville de la banlieue de Guangzhou de 6 millions d’habitants), âgé de 24 ans, a pressé le bouton « arrêt d’urgence », mettant de ce fait toute l’usine à l’arrêt. Cet acte intrépide, à l’origine d’une grève de deux semaines, aura été l’élément qui aura fait dévier l’immense locomotive du Travail chinois vers une nouvelle voie entièrement neuve. La grève de Foshan est devenue célèbre en tant que point de départ de la vague de grèves audacieuse de cet été. La plupart des travailleurs impliqués dans cette première grève, tout comme dans celles ont suivis, étaient âgés d’à peine 20 ans. Nombre d’entre eux étaient des internes (logés dans les entreprises), dont les conditions de travail sont plus précaires que celles des autres travailleurs. Par leur bravoure, leur détermination et leur aptitude à improviser des tactiques et des méthodes « sous le feu ennemi » (face aux tentatives de la direction de briser les grèves), cette nouvelle génération de travailleurs émigrés s’est imposée en tant que facteur décisif dans la Chine d’aujourd’hui.

    Ces événements dramatiques ont forcé les politiciens et les économistes, partout dans le monde, à en prendre note. Le Wall Street Journal avertit que les grèves sont ‘‘un dilemme pour le Parti Communiste’’, dont les dirigeants sont ‘‘très inquiets quant à un scénario comme celui qui s’est déroulé en Pologne à la fin des années 80, lorsqu’un mouvement syndical indépendant a mené au renversement du gouvernement polonais…’’ (stalinien).

    Bien que les grévistes aient remporté ce qui de prime abord semble être une forte hausse salariale, de +25, 30%, et dans certains cas +50%, ces hausses ne sont rien de plus que des ‘‘rattrapages’’. Pendant plus d’une décennie de croissance salariale non-existante ou léthargique, la productivité du travail en Chine s’est accrue de près de +10% par an, rapportant d’énormes bénéfices aux capitalistes, surtout en ce qui concerne les marchés étrangers. Ensuite, la plupart des gouvernements locaux ont imposé un gel des salaires lorsque la crise capitaliste mondiale a frappé en 2008. De nombreux analystes parlent d’employeurs qui ‘‘utilisent la crise comme une excuse’’ afin de maintenir les salaires à la baisse et d’augmenter l’exploitation (journées plus longues, heures supplémentaires non-payées, non-paiement de l’assurance-pension et autres allocations).

    Partout dans le pays, les autorités locales ont été plus souples concernant la (non-)mise en application du Code du Travail. Un gérant d’une usine à Dongguan (une autre ville de la banlieue de Guangzhou – 6 millions d’habitants également) disait du gouvernement local qu’il ‘‘ne dit pas qu’il ne faut pas se soucier du Code du Travail, mais à présent c’est «un œil ouvert, l’autre fermé»’’. D’autres régions ont introduit des lois locales qui contredisent le Code du Travail. La loi est ‘‘entrée dans un état de paralysie dans certaines régions’’, selon les termes Qiao Jian de l’Institut Chinois sur les Relations au Travail.

    Partout, l’environnement de travail est devenu plus dur à cause de la crise. People’s Daily Online (10 mars 2010) a rapporté que 14,4% des travailleurs ont subi un non-paiement de salaire en 2009 – en 2007 ils n’étaient que 4,1%. Ces statistiques et d’autres retraçant les salaires et le paiement des heures sup’ ont révélé un nouveau transfert de pouvoir et de richesse – sous couvert de la crise – du Travail vers le Capital. Cette pression à la baisse s’est heurtée aux coûts qui montent en flèche, surtout depuis que l’économie s’est rétablie. Le prix du riz a grimpé de +17% en un an, et les légumes frais coûtent +22% plus cher.

    Le Premier Ministre Wen a récemment pris la parole devant des dirigeants japonais en visite au sujet des ‘‘salaires relativement bas’’ octroyés par les compagnies japonaises, qui sont la cause des grèves. Les salaires de nombreux sous-traitants chinois sont même encore plus bas. Les médias officiels veulent donner l’impression que le gouvernement soutient les hausses de salaire et même perçoit les grèves d’un bon œil, en tant que manière d’imposer de meilleures conditions aux capitalistes étrangers. Cela n’est qu’un conte de fées. Si c’était vrai, pourquoi les grèves ont-elles dû subir la répression, la brutalité policière, et un boycott des médias afin de limiter la propagation du mouvement ?

    Malgré des rapports comme quoi les salaires minimum se sont accrus de +12% en moyenne cette année, le salaire minimum est toujours de tout juste 770 RMB (87€) à Dongguan, et de 960 RMB (108€) à Beijing (une hausse par rapport à 800 RMB en juin 2010). C’est à Shanghai qu’on trouve le plus haut salaire minimum du pays, à 1120 RMB (127€). Avec les pressions du capitalisme mondialisé et sa course vers le bas, les autorités chinoises sont forcées de jouer les équilibristes, entre l’explosion de colère des ouvriers d’une part, et de l’autre la possibilité pour les capitalistes de transférer ailleurs la production, les investissements et les emplois.

    Les grèves de 2010 représentent par conséquent, dans une certaine mesure, la revanche des plus jeunes travailleurs après les privations des dernières années. Une confluence de plusieurs facteurs leur a suggéré que l’heure était venue de se battre.

    D’abord, il y a eu la reprise de la conjoncture économique et une croissance plus forte dans les régions continentales, ce qui a ouvert un marché de l’emploi alternatif par rapport aux régions côtières, ce qui a ensuite conduit à un manque de main d’œuvre dans certaines parties du Guangdong (1) et d’autres zones exportatrices. En plus de cela, il y a eu beaucoup d’investissements, surtout dans l’automobile. Honda, qui a été touché par au moins dix grèves en Chine, a annoncé des plans pour étendre d’un tiers sa capacité de production en Chine au cours des deux prochaines années. Malgré la hausse des coûts salariaux, la compagnie s’attend à profiter du plus grand et du plus dynamique marché automobile au monde. Un autre facteur crucial derrière les grèves est la nouvelle perception du monde de la nouvelle génération de travailleurs émigrés. Une majorité d’entre eux se considèrent maintenant non plus comme ‘‘paysans’’ ni même comme ‘‘ouvriers-paysans’’, mais comme ‘‘ouvriers’’.

    ‘‘C’est une nouvelle race. Leur expérience différente fait en sorte qu’ils ont des perspectives différentes… C’est cette société qui a modelé leur mode de pensée, elle leur a coupé le chemin du retour à la maison, et les a laissé sans aucune issue.’’ – Voilà la vision d’un étudiant de Beijing qui travaillait à l’usine de Dongguan l’été dernier (Pensées au Hasard sur la Vie à l’Usine, China Labour Bulletin).

    Appel à des ‘‘syndicats réorganisés

    Même avant la récente vague de grèves, les statistiques montrent une rehausse de protestations ouvrières. En décembre de l’an dernier, le magazine Liaowang de la Xinhua News Agency, une agence de presse gouvernementale, a rapporté que ‘‘selon la Cour Populaire Suprême, les cours civiles ont accepté 280 000 cas de disputes au travail en 200, 93,93% de plus que l’année précédente. Dans la première moitié de 2009, 170 000 cas ont été accepté, soit 30% de plus’’.

    Mais ce qui est encore plus alarmant pour le régime chinois et pour la ‘stabilité’ qu’il chérit par-dessus tout : ‘‘Les incidents de masse provenant de disputes au travail se sont considérablement accrus et ont pris une forme plus violente, augmentant la conscience du public quant à ces enjeux. De nombreux experts et académiciens qui ont été interviewés pour cet article ont confirmé ce point, et ont ajouté que les disputes au travail étaient maintenant devenues une source de conflits majeure dans la société chinoise’’ (Liaowang).

    En même temps, le régime est prudent quant à l’usage de la répression. Non seulement les grèves bénéficient d’un soutien considérable parmi els autres travailleurs et les couches moyennes, mais le régime lui-même n’est pas certain que la répression fonctionnera, et craint de déclencher une explosion sociale encore plus large.

    La caractéristique la plus importante des luttes de 2010 a été les appels répétés par les grévistes, de Dalian (ville de la province de Liaoning, important port à la frontière Nord-Coréenne, 2 millions d’habitants) à Tianjin (grande métropole adjacente à Pékin, qui lui sert de port maritime, 12 millions d’habitants) en passant par Guangzhou (Capitale de la province du Guangdong (Canton), très importante région industrielle du sud de la Chine – 13 millions d’habitants ) pour des syndicats ‘‘réorganisés’’ et pour une représentation ‘‘de la base’’.

    Au cours de la grève à l’usine Honda de Foshan, cette revendication a été posée de la manière la plus vive lorsque 200 nervis, payés par la section locale du syndicat officiel, ont tenté de briser la grève manu militari. Lorsque cette tactique s’est avérée avoir l’effet inverse – plutôt que d’affaiblir la grève, elle a suscité une combativité encore plus grande parmi les jeunes ouvriers – les représentants du syndicat officiel ont été sacrifiés par leur supérieurs bureaucrates et par les patrons de Honda. Quelques jours plus tard, un message d’excuses a été publié par le syndicat : c’était là une des principales conditions posées par les travailleurs pour mettre un terme à la grève.

    Ces grèves, et la proéminence de la question syndicale en leur sein, marque un tournant. Ceci du fait du degré d’organisation, de la sympathie générée dans la société en général et par-dessus tout de la conscience quant à la question syndicale. Comme l’a fait remarquer un analyste dans le China Daily : ‘‘La Fédération Pan-Chinoise des Syndicats (FPCS) a réalisé que la grève à Honda est une forme nouvelle d’action ouvrière, très certainement parce qu’elle va au cœur du problème – quel est le rôle légitime du syndicat. Son impact est potentiellement énorme’’ (souligné par le magazine Socialist).

    Il y a eu d’autres luttes de masse dans lesquelles la revendication pour des syndicats indépendants a fait surface. Les mouvements dans le Liaonin (2) et dans le Heilongjiang (3) en 2002 en ressortent comme un important exemple. Mais aussi dans d’autres grèves, telle que l’arrêt de travail des ouvriers d’Uniden à Shenzhen (ville de la province de Guangdong, entre Guangzhou et Hong Kong, 9 millions d’habitants) en 2005, le rejet de la FPCS et la revendication d’une vraie représentation ouvrière a été un véritable moteur. Dans le mouvement de 2002, principalement basé sur des xia’gang (travailleurs d’entreprises étatiques qui ont été licenciés), les autorités ont répondu avec quelques concessions symboliques, mais aussi avec une répression totale. Les dirigeants du mouvement ont été arrêtés et emprisonnés. A Uniden, les directeurs de la société et les dirigeants locaux ont coordonné leur réponse afin de noyer la revendication d’un syndicat indépendant en offrant des concessions plutôt généreuses. Cette fois-ci, cependant, à cause de l’étendue des grèves, du haut degré de conscience et d’opposition vis-à-vis du syndicat officiel, et de la position centrale de cette revendication, il ne sera pas si facile pour le gouvernement de s’en dépêtrer. Le génie syndical a été libéré de sa lampe !

    Qu’est-ce que la FPCS ?

    La FPCS prétend être la plus grande organisation syndicale au monde, avec ses soi-disant 226 millions de ‘‘membres’’. Mais il s’agit d’un syndicat ‘‘jaune’’ (c.à.d, acquis à la cause patronale), qui par-dessus le marché fait partie intégrante de l’Etat chinois. Le président de la FPCS, Wang Zhaoguo, est un membre haut placé de la hiérarchie du PCC (Parti Communiste Chinois), et est un des vice-présidents du Congrès National Populaire. En tant que syndicat, la FPCS possède un historique plutôt unique :

    • Elle n’a jamais mené ni soutenu des grèves, et ne s’est jamais battue pour des augmentations de salaire. Depuis 1982, où toutes les grèves ont été interdites, le syndicat condamne ce genre d’action « illégale ».
    • Elle n’a jamais protesté contre les arrestations de militants ouvriers ou de meneurs de grève
    • Elle recrute ses membres en cooptant les entreprises privées et leur direction dans la structure du syndicat. Pour la plupart des travailleurs, le syndicat n’a aucune présence réelle, la seule preuve de son existence est constituée des déductions de leur « cotisation de membres » de leurs salaires.

    La transition vers le capitalisme ‘‘a conduit à une marginalistion tragique de la FPCS’’ dans les années ‘90, selon l’IHLO, une organistion de Hong Kong qui soutient les syndicats démocratiques et indépendants. La base traditionnelle de la FPCS se trouvait dans le secteur étatique en constante diminution alors qu’aujourd’hui, environ 80% des entreprises sont soit privées, soit appartenant à des capitaux étrangers. Craignant un vide de pouvoir dans les usines privées susceptible de causer des dégâts, Pékin a poussé la FPCS dans ce secteur avec pour instruction d’établir des sections et de saboter toute tentative d’auto-organisation de la part des travailleurs.

    Là où la FPCS existe – et ceci englobe la plupart des entreprises privées actuelles – elle a ressuscité en tant que ‘‘partenariat’’ entre la direction et le gouvernement local, avec pour objectif de contrôler la main d’œuvre et d’empêcher les protestations et tout mouvement indépendant.

    ‘‘Dans les entreprises étrangères de la région du delta du Fleuve des Perles – province de Guangdong -, les représentants syndicaux (du moins, là où ils existent) sont désignés par les gouvernements locaux, dont l’intérêt majeur est d’attirer les investissements étrangers. Historiquement, ces gouvernements sont constitués des anciennes brigades ou communes de production, qui maintenant louent la terre aux entreprises et désignent quelques personnes locales ignorantes sur le plan syndical afin de diriger les centrales syndicales. Même certains hauts-gradés syndicaux en parlent en tant que ‘‘faux syndicats’’» (Anita Chan, dans le China Daily du 18 juin 2010)

    La FPCS étatique est-elle sur le point de changer ?

    A la question de savoir s’il faut s’attendre à du changement, la réponse est à la fois oui et non. Il est clair que la FPCS, en tant que structure étatique, doit modifier ses méthodes face à ces grèves. Si elle refuse catégoriquement les revendications des travailleurs en faveur de syndicats de la base, elle risque de perdre le contrôle de ce processus. Reflétant son approche par rapport au contrôle des médias en notre ère d’internet, le gouvernement va tout d’abord tenter de vendre sa propre version, promue à coups de restrictions et de menaces implicites, plutôt que de laisser se créer un vide dans lequel d’autres forces puissent s’avancer.

    Les propositions qui ont jusqu’ici été révélées sont essentiellement cosmétiques, plutôt que de posséder une quelconque substance réelle. Comme toujours, on a droit à de vagues indications quant à un changement à venir, accompagnées de l’adjectif ‘graduellement’. Une chose est sûre : la nature fondamentale de l’Etat de parti unique et de son faux syndicat reste la même. Il est simpliste et naïf de dire, comme l’ont fait certains analystes sur la chaîne d’actualité CNN, que ‘‘la FPCS est maintenant confrontée à un choix : devenir un véritable syndicat ouvrier, ou rester marginalisée’’. Une telle perspective, selon laquelle la FPCS pourrait devenir une authentique organisation ouvrière, est complètement exclue.

    Le gouvernement comprend les implications d’un appel à des ‘syndicats réorganisés’, au cas où cette tendance devait poursuivre son élan à travers l’industrie. Un mouvement syndical indépendant, basé sur le prolétariat le plus nombreux au monde, dans sa plus grande base d’exportation, deviendrait une superpuissance économique et politique. Une dictature autoritaire peut faire beaucoup de choses, mais une chose qu’elle ne peut pas faire, c’est partager le pouvoir avec une puissance indépendante rivale. Les initiatives en vue d’une ‘réforme’ annoncée par la FPCS ces derniers mois doivent être comprises dans cette lumière – en tant que manœuvre défensive afin de saboter le mouvement en faveur de véritables syndicats.

    La principale fondation de cette ‘nouvelle’ politique est composée de déclarations superficielles et encore floues en vue d’élections sur le lieu de travail. L’objectif est de fournir une soupape de sécurité pour le mécontentement des travailleurs, un mécanisme afin de relâcher la pression, sans pour autant fournir aux travailleurs un réel outil de lutte. Un certain espace va être octroyé pour des élections sur le lieu de travail. Mais le régime voudra garder cela endéans des limites strictes, afin de barricader chaque entreprise en tant qu’entité hermétiquement scellée, et d’empêcher l’émergence de véritables structures de la base. Selon le plan de la FPCS, les travailleurs pourraient recevoir le droit d’élire des délégués d’usine, mais ceux-ci seront placés sous la ‘supervision’ de la hiérarchie syndicale au niveau du district ou de la ville, c.à.d. du gouvernement !

    Certains militants et experts des droits au travail applaudissent ce nouveau tour de passe-passe. Han Dongfang, Directeur du China Labour Bulletin de Hong Kong, a décrit la réponse du gouvernement comme étant ‘‘positive’’, affirmant que les nouvelles propositions ‘‘pourraient se révéler être d’une portée historique’’. The Socialist avertit que ce n’est absolument pas ce que la FPCS et le gouvernement ont en tête.

    Le fait qu’ils puissent être forcés à faire bien plus de concessions que ce qu’ils ne l’auraient souhaité est une toute autre affaire. Mais cela dépend du niveau de lutte de masse dans la période à venir, et non pas de pseudo ‘réformes’ ou ‘réformateurs’ dont l’influence au sein du gouvernement est négligeable. Le facteur positif dans cette situation est que le gouvernement se sent forcé de battre en retraite – bien qu’une petite retraite. Ceci veut dire qu’il y a plus à gagner, que la lutte de masse est capable d’arracher des concessions encore plus grandes, qui vont encore plus loin !

    Personne ne devrait se sentir exagérément impressionné de l’offre d’organiser des élections syndicales locales, de la manière dont elles seront réalisées dans le cadre de la machine à contrôler de la FPCS. Comme le dit le dicton, ‘‘le diable est dans le détail !’’ Selon Liu Jichen du département juridique de la FPCS, les élections proposeront des candidats ‘‘validés par le syndicat’’. Il ajoute que ‘‘Même avec les élections directes [du délégué principal], aucun autre mode d’organisation n’est permis que le système syndical unifié actuel, dans lequel les syndicats de la base sont dirigés par leurs autorités supérieures ». (South China Morning Post du 23 août 2010)

    Il est clair que le système d’élections envisagé par Liu et ses amis bureaucrates incorporera sans nul doute des ‘sonnettes d’alarme’ tels que le droit pour les comités supérieurs de la FPCS d’approuver ou de rejeter les candidats au niveau de l’entreprise. Le rôle de ces ‘sonnettes d’alarme’ – de même que celui des odieuses ‘circonscriptions fonctionnelles’ de la ‘démocratie’ hongkongaise – est de garantir le contrôle ultime de la dictature du parti unique et de s’assurer que les travailleurs et les revendications de la base soient filtrées et rejetées en-dehors du système.

    La force réside dans l’organisation clandestine des travailleurs

    Le régime chinois a une expérience considérable quant à l’organisation d’élections à petite échelle – dans des dizaines de milliers de villages – et celle-ci ne présage pas grand’chose de bon. Non seulement ces élections sont organisées de telle sorte qu’elles excluent toute véritable militance ou organisation de la base, mais elles sont de plus en plus devenues un champ de bataille pour les intérêts éhontés de tel ou tel homme d’affaires ou pour diverses luttes de pouvoirs entre clans.

    Si les entreprises perdent le pouvoir de désigner les représentants syndicaux qu’elles possèdent aujourd’hui, elles vont exercer leur pression sur les structures syndicales par une approche plus indirecte, fréquentant les échelons supérieurs de la FPCS de manière plus assidue, et intervenant dans les ‘expériences démocratiques’ à l’échelle de l’usine soutenant leurs propres agents contre les véritables délégués syndicaux. Ceci peut bien entendu être accompli par toutes sortes de moyens, du pot-de-vin aux menaces en passant par la propagande. Ce sont là les leçons à tirer de l’expérience des élections villageoises. C’est donc avec le plus grand scepticisme que les travailleurs de Chine devraient par conséquent traiter les dernières gesticulations officielles autour de la « réforme » syndicale. Ceci ne veut pas dire qu’il faille rejeter ce développement en bloc. Tout symptôme d’une crise au sein de l’appareil dirigeant doit être exploité. Les travailleurs devraient tout naturellement défendre le droit d’élire leurs propres représentants ‘en accord avec la loi’, et tenter d’utiliser ce processus afin de mettre en avant leurs revendications. Mais pour que ceci puisse fonctionner, il est nécessaire de s’organiser de manière informelle et séparée des institutions gouvernementales. Malgré son ‘lifting’ en cours, la FPCS reste pour les travailleurs une organisation hostile et antidémocratique, capable uniquement de saboter la lutte de classe et de limiter la vision des travailleurs à un seul lieu de travail, sans aucune possibilité de forger des liens entre usines et entre villes.

    Afin de construire des organisations plus fortes, il est nécessaire d’exploiter même les plus restreints des canaux légaux. Mais à moins que des structures inofficielles, des comités d’usine ou autres organes locaux directement élus et redevables ne soient bâtis derrière l’écran des structures officielles, les travailleurs ne disposeront pas d’un instrument qu’ils puissent eux-mêmes contrôler. L’exemple des travailleurs de Honda à Foshan est encore une fois une grande leçon. Au cours des négociations, leurs représentants ont juré de ne jamais signer un accord sans qu’il ait été soumis au vote de l’assemblée des travailleurs, et ils ont exigé de la direction qu’elle accorde au personnel des temps de pause afin de pouvoir participer à ces assemblées. Le régime de Pékin va tout faire pour résister, et sa capacité à manœuvrer et à attendre est légendaire. Mais la formation de syndicats de la base indépendants n’est maintenant plus qu’une question de temps. C’est là tout le sens à donner à la récente vague de grèves.


    (1) Province de Canton (Guangzhou), très importante zone industrielle du sud de la Chine, qui inclut entre autres les villes de Guangzhou, de Foshan et de Dongguan ; 100 millions d’habitants dont 31 millions de travailleurs émigrés (en 2005), même taille que la France

    (2) Nord-Est de la Chine, entre la province de Hebei (Pékin) et la Corée du Nord, capitale Shenyang – 43 millions d’habitants pour 5 fois la taille de la Belgique

    (3) Nord-Est de la Chine, à la frontière avec la Russie (fleuve Amour), dont la capitale est Harbin – 38 millions d’habitants pour 2,5 fois la taille de la France

  • Capitalisme en crise : socialisme ou barbarie ! (1)

    Chaque jour, le capitalisme démontre l’ampleur de sa faillite : extrême pauvreté, guerres, famine, destruction de l’environnement,… Nous refusons ce constat, nous opposons résolument au capitalisme et luttons pour une société socialiste démocratique. Dans ce cadre, notre réflexion et nos actions sont basées sur le marxisme. Ce dossier vous présente nos critiques contre le capitalisme ainsi qu’un petit aperçu de ce qu’est notre vision du socialisme. Ce texte est largement basé sur le livre «Le socialisme au 21e siècle» de notre camarade britannique Hannah Sell.

    Qu’est-ce que le capitalisme?

    En 300 ans d’existence, le capitalisme a changé la face du monde à coups de voies ferrées, de lignes électriques, d’avions, d’ordinateurs,… Au cours du dernier siècle seulement, l’économie mondiale est devenue 17 fois plus grande !

    Cependant, malgré les capacités technologiques actuelles, malgré tout le potentiel aujourd’hui présent, 1,2 milliard de personnes n’ont aucun accès à l’eau potable, 841 millions de personnes sont sous-alimentées et jusqu’à 28 millions d’Africains sont infectés par le virus du SIDA. Alors que le capitalisme consacre des milliards d’euros au bombardement d’une population pauvre comme celle d’Afghanistan, au même moment, ce système n’a aucune solution pour la pauvreté, la faim ou les maladies. En fait, le capitalisme est même une menace pour l’avenir de la planète. L’avidité conduit à une production aveugle qui ne tient aucun compte de l’homme ou de l’environnement.

    Les forces productives ont amplement été développées, mais elles ne sont pas systématiquement utilisées. Seul compte le profit à court terme. De leur côté, les gouvernements et les politiciens traditionnels sont au service des intérêts du capital et c’est à cet objectif que l’appareil d’Etat ou le pouvoir judiciaire est utilisé. Le capitalisme est soi-disant un ‘‘marché libre’’ et une ‘‘démocratie’’ mais quelle participation démocratique avons-nous concernant la manière de produire ? Des milliards de personnes à travers le monde n’ont que la liberté d’être exploités ou de connaître la misère et la guerre.

    Qu’est-ce que le socialisme ?

    Une société socialiste assimilerait l’énorme potentiel des talents de chacun et de la technologie pour édifier une société et une économie au service des besoins de tous. Cela ne signifie pas que tous les problèmes seraient immédiatement résolus, loin de là, mais la suppression du profit marquerait le début de la construction d’une nouvelle société, ce qui n’est possible qu’à l’échelle internationale.

    Les marxistes sont en faveur d’une économie démocratiquement planifiée, une économie où les grandes entreprises qui dominent aujourd’hui plus de 80% de l’économie seraient mises sous le contrôle démocratique de la collectivité, ce que nous appelons le contrôle ouvrier. Cela ne signifie toutefois pas que tous les petits commerces, les boulangeries, les boucheries,… seraient nationalisés.

    Un régime socialiste nous permettrait d’avoir bien plus à dire que sous la ‘‘démocratie’’ parlementaire capitaliste, qui ne nous accorde que des élections fort médiatisées après quelques années, tout ça pour élire des représentants qui ne défendent pas nos intérêts et qui ne doivent en rien se justifier auprès de leurs électeurs. Pour les marxistes, tout le monde doit pouvoir participer au processus de prise de décision quant à la manière dont sont gérées l’économie et la société.

    Les élus devraient toujours avoir à se justifier et être révocables, à tous niveaux, par leurs électeurs. De plus, les représentants ne toucheraient que le salaire moyen d’un travailleur, afin de garder un lien concret avec le quotidien de la majorité de la population. Un parlementaire marxiste (comme notre camarade irlandais Joe Higgins au Parlement Européen) ne gagnerait ainsi que l’équivalent du salaire moyen d’un travailleur.

    Les marxistes luttent pour la démocratie des travailleurs, ce qui implique que toute la collectivité travaillerait ensemble à la planification de la production. A tous les niveaux, sur les lieux de travail et dans les quartiers, des comités de représentants seraient organisés, sur les plans régionaux et nationaux, sous le contrôle d’assemblées générales de base. Chacun aurait ainsi la possibilité de réellement participer aux décisions et à la gestion de la société.

    Le capitalisme a développé plusieurs outils pour nous faciliter cette tâche, comme l’enseignement, qui fournit un niveau supérieur d’éducation, ou encore les nouvelles technologies, qui rendent la communication beaucoup plus facile et potentiellement bien plus accessible. La planification de l’économie n’est pas une utopie, les grandes entreprises et les multinationales fonctionnent d’ailleurs sur base d’une planification de leurs activités à grande échelle. Mais porter cela au niveau de la société signifie de s’attaquer à leur propriété.

    Le socialisme va bien au-delà du simple partage des richesses. Il s’agit également de décider de ce qui est produit et de quelle manière. Nous voulons immédiatement en finir avec le gaspillage consacré à des industries comme celle de la publicité. Nous voulons répartir le travail disponible au lieu de demander à une couche de travailleurs de travailler plus dur et plus longtemps alors qu’une autre couche (y compris beaucoup de jeunes) est au chômage.

    Mais aujourd’hui, dans le cadre d’une société où le profit est sacré et où l’humanité souffre sous ses diktats, il n’est pas possible de donner une vue complète de ce que sera une société socialiste. Nous ne pouvons que donner un léger aperçu en mettant en lumière les conditions qui permettront au potentiel existant d’être utilisé dans l’intérêt de la majorité de la population.

    Le socialisme n’aboutira-t-il pas à une dictature bureaucratique comme en Russie ?

    Les monstrueuses dictatures bureaucratiques et sanglantes de Russie, de Chine, d’Europe de l’Est et d’ailleurs étaient une négation totale du véritable socialisme démocratique. Mais il est fondamental que les marxistes d’aujourd’hui étudient l’expérience de la Révolution russe afin d’expliquer les raisons qui ont conduit à sa dégénérescence bureaucratique. En fait, ce processus trouve ses racines dans des conditions historiques spécifiques et non dans la nature humaine.

    La Révolution russe de 1917 a constitué la première fois où la classe ouvrière a renversé le capitalisme et a commencé à instaurer une nouvelle société socialiste. L’Union Soviétique des premiers temps était le gouvernement le plus démocratique que le monde ait jamais connu: ouvriers et paysans dirigeaient la société démocratiquement par l’intermédiaire de conseils ouvriers (c’est-à-dire, en russe, des soviets). C’est le premier Etat au monde à avoir donné aux femmes la totalité des droits légaux, comme le droit de vote et celui d’avorter. L’Union Soviétique avait aussi légalisé l’homosexualité.

    Les dirigeants bolcheviks Lénine et Trotsky, ont toujours expliqué qu’il était impossible d’instaurer le socialisme dans un seul pays, et plus particulièrement dans les conditions semi-féodales de la Russie de l’époque. Pour eux, la Révolution russe ne pouvait parvenir à survivre qu’en s’étendant aux puissants pays capitalistes d’Europe occidentale.

    Les principales puissances impérialistes ont elles-mêmes reconnu que la Révolution russe n’était pas une affaire purement locale et que le capitalisme était mondialement menacé. Elles ont donc participé à une sanglante guerre civile du côté des capitalistes et des propriétaires terriens russes afin de renverser le nouveau gouvernement soviétique. 21 pays ont envahi la Russie pour soutenir la contre-révolution (États-Unis, France, Allemagne, Grande-Bretagne, Belgique, Japon,… ) Pour que les bolcheviks arrivent à remporter la guerre civile (1918-1921), la vague de révolutions qui a déferlé sur toute l’Europe et dans le monde a été décisive. La Révolution russe et l’appel des bolcheviks aux travailleurs du monde entier au soulèvement contre la Première Guerre Mondiale avait mis le feu aux poudres. Les soulèvements révolutionnaires en Allemagne et à travers l’Europe ont entraîné la fin de la guerre et ont forcé les classes dirigeantes à retirer leurs troupes hors de Russie afin d’éviter d’autres bouleversements dans les pays capitalistes.

    Malheureusement, ces révolutions n’ont pas réussi à renverser le capitalisme. A la différence de la Russie, il n’existait aucun parti révolutionnaire de masse disposé à mener les révolutions jusqu’à leur terme. Au lieu de cela, les partis ouvriers de masse en Europe ont été dominés par les dirigeants réformistes qui ont joué un rôle décisif pour sauver l’économie capitaliste. Ainsi, alors que l’Union Soviétique a vaincu la contre-révolution, la jeune république Soviétique est restée isolée. La première guerre mondiale puis la guerre civile avaient laissé le pays dans une situation désastreuse, les masses épuisées, au chômage et affamées. Tout cela a constitué la base pour l’accession au pouvoir d’une caste bureaucratique conservatrice. La bureaucratie, groupée autour de Staline, a concentré le pouvoir dans ses mains dans les années ’20 et ’30 et a démoli les droits démocratiques que la classe ouvrière russe avait réussi à obtenir.

    Les nombreuses révolutions qui, plus tard, ont pris place dans le monde néocolonial et en Europe ont malheureusement regardé la Russie comme le modèle à suivre, et le gouvernement bureaucratique soviétique a pu exporter son modèle stalinien vers la Chine, l’Europe de l’Est, et ailleurs.

  • Hong Kong : Un salaire minimum pour TOUS les travailleurs. Pas de compromis !

    Le 15 juillet dernier, le conseil législatif de Hong Kong (Legco) s’est réuni pour débattre de la législation concernant le salaire minimal. À l’extérieur se trouvait un groupe de 200 manifestants, avec un fort contingent de travailleurs étrangers qui exigeaient des droits égaux pour tous les travailleurs, indépendamment de leur nationalité. Action Socialiste (CIO-Hong Kong) était aussi présent pour revendiquer un salaire minimal et pour mener campagne sur la question de la solidarité des travailleurs.

    Socialist Action (CIO-Hong Kong)

    Avant même que les membres du Legco n’aient commencé à discuté du montant de ce salaire minimal, il est clair qu’ils n’ont pas gaspillé de temps pour se mettre d’accord sur le fait que son application serait limitée. Le conseil législatif de Hong-Kong est le rêve de tout capitaliste : il est dirigé par des hommes d’affaires et par leurs laquais. Il n’y a aucun risque pour qu’une protection réelle soit garantie pour les travailleurs sous-payés de Hong Kong.

    Il y avait 34 amendements à débattre. La plupart de ceux proposés par le gouvernement et les patrons ont été approuvés, tandis que ceux des représentants des travailleurs ont subi un veto. Dans un Parlement de patrons non-démocratique, ce n’est pas vraiment une surprise. Avant que le niveau de salaire n’ait même été décidé, les patrons ont exposé leur position. Ils ont commencé en retirant du projet de loi le cas des immigrés et des jeunes. Les patrons vont donc continuer à avoir une main-d’œuvre jeune bon marché, exploitable à merci.

    Une proposition a été soumise de la part du représentant des travailleurs démocratiquement élu Lee Cheuk Yan, qui voulait inclure les travailleurs étrangers, assurant ainsi que les employeurs des quelques 250.000 travailleurs étrangers de Hong-Kong ne puissent plus légalement continuer à les faire travailler 16 à 18 heures par jour pour moins de 10 dollars de Hong Kong de l’heure, proposition qui a reçu un véto.

    C’est une preuve supplémentaire, s’il en fallait encore une, que le marché libre donne simplement aux patrons la liberté d’exploiter les plus faibles. Nous applaudissons Lee Cheuk Yan pour sa proposition. Les travailleurs étrangers qui ne sont pas résidents et qui sont privés du droit de vote à cause des politiques racistes de Hong-Kong concernant l’immigration sont le secteur le plus vulnérable de la société. Sans représentation démocratique, comment faire entendre leur voix ?

    Le niveau réel du salaire minimal sera évalué par la « Commission du Salaire Minimal », un groupe qui inclut Michael Chan Yue-kwong, le président exécutif de Café de Corail, la plus grande chaîne de restauration rapide de Hong-Kong, qui paye scandaleusement ses salariés moins de 20 dollars de Honk Kong de l’heure. Les capitalistes et leurs laquais politiques essayent chaque fois de saboter l’arrivée d’une loi portant sur le salaire minimum et veulent continuellement abaisser le niveau du salaire légal.

    Comment un individu qui se fait de l’argent en exploitant les autres peu-il décider d’une limitation salariale alors qu’il ne peut pas , lui, contrôler sa propre avidité ?

    Action Socialiste (CIO-Hong Kong) était présent à la manifestation avec un groupe de jeunes camarades internationaux. Nous revendiquons un salaire minimal de 33 dollars de Hong Kong, sans compromis. Nous exigeons l’application de ce salaire minimal pour tous les travailleurs, indépendamment de leur âge, de leur nationalité, ou de leur invalidité. Ce salaire minimal doit être de 33 dollars de Hong Kong. Si tel n’est pas le cas, les syndicats devraient appeler à la grève. Nous appelons les jeunes travailleurs à rejoindre un syndicat, et les syndicats à résister plus fortement. Nous exigeons la fin des circonscriptions électorales non démocratiques capitalistes et la création d’une assemblée des peuples élus contre l’autorité capitaliste. Nous exigeons le contrôle démocratique des banques, des grandes entreprises et des secteurs clefs de l’industrie par le biais de la nationalisation. Nous soutenons tous les travailleurs en lutte, le mouvement démocratique ainsi que l’unité des luttes des travailleurs à Hong-Kong et en Chine.

  • Ecole d’été 2010 – Crise économique: aucune solution sur base capitaliste

    Aujourd’hui, nous ne parlons pas seulement d’une crise économique, notre environnement est également en jeu. Et si nous analysons les développements actuels, c’est pour nous préparer pour le futur, pour nous préparer à intervenir. Il est vrai qu’il est difficile de déterminer exactement la façon dont les choses peuvent se dérouler, mais il est très clair qu’un certain nombre de pays font face à l’imminence d’une explosion sociale. La crise a déjà entraîné une diminution du niveau de vie de millions de personnes et des dizaines de millions connaissent l’insécurité, la peur du lendemain.

    Vers une plus grande instabilité

    La crise économique mondiale est parfaitement illustrée par la crise que traverse l’Europe. Newsweek et Times (deux magasines américains) ont consacré tous les deux et au même moment leur première page à l’Europe. Il y était notamment dit que le grand secret de l’Europe était que son secteur bancaire était plus touché que Wall Street et que les banques européennes sont tout aussi voraces que les américaines quand il s’agit de jouer avec des actifs toxiques.

    Les commentateurs bourgeois ne peuvent plus maintenant se permettre de parler d’un éventuel progrès, ils ne parlent que d’assainissements. La perte de confiance des classes dirigeantes et de leurs partisans, un peu partout dans le monde, est un élément important qui dans un certain sens exprime le cul-de-sac dans lequel se trouve le capitalisme. Toutefois, nous savons que le système capitaliste ne disparaitra pas de lui même, cela ne pourra arriver que par l’intervention consciente de la classe des travailleurs. Mais la division au sein même des élites dirigeantes est un élément important. Les tensions augmentent (comme les tensions commerciales entre différents pays ou encore les tensions entre différents niveaux de pouvoir). Au niveau international, de façon générale, nous allons vers une période caractérisée par de plus en plus d’instabilité.

    En 1938, Trotsky a publié le ‘‘Programme de transition, L’agonie du capitalisme et les tâches de la IVe Internationale’’ dans lequel il disait notamment que la bourgeoisie ferait tout pour éviter la déroute. C’est encore tout à fait vrai aujourd’hui, et on peut d’ailleurs le voir à la façon dont la bourgeoisie se défend.

    Le pouvoir le plus puissant que le monde ait jamais connu – l’impérialisme américain – est embourbé depuis 10 ans en Afghanistan. Ce que l’impérialisme américain espère, c’est de gagner assez de traitres à ses côtés pour pouvoir aboutir à une situation de ‘calme’ comme en Irak mais, même là, il n’est pas question de victoire. Tout comme Tacite le disait de l’empire romain, c’est une paix de désolations (‘‘ils firent un désert et le nommèrent paix’’). En Irak, la guerre civile a été temporairement gagnée par les chiites. Le pays est divisé sur base communautaire, mais ces délimitations peuvent voler en éclat à tout moment. Au lieu d’un Saddam Hussein, on peut en voir émerger une dizaine.

    Quant à la catastrophe de BP, où l’actionnariat est majoritairement américain, elle constitue une parfaite illustration de l’incapacité du capitalisme à gérer l’environnement. La détérioration de la planète est inévitable dans le système capitaliste. Les problèmes ne vont faire qu’empirer, y compris en termes de guerre. Si ce système continue ses méfaits, nous connaîtrons d’autres guerres pour les ressources, comme la guerre pour le pétrole au Moyen-Orient. Déjà aujourd’hui, il y a de plus en plus de conflits autour de l’approvisionnement en eau potable. On estime actuellement à 50 millions le nombre de réfugiés sur la question de l’eau, et ils seraient issus de 27 pays. Dans ce cadre, le sommet de l’ONU au sujet des changements climatiques de Copenhague a été un échec total.

    D’une politique de stimulants à une politique d’austérité

    L’incapacité du capitalisme à faire la moindre mesure progressive peut se voir concernant la crise économique. Dans un premier temps, on a tenté de se limiter à des plans de relance mais, puisque ces programmes de sauvetage n’ont plus d’effet, dans un deuxième temps, on passe maintenant à des plans d’austérité, à des attaques contre les travailleurs. Lors du dernier G20 à Toronto, les partisans des plans de relance étaient minoritaires, l’optique générale est maintenant de passer à des plans d’austérité très durs. Après ce sommet, seul Obama était en faveur de plans de relance. S’il n’avait pas adopté cette position, il aurait eu des problèmes et se serait retrouvé en minorité, y compris au sein de son parti. Mais le fait même qu’il ait été mis en minorité à Toronto illustre que l’impérialisme américain a perdu sa capacité d’imposer sa volonté.

    A certains moments les assainissements sont très brutaux, comme en Roumanie, à d’autre c’est plus léger. Le gouvernement britannique veut par exemple réduire le déficit budgétaire de 40 à 50% dans les 5 prochaines années. Les conséquences de ce genre de politique ont été illustrées, en Irlande notamment. Il y a quelques semaines, des milliers de personnes y ont manifesté: des parents d’handicapés mentaux qui s’occupent de leur enfant déficient à la maison. Ils avaient une institution où ils pouvaient déposer leur enfant une ou deux nuits pour souffler un peu, et une des premières conséquences des coupes budgétaires était, entre autres, la suppression de cette institution. Angela Merkel a déclaré que l’Allemagne devait donner l’exemple pour le reste de l’Union Européenne avec son plan d’austérité. Ces assainissements vont très certainement empirer la situation dans les autres pays, et pas seulement en Allemagne.

    Essai après essai, les entreprises veulent augmenter leur profitabilité, avec l’aide des gouvernements. Dans les environs de Venise, une commune a été jusqu’à interdire de faire des châteaux de sable. La raison est toute simple: les amendes rapportent de l’argent. Cela indique à quel point de désespoir se retrouvent parfois confrontées les autorités. Ce n’est certes pas un élément de ce type qui va déclencher une révolution, mais il suffit parfois d’une étincelle, aussi absurde soit-elle. Le doute qui subsiste dans l’esprit de la bourgeoisie est de savoir jusqu’où elle sera capable d’attaquer les travailleurs sous l’argument "Vous êtes obligés d’accepter les coupes, sinon c’est la Grèce qui vous attend". Cette menace est même utilisée aux Etats-Unis.

    La Grèce est le maillon faible du capitalisme européen. La situation qui s’y développe est un test pour la bourgeoisie et pour la classe ouvrière, mais aussi pour le CIO: comment une de ses sections peut-elle réagir et adapter son intervention dans une telle situation. La grève du 5 mai était la plus grande depuis 25 ans, de même que la taille des manifestations. L’attaque du Parlement avait été le fait de travailleurs du service public. Il y a aussi eu des mouvements de masse dans les secteurs de l’enseignement, des hôpitaux,… En fait, tous les secteurs les plus importants, du privé ou du public, ce sont mis en action durant cette période. A Athènes, il y a eu des mobilisations contre le gouvernement chaque semaine. Nous sommes dans une phase où les commentateurs ont peur que l’expérience grecque rate son coup à cause d’une trop grande mobilisation. Les jeunes, les travailleurs et les commentateurs font le parallèle avec l’Argentine du début de ce siècle. Mais le gouvernement tient bon, parce que les directions syndicales n’ont aucune idée de la manière de réagir, aucune réelle stratégie ni alternative.

    Nos slogans sont "abolition de la dette – nationalisation du secteur financier", tout en appelant à des actions communes pour rassembler les grévistes. La lutte est actuellement en pause, mais le sentiment général est que les luttes recommenceront en septembre. Nous devons aussi renforcer la revendication de nationalisation sous le contrôle démocratique de la population du secteur financier. C’est une revendication qui avait suscité un grand enthousiasme quand Joe Higgins en avait parlé lors d’un grand meeting de la formation large de gauche grecque Syriza. Nous sommes les seuls à accorder autant d’attention à cela. Une banque publique ou des mesures visant à rester dans le cadre de la compétition entre banques sont des mesures insuffisantes.

    De sombres perspectives économiques

    Tous ces budgets d’austérité seront incapables de solutionner quoi que ce soit. Les capitalistes se réfèrent à la Suède ou au Canada au début des années ‘90, et ils caricaturent ce qui y a été réalisé. A l’époque, le capitalisme était en croissance, différence fondamentale avec aujourd’hui. Les éléments actuels de rémission du capitalisme sont avant tout circonstanciels et non structurels, on ne parle pas de croissance des moyens de productions.

    De toute façon, avant même de discuter de cette soi-disant reprise économique, de sa nature et de sa durée, il faut bien se rendre compte que, pour l’écrasante majorité des travailleurs et des jeunes, la reprise économique n’a pas ouvert de meilleures perspectives d’avenir. Cela est tout au plus considéré comme un évènement temporaire. Même dans les pays où la reprise a été plus importante, quand on regarde les chiffres, on se rend compte qu’il s’agit pour beaucoup d’un écran de fumée. Ainsi, dans les médias, on s’est moqué de la reprise économique allemande comme d’un conte de fée. Cette année sera certes un record en termes d’exportations des automobiles allemandes, mais les ventes au sein même du pays vont reculer de 30% pour cette année. La fragilité de la reprise est notamment illustrée par l’utilisation de la capacité de production de l’économie allemande, qui se situe sous les 80% alors que la moyenne était précédemment de 84%. De plus, aucune certitude n’existe quant à la durée de cette reprise économique. Nous devons regarder tous ces chiffres avec beaucoup de prudence. Par exemple, selon les chiffres, le pays qui a connu la plus forte progression de sa production industrielle est Singapour (+64% en une année), mais ce n’est que le reflet de l’ampleur de la chute connue l’année d’avant! Aucun commentateur bourgeois n’a en fait de réelle confiance dans le système. Le dernier rapport du FMI a d’ailleurs revu à la baisse ses prévisions économiques.

    Le mieux auquel s’attendre, c’est une stagnation avec un chômage de masse. Mais nous nous dirigeons vers une nouvelle récession, et très probablement vers une nouvelle crise bancaire. Les Etats réinterviendront encore avec l’argent de la collectivité (comme ils l’ont déjà fait), mais une nouvelle crise bancaire combinée à une récession aurait un grand effet. Le résultat serait une nouvelle dégradation importante du niveau de vie des masses, mais l’impact politique serait également énorme. Ce serait une défaite gigantesque pour la classe capitaliste et cela provoquerait une remise en question encore plus grande du système capitaliste, avec la recherche d’une alternative.

    La dette publique a remplacé la crise des dettes financières. Mais quelle classe sociale est responsable de cette dette publique? D’un pays à l’autre, les conditions sont différentes, mais c’est généralement une conséquence du renflouement des banques. C’est encore une conséquence du fait que l’Etat a dû garantir la faillite financière et immobilière. Nous devons expliquer que la crise n’est pas provoquée par les pensionnés grecs ou par les travailleurs des services publics. Il y a 3 ans, en 2007, tous les Etats avaient un déficit d’à peine plus de 1%. Depuis lors, la moyenne est montée de 1.7% à plus de 8%, malgré l’absence d’augmentation des pensions par exemple.

    Les plans d’austérité vont encore aggraver les conséquences de la crise. Les keynésiens classiques ont raison de dire que le problème fondamental, c’est la demande insuffisante. Le prix Nobel d’économie Paul Krugman a raison d’affirmer que les capitalistes sont repartis vers la politique de Hoover en 1929: liquider les acquis des travailleurs. Il a aussi raison quand il indique que les politiques actuelles vont poser les bases d’une seconde crise, beaucoup plus profonde.

    En cas d’augmentation des dépenses publiques: qui va payer ? Si on fait payer les bourgeois, ils vont se retirer et arrêter d’investir. L’idée générale est de s’en prendre aux travailleurs et à leurs familles, mais il faut s’attendre à ce qu’un tsunami de résistance accompagne le tsunami d’austérité. De plus, malgré toutes les coupes, les déficits des budgets des Etats seront encore plus profonds à la fin de l’année qu’au début et les milliards retirés de l’économie par les plans d’austérité vont peser sur elle. La Chine est le seul pays à avoir connu une bonne reprise sur base des investissements d’Etat, mais cette reprise se place dans le contexte d’une grosse surchauffe de l’économie.

    Remontée de la lutte des classes

    Quant aux travailleurs, l’impact de la crise les frappe de plein fouet. Ceux qui retrouvent un emploi après l’avoir perdu connaissent des conditions de travail bien pires. En Grèce, la possibilité d’un effondrement complet des conditions de travail n’est pas à exclure. En Espagne, 90% des emplois disparus concernaient les couches de travailleurs précaires, mais une bonne partie de la population connait ces conditions. Tous les regards se portent vers le sud de l’Europe, et l’atmosphère combative qui y existe est inspirante. En Angleterre, certains Tories (les conservateurs) ont même été jusqu’à dire qu’ils allaient faire des manifestations contre leur propre gouvernement suite à l’annonce d’attaques contre les budgets des écoles! Tout a été utilisé pour décrédibiliser le mouvement qui se développe en Grèce. Mais toute cette propagande capitaliste a ses limites. Jusqu’ici, les capitalistes se basaient beaucoup sur l’idée que les richesses se répartiraient, que ‘‘demain sera meilleur’’. Cette idée est en train d’être réduite en morceaux.

    Aujourd’hui, les protestations se généralisent. Grèce, Portugal, Espagne, France,… les luttes se développent, mais les directions syndicales jouent un rôle de frein. Lors d’une grande manifestation à Bologne, en Italie, le dirigeant syndical local a notamment dit "personne ne remet en cause qu’il doit y avoir des coupes budgétaires, mais il faut les faire autrement". Avec des dirigeants pareils, on n’est pas encore sortis de l’auberge. Quand Rosa Luxembourg décrivait le rôle des dirigeants sociaux-démocrates durant la première guerre mondiale, elle était particulièrement virulente. Mais que dirait-elle aujourd’hui? L’attitude des dirigeants syndicaux actuels est de compliquer la situation. En Belgique, cela a laissé une certaine ouverture pour approfondir la crise communautaire et aux USA cela s’exprime avec le Tea Party. En Hongrie et en Grèce, l’extrême-droite se renforce. Des questions comme l’immigration commencent à devenir des questions clés, auxquelles nous devons apporter une attention toute particulière.

    Le mouvement de résistance ne se développe pas partout de la même manière. En Grande-Bretagne par exemple, les mesures mises en avant par le gouvernement actuel sont les plus dures depuis 1922, ce qui avait jeté les bases pour la grande grève générale de 1926. Nous en sommes encore loin aujourd’hui. Le niveau de conscience des masses a fortement chuté depuis la chute du mur. Avant, une grève générale posait très rapidement la question du pouvoir et de la confrontation avec l’Etat capitaliste. D’une certaine manière, toutes les grèves générales font cela. Mais l’absence actuelle d’un facteur subjectif de masse, même sous la forme d’un parti réformiste très confus, complique les choses.

    Le capitalisme est incapable de résoudre les problèmes qu’il engendre. Il connaît sa plus grande crise, mais la conscience des masses n’est pas à la hauteur de la situation. Cela ne signifie toutefois pas dire qu’on ne peut pas vaincre la bourgeoisie, comme en France, en 1995, quand le premier ministre Alain Juppé avait connu une défaite avec son ‘‘plan Juppé’’.

    Nouveaux partis des travailleurs, ouverture pour les idées socialistes

    Un des points cruciaux pour reconstruire la conscience des masses est la création et le développement de nouvelles formations politiques larges capables d’orienter des couches larges de la population dans les luttes afin qu’elles puissent apprendre de leur expérience pratique de lutte. Mais il existe le danger de l’électoralisme. Le point le plus important est de maintenir une orientation claire vers les entreprises et le monde du travail. Ces nouvelles forces peuvent se développer très vite, mais également s’effondrer très vite, comme l’illustre l’exemple de Rifondazione Comunista en Italie. Cette formation avait un grand potentiel, qui a beaucoup souffert de sa participation au gouvernement capitaliste de Prodi ainsi qu’à des coalitions locales. Aujourd’hui, l’état général de l’opposition est tel qu’il n’est pas impossible que Berlusconi remporte d’autres victoires malgré les scandales, les conséquences de la crise économique, les attaques contre les travailleurs,…

    L’espace laissé vacant par le mouvement ouvrier se rempli d’autre chose, et nous avons eu différents exemples dans plusieurs pays. Nous pouvons comprendre ces développements au vu de la pourriture des anciens dirigeants politiques. En Italie, il y a le Mouvement Violet. Vu la chute du PRC, il est quasiment inévitable de voir même des couches syndicales développer un état d’esprit antiparti et antipolitique. On peut également voir se développer des tendances au terrorisme, comme en Grèce où l’on assiste à des attentats contre des commissariats ou des banques. L’absence de formulation d’une riposte face à la crise par les directions syndicales est à dénoncer dans ces actes. Les camarades grecs ont ainsi parlé de dirigeants syndicaux qui appelaient à faire grève, mais qui étaient incapable de participer aux actions car les travailleurs les attaquaient dès qu’ils les voyaient pour leur mollesse.

    Pour l’instant, ce sont surtout les organisations d’extrême droite ou populistes de droite qui connaissent une petite poussée. Même si des organisations de gauches de masses existaient, avec le racisme latent dans la société, ces organisations auraient de toute façon connu une poussée dans un premier temps. La question nationale refait également son apparition (Ecosse, Belgique, Pays Basque,…)

    Les choses ne se développent pas qu’en Europe. Au Moyen-Orient, face à la corruption des régimes en place, de plus en plus de travailleurs sont ouverts à nos idées. En Russie, une opposition se développe contre Poutine. Au Kazakhstan également, avec une petite organisation, nous avons pu lancer une organisation ouvrière de masse, Kazakhstan 2012. En Chine, de gigantesques usines existent, avec des conditions de travail véritablement horribles. Des filets ont par exemple été fixés sous les fenêtres d’une usine Foxconn où 12 travailleurs se sont suicidés cette année. L’Etat est bien conscient du problème et essaye de créer de nouveaux syndicats "patronaux", pour tenter d’étouffer la contestation. Mais les grèves continuent de se développer.

    Dans toute une série de pays, de grands mouvements ont déjà pris place. Plusieurs syndicats ont déjà appelé à une grève générale en septembre. Dans d’autres pays, on parle surtout de manifestation ou de journée d’action (de la part des directions syndicales), d’où l’importance de la manifestation du 29 septembre à l’appel de la Confédération Européenne des Syndicats. Il est important de voir comment nous allons intervenir dans ces évènements et comment cadrer cela dans les évènements qui forment la conscience et la combativité de la classe ouvrière. Nous ne devons pas seulement intervenir pour construire le mouvement mais aussi pour voir quel élément mettre en avant et pourquoi. Il est important de comprendre que les attaques antisociales peuvent provoquer différents types de réactions à différents moments.

    Cette crise économique et sociale a aussi son impact politique avec la chute du soutien des partis au pouvoir en Allemagne, en France, en Italie ou même au Japon. La semaine dernière, des élections se sont déroulées pour le parlement japonais. Le premier ministre, élu depuis juillet seulement, a reçu une raclée électorale de grande ampleur, parce qu’il a commencé à parler d’assainissements et du doublement d’une taxe. Quant aux conservateurs britanniques, ils avaient banni le terme "austérité" de leur vocabulaire pendant la campagne, mais ce n’était qu’une opération de communication. Dans différents pays, il y a de grands changements d’état d’esprit très rapide, et une des conséquences de ce processus est que cela mine le soutien des gouvernements en place. Du point de vue des mouvements futurs, l’intervention des camarades de Chypre était intéressante, avec un gouvernement de centre-gauche qui essaye de prendre des mesures également contre les riches, mais qui est de suite bloqué au Parlement. Ce qui est encore possible, ce sont des gouvernements élus sur base de populisme,… mais qui peuvent provoquer des mouvements sociaux importants. C’est entre autres le cas de la Grèce, où le gouvernement est en place depuis 9 mois seulement, élu sur base du moindre mal et de la promesse de ne pas appliquer l’austérité, et a suscité des mouvements sociaux de grande ampleur.

    Ce que le capitalisme nous propose, c’est un monde où chacun est en lutte contre chacun. Notre tâche est de préparer la classe ouvrière pour prendre le pouvoir et s’émanciper. En ce sens, la moindre erreur théorique se paye très cher dans la pratique. Mais nous avons réussi à démontrer ce que nous sommes capables de faire. Dans une telle période, un petit groupe avec des idées claires et qui est enraciné dans les masses peut avoir un impact énorme. A la fin des années ’80, dans des circonstances spécifiques, nous avons pu diriger un mouvement de masse contre la Poll Tax en Angleterre, un mouvement qui a rassemblé 18 millions de personnes, et nous étions à l’époque quelques milliers dans le pays. Cette école d’été a pour vocation de nous préparer à cela. A travers son expérience de lutte, la classe ouvrière va arriver à la conclusion que la seule façon de sortir de ce système, c’est la voie vers le socialisme.

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